compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Claude Carle
vice-président
Secrétaires :
M. Marc Daunis,
Mme Odette Herviaux.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Démission et remplacement d'un sénateur
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de Mme Odette Duriez une lettre par laquelle elle se démettait de son mandat de sénatrice du Pas-de-Calais, à compter du jeudi 28 février à minuit.
En application de l’article L.O. 320 du code électoral, elle a été remplacée par M. Hervé Poher, dont le mandat de sénateur du Pas-de-Calais a commencé le vendredi 1er mars, à zéro heure.
Au nom du Sénat tout entier, je souhaite à M. Hervé Poher la plus cordiale bienvenue.
3
Engagement de la procédure accélérée pour l'examen de deux projets de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi et du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable, déposés sur le bureau de l’Assemblée nationale le 6 mars 2013.
4
Demande d'avis sur un projet de nomination
M. le président. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre, par lettre en date du 6 mars 2013, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître, en application de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, l’avis de la commission compétente du Sénat sur le projet de nomination de M. Jean-Yves Le Gall comme président du conseil d’administration du Centre national d’études spatiales.
Acte est donné de cette communication.
Ce courrier a été transmis à la commission des affaires économiques.
5
Dépôt de rapports du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, d’une part, en application de l’article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 et, d’autre part, le rapport 2011 sur les chiffres de la politique de l’immigration et de l’intégration, établi en application de l’article L. 111-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Le premier a été transmis à la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois et, pour information, à la commission des finances ; le second, à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
Ils sont disponibles au bureau de la distribution.
6
Candidature à une commission
M. le président. J’informe le Sénat que le groupe socialiste et apparentés a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la commission des affaires sociales à la place laissée vacante par Mme Odette Duriez, démissionnaire de son mandat de sénatrice.
Cette candidature a été affichée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
7
Communication du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 11 mars 2013, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 60 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 (dispositifs temporaires d’achèvement et de rationalisation de l’intercommunalité) (2013-315 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
8
Retrait de questions orales
M. le président. J’informe le Sénat que la question orale n° 348 de M. Thierry Foucaud est retirée de l’ordre du jour de la présente séance, à la demande de son auteur.
Par ailleurs, j’informe le Sénat que les questions orales n° 340, de M. Ronan Kerdraon, n° 351, de Mme Leila Aïchi, et nos 371 et 372, de M. Jacques Mézard, sont retirées du rôle des questions orales, à la demande de leurs auteurs.
9
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
médecine du travail et collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chauveau, auteur de la question n° 125, adressée à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.
M. Jean-Pierre Chauveau. Madame le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les appels de cotisations de la médecine du travail pour les collectivités territoriales.
Toutes les collectivités et tous les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, sont soumis à une stricte obligation de versement de leurs cotisations. Le montant de celles-ci est calculé en fonction de l’effectif déclaré.
Ce mode de calcul serait bien compréhensible si chacun des salariés était réellement convoqué à une visite annuelle ou biennale.
En théorie, ces visites périodiques ont lieu tous les vingt-quatre mois. Une dérogation est même possible, au-delà de deux ans, sous réserve de l’obtention d’un agrément du service de santé au travail. Cependant, le paiement par les collectivités et le calcul des cotisations demeurent annuels.
Il existe néanmoins un réel décalage entre le principe et la réalité, décalage qui m’a été confirmé par tous les représentants des collectivités que j’ai pu interroger.
Ainsi, dans la communauté de communes que je préside, seulement 20 % des salariés sont en moyenne examinés chaque année. Autrement dit, les salariés ne sont examinés qu’une fois tous les cinq ans !
En pratique, on peut constater que les services de la médecine du travail examinent les salariés très au-delà de la limite des deux ans. Bien sûr, les salariés peuvent toujours être examinés à leur demande.
Mon but n’est pas de remettre en cause le fonctionnement de la médecine du travail : en réalité, ma question se fonde sur le mode de calcul des cotisations. En effet, au regard des visites réellement effectuées, l’établissement d’un nouveau mode de calcul pourrait permettre aux collectivités territoriales et à leurs EPCI d’échapper à des dépenses indues.
Concrètement, compte tenu des sommes versées, une visite médicale périodique effectivement réalisée coûte aujourd'hui aux alentours de 500 euros par agent ! Par ailleurs, dans la Sarthe, les visites effectuées au travers du service Santé au travail 72 le sont non plus par des médecins, mais par des infirmières spécialisées.
Aussi, je souhaiterais savoir si le Gouvernement envisage un nouveau mode de calcul. Celui-ci pourrait s’établir en fonction de la réalité du service rendu, ce qui me semblerait tout à fait logique : il s’agit non pas de réduire le financement des services de la médecine du travail, mais plutôt de le moderniser pour permettre un paiement à l’acte. Cette réforme permettrait aux collectivités d’économiser la moitié de leurs dépenses liées aux visites périodiques, soit la part correspondant aux visites qui ne sont pas réalisées.
Ma question ne vise pas à déclencher une polémique : je souhaite simplement faire preuve de pragmatisme et trouver des pistes pour réaliser des économies dans ce domaine.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur Jean-Pierre Chauveau, Mme Marylise Lebranchu aurait souhaité être présente pour répondre plus précisément encore que je ne saurais le faire à la question que vous venez de poser, mais elle est retenue ce matin par l’ouverture des négociations avec les syndicats de la fonction publique. Elle m’a donc chargée de vous répondre.
Vous avez précisé que votre objectif n’était pas du tout de modifier le contexte dans lequel sont organisées la médecine du travail et la médecine préventive, laquelle a été prévue et organisée par le décret du 10 juin 1985, pris en application de la loi de 1984.
Vous le savez, chaque collectivité est normalement tenue d’organiser un service de médecine préventive. Elle peut créer ce service ou adhérer à un service commun à plusieurs collectivités.
En fait, il existe au moins trois autres possibilités.
Premièrement, les collectivités peuvent faire appel à un service de santé au travail régi par le titre II du livre VI de la quatrième partie du code du travail : service de médecine du travail interentreprises ou service de santé au travail du secteur agricole.
Deuxièmement, elles peuvent avoir recours aux associations à but non lucratif qui se sont justement créées pour répondre aux obligations en matière de médecine du travail. Cette possibilité se développe fortement dans nos territoires.
Troisièmement, enfin, les collectivités peuvent disposer, soit dans des conditions conventionnelles, soit par le versement d’une cotisation additionnelle à la cotisation obligatoire due au centre de gestion, du service de médecine préventive qui existe dans les locaux mêmes de ce dernier.
Je veux rappeler les difficultés que rencontre aujourd'hui la France pour se doter de médecins du travail : vous le savez, la médecine du travail fait partie des spécialités les plus difficiles, et le manque de praticiens est cruel.
Les médecins du travail se sont vu confier deux missions : une mission de santé en milieu de travail et une mission de médecine préventive, laquelle ne correspond qu’à un tiers – un peu plus peut-être – du temps d’activité de ces médecins. Monsieur Chauveau, ce partage explique ce que vous avez relevé : le fait que seuls 20 % de nos fonctionnaires bénéficient d’un contrôle tous les ans et que nos agents ne se font contrôler, au mieux, que tous les deux ou trois ans, alors que la cotisation, elle, est calculée chaque année.
Ne pouvant déterminer exactement les parts de l’activité des médecins du travail qui seront respectivement consacrées aux contrôles effectués au titre de la mission de santé en milieu de travail et à la médecine préventive, nous devons aujourd'hui en rester à la cotisation au forfait.
Monsieur le sénateur, soyez assuré que Mme Lebranchu a examiné et continuera d’examiner ce point avec l’ensemble de ses partenaires, dans les meilleures conditions possibles, pour mieux répondre à vos attentes. Néanmoins, cette préoccupation ne l’amène pas pour le moment à privilégier un changement de la législation et de la réglementation en vigueur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chauveau.
M. Jean-Pierre Chauveau. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Il faudrait que nous parvenions à trouver une solution, notamment en explorant les trois pistes que vous avez évoquées.
À une époque où l’on cherche par tous les moyens à serrer au maximum nos budgets, la situation actuelle ne me semble pas tout à fait logique. Nous devons donc essayer de trouver des solutions qui soient mieux adaptées à la réalité. L’idéal serait tout de même qu’existe une certaine adéquation entre, d’un côté, les services rendus et, de l’autre, le paiement effectué par les collectivités.
aménagement du carrefour giratoire des couleurs situé à valence
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère, en remplacement de M. Bernard Piras, auteur de la question n° 170, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Jean-Louis Carrère. Madame la ministre, notre collègue Bernard Piras étant retenu pour des raisons d’ordre climatique, je m’exprimerai en son nom.
Bernard Piras a attiré l’attention de M. le ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche sur l’aménagement du carrefour giratoire dit « des Couleurs », situé à Valence, dans la Drôme.
En effet, l’aménagement de ce carrefour giratoire, attendu depuis longtemps par l’ensemble des élus locaux, représente un enjeu très important en matière d’aménagement du territoire et de développement économique du nord de Valence, ainsi qu’en termes de sécurité.
Ce carrefour giratoire présente une double spécificité : d’une part, il comporte sept branches et, d’autre part, il concentre une superposition de trois trafics de différentes natures, à savoir un transit autoroutier et interurbain – sur les routes nationales 7 et 532 –, un trafic pendulaire entre les lieux de domicile et les lieux de travail et de scolarité, enfin, un trafic de loisir, des zones commerciales jouxtant le carrefour giratoire.
Ce carrefour est d’ores et déjà très souvent saturé, des pointes à environ 8 000 véhicules par heure ayant été relevées. Ces graves dysfonctionnements sont très contraignants pour la population et risquent de l’être encore davantage compte tenu des projets de développement en cours.
Madame la ministre, il convient de rappeler qu’à l’origine avait été prévue la construction d’un carrefour giratoire à plusieurs niveaux, afin d’éviter le mélange des transits. Ce projet n’a pas été réalisé pour des raisons de coût.
Désormais, la configuration actuelle du carrefour giratoire est obsolète et source d’engorgements préjudiciables et en accroissement.
Conscient de ce désordre, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a commandé une étude d'opportunité quant à l'aménagement de ce carrefour giratoire, étude remise en février 2011. Cette étude propose et évalue plusieurs scénarios d'aménagement, dont les coûts sont estimés dans une fourchette allant de 20 à 30 millions d'euros.
Une décision politique est à présent attendue par les élus, la population et les usagers concernés. M. Bernard Piras demande ainsi à M. le ministre délégué de lui indiquer à quelle échéance cet aménagement est programmé dans un contexte où, vous l’aurez compris, une certaine impatience s’exprime localement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur Carrère, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, qui, sans doute bloqué lui aussi par des congères l’empêchant de quitter la Côte d’Opale, m’a demandé de répondre à votre question. Cette dernière correspond d’ailleurs à une véritable préoccupation de Frédéric Cuvillier.
Le projet d'aménagement du carrefour des Couleurs situé sur la route nationale 7, à l’est de Valence, doit contribuer à décongestionner un nœud majeur de communication où se rencontrent et se croisent chaque jour d'importants trafics locaux.
Le projet d'aménagement du carrefour des Couleurs a fait l'objet d'études d'opportunité qui ont porté sur différents scénarios de dénivellation. Comme M. Piras l’a relevé dans sa question, ces études sont aujourd'hui achevées et ouvrent ainsi la voie à une phase de concertation avec l'ensemble des acteurs et élus locaux concernés autour du choix du scénario d'aménagement.
Cette phase de concertation doit être surtout l'occasion de définir les modalités de financement de travaux dont vous avez également indiqué le coût, effectivement compris entre 20 et 30 millions d’euros suivant la variante d'aménagement retenue.
Or, le financement de cette opération n'a pas été prévu par l’actuel programme de modernisation des itinéraires routiers, ou PDMI, de la région Rhône-Alpes qui avait été arrêté en 2009. Compte tenu du contexte économique actuel, le Gouvernement souhaite qu’une nouvelle négociation soit entamée pour que de nouveaux travaux soient entrepris. Ainsi, l’année 2014, avec l’échéance des PDMI actuels, devra être l’occasion d’une nouvelle réflexion demandée aux préfets de région. Dans ce cadre, ces derniers devront élaborer une liste hiérarchisée des opérations de modernisation du réseau routier national dont la poursuite ou l'engagement des travaux paraissent nécessaires à un horizon de cinq ans.
Ces opérations devront répondre prioritairement à des enjeux de sécurité, de réduction d’une congestion chronique, de désenclavement et d'amélioration nécessaire de la desserte des territoires ou encore de la qualité de vie.
À l'évidence, les critères que je viens de rappeler correspondent assez bien aux difficultés rencontrées au carrefour des Couleurs. M. Cuvillier s’engage bien entendu, au nom du Gouvernement, à reprendre les négociations pour apporter les solutions les plus opérantes dans les meilleurs délais possibles.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse que je transmettrai dans son intégralité à M. Bernard Piras. J’attire cependant l’attention du Gouvernement sur le fait que l’année 2014 n’est pas un terme très éloigné. Ainsi, il serait particulièrement intéressant que puisse être mise en œuvre, dans les délais les plus brefs, la procédure de concertation de telle sorte que le problème du carrefour des Couleurs puisse être traité prioritairement.
N’étant pas un usager quotidien de ce carrefour, je ne ressens pas l’urgence de son aménagement comme M. Bernard Piras ; je crois néanmoins savoir que les usagers de ce carrefour aimeraient que le processus qui conduira à la dénivellation de ce dernier se mette en place le plus rapidement possible, de telle sorte qu’il n’y ait pas de retard à compter de 2014, soit dans un an.
avant-projet de loi de décentralisation et clarification des compétences en matière de desserte ferroviaire
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 325, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Bruno Sido. Ma question, qui concerne non pas seulement mon département de la Haute-Marne mais toute la France, s’adressait au ministre délégué chargé des transports. Mais ce dernier étant bloqué par des congères, c’est Mme la ministre déléguée chargée de la décentralisation qui va me répondre, et je m’en réjouis.
L'avant-projet de loi de décentralisation et de réforme de l'action publique, dans son chapitre IX consacré aux transports, prévoit de clarifier les compétences de l'État et des conseils régionaux en matière de desserte ferroviaire.
Si l’intention est louable, les conséquences des dispositions de ce chapitre peuvent se révéler dramatiques pour le niveau de service, en particulier sur la ligne Paris-Belfort.
En effet, d'après les informations dont je dispose, les lignes d'intérêt national devraient à l'avenir desservir au moins deux villes de plus de 100 000 habitants situées, qui plus est dans deux régions non contiguës.
Si les dispositions concernées de l'avant-projet de loi n'étaient pas modifiées, elles entraîneraient une dégradation très nette de la qualité de la desserte entre Paris et la Haute-Marne : onze trains au départ de Chaumont seraient supprimés chaque semaine !
Alors que le conseil général met tout en œuvre pour moderniser le département et l'ouvrir aux grands axes de circulation, cette perspective est inacceptable.
La Haute-Marne est en reconversion industrielle depuis plus de trente ans : depuis la fin des Trente glorieuses et le premier choc pétrolier. La crise des industries et de la métallurgie y a apporté, comme dans tout l'est du pays, son cortège de licenciements et de souffrances.
Tous les élus du territoire sont mobilisés depuis une dizaine d'années, bien au-delà des sensibilités partisanes. Ainsi les élus au conseil général ont-ils décidé de faire de la modernisation des infrastructures une priorité pour gagner en attractivité.
Madame la ministre, je ne vous citerai qu'un seul exemple : nous investissons 40 millions d'euros pour poser 1 200 kilomètres de fibre optique et permettre aux habitants des zones rurales, qui ne sont pas des citoyens de seconde zone, de disposer du haut débit comme tout le monde.
Le conseil régional, le conseil général et les parlementaires partagent cette même préoccupation pour laquelle nous sommes tous mobilisés.
Je vous remercie donc, madame la ministre, de m'indiquer si le Gouvernement entend modifier cet avant-projet de loi afin de conserver à la Haute-Marne, en particulier, une politique d'aménagement du territoire digne de ce nom.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Vous avez évoqué, au début de votre question, un avant-projet de loi dans une version très antérieure à celle qui a été transmise jeudi dernier au Conseil d’État : dans cette dernière, en effet, le chapitre IX n’existe plus en tant que tel et ses dispositions se trouvent donc considérablement modifiées.
Dans le projet de loi soumis au Conseil d’État, qui sera examiné le 10 avril prochain en conseil des ministres, les dispositions concernées sont très édulcorées. En effet, l’intention de Frédéric Cuvillier est de disposer d’un véhicule législatif propre qui lui permettra d’aborder complètement la problématique des transports ferroviaires, notamment dans le cadre de la concertation à laquelle il s’est engagé, concertation qui doit être longue, lourde et nourrie compte tenu des enjeux que vous avez rappelés.
S’agissant de ces enjeux, nous n’étions pas allés au bout des logiques qui auraient permis de répondre à ce maillage indispensable pour l’ensemble de notre territoire, et c’est peut-être la raison pour laquelle la partie de texte que vous aviez lue a disparu.
Tel est le contexte général que je voulais rappeler.
J’en viens à des réponses plus techniques. M. Frédéric Cuvillier m'a en effet demandé de partager avec vous certaines de ses convictions sur les trains d'équilibre du territoire, les fameux TET.
Ces trains sont un lourd héritage pour l'État, qui en est depuis peu l'autorité organisatrice. Ils sont fortement déficitaires ; la SNCF, qui en avait précédemment la responsabilité, n'y investissait plus.
Les TET jouent pourtant – vous l’avez rappelé – un rôle essentiel dans l'aménagement du territoire et dans le quotidien de nos concitoyens. Ils doivent en outre constituer une offre commerciale complémentaire du TGV par des horaires et des correspondances adaptés, l'accent étant mis sur l'accessibilité et la qualité du service à bord.
L'évolution de ces trains du quotidien est donc une priorité du Gouvernement. C'est la raison pour laquelle mon collègue Frédéric Cuvillier a annoncé le lancement dans les tout prochains mois d'une première tranche d'investissement de 400 millions d'euros pour le renouvellement du matériel roulant.
Mais l'investissement, seul, ne suffira pas pour améliorer la qualité du service à la hauteur de ce qu'attendent les usagers. L’offre doit aussi évoluer pour mieux répondre aux besoins de déplacement.
De ce point de vue, et comme vous l’avez dit, les régions sont les premières à reconnaître qu’elles rencontrent parfois des difficultés pour tracer, sur certains trains, la frontière entre leurs trains express régionaux et nos trains d’équilibre du territoire, car ils concernent des liaisons entre deux régions. Cette imbrication des services est à l'origine de problèmes qui pèsent au final sur les coûts et sur la qualité de service.
Derrière les autorités organisatrices, il y a des usagers qui doivent être satisfaits, chacun au mieux de ses moyens. Les régions ont reçu compétence d’organiser les services de transport régional, ce qu’elles font remarquablement bien.
Dès lors, l'État a-t-il vocation à les concurrencer avec ses trains sur ces liaisons entre deux régions seulement ? N'est-il pas plus intéressant pour les régions de disposer de l'ensemble des leviers sur les trains qui assurent les déplacements domicile-travail à l'intérieur d'une région ou entre deux régions limitrophes ?
L'État, en revanche, a vocation à conserver la maîtrise des trains qui assurent l'aménagement du territoire entre trois régions, là où n'existe aucune offre alternative. Il nous faut donc réfléchir à la manière de mieux organiser les offres dans le respect, naturellement, d'un juste équilibre financier des parties. Il va de soi que, en cas de transfert de certaines liaisons aux régions, celles-ci se verraient attribuer la compensation financière existante.
Vous constatez ainsi, monsieur le sénateur, que le Gouvernement prend le problème à bras-le-corps et qu’il le traitera, comme il en a aujourd'hui l’habitude, en suivant sa méthode de concertation, d’écoute et de dialogue avec les élus locaux.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.
M. Bruno Sido. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je ne sais si mon inquiétude doit subsister ; mais ma vigilance, certainement ! En effet, vous venez de me dire, pour résumer, que les dispositions concernées ne figurent plus dans le projet de loi de décentralisation et de réforme de l’action publique, mais qu’elles seront inscrites dans un véhicule législatif propre. Cela ne retirerait rien à mes craintes si, comme vous l’avez heureusement dit à l’instant, ces TET ne devaient relier trois régions, ce qui est le cas du train Paris-Belfort. Par conséquent, avec les investissements prévus, qui s’élèvent à 400 millions d'euros, nous pourrons à mon avis maintenir le niveau de service.
Je précise que les difficultés sont réelles ! Ainsi, hier soir, venant en train à Paris, je me suis trouvé dans un wagon non chauffé et mal éclairé au point qu’il était impossible de lire le journal ! À l'évidence, ce matériel arrive à bout de course et il faut absolument le remplacer. Certes, des investissements importants ont été réalisés par Réseau ferré de France pour améliorer la ligne. Encore faut-il que des trains puissent rouler dessus…
M. le président. Mes chers collègues, avant d’aborder la prochaine question orale sans débat, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures cinquante-huit, est reprise à dix heures une.)
M. le président. La séance est reprise.
concertation autour du retour à la semaine de quatre jours et demi de cours
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 153, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.
M. Rémy Pointereau. Madame la ministre, ma question, qui s’adresse au ministre de l’éducation nationale, M. Vincent Peillon – et je remercie par avance Mme Pau-Langevin, ministre chargée de la réussite éducative, de bien vouloir me répondre –, concerne la réforme des rythmes scolaires, avec notamment le retour de la semaine à quatre jours et demi qui pose quelques difficultés, non pas sur le fond mais surtout sur la forme.
Tout d'abord, en termes de concertation, on nous dit qu’un consensus existait, mais je n’en suis pas tout à fait sûr. Ainsi, en octobre, une consultation dans les 300 écoles de mon département, le Cher, représentant 1 200 personnes au total dont 800 professeurs des écoles et 400 parents d’élèves, laissait apparaître au contraire un rejet du retour à la demi-journée supplémentaire de cours.
En outre, une réunion a été organisée à l’intention des élus du Cher le 18 février dernier à la demande du directeur académique et sous la présidence du préfet du Cher, réunion à laquelle l’association des maires du Cher que je préside a bien voulu s’associer. Plus de 200 élus étaient présents lors de cette réunion, et je peux vous dire que tous étaient inquiets. J’ai rappelé qu’une motion avait été adoptée lors de notre dernière assemblée générale extraordinaire réunie sur ce sujet. Compte tenu des délais extrêmement contraints, les élus présents ont demandé à l’unanimité le report de la réforme à la rentrée de 2014.
Les élus sont bien sûr conscients de la nécessité de mettre en avant l’intérêt de l’enfant et du fait qu’il ne s’agit en aucun cas d’une position politique, de nombreux élus de toutes sensibilités, de droite comme de gauche, partageant le même avis.
Toutefois, il faut permettre aux communes de s’organiser dans les meilleures conditions, s’agissant notamment du temps périscolaire ; elles seront obligées de recruter du personnel adapté, ce qui entraînera pour elles un coût financier important, estimé à environ 150 euros par élève.
Par ailleurs, s’agissant des transports scolaires, dont les conseils généraux ont la charge, le coût supplémentaire est estimé entre 500 000 euros et 1,2 million d’euros pour le département du Cher.
En outre, une telle mesure risque de créer des inégalités territoriales dans la mesure où il faudra mettre à disposition des locaux supplémentaires afin de mettre en place des activités culturelles, sportives et autres. En milieu rural, ce sera beaucoup plus difficile.
Enfin, le Gouvernement a décidé au mois de décembre d’accorder une aide de 50 euros par élève, avec une majoration pouvant aller jusqu’à 40 euros dans les « communes urbaines ou rurales les plus en difficulté », afin d’inciter les communes à appliquer la réforme dans l’enseignement primaire dès 2013.
Madame la ministre, comment ce fonds de 250 millions d’euros pour les rentrées 2013 et 2014 sera-t-il financé et que va-t-il se passer ensuite pour les rentrées suivantes ? Comment allez-vous identifier les communes rurales et urbaines les plus en difficulté ? Enfin, allez-vous compenser « à l’euro près » cette dépense nouvelle imposée aux conseils généraux ?
L’Association des maires de France a fait savoir depuis que nombre de communes ou d’intercommunalités ne seraient pas en mesure d’appliquer la réforme des rythmes scolaires avant 2014, malgré sa volonté – je la cite – de « sauver » la réforme. Elle a estimé, je le répète, à 150 euros par enfant le coût réel de la réforme.
Alors même que des réductions de dotations aux collectivités de 4,5 milliards d’euros en 2014 et en 2015 viennent d’être annoncées, comment comptez-vous faire pour rassurer les maires sur le soutien pérenne de l’État ?
Écoutez les élus locaux : ils sont suffisamment sollicités ! Ne leur mettez pas la pression pour une application anticipée qu’ils ne peuvent pas assumer !