M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
Mme Fabienne Keller. … gages de lisibilité pour les acteurs économiques.
Au-delà des reniements et des contradictions, nous avons du mal à comprendre vos choix et quelque peine à les mettre en regard de vos annonces.
Je prendrai quelques exemples pour illustrer mon propos, en commençant par la question du coût du travail.
Le rapport Gallois est très habile sur ce point : il ne dit pas explicitement que l’augmentation du coût du travail en France est un handicap pour la compétitivité de nos entreprises par rapport à leurs concurrentes, probablement afin de ne pas froisser une partie de la majorité gouvernementale et des syndicats.
Néanmoins, il préconise de transférer 30 milliards d’euros de charges sociales. Or, qu’avez-vous fait, monsieur le ministre, depuis l’été dernier ? Vous avez augmenté le coût du travail en donnant un coup de pouce au SMIC et, surtout, en supprimant brutalement les exonérations de cotisations sociales pour les heures supplémentaires.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Eh oui !
Mme Fabienne Keller. Et maintenant, vous nous proposez le contraire,…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Voilà !
Mme Fabienne Keller. … au travers d’allégements de charges de 20 milliards d’euros !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est le tournant !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Non, c’est la continuité !
Mme Fabienne Keller. Quand on veut prendre un virage à 180 degrés, il est vrai qu’on ne peut le faire d’un seul mouvement : le projet de loi de finances pour 2013 marque peut-être une première étape, avant le demi-tour complet…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela donne mal au cœur ! (Sourires.)
Mme Fabienne Keller. Cet allégement de charges prend la forme assez compliquée d’un crédit d’impôt. Les chefs d’entreprise que nous avons, les uns et les autres, pu rencontrer se demandent vraiment comment cela va fonctionner : par exemple, cette créance sur l’État pourra-t-elle être escomptée ? Aujourd'hui, rien n’est moins certain.
Deuxième exemple concret, celui de la TVA « compétitivité ».
En juillet dernier, vous avez supprimé une mesure que le président Marini qualifierait sans doute de tardive mais courageuse,…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Absolument !
Mme Fabienne Keller. … et ce par idéologie ; c’est bien dommage.
Puis voilà que, sous l’influence du miraculeux rapport Gallois, vous prenez le virage, vous faites marche arrière !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Un virage en marche arrière ? C’est un peu compliqué !
M. Francis Delattre. C’est dangereux, oui !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. En tout cas, on a mal au cœur !
Mme Fabienne Keller. Monsieur le ministre, nous avons du mal à suivre et nous ne croyons pas du tout que tout cela puisse être sincère !
M. Gérard Miquel. Vous verrez le résultat !
Mme Fabienne Keller. Le résultat, nous le redoutons, mon cher collègue !
Le Gouvernement nous propose un substitut à la TVA « compétitivité ». Monsieur le ministre, permettez-moi de vous rappeler, puisque vous avez évoqué le passé, que le candidat François Hollande avait promis de ne pas augmenter la TVA. D’ailleurs, les médias se sont bien amusés à rapprocher ces déclarations des récentes annonces… (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx acquiesce.)
Mme Fabienne Keller. Dans le dispositif conçu par le Gouvernement, on voit bien la hausse de la TVA, mais pas du tout la baisse des charges pour les entreprises !
Mon troisième exemple touche à la fiscalité des entreprises.
Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit d’alourdir de 10 milliards d’euros la charge fiscale des entreprises, toutes tailles confondues. Cette somme s’ajoutant aux 10 milliards d’euros de prélèvements déjà inscrits dans la loi de finances rectificative de juillet, la facture s’élève au total à 20 milliards d’euros.
Mes chers collègues, une telle hausse des prélèvements aura des effets désastreux sur l’investissement et sur la croissance dès l’an prochain. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)
Mais vous promettez aux entreprises qu’après avoir avalé cette potion amère, peut-être fatale pour certaines d’entre elles, elles bénéficieront d’une restitution en 2014 sous la forme d’un crédit d’impôt d’un montant à peu près équivalent. Quelle est la logique économique suivie ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Elle est assez douteuse…
Mme Fabienne Keller. Quant à la limitation de la déductibilité des intérêts d’emprunt, outre qu’elle handicape certains secteurs et le développement à l’international, elle engage les entreprises dans une voie sans issue, puisque leurs faibles marges sont un obstacle à l’autofinancement. Dans ces conditions, comment parviendront-elles à financer leurs investissements ?
Mon quatrième exemple a trait à la fiscalité de l’épargne.
M. Gallois préconise d’améliorer la fiscalité de l’épargne longue en actions ; sur ce sujet encore, je crois entendre le président Marini…
Monsieur le ministre, en bon élève de M. Gallois, vous annoncez une réforme de la fiscalité de l’épargne. Soit, mais nous n’en voyons aucune trace dans le projet de loi de finances qui nous est soumis.
Par contre, en augmentant le plafond du livret A, vous avez étendu une niche fiscale au bénéfice de ceux qui disposent déjà d’une épargne substantielle. En outre, vous avez méconnu le fait que le déficit de logements sociaux tient non pas à un manque de financement, mais essentiellement à un manque de disponibilité foncière. Vous captez donc une partie de la ressource au détriment du financement de l’économie !
Quelle réforme de la fiscalité de l’épargne et du patrimoine allez-vous entreprendre ? Nous n’en savons rien, ce projet de loi de finances ne nous apporte aucune précision à cet égard ; nous devons nous contenter d’annonces très générales.
Il est vrai que vous n’avez guère de marge de manœuvre, puisque vous avez déjà fortement augmenté la CSG pour les revenus du capital et que votre projet d’aligner la fiscalité du capital sur celle du travail pourrait déboucher – mais à ce jour, nous ne savons rien de précis – sur des niveaux d’imposition confiscatoires.
Mon cinquième exemple concerne la participation, un domaine dans lequel les choix du Gouvernement auront des effets destructeurs pour les salariés de nos entreprises.
Là encore, le rapport Gallois brille par sa diplomatie. Il plaide pour l’amélioration du dialogue social dans notre pays. Les syndicats sont concernés au premier chef, mais la qualité du dialogue social se décline aussi à l’échelon de chaque entreprise.
Or quelle a été la première mesure prise par le Gouvernement l’été dernier ? Une mesure catastrophique pour le dialogue social ! Je veux parler de la forte augmentation du forfait social à la charge de l’employeur, qui a d’ores et déjà pour conséquence de limiter le recours à l’intéressement et à la participation dans certaines entreprises.
Ces formes de rémunération complémentaires sont pourtant un facteur important d’implication et de mobilisation des salariés au sein de l’entreprise. Je rappelle qu’elles ont été mises en place dès les années soixante pour assurer une convergence entre les intérêts des propriétaires de l’entreprise et ceux des salariés.
Cet alourdissement est tout à fait pénalisant. Le Gouvernement annonce une inflexion, mais rien ne figure à ce titre dans le projet de loi de finances !
Mon sixième exemple a trait à la baisse de la dépense publique, sujet sur lequel, monsieur le ministre, vous n’avez pas été très convaincant tout à l’heure.
Vous promettez de réduire la dépense publique de 10 milliards d’euros, mais, comme le dirait Philippe Marini, ces économies ne sont pas documentées précisément…
Comme par magie, vous parvenez, à effectifs constants, à stabiliser la masse salariale de la fonction publique. Aucun responsable de collectivité territoriale ne parvient à réussir ce tour de passe-passe, puisque les progrès statutaires et l’application du glissement vieillesse-technicité contribuent à l’augmentation de la masse salariale.
Nous ne disposons donc d’aucune information sur les moyens que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour maîtriser la dépense publique, en particulier la masse des rémunérations des fonctionnaires.
À un niveau d’endettement de 90 % du PIB, la baisse des dépenses publiques n’est pas une variable d’ajustement ; elle est une politique en soi, garante du respect de la trajectoire de retour à l’équilibre de nos finances publiques.
J’ajoute que vous ne disposez d’aucun outil de pilotage, puisque vous avez jeté aux orties la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui fonctionnait.
Mme Cécile Cukierman. À quel prix !
Mme Marie-France Beaufils. Avec des conséquences très douloureuses pour les services !
Mme Fabienne Keller. Vous parlez de concertation, mais on ne sait pas de laquelle il s’agit ; les principes et les méthodes d’action ne sont pas définis à ce jour.
Mon septième exemple porte sur la stabilité de la législation.
Monsieur le ministre, vous semblez découvrir l’importance de la stabilité législative et réglementaire dans votre pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi. En la matière, vous avez fait jusqu’ici exactement l’inverse de ce qui est souhaitable ! L’instabilité fiscale qui résultera de la mise en œuvre du projet de loi de finances pour 2013, dont certaines dispositions auront de surcroît un effet rétroactif, sera pénalisante pour nos entreprises.
À cet égard, je souhaite apporter mon témoignage de frontalière. J’ai réalisé, avec deux collègues parlementaires, une étude sur les frontières des États de l’Union européenne avec la Suisse. D’autres études fort bien documentées, menées par la préfecture régionale de Franche-Comté, les chambres de commerce du Haut-Doubs et de la Moselle et un cabinet d’études existent également sur le même sujet.
Tous ces travaux démontrent que si la règle générale, pour les entreprises situées près de la Suisse ou du Luxembourg, est aujourd’hui de s’installer de l’autre côté de la frontière, alors même que les rémunérations sont plus élevées dans ces pays, cela tient d’une part au niveau de la fiscalité, d’autre part à l’instabilité des dispositifs fiscaux dans notre pays.
Monsieur le ministre, je vous invite à prendre connaissance de ces études, qui sont tout à fait éloquentes. Votre fébrilité à concevoir, à supprimer ou à ajouter des dispositifs fiscaux concernant les entreprises est extrêmement destructrice !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce phénomène n’a rien de nouveau !
M. Gérard Miquel. C’était pareil avant !
Mme Fabienne Keller. Monsieur le ministre, nous vous proposons d’agir immédiatement et de nous présenter un projet de budget cohérent avec les annonces du Gouvernement. Pour que la « révolution copernicienne » dont vous avez parlé ne soit pas un énième slogan, il va falloir que vous lui donniez une traduction concrète ! (M. le président de la commission des finances acquiesce.)
Il faudra aussi que vous l’expliquiez à votre majorité. À cet égard, je comprends que la situation ait été quelque peu compliquée par un mauvais timing, puisque le rapport Gallois a été publié après la présentation du projet de loi de finances pour 2013…
Il faudra surtout faire preuve de pédagogie à l’égard de nos concitoyens et de nos chefs d’entreprise, au lieu de leur tenir des propos un peu généraux, voire simplistes, quand ils ne sont pas méprisants à l’égard des entreprises : je pense ici au signal terrifiant donné à la filière automobile par le ministre du redressement productif dans un bassin d’emploi que je connais bien.
Au cours de son audition par les commissions des finances et des affaires économiques du Sénat, M. Gallois a déclaré que ce n’est pas seulement un choc de compétitivité qu’il s’agit de créer, mais aussi un choc de confiance. Nous avons besoin de retrouver la confiance !
D’une certaine manière, le groupe UMP pourrait se réjouir de changements de doctrine que vous refusez d’inscrire dans le projet de loi de finances mais auxquels vous allez peut-être donner rapidement une portée concrète. Mais il y a vraiment un problème de méthode : monsieur le ministre, pourquoi les mesures du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi ne figurent-elles pas dans le projet de loi de finances ? Pourquoi ne proposez-vous pas une baisse claire et simple des charges ? Le crédit d’impôt que vous voulez mettre en place ressemble à une usine à gaz !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cette formule a été employée par M. Piketty !
Mme Fabienne Keller. Bonne référence !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le président de la commission des finances, je ne savais pas que vous vous inspiriez des travaux de M. Piketty !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je les suis toujours avec intérêt et, en l’occurrence, j’ai trouvé que sa formule était bonne !
Mme Fabienne Keller. Il est vrai que nous commençons à être habitués aux usines à gaz, puisque, voilà quelques semaines, nous avons examiné la proposition de loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre, dont le dispositif, totalement inapplicable, consistait à mettre l’ensemble des ménages de France sous coupe réglée par le biais d’une tarification progressive de leur consommation d’énergie. L’absence de visibilité affaiblit l’efficacité.
Monsieur le ministre, pourquoi reportez-vous les réformes nécessaires alors que vous-même venez d’expliquer combien il serait utile de redresser la barre, notamment pour ce qui concerne notre industrie ?
Comment allez-vous financer le soutien à la compétitivité, alors que vous vous êtes vous-même lié les mains en commençant par alourdir fortement la fiscalité des entreprises et des ménages ?
Pourquoi n’abordez-vous pas franchement deux grands sujets liés à celui de l’amélioration de la compétitivité de nos entreprises, à savoir la réforme de la protection sociale et la réduction de la dépense publique ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En clair, tout ce que vous n’avez pas fait !
Mme Fabienne Keller. Monsieur le ministre, nous sommes au regret de constater que, au regard de vos propres déclarations, le projet de loi de finances pour 2013 que vous nous présentez est déjà dépassé, nul et non avenu. Mes collègues Albéric de Montgolfier, Gérard Larcher, Jean Arthuis et Marie-Hélène Des Esgaulx n’ont pas dit autre chose.
C’est pourquoi nous demandons le renvoi de ce texte à la commission. Monsieur le ministre, nous vous prenons au mot : le changement, c’est maintenant ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Germain, contre la motion.
M. Jean Germain. Nous nous doutions depuis quelque temps que l’UMP ne sait pas compter ; nous nous apercevons ce soir que, de plus, certains de ses membres ne savent pas lire ! (M. le président de la commission des finances proteste.)
Ces six derniers mois, un chemin a été tracé, d’abord avec la création du Mécanisme européen de stabilité, puis avec l’élaboration du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 et du projet de loi de finances pour 2013, enfin avec l’annonce, par le Premier ministre, des mesures qui seront prises dans le cadre du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi : crédit d’impôt, hausse de la TVA, économies budgétaires.
Dès la publication du rapport Gallois, l’UMP s’était inquiétée : allait-il être appliqué ? Maintenant qu’elle sait qu’il va l’être, l’UMP s’inquiète toujours !
Mme Fabienne Keller et M. Francis Delattre. Non, justement, vous ne l’appliquez pas !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ce n’est pas en 2014, mais maintenant qu’il faut l’appliquer !
M. Jean Germain. Je crois que le ministre du budget a été clair, sauf peut-être pour des personnes qui ont décidé de ne rien comprendre… (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Soyez charitable, monsieur le professeur !
M. Jean Germain. Monsieur l’inspecteur des finances, soyez-le vous aussi ; ce n’est pas toujours le cas !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n’est pas la peine d’être désagréable pour le plaisir, cela ne sert à rien !
M. Jean Germain. Ce n’est pas un plaisir, en ce qui me concerne, c’est simplement une réaction !
Le ministre du budget l’a très simplement expliqué tout à l’heure, le crédit d’impôt, qui s’appliquera dès 2013, trouvera sa traduction budgétaire en 2014.
Mme Fabienne Keller. Parlez-en aux entreprises !
M. Jean Germain. Dans les semaines qui viennent, nous aurons justement à discuter des modalités pratiques de la mise en œuvre du crédit d’impôt. Par conséquent, les choses sont claires.
Plutôt que de demander le renvoi du texte à la commission, j’appelle nos collègues de l’opposition à engager ce que nombre d’entre eux ont réclamé tout à l’heure, à savoir un dialogue constructif pour l’établissement du budget. Il ne pourra se nouer que si la discussion de ce projet de loi de finances se poursuit. Le travail parlementaire pourra alors être fructueux.
Je ne prolongerai pas mon propos. En ce qui nous concerne, nous ne voyons pas pourquoi il y aurait lieu de renvoyer ce projet de loi de finances à la commission. Aussi nous opposons-nous à cette motion. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Fabienne Keller a défendu avec toute la conviction qu’on lui connaît une motion tendant au renvoi du texte à la commission.
Si elle était adoptée, le rapporteur général serait amené…
Plusieurs sénateurs de l’UMP. … à travailler !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … à rédiger un nouveau rapport. Sachant que celui qui vient d’être déposé compte quatre cents pages et a exigé de nombreuses semaines de travail, quelques jours me seraient pour cela nécessaires, ce qui repousserait la suite de nos travaux jusqu’à mercredi ou jeudi !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Vous vous posiez moins de questions quand vous étiez dans l’opposition !
M. Francis Delattre. Plus le temps d’aller à la messe !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Par conséquent, d’un point de vue purement pratique, il serait difficile de faire droit à votre sollicitation sans nuire à la bonne harmonie de notre commission des finances, dont les membres devraient attendre que j’aie fini mon travail !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il y a six mois, cela ne vous posait pas tant de problèmes !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Toutefois, sur le fond, il y a tout de même matière à se réjouir de cette demande.
En effet, le groupe UMP juge excellentes les propositions du Gouvernement. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On n’a pas dit cela !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Celles du rapport Gallois, que vous n’appliquez pas !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Elles font suite à l’excellent rapport Gallois. En effet, le 6 novembre, le lendemain même de la parution de celui-ci, le Gouvernement a présenté un ensemble de mesures qu’il entend mettre en œuvre rapidement.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il n’y a pas le crédit d’impôt, c’est bizarre !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Vous êtes donc de ceux qui souhaitent voir ces mesures appliquées le plus vite possible, au point que vous voudriez les inclure immédiatement dans le projet de loi de finances qui nous est soumis.
Dès lors, nous ne pouvons que nous satisfaire de cette attitude, puisque cela emporte que vous reconnaissez le bien-fondé de l’action que le Gouvernement souhaite conduire.
Pour autant, du point de vue du calendrier budgétaire, il est tout à fait impossible d’accéder à votre demande, en raison de la primauté de l’Assemblée nationale sur le Sénat en matière financière. En vertu de ce principe, la Haute Assemblée ne peut introduire dans le projet de loi de finances un dispositif qui n’aurait pas été au préalable examiné par les députés. Cet argument m’amène à préconiser le rejet de la motion.
Par ailleurs, j’observe que le projet de loi de finances pour 2013 a suscité un très grand intérêt de la part de l’ensemble de nos collègues. En effet, 428 amendements ont été déposés, contre quelque 250 les années précédentes. C’est dire à quel point le débat qui nous réunira dans les jours et les nuits à venir s’annonce riche !
Pour toutes ces raisons, la commission des finances invite le Sénat à rejeter cette motion tendant au renvoi à la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement souhaite lui aussi que la Haute Assemblée rejette cette motion tendant au renvoi à la commission.
Tout d’abord, le Gouvernement souhaite pouvoir débattre le plus vite possible avec la Haute Assemblée, dont les réflexions et les propositions permettront d’enrichir le texte adopté par l’Assemblée nationale.
Ensuite, la demande de renvoi à la commission se fonde sur l’objection selon laquelle les mesures propres à favoriser l’amélioration de la compétitivité ne figurent pas dans ce projet de loi de finances. Or, comme l’a très bien dit le rapporteur général, ce motif peut en toute objectivité être récusé.
En effet, en raison de la primauté de l’Assemblée nationale sur le Sénat en matière financière, ce dernier ne saurait introduire de telles dispositions dans le projet de loi de finances, dès lors que les députés n’en auraient pas été saisis au préalable. Elles seraient immanquablement censurées par le Conseil constitutionnel, ce qui retarderait davantage encore l’application de mesures en faveur de nos entreprises. Cela irait donc à l’encontre de ce que vous souhaitez, madame Keller !
Quant au recours à une loi de finances rectificative, que vous avez dénoncé, la chose n’est pas si scandaleuse ! Je crois me souvenir que, en 2008, un projet de loi de finances rectificative avait été déposé avant même que la loi de finances initiale n’ait été votée ! La démarche du Gouvernement me semble plus respectueuse du Parlement que ce que l’on a pu connaître entre 2007 et 2012 !
Par conséquent, le Gouvernement appelle au rejet de cette motion tendant au renvoi à la commission. Quelle que soit la qualité des membres de celle-ci, je ne vois pas ce qu’un tel renvoi pourrait apporter. Je vous invite donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à poursuivre un débat dont je ne doute pas qu’il sera de qualité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Je rappelle qu’aucune explication de vote n’est admise.
Je mets aux voix la motion n° I-169, tendant au renvoi à la commission.
J’ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 38 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 173 |
Pour l’adoption | 169 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme Fabienne Keller. Dommage !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n’est pas passé loin !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je l’ai échappé belle ! (Sourires.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.