M. Albéric de Montgolfier. On vous suivra !
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° I-345 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Oui, monsieur le président. Je demeure convaincu que ce sont les catégories les plus aisées qui utilisent les vols intérieurs. (Exclamations sur de nombreuses travées.)
M. Francis Delattre. Y compris les sénateurs !
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Je suis obligé de réagir. Dans une région comme la mienne, comment faire sans l’avion ? Les aéroports sont nécessaires à la desserte de certains territoires. Les TGV ne vont pas partout ! (Nombreuses marques d’approbation.)
C’est pourquoi je voterai contre cet amendement.
M. Francis Delattre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je suis scandalisé par cet amendement ! (Ah ! sur les travées de l’UMP.) Nous sommes là dans les excès de l’idéologie. Nous savons que nos collègues du groupe écologiste veulent supprimer les aéroports ou en tout cas empêcher la construction de nouveaux, fût-ce au mépris de la loi républicaine. (M. André Gattolin s’exclame.)
L’industrie aéronautique est l’un des fleurons de notre pays. Elle travaille beaucoup pour produire de nouveaux modèles plus respectueux de l’environnement et moins consommateurs d’énergie. En outre, certains de nos territoires ont besoin d’être désenclavés, ce qui passe par le transport aérien.
J’entends que la rédaction de votre amendement exclut du champ de la taxation proposée les liaisons soumises aux obligations de service public. Encore heureux !
Mme Catherine Procaccia. La Corse !
M. Jacques Mézard. On connaît cependant la fragilité de ce classement. Pour des raisons budgétaires, d’ailleurs compréhensibles, un certain nombre de liaisons ont cessé d’être considérées comme des lignes d’aménagement du territoire.
Certes, il est facile de se déplacer à vélo entre le café de Flore et le jardin du Luxembourg ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe écologiste.)
M. Francis Delattre. Ah, les Germanopratins !
M. Jacques Mézard. Mais il est des territoires où il faut souvent aujourd’hui plus de dix heures pour rejoindre Paris par le train, quand le trajet ne durait que six heures voilà encore vingt-cinq ans…
Je constate que l’objet de votre amendement mentionne « l’avènement d’un réseau TGV ». Or vous vous êtes souvent opposés aux trains à grande vitesse. Il faudrait être cohérent !
Dans nos régions, nous avons des omnibus qui roulent à moins de 60 kilomètres-heure. Depuis Paris, il faut plus de dix heures de train pour rejoindre notre préfecture ! En outre, la ministre Dominique Voynet a jugé bon de supprimer la disposition législative prévoyant que toute préfecture devait se trouver à moins de quarante-cinq minutes d’une autoroute. La nôtre est encore à plus d’une heure d’un accès autoroutier, et les conditions de desserte sont catastrophiques. Notre seul moyen de rejoindre rapidement Paris, c’est l’avion, même s’il est souvent en retard ! Et vous voulez nous pénaliser encore davantage, par la plus facile des démagogies ! Il faut arrêter, parce que trop, c’est trop !
C’est donc avec conviction que je voterai contre cet amendement, qui dessert l’aménagement du territoire et s’oppose au progrès ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)
M. Francis Delattre. C’était l’amendement « Golfe du Morbihan » !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-324, présenté par MM. Labbé, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 265 bis A du code des douanes est abrogé.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement a pour objet de supprimer l’exonération fiscale accordée aux agrocarburants, dont la production présente en effet un bilan énergétique, économique et écologique plus que discutable. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Selon un rapport de l’Inspection générale des finances publié en août 2011, la filière des agrocarburants bénéficie d’une véritable collusion de soutiens : défiscalisation des biocarburants, rente de la taxe générale sur les activités polluantes, notamment pour le biodiesel, obligation communautaire d’intégrer les biocarburants dans la production d’énergies renouvelables à hauteur de 10 %.
Par ailleurs, compte tenu de leur faible efficacité énergétique – maintenant prouvée –, les agrocarburants industriels ne peuvent pas contribuer de manière significative à l’indépendance énergétique nationale. Leur coût de production est en effet fortement corrélé avec le prix de l’énergie fossile.
Quant à l’effet redistributif de ce cadeau fiscal, parce que c’en est un, il est très limité et ne parvient pas, ou très peu, jusqu’aux consommateurs. La rente économique est captée par le producteur majeur d’agrocarburants.
Enfin, la production d’agrocarburants contribue à la forte augmentation des prix mondiaux des denrées agricoles, et donc à celle des prix des produits alimentaires consommés en France et partout dans le monde. Lorsque l’on prend en compte l’important changement d’affectation des sols qu’elle induit au détriment des cultures vivrières ou des forêts, en Indonésie ou au Brésil par exemple, on s’aperçoit que les agrocarburants, improprement appelés « biocarburants », ont un impact environnemental désastreux, notamment au regard de la production de gaz à effet de serre.
Ainsi, il est proposé de mettre fin à cette exonération fiscale, ce qui permettrait en outre à notre pays d’économiser près de 400 millions d’euros.
M. le président. L’amendement n° I-425 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol et MM. Rome, Teston, Chastan, Esnol, Fichet, Le Vern, Ries, Kerdraon, Filleul, Leconte, Anziani, Tuheiava, Patient, Chiron, Daunis et Carvounas, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la colonne « 2013 » du tableau constituant le second alinéa du 1 de l’article 265 bis A du code des douanes, aux 1, 2 et 5, le chiffre : « 8,00 » est remplacé par le chiffre : « 6,00 ».
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Cet amendement ne vise que le biodiesel, le bioéthanol étant exclu du champ de son dispositif.
S’il est clair que soutenir la création de nouvelles filières et y intervenir économiquement relève bien du rôle de la puissance publique, il arrive un moment où elles ont atteint un degré de développement et une autosuffisance tels que les subventions publiques qui leur sont versées ne sont plus que des rentes de situation et des aides indues. Personne ne le conteste, ni la Cour des comptes, qui a produit un rapport fort intéressant sur ce sujet, ni le Gouvernement, qui l’a évoqué lors de la Conférence environnementale et a d’ailleurs annoncé son intention de réduire les subventions à la filière du biodiesel à partir de 2014.
L’argent qui est injustement accordé à la filière ici visée n’est pas disponible pour intervenir dans d’autres secteurs, qui en auraient pourtant besoin.
Notre amendement diffère de celui de nos collègues du groupe écologiste en ce que nous admettons que la filière du bioéthanol est encore un peu fragile. En revanche, il est possible de commencer à réduire dès cette année les subventions accordées à la filière du biodiesel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Certes, ces amendements ont du sens,…
Mme Catherine Procaccia. Ça commence mal !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … mais je dois souligner que, lors de la Conférence environnementale, le Gouvernement a annoncé son intention de réduire cet avantage fiscal à partir de 2014 et de le supprimer en 2015. Peut-être faudrait-il accélérer ce calendrier, mais il n’en demeure pas moins qu’il semble inopportun de supprimer immédiatement et de façon non ciblée le dispositif. La commission souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. La situation est claire : lors de la Conférence environnementale, un plan a été proposé et des décisions ont été annoncées par le Premier ministre en vue de la mise en extinction progressive de ces aides fiscales dont on sait quand et pourquoi elles avaient été instaurées.
On peut porter des jugements négatifs sur cette filière industrielle. On sait quelles peuvent être les conséquences préjudiciables de la production de biocarburants, notamment pour les cultures vivrières, essentiellement en dehors de nos frontières.
Il demeure toutefois qu’un processus industriel a été élaboré, que des investissements ont été réalisés et que des emplois dépendent de cette filière. Par conséquent, s’il peut paraître souhaitable de laisser celle-ci prospérer, si elle le peut, sans aides fiscales, il me semble judicieux, d'un point de vue industriel et économique, d'envisager une extinction progressive, et non pas brutale, de ces aides.
Monsieur Labbé, madame Rossignol, le Gouvernement demande donc le retrait des amendements que vous avez présentés, afin de laisser se dérouler le plan que le Gouvernement a imaginé et dont on connaît les modalités. Son calendrier ne semble pas vous satisfaire ; pourtant, il est assez proche de ce que vous souhaitez.
Le compromis auquel est parvenu le Gouvernement, qui consiste à préserver cette filière industrielle tout en prévoyant une extinction à terme des aides de l'État, devrait vous donner satisfaction, d’autant qu’il s’appuie sur un calendrier équilibré, respectant à la fois les impératifs des finances publiques, les exigences environnementales et des considérations industrielles que l'on ne saurait méconnaître.
M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement n° I-324 est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Ma décision dépendra de celle de Mme Rossignol : je retirerai mon amendement si elle maintient le sien. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Madame Rossignol, l'amendement n° I-425 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Laurence Rossignol. Il s'agit d'un amendement ciblé. Cette filière, sur laquelle je n’ai porté aucun jugement dans mon intervention, va bien. Elle peut aujourd’hui poursuivre son développement sans les aides de l'État.
Dans cette période où les contraintes sur les finances publiques sont extrêmement fortes – elles se sont encore renforcées depuis la tenue de la Conférence environnementale –, je pense que l’intérêt collectif commande d’accélérer le calendrier. Nous demandons non pas une suppression pure et simple de l’aide fiscale accordée, mais une réduction entrant en vigueur dès 2013.
Nous maintenons donc notre amendement, monsieur le président.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Très bien !
M. Joël Labbé. Nous retirons l’amendement n° I-324, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° I-324 est retiré.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote sur l'amendement n° I-425 rectifié bis.
M. Albéric de Montgolfier. Cet amendement pose un véritable problème, puisqu'il vise à réduire dès maintenant l’exonération de TICPE de 8 euros à 6 euros par hectolitre de biodiesel. Or, M. le ministre l'a souligné, cette mesure va clairement à l'encontre de l'accord gouvernemental, qui ne prévoit la réduction de l’exonération qu'à partir de 2014.
Ce manque de cohérence de la majorité m’étonne quelque peu ! Les décisions qui ont été annoncées par le ministre de l'agriculture au mois de septembre dernier représentent déjà un poids considérable pour la filière, notamment au regard des investissements qui ont été engagés en faveur du développement des biocarburants de seconde génération.
Je rappelle d’ailleurs que le Gouvernement avait souligné que ces décisions interviendraient « sans remise en cause des investissements réalisés et des emplois liés à cette filière ». En d'autres termes, une suppression précoce et brutale de cette exonération pourrait avoir des conséquences très importantes pour la pérennité de cette filière, pourtant source d'emplois – elle en a déjà créé plus de 30 000 – et d'innovation.
Le groupe UMP votera donc contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-425 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons déjà examiné 175 amendements ; il en reste 175. Je vous remercie tous du bon travail effectué.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 26 novembre 2012, à dix heures, à quatorze heures trente et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2013, adopté par l’Assemblée nationale (n° 147, 2012-2013) ;
Suite de l’examen des articles de la première partie ;
Rapport de M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances (n° 148, 2012-2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART