M. le président. La parole est à M. André Reichardt.
M. André Reichardt. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui répond à l’engagement du Président de la République de faire de la Banque publique d’investissement « la pierre angulaire du développement économique de notre pays, avec les régions pour chefs de file. »
Qu’en est-il véritablement ? Cette BPI, telle qu’on nous la propose, répondra-t-elle aux attentes de nos entreprises ?
Selon l’exposé des motifs du projet de loi, la BPI doit répondre à quatre urgences : poursuivre et amplifier le soutien public au financement des entreprises ; développer une stratégie de croissance orientée par l’État et mise en œuvre en région ; offrir un meilleur service aux chefs d’entreprises par un accès direct aux outils nécessaires à leur développement ; enfin, mobiliser l’État, la Caisse des dépôts et consignations et les régions, ces dernières et la BPI devant créer ensemble des plateformes communes d’accueil des entreprises pour leurs besoins de financement.
On ne peut que partager ces quatre urgences. La question de fond est de savoir ce qu’apportera réellement la BPI en plus de ce qui existe déjà. Son principe fondateur a quelque chose de particulièrement simpliste, car il repose sur la proposition suivante : créer un guichet unique avec des équipes de développeurs à l’international et, surtout, des chargés d’affaires polyvalents permettant de réaliser un diagnostic sommaire des besoins de l’entreprise afin d’identifier avec elle les produits distribués par la BPI qui pourraient le mieux répondre à ses besoins, qu’il s’agisse d’un prêt, d’une prise de participation par l’entrée en capital d’un fonds ou de quasi-fonds propres, entre autres.
Est-ce à dire que, aujourd’hui, personne n’est capable de réaliser ce diagnostic et d’identifier les produits d’OSEO, du capital investissement régional ou national ou d’accompagner les entreprises à l’export ? Ce serait bien sûr nier la plus-value des agents des régions, des agences de développement économique qui sont nombreuses et des chambres de commerce et d’industrie par exemple. Ce serait également nier le rôle d’animateur de ces acteurs qui est dévolu aux régions depuis 2006.
Si la BPI se résume à ce guichet unique, elle ne changera, à mon sens, pas grand-chose à la situation actuelle. Pis, on peut penser que, si ce sont les équipes d’OSEO qui deviennent les interlocuteurs des entreprises, elles perdront en efficacité, car une part importante de leur temps sera passée à analyser des dossiers en lieu et place d’autres acteurs qui le font déjà.
Il est peu probable, car une telle mesure serait déraisonnable, que la mise en place de la BPI s’accompagne de créations de postes : on peut donc présager que, loin de réduire des délais d’instruction parfois jugés excessifs, cette réforme viendra augmenter les temps d’attente et se révélera, partant, contre-productive.
M. Pierre Charon. Eh oui !
M. André Reichardt. À mon sens, le guichet unique n’est ni une solution incontournable ni, en tout état de cause, la réponse aux urgences que je viens d’évoquer et que présente l’exposé des motifs du présent projet de loi.
Pour autant, la BPI peut-elle réellement représenter un progrès ? Oui, mais à condition que quatre facteurs soient réunis.
Premièrement, la BPI sera utile si elle permet de disposer en régions d’une structure bénéficiant d’une capacité de décision et donc d’engagement, tant en prêts qu’en fonds propres. À cet égard, si OSEO peut sembler plus largement déconcentré que le FSI Régions, certains des arbitrages relatifs à des prêts pourraient être opérés en régions plutôt qu’au siège parisien. Je songe notamment, parmi de nombreux exemples, au relèvement des plafonds des décisions régionales.
Deuxièmement, la BPI sera utile si elle permet de disposer, en régions, d’une structure jouissant d’une compétence de priorisation de ses outils d’intervention, sur tel ou tel secteur ou tel ou tel montant, voire d’une capacité de création de nouveaux outils d’intervention. Cette attribution serait exercée en partenariat avec les conseils régionaux, au regard des enjeux et des objectifs synthétisés par le schéma régional de développement économique et d’innovation, le SRDEI.
Troisièmement, la BPI pourrait être utile si elle permettait d’employer les interventions en fonds propres du FSI Régions en complémentarité avec les outils régionaux déjà existants. Sur ce plan, il conviendrait de mettre fin à l’unique politique d’investissement du FSI, qui peut conduire ce dernier à intervenir dans certaines régions en concurrence avec des fonds régionaux. Je sais de quoi je parle, pour ce qui est de l’Alsace !
Quatrièmement, et enfin, la BPI pourrait être utile si elle permettait, via l’apport en fonds propres de la Caisse des dépôts et consignations, de disposer d’une assise plus importante pour ces outils de financement que sont les prêts ou les garanties.
Néanmoins, à l’heure actuelle, j’ai le sentiment que le compte n’y est pas : pour reprendre les termes du président de la région Île-de-France, M. Jean-Paul Huchon, qui semble plutôt proche de nos collègues siégeant à la gauche de cet hémicycle – c’est toutefois ce que je croyais jusqu’à présent –, le moins que l’on puisse dire, c’est que « ce texte est réducteur par rapport à l’ambition de départ. »
Sans même évoquer les modes de gouvernance qui, à mon sens, ne sont pas davantage à la hauteur des enjeux, les comités d’engagement régionaux semblent n’être compétents que pour les seules décisions d’investissements en fonds propres : tous les autres sujets seraient partant écartés, qu’il s’agisse de garanties, de trésorerie, d’aide à la succession ou à l’innovation, etc.
Pour l’ensemble de ces raisons, et sauf à ce que des modifications soient apportées à ce texte au cours de nos débats, je ne pourrai pas, à titre personnel, soutenir le présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Plancade. Eh bien, vous avez tort !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, face au constat des difficultés de plus en plus grandes qu’éprouvent nos entreprises, particulièrement des TPE, PME et ETI, à accéder au crédit, il est nécessaire de mettre en place un dispositif de soutien efficace.
C’est le rôle assigné à la BPI. François Hollande, alors candidat à la présidence de la République avait fait de la création d’une telle instance le premier de ses engagements.
M. Roland Courteau. Il avait raison !
M. Michel Teston. Ainsi, son programme insistait sur la nécessité de créer un organisme dont l’objet serait de favoriser « le développement des PME, le soutien aux filières d’avenir et la conversion écologique et énergétique de l’industrie. » La BPI vise donc à remédier aux faiblesses du financement du tissu productif et à renforcer la compétitivité de l’économie française.
Je centrerai mon intervention sur le financement de la transition écologique et la contribution de la BPI au développement économique régional, deux domaines qui figurent au cœur des compétences de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire.
La transition écologique est un objectif qui nécessite des investissements très lourds, mais elle constitue aussi et surtout un important levier pour l’économie. De fait, elle pourrait susciter chaque année, pendant dix ans, des investissements estimés entre 2 % et 3 % du PIB.
En outre, les activités liées à l’isolation thermique, au développement des énergies renouvelables ou encore aux écotechnologies constituent des gisements d’emplois territorialisés et donc, pour leur majeure partie, peu délocalisables.
S’agissant du domaine des énergies renouvelables, si l’accès au crédit est facilité et moins cher, le coût de revient de l’éolien et du photovoltaïque devrait baisser, rendant ainsi plus facile un rééquilibrage du mix énergétique.
Initialement, le présent projet de loi ne mentionnait pas explicitement la vocation de la BPI à accompagner financièrement la transition écologique. Les députés ont rappelé, dès l’article 1er, que cette banque devait y contribuer. Ils ont également souhaité intégrer dans les comités d’orientation national et régionaux de la BPI des personnalités qualifiées en matière de développement durable. Cette disposition est conforme aux orientations définies par le Président de la République lors de l’ouverture de la conférence environnementale, en septembre dernier.
J’en viens au rôle reconnu aux régions dans l’organisation de la BPI. Alors que le Gouvernement s’apprête à reconnaître, dans le cadre de la future réforme territoriale, et contrairement à ce qui avait été fait en 2004, le rôle de chef de file des régions en matière de développement économique, il est absolument nécessaire de ménager à ces dernières une place équivalente au sein des instances de la BPI.
En effet, le rôle de cette banque est bien de contribuer à la politique industrielle définie par l’État et menée, notamment, par nos territoires. C’est la raison pour laquelle les régions doivent être correctement représentées – c’est d’ailleurs le cas – au sein du Comité national et des comités régionaux d’orientation.
Pour la même raison, les représentants des régions doivent présider les comités régionaux. Le projet de loi initial le prévoyait. Or l’Assemblée nationale a supprimé cette disposition, ce qui a conduit la commission du développement durable du Sénat, suivant en cela l’avis de son rapporteur André Vairetto, à adopter un amendement rétablissant le texte initial.
Pour terminer, j’aborderai une question étrangère au domaine du développement durable : le FSI et CDC Entreprises détiennent actuellement des participations dans plusieurs groupes français. On a évoqué la possibilité de céder les participations non stratégiques, une fois la BPI mise en place. Sur un sujet aussi important et sensible, il me paraît essentiel que le Parlement soit, à tout le moins, consulté. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire ce qu’il en sera ?
En conclusion, je tiens à souligner que, comme les précédents orateurs du groupe socialiste, je soutiens sans réserve la réforme présentée par le Gouvernement, convaincu que la BPI sera un atout majeur pour rendre de la compétitivité à l’économie française. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet instrument que constitue la BPI était certes attendu par les présidents de conseil régional – l’un d’entre eux s’est d’ailleurs déjà exprimé avant moi –, mais il était d’abord et avant tout désiré par les chefs d’entreprise, bref par les créateurs de richesse que compte notre territoire. Ce sont eux qui attendent cet outil innovant ô combien nécessaire.
Quant aux régions, elles souhaitent bien entendu prendre part à la mise en œuvre de la BPI. Elles disposeront de responsabilités accrues dans le financement des entreprises. Qui plus est, elles joueront un rôle d’appui en matière d’innovation et à l’exportation, ainsi que dans la formation des demandeurs d’emploi.
Monsieur le ministre, c’est l’équilibre que traduit la déclaration commune État-régions adoptée le 12 septembre dernier, lorsque les présidents de région ont été reçus à l’Élysée, en votre présence, par le Président de la République et le Premier ministre.
L’État et les régions ont ainsi décidé d’unir leurs efforts pour redresser l’économie du pays et lutter contre le chômage. Nous avons pris ensemble quinze engagements qui constituent un acte de confiance réciproque.
Un équilibre a donc été établi : si la BPI est organisée au niveau national, les régions participent à toutes les instances nationales et président même les comités régionaux d’orientation. Concernant le financement des entreprises, une innovation de taille mérite d’être relevée : les régions président le Comité national d’orientation de la BPI et sont membres de son conseil d’administration. Elles joueront ainsi un rôle de pilote dans les orientations stratégiques de la BPI, et nous nous en réjouissons.
J’ai bien entendu les doutes, les remarques et les attentes exprimés sur les travées de l’opposition. Toutefois, je ne vois pas là, pour celles et ceux qui émettent ces réserves, un motif suffisant pour ne pas se réjouir de cette réforme et pour ne pas y prendre part !
S’agissant du soutien à l’innovation, les présidents de conseil régional présideront ces comités de pilotage pour coordonner leurs interventions avec celles de la BPI. Je salue à ce titre mon collègue Christian Bourquin, qui préside le Languedoc-Roussillon.
M. Christian Bourquin. Merci, monsieur le président !
M. Roland Courteau. L’excellent président Bourquin !
M. Christian Bourquin. Merci également au département de l’Aude !
M. François Patriat. Au surplus, les régions verront leurs responsabilités renforcées en matière de formation des demandeurs d’emploi. Fortes de leur connaissance des territoires, elles assumeront donc un rôle de premier plan dans les politiques publiques de développement économique.
Monsieur le ministre, vous affirmiez il y a peu que près de 90 % des décisions de la future BPI seraient prises par les régions. J’ai confiance dans vos déclarations. C’est au reste une excellente chose, car les régions ne doivent pas se cantonner dans un simple rôle de consultant. La BPI sera déconcentrée sur les territoires et elle travaillera en partenariat avec les conseils régionaux, qui seront associés à ses décisions et à ses orientations.
Les régions définiront les orientations et les priorités de la BPI en lien avec l’État, aussi bien à l'échelle nationale qu’au niveau local, et des guichets uniques seront établis en régions, au plus près des entreprises. Ceux qui doutent de l’efficacité du guichet unique devraient se pencher sur les politiques menées à ce titre par certaines régions, en vue d’aider les entreprises dans le cadre du dépôt et de l’enregistrement des dossiers, afin de faciliter le déroulement de cette procédure ! (M. Daniel Raoul applaudit.)
M. Marc Daunis. C’est tout à fait vrai !
M. Christian Bourquin. Notamment en Bourgogne !
M. François Patriat. Je tiens également à rappeler que les régions attendaient beaucoup du dialogue que le Gouvernement et le Président de la République ont su engager sur ce sujet.
Pour avoir été président de région sous la dernière mandature, je me souviens que le précédent chef de l’État ne nous avait pas habitués à autant de sollicitude. À ce titre, il est prévu que des réunions de travail entre l’État et les régions aient lieu tous les trois mois. Une page se tourne, marquant une rupture nette avec les procédés du précédent gouvernement. (M. Pierre Charon s’exclame.)
Monsieur Charon, vous avez beau sourire, mais nous n’avons jamais été reçus à l’Élysée sous la dernière présidence !
M. Pierre Charon. Je m’en souviens très bien !
M. François Patriat. Je vous rappelle donc un souvenir qui, s’il reste douloureux pour nous, appartient fort heureusement au passé.
Si la BPI avait été la simple juxtaposition de dispositifs déjà existants, elle n’aurait pas résolu le moindre problème.
Les régions seront incontournables dans les instances de la future BPI. Comme le préconisait Alain Rousset, il faut prendre exemple sur le modèle allemand et son réseau d’entreprises de taille intermédiaire financées par les Länder.
Je suis convaincu de l’efficacité d’une organisation décentralisée. Le pilotage des fonds de la BPI par les régions ne sera en aucun cas synonyme d’inefficacité, comme je l’entends dire ici ou là. À ce titre, je rappellerai que les régions ont déjà fait leurs preuves : elles ont d’ores et déjà mis en place 800 dispositifs avec OSEO ou encore avec la Caisse des dépôts et consignations,…
M. Daniel Raoul. Exactement !
M. François Patriat. … pour accompagner les entreprises dans les domaines des prêts, des fonds propres ou des avances remboursables. Mes chers collègues, pouvez-vous citer un seul de ces dispositifs qui ne fonctionne pas ?
Les régions sont à la tête de quatre-vingts fonds d’investissements régionaux. Pas un seul n’est en difficulté, et des milliers de créateurs d’entreprises ont bénéficié de ces dispositifs !
Comme le précise Jean-Pierre Jouyet, les régions sont aguerries dans le domaine du développement économique, elles connaissent le monde de l’entreprise, pour être en permanence au contact de ce dernier, et interviennent de longue date en investisseurs avisés. La BPI doit donc être l’outil des entrepreneurs, qui finance des stratégies et des parcours de développement dans toutes leurs dimensions, et non un nouveau guichet distribuant des aides au coup par coup. C’est cette politique que doit promouvoir le Comité national d’orientation.
De surcroît, la BPI doit être beaucoup plus qu’un établissement bancaire. Elle doit devenir, dans chaque région, l’un des piliers d’une plate-forme de financement des PME et des ETI : en effet, il faut permettre à ces entreprises de grandir et d’atteindre leur taille critique. À cette fin, la BPI interviendra en synergie avec l’ensemble des dispositifs et finances locaux existants, qu’ils soient publics ou privés.
S’il est possible de conclure des accords avec les actionnaires de la BPI, les régions développeront ces synergies de manière à ce que les entreprises bénéficient d’une palette de financements complète, depuis l’aide à la création jusqu’à l’appui à l’international.
La naissance de la BPI nous fournit au demeurant l’occasion de rassembler, en un lieu unique, tous les acteurs du développement des entreprises, les technologues et les spécialistes de la région et de son agence, les filiales de la BPI, Ubifrance, les réseaux consulaires le cas échéant, sans oublier les acteurs de l’économie sociale et solidaire : tous seront réunis pour simplifier les démarches des entreprises et les accompagner dans la globalité de leur projet.
M. Marc Daunis. Très bien !
M. Christian Bourquin. Bravo !
M. François Patriat. Je le souligne, la BPI et la décentralisation vont de pair. Le redressement économique passe par la croissance des PME. Voilà pourquoi des politiques associées doivent être conduites dans les territoires. Les régions, qui verront leur rôle de chef de file du développement économique se concrétiser via ce nouvel acte de décentralisation, se réjouissent de l’avènement de la BPI, constituant un nouveau levier pour renforcer encore leur engagement en faveur de la croissance et de l’emploi.
Sachez, monsieur le ministre, que nous serons à vos côtés dans la mise en place de ce dispositif, qui, n’en doutons pas, permettra de renforcer la compétitivité de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je m’efforcerai de répondre aux différents intervenants de cette discussion générale riche et fructueuse.
Monsieur le rapporteur général, comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire, nous souhaitons évidemment capitaliser sur les instruments existants. En effet, OSEO a bien fonctionné. Comme l’a souligné le Président de la République au cours des Journées OSEO, nous voulons faire plus, en nous appuyant sur ce qui fonctionne d’ores et déjà.
Il n’y aura pas de chasse aux sorcières. Vous avez insisté sur ce point, monsieur le rapporteur général, et je tiens pour ma part à saluer l’action de l’actuel président d’OSEO, qui a incontestablement réussi à la tête de cet établissement. Je proposerai donc qu’il occupe le poste de vice-président, auprès de Jean-Pierre Jouyet, et j’espère qu’il aura également l’occasion d’exercer d’autres fonctions importantes.
Vous l’avez dit, monsieur le rapporteur général, nous avons décidé pour ce projet de nous appuyer sur ce qui a été mis en place et qui a marché.
Pour répondre à votre première question, je vous confirme ce que vous a déclaré Benoît Hamon la semaine dernière ; je renouvelle d’ailleurs mes excuses pour mon absence à cette occasion, car j’étais à l’Élysée pour préparer le délicat et important Conseil européen de cette semaine. Je vous confirme donc que l’État et la Caisse des dépôts et consignations, qui ont souscrit des augmentations de capital pour le Fonds stratégique d’investissement, le FSI, et OSEO, devront libérer le capital considéré d’ici à la fin de 2014.
S’agissant de votre deuxième question, je rappelle les précautions que nous avons prises : la garantie de l’État sur les émissions du nouvel établissement demeure, via l’EPIC. Je vous confirme également que des contacts seront pris par le futur directeur général avec les investisseurs pour leur expliquer que cette garantie demeure.
Je rappelle que le schéma retenu permet de bien séparer les activités de financement et les fonds propres.
Je ne sais pas, au fond, si je vous rejoins pour dire que la BPI sera un « animal à sang chaud », mais je prends note de l’expression, qui a le mérite d’être parlante et de souligner la volonté qui vous inspire au moment de ce vote… (Sourires.)
Je vous rejoins enfin, monsieur le rapporteur général, pour dire que nous attendons beaucoup des nouveaux dirigeants : ils auront un rôle essentiel à jouer pour conduire les opérations délicates, dont, au premier chef, la pleine association des personnels à ce projet.
Nous avons choisi un homme, M. Nicolas Dufourcq, pour conduire une mission de préfiguration. Il a empoigné ce dossier à bras-le-corps et je pense que, s’il réussit, il a vocation à aller plus loin. Je crois qu’il mérite la confiance que j’ai placée en lui. Il a su préparer, parallèlement au vote du projet de loi, une BPI qui tienne la route.
Je vous remercie enfin d’avoir pris l’initiative de prévoir que sera recueilli l’avis de la représentation nationale sur la nomination du dirigeant de la BPI ; il va de soi que cette suggestion sera retenue.
Monsieur le rapporteur pour avis Martial Bourquin, vous avez souligné un point important, un enjeu auquel les instruments existants ne répondent pas : la structuration des filières. Je sais que vous y êtes très attaché.
La BPI pourra le faire, parce qu’elle place sous un pilotage unique les interventions en fonds propres. C’est ainsi que nous pourrons structurer les filières, à l'échelle nationale, mais également au niveau régional, puisque nous incluons le FSI et le FSI Régions.
Vous avez mentionné un autre point important à mes yeux, monsieur le rapporteur pour avis, en soulignant que ce projet répond à une demande des entreprises. À cet égard, je ne peux m’empêcher de considérer comme des prétextes les arguments qui poussent l’opposition à voter contre ce texte.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je vous répondrai tout à l’heure, mais je regrette que vous ayez annoncé dès à présent votre intention de voter contre le texte, avant même le débat. Prenez-vous en compte, par exemple, le fait que la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, la CGPME, réclame ce projet ? Certains d’entre vous contesteront assurément la création de la BPI, mais ils devront ensuite s’expliquer auprès des entreprises sur les motifs les conduisant à refuser un projet qui va dans le sens des aspirations, des besoins et des demandes des entrepreneurs de ce pays, notamment des PME, qui, je le répète, sont le fer de lance de l’économie française, et qui doivent l’être davantage encore à l’avenir.
En effet, notre projet est bien de faire monter en gamme nos entreprises, d’amener patiemment vers l’innovation et l’exportation de plus en plus de petites et moyennes entreprises, devenues des ETI, c'est-à-dire des entreprises de taille intermédiaire, puis des sociétés plus grosses encore.
Quand nous nous comparons avec l’Allemagne – nous aimons bien le faire, à raison d'ailleurs –, nous nous apercevons que le chaînon manquant, ce sont les entreprises formant le Mittelstand. Nous avons énormément de petites entreprises de qualité, de grandes entreprises leaders, mais nous sommes incontestablement en retard sur ce segment-là. C’est bien cette montée en gamme que la BPI a vocation à accompagner, et c’est la raison pour laquelle, comme vous l’avez dit, les entreprises réclament sa création.
Je remercie enfin, par avance, M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques de certains de ses amendements. Je sais que les travaux de la commission dont il est membre ont abouti, par exemple, à une proposition de synthèse sur la gouvernance régionale de la BPI qui, je peux le dire d’ores et déjà, sera accueillie favorablement par le Gouvernement.
Je vous rejoins pour dire que nous avons eu, à l’Assemblée nationale, un travail constructif sur les missions de la BPI. L’un des acquis des débats menés devant la chambre saisie en premier lieu est d’avoir souligné que la BPI, c’est des produits financiers et de l’accompagnement.
Pour conclure sur votre intervention, monsieur le rapporteur pour avis, je vous rejoins pour souhaiter que la BPI soit victime de son succès. Toutefois, je confirme en même temps qu’elle ne répond pas à tous les problèmes. Il ne faut pas semer d’illusions – je reviendrai ultérieurement sur les références cinématographiques du président de la commission des finances !
En revanche, nous avons une grande ambition : répondre aux besoins financiers des collectivités territoriales. Voilà quelques semaines, j’ai présenté à Dijon, en compagnie du président du conseil régional, François Patriat, ainsi que du maire de Dijon et président du Grand Dijon, François Rebsamen, un plan précis pour répondre à ces besoins. Je suis tout prêt à venir m’en expliquer devant le Sénat, qui, je le sais, est attaché à cette question.
En ce qui concerne les délais de paiement, le Gouvernement a pris des initiatives. Je ne doute pas que la mission qui vous sera confiée, et qui porte sur une politique d’achat responsable dans les filières industrielles, nous permettra d’aller plus loin encore.
Monsieur Vairetto, je profite de votre intervention pour revenir sur le rôle de la BPI en matière de transition écologique et énergétique. Vous n’ignorez pas que les débats à l’Assemblée ont permis de faire progresser très fortement la prise en compte de cette dimension dans le projet de loi – je suis certain que M. Placé en conviendra également. C’est un engagement du Président de la République qui trouve aujourd’hui sa traduction dans la loi, au lendemain de la conférence de Doha qui n’aura pas permis d’aller aussi loin que l’Europe l’aurait souhaité. Il y a là, je crois, un symbole fort.
Vous avez mentionné un chiffre frappant, issu du rapport Parent : il existe plus de 800 dispositifs régionaux de financement des entreprises. Quand on les ajoute à la myriade des interventions de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations, on voit bien qu’il y a incontestablement matière à réforme, à mise en cohérence, à mise en commun des moyens et à rationalisation au service des clients de la BPI, à savoir les entrepreneurs.
J’en profite pour rendre hommage à M. Parent et à sa mission, dont le rapport, s’il présente bien entendu des limites, a aussi de grandes qualités. Sans ce travail, nous ne serions pas là aujourd’hui, car il fallait une base à partir de laquelle élargir encore la réflexion.
À ceux qui pensent que cette rationalisation est superflue, j’oppose un démenti formel. Elle est utile, elle est nécessaire, et ce sera la mission de la BPI.
Je me tourne à présent vers le président de la commission des finances, M. Marini. Avec son talent si singulier,…