M. Jacques Mahéas. Je citerai encore Le Monde du 21 avril dernier, pour lequel ce texte de loi a bien vocation à s’appliquer à un seul homme : « Faut-il penser que le métier de préfet souffre d’une crise de vocation ? Ou que les hauts fonctionnaires au service du Président de la République et de sa politique, comme Christian Lambert, ne sont finalement pas aussi nombreux, au point qu’il faut absolument et contre les règles en vigueur prolonger leur affectation ? »

Plus loin, l’auteur de l’article ajoute : « Le 5 juin, Christian Lambert aura 65 ans. » Aussi le conseil des ministres a-t-il tranché : il faut sauver le préfet Lambert de l’obligation de partir à la retraite et le maintenir à son poste.

En clair, M. Lambert rempile au moins jusqu’en 2012 ! Mais, attention ! « le Gouvernement conservera le pouvoir à tout moment de mettre fin aux fonctions de l’intéressé »…

Enfin, cerise sur le gâteau, l’urgence est telle que l’étude d’impact, en douzième et dernière page, justifie la mise en œuvre de la réforme pour une application immédiate. Que de précautions écrites ! Ainsi, « aucun décret d’application n’est nécessaire… Il n’y a pas lieu d’envisager d’adaptation ou de mention d’application outre-mer… et enfin l’objet de la mesure peut conserver, sans qu’il soit besoin de le préciser, les situations en cours ». Il n’est pas besoin de le préciser, mais cela va tout de même mieux en le disant !

Et l’étude de se clore ainsi : « Le maintien au-delà de la limite d’âge ne pouvant en aucun cas être imposée à l’intéressé, il n’y a pas lieu de prévoir des mesures d’accompagnement ou un différé dans l’entrée en vigueur de ces dispositions. »

Tout est bien mis en œuvre, pour ne pas dire ficelé, afin que la loi s’applique au 5 juin prochain.

Se pose, troisièmement, la question de l’inféodation. Les emplois visés par ce texte comportent une large marge d’appréciation du politique. On peut légitimement s’interroger sur la notion d’indépendance de ces hauts fonctionnaires, même s’ils sont évidemment tenus d’appliquer la politique du Gouvernement.

Il n’y a pas si longtemps, on mettait en avant dans la haute fonction publique, la notion de neutralité, le sens du service de l’État, l’indépendance par rapport aux politiques. Ces qualités ne semblent plus reconnues.

Quatrièmement, ces situations sont-elles si imprévisibles qu’il soit nécessaire de généraliser quasiment ce qui, aujourd’hui, est une exception ?

Faut-il croire que, à l’heure où nos administrations centrales sont dotées de secrétaires généraux et de directions des ressources humaines performantes, une anticipation des dates de départ soit à ce point complexe ?

Tout fonctionnaire de l’État est invité à déposer son dossier de demande de retraite, pour instruction, au service des pensions de Nantes six mois au minimum avant sa date de départ. Date qui, dans le cas qui nous préoccupe, ne connaît aucune incertitude puisqu’il s’agit d’une date couperet : le jour anniversaire des 65 ans de la personne. Rien d’imprévisible à cela !

D’une certaine manière, ce projet de loi ne fait-il pas qu’accroître les pouvoirs de nomination à la décision du Gouvernement, déjà discrétionnaire ?

Cinquièmement, des adaptations nombreuses sont déjà possibles ; des situations dérogatoires existent

Les arguments mis en avant pour justifier ce projet de loi ne sont pas convaincants. La dérogation proposée va bien au-delà de ce qui est nécessaire pour répondre au problème posé, même si l’on peut admettre qu’il peut y avoir dans certains cas une insécurité juridique.

Le journal Le Monde daté du 21 avril dernier, toujours, relève « qu’à un an de l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy peut difficilement se passer de hauts fonctionnaires qui mettent en œuvre sa politique avec autant de zèle et, selon son ministre de l’intérieur, "d’efficacité" ».

Demain, ce sera peut-être le cas de Jean-Jacques Aillagon. La Lettre de l’Expansion du 27 avril 2011 révèle que ce dernier va s’activer pour obtenir de l’Élysée qu’il puisse terminer son mandat de quatre ans à la présidence du château de Versailles au-delà de la limite d’âge de 65 ans, qu’il atteindra en octobre prochain.

L’arsenal législatif et jurisprudentiel couvre donc tous les cas qui pourraient être problématiques, sauf un… à ma connaissance ! Je vous laisse deviner lequel !

Bien sûr, je comprends qu’un recteur puisse finir une année scolaire : c’est une adaptation tout à fait logique et légitime. Mais là, on passe à deux ans, ce qui est quand même beaucoup !

Alors, sixièmement, on met en avant l’inégalité avec les non-fonctionnaires, appelés opportunément à la rescousse.

Notons que, dans l’étude d’impact, il est indiqué que la limite d’âge n’est pas applicable à la cessation de fonctions d’une personne qui n’a pas la qualité d’agent public préalablement à sa nomination sur un emploi à la décision du Gouvernement.

À la page 15 de son rapport, M. Vial apporte des précisions importantes : « Selon les indications fournies par la direction générale de l’administration et de la fonction publique, les non-fonctionnaires seraient peu nombreux. » Effectivement, les cas doivent être si nombreux – et ne devraient donc pas venir au secours de l’argumentation du Gouvernement – qu’ils ne sont pas dénombrés dans l’étude d’impact. C’est particulièrement curieux !

Ainsi, monsieur le secrétaire d'État chargé de la fonction publique, vos services ne seraient pas en mesure de dénombrer, sur les 500 à 600 personnels concernés par ce type de nominations à la décision du Gouvernement, le nombre exact de non-fonctionnaires ?...

Si l’on interprète les graphiques fournis sur l’âge des ambassadeurs en poste, qui représentent le plus gros effectif des emplois à la décision du Gouvernement, on en compte seulement deux – sur 160 – qui ont dépassé la limite d’âge d’un an, grâce aux multiples dérogations possibles. Aucun n’a plus de 66 ans. Donc, les personnels non-fonctionnaires qui se maintiendraient au-delà de la limite imposée aux fonctionnaires relèvent, à mon avis, de la pure fiction !

Était-il nécessaire de légiférer ? Non, et je l’ai bien montré.

L’impossibilité de procéder à un remplacement relève toujours d’une appréciation.

L’étude d’impact souligne en outre dans sa dernière page que « l’option qui sera ouverte et qui a, en principe, vocation à n’être utilisée que dans un contexte particulier, n’est susceptible de concerner que quelques unités tout au plus chaque année. » A-t-on, dans ce cas, besoin d’une loi ?

Plusieurs de mes collègues de l’Assemblée nationale ont interrogé M. Baroin, en tant que porte-parole du Gouvernement, sur ce texte afin de comprendre pourquoi son article unique n’avait pas été étudié au moment de l’examen du projet de réforme des retraites, en novembre dernier, avec l’ensemble des questions portant directement ou indirectement sur les retraites. Cette question est pertinente et je vous la pose à mon tour, monsieur le secrétaire d'Etat.

On légifère pour une, voire deux personnes… À ce rythme, il y aura autant de lois à voter que de cas particuliers à résoudre ! Alors que se multiplient les lois, ce qui est préjudiciable à leur qualité et à leur application, le présent texte vient apporter – et à une heure très avancée de la nuit – sa contribution à l’édification de cette tour de Babel législative.

Pour être crédibles, les hypothèses visées par ce projet de loi devraient être mieux éclairées et précisées, compte tenu du pouvoir discrétionnaire dont dispose déjà le Gouvernement concernant les nominations à ces emplois.

À force de faire des lois pour des cas individuels, ne risque-t-on pas de glisser de l’état de droit à l’état de passe-droits ?

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste du Sénat votera contre ce projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi tend à modifier les conditions d’exercice des fonctionnaires occupant un emploi à la décision du Gouvernement. Plus précisément, il lève la limite d’âge au-delà de laquelle un fonctionnaire ne peut plus exercer dans son corps d’origine, afin de lui permettre de poursuivre auprès du Gouvernement les missions que celui-ci a décidé de lui confier.

Pour justifier cette mesure, le Gouvernement affirme que l’état actuel du droit manque de cohérence puisque les personnes occupant un emploi à la décision du Gouvernement, mais n’étant pas fonctionnaires, ne sont, pour leur part, concernées par aucune limite d’âge.

Cette précision nous amène à poser cette question toute simple : pourquoi, alors, ne pas proposer aux quelques fonctionnaires concernés d’ouvrir leurs droits à retraite au sein de la fonction publique et de poursuivre, sous un contrat de droit privé, les missions qui leur sont confiées par le Gouvernement ? Cette solution, facile à mettre en œuvre, présente l’avantage de ne pas exiger de modifications législatives. Mais elle présente l’inconvénient de ne pas convenir à toutes les situations. Elle aurait pu être opérante pour M. Guéant, qui était secrétaire général de l’Élysée à 65 ans et trois mois, et donc en infraction avec la loi, elle ne peut l’être pour d’autres fonctions, comme celles de préfet, par exemple.

Cette première question nous a d’ailleurs conduits à nous en poser deux autres.

La première a trait à la situation de la fonction publique dans notre pays. Faut-il que celle-ci soit dans une situation dramatique quant au nombre de hauts fonctionnaires, à leur niveau de compétences, à la qualité de leur formation, pour que le départ à la retraite de l’un d’entre eux entraîne une désorganisation telle du service qu’il accomplit que le Gouvernement soit contraint de proposer un tel projet de loi !

Pourtant, l’étude d’impact réalisée précise qu’il ne s’agit que de «quelques unités », ce qui nous donne à penser – mais nous en étions déjà convaincus – que l’excellence de notre fonction publique n’est pas en cause.

Votre politique de réduction drastique des moyens qui lui sont consacrés, l’opposition que vous tentez en permanence de construire entre les fonctionnaires et les salariés de droit privé participent, certes, d’une déstabilisation de la fonction publique, accusée par votre majorité de tous les maux, mais ne peuvent expliquer ce projet de loi.

À moins que le Gouvernement n’ait quelques difficultés à trouver des hauts fonctionnaires acceptant de mener à bien la politique qui est la sienne…

À titre d’exemple, chacun se souvient de la fronde récente d’une partie des ambassadeurs de France qui, dans une tribune publiée par le journal Le Monde, constatait, pour le regretter, que la voix de la France dans le monde diminue d’intensité. Ces ambassadeurs, hauts fonctionnaires, nommés de manière discrétionnaire par le Gouvernement, potentiellement concernés par ce projet de loi, affirmaient : « La manœuvre ne trompe plus personne : quand les événements sont contrariants pour les mises en scène présidentielles, les corps d’État sont alors désignés comme responsables. »

Dans ce contexte, sans doute est-il préférable pour le Gouvernement de conserver en poste des ambassadeurs qui, eux, ne critiquent pas la politique qu’il conduit !

Au final, nous nous sommes posé une dernière question, sans doute la plus pertinente : à qui profite ce projet de loi ?

Et cette réponse, nous l’avons trouvée dans la rubrique « Confidentiels » du journal Le Figaro : l’édition du 26 avril dernier lève toutes nos interrogations en affirmant que c’était parce que le préfet Christian Lambert était indispensable à la politique du Président de la République et parce qu’il sera précisément atteint par la limite d’âge le 5 juin prochain que le Président a eu l’idée de ce projet de loi. Il fallait donc s’empresser de faire voter la loi puisque nous sommes aujourd'hui le 13 mai et qu’il faut encore qu’elle soit adoptée par l’Assemblée nationale.

Les choses sont maintenant plus claires et nous pouvons donc engager le débat sur le sujet qui nous paraît être au centre de ce projet de loi, à savoir le bilan de M. Christian Lambert en sa qualité de préfet de Seine-Saint-Denis, c’est-à-dire à dire, en réalité, le bilan de la politique de Nicolas Sarkozy en matière de sécurité, puisqu’il appartient à M. Lambert de la mettre en œuvre, comme si ce bilan reposait sur les seules qualités de certaines personnes…

Croyez bien, chers collègues, que nous nous serions dispensés d’un tel exercice ! Or, en précisant que le Gouvernement dépose ce projet de loi afin de conserver en place un haut fonctionnaire qui, je cite l’exposé des motifs, «dispose de qualités, de compétences et d’une expérience faisant qu’il est difficilement remplaçable », le Gouvernement nous oblige à vérifier, à l’épreuve des faits, si ces éléments sont effectivement réunis.

J’ai un profond respect pour M. Lambert et je ne doute pas de ses multiples qualités, dont la première est sans doute celle d’être un homme de dialogue.

Comme sénatrice de la Seine-Saint-Denis, mais aussi comme militante et présidente d’une grande association d’élus, j’ai, je crois pouvoir le dire, une connaissance assez fine de mon département. Or je ne suis pas certaine, à ce jour, que les résultats du préfet Christian Lambert en matière de lutte contre l’insécurité soient vraiment à la hauteur des louanges qui lui sont adressées.

C’est particulièrement vrai en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, qui est une véritable plaie dont les premières victimes sont les habitants de ce département. En regard des proclamations exagérément volontaristes, les résultats sont bien modestes. Certes, il y a des interpellations, mais elles concernent presque toujours des petits revendeurs. Les chefs, ceux qui dirigent ce marché et en vivent très, très bien, ne sont que rarement inquiétés, et le trafic, malgré quelques baisses épisodiques, continue à progresser. Comment pourrait-il en être autrement lorsque l’on mesure, comme le font grand nombre d’élus, combien les moyens humains et matériels mis à la disposition des forces de police sont à la fois inadaptées et insuffisants ?

Les élus de terrain le disent, mais ils ne sont pas les seuls à dresser ce constat. Il y a peu, un brigadier en fonctions en Seine-Saint-Denis l’exprimait clairement : « Dans le 93, il y a 3 300 fonctionnaires : on est 10 à 20 % en dessous des effectifs nécessaires pour faire du bon boulot. »

Ces moyens sont en effet inadaptés, car les défilés successifs de compagnies de CRS venues d’autres départements de France ne permettent pas une présence continue et stable des effectifs, alors que l’on sait pertinemment que c’est cette stabilité qui permet d’accomplir un travail de proximité et de qualité.

Les résultats ne sont donc pas au rendez-vous.

De façon plus générale, sans plus tenir compte du fait que ce projet de loi est destiné à régler un cas individuel, ce texte, contre lequel nous voterons, nous a permis de faire la démonstration que ceux qui prétendent que la qualité du service public à la française dépendrait d’une minorité de personnes se trompent. Ce qui fait la force de celui-ci, c’est l’excellence de la formation de tous ceux qui en sont les acteurs, c’est leur proximité avec les concitoyens et leur mobilisation constante pour mener à bien leurs missions.

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l’article unique.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif au maintien en fonctions au-delà de la limite d'âge de fonctionnaires nommés dans des emplois à la décision du Gouvernement
Article unique (Texte non modifié par la commission) (fin)

Article unique

(Non modifié)

Après l’article 2 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public, il est rétabli un article 3 ainsi rédigé :

« Art. 3. – Les fonctionnaires occupant, lorsqu’ils atteignent la limite d’âge qui leur est applicable, un des emplois supérieurs mentionnés à l’article 25 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, peuvent être, à titre exceptionnel dans l’intérêt du service, et avec leur accord, maintenus dans cet emploi pour une durée maximale de deux ans, par une décision prise dans les mêmes formes que leur nomination. Cette décision fixe la durée du maintien dans les fonctions, auquel il peut être mis fin à tout moment.

« La radiation des cadres et la liquidation de la pension des fonctionnaires maintenus dans leur emploi en application du présent article sont différées à la date de cessation de leur prolongation d’activité. »

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par MM. Mahéas et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collomb, Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Peyronnet, Sueur, Sutour, Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. À notre avis, il n’y a pas lieu de légiférer sur cette matière. C'est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement de suppression de l’article unique.

La dérogation que celui-ci prévoit va bien au-delà de ce qui est nécessaire pour répondre aux problèmes qui pourraient se poser, d’autant qu’il existe déjà des dispositifs dérogatoires. En réalité, ce projet de loi examiné selon la procédure accélérée, dans un calendrier législatif chargé, à un an de l’élection présidentielle, apparaît comme un texte de circonstance.

Monsieur le secrétaire d'État, j’attire votre attention sur le fait que nous pouvons difficilement travailler dans ces conditions. Nous ne cessons de le répéter sur nos travées, vous avez pris l’habitude de répondre à chaque fait divers par une loi, le plus souvent sécuritaire, bien entendu. De la même façon, dès que quelques cas particuliers surgissent, vous élaborez un texte modifiant les règles administratives, alors que nous avons déjà abondamment traité le problème des retraites. Avouez tout de même que ce n’est pas une bonne façon de gérer la France !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Sans surprise, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. À mon tour, je ne vous surprendrai pas en vous apprenant que le Gouvernement est défavorable à cet amendement de suppression.

La raison en est simple : nous estimons qu’il n’est pas choquant de demander à des hauts fonctionnaires – avec leur accord, bien entendu – de rester en fonctions pour terminer la mission qu’ils ont commencée.

Certes, on peut discuter à l’envi des modalités d’application de cette mesure. Une prorogation de deux ans est-elle choquante au regard de la dérogation de dix-huit mois qui existe pour les agents de la fonction publique territoriale ? Je ne le crois pas. S’agit-il d’un régime exceptionnel ? Non, puisque des dérogations sont déjà possibles. Peut-on prétendre qu’il n’est pas encadré ? Là encore, la réponse est non : il ne s’agit pas d’une décision discrétionnaire puisque quatre conditions, que j’ai rappelées, doivent être remplies.

Il est donc dans la logique des choses de prévoir une telle mesure.

Vous l’avez souligné, la qualité des hommes n’est pas en cause et je vous sais gré, madame Assassi, monsieur Mahéas, de ne pas avoir invoqué cet argument à l’encontre d’un préfet plutôt que d’un autre Il s’agit non pas d’élaborer un texte pour répondre à des cas précis, mais de savoir si l’exercice d’une mission de service public peut justifier un système dérogatoire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'article unique.

M. Jacques Mahéas. Monsieur le secrétaire d'État, vous vous en doutez : vos explications ne m’ont pas convaincu !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Et pourtant… (Sourires.)

M. Jacques Mahéas. Je suis d’ailleurs intervenu assez longuement pour défendre le raisonnement contraire.

Certes, il n’est pas question de faire du cas de la Seine-Saint-Denis l’unique objet de ce projet de loi, mais il convient de rappeler que M. Christian Lambert exerce ses fonctions dans ce département depuis un an, soit la même durée que son prédécesseur, M. Nacer Meddah.

Il faut laisser du temps au temps, disait un certain Président de la République que j’ai bien connu. Par conséquent, nous sommes en droit de nous demander si nous pouvons considérer que nous avons là un « super préfet ». C’est non de ses qualités que je doute, mais de la politique qu’il est obligé de mener, ce qui est totalement différent.

Permettez-moi un détour pour expliciter ma pensée.

La langue française est une belle langue. Mais il existe deux sortes de grammairiens : ceux qui se réjouissent qu’elle soit compliquée et comporte des exceptions, et les autres. Comme ceux de la première catégorie, monsieur le secrétaire d'État, vous prisez les exceptions.

Vous auriez pu introduire les dispositions que vous nous présentez ce soir dans la loi portant réforme des retraites qui a été adoptée récemment, mais vous vous êtes d’un seul coup aperçu que vous aviez omis de le faire. Faut-il comprendre que, au moment où tel préfet, tel ambassadeur, tel ancien ministre a été nommé, personne n’a songé que leur âge – sans doute avaient-ils une allure très jeune ! – était susceptible, à brève échéance, de poser un problème ? C’est tout à fait possible et, comme il faut réparer cet oubli, on crée une exception !

Vous ne pouvez nier qu’il y a là une réelle anomalie : on élabore une loi, on proclame qu’elle est la même pour tous et, dans le même temps, on crée chaque année des exceptions.

Je me réjouis que nous n’ayons pas à examiner l'amendement qui concernait le gouverneur de la Banque de France, puisqu’il a été finalement retiré : nous aurions sans doute prévu que l’on pouvait occuper de telles fonctions jusqu’à plus de 70 ans !

Vous voyez bien, monsieur le secrétaire d'État, qu’il est des limites à ne pas dépasser.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Et pour les sénateurs ? (Sourires.)

M. Jacques Mahéas. Cette façon de travailler n’est pas bonne.

Si vous aviez expliqué qu’il était important que certaines personnalités – trois ou quatre – restent en fonctions jusqu’en 2012, nous aurions éventuellement pu en discuter. Mais vous élaborez une loi et prévoyez une disposition qui s’appliquera dorénavant jusqu’à ce qu’elle soit abrogée.

Je le répète, cette façon de travailler au cas par cas n’est pas une bonne méthode de gouvernement.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Article unique (Texte non modifié par la commission) (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif au maintien en fonctions au-delà de la limite d'âge de fonctionnaires nommés dans des emplois à la décision du Gouvernement
 

15

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 13 mai 2011, à quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (n° 361, 2010-2011 ; texte de la commission, n° 488 rectifié, 2010-2011).

Rapport de Mme Muguette Dini, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 487, 2010-2011).

Texte de la commission (n° 488 rectifié, 2010-2011).

Avis de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois (n° 477, 2010-2011).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 13 mai 2011, à trois heures quarante.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART