Article 24
À la première phrase du deuxième alinéa du I de l’article 24 de la loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 précitée, les mots : « de l’État » sont remplacés par les mots : « des administrations de l’État et de membres du Parlement ».
M. le président. L'amendement n° 50, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. L’article 24 ajoute de la complexité et de la lourdeur, en prévoyant que des parlementaires siégeront au côté des représentants des associations des collectivités territoriales et de ceux des collectivités ou des syndicats mixtes. À mon sens, un tel accroissement de l’effectif du comité nuirait à l’efficacité de celui-ci dans son rôle de formulation d’avis.
Par ailleurs, je constate que les parlementaires sont déjà largement associés au comité des réseaux d’initiative publique. Ainsi, M. Rome, en tant que représentant de l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel, l’AVICCA, M. Pintat, au titre de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, M. Christian Paul, en tant que représentant de l’association des régions de France, en sont déjà membres.
Pour ces raisons, nous jugeons préférable de maintenir la composition actuelle : elle nous paraît équilibrée et inclut déjà l’ensemble des parties concernées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. Monsieur le ministre, je ne suis pas certain que nous parlions de la même chose : il s’agit ici du comité de gestion du FANT, qui n’a pas encore été créé.
Cela étant, la commission ne considère pas que l’adjonction de deux représentants du Parlement alourdira le fonctionnement de l’instance, d’autant que, dans notre esprit, ils peuvent très bien se substituer à des fonctionnaires, à effectif constant. Affirmer comme vous le faites, monsieur le ministre, que la présence de parlementaires complexifierait les choses peut même apparaître désobligeant !
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 24.
(L'article 24 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 24
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1 rectifié est présenté par MM. Magras, Laufoaulu, Fleming, Cointat et Beaumont, Mme Bouchart et MM. Ferrand, Grignon, Revet et Houpert.
L'amendement n° 5 rectifié est présenté par MM. J. Gillot, Desplan, Antoinette, Patient et S. Larcher.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre V du titre II du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un article L. 1425-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 1425-4. – I. – Les capacités des réseaux de communications électroniques établis dans les départements et les collectivités d’outre-mer par les collectivités territoriales et leurs groupements au sens de l’article L. 1425-1, sont mises à disposition de tout opérateur de communications électroniques déclaré auprès de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes qui en fait la demande.
« Le tarif de mise à disposition doit permettre de favoriser l’abaissement des coûts pour les consommateurs. Il est défini selon des modalités transparentes et non discriminatoires.
« L’exploitant en charge de ces réseaux est tenu de répondre à l’opérateur qui en a fait la demande dans les quinze jours suivant la réception de la demande. En l’absence de réponse de l’exploitant, les dispositions de l’article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques s’appliquent.
« La mise à disposition fait l’objet d’une convention entre les parties que l’exploitant notifie sans délai à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et à la collectivité territoriale concernée.
« Le présent I s’applique aux contrats en cours passés en application de l’article L. 1425-1 du présent code. Est exclu tout dédommagement du préjudice causé par l’application du même I.
« II. – Dans les départements et collectivités d’outre-mer, une personne morale ne peut à la fois exercer une activité d’opérateur de communications électroniques et être chargée de l’exploitation des réseaux de communications électroniques ouverts au public dans les conditions prévues au I du présent article.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes est chargée de la mise en œuvre du présent II.
« III. – Chaque année, les bénéficiaires de subventions publiques pour des activités de réseaux de communications électroniques dans les départements et collectivités d’outre-mer doivent établir et rendre public un rapport sur le montant et l’usage de ces subventions ainsi que leur contribution à l’abaissement du coût des communications électroniques. Ce rapport est adressé au Gouvernement qui en informe le Parlement. »
La parole est à M. Michel Magras, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.
M. Michel Magras. Outre-mer, l’instauration d’un réseau public de communications électroniques visait à favoriser l’accès aux nouvelles technologies de l’information, bien entendu, mais aussi l’abaissement des prix pour le consommateur, grâce au jeu de la concurrence.
Or, aujourd’hui, nous constatons qu’une situation de duopole s’est instaurée, avec, d’un côté, un opérateur historique disposant de son propre réseau, et, de l’autre, un délégataire de la gestion du câble, lui-même opérateur de détail.
Nous proposons donc de renforcer les obligations pesant sur le délégataire, afin de faciliter l’accès des opérateurs concurrents au câble.
L’article 3 ter de la présente proposition de loi opère une avancée en permettant à l’entité adjudicatrice d’attribuer l’utilisation du réseau en connaissance des conditions commerciales des offres de détail.
Toutefois, à mon sens, cette disposition demeure insuffisante dans le contexte ultramarin. En effet, compte tenu de leur étroitesse, les marchés y sont très peu concurrentiels, ce qui favorise la création de situations de monopole. Par conséquent, il convient de fixer le cadre au sein duquel la concurrence pourra s’exercer, en vue d’aboutir non seulement à une amélioration du service, mais aussi à une diminution de son coût pour le consommateur.
Dans cette perspective, mon amendement a pour objet d’une part de rendre incompatible, dans les DOM-COM, la commercialisation des offres de détail avec l’exploitation des réseaux publics dans le cadre d’une délégation de service public, d’autre part de renforcer les obligations de mise à disposition pesant sur l’exploitant délégataire.
Enfin, la mise en place des réseaux publics ayant fait l’objet d’un investissement public de plus de 60 millions d’euros, il convient de vérifier qu’ils sont exploités conformément aux objectifs fixés. C’est la raison pour laquelle je propose de prévoir la remise d’un rapport annuel.
J’ai bien noté que la commission avait souhaité circonscrire le champ d’application du présent texte à l’Hexagone. Monsieur le rapporteur, je vous prie donc de bien vouloir réviser votre position sur cette question. Compte tenu de l’agenda parlementaire, cette proposition de loi constitue l’un des rares véhicules législatifs propres à accueillir un tel amendement, largement approuvé par nos collègues, notamment ultramarins, M. Gillot en ayant d’ailleurs déposé un identique. Cela témoigne de la nécessité de réviser le dispositif actuellement en vigueur outre-mer.
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1 rectifié ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. Il est vrai, monsieur Magras, que la commission avait dans un premier temps émis un avis défavorable, parce que cette proposition de loi fait suite à un rapport ne portant que sur la France métropolitaine, M. Virapoullé ayant été chargé d’établir un rapport sur l’outre-mer, qui a d’ailleurs débouché lui aussi sur l’élaboration d’une proposition de loi.
Toutefois, nous avons été sensibles aux arguments que vous avez invoqués en commission. En particulier, aucun autre véhicule législatif ne permettra, dans l’immédiat, de faire adopter votre amendement, qui nous semble effectivement utile.
C’est pourquoi, sous réserve des informations que le Gouvernement serait susceptible de nous communiquer, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le sénateur, nous partageons votre objectif de favoriser l’émergence d’un environnement concurrentiel outre-mer, susceptible d’entraîner une baisse des prix des communications électroniques pour les consommateurs.
Toutefois, le dispositif dont vous préconisez l’adoption nous semble soulever un certain nombre de problèmes.
Vous proposez d’abord d’instaurer des obligations d’accès spécifiques pour les réseaux d’initiative publique outre-mer, ainsi que des tarifs de mise à disposition permettant de favoriser la baisse des coûts pour le consommateur. Or de telles obligations doivent être définies dans les contrats liant la collectivité concédante et le concessionnaire. Les imposer a posteriori par voie législative pourrait remettre en cause ces contrats, sans garantie d’efficacité. Prendre une telle mesure aurait pour principal effet d’engendrer des contentieux.
Par ailleurs, vous proposez que les opérateurs souhaitant avoir accès à ces réseaux puissent saisir l’ARCEP en règlement des litiges, sur la base de l’article L. 36-8 du code des postes et communications électroniques. Or tel est déjà le cas.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 24.
Article 25
(Non modifié)
Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 403, 575, 575 A et 991 du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Hervé Maurey, rapporteur. La commission propose de toiletter le texte en supprimant cet article prévoyant un gage, qui n’a plus d’utilité puisqu’aucune des dispositions de la proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, n’entraîne l’augmentation d’une charge ou la diminution d’une ressource pour l’État.
Je prie donc le Sénat de ne pas voter l’article 25.
M. Yves Rome. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 25.
(L'article 25 n’est pas adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi soulève des questions intéressantes : quel doit être notre degré d’ambition concernant la couverture en haut débit, voire en très haut débit, de nos territoires ? Qui doit financer les projets ? Quelles sont, en la matière, les marges de manœuvre dont disposent les collectivités ? Quelles obligations doivent incomber aux différents acteurs ?
Nous l’avons vu, les dispositions de ce texte se heurtent aux intentions du Gouvernement en la matière, lequel préfère n’imposer aucun engagement ni aucune obligation aux opérateurs.
Ainsi, le Gouvernement propose de laisser les opérateurs décider de l’aménagement numérique du territoire, en interdisant même aux acteurs publics d’intervenir là où les entreprises privées souhaitent investir. En revanche, dans les zones non rentables, où aucun bénéfice ne peut être escompté, il reviendrait à la puissance publique d’agir !
Face à ce constat, le présent texte marque une ambition d’assurer la couverture du territoire par la fibre optique. Il manifeste très nettement un sentiment de lassitude devant le statu quo, et même d’exaspération devant l’autosatisfaction du Gouvernement, alors que rien ne bouge concrètement.
Ce texte souligne également le devoir qui incombe aux collectivités de définir des documents programmatiques s’appuyant sur des engagements fermes d’opérateurs ; intéressante nouveauté, le non-respect de ces engagements sera sanctionné.
Pour autant, comment se contenter d’un système à ce point compliqué, qui donnera sans doute lieu à des contentieux et qui ne paraît pas juste au regard de nos ambitions en termes de service public et de péréquation nationale ? Nous l’avons dit : les profits de France Télécom auraient permis de financer la couverture de l’ensemble du territoire national par la fibre optique en l’espace de cinq ans.
Pour nous, la modernité réside bien dans l’octroi de nouveaux droits à nos concitoyens, notamment en matière de communication et d’information. C’est pourquoi nous avons présenté des amendements tendant à intégrer le haut débit, voire le très haut débit, au sein du service universel.
Nous estimons que la création de ces nouveaux droits doit être adossée à des entreprises publiques ayant pour mission non seulement la réalisation des infrastructures, mais également la fourniture de services, afin de prendre en compte la fracture numérique territoriale, et par voie de conséquence la fracture sociale.
Pour toutes ces raisons, nous ne pourrons pas voter en faveur de l’adoption de cette proposition de loi. Toutefois, au regard des avancées pragmatiques qu’elle contient, nous ne souhaitons pas non plus voter contre. En conséquence, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Pierre Camani, pour explication de vote.
M. Pierre Camani. Nous avons eu ce soir un débat intéressant et important pour l’avenir de notre pays.
Ce texte comporte des avancées incontestables en faveur d’un développement et d’un aménagement numériques équilibrés de nos territoires. Aussi le groupe socialiste le votera-t-il, même s’il ne va pas aussi loin que nous l’aurions souhaité.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je regrette votre manque d’ouverture à nos propositions, monsieur le rapporteur. Il me semble pourtant que les amendements que nous avons présentés auraient pu permettre d’améliorer le texte, notamment en vue de mieux équilibrer les relations entre collectivités et opérateurs, le rapport de force étant souvent favorable à ceux-ci.
Comme la quasi-totalité des membres du groupe UMP, je ne voterai donc pas cette proposition de loi, dont le dispositif enfermera les collectivités dans une confrontation avec les opérateurs qui ne pourra déboucher sur rien de constructif. Seul le modèle coopératif pourra, demain, permettre de relier à la fibre la totalité, ou presque, de notre territoire.
Quand il s’agit d’investissements aussi lourds, que les opérateurs et les collectivités devront assumer dans la durée, on ne peut en permanence modifier les règles du jeu. La « bougeotte » législative constitue un mauvais signal.
Sans faire de procès d’intention, je voudrais par ailleurs relever une ambiguïté dont il me semble que vous avez été l’otage, monsieur le rapporteur : pour les uns, il faut revoir entièrement le modèle de développement actuel, afin d’affirmer plus nettement la prééminence de la puissance publique ; pour d’autres, dont vous faites partie, il s’agit simplement de l’améliorer à la marge.
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour explication de vote.
M. Raymond Vall. N’en déplaise à M. Retailleau, j’estime pour ma part que les élus des départements ruraux ne peuvent se permettre de ne pas voter ce texte. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Cette proposition de loi constitue une bouffée d’espoir pour la ruralité. Pour certains territoires, elle représente même la dernière chance, après bien des déceptions ! Nous devons la saisir si nous voulons conserver le peu de richesse économique qui y subsiste. C’est pourquoi nous voterons ce texte sans états d’âme, même s’il est imparfait.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, pour explication de vote.
M. Philippe Leroy. Si certains propos ont pu donner à penser que d’aucuns aspirent à un changement de modèle, tel n’est pas l’objet de cette proposition de loi, qui n’a rien d’idéologique. Il s’agit d’un texte purement technique, visant simplement à compléter et à enrichir le modèle retenu par l’État, de façon à éviter la fracture numérique qui menace non seulement les zones rurales, mais aussi un grand nombre de quartiers suburbains ou urbains. C’est là un objectif d’intérêt général.
Ce sera tout à l’honneur du Sénat d’adopter cette proposition de loi. Le débat, où l’idéologie, je le répète, n’a pas sa place, se poursuivra pendant toute une année. Notre vote d’aujourd’hui aura une grande portée ; les opérateurs, l’ensemble des partenaires nous écoutent. Nous prenons part à une avancée formidable pour le pays : ne décevons pas nos concitoyens, qui doivent tous pouvoir accéder à l’univers numérique !
En conséquence, je voterai cette proposition de loi sans arrière-pensées, de même qu’un certain nombre de mes collègues de l’UMP.
M. Yves Rome. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Cette proposition de loi permet de remettre en perspective les enjeux de l’aménagement numérique du territoire, en particulier pour les zones rurales.
Tout d’abord, le SDTAN doit être renforcé juridiquement et devenir obligatoire : il constitue le socle pour l’aménagement des territoires ruraux.
Ensuite, la complémentarité et la transparence dans les relations entre les opérateurs privés et les acteurs publics sont nécessaires. La mise en place d’engagements et d’une sanction en cas de non-respect de ceux-ci dans les délais prévus constitue le deuxième étage de l’édifice.
Le troisième étage a été supprimé, hélas ! Il s’agissait de la pérennisation du fonds d’aménagement numérique des territoires, le FANT. Même si 900 millions d’euros lui sont alloués, je pense, à l’instar de M. le rapporteur, qu’inscrire sa pérennité dans le texte aurait constitué un signal utile. La commission a choisi un autre chemin ; je le déplore.
Il n’en demeure pas moins que notre débat de ce soir va dans le bon sens au regard de l’enjeu majeur que représente l’aménagement numérique des territoires, notamment ruraux. C’est la raison pour laquelle le groupe de l’Union centriste et républicaine votera à l’unanimité ce texte.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Ce texte contient des avancées pour lutter contre le risque de fracture numérique. Il a aussi eu le mérite de lancer un véritable débat sur la place des collectivités publiques dans l’aménagement numérique des territoires.
En conséquence, le groupe écologiste votera cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson. Cette discussion importante aura permis de retracer l’historique du dossier, les évolutions intervenues, les divergences existant sur un certain nombre de points.
Le groupe UMP, à l’exception de quelques-uns de ses membres, votera contre ce texte.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Hervé Maurey, rapporteur. Je n’avais pas prévu d’intervenir à cet instant, mais les propos de M. Retailleau m’ont beaucoup surpris.
Selon lui, nous aurions fait preuve de fermeture d’esprit et refusé tous ses amendements. Or nous avons tout de même accepté un nombre significatif d’entre eux dont la portée n’était pas que symbolique ou rédactionnelle, aussi bien ce soir en séance plénière qu’en commission. (M. Yves Rome marque son approbation.)
Je m’étonne également que M. Retailleau ait annoncé que le groupe UMP ne voterait pas cette proposition de loi. Celle-ci constitue pourtant le prolongement direct d’un rapport qui avait été adopté à l’unanimité de la commission. De surcroît, voilà quinze jours, tous les membres de la commission, à l’exception de deux sénateurs de l’UMP, avaient approuvé le texte.
Le changement d’attitude du groupe UMP me paraît donc quelque peu surprenant. Je souhaite bien du courage à ceux de ses membres qui devront maintenant expliquer sur le terrain pourquoi ils ont voté contre !
Par ailleurs, je cherche non pas la confrontation, monsieur Retailleau, mais l’équilibre. Je ne m’inscris nullement dans une démarche belliqueuse, mais il est exact que je refuse la domination des collectivités locales par les opérateurs.
Comme l’a très justement souligné M. Philippe Leroy, dont je salue la contribution, il s’agit ici d’un texte technique, dénué d’idéologie, marqué uniquement par la volonté d’améliorer la couverture numérique de nos territoires.
Cette volonté, je la croyais partagée par tous dans notre assemblée ; je suis un peu attristé que, pour des raisons qui m’échappent, on ne retrouve pas ce soir cette unanimité. Personne, me semble-t-il, ne peut considérer que la situation actuelle est satisfaisante.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre. Monsieur le rapporteur, vos intentions sont nobles et nous les partageons tous dans cet hémicycle : nous voulons tous permettre l’accès au très haut débit sur l’ensemble du territoire.
Cependant, il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour : nous serons jugés non pas sur nos intentions, mais sur les actes.
Votre proposition de loi marque-t-elle une avancée vers l’objectif que vous prétendez vouloir atteindre ? Ma réponse à cette question est très clairement « non » !
Ce texte et les propos que vous avez tenus ce soir sont empreints de défiance à l’égard du Gouvernement et de l’administration. Ce n’est pas très grave, même si vous faites ainsi preuve d’un peu d’ingratitude envers le Premier ministre, qui vous avait confié la rédaction du rapport auquel vous avez fait allusion… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Par ailleurs, vous nous accusez en permanence de candeur, de naïveté à l’égard des opérateurs, voire de vivre dans le monde des Bisounours. Il n’en est rien : nous avons simplement la profonde conviction que vous ne construirez pas l’économie numérique contre ses principaux acteurs, en particulier contre les opérateurs.
Mme Cécile Cukierman. Ils s’en remettront !
M. Éric Besson, ministre. Le programme national « très haut débit » est ambitieux, actuellement sans équivalent, à ma connaissance, au sein de l’Union européenne. Il vise, conformément à la volonté du Président de la République, à assurer une couverture totale de notre territoire d’ici à 2025 ; nous nous sommes donné les moyens d’atteindre cet objectif.
M. Hervé Maurey, rapporteur. On verra !
M. Éric Besson, ministre. La complexité est la deuxième caractéristique de votre texte. Je ne veux pas être désagréable, mais c’est une usine à gaz ! Chacune de ses dispositions ajoute de la complexité, de la lenteur. C’est comme si, après quatre ans de préparation, vous vouliez que l’avion qui vient de décoller revienne sur la piste au motif que l’on peut faire beaucoup mieux !
M. Hervé Maurey, rapporteur. C’est faux !
M. Éric Besson, ministre. Concrètement, que vous le vouliez ou non, votre texte remet en cause les licences de téléphonie mobile accordées et le programme national « très haut débit ». Cela ne manquerait pas de susciter des contentieux et d’entraîner des dépenses d’argent public.
Monsieur le rapporteur, les sénateurs UMP assumeront sans difficulté leur vote contre une proposition de loi dont la mise en œuvre déboucherait sur un gel complet des investissements des opérateurs au moins pour les deux ou trois prochaines années ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Tout serait à reconstruire ! Je ne mets pas en doute la noblesse de vos intentions, mais ce texte est totalement contre-productif.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Monsieur le ministre, les propos que vous venez d’adresser à M. le rapporteur m’ont beaucoup surpris. Pour ma part, je le remercie du travail qu’il a réalisé, qui marque une étape importante. Je trouve assez désobligeante la remarque que vous lui avez faite sur la mission confiée par le Premier ministre.
Il n’a jamais été question, dans notre esprit, de chercher la confrontation avec les opérateurs ; nous appelons de nos vœux la concertation, sachant que, comme M. Retailleau l’a lui-même reconnu tout à l’heure, le rapport de force est actuellement un peu trop défavorable aux collectivités. Nous avons simplement voulu redresser le fléau et rééquilibrer les relations. Tel est l’unique objet de cette proposition de loi.
Par ailleurs, monsieur Retailleau, je vous ferai observer que nous avons adopté nombre de vos amendements, tant en commission qu’en séance : vous ne pouvez pas nous reprocher de ne pas avoir fait preuve d’ouverture !
Quoi qu’il en soit, nous avons, me semble-t-il, franchi ce soir une étape importante pour l’aménagement du territoire, au bénéfice des territoires ruraux, bien sûr, mais aussi de certains territoires urbains très mal desservis. Il existe en effet des quartiers, y compris dans ma ville, où le débit est encore limité à 512 kilobits.
Je vous remercie, mes chers collègues, d’avoir siégé jusqu’à cette heure tardive pour contribuer à l’élaboration d’un texte en faveur de l’aménagement du territoire.