M. Jean-Jacques Mirassou. Moi aussi !
M. Thierry Mariani, ministre. Je n’oublie pas M. Mirassou, qui ne manquera sans doute pas d’en reparler en d’autres occasions !
M. Roland Courteau. Le sujet n’est pas clos !
M. Thierry Mariani, ministre. D'ores et déjà, 37 millions d’euros ont été investis sur l’ensemble des voies du Sud-ouest, en particulier sur le canal du Midi. Pour faire face à ce drame que constitue la destruction des platanes par le chancre coloré et sauver ce patrimoine exceptionnel, il nous faut aller plus loin, et le Gouvernement assumera pleinement ses responsabilités.
En accord avec Nathalie Kosciusko-Morizet, j’ai proposé au Premier ministre d’adopter une stratégie offensive. Dans ce cadre, François Fillon a ainsi accepté de confier à M. Chatillon une mission consacrée à la restauration des plantations de platanes.
Par ailleurs, j’indique à M. Christian Bourquin que le projet de loi ne traite pas uniquement de la question du grand gabarit mais qu’il rappelle également l’attachement du Gouvernement aux missions d’aménagement du territoire. Il permet notamment d’adapter les méthodes de gestion de nos canaux pour tenir compte de leurs spécificités. Il faut, par exemple, tenir compte du fait que beaucoup d’entre eux sont principalement utilisés l’été.
Nous souhaitons enfin passer d’une logique d’intervention en urgence à une logique de maintenance préventive des écluses, puisque celles-ci sont les éléments les plus sensibles du réseau.
Malheureusement, l’augmentation de ces travaux sur le domaine géré par VNF entraînera un certain nombre de nuisances, qui ont été signalées. Il arrive en effet que certains travaux de mise à grand gabarit, notamment sur l’Oise, à l’image du battage des palplanches, occasionnent des nuisances sonores pour les riverains. Néanmoins, je tiens à le préciser, de tels travaux sont toujours effectués de jour et en semaine. Lorsque le travail de nuit est néanmoins nécessaire, comme cela a été le cas pour le barrage de Chatou, une information est systématiquement délivrée aux riverains. Globalement pour chaque projet, tel que le projet MAGEO, une étude est réalisée préalablement aux travaux et inclut notamment une analyse des nuisances.
Je terminerai en évoquant, à la suite de Mme Schurch et de M. Patriat, la décentralisation des voies navigables.
Le projet de loi ne remet absolument pas en cause l’expérimentation ouverte par la loi de 2004, et cette possibilité doit être préservée. La décentralisation n’est pas un facteur de déstabilisation ; elle constitue au contraire une opportunité pour le réseau secondaire.
En ce qui concerne l’expérimentation bourguignonne, j’indique à M. Patriat mon souhait de voir les discussions en cours entre la région et Mme la préfète, qui m’en a rendu compte, aboutir le plus rapidement possible.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est soumis ne résume donc pas à lui seul la relance des voies navigables que nous souhaitons mener, même s’il en constitue la clef de voûte. Ce débat, un certain nombre d’entre vous l’ont souligné, rejoint celui que nous avons eu ensemble sur la réforme portuaire, la semaine dernière. La bataille des ports se gagne à terre : voilà une expression que j’ai entendue à maintes reprises. Mais, comme le disait Jean Jaurès, « c’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source ». (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Louis Nègre. La gauche pourrait applaudir !
M. Jean-Jacques Mirassou. Cela sonne faux…
M. Thierry Mariani, ministre. Je m’efforce de m’adapter à la nouvelle majorité du Sénat ! Croyez bien que trouver une citation de Jaurès sur les fleuves n’était pas chose aisée ! (Rires.)
Mme Évelyne Didier. Chez Jaurès, c’était une image !
M. Thierry Mariani, ministre. Le projet de loi constitue une étape importante de la réforme des voies navigables, une étape indispensable à sa réussite. Il vient parachever l’initiative qui, lancée il y a vingt ans, a conduit à la création de VNF. Je suis convaincu que, compte tenu des enjeux, l’ambition que nous partageons tous pour la voie d’eau nous permettra de trouver ensemble des solutions pour affronter au moins les défis des vingt prochaines années. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR, ainsi que sur les travées du RDSE.)
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Mes chers collègues, à la demande du Gouvernement, nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous passons à la discussion des articles.
Chapitre IER
Dispositions relatives aux missions et à l’organisation de Voies navigables de France
M. le président. L'amendement n° 12, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Dans l'intitulé de cette division, remplacer les mots :
Voies navigables de France
par les mots :
Agence nationale des voies navigables
II. - Procéder à la même substitution dans l’ensemble du texte.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. En commission, une quasi-unanimité s’est faite pour maintenir le nom de Voies navigables de France au motif qu’il constitue un élément de visibilité. J’ai également entendu que ce maintien permettrait en outre de ne pas dépenser inutilement de l’argent pour créer un nouveau logo. Je crois qu’il convient cependant de se montrer prudent en la matière.
Sur cet amendement, j’espérais au moins recevoir le soutien du Gouvernement, mais M. le ministre m’a déjà annoncé qu’il se ralliait à la position adoptée par la commission ; je le regrette. En effet, les protocoles d’accord qu’il a signés le 24 juin et le 1er juillet ont été conclus sur la base du nom « Agence nationale des voies navigables », et non sur celui de « Voies navigables de France ». Si je défends à nouveau cet amendement, c’est donc aussi en vertu du respect dû au dialogue social. En effet, il appartient aux parlementaires, non pas de réécrire les termes du protocole d’accord, mais, à l’inverse, de garantir leur respect.
En outre, je pense qu’il est réellement important de donner de la lisibilité au nouveau statut fixé par ce texte au nouvel établissement : il s’agit d’un EPA, et non plus d’un EPIC. Cela suffit, notamment aux yeux des agents, à imposer un changement de nom. Ce sont bien les agents du futur établissement qui vont concrètement assurer au quotidien l’accomplissement de ses nouvelles missions. Il est donc particulièrement important qu’ils s’approprient aussi sa dénomination.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. Madame Schurch, nous avons longuement débattu de cela en commission.
Je dirai simplement que ceux qui travaillent aujourd’hui sur le terrain et qui sont des fonctionnaires de l’État portent tous un vêtement marqué par le logo de VNF. Jusqu’à présent, cela n’a vraiment posé aucun problème !
Le Gouvernement ayant, de surcroît, donné à la commission son accord sur le maintien de l’actuelle dénomination, je ne peux qu’émettre, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Sans vouloir contredire M. le rapporteur, je tiens à préciser que je n’ai pas dit que le Gouvernement était d’accord avec la commission : j’ai seulement dit qu’il s’en remettrait à la sagesse – légendaire ! – du Sénat.
Le Gouvernement a souhaité changer le nom de l’établissement public pour marquer l’importance de l’étape franchie avec cette réforme. L’esprit est le même qu’en 1991, lorsque l’ancien Office de la navigation avait pris le nom de Voies navigables de France. Ce souhait répond, de plus, aux demandes des représentants des personnels de l’État qui étaient réticents à passer de l’employeur État à l’employeur VNF, dont les salariés relèvent à ce jour du droit privé.
Le Gouvernement est cependant conscient que ce changement de nom pourrait apparaître comme une remise en cause du travail accompli par VNF depuis vingt ans. Il ferait, en outre, disparaître un nom bien connu – et reconnu ! – des acteurs de la voie d’eau.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Nous avons effectivement eu, à ce sujet, une discussion assez longue en commission.
Si elle a lieu de nouveau, c’est bien qu’il y a ambiguïté. Tout à l’heure, notre collègue Daniel Dubois a posé la question : qu’est-ce qu’un EPA dérogatoire par rapport à un EPIC ? Un EPIC, c’est un établissement à caractère industriel et commercial qui correspond à une marque et qui a un logo. Il est donc cohérent de garder la marque et le logo VNF, même si de nouvelles missions sont dévolues au nouvel organisme, au demeurant hybride.
M. le président. La parole est à M. Louis Nègre, pour explication de vote.
M. Louis Nègre. Je suis partisan du maintien de l’appellation « Voies navigables de France » compte tenu de sa notoriété et de son image, qui est excellente. Il s’agit là d’un élément très important, car il faut des années, voire des décennies pour qu’un nom s’impose ainsi et devienne un emblème.
On peut le dire, aujourd’hui, dans le domaine des transports, Voies navigables de France est une référence.
D’une manière générale, il me paraît fâcheux de renoncer à des dénominations qui disposent d’une grande notoriété, a fortiori lorsque celle-ci est particulièrement positive. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. La volonté du Gouvernement a été de regrouper tous les personnels dans un même établissement public. Ne brûlons pas le drapeau ! L’intérêt, c’est que tout le monde travaille sous le même drapeau. Il existe, il flotte au vent, tout le monde le connaît. Ne changeons pas le nom !
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Je suis d’accord avec tout ce qui a été dit. Je veux seulement faire observer que, après discussion, le Gouvernement s’était mis d’accord avec les organisations syndicales sur un autre nom.
Ce qui me gêne, c’est que, nous, parlementaires, en décidions autrement. Nous sommes en contradiction avec ce qui a été négocié.
Je suis tout à fait prête à considérer que le nom de VNF est un label. Néanmoins, cet amendement demeure justifié.
M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.
M. Louis Nègre. J’attire l’attention de notre distinguée collègue sur le fait que le peuple souverain, c’est nous ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)
M. Alain Fouché. Il a raison !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
Le titre Ier du livre III de la quatrième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 4311-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 4311-1. – L’établissement public de l’État à caractère administratif dénommé “ Voies navigables de France ” :
« 1° Assure l’exploitation, l’entretien, la maintenance, l’amélioration, l’extension et la promotion des voies navigables ainsi que de leurs dépendances, en développant un transport fluvial complémentaire des autres modes de transports ;
« 2° Est chargé de la gestion hydraulique des voies qui lui sont confiées en conciliant les usages diversifiés de la ressource aquatique, ainsi qu’en assurant l’entretien et la surveillance des ouvrages et aménagements hydrauliques situés sur le domaine qui lui est confié ;
« 3° Concourt au développement durable et à l’aménagement du territoire, notamment par la reconstitution de la continuité écologique, la conservation du patrimoine, la promotion du tourisme fluvial et des activités nautiques ;
« 4° Gère et exploite, en régie directe ou par l’intermédiaire de personnes morales de droit public ou de sociétés qu’il contrôle, le domaine de l’État qui lui est confié en vertu de l’article L. 4314-1 ainsi que son domaine privé. » ;
2° Après l’article L. 4311-1, sont insérés deux articles L. 4311-1-1 et L. 4311-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 4311-1-1. – Voies navigables de France est également chargé de l’étude de toute question relative à la navigation intérieure et à l’utilisation des cours et plans d’eau.
« Cet établissement apporte un appui technique aux autorités administratives de l’État en matière de navigation intérieure et propose toute réglementation qu’il estime nécessaire concernant l’exploitation du domaine public fluvial, les activités et les professions qui s’y rattachent ainsi que la police de la navigation intérieure.
« Art. L. 4311-1-2. – Pour l’exercice de ses pouvoirs de police de la navigation intérieure, notamment lorsqu’une situation de crise le justifie, le représentant de l’État territorialement compétent dispose des services de Voies navigables de France.
« L’établissement informe l’autorité administrative territorialement compétente de tout événement susceptible de porter gravement atteinte à l’ordre public. » ;
3° L’article L. 4311-2 est complété par des 6° à 8° ainsi rédigés :
« 6° Exploiter, à titre accessoire, l’énergie hydraulique au moyen d’installations ou d’ouvrages situés sur le domaine public fluvial mentionné à l’article L. 4311-1 du présent code en application des articles L. 511-2 ou L. 511-3 du code de l’énergie ;
« 7° Valoriser le domaine de l’État qui lui est confié en vertu de l’article L. 4314-1 ainsi que son domaine privé en procédant à des opérations d’aménagement ou de développement connexes à ses missions ou complémentaires de celles-ci ;
« 8° Créer des filiales ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes en vue de réaliser toute opération utile à ses missions, y compris celles mentionnées au 7° du présent article. » ;
4° Le 3° de l’article L. 4312-1 est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Sont électeurs au conseil d’administration toutes les catégories de personnel mentionnées à l’article L. 4312-3-1. L’élection a lieu par collèges représentant respectivement, d’une part, les personnels mentionnés aux 1° à 3° de l’article L. 4312-3-1 et, d’autre part, les personnels mentionnés au 4° du même article, dans des conditions de nature à permettre la représentation de chaque collège fixées par décret en Conseil d’État. Le nombre de représentants du personnel au conseil d’administration tient compte des effectifs respectifs des agents de droit public et des salariés de l'établissement. »
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, j’implore votre clémence : faute d’avoir eu la possibilité de m’exprimer lors de la discussion générale, je voudrais revenir sur un point qui a déjà été évoqué par plusieurs de mes collègues, notamment Jean-Jacques Mirassou, à savoir le canal du Midi.
Personnellement, je regrette vivement que les travaux de modernisation et de mise au gabarit Freycinet entrepris dans les années soixante-dix n’aient jamais été terminés sur cette voie d’eau, car c’est une condition absolue pour y faire circuler des marchandises. Ainsi, la section comprise entre Baziège et Argens n’est toujours pas modernisée. C’est un véritable gâchis, car cela rend l’ensemble de ce canal impropre au transport de marchandises par des péniches d’un certain gabarit.
Je veux insister sur un autre problème qui a déjà été soulevé aujourd'hui, celui des platanes qui bordent ce canal et dont la dimension patrimoniale est aujourd’hui menacée. Vous avez d’ailleurs indiqué, monsieur le ministre, qu’un de nos collègues s’était vu confier une mission à ce sujet.
Chacun le sait, plusieurs milliers des 42 000 platanes qui forment en quelque sorte l’architecture végétale de cette magnifique voie d’eau – c’est, parmi celles qui sont nées du génie humain, la plus ancienne d’Europe – sont contaminés par un microchampignon, le ceratocystis platani, plus communément appelé « chancre coloré ». C’est un véritable fléau, car un arbre contaminé meurt dans un délai de trois à cinq ans.
Ce champignon se serait propagé en France au cours de la Seconde Guerre mondiale, à partir de caisses en bois de platane apportées par l’armée américaine et contenant du matériel de guerre.
Le seul moyen de lutter contre le chancre coloré est d’abattre les arbres contaminés, ainsi que tous ceux, même sains, qui sont situés dans leur périmètre immédiat.
Pour les populations riveraines, pour les touristes, mais aussi pour VNF, c’est un véritable crève-cœur !
Et la maladie est en expansion, car l’eau et les bateaux sont des vecteurs de propagation ; dès lors, la progression de la contamination ne peut être qu’exponentielle. On comptait 58 foyers entre 2006 et 2009 ; on en dénombrait 130 en 2010. Ce sont en fait les 42 000 platanes qui sont menacés et, avec eux, la majesté d’un site exceptionnel. Le canal du Midi sans ses platanes, ce n’est plus le canal du Midi ! Autrement dit, c’est l’identité même de cette voie d’eau qui est menacée.
J’ai appris que le nombre annuel d’abattages pourrait concerner 4 000 arbres en 2013. À ce rythme, les 42 000 platanes ne tarderont guère à disparaître tous !
Monsieur le ministre, peut-on améliorer la prophylaxie ? Est-il possible de mieux contrôler les foyers de propagation ? Peut-on mieux former les personnes qui travaillent sur ces platanes ou à proximité ? J’aimerais obtenir des réponses à ces questions.
Certes, des replantations adaptées sont en cours et des solutions sont à l’étude, notamment la modification et la diversification des essences. Il n’en reste pas moins que l’impact de cette maladie est inéluctable.
Je conclurai mon propos par une autre question. Depuis 1996, le canal du Midi est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Or les élus et la population craignent un déclassement. Je crois savoir que l’État envisagerait de signaler à l’UNESCO le problème auquel nous sommes confrontés. Cela a-t-il été fait ?
Ainsi que Christian Bourquin l’a rappelé, lorsque, récemment, M. le Président de la République est venu en Languedoc-Roussillon, ce problème lui a été exposé. Monsieur le ministre, pouvez-vous me dire quelles mesures ont été décidées à la suite de cette visite ? Le Gouvernement a-t-il pris des initiatives ? A-t-il saisi l’UNESCO ?
L’avenir de ce canal, patrimoine exceptionnel et poumon économique de toute une région, est ici en jeu. Nous devons tous être vigilants, et je vous invite à l’être au premier chef, monsieur le ministre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. L’amendement n° 8, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, contribuant ainsi au report modal
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. La France possède 22,4 % du réseau fluvial européen, soit le plus vaste réseau navigable d’Europe. Pourtant, comme le notent de nombreux observateurs, cet atout ne se traduit pas, dans les faits, par un dynamisme de notre trafic de marchandises, puisque la voie d’eau plafonne toujours à 4 % du transport total de fret.
Pour renforcer et valoriser le trafic fluvial, il est nécessaire d’avoir une double approche globale : du fluvial en tant que tel, d’une part, comme l’a souligné le rapporteur ; du transport de marchandises alternatif à la route, d’autre part.
Notre amendement ne vise pas seulement à encourager la multimodalité ou l’intermodalité, mais aussi à favoriser de manière volontariste le report modal. En ce sens, il s’inscrit dans la droite ligne des engagements pris à travers le Grenelle de l’environnement et il fait écho à l’objectif tendant à faire passer la part du fret non routier de 14 % à 25 % en quinze ans. Cette ambition donne au transport fluvial une place et un rôle majeurs, qui doit se traduire par un report modal, et non par la concurrence entre différents modes de transport au moyen du moins-disant social et écologique.
Favoriser le report modal, ce n’est pas seulement se concentrer sur le réseau magistral, c’est aussi tout faire pour entretenir et valoriser les réseaux dits « secondaires », qui sont tout aussi nécessaires au fret, comme le montre l’exemple du canal du Midi. Le parallèle avec le fret ferroviaire est ici évident.
Je rappelle que le schéma national d’infrastructures de transport ne prévoit pas de progression de la part du fret par voie d’eau, et je le regrette. En vingt ans, nous avons perdu 2 000 postes dans le secteur fluvial, et il est prévu, dans le cadre de la RGPP, de supprimer encore 271 emplois. Comment voulez-vous faire plus et mieux avec toujours moins d’emplois ?
N’oublions pas qu’un convoi fluvial de 5 000 tonnes équivaut à 250 camions, soit une file de 7 kilomètres en moins sur les routes !
Vous le voyez, cet amendement n’a donc rien d’anecdotique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. C’est un excellent amendement, qui va dans le sens du report modal. La commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Avant de donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 8, je souhaite répondre à M. Courteau.
Le Président de la République et le Gouvernement sont pleinement conscients de la situation du canal du Midi. D’ailleurs, comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, lorsqu’il s’est rendu en Languedoc-Roussillon, Nicolas Sarkozy a pu prendre toute la mesure du problème.
Où en sont les démarches entreprises auprès de l’UNESCO ? Je vous l’avoue, je ne suis pas, en cet instant, en mesure de répondre précisément à cette question.
M. Roland Courteau. C’est ce qui m’intéresse !
M. Thierry Mariani, ministre. Je m’engage à me renseigner à ce sujet auprès du cabinet de Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, car ce sujet me paraît relever plutôt de sa compétence.
Je rappelle que 37 millions d’euros ont déjà été investis en faveur de l’ensemble des voies navigables du Sud-ouest, et en particulier du canal du Midi. Je vous confirme en outre que votre collègue Alain Chatillon s’est vu confier une mission sur la replantation de ces platanes.
Étant moi-même originaire du Midi, mais du Sud-est, je peux vous dire que le chancre coloré prolifère équitablement, hélas, sur les deux rives du Rhône : j’ai pu constater les ravages de cette maladie dans ma propre région.
J’en viens à l’amendement n° 8.
Pour le transport des marchandises, il est acté à l’article 11 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement que le développement de l’usage du transport fluvial revêt un caractère prioritaire. Ce texte prévoit que la part du fret non routier et non aérien doit passer de 14 % à 25 % à l’échéance de 2022.
Cet amendement tend à expliciter les missions de la future agence en mentionnant la contribution au report modal, ce qui dépasse l’objectif de complémentarité avec les autres modes de transport et paraît plus cohérent par rapport aux dispositions de la loi Grenelle 1.
J’émets donc un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 9, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le personnel de l'établissement assure la maîtrise de la gestion et de l'exploitation des voies d'eau.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. La valorisation, s’agissant du domaine public de l’État ou de toute autre personne publique, ne peut s’entendre comme la seule maximisation du profit. Elle a aussi pour objectif la recherche d’une meilleure satisfaction de l’intérêt général.
Au regard des différentes fonctions du réseau des voies navigables, c’est-à-dire le transport fluvial, la prévention des crues, l’alimentation en eau des usagers urbains, agricoles ou industriels, la production hydroélectrique ou le tourisme, nous estimons que la gestion et l’exploitation des voies d’eau doivent se faire sous maîtrise publique de l’établissement.
De plus, et c’est le sens de notre amendement, il nous paraît essentiel d’encadrer la réalisation d’opérations d’aménagement ou bien d’opérations connexes aux missions de l’EPA. Celle-ci doit se faire sous maîtrise publique, afin de permettre aux personnels de l’EPA d’assurer l’ensemble des opérations liées à la gestion ainsi qu’à l’exploitation des voies d’eau et des installations.
Notre amendement autorise la sous-traitance et le recours à des prestataires de service sur le domaine public, mais en encadrant tout risque de privatisation des missions dévolues à l’EPA. En définitive, la valorisation des biens publics, quels qu’ils soient, doit s’entendre comme une valorisation au service de l’utilité publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. Il revient, bien sûr, aux personnels de VNF de gérer et d’exploiter les voies navigables. Faut-il, pour autant, interdire à l’établissement public tout recours à des prestataires extérieurs pour l’exécution de certaines parties de ces missions ? Il me semble que ce serait hypothéquer l’avenir. Vous le savez, les métiers changent, et VNF peut avoir ponctuellement besoin de spécialistes qui ne font pas partie de son personnel.
La commission, qui avait déjà repoussé votre proposition la semaine dernière, madame Schurch, a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Comme l’a dit fort justement M. le rapporteur, l’adoption de cet amendement aurait pour conséquence d’exclure toute possibilité de partenariat ou de sous-traitance avec une entreprise.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Je comprends votre souci, ma chère collègue, mais la rédaction de votre amendement pose un réel problème. Si vous aviez écrit que VNF devait assurer exclusivement la maîtrise d’ouvrage, nous aurions pu vous suivre. Or tel n’est pas le cas.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement ne vise pas à interdire la sous-traitance ou le recours à des experts extérieurs. Nous avons écrit que le personnel de l’établissement devait assurer « la maîtrise de la gestion et de l’exploitation ». Nous ne demandons rien d’autre et la rédaction de cet amendement est donc tout à fait correcte !