M. Jacky Le Menn. Ah ! ça…
M. Jean-Claude Lenoir. Un certain nombre d’opérations auxquelles je tiens n’y figurent pas, ou, du moins, pas encore.
Or mes interlocuteurs me répondent que ce n’est pas grave et que les opérations qui seront menées ne seront pas forcément celles qui figurent dans le SNIT. J’ai même entendu un collaborateur de ministre, dont je ne révélerai pas l’identité, affirmer que pour être certain de la mise en œuvre effective d’une action, il valait mieux ne pas l’inscrire dans ce schéma ! (Exclamations amusées.) J’apprécierais tout de même qu’on nous prenne pour des gens sérieux ! Par conséquent, je vous annonce d’ores et déjà mon retour prochain dans les couloirs du ministère pour évoquer les questions qui me tiennent à cœur.
M. Jean-Claude Lenoir. Je le sais, monsieur le secrétaire d’État : nous avons été longtemps voisins au sein d’autres institutions de la République, et je serai, moi aussi, heureux de vous retrouver !
Nous aurons ainsi l’occasion d’aborder un sujet auquel je tiens, celui de la RN 12. Comme vous le savez, cette route nationale relie Paris à Brest. Entre ces deux villes, s’étendent des territoires ruraux dont le département de l’Orne fait partie. Nous avons impérativement besoin de créer une liaison moderne avec Paris. En l’occurrence, je m’exprime au nom de tous les parlementaires, élus en Ille-et-Vilaine,…
M. Jacky Le Menn. Eh oui ! Vous avez raison !
M. Jean-Claude Lenoir. … en Mayenne, dans l’Orne, et même dans l’Eure ou en Eure-et-Loir.
Je tiens à en informer vos collaborateurs, monsieur le secrétaire d’État : nous reparlerons souvent d’une commune qui est le point noir de la région Basse-Normandie, celle de Saint-Denis-sur-Sarthon, dont je tenais à citer le nom à la tribune. Je vous avertis que je poursuivrai les actions nécessaires pour faire lever cet obstacle majeur sur un axe moderne.
Je voudrais également évoquer les chemins de fer. Selon Guillaume Pepy, le président de la SNCF – comme ses prédécesseurs disaient la même chose, je suppose qu’il doit bien y avoir une part de vérité –, la ligne ferroviaire Paris-Granville est celle qui pose le plus de problèmes. Je n’insiste pas sur les difficultés que nous rencontrons. M. Pepy a récemment annoncé devant la commission de l’économie un certain nombre de mesures importantes pour améliorer les infrastructures et faire un effort qui assure vraiment la fluidité du trafic. Je continuerai d’être vigilant sur ce dossier dans les semaines et les mois à venir.
Le deuxième point que je souhaite aborder est celui de l’énergie. Je m’y intéresse depuis longtemps et j’exerce aujourd’hui encore un certain nombre de responsabilités dans ce domaine.
En ce qui concerne les énergies renouvelables, j’entends trop souvent dire que notre pays serait en retard et ne prendrait pas les mesures nécessaires en matière d’infrastructures. En tant qu’ancien coprésident du comité opérationnel du plan de développement des énergies renouvelables et actuel président du Conseil supérieur de l’énergie, organisme chargé d’assurer le suivi du Grenelle de l’environnement, j’affirme qu’on ne peut pas parler de retard !
Certes, les rapports qui ont été réalisés, y compris par les opérateurs, ont montré que, sur les deux premières années, nous n’avions pas atteint le niveau moyen permettant d’atteindre les objectifs définis pour l’horizon 2020. Mais, aujourd’hui, l’élan est donné dans les différents domaines. Cela dit, j’insiste sur un point : le développement d’énergies renouvelables comme l’éolien et le photovoltaïque nécessite l’émergence d’une industrie française.
Prenons le cas de l’éolien : l’offshore va se développer dans la Manche, mais, parallèlement, Areva construit au Havre et Alsthom à Cherbourg. Il faut créer un lien – comme l’a fait ce pays remarquable qu’est le Portugal – entre les contraintes liées au développement des énergies renouvelables et les retombées en matière d’emploi.
Toujours à propos des énergies renouvelables, la biomasse doit prendre à l’avenir une part plus importante, notamment grâce aux perspectives intéressantes qu’offre la méthanisation.
L’efficacité énergétique est un sujet que nous avons abordé en commission et sur lequel notre collègue Ladislas Poniatowski a remis un excellent rapport. Je voudrais féliciter le Gouvernement, qui a placé la barre très haut pour les crédits destinés à la recherche en matière d’efficacité énergétique dans le bâtiment. L’objectif du Grenelle de l’environnement, une augmentation d’un milliard d’euros chaque année, est dépassé : nous avons atteint, en moyenne, 1,2 milliard d’euros depuis le début de la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement et nous serons à 1,6 milliard d’euros en 2012. Le Gouvernement avait vu juste, et les engagements sont tenus.
J’aimerais aussi relayer les propos qui ont été tenus par un collègue pour lequel j’éprouve depuis longtemps une empathie naturelle en raison de notre proximité patronymique : M. Louis Nègre. (Sourires.) Tout comme lui, je suis un partisan du développement du véhicule électrique.
La majeure partie de la pollution dans nos villes vient évidemment des véhicules. Aujourd’hui, un automobiliste parcourt en moyenne moins de 60 kilomètres par jour. Certes, tout le monde ne pourra peut-être pas utiliser un véhicule électrique, mais les perspectives de développement sont réelles, et la France doit être leader dans ce domaine industriel. Je suggère ainsi que le Sénat se dote de véhicules électriques. Après tout, la moyenne des kilomètres parcourus permet tout à fait une rotation avec de tels véhicules. Pourquoi ne pas nous montrer exemplaires en la matière ?
Dernier élément sur l’énergie, je veux souligner que le Gouvernement a doté l’Autorité de sûreté nucléaire de 20 millions d’euros supplémentaires – cela représente quarante emplois – après la catastrophe de Fukushima. J’aimerais aussi que le Gouvernement communique sur les premiers résultats des inspections menées dans les centrales nucléaires françaises, …
Mme Laurence Rossignol. Sur Fessenheim, on les a !
M. Jean-Claude Lenoir. … car ils apportent un certain nombre d’enseignements très intéressants qui mériteraient d’être connus de l’ensemble des membres de la Haute Assemblée.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Plus on aura d’informations, mieux ça vaudra !
M. Jean-Claude Lenoir. Le troisième point que je voulais aborder concerne l’urbanisme.
Quel que soit notre territoire, il est nécessaire, me semble-t-il, de bien maîtriser l’espace, c’est un truisme. Les collectivités locales ont besoin de moyens pour se doter de PLU intercommunaux. C’est notamment le cas des petites communautés de communes. J’insiste sur ce point, car j’en dirige une. (Sourires.)
M. Jean-Claude Lenoir. Mais d’autres pourront peut-être s’exprimer pour des communautés beaucoup plus importantes.
Nous avons besoin – c’est un sujet relativement nouveau – que le territoire rural soit organisé et puisse disposer de documents d’urbanisme, qu’il s’agisse des PLU intercommunaux ou des schémas de cohérence territoriale, les SCOT. Vous devez nous aider sur ce point, monsieur le secrétaire d’État. Je ne suis pas certain que les crédits inscrits dans ce projet de budget – c’est l’une de ses faiblesses – suffisent pour faire face aux charges.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à défaut sans doute d’avoir convaincu mes collègues de soutenir le Gouvernement, j’aurai au moins exprimé ce que ressentent les personnes qui m’ont mandaté pour les représenter ici ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, quelle déception à l’examen des crédits consacré à l’environnement ! Voilà qui confirme les renoncements de la majorité à ses propres engagements !
Si nous voulions être indulgents, nous pourrions dire qu’en matière d’environnement, vous avez été velléitaires. Sans doute les ministres qui se sont succédé depuis cinq ans auraient-ils bien voulu agir, mais ils ne l’ont pas pu, ou alors très peu, empêchés par des lobbies puissants, par l’électoralisme court-termiste et par des arbitrages budgétaires souvent indifférents.
Car c’est bien d’indigence et, plus grave encore, d’imprévoyance qu’il faut parler à la vue des crédits affectés à la mission « Écologie, développement et aménagement durables » consacrés, notamment, à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, qui devait être, selon les mots du Président de la République, « l’acte fondateur d’une nouvelle politique, d’un new deal écologique en France, en Europe et dans le monde » ! Vous en conviendrez, pour changer le monde, 161 malheureux millions d’euros sur plus de 9 milliards d’euros, c’est peu ! Et il faut croire que c’était sans doute encore trop, puisque, à l’Assemblée nationale, les députés de la majorité n’ont pas manifesté le moindre d’état d’âme pour réduire encore les crédits de la mission de 84 millions d’euros !
Le mandat du Président de la République avait pourtant commencé en fanfare avec l’organisation du Grenelle de l’environnement, auxquels tous, État, collectivités locales, organisations syndicales et professionnelles, ONG et élus, avaient participé. Cette concertation avait abouti non seulement à une vaste prise de conscience, mais aussi à des décisions ambitieuses et salutaires. Je vous rappelle, d’ailleurs, que le soutien de la gauche n’avait pas fait défaut au Gouvernement, parfois même pour l’aider dans des arbitrages contre sa propre majorité !
Mais, depuis le Grenelle de l’environnement, les « coups de rabot », pour reprendre une expression qui sera sans doute le gimmick de l’année 2011, ont été constants et méthodiques. D’abord insidieusement, puis franchement, quand le Président de la République, au salon de l’agriculture en 2010, a en quelque sorte sonné la retraite, en déclarant : « Je voudrais dire un mot de toutes ces questions d’environnement, parce que, là aussi, ça commence à bien faire. »
Aujourd’hui, le budget ne fait pas la maille et le Grenelle est détricoté ! (Sourires.)
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Joli !
Mme Laurence Rossignol. Je vous ferai grâce d’un inventaire fastidieux. Mais, comme ce budget est le dernier du quinquennat, il nous offre l’occasion de dresser un bilan comparatif des ambitions et des résultats.
D’abord, la contribution climat-énergie, qui devait être la pierre angulaire de la fiscalité environnementale promise par le Président de la République, a été abandonnée en rase campagne.
Mme Chantal Jouanno. Grâce à qui ? C’est vous qui avez saisi le Conseil constitutionnel !
Mme Laurence Rossignol. Et ne nous répondez pas que le recours du groupe socialiste devant le Conseil constitutionnel en est la cause !
Mme Chantal Jouanno. C’est quand même vous qui l’avez attaquée !
Mme Laurence Rossignol. Vous aviez inventé une usine à gaz inefficace écologiquement et injuste socialement !
Le report de la taxe poids lourd, qui nous prive de recettes pour investir dans le ferroutage, est un autre renoncement.
La politique en faveur des énergies renouvelables est un échec. Les conclusions du rapport Ollier, mises en œuvre dans la loi Grenelle 2, ont paralysé l’éolien terrestre en multipliant les procédures.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. C’est exact ! Vous avez raison !
Mme Laurence Rossignol. La versatilité et l’imprévisibilité de la politique de développement de l’énergie photovoltaïque ont déstabilisé et sabordé une filière naissante. Le développement de la biomasse a pris du retard.
Et ce n’est pas un hasard si, aujourd’hui, la Commission européenne s’apprête justement à adresser un avis motivé à la France pour manquement à son obligation de transposition de la directive européenne sur les énergies renouvelables.
Le bilan est aussi largement négatif, s’agissant de l’objectif de réduction de moitié de l’usage des pesticides à l’horizon de 2018. Les chiffres présentés lors du Comité national d’orientation et de suivi du plan Écophyto 2018 sont inquiétants. Très loin de reculer, l’utilisation de pesticides a même augmenté de 2,4 % de 2008 à 2010.
En matière de politique en faveur de la biodiversité, la trame verte et bleue tarde à être mise en œuvre.
Dans le projet de loi de finances pour 2012, les dépenses fiscales favorables à l’environnement sont évaluées à 95 millions d’euros. Par rapport aux 5,8 milliards d’euros de dépenses fiscales ayant un impact négatif sur l’environnement, selon l’évaluation de l’Inspection générale des finances, c’est bien peu !
Alors que le coût de l’énergie est promis à une augmentation significative, avec la raréfaction du pétrole et le renchérissement structurel du coût du nucléaire, lié à la fois à la mise aux normes post-Fukushima, à la gestion des déchets, au démantèlement à venir des centrales et à la fin de vie de nombre de nos réacteurs, la majorité semble ignorer qu’un nombre croissant de nos concitoyens sont en situation de précarité énergétique.
M. Jacky Le Menn. Très bien !
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Il fallait le dire !
Mme Laurence Rossignol. Pour ce projet de budget, votre Gouvernement cherche beaucoup de recettes supplémentaires et beaucoup d’économies. Nous devons affronter une crise financière, économique, sociale, mais aussi environnementale. Or cette dernière dimension semble ignorée. L’environnement est la variable d’ajustement des déficits publics, voire une contrainte dont on s’occupera peut-être plus tard, une fois la crise passée. Mais la transition environnementale n’est pas un fardeau ! Elle constitue, à l’inverse, un levier de sortie de crise, un nouveau gisement de développement et de création de richesses, une voie nouvelle pour le partage et l’égal accès de tous à des ressources essentielles et de plus en plus rares ! Ce budget vous offrait l’occasion de « verdir » notre fiscalité, mais tel n’est pas le choix que vous avez fait !
Je voudrais donc vous interroger : si le moment n’est pas encore venu de modifier la donne fiscale, d’organiser la transition environnementale et d’investir dans cette démarche, quand viendra-t-il ? Quand pourrons-nous engager ces mutations mieux qu’aujourd’hui ? Vous laissez passer, je le crains, une occasion que nous ne retrouverons pas si facilement, surtout si vous restez au Gouvernement !
Malgré un contexte budgétaire défavorable à l’ambition et aux politiques publiques, il y avait une autre raison de proposer un budget « environnement » à la hauteur des enjeux : le message qu’il envoie aux Français, sa vertu pédagogique.
La transition environnementale de notre société, de nos modes de vie et de nos modes de production et de consommation ne se fera pas sans nos concitoyens ou contre eux. Ils en sont les premiers acteurs. Il ne s’agit pas de les culpabiliser au motif que la somme des comportements individuels ferait l’engagement national. Il faut au contraire leur permettre de s’inscrire dans un élan partagé, soutenu et impulsé par les pouvoirs publics.
Le message qui est envoyé aujourd’hui au travers de ce budget est un message inverse et démobilisateur.
Le groupe socialiste-EELV et apparentés a déposé plusieurs amendements, qui ont déjà été adoptés par notre assemblée ou qui, je l’espère, le seront cet après-midi. Ils prévoient notamment le relèvement de la TVA sur les produits phytosanitaires, l’assujettissement à la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, des métaux lourds – sélénium et arsenic –, le relèvement de la redevance pour pollutions diffuses et l’assujettissement des perturbateurs endocriniens à celle-ci.
Ce sont des mesures de bon sens, favorables à l’environnement. Elles se sont cependant heurtées à un avis négatif du Gouvernement. En commission, la ministre Mme Kosciusko-Morizet avait précisé que, à titre personnel, elle leur apportait son soutien de principe. J’espère que ces mesures survivront à la navette parlementaire et à votre majorité à l’Assemblée nationale.
Monsieur le secrétaire d’État, c’est avec regret que nous ne voterons pas les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour 2012. La maison brûle, l’incendie s’est étendu à tout le quartier et vous regardez toujours ailleurs ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – M. Bruno Sido s’exclame.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » dans un contexte difficile, avec des moyens financiers particulièrement contraints.
Le budget qui nous est proposé se caractérise, sur la forme d’abord, par un manque de lisibilité. D’une part, les indicateurs de performance fournis sont dénués trop souvent de pertinence au regard de l’appréciation que nous sommes amenés à porter sur celui-ci. D’autre part, le périmètre de la mission est manifestement trop instable et empêche un travail satisfaisant de comparaison d’une année sur l’autre.
Prenons, par exemple, le périmètre du programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » qui a tellement évolué. Dans ce programme, eau, biodiversité et matières premières minérales non énergétiques sont agrégées dans l’action Gestion des milieux et biodiversité alors qu’ils étaient séparés en 2010. Cela ne facilite pas la lecture. En outre, cela permet de mieux dissimuler une baisse de crédits de plus de 16 % en 2011, baisse qui ne sera pas compensée cette année puisque les sommes allouées stagnent.
Par ailleurs, ce budget, sur le fond, ne traduit pas suffisamment les avancées du Grenelle. Il symbolise bien, en réalité, le choix qui est fait d’abandonner petit à petit les compétences et la capacité d’expertise dont disposait l’État en matière d’écologie.
Concernant les programmes 170 « Météorologie » et 159 « Information géographique et cartographique », ils sont séparés dans les documents budgétaires.
Cependant, il est prévu que l’Inventaire forestier national, l’IFN, sera intégré à l’Institut géographique national, l’IGN. Or, à la page 337 du « bleu », on trouve, dans le même tableau, les effectifs de l’IGN seul, puis, pour 2012, de l’IGN nouvelle version, c’est-à-dire du regroupement IGN et IFN, ce qui laisse croire à une hausse généreuse de 172 équivalents temps plein, alors que, en réalité, 30 équivalents temps plein sont perdus. Cette intégration n’est donc guidée que par des considérations budgétaires, par la sacro-sainte révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui vise à mutualiser certains services, mais surtout à réduire le nombre de postes. Pourtant, dans le cas présent, ces deux établissements publics ont des missions tout à fait différentes et n’ont en commun que la dimension cartographique de leur travail.
Cette fusion entraîne une délocalisation des activités, que l’administration n’accompagne pas, notamment en ce qui concerne le logement, ce qui découragera à l’évidence certains agents devant quitter la province pour l’Île-de-France. Il en résultera sans doute, à terme, une perte de compétences.
Mais ce n’est pas tout. Cela préfigure surtout ce qui risque de se passer avec Météo-France dans un avenir proche. La fermeture annoncée de près de la moitié des centres départementaux et le déménagement des services parisiens vers Saint-Mandé, où est implanté l’IGN, n’est que la première pierre d’une nouvelle fusion, où, cette fois, l’IGN pourrait être absorbé par Météo-France. Ce regroupement ne peut mener qu’à l’affaiblissement et, à terme, au démantèlement des services publics.
J’en viens au programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité ».
La faible hausse des crédits pour ce programme – qui tranche, il est vrai, avec la baisse de l’exercice précédent –, accompagnée d’un redéploiement en faveur de la préservation et de la restauration de la biodiversité, pourrait constituer un motif de satisfaction.
Pour autant, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux : si quarante-six postes ont été créés, ce qui constitue un progrès, sur l’action Gestion des milieux et biodiversité pour répondre à une nouvelle ambition en la matière, j’ai peur que ces ouvertures de postes ne soient insuffisantes au vu des besoins qui naîtront de la création de trois nouveaux parcs nationaux et de quatre parcs naturels marins.
Par ailleurs, l’ensemble du programme perd 423 postes, en particulier des postes pour l’appui technique destiné à venir en aide aux petites collectivités locales. Certes, il a été annoncé que les extensions jusqu’à 40 mètres carrés ne seront plus soumises au permis de construire, mais feront l’objet d’une simple déclaration préalable. Dès lors, toutes les communes devront instruire davantage de demandes sans bénéficier de l’appui technique des services de l’État. Encore une fois, l’État transfère des compétences vers les collectivités, et ce sont avant tout les petites communes qui seront les plus impactées. Je ne suis pas sûre qu’une telle décision, si elle était appliquée, apporterait plus de souplesse aux administrés, comme cela a pu être avancé.
Je dirai également un mot de l’épineuse question de l’approbation des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, rendue délicate en raison de la difficulté qu’il y a à financer les mesures foncières. Le dispositif que vous avez introduit et qui prévoit de fixer à un tiers le taux de participation pour chacun des acteurs – État, collectivité et exploitant – permettra, nous l’espérons, d’améliorer un peu la situation.
Toutefois, la réduction des risques à la source, notamment par des améliorations dans les process industriels, pourrait être plus avantageuse. Mais encore faudrait-il que l’Inspection des installations classées ait les moyens de ses ambitions : ses missions tendent à s’élargir du fait de nouvelles réglementations, nationales et européennes, ce qui enrichit le travail des inspecteurs d’approches complémentaires, singulièrement pour les produits, en raison du règlement REACH et de la directive sur les biocides.
Cependant, alors que le nombre d’inspecteurs avait légèrement augmenté au cours des dernières années, il commence à diminuer. Je regrette qu’il n’y ait pas un seul indicateur de performance pertinent à ce sujet. Pour autant, les faits sont là : il y a 1 200 équivalents temps plein pour 500 000 installations classées. Ces inspecteurs sont pourtant le premier moyen, et sans doute aussi le plus efficace, pour amener les industriels à améliorer leurs installations et à mener une politique de prévention des risques. Or, comme pour la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, on observe une baisse du nombre des contrôles, notamment des contrôles inopinés des rejets, associée à une hausse significative des sanctions administratives aux dépens des sanctions pénales qui, je le rappelle, sont, elles, rendues publiques et présentent donc l’intérêt de l’exemplarité. Là aussi, l’État semble abandonner progressivement ses missions de contrôle.
Par ailleurs, j’ai bien noté l’augmentation des moyens humains et financiers accordés à l’Autorité de sûreté nucléaire afin qu’elle puisse mieux remplir la mission qui lui a été confiée par le Premier ministre après l’accident de Fukushima, et, nous l’espérons, en toute indépendance.
Bien qu’il soit difficile d’être exhaustif en sept minutes, je tiens également à souligner que le Fonds chaleur de l’ADEME, s’il a fait ses preuves, reste sous-doté avec 250 millions d’euros pour 2012 quand il en faudrait près du double !
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Très bien !
Mme Évelyne Didier. En définitive, ce budget traduit bien la réduction des ambitions, la perte des compétences et, surtout, une volonté, ici comme ailleurs, de réduire les moyens d’action de l’État dans les domaines non régaliens afin d’affaiblir les moyens publics jusqu’au moment où l’on sera sans doute amené à conclure à leur inefficacité, ce qui laissera alors le champ libre au privé.
La crise vient apporter son aide, si je puis dire, à ce plan général de réduction du service public dont l’exécution a commencé depuis bien des années.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Depuis dix ans !
Mme Évelyne Didier. Nous sommes entrés dans la phase la plus dure de ce programme.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV. – M. Raymond Vall applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, qu’il semble loin le temps où le Grenelle de l’environnement devait faire entrer notre pays dans un nouveau cycle de développement et de croissance,…
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Oh oui !
M. Jean-Claude Requier. … un développement que l’on annonçait durable et une croissance que l’on prédisait verte ! (Mme Chantal Jouanno s’exclame.)
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Tout à fait !
M. Jean-Claude Requier. Force est de constater que, malgré l’initiative du Grenelle, notre pays n’échappe pas à la crise, tant s’en faut !
C’est désormais le Grenelle dans son ensemble qui est menacé, comme en témoigne ce budget de crise fondé sur des hypothèses économiques déjà dépassées.
Les objectifs du Grenelle font donc, eux aussi, les frais de la politique d’austérité du Gouvernement. Dans bien des secteurs liés à l’environnement et à l’aménagement du territoire, la crise sera synonyme de retour en arrière et de temps perdu sur la route de la modernité et du désenclavement.
Fondés sur une croissance de 1,75 % que nous savons désormais totalement inatteignable, les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour 2012 sont en baisse par rapport à 2011. Il convient de préciser, ici, que les crédits de cette mission ont déjà subi deux coups de rabot successifs à l’occasion des derniers collectifs budgétaires, l’un de 84 millions d’euros et l’autre de 51 millions d’euros.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. Eh oui !
M. Jean-Claude Requier. Mon propos portera essentiellement sur le programme « Infrastructures et services de transports », qui reste, de loin, le plus important de la mission, mais qui est aussi la première victime des coups de rabot du Gouvernement puisqu’il a été amputé de près de 100 millions d’euros.
Face à l’ampleur des défis en matière d’infrastructures routières et ferroviaires, il apparaît que ce budget n’est pas à la hauteur. On ne peut que regretter le décalage entre les ambitions affichées du schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT, et les chiffres d’un budget qui prélève 53 millions d’euros sur les ressources déjà insuffisantes de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui diminue les dotations de Voies navigables de France, les soumettant à une amputation de ressources, et qui ne prévoit pas de perspectives d’amélioration pour les acteurs du secteur des transports ferroviaires, je pense en particulier à la SNCF, à la RATP ou encore à RFF qui ne disposeront pas des moyens suffisants pour atteindre leurs objectifs.
Chacun s’accorde à reconnaître que notre système ferroviaire est à bout de souffle et ne remplit plus sa mission d’aménagement du territoire, de tout le territoire ! Je prendrai un exemple, monsieur le secrétaire d’État : nous avions dans le Lot, il y a près de quarante ans, un train rapide et moderne, Le Capitole, qui reliait Toulouse à Paris, avec des pointes à plus de 200 kilomètres par heure. Ce train n’est malheureusement plus en circulation. Il a été remplacé par un Téoz moins rapide, avec, bien souvent, un changement en gare de Brive, et des conditions de confort et de propreté contestables. Ne parlons pas de la restauration.