M. le président. La parole est à M. François Patriat.
M. François Patriat. Je ne reviendrai pas sur la polémique que M. le secrétaire d’État a engagée à la fin de sa réponse.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État. Je n’ai engagé aucune polémique ! J’ai simplement émis une remarque !
M. François Patriat. Ce n’est pas l’objet de ma question.
D’abord, il est vrai que je n’ai pas voté la réforme de la taxe professionnelle. En effet, je la trouve terriblement coûteuse pour les finances publiques ; nous en voyons la traduction aujourd'hui. En plus, elle est inefficace pour les petites entreprises ; j’en ai des illustrations tous les jours.
Mais, monsieur le secrétaire d’État, je ne vous demande pas de me répondre sur la politique globale du Gouvernement. Je vous interroge sur un cas particulier.
Il s’agit d’un investisseur étranger – vous cherchez comme moi à les attirer – qui emploie des gens en milieu rural après avoir investi 12,5 millions d’euros alors qu’il aurait dû partir. D’ailleurs, il n’a été aidé que par les collectivités territoriales. L’État, lui, était absent le jour du sinistre. Je n’ai pas vu le préfet ou le sous-préfet lorsque je suis allé à la rencontre des salariés.
Le site a été reconstruit. Les acteurs ont fait le pari de l’excellence.
Le bâtiment coûte évidemment beaucoup plus cher que sa valeur vénale. D’ailleurs, c’est bien le problème ; il a coûté 12,5 millions d’euros alors qu’il vaut 5 millions d’euros, si tant est que l’on trouve un repreneur, ce dont je ne suis pas certain. Et l’imposition est assise sur la valeur de l’investissement !
Les responsables de l’entreprise m’ont précisé qu’ils ne refusaient pas de payer la CVAE. Ils comprennent bien qu’ils doivent payer des impôts sur les bénéfices en France. Mais, au regard de l’effort extraordinaire qu’ils ont réalisé pour sauver l’usine et les emplois afférents, ils jugent un tel sursaut d’imposition foncière pénalisant.
Il conviendrait d’examiner de près ma question. Je vous demande non pas de généraliser le processus, mais de prendre en compte les cas particuliers. À la suite d’un sinistre, dans des territoires exceptionnels, il devrait être possible non de déroger à la règle, mais de décider des mesures d’amoindrissement favorables aux entreprises. Au bout du compte, je crains, monsieur le secrétaire d’État, de vous rencontrer de nouveau dans quelques semaines ou quelques mois. Si les dirigeants de cette entreprise ont alors décidé de fermer le site, que dira-t-on ? Que c’était la règle ? Il me semble que nous ne pouvons pas nous en tenir à cette réponse.
difficultés d'accès à l'emprunt pour les collectivités locales
M. le président. La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 1394, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Michel Doublet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur les conséquences pour les collectivités locales des règles prudentielles déterminées par le comité de Bâle, dit « Bâle III ».
Ces recommandations, qui visent à renforcer la solidité du système bancaire en appliquant des règles plus strictes en matière de capital et de liquidité, devraient avoir pour incidence une réduction sensible des possibilités pour les banques d’accorder des prêts aux collectivités locales.
Alors que les ratios pouvant avoir une incidence sur le financement des collectivités locales ne devraient être obligatoires qu’en 2018, on peut s’interroger sur les motivations réelles des banquiers.
Sur le terrain, nous avons déjà pu constater que certaines banques ont anticipé la mise en œuvre de ces dispositions préjudiciables aux investissements publics locaux et aux acteurs économiques de notre pays.
Pour illustrer mon propos, je souhaite faire un éclairage sur la situation du département de la Charente-Maritime.
En juin dernier, le département a organisé une consultation auprès de plusieurs établissements bancaires afin de pourvoir au financement d’une partie des besoins d’investissement pour l’année 2011. Sur les onze partenaires consultés, seuls cinq ont répondu et il a été décidé de retenir trois offres. Au cours du mois d’août, une des banques choisies a retiré sa proposition en raison de la crise des liquidités.
Cette consultation a ainsi mis en lumière la réduction de notre capacité de négociation due à l’absence de concurrence et au renchérissement du coût du crédit.
Ce qui vaut pour le département vaut également pour les communes. Nos collègues maires nous ont déjà fait part du fait qu’ils rencontraient de telles difficultés.
L’inquiétude des élus locaux est d’autant plus patente que le projet de loi de finances pour 2012 prévoit un nouveau gel en valeur des concours financiers aux collectivités locales.
Les élus locaux ne sont pas hostiles à l’idée de participer à l’effort budgétaire de maîtrise des déficits, mais ils souhaitent que le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales soit respecté et veulent conserver leur capacité d’investissement.
Pour cela, il convient de garantir les moyens nécessaires à l’exercice de leurs compétences.
En effet, les collectivités territoriales qui souhaitent investir pour l’avenir doivent avoir recours raisonnablement et en toute sécurité à l’emprunt.
Dans les années quatre-vingt-dix, certains groupes bancaires ont proposé aux collectivités des produits de financement à taux variable, avec la perspective de faire baisser la charge de leur dette. On connaît le résultat : les taux d’intérêt ont explosé, mettant en grande difficulté de nombreuses collectivités.
Ainsi, afin de garantir l’accès à la liquidité en diversifiant les sources de financement, le président de l’Association des maires de France, le président de l’Association des communautés urbaines de France et le président de l’Association des maires de grandes villes de France ont pris l’initiative de proposer la création d’une agence de financement des investissements locaux, proposition qui devrait prochainement trouver une traduction législative.
Dans le même temps, l’Association des maires de France propose l’ouverture d’un guichet de secours à destination des collectivités. Je souscris totalement à cette idée et je soutiens également le principe d’une reconnaissance de la spécificité des collectivités locales.
Le Premier ministre, François Fillon, a annoncé récemment que la Caisse des dépôts et consignations allait dégager 3 milliards d’euros pour assurer le financement des collectivités locales. La Banque postale et la Caisse des dépôts et consignations examinent, pour leur part, la mise en place d’un pôle de financement public des territoires, dont le rôle serait d’offrir les prêts bancaires nécessaires au développement des collectivités.
La situation est grave et complexe, mais les élus ont besoin de visibilité et d’assurances pour l’avenir. Il en va de même pour les entreprises, déjà impactées.
Dans les périodes de ralentissement de l’activité, nous le savons, la commande publique est indispensable pour soutenir le volume d’investissement des entreprises. Tous attendent des réponses.
En conséquence, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre afin de ne pas obérer la dynamique et l’aménagement de nos territoires ?
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, qui ne peut être présent ce matin et vous prie de bien vouloir l’en excuser, m’a chargé de répondre à votre question.
Les effets potentiels de la nouvelle réglementation prudentielle Bâle III sur le financement des collectivités locales sont, pour l’instant, difficiles à quantifier.
Les nouvelles exigences qu’elle emporte auront, en effet, des conséquences différentes en fonction des types de ratio considérés. Ainsi, les conséquences sont potentiellement plus importantes s’agissant des nouveaux ratios de liquidité que du ratio dit « de levier ».
De plus, les modalités d’application de ces ratios ne sont pas encore déterminées précisément à ce jour et devront faire l’objet de discussions complémentaires au niveau international, en particulier s’agissant des ratios de liquidité. La France plaide donc au sein des enceintes internationales pour que les normes qui s’appliquent aux établissements de crédit restent compatibles avec le maintien d’un financement élevé de l’ensemble des secteurs de notre économie. C’est notre souci, monsieur Doublet, vous le savez bien.
Si un effet structurel sur la capacité du marché bancaire à financer les collectivités territoriales ne peut être écarté, il est aujourd’hui assez difficile à caractériser et à quantifier.
En outre, le resserrement actuel de l’offre de crédit s’explique par des raisons conjoncturelles et tient, notamment, à une reconfiguration de l’offre sur le marché. Pour répondre à cette tension conjoncturelle, le Gouvernement a décidé l’ouverture d’une enveloppe sur fonds d’épargne dédiée au financement des collectivités locales et établissements publics de santé d’un montant de 3 milliards d’euros. Cette enveloppe permettra de prévenir tout manque éventuel de liquidités sur le marché des collectivités locales françaises en 2011.
Enfin, vous y avez fait allusion, le Premier ministre a annoncé que la Banque postale et la Caisse des dépôts et consignations s’apprêtent à créer une société commune spécialisée dans le financement des collectivités locales. Ce nouvel acteur du marché sera une société publique et fournira uniquement des produits de crédit simples et transparents. Il devrait être opérationnel d’ici à quelques mois. L’apparition de ce nouvel acteur autour de la Banque postale et de la Caisse des dépôts et consignations est de nature à assurer un bon équilibre entre l’offre et la demande sur ce marché.
M. le président. La parole est à M. Michel Doublet.
M. Michel Doublet. Je remercie M. le ministre de sa réponse.
J’espère que les mesures qui seront décidées et prises satisferont les besoins des collectivités et permettront à celles-ci de réaliser, ainsi qu’elles l’espèrent, des projets indispensables pour l’économie et pour l’emploi.
situation des salariés de boulanger tours nord
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 1410, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les conséquences du rachat de Planet Saturn par Boulanger acté par la décision de l’Autorité de la concurrence sont catastrophiques pour les salariés des six sites sur le plan national et très bénéfiques pour le groupe et ses actionnaires. Sur Tours, en particulier, on ne peut imaginer, à moins d’être naïf, que le groupe Mulliez, en décidant de racheter Planet Saturn, ignorait la situation de quasi-monopole qu’il créait, de fait, et l’avantage qu’il pouvait en tirer en se débarrassant du magasin de Tours Nord dont les résultats étaient en baisse et qu’il laissait plus ou moins à l’abandon depuis un certain temps. Que de cynisme !
Dans les magasins, l’ambiance est lourde aujourd’hui et le personnel est fragilisé. Alors que le groupe Mulliez conforte sa place dans le secteur de l’électrodomestique sur Tours, on imagine mal, avec cette restructuration, des concurrents venir se confronter à ce mastodonte.
Dans une situation de crise et sur un site dégradé, « les salariés sont angoissés », comme le souligne le délégué CFDT du personnel et secrétaire du comité d’entreprise du magasin. Selon lui, « il y a des gens qui travaillent depuis de nombreuses années pour Boulanger et n’envisagent en aucun cas de quitter l’enseigne », d’autant que celle-ci a les moyens économiques et financiers d’intégrer ses personnels dans d’autres magasins, comme en attestent les derniers résultats du groupe. La société de M. Mulliez a fait le choix de les abandonner. C’est inhumain !
Comment sont menées les négociations dans cette entreprise ? Chez Boulanger les procédures ne sont pas respectées ou traînent en longueur. Plusieurs rappels à l’ordre ont été signifiés à l’employeur par l’administration du travail pour non-respect de la procédure. Le 7 juillet 2011, une réunion extraordinaire était demandée par le secrétaire du comité central d’entreprise ; elle n’a eu lieu que trois mois après. Dans un courrier du 3 octobre dernier, l’accent était mis sur les difficultés dans les négociations en cours en raison de la communication tardive des documents nécessaires à une négociation loyale. Il était noté, également, que la situation était alarmante dans les établissements Boulanger et que 2 000 salariés se trouvaient dans l’incertitude. Enfin, le suicide, le 3 août dernier, d’un salarié, à qui je tiens à rendre hommage dans cet hémicycle, est la conséquence de cette situation et montre que le groupe fait peu de cas des risques psychosociaux liés à la restructuration. L’intérêt financier immédiat des actionnaires est placé au-dessus de l’intérêt collectif de l’ensemble des salariés de ces entreprises. C’est inacceptable !
Chez Boulanger, la direction a choisi de traiter les salariés comme une chose, faisant partie de l’actif de l’entreprise et dont il faudrait se débarrasser. Comment pourrait-on obliger les employés à changer d’employeur sans même qu’ils donnent leur avis, sans même qu’ils le choisissent eux-mêmes ? C’est là une entorse grave à la liberté du travail, principe pourtant inscrit dans la Constitution.
La Déclaration universelle des droits de l’homme dispose très clairement que « toute personne a droit […] au libre choix de son travail ». De nombreux textes internationaux confirment cette orientation : je pense à l’Organisation internationale du travail, à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, adoptée à Nice en 2000, et à bien d’autres textes encore. Comme le dit fort judicieusement Alain Supiot, juriste spécialiste en droit du travail, « attacher les hommes à l’entité économique transférée, ce serait revenir à l’institution romaine du colonat ». Il ajoute très justement : « on comprend qu’à notre époque, marquée par la restructuration permanente des entreprises et l’instabilité du pôle patronal qui en résulte, le colonat puisse présenter un certain attrait pour les investisseurs, qui comptent sur le travail des salariés attachés au fonds qu’ils reprennent, pour en tirer profit ».
Je demande à M. le ministre d’intervenir auprès du groupe Mulliez pour qu’il respecte les droits de ses salariés et qu’il ait l’obligation de les reclasser dans l’enseigne Boulanger, au lieu de les vendre.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur. Madame la sénatrice Marie-France Beaufils, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, qui ne peut pas être présent ce matin et vous prie de bien vouloir l’excuser, m’a chargé de répondre à votre question.
Par une décision n° 11-DCC–87 du 10 juin 2011, l’Autorité de la concurrence a autorisé la société Boulanger SA appartenant au groupe HTM, spécialisée dans le commerce de détail de produits électrodomestiques – TV, Hifi, électroménager, matériel informatique et électronique, etc. –, exploitant des magasins à l’enseigne Boulanger, à prendre le contrôle des magasins sous enseigne Saturn ou Planet Saturn dont le propriétaire est la société Media Concorde SNC.
Cette décision a été assortie d’un certain nombre d’engagements qui sont autant de mesures correctives ayant pour effet de remédier aux risques d’atteinte à la concurrence que comportait le cumul des parts de marché des parties à la concentration. Afin de remédier aux différents risques soulevés, des mesures structurelles ont été proposées consistant en la cession de six magasins.
Madame la sénatrice, vous interrogez le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie sur les conséquences de cette décision. Vos inquiétudes portent plus particulièrement sur la situation du magasin Boulanger de Tours Nord au sujet duquel vous constatez que les trente-trois salariés sont inclus dans la cession de l’entreprise. Vous estimez que la société Boulanger aurait dû avoir pour obligation de reclasser son personnel et non de le « vendre ».
La situation des salariés dans le cadre de cette opération de rachat est conforme au droit et protectrice de leurs intérêts. En effet, à l’occasion d’une telle opération de concentration, les contrats de travail en cours sont transférés automatiquement au repreneur en application des dispositions de l’article L. 1224–1 du code du travail : « Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. »
Il résulte d’une jurisprudence constante en la matière que la pérennité de ces contrats n’est pas subordonnée à l’existence d’un lien de droit entre les employeurs successifs – Cour de cassation, Assemblée plénière, 16 mars 1990, nos 89–45 730 et 86–40 686, Bulletin civil Assemblée plénière n° 4.
Par ailleurs, ces dispositions, qui sont d’ordre public – Cour de cassation, chambre sociale, 26 septembre 1990, Bulletin Civil n° 392 –, s’imposent tant aux salariés qu’aux employeurs et s’appliquent à tous les contrats en cours au jour de la modification.
Il appartiendra ainsi au mandataire, dont la désignation est prévue dans la décision de l’Autorité de la concurrence, de s’assurer de la bonne exécution des engagements, notamment de trouver des acquéreurs pour les magasins cédés et de négocier avec eux les conditions de la cession.
Dans cette attente, le mandataire devra veiller à ce que ces magasins soient gérés en bon père de famille, de manière à préserver l’intégrité de leurs actifs et de leurs valeurs marchandes. Cette mission inclut bien évidemment la préservation de l’emploi.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le secrétaire d'État, j’ai bien entendu votre réponse, mais la situation est très particulière. Comme je l’ai dit, si Boulanger a repris l’activité en question, c’est parce que ce rachat renforce considérablement le poids et la présence de ce groupe sur l’ensemble de notre pays et que, face à un tel groupe, aucune entreprise n’envisagera de reprendre l’activité concernée.
Les salariés ne peuvent même pas espérer être embauchés dans d’autres enseignes du groupe Mulliez puisqu’il leur a été répondu qu’ils ne pourront pas aller dans les unités du groupe Mulliez directement concernées par l’enseigne Boulanger. Ils sont donc dans une situation de totale incertitude au regard de la reprise du magasin et ne peuvent être réembauchés en tant que tels par le groupe.
Face à cette situation très particulière, vous avez cité des articles de loi généraux qui s’appliquent à une multitude de situations. Les salariés de Boulanger, comme ils le disent eux-mêmes, ont participé à l’amélioration de la qualité de cette enseigne, en permettant qu’elle occupe aujourd'hui une place reconnue dans son secteur d’activité. Or, tout en reconnaissant d’une certaine manière qu’ils ont rendu des services à l’entreprise, on leur dit qu’on ne veut plus d’eux et qu’il n’y aura pas de perspective de reprise dans ce même magasin dans leur domaine de compétences.
Je regrette que leur situation ne puisse faire l’objet d’une étude particulière. Il y a quand même des cas spécifiques qui peuvent déroger à la loi générale. En tout cas, il existe d’autres textes sur lesquels on pourrait peut-être s’appuyer pour étudier la situation de ces salariés.
centrale nucléaire frontalière et information du pays limitrophe
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 1399, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
M. Marc Laménie. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement sur le problème de l’information des pays limitrophes sur l’activité d’une installation nucléaire française lorsque celle-ci se trouve en secteur frontalier du territoire.
Auprès de chaque site nucléaire, on trouve une commission locale d’information, une CLI, dont le siège est souvent situé au sein des conseils généraux, ce qui est le cas de la centrale nucléaire de Chooz, dans les Ardennes. Un certain nombre d’établissements nucléaires sont situés en zone frontalière, et en qualité de président de la CLI auprès du site de Chooz, je suis régulièrement sollicité – trois ou quatre fois par an – par des élus ou des représentants du monde économique ou associatif belges pour l’accès à la communication sur la gestion du site.
En effet, il ne semble pas que la loi n° 2006–686 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire autorise le président du conseil général à nommer des personnes de nationalité étrangère membres de la CLI, même dans l’hypothèse où celle-ci s’est constituée en association, ce qui est assez souvent le cas aujourd'hui.
En conséquence, je souhaite savoir s’il existe des procédures internationales qui permettent d’informer les populations frontalières – qui ne sont qu’à trois ou quatre kilomètres à vol d’oiseau –, notamment en cas d’incident sur une installation nucléaire. J’aimerais également avoir votre avis, madame la secrétaire d'État, sur la possibilité offerte à une représentation belge de participer, en qualité de membre à part entière, à la CLI et d’être informée de ses travaux.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Laménie, Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, qui vous prie de l’excuser de ne pouvoir être présente aujourd’hui, m’a chargée de vous transmettre ces éléments de réponse.
En tant que président de la commission locale d’information auprès du site de la centrale nucléaire de Chooz, monsieur le sénateur, vous êtes régulièrement sollicité par des représentants belges pour l’accès à la commission sur la gestion du site.
La réglementation n’interdit pas au président du conseil général de nommer des membres de nationalité étrangère. Une telle nomination semble d’ailleurs pertinente au sein du collège des « personnalités qualifiées », voire au sein du collège des « associations de protection de l’environnement ».
Le décret du 12 mars 2008 relatif aux commissions locales d’information auprès des installations nucléaires de base prévoit explicitement à son article 8 que « dans le cas où une installation nucléaire est située à proximité de la frontière, le président du conseil général peut inviter des représentants de la ou des autorités locales étrangères intéressées à assister à certaines réunions ou activités de la commission ».
Par ailleurs, outre les conventions internationales et européennes relatives à l’information en cas d’accident nucléaire, la France dispose, pour chacune de nos centrales frontalières, d’accords avec les pays voisins. Ces accords portent tout particulièrement sur les modalités d’information et de coopération avec les autorités étrangères en cas d’incident ou d’accident.
Ainsi, pour la centrale de Chooz, l’accord bilatéral entre la France et la Belgique a été signé le 8 septembre 1998. Il a été décliné en un arrangement particulier entre le préfet des Ardennes et le gouverneur de la province de Namur.
Enfin, ces dispositions sont complétées par les actions que l’exploitant nucléaire met en œuvre sur son initiative à l’attention des populations transfrontalières : la centrale de Chooz a par exemple conclu des conventions d’information avec certaines communes belges proches du site.
En tout état de cause, monsieur le sénateur, les obligations de communication d’informations à caractère environnemental par les autorités publiques françaises et par les exploitants nucléaires s’appliquent également envers les citoyens belges qui en feraient la demande.
En tout cas, j’espère que ces éléments d’information apportent une réponse satisfaisante à votre question.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Madame la secrétaire d'État, je tiens tout d’abord à vous remercier de votre réponse particulièrement précise et détaillée. Il est très important d’être précis car, en ce domaine, compte tenu de la référence à la loi de 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, nous n’avons pas droit à l’erreur.
J’ajoute que nos amis belges, en raison de la réelle proximité de la frontière, sont à cet égard également demandeurs et les associer de façon tout à fait impartiale et objective est réellement très important.