Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon absence au cours de la plus grande partie de ce débat. J’ai dû en effet accompagner le Président de la République dans le cadre d’un déplacement sur l’efficacité énergétique et la sûreté nucléaire.
Sur cet amendement qui lui paraît équilibré au terme de sa nouvelle rédaction, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je m’abstiendrai sur cet amendement, qui peut effectivement paraître de bon sens, mais qui manque de précision. Le diable se cache parfois dans les détails !
En tant que rapporteur pour avis de la mission « Politique des territoires », et notamment du programme des interventions territoriales de l’État, le PITE, consacré au plan de sauvegarde du marais poitevin, je constate que, aujourd’hui, la tendance est massivement à la création de retenues supplémentaires, là où des alternatives seraient pourtant possibles, notamment par un accompagnement différent des agriculteurs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Je souhaite donner un éclairage sur la politique menée dans ce domaine par le Gouvernement.
Cet été, la sécheresse, finalement moins grave que prévu, a conduit à lancer un plan qui repose sur deux piliers.
Le premier pilier concerne la création de retenues collinaires des eaux d’hiver, reconnues comme telles par des expertises.
Le second pilier s’intéresse aux cultures moins consommatrices d’eau, qui devront être substituées aux cultures consommatrices ou irriguées, le premier objectif étant de remplacer 14 000 hectares de maïs irrigué. Un certain nombre d’actions de recherche et de formation seront mises en place pour accompagner la transition vers des agricultures moins consommatrices d’eau, notamment dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.
Il s’agit donc d’un plan équilibré reposant sur deux piliers d’égale importance. (M. Ronan Dantec en doute.) Évidemment, la rédaction de cet amendement n’est peut-être pas aussi précise…
M. Ronan Dantec. Qu’à cela ne tienne : il faudrait y introduire ce degré de précision !
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Les évolutions de notre climat engendrent des sécheresses de plus en plus importantes dans un certain nombre de nos territoires.
Le Sud-Ouest a été marqué cet été par une très grave sécheresse. Or qu’avons-nous constaté ? Là où ont été mises en place des réserves d’eau en amont des petites rivières, avec des débits d’étiage, l’eau a continué de couler, permettant à la vie de se maintenir, et je pense ici notamment aux écrevisses à pattes blanches ! Là où, en revanche, comme dans mon département, de telles réserves n’ont pas été aménagées, les rivières se sont asséchées, et tout est mort.
Réfléchissons bien, mes chers collègues ! Il ne s’agit pas de constituer des réserves d’eau pour le plaisir ou pour irriguer des champs de maïs ! (M. Ronan Dantec en doute encore.) Il s’agit de maintenir une agriculture sur nos territoires, pour assurer un certain nombre de nos productions.
Et si cela se révèle nécessaire, il faut également pouvoir arroser les surfaces de maïs, car, dans des secteurs comme les nôtres qui ne sont pas des régions de grandes productions, nous avons besoin du maïs pour l’alimentation des animaux. Si nous ne mettons pas en place des réserves d’eau, notre agriculture disparaîtra.
Il nous faut maintenir des hommes et des animaux sur nos territoires : il y va de l’équilibre du milieu naturel !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-177.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-101 rectifié, présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Fortassin, Collin, C. Bourquin, Barbier, Baylet, Bertrand, Chevènement et Collombat, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 12, première phrase
Remplacer les mots :
un milliard
par les mots :
1,120 milliard
II. - Alinéa 13, première phrase
Remplacer les mots :
150 millions d'euros par an
par les mots :
780 millions d'euros
et le pourcentage :
20 %
par le pourcentage :
23 %
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Les agences de l’eau ont joué, depuis leur création, en 1964, un rôle essentiel dans la lutte contre toutes les pollutions. Elles participent également à la préservation des ressources en eau et des milieux aquatiques, ainsi qu’au financement de la connaissance de l’eau.
La mutualisation entre tous les usagers de l’eau à laquelle sont parvenues ces agences est exemplaire et inspire d’ailleurs de nombreux autres pays.
Une hausse importante des dépenses des agences de l’eau risque d’avoir des répercussions sur les redevances et donc, in fine, d’aboutir à une augmentation du prix de l’eau pour les usagers.
Or, dans la version du projet de loi de finances pour 2012 adoptée à l’Assemblée nationale, on demande à ces agences, d’une part, d’augmenter leur contribution à l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques en 2012, d’autre part, d’augmenter de 38 % – c’est l’objet de l’article 51 sexies – le plafond annuel des contributions des agences de l’eau à l’ONEMA entre 2013 et 2018, en les portant à 150 millions d’euros par an, soit 900 millions d’euros sur l’ensemble du dixième programme d’intervention.
Une telle hausse des contributions des agences de l’eau à l’ONEMA résulte de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement déposé par le Gouvernement. Parallèlement, les députés ont maintenu le plancher des dépenses de solidarité avec les communes rurales à 1 milliard d’euros.
Or les besoins des communes et des intercommunalités en matière de traitement des eaux résiduaires et de distribution d’eau potable continuent à augmenter du fait des directives européennes, d’une part, et de l’accroissement de la population, d’autre part.
Cet amendement a donc pour objet d’accroître les dépenses des agences de l’eau réalisées en faveur des communes rurales, sans pour autant diminuer la solidarité avec l’outre-mer et la Corse. Les sommes qui leur sont réservées sur les contributions à l’ONEMA sont même légèrement augmentées.
Une hausse des contributions des agences de l’eau pour les autres missions de l’ONEMA ne semble pas justifiée pour l’instant, d’autant qu’elle risquerait d’avoir des répercussions sur le prix de l’eau.
C’est pourquoi, par cet amendement, nous proposons de diminuer le plafond des contributions des agences de l’eau destinées à I’ONEMA, et de globaliser ces dernières sur la durée du dixième programme, de 2013 à 2018, ce qui permettrait une plus grande souplesse d’adaptation aux besoins des bassins ultramarins.
M. le président. L'amendement n° II-140 rectifié bis, présenté par MM. Patient et S. Larcher, Mme Rossignol, M. Dantec, Mme Bourzai, MM. Antoinette et Antiste, Mme Claireaux, MM. Cornano, Desplan, J. Gillot, Mohamed Soilihi, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
1° Alinéa 12, première phrase
Remplacer les mots :
un milliard
par les mots :
1,120 milliard
2° Alinéa 13, première phrase
Remplacer le taux :
20 %
par le taux :
23 %
La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. L’article 51 sexies maintient à 1 milliard d’euros le plancher des dépenses de solidarité avec les communes rurales et porte de 108 à 150 millions d’euros la contribution annuelle des agences de l’eau à l’ONEMA pour la période 2013-2018.
Il réserve 20 % du produit de cette contribution, soit 30 millions d’euros, aux actions de solidarité avec les bassins d’outre-mer et la Corse.
Cependant, les besoins des communes et des intercommunalités rurales pour le traitement des eaux résiduaires comme pour la distribution d’eau potable connaissent une augmentation continue, du fait tant des directives européennes que de l’accroissement de leur population.
Il est donc essentiel d’augmenter de 120 millions d’euros la part des dépenses des agences consacrée à la solidarité avec les communes rurales.
Par ailleurs, la solidarité avec les populations des départements et collectivités d’outre-mer est nécessaire et urgente au vu de nos engagements européens.
C’est pourquoi les auteurs de l’amendement n° II-140 rectifié bis proposent aussi, pour prolonger l’amendement n° II-138 rectifié bis déposé sur l’article précédent, que 23 %, au lieu de 20 %, des sommes versées par les agences de l’eau à l’ONEMA soient fléchées vers ces territoires.
Je le répète, en insistant : cette augmentation est tout à fait légitime, compte tenu de la situation des outre-mer.
La Guyane, par exemple, est emblématique de leur retard structurel en matière d’équipements. D’ailleurs, le conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009 avait fait des équipements et de l’assainissement des chantiers prioritaires dans ce département. Et pour cause : en Guyane, moins de 35 % des foyers sont raccordés à un système collectif, contre plus de 80 % en métropole ! Un retard encore accentué par une croissance démographique exponentielle…
Le Comité national de l’eau, dans une délibération adoptée au cours de sa séance du 9 novembre dernier, s’est « félicité du projet de doublement de la solidarité interbassins envers les départements d’outre-mer et de Corse dans les dixièmes programmes afin de conforter l’accès à l’eau et à l’assainissement partout sur le territoire français et de répondre aux enjeux de santé et salubrité publiques ».
L’adoption de l’amendement n° II-140 rectifié bis serait donc une mesure d’équité et un signe important au moment où la France s’apprête à accueillir sur son territoire le forum mondial de l’eau.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Les amendements n° II-101 rectifié et II-140 rectifié bis ont un objectif identique, mais prévoient des montants quelque peu différents.
Je serais tenté d’émettre un avis favorable sur l’amendement n° II-101 rectifié présenté, notamment, par M. Mézard et Mme Escoffier, et qui fait passer de 900 à 780 millions d’euros le plafond des contributions versées à l’ONEMA par les agences de l’eau. Mais M. Antiste serait-il prêt à s’y rallier ?
M. le président. Monsieur Antiste, entendez-vous l’appel de M. le rapporteur spécial ?
M. Maurice Antiste. Si la part réservée à la solidarité financière entre bassins avec l’outre-mer et la Corse est bien portée à 23 %,…
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. C’est bien ce que l’amendement prévoit.
M. Maurice Antiste. … je suis d’accord.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Dans ces conditions, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° II-101 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. En dépit des contraintes budgétaires, nous conservons un plancher de 1 milliard d’euros pour la solidarité du monde urbain envers le monde rural.
Nous avons besoin de maintenir à 900 millions d’euros le plafond des versements à l’ONEMA, alors qu’il est proposé, dans l’amendement n° II-101 rectifié, de le ramener à 780 millions d’euros.
C’est notamment nécessaire pour financer des recherches, des études et des innovations dont je vous rappelle qu’elles bénéficieront largement aux petites communes, singulièrement à l’épuration des eaux.
Ces investissements obligatoires sont aussi, en quelque sorte, des dépenses d’avenir.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote sur l'amendement n° II-101 rectifié.
M. Ronan Dantec. Madame la ministre, le Gouvernement peut-il s’engager, de façon ferme et formelle, à ne pas opérer d’autres prélèvements sur le fonds de roulement de l’ONEMA ? C’est que 55 millions d’euros ont déjà été ponctionnés, ce qui nous rend extrêmement méfiants…
M. le président. En conséquence, l’amendement n° II-140 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l'article 51 sexies, modifié.
(L'article 51 sexies est adopté.)
M. le président. J’appelle en discussion l’article 64 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres ».
Aides à l’acquisition de véhicules propres
Article 64 ter (nouveau)
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif aux conditions dans lesquelles les personnes morales peuvent être rendues éligibles au bénéfice du bonus aujourd’hui réservé aux seules personnes physiques et destiné à encourager l’achat de véhicules hybrides. Ce rapport est remis au Parlement avant la fin de l’année 2011.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. La commission des finances est favorable à cet article.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et « Aides à l’acquisition de véhicules propres ».
Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
Travail et emploi
Compte d’affectation spéciale : Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Travail et emploi » (et articles 62, 62 bis, 63, 63 bis, 63 ter et 63 quater) et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
La parole est à M. François Patriat, rapporteur spécial.
M. François Patriat, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la politique de l’emploi et l’apprentissage. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient donc de vous présenter les crédits des programmes 102 et 103 et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
Tout d’abord, quelques chiffres.
Pour 2012, les crédits de la mission « Travail et emploi » s’établissent à 10,2 milliards d’euros en crédits de paiement et subissent une réduction de 11 % par rapport à 2011 – 11,6 milliards d’euros. Le périmètre de la politique de l’emploi représente 9,4 milliards d’euros, soit 92 % des crédits de la mission, ainsi répartis : 5,4 milliards d’euros pour le programme 102 « Accès et retour à l’emploi » ; 4 milliards d’euros pour le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi ».
En outre, le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » comporte 575 millions d’euros destinés à assurer la péréquation de la taxe d’apprentissage entre les régions et le financement des contrats État-régions en faveur de l’apprentissage.
Monsieur le ministre, je pourrais m’entretenir longuement avec vous ou avec votre collègue Nadine Morano de la situation que nous vivons dans les régions.
Quels sont les points marquants de ce budget pour 2012 ?
Tout d’abord, et c’est bien là le fait majeur, il faut noter que, pour participer à l’effort de diminution du déficit public, le Gouvernement a décidé de réduire les moyens des programmes 102 et 103 de 1,4 milliard d’euros par rapport à 2011. Il faut toutefois s’étonner du fait que la totalité de la réduction des crédits porte sur des dépenses d’intervention.
Cela s’explique notamment par la fin des financements exceptionnels du plan de relance de l’économie de 2009, qui pesait encore près de 600 millions d’euros en 2011.
M. François Patriat, rapporteur spécial. Mais l’essentiel relève du choix du Gouvernement de sous-budgétiser de nombreux dispositifs.
Je citerai, à titre d’exemple, la subvention de l’État au Fonds de solidarité pour le financement de l’allocation de solidarité spécifique, qui a suscité certaines réactions.
Je citerai encore la participation de l’État au financement des maisons de l’emploi, qui devait baisser de 30 millions d’euros, coup de rabot que nos collègues de l’Assemblée nationale, et certains de votre propre majorité, monsieur le ministre, ont souhaité limiter à 15 millions d’euros. Je ne doute pas que nombre de nos collègues reviendront sur le sujet.
Je citerai également l’enveloppe allouée au paiement du marché de l’Association pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, pour les « Publics fragiles ».
Enfin, je souhaiterais m’arrêter un instant sur la baisse des crédits destinés au financement des contrats aidés – 1,906 milliard d’euros en 2012, au lieu de 2,023 milliards d’euros en 2011. Cette sous-budgétisation, monsieur le ministre, mes chers collègues, est dangereuse, car le futur gouvernement, quel qu’il soit, sera obligé de demander, en cours d’année 2012, une ouverture massive de crédits supplémentaires afin de financer les contrats aidés qu’il faudra créer pour lutter contre la montée du chômage.
Rappelons que, en 2010, la dépense finale des contrats aidés s’est élevée à 3,5 milliards d’euros de crédits, au lieu de 1,77 milliard d’euros prévus initialement, soit près du double. Il y a là un phénomène d’insincérité que l’on peut désormais qualifier de notoire.
Mais ce budget souffre d’un autre travers.
Ce que l’État ne peut financer lui-même, il le fait supporter par les partenaires sociaux, les opérateurs et les collectivités territoriales. C’est un comble !
Là encore, je prendrai un exemple précis : pour financer la formation professionnelle, l’État veut effectuer un nouveau prélèvement de 300 millions d’euros sur le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le FPSPP, et en transférer la gestion à l’AFPA, à l’Agence de services et de paiement et à Pôle emploi. Nous en reparlerons lors de l’examen de l’article 63.
Ces crédits seront utilisés de facto et cette opération risque de mettre en péril le FPSPP.
Au final, il ne s’agit pas de méconnaître l’impératif de retour à l’équilibre des finances publiques, mais c’est en toute responsabilité qu’il faut regretter le choix fait par le Gouvernement de se désengager des politiques actives de l’emploi et de lutte contre le chômage en ne faisant porter l’effort d’économie que sur les dépenses budgétaires.
En quelques mots, et pour terminer, je voudrais vous dire pourquoi ce choix est mauvais et, en conséquence, pourquoi le budget de la politique de l’emploi du Gouvernement doit être rejeté.
Le choix du Gouvernement est clair : il veut réduire drastiquement les dépenses budgétaires d’intervention. Nous l’avons compris.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. François Patriat, rapporteur spécial. Ce faisant, il prive le pays d’un levier important dans la lutte contre le chômage. Le budget pour 2012 de la politique de l’emploi ne sera pas de nature à influer activement sur la conjoncture. L’objectif du Gouvernement d’une baisse du taux de chômage à 9 % relève aujourd’hui d’une politique d’affichage. Même si nous souhaitons tous que celui-ci soit atteint, nous savons très bien qu’il n’en sera rien.
La voie suivie par la nouvelle majorité sénatoriale est radicalement différente : plutôt que de réduire les seules dépenses d’intervention de la politique de l’emploi, elle considère qu’il faut supprimer les niches fiscales et sociales très coûteuses et sans effet sur l’emploi.
Nous avons voté ici la suppression du dispositif d’exonération des heures supplémentaires : cela représente une économie globale de 4,9 milliards d’euros, bien supérieure à celle que souhaite faire le Gouvernement sur les dépenses d’intervention en faveur de l’emploi.
Vous n’avez pas saisi l’occasion de régler ce problème, monsieur le ministre.
C’est pourquoi, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, je vous propose de rejeter les crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur spécial.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la gestion des moyens des politiques du travail et de l’emploi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, François Patriat vient de vous présenter les crédits de la politique de l’emploi, crédits qu’il a appelé le Sénat à rejeter. Il me revient maintenant de vous présenter les crédits des programmes 111 et 155 constitutifs du volet relatif à la gestion des moyens des politiques du travail et de l’emploi.
Je vous livrerai ensuite quelques observations sur un certain nombre de sujets liés à l’emploi et aux finances publiques.
Le programme 111 « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail » est doté de 81 millions d’euros pour 2012 et a pour objectif d’améliorer les conditions d’emploi et de travail des salariés. Il vise à garantir le respect du droit du travail, de la santé et de la sécurité au travail, du dialogue social et à lutter contre le travail illégal.
Le respect du droit du travail, de la santé et de la sécurité est assuré par les inspecteurs du travail.
Le dialogue social est assuré par le code du travail, avec les syndicats.
Mais il y a un autre dialogue social, qui, lui, n’est pas prévu par le code du travail, et qui est tout aussi important, sinon plus, que celui qui se déroule avec les syndicats, c’est celui qui concerne tous les salariés, acteurs indispensables à l’activité des entreprises et sans lesquels celle-ci serait impossible.
C’est pour cela que le dialogue social avec l’ensemble des salariés dans le cadre d’une participation aux bénéfices égale aux dividendes est tout aussi fondamental et qu’il faut le promouvoir. C’est ce que j’appelle la « gestion participative ».
Ce programme 111 porte aussi sur les engagements financiers liés à la mise en œuvre de la loi du 20 août 2008, qui prévoit que la première mesure de l’audience des organisations syndicales sera réalisée avant la fin de 2013 pour démontrer leur véritable représentativité, ce qui est très bien. Aussi le budget pour 2012 prévoit-il une progression des crédits de paiement de la ligne budgétaire consacrée à la mesure de l’audience syndicale, celle-ci passant de 9,7 millions d’euros en 2011 à 16 millions d’euros en 2012.
Hormis cette exception, toutes les lignes budgétaires du programme 111 seront en diminution, avec des crédits très faibles.
J’en viens maintenant au programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail », qui est doté de 743 millions d’euros, dont 600 millions financés pour le personnel. Programme support de la mission « Travail et emploi », il regroupe les moyens de soutien des politiques de l’emploi et du travail.
Permettez-moi maintenant de vous présenter brièvement mes observations personnelles sur la politique de l’emploi et sur les finances publiques.
Dans la situation financière critique où nous nous trouvons aujourd’hui, avec une menace qui se précise de plus en plus sur notre notation, il importe plus que jamais de réduire encore nos dépenses de 2012, car le déficit prévu, soit 81 milliards d’euros, trop important, inquiète les marchés. Un relèvement des taux d’intérêt à payer pour nos emprunts et le service de la dette serait catastrophique pour tous.
Il faut donc réduire nos dépenses, et la plus importante est celle qui concerne tous les allégements de charges, qui représentent près de 25 milliards d’euros ; ils ont des conséquences indirectes sur le budget de l’emploi.
Cette exception n’existait pas avant 1997 et personne ne s’en plaignait. Il est vrai qu’à l’époque on travaillait 39 heures… Il faudrait donc, pour sauver notre note et pouvoir retrouver rapidement l’équilibre budgétaire, revenir aux 39 heures et alors supprimer tous les allégements de charge. Une économie de 25 milliards d’euros, ce n’est pas rien ! Je souhaiterais que l’on s’occupe un peu plus de ce problème, au lieu de grappiller quelques économies par-ci par-là, pour un total de 2 millions d’euros.
Par ailleurs, il est totalement admis aujourd’hui que la prime pour l’emploi n’a aucun effet sur le retour à l’emploi. J’en préconise la suppression, ce qui représenterait une économie de 2,8 milliards d’euros.
La réduction du taux de la TVA sur la restauration, abaissé à 5,5 %, coûte 3,2 milliards d’euros. Cela a-t-il réellement créé des emplois ? Personne ne peut le prouver. Compte tenu de l’urgence des économies à faire, je propose de revenir au taux antérieur, c'est-à-dire à 19,6 %, et non à 7 %, comme on le propose.
Ces propositions permettraient au total d’économiser 32,2 milliards d’euros de dépenses par an, ce qui est considérable.
Ainsi, le déficit budgétaire pour 2012 passerait de 81 milliards d’euros à 59 milliards d’euros, c’est-à-dire près de 3 % du PIB, ce qui nous ramènerait aux critères de Maastricht et nous enlèverait tout souci immédiat de note et de taux d’intérêt majorés.
Cela vaut la peine d’y réfléchir, compte tenu des menaces qui pèsent sur notre note. Au lieu de cela, on envisage de multiples dépenses, qui ne pourront être engagées, faute de moyens.
Tout à l’heure, M. Patriat a, au nom de la commission des finances, appelé au rejet des crédits de cette mission,…
M. Roland Courteau. À juste raison !
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. … ce qui est tout à fait son droit. Mais il ne fait aucune proposition.
M. François Patriat, rapporteur spécial. Si !
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Il pourrait dire que ce budget est trop élevé ou pas assez, qu’il faudrait augmenter les dépenses, ou les recettes, enfin formuler des suggestions pour un autre budget de l’emploi. Mais non ! Il est favorable à la suppression pure et simple.
À ce compte-là, si le Sénat votait contre les crédits de la mission, il n’y aurait plus du tout de budget de l’emploi. On pourrait dire adieu à Pôle emploi, aux contrats aidés, aux contrats d’apprentissage et de professionnalisation, au Fonds de solidarité…
Puisque l’argent manque, il aurait été normal que ceux d’entre nous qui critiquent ce budget s’expliquent et formulent des propositions positives susceptibles de le remplacer.
Or M. le rapporteur spécial ne l’a pas fait. Il a adopté une attitude totalement négative, ce qui, par rapport aux exigences d’une discussion budgétaire au Sénat, n’est à mes yeux pas normal.
Cela signifie-t-il que mon collègue rapporteur spécial veut réduire les crédits de la mission « Travail et emploi » de 10 milliards d’euros ? Puisque cela ne sert à rien à ses yeux, supprimons ce budget et économisons la somme !