M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Je vous remercie de cette réponse très claire, madame la ministre ; je ne vois pas de désaccord entre nous.
Cela étant, vous nous avez exposé un idéal : je suis persuadé que le consommateur reste mal informé sur le caractère industriel de la fabrication du pain qu’il achète dans ce qu’il croit être une authentique boulangerie. Chacun est bien sûr libre d’acheter un tel produit, mais ce doit être en connaissance de cause, en sachant qu’il ne s’agit pas de pain fabriqué sur place, par un boulanger qui s’est levé en pleine nuit pour préparer sa pâte.
Le même manque d’information prévaut pour la pâtisserie. En principe, un gâteau ayant été congelé doit être signalé par un petit ours, mais je vous mets au défi, madame la ministre, de me citer un commerce pratiquant cet affichage. En effet, les professionnels craignent les réactions négatives des consommateurs.
En définitive, tout ce que je souhaite, c’est que notre formidable tradition du pain, renommée dans le monde entier, ne se perde pas. Soyez assurée, madame la ministre, de mon soutien pour la défendre !
dérives dans les cuisines des restaurants
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 349, adressée à Mme la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, ma question recoupe en partie celle de mon collègue Alain Gournac : si elle concerne un autre secteur, elle porte sur le même sujet.
Les crises successives que vient de connaître le secteur agroalimentaire incitent de plus en plus les consommateurs à rechercher la transparence sur l’origine, la composition et la qualité gustative des produits qu’ils achètent et consomment, notamment dans les restaurants.
Or, en ces temps de crise économique, nous devons tout faire pour promouvoir la qualité de nos productions alimentaires. L’agroalimentaire représente en effet un secteur de l’économie nationale source d’emplois, de formations pour nos jeunes et de débouchés à l’export.
Dans le département dont je suis l’élu, le marché d’intérêt national de Rungis est la vitrine par excellence de ce savoir-faire français. Cette qualité vient d’être récompensée, puisque le « repas gastronomique des Français » a été classé au patrimoine mondial immatériel de l’humanité par l’UNESCO en 2011.
Néanmoins, ce secteur subit une évolution inquiétante. En effet, pour des raisons pratiques, économiques ou financières, de plus en plus de restaurants proposent des modes de cuisine très différents, qui ne respectent pas totalement les valeurs de la gastronomie française.
En fait, trois modes de cuisine sont pratiqués dans nos restaurants : le réchauffage, l’assemblage et la cuisine « maison ».
Le réchauffage consiste, comme son nom l’indique, à décongeler des produits surgelés, à réchauffer des plats sous vide ou le contenu de boîtes de conserve. Ainsi, sans le savoir, on peut déguster, dans certains restaurants situés sur les bords de la Méditerranée, une soupe de poissons qui n’a rien à voir avec la pêche du jour, mais provient de boîtes de conserve. De même, la traditionnelle tarte des demoiselles Tatin peut avoir été fraîchement décongelée et provenir d’un établissement industriel qui semble détenir une forme de monopole de la fabrication en masse de cette pâtisserie, magnifique lorsqu’elle est bien travaillée.
L’assemblage est une pratique permettant de présenter sur une même assiette des produits qui n’ont pas été élaborés sur place, ou seulement en partie.
Enfin, la cuisine « maison », pour laquelle nombre de nos artisans restaurateurs se battent avec courage, respecte les savoir-faire traditionnels et propose des repas préparés entièrement sur place, à base de produits frais.
Malheureusement, faute de label précis, le consommateur ne s’y retrouve pas et risque de finir par perdre confiance, comme pour le pain.
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Christian Cambon. De surcroît, le secteur est en crise : les recettes ont connu une baisse de 2 % en volume en 2012, et la situation ne devrait pas s’améliorer en 2013. En outre, la restauration commerciale devra composer avec un relèvement du taux de la taxe sur la valeur ajoutée de 7 % aujourd’hui à 10 % en 2014. Ces évolutions pourraient profiter aux industriels de l’agroalimentaire et nuire aux restaurateurs pratiquant la cuisine « maison », l’assemblage assurant des performances économiques beaucoup plus élevées.
Pour lutter contre cette tendance, des restaurateurs se mobilisent, à l’instar des artisans boulangers, pour valoriser leurs savoir-faire et leur travail grâce à différents labels.
Ainsi, depuis le mois de février dernier, en région d’Île-de-France, le Centre régional de valorisation et d’innovation agricole et alimentaire a lancé le label « des produits d’ici, cuisinés ici ». Les professionnels signataires de la charte doivent utiliser en priorité des matières premières issues de l’agriculture francilienne, appartenir au secteur de la restauration commerciale traditionnelle et transformer eux-mêmes les produits frais dans la cuisine de leur restaurant. Ce nouveau label régional vient s’ajouter à ceux qui ont déjà été mis en place dans différentes régions par les restaurateurs.
Toutefois, cela n’est guère lisible pour les consommateurs. Par conséquent, ne faudrait-il pas instituer, à l’exemple de la classification hôtelière, un label national validé par l’État pour aider les consommateurs à mieux comprendre la nature des produits qu’ils vont trouver dans leur assiette ?
Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour valoriser la cuisine « maison » et le travail des restaurateurs – ce ne sont pas forcément les plus grands –…
M. Alain Gournac. C’est vrai !
M. Christian Cambon. … qui s’attachent à maintenir les valeurs de la gastronomie française ? (M. Alain Gournac applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme. Monsieur le sénateur, valoriser la qualité dans la restauration est l’une de mes priorités.
Dans cet esprit, conformément aux engagements du Président de la République, j’ai établi, avec les organisations représentatives des professionnels du secteur, un bilan de la mise en place du contrat d’avenir dans la restauration. Nous avons constaté que ce dispositif n’avait pas permis de répondre à l’ensemble des attentes.
J’ai donc décidé de définir, en lien avec les organisations professionnelles, une méthode de travail. J’aurai le plaisir d’installer prochainement un comité stratégique de filière pour la restauration. Il travaillera sur les sujets que vous avez évoqués, monsieur le sénateur, ainsi que sur le dialogue social, les conditions de travail, la modernisation de nos restaurants, la création d’emplois. Nous devons notamment accompagner les professionnels de la restauration dans la réflexion sur la qualité et la transformation des produits.
Une première réponse à vos préoccupations a déjà été apportée par l’État avec la création du titre de maître-restaurateur, qui vise à distinguer les professionnels de la restauration traditionnelle, sur la base d’une qualification professionnelle et du respect d’un cahier des charges très précis, fondé sur une forte exigence de qualité. Ce dernier impose en particulier que la cuisine soit faite sur place, à partir de produits majoritairement frais, sans recourir à des plats préparés. En matière d’accueil des clients, il prévoit la présence d’au moins un personnel de salle titulaire d’un certificat d’aptitude professionnelle « restaurant », d’un titre homologué ou de deux ans d’expérience. Le niveau d’exigence est également élevé pour les aménagements intérieurs, qui doivent être soignés, l’environnement et, bien sûr, l’hygiène.
Malheureusement, nous constatons aujourd'hui que le titre de maître-restaurateur n’a pas rencontré le succès escompté : le 12 novembre dernier, j’ai remis le 2 000ème. Ce chiffre est insuffisant, c’est pourquoi je souhaite que nous puissions travailler à la rénovation de ce titre dans le cadre du comité stratégique de filière, en vue non pas d’abaisser l’exigence de qualité, mais plutôt de simplifier le cahier des charges pour le rendre plus accessible aux professionnels, en particulier aux petits restaurateurs. En effet, ceux-ci peuvent être effrayés par le volume du dossier administratif à compléter pour l’obtention du titre de maître-restaurateur.
C’est là une première piste de travail pour à la fois valoriser le travail des professionnels et rassurer les clients, qui ont évidemment le droit de savoir si les plats qui leur sont servis ont été ou non préparés sur place et d’être informés sur la provenance des produits.
Il s’agit donc d’une problématique globale. La fête de la gastronomie, au mois de septembre prochain, devra permettre aux professionnels de présenter leur savoir-faire, leur excellence et, surtout, leur passion.
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, je vous remercie des informations précises que vous venez de nous apporter sur ce sujet consensuel, notamment au Sénat, qui, en tant qu’assemblée des territoires, entend porter haut les couleurs de notre gastronomie.
M. Jean-Claude Lenoir. Comme au restaurant du Sénat ! (Sourires.)
M. Christian Cambon. Le président Carle nous conseillera peut-être de ne manger que de la raclette : avec ce plat, impossible de tricher ! (Nouveaux sourires.)
Plus sérieusement, j’approuve votre approche concernant l’évolution du titre de maître-restaurateur, madame la ministre. Mais si la qualité de la formation des professionnels est une question essentielle, je voudrais surtout insister ici sur l’importance de travailler des produits frais. Trop souvent, il est recouru à l’assemblage d’éléments préconfectionnés, et cela vaut aussi pour des établissements prestigieux ! On constate des choses très surprenantes à cet égard ! A contrario, certains petits restaurants consentent beaucoup d’efforts pour défendre les valeurs de notre gastronomie en cuisinant des produits frais. (M. Alain Gournac acquiesce.)
Sachez, madame la ministre, que toutes les initiatives du Gouvernement visant à promouvoir la gastronomie de notre pays recevront notre assentiment et notre soutien.
M. le président. Mon cher collègue, je vous remercie de cette défense et illustration de la raclette, mais n’oubliez pas la fondue ! (Sourires.)
M. Christian Cambon. On ne peut pas tricher avec la fondue !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à onze heures.)
M. le président. La parole est à M. René Teulade, auteur de la question n° 321, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. René Teulade. Voilà une vingtaine d’années, Guy Bedos déclarait, dans un hebdomadaire, que « personne n’est à l’abri d’une sorte d’obésité morale : il est nécessaire de se faire transpirer l’âme ». Aujourd'hui, je voudrais évoquer non pas les maux de l’âme, mais l’obésité corporelle, qui connaît une dangereuse progression depuis une quinzaine d’années.
En effet, le constat issu de l’enquête nationale Obepi-Roche de 2012 est inquiétant. L’obésité concernerait à l’heure actuelle près de 7 millions de Français, soit 15 % de la population, et le surpoids quelque 15 millions de nos compatriotes. Ainsi, le nombre de personnes obèses a augmenté de 76 % depuis 1997.
En outre, d’autres tendances, tout aussi pernicieuses, méritent d’être soulignées.
Ainsi, la prévalence de l’obésité a crû de 1,4 point en seulement trois ans chez les 18-24 ans.
Par ailleurs, les inégalités territoriales se sont creusées. Désormais, quatre régions affichent un taux de prévalence de l’obésité supérieur de près de 40 % à la moyenne nationale, tandis que le gradient décroissant Nord-Sud et Est-Ouest, déjà observable quinze années auparavant, est plus que jamais une réalité.
Enfin, l’obésité s’est développée du fait des inégalités de revenus. Il existe toujours une relation inversement proportionnelle entre le niveau de revenu des ménages et la prévalence de l’obésité.
Outre l’impact potentiellement négatif de l’obésité sur la psychologie de l’individu – elle s’accompagne souvent d’une perte de confiance, d’un mal-être et d’un enfermement sur soi –, les risques cardiovasculaires augmentent nettement. Par exemple, les personnes obèses sont trois fois plus souvent affectées que les autres par la dyslipidémie, sept fois plus par le diabète et quatre fois plus par des problèmes d’hypertension.
Dans ces conditions, il est primordial de lutter activement contre cette maladie. La prévention, l’éducation à la nutrition et la protection des consommateurs sont les principaux leviers d’action dont disposent les pouvoirs publics.
Or, plus d’une décennie après les premières décisions prises par l’industrie agroalimentaire afin d’améliorer les recettes des produits, les derniers chiffres diffusés par l’Observatoire de la qualité de l’alimentation indiquent que les produits agroalimentaires ne respectent toujours pas les préconisations du Programme national nutrition santé, lancé en 2001.
Si certains progrès sont à noter, le récent scandale de la viande chevaline rappelle l’impérieuse nécessité de renforcer les contrôles sanitaires, l’information des consommateurs et la qualité nutritionnelle des produits agroalimentaires, ainsi que d’encadrer davantage le marketing promotionnel, notamment à destination des plus jeunes.
Enfin, la lutte contre l’obésité nécessite des moyens, comme en témoigne le programme lancé par la première dame des États-Unis, la semaine passée, visant à promouvoir l’activité physique au sein des écoles. Ce programme sera financé par un partenariat public-privé à hauteur de 150 millions de dollars par an.
Par conséquent, des solutions concrètes existent. Je souhaiterais savoir si des actions nouvelles sont envisagées par le Gouvernement en matière de prévention de l’obésité. Est-il prévu d’inscrire des mesures législatives à ce titre dans la future loi de santé publique ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, il est exact que l’obésité est devenue un enjeu de santé publique majeur dans notre pays : 15 % de la population adulte serait concernée.
Comme vous l’avez souligné, il est préoccupant de constater que les données statistiques globales cachent des réalités très diverses selon les territoires et les catégories sociales : le surpoids et l’obésité sont devenus des marqueurs d’inégalités parfaitement identifiés. Il y a dix fois plus d’enfants obèses chez les ouvriers que chez les cadres. De même, plusieurs régions affichent des taux élevés d’obésité : 21,3 % pour le Nord-Pas-de-Calais, 20,9 % pour Champagne-Ardenne, 20 % pour la Picardie, alors que la moyenne nationale est de 15 %.
Nous sommes donc confrontés à un enjeu majeur, ce qui doit nous amener à développer des actions multiples et cohérentes dans divers milieux. En effet, les actions ciblées, si elles restent concentrées sur un seul secteur, ne sont plus suffisantes aujourd’hui. Il faut pouvoir mettre en place des chaînes d’actions, depuis les familles jusqu’à l’école ou au milieu de travail. De ce point de vue, les collectivités territoriales ont bien entendu un rôle essentiel à tenir, en tant qu’acteurs de proximité.
La première priorité du Gouvernement est d’agir très en amont, pour prévenir le surpoids et l’obésité le plus tôt possible.
Pour ce faire, il convient, tout d’abord, de développer, en particulier en direction des jeunes, des actions de sensibilisation afin de promouvoir une bonne alimentation et la pratique d’une activité physique régulière. L’école a un rôle important à jouer à ce titre : l’activité sportive fait d’ailleurs partie, en France, du programme scolaire, ce qui n’est pas le cas aux États-Unis. Je me réjouis qu’un nombre croissant de collectivités s’engagent dans la promotion d’une bonne alimentation dans les restaurants scolaires.
Par ailleurs, nous devons renforcer les actions de repérage des enfants à risque par les médecins généralistes et les pédiatres. Nous avons entrepris une démarche de sensibilisation de ces professionnels à cette problématique.
Nous devons, enfin, organiser des prises en charge de proximité plus soutenues et mieux coordonnées.
Pour réussir, il faut démultiplier les lieux d’action, qu’il s’agisse du milieu scolaire, des lieux de travail ou des lieux de vie. Nous entendons aller vers une « labellisation » des actions menées par les collectivités et les entreprises, afin de garantir des obligations non seulement de moyens, mais aussi de résultats.
Cette démarche sera intégrée dans le projet de loi de santé publique qui sera présenté prochainement au Parlement. C’est un élément-clé de la stratégie nationale de santé voulue par le Gouvernement. La lutte contre l’obésité illustre la déclinaison de notre politique de santé, allant de la prévention jusqu’à l’accompagnement et au soin.
M. le président. La parole est à M. René Teulade.
M. René Teulade. Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre.
Vous pouvez compter sur notre engagement à vos côtés. Je partage particulièrement votre ambition d’agir auprès des jeunes dans le milieu scolaire. Aujourd’hui, de moins en moins d’enfants se rendent à l’école à pieds : même quand il n’y a que 500 mètres à parcourir, leurs parents les y emmènent en voiture !
ouverture d'une formation de maïeutique au sein de la faculté de médecine de saint-étienne
M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent, auteur de la question n° 307, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Maurice Vincent. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur le projet d’ouverture d’une formation de maïeutique au sein de la faculté de médecine de Saint-Étienne, seule ville universitaire de France à en être dépourvue.
Je souligne que l’absence d’une telle formation porte préjudice aux étudiants ligériens, souvent d’origine modeste. Ils sont contraints de payer un loyer pour se loger à Lyon ou à Bourg-en-Bresse, ce qui renforce les inégalités territoriales.
Le département de la Loire, je le souligne, accueille un nombre significatif de patientes venues des départements limitrophes de la région Auvergne, qui ne sont habituellement pas prises en compte dans les statistiques.
Le projet d’ouverture d’une formation à la profession de sage-femme, engagé dès 2006, vise à répondre à une situation devenue sensible : pyramide des âges défavorable, contexte réglementaire ayant élargi très significativement le champ de compétence des sages-femmes, diminution du nombre des gynécologues médicaux et des obstétriciens.
Ce projet, étudié de longue date, a fait l’objet d’un travail partenarial entre le CHU de Saint-Étienne, l’ordre des sages-femmes de la Loire, l’agglomération Saint-Étienne Métropole et la région Rhône-Alpes. Il s’est heurté jusqu’ici à l’existence d’un numerus clausus, pour l’accès à la deuxième année de formation au métier de sage-femme, de quatre-vingt-seize places pour l’ensemble de la région.
Sur un plan pédagogique et logistique, la formation pourrait être accueillie sans difficulté dans les locaux actuels de la faculté de médecine, puis, à partir de 2014, sur le pôle de santé devant être créé au nord de l’agglomération.
La région Rhône-Alpes soutient l’ouverture d’une telle formation à Saint-Étienne et s’est engagée à financer l’intégralité du coût de celle-ci, soit un montant de l’ordre de 500 000 euros par an, sous réserve qu’un arrêté ministériel autorise l’élargissement du numerus clausus afin de rendre la réalisation de ce projet possible.
Un accroissement du numerus clausus de quinze à vingt places permettrait de répondre aux besoins du territoire et serait conforme à l’esprit de la loi du 13 août 2004, qui a confié aux régions le soin de veiller à l’organisation et au financement des formations paramédicales.
Compte tenu de ces éléments, j’aimerais connaître les intentions du Gouvernement quant à l’ouverture d’une formation de maïeutique au sein de la faculté de médecine de Saint-Étienne. J’espère, madame la ministre, que vous pourrez donner une réponse favorable à ma demande.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur le projet, amorcé en 2006, de création d’une école de sages-femmes à Saint-Étienne. Ce projet, porté par l’ensemble des acteurs locaux, suppose que le numerus clausus soit accru de quinze à vingt places.
Le nombre d’étudiants admis en filière maïeutique est fixé chaque année par les ministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur, après consultation des autorités compétentes et en fonction de la démographie des femmes en âge de procréer, ainsi que de l’effectif et de l’âge des sages-femmes en exercice.
La région Rhône-Alpes connaît incontestablement un fort taux de naissances, puisqu’il s’élevait à 10 % en 2009. Dans le département de la Loire, le taux brut de natalité est de 12,3 % et l’indicateur conjoncturel de fécondité est également élevé, puisqu’il s’établit à 212 enfants pour 100 femmes âgées de 15 à 49 ans.
Au 1er janvier 2012, 12 % des effectifs de sages-femmes exerçaient en région Rhône-Alpes, soit 265 des 2 256 sages-femmes en activité en France métropolitaine. Cette densité de sages-femmes plutôt élevée classe la région Rhône-Alpes parmi les mieux dotées de France. Pour autant, il est exact que des différences existent au sein de la région : la densité de sages-femmes dans le département de la Loire est relativement forte, même si les perspectives en matière de départs à la retraite doivent nous alerter.
Actuellement, douze places de formation en maïeutique sont ouvertes pour les étudiants au concours de première année commune aux études de santé à l’université de Saint-Étienne, se répartissant entre l’école du centre hospitalier régional de Lyon et celle de Bourg-en-Bresse.
L’ouverture d’une formation de maïeutique à Saint-Étienne doit être étudiée en prenant en compte l’évolution de l’offre de soins en périnatalité et en pédiatrie, les perspectives offertes par les coopérations interprofessionnelles, ainsi qu’une meilleure répartition des formations sur les territoires en Rhône-Alpes.
Monsieur le sénateur, sans exclure a priori une augmentation du nombre de places offertes, je tiens à vous dire que l’ouverture d’une nouvelle formation en maïeutique à Saint-Étienne devra d’abord s’appuyer sur un redéploiement du numerus clausus sans altérer les conditions de formation au sein des écoles de Lyon et de Bourg-en-Bresse. Ce redéploiement me paraît possible ; nous devrions pouvoir travailler ensemble en ce sens.
M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent.
M. Maurice Vincent. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, même si elle ne me satisfait pas totalement compte tenu des difficultés que pose un redéploiement du numerus clausus entre les écoles.
J’insiste une nouvelle fois sur le fait que le département de la Loire accueille des patientes extérieures à la région Rhône-Alpes. L’influence exercée par l’agglomération stéphanoise sur les bassins de vie du Puy-en-Velay et de Monistrol-sur-Loire a une incidence sur l’activité de nos établissements de santé, qui doit aussi être prise en considération pour l’évaluation des besoins, outre les éléments que vous avez cités, madame le ministre.
Quoi qu’il en soit, je reste optimiste. Vous pouvez compter sur ma motivation pour faire avancer ce dossier, dans le sens d’une amélioration de la répartition de l’offre de formation, au bénéfice des étudiants stéphanois.
transfert d’une officine de pharmacie dans la commune de régusse (var)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 333, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la ministre, je souhaiterais connaître votre sentiment sur les obstacles rencontrés par la commune de Régusse, dans le Var, pour obtenir l’implantation sur son territoire d’une pharmacie, dont la nécessité est évidente – en tout cas, je voudrais vous en persuader –, dans le cadre du transfert d’une officine.
Régusse, qui est la plus grande commune du canton de Taverne, lequel ne compte aucune pharmacie, connaît depuis longtemps, du fait de sa situation dans la zone d’influence de l’agglomération Marseille-Aix-en-Provence, une dynamique démographique exceptionnelle. Sa population est passée de 820 habitants en 1990 à 1 133 en 1999, puis à 1 729 habitants en 2008. À partir de cette date, la croissance s’accélère, la population atteignant 2 067 habitants au recensement de 2011, soit une augmentation de 19,5 % en trois ans. À ce rythme, la population permanente de Régusse dépassera 2 500 habitants en 2015, c’est-à-dire demain matin.
Si l’on ajoute que la proximité des gorges du Verdon et du lac de Sainte-Croix entraîne un triplement de la population du secteur en période estivale, on a un peu de peine à comprendre l’application sans nuance de l’article L. 5125-11 du code de la santé publique par l’agence régionale de santé, l’ARS, et le préfet du Var pour s’opposer au transfert d’une officine demandé par la commune de Régusse.
En conséquence, madame la ministre, je vous prie de bien vouloir m’indiquer si vous disposez d’une marge d’appréciation dans l’application de l’article L. 5125-11 du code de la santé publique, ouvrant la possibilité d’un nouvel examen de la demande de la commune de Régusse, et si, à défaut, vous envisagez, dans le cadre de la politique gouvernementale d’égalité des territoires, de prendre des dispositions permettant, dans les secteurs ruraux et périurbains, de donner un contenu autre que décoratif à l’article L. 1411-11 du code de la santé publique, qui dispose que « l’accès aux soins de premier recours ainsi que la prise en charge continue des malades sont définis dans le respect des exigences de proximité, qui s’apprécie en termes de distance et de temps de parcours ».
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, je suis particulièrement attachée à garantir l’accès aux soins pour tous nos concitoyens, sur l’ensemble du territoire. À l’évidence, l’officine de pharmacie joue un rôle important à cet égard.
Aujourd'hui, de nouvelles perspectives sont offertes aux pharmaciens d’officine : nous avons la volonté de leur permettre de répondre aux préoccupations et aux attentes de la population française. Cela se traduira par l’attribution de missions nouvelles identifiées comme telles, notamment en matière de conseil, qui seront rémunérées. L’officine de pharmacie est donc un acteur à part entière de notre système de soins.
En matière d’implantation d’officines, des règles sont fixées au niveau législatif. Elles sont appliquées de façon claire et stricte. La France bénéficie incontestablement d’une des plus fortes densités officinales d’Europe. Même si nous sommes attachés à cette spécificité, nous devons veiller à ce que les pharmacies puissent conserver une taille suffisante, qui leur permette à la fois de développer de nouveaux services à la population et de maintenir un équilibre économique.
Actuellement, le dispositif législatif autorise l’implantation d’une pharmacie dans une commune de moins de 2500 habitants qui en est dépourvue dans deux cas seulement : soit par voie de transfert, afin de favoriser le rééquilibrage du réseau officinal, soit lorsqu’une pharmacie a cessé définitivement son activité, en vue de préserver la desserte en médicaments des populations concernées.
Cette législation a permis un maillage du territoire très homogène. Aujourd'hui, il n’y a pas de déserts officinaux dans notre pays, alors que nous sommes confrontés au risque de voir apparaître des déserts médicaux.
En application de cette législation, une autorisation d’ouverture d’une pharmacie dans la commune de Régusse serait illégale et susceptible d’un recours contentieux, qui ne manquerait pas d’être formé.
Cependant, au regard de l’évolution démographique très rapide de cette commune, le seuil des 2 500 habitants devrait être atteint très prochainement : l’ouverture d’une pharmacie pourrait alors être envisagée de manière tout à fait différente. Vous le voyez, monsieur le sénateur, des perspectives sont ouvertes à ce titre pour la commune de Régusse, compte tenu de son dynamisme démographique.