M. le président. L’amendement n° 10, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 4311-1-3. - L'État et l'Agence de financement des infrastructures de transport de France concourent au financement des actions et projets prévus pour les voies navigables. »
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Par cet amendement, que l’on pourrait qualifier de déclaratoire, nous souhaitons réaffirmer la nécessité d’investissements en faveur des voies navigables réalisés par l’État et l’AFITF.
Vous nous répondrez que le Gouvernement vient de s’engager, notamment au travers du plan de relance de la voie d’eau, à réaliser un investissement de 840 millions d’euros. Nous sommes malheureusement habitués, en particulier depuis le Grenelle de l’environnement, à voir de grandes déclarations tomber aux oubliettes au nom de la rigueur budgétaire...
Tous les orateurs l’ont dit, les voies d’eau, et notamment les digues, sont dans un état lamentable. Faute d’investissements suffisants, une grande partie du réseau risque d’être définitivement abandonnée, ce qui mettrait irrémédiablement un terme à toute volonté de relance de la voie d’eau et de rééquilibrage modal au profit des modes de transport alternatifs à la route.
Je rappelle que les engagements financiers nécessaires à la rénovation de la voie d’eau ont été estimés à plus de 2,5 milliards d’euros. Des engagements fermes devront donc figurer dans la prochaine loi de finances et les décisions inscrites dans le SNIT, être mises en œuvre.
Nous souhaitons, par ailleurs, dénoncer la volonté du Gouvernement de se désengager de ses responsabilités, notamment en s’en déchargeant sur les collectivités, mais aussi en recourant de façon accrue aux partenariats public-privé.
Nous estimons, pour notre part, que la révolution écologique passe par un engagement fort et acté de l’État, garant de l’intérêt général, et par l’inscription des financements correspondants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. La réalité vous donne satisfaction, madame Schurch, puisque les subventions représentent déjà le quart des financements de VNF et que le regroupement des agents des services de l’État va considérablement augmenter la masse salariale, de l’ordre de 180 millions d'euros, à la charge de l’État.
Cependant, la précision que vous voulez introduire n’est peut-être pas inutile pour garantir la participation de l’AFTIF au financement des voies navigables. Dès lors que le présent amendement ne fixe aucun montant de participation, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Les modalités du financement des projets de développement de la voie d’eau seront examinées le moment venu et ce financement sera assuré au cas par cas non seulement par le recours à des crédits budgétaires de l’État et/ou de l’AFTIF, mais également par la recherche de cofinancements auprès des collectivités territoriales concernées, de partenaires privés et de l’Europe.
Le Gouvernement ne souhaitant pas restreindre ces possibilités de financement pour contribuer au développement de la voie d’eau, il émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous apporter quelques précisions. L’amendement n° 10 dispose : « L’État et l’Agence de financement des infrastructures de transport de France concourent au financement… » Ce n’est pas l’amendement que nous avions examiné dans un premier temps en commission : il ne comporte aucune mention impliquant une exclusivité quant à l’origine des financements.
Cet amendement, sur lequel je confirme l’avis favorable de la commission, ne devrait donc pas vous gêner en quoi que ce soit, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Passé le stade des bonnes intentions, à l’heure des travaux pratiques, pour être sûr de ne pas être débordé, monsieur le ministre, vous fermez en quelque sorte l’écluse… Nous le regrettons !
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 4311-1-4. Les investissements effectués par l'établissement public Voies navigables de France pour la modernisation ou le développement des voies d’eau sont réalisés dans le cadre de dispositifs financiers publics, excluant le recours aux contrats de concessions ou de partenariat public-privé. » ;
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. La relance de la voie d’eau et la nécessaire mobilisation de ressources nouvelles pour le financement de la mise en sécurité, de la modernisation et de l’exploitation du réseau ne doivent pas conduire à faire accepter l’externalisation des tâches d’entretien et d’ingénierie publique.
Sous prétexte d’économies à court terme, mettant en lumière l’affaiblissement de la capacité d’investissement à la fois de l’État et des collectivités, un tel procédé est très clairement, en réalité, un prélude à la privatisation des infrastructures. En tout cas, cela nous semble dangereux. Pourtant, ce type de contrat fait florès et tend à être généralisé à l’ensemble des infrastructures et équipements publics, notamment dans le secteur de la voie d’eau. En témoigne le projet de canal Seine-Nord Europe.
À l’inverse, nous estimons qu’il est urgent d’engager une politique publique ambitieuse pour l’entretien et l’exploitation des infrastructures, seule capable d’assurer réellement le développement d’un réseau multimodal et intégré. Et, monsieur le ministre, vous venez de nous confirmer une nouvelle fois votre ferme engagement en la matière.
Pourtant, votre gouvernement non seulement continue de mener une politique d’austérité et de rigueur, notamment par le biais de la RGPP, mais, plus grave, se dessaisit d’un financement des infrastructures à travers des concessions ou le recours aux PPP, les partenariats public-privé. Il s’agit bien là d’une logique de privatisation répondant à des impératifs budgétaires, et ce pour le plus grand bénéfice des actionnaires des entreprises du bâtiment.
Pour notre part, nous sommes très circonspects devant cette généralisation des PPP, notamment en ce qui concerne la reconstruction des barrages manuels sur la Meuse et l’Aisne.
Le transfert de la maîtrise d’ouvrage aux géants du BTP, dont le principal objectif est de verser des dividendes, ainsi que la suppression d’emplois publics qui y est liée nous semblent insupportables et en total décalage avec une politique des transports ambitieuse, répondant aux impératifs découlant du Grenelle de l’environnement.
Les récents exemples de mise en œuvre de PPP démontrent que, loin de constituer un mode de marché public efficace, cette solution se traduit à terme par des coûts plus élevés. Le recours à cette forme de marché public entérine également une perte de maîtrise publique qui n’est pas conforme aux objectifs d’intérêt général assignés à une politique des transports favorisant l’intermodalité et garantissant un niveau élevé de sécurité.
L’exemple de l’hôpital d’Évry constitue à ce titre un nouvel exemple de l’incapacité du privé, trop enclin à privilégier ses bénéfices, à répondre à des objectifs d’intérêt général.
Pour cette raison, et par le biais du présent amendement, nous voulons alerter nos collègues et le Gouvernement sur les conséquences néfastes de la généralisation du recours aux PPP et interdire ceux-ci pour la réalisation et l’exploitation des infrastructures fluviales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. Une telle interdiction paraît excessive, madame Schurch.
Je rappelle que les contrats de concession – puisque vous visez à la fois les concessions et les PPP – datent du XVIIe siècle et qu’ils ont servi à creuser bien des canaux.
Quant au partenariat public-privé, je ne pense pas qu’il faille le diaboliser : c’est un outil parmi d’autres au sein de la commande publique. Il a certes un coût, mais il permet de mobiliser des crédits importants : c’est le cas pour la réalisation du canal Seine-Nord Europe, dont le montant global dépasse 4 milliards d’euros. Il serait donc dommage de priver VNF de ce moyen d’action.
De surcroît, il ne s’agit pas, contrairement à ce que vous dites pressentir, de généraliser un tel système. Je rappelle que trois critères sont requis : l’urgence, la complexité, un bilan globalement favorable. J’ajoute qu’une mission d’appui aux PPP doit donner son feu vert.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Comme l’a fort justement indiqué M. le rapporteur, si l’amendement n° 14 était adopté, la concrétisation du projet du canal Seine-Nord Europe ou du projet tendant à reconstruire vingt-neuf barrages manuels sur le réseau fluvial serait impossible.
Les PPP constituent un outil novateur et permettent de réaliser un grand nombre d’investissements.
Je rappelle que, si quatre lignes de TGV peuvent actuellement être construites en même temps, c’est grâce au recours aux PPP. Bien sûr, il ne s’agit pas du domaine fluvial, mais je me permets de citer cet exemple, car je sais que les membres de votre groupe, madame Schurch, sont particulièrement attachés au développement du transport ferroviaire.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Louis Nègre, pour explication de vote.
M. Louis Nègre. Notre collègue Mme Schurch considère que les PPP doivent être rejetés systématiquement.
Il faut regarder ces partenariats avec les yeux grands ouverts. Le PPP, c’est un peu comme la langue d’Ésope : ce peut être la pire et la meilleure des choses ! Il reste que, compte tenu des conditions qui sont imposées en cas de recours à de tels partenariats, les délais et les prix sont rigoureusement encadrés, ce qui n’est pas rien. Et n’oublions pas l’engagement de la partie privée d’entretenir l’ouvrage.
C’est pourquoi il me semble qu’il ne faut pas rejeter a priori les PPP.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. On ne peut pas laisser dire que les entreprises du bâtiment et de travaux publics ne cherchent qu’à supprimer des emplois publics. Elles jouent un rôle complémentaire de celui de l’État. Si ces entreprises n’existaient pas, les lignes à grande vitesse en cours de réalisation ne sortiraient jamais de terre !
Par conséquent, j’estime que l’amendement n° 14 n’est pas acceptable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Le projet du canal Seine-Nord Europe n’aurait pas vu le jour sans un PPP.
Je souhaite cependant évoquer à mon tour le contre-exemple du fameux hôpital sud-francilien, qui démontre que le partenariat public-privé peut aussi, comme le disait notre collègue Louis Nègre, être la pire des choses. Un contrôle en amont d’un tel montage est évidemment nécessaire et le recours au PPP n’est pas un dogme religieux dont il ne faudrait jamais s’écarter !
M. Louis Nègre. Voilà !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mmes Schurch et Didier, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
1° Alinéa 15
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’établissement ne peut confier la réalisation des opérations d’aménagement et de construction qu'à des organismes visés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, et aux articles L. 326-1 et L. 327-1 du code de l’urbanisme ;
2° Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
8° Créer des filiales à capitaux majoritairement publics ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes à capitaux majoritairement publics en vue de réaliser toute opération utile à ses missions, y compris celles mentionnées au 7° du présent article. » ;
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. L’article 1er définit les missions imparties au nouvel établissement public administratif. Ainsi, il est prévu que l’établissement peut « valoriser le domaine de l’État qui lui est confié […] ainsi que son domaine privé en procédant à des opérations d’aménagement ou de développement connexes à ses missions ou complémentaires de celles-ci » et qu’il peut « créer des filiales ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes en vue de réaliser toute opération utile à ses missions », y compris celles de valorisation par des opérations d’aménagement.
Non encadrée, une telle disposition aboutirait manifestement à laisser à l’EPA la possibilité de privatiser les installations et leurs dépendances comme leur gestion.
Nous proposons, par le présent amendement rectifié – et la rectification apportée va plus loin que celle qu’a suggérée M. le rapporteur –, que les opérations d’aménagement ne puissent être déléguées qu’aux seuls organismes d’HLM, aux établissements publics d’aménagement et aux sociétés publiques locales d’aménagement, ou SPLA.
En effet, la rédaction qui nous a été soumise pour la phrase visant à compléter l’alinéa 15 de l’article 1er ne permettait pas d’inscrire une exclusivité de délégation au profit des organismes d’HLM, des établissements publics d’aménagement et autres SPLA.
Par ailleurs, et sur ce point notre amendement est identique à celui de nos collègues socialistes, nous proposons de circonscrire les possibilités de filialisation ou de prises de participations aux sociétés à capitaux majoritairement publics. Une telle précision est à notre sens particulièrement utile pour garantir le caractère d’intérêt général des opérations ainsi menées.
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Esnol, Navarro, Mirassou, Ries, M. Bourquin et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
1° Alinéa 15
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’établissement peut confier la réalisation des opérations d’aménagement et de construction à des organismes visés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, et aux articles L. 326-1 et L. 327-1 du code de l’urbanisme ;
2° Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 8° Créer des filiales à capitaux majoritairement publics ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes à capitaux majoritairement publics en vue de réaliser toute opération utile à ses missions, y compris celles mentionnées au 7° du présent article. » ;
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Par le biais de cet amendement, nous souhaitons « marquer » le présent texte de plusieurs valeurs fondamentales à nos yeux.
Permettez-moi tout d’abord d’insister sur le caractère accessoire de la délégation de valorisation foncière et d’exploitation de l’énergie de la nouvelle agence.
Nous pensons que la valorisation foncière et immobilière doit être conduite afin de valoriser les territoires concernés et pas seulement le bilan financier de la nouvelle agence.
Mes chers collègues, vous savez comme moi que l’on attend beaucoup de la manne foncière que représentent les emprises du domaine public de l’État. Depuis des années, nous assistons à la grande braderie du domaine public : emprises de RFF, de la SNCF, anciennes casernes et autres emprises militaires ou encore, comme on l’a vu récemment, bâtiments classés et autres monuments historiques. Tout est bon, aux yeux de l’actuelle majorité présidentielle, pour « faire de l’argent » et combler les trous !
L’État se comporte comme un propriétaire privé, sans montrer aucune considération pour les politiques publiques qui sont conduites dans les territoires où figure le patrimoine qu’il brade. C’est devenu une manie qui ne serait pas problématique si elle n’avait pour conséquence, alors que sévit une crise du foncier disponible, de faire monter les prix.
Pour notre part, nous entendons mettre fin à ce type de pratique. C’en est fini de l’État spéculateur ! Si VNF exerce une telle mission, l’établissement devra le faire dans le respect d’un certain nombre de principes. Nous estimons en effet que la création de filiales ou les prises de participations dans des entreprises, fussent-elles publiques, ne doivent pas être considérées comme une mission en soi.
Par ailleurs, nous vous avons fait part de notre interrogation quant au choix effectué, à savoir le statut d’établissement public d’État. Certes, cette option correspond au souci de préserver l’intérêt général. Nous ne doutons pas que ce même souci anime l’ensemble des personnels concernés par la présente réforme. Toutefois, nous souhaitons veiller à ce que les missions de VNF ne puissent être confiées qu’à des filiales à capitaux majoritairement publics ou, dans le cas particulier des opérations d’aménagement en cœur de ville, à des opérateurs dédiés, comme les organismes d’HLM, les établissements publics d’aménagement ou les SPLA.
Tel est le sens de l’amendement n° 3 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Grignon, rapporteur. L’amendement n° 11 rectifié comprend deux parties, qui auraient pu faire l’objet de deux amendements distincts : notre débat en eût été plus clair ! La première partie de l’amendement vise la possibilité pour VNF de confier la réalisation d’opérations d’aménagement et de construction. La seconde tend à permettre à l’agence de créer des filiales. Il s'agit de deux problèmes différents.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l’économie. Exact !
M. Francis Grignon, rapporteur. Or nous sommes favorables à la deuxième partie de l’amendement, mais pas à la première. En effet, madame Schurch, l’expérience nous montre que prévoir que « l’établissement ne peut confier la réalisation des opérations d’aménagement et de construction qu'à des organismes visés à l’article L. 411-2 » serait beaucoup trop restrictif.
C'est pourquoi, si la commission n’a pas pu se prononcer sur cet amendement, à titre personnel, j’y suis défavorable.
Dans la mesure où l’amendement n° 3 rectifié prévoit une faculté là où celui qu’a défendu Mme Schurch vise à établir une exclusivité – « peut » et non « ne peut que » –, j’y suis, à l’inverse, personnellement favorable. Cependant, la commission a souhaité, sur cet amendement, s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée, pour des raisons qui tiennent à la partie de l’amendement relative à la création de filiales : comme nous avons décidé de mettre en place un EPA, il n’est pas illogique que ses filiales soient créées avec des organismes à capitaux majoritairement publics.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Mariani, ministre. Les opérations d’aménagement seront bien sûr menées, dans la majorité des cas, par un organisme public. Pour autant, il peut y avoir des cas où l’établissement aura à traiter avec un aménageur privé, notamment sur de petites parcelles. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 11 rectifié.
S’agissant de l’amendement n° 3 rectifié, le Gouvernement est tout à fait d'accord pour que l’établissement, dans des cas particuliers d’aménagement en cœur de ville, puisse confier la réalisation d’opérations spécifiques, notamment quand il s'agit de logements, à des organismes HLM, des établissements publics d’aménagement ou des SPLA, dans le respect des règles afférentes à la commande publique.
En revanche, pour la composition du capital des sociétés filiales créées par VNF afin de conduire les opérations envisagées, l’objectif du Gouvernement est précisément que la mobilisation de capitaux privés ait un effet de levier par rapport à la situation résultant de la seule utilisation des ressources publiques. Dès lors, imposer une participation majoritaire de capitaux publics restreindrait le nombre et l’ampleur des opérations susceptibles d’être réalisées.
Monsieur Courteau, je vous suggère donc de supprimer le 2° du texte proposé, ce qui me permettrait d’émettre un avis favorable sur l’amendement.
M. le président. Monsieur Courteau, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le ministre ?
M. Roland Courteau. Non, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Les dispositions de l’amendement n° 3 rectifié répondent parfaitement à l’inquiétude que j’ai manifestée tout à l'heure, quand j’ai souligné que les nouvelles missions de VNF pourraient susciter des dérapages et entretenir la confusion des genres.
Le texte de cet amendement a le mérite de recentrer VNF sur son cœur de métier, tout en préservant le principe d’une majorité de capitaux publics dans ses filiales et en garantissant la nature des missions exercées. Par conséquent, le dispositif prévu, tout en donnant à VNF la flexibilité nécessaire pour réaliser les aménagements qui s’imposent, est suffisamment encadré pour éviter les dérapages que j’évoquais tout à l'heure et dont je soulignais qu’ils pouvaient être dangereux.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, quand vous demandez pourquoi les capitaux privés ne pourraient être majoritaires dans ces filiales, vous faites sauter un verrou. Nous nous inscrivons en faux contre cette conception, et nous maintenons donc l’amendement tel qu’il est rédigé.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Monsieur Courteau, je tiens à vous dire que la vente à bon prix d’un bien de l’État n’est pas obligatoirement un acte spéculatif. Ce peut être un acte d’intérêt général,…
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Daniel Dubois. … tout simplement parce qu’il s'agit là d’une source d’argent public.
M. Roland Courteau. Sauf quand le bien est bradé !
M. Daniel Dubois. Aujourd'hui, de nombreuses collectivités vendent des immeubles,…
M. Charles Revet. Et en construisent d’autres !
M. Daniel Dubois. … parce qu’elles estiment qu’elles n’en ont plus besoin. Très honnêtement, je pense que les vendre au meilleur prix est une décision d’intérêt général. Il y a là certainement une différence d’approche entre nous, mais je tenais à souligner ce point.
En outre, je voudrais faire une analogie avec les organismes HLM, dont on parle beaucoup. Ceux-ci étaient pour la plupart des EPA, et on en a fait des OPH, des offices publics de l’habitat, qui sont des EPIC, en partie, justement, pour leur permettre d’agir avec des acteurs privés.
Je vous le rappelle, aujourd'hui, les organismes HLM peuvent acheter des logements auprès d’opérateurs privés. Je ne comprends donc pas pourquoi on diabolise à ce point les opérateurs privés,…
M. Roland Courteau. Parce qu’il y a eu des dérapages !
M. Daniel Dubois. … en manifestant un tel dogmatisme.
Attention, mes chers collègues : au moment où l’argent public est rare, prenez garde à ne pas piéger les collectivités locales. En effet, si vous interdisez à VNF d’intervenir dans certains cas spécifiques en partenariat avec des acteurs privés et rendez obligatoire la constitution de structures publiques, vous contraindrez les collectivités à investir de l’argent public dans ces organismes, alors qu’elles n’en ont plus guère et qu’elles pourraient en consacrer à d’autres actions. Je vous invite donc à la prudence.
En tout cas, à titre personnel, je partage l’avis du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le rapporteur, j’ai entendu vos explications. La première partie de l’amendement n° 11 rectifié, qui vise à modifier l’alinéa 15 de l’article, est très exclusive, j’en conviens. Nous aurions pu prévoir que l’établissement « peut confier prioritairement ou majoritairement la réalisation des opérations d’aménagement ». Quoi qu'il en soit, je vais retirer cet amendement pour me rallier à l’amendement n° 3 rectifié, dont les autres dispositions sont strictement les mêmes que celles que j’ai défendues.
Par ailleurs, monsieur Dubois, pourquoi l’argent est-il rare ? À mon avis, il n’est pas rare pour tout le monde !
M. Jean-Jacques Mirassou. Bravo !
Mme Mireille Schurch. Il faudrait tout de même veiller à alimenter correctement les caisses des collectivités territoriales, ne serait-ce qu’en puisant à des sources auxquelles le Gouvernement a manifestement renoncé jusqu’à présent.
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié est retiré.
La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur l’amendement n° 3 rectifié.
M. Roland Courteau. Monsieur Dubois, il est vrai que, dans certains cas, on peut vendre à bon prix les biens publics, mais ces opérations ressemblent parfois à ce que j’ai qualifié tout à l'heure de grande ou très grande braderie. Et là, les ventes ne se font pas à bon prix !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Sans allonger notre débat, je rappellerai qu’il existe dans toutes les collectivités de bons gestionnaires, qui sont parfois de gauche et très souvent de droite ! (Sourires.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Comme à Chantilly ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Thierry Mariani, ministre. Puisque le texte de l’amendement n° 3 rectifié reste inchangé, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je prendrai un exemple simple : celui de l’hydroélectricité. Faut-il que VNF soit majoritaire dans la filiale qui exploite les turbines, alors que, à l’évidence, ce n’est pas son cœur de métier. Autant une participation a du sens, autant il n'est pas logique que VNF ou le secteur public soient majoritaires dans ce type d’activités. Voilà pourquoi nous nous opposons à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par MM. Esnol, Navarro, Mirassou, Ries, M. Bourquin et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Alinéa 15
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