M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger.
M. Yves Krattinger. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Depuis 2007, nous constatons un affaissement des services publics de l’État dans les territoires. Je donnerai trois exemples.
Le premier exemple concerne l’éducation nationale. Il y aura cette année 16 000 suppressions de postes malgré une augmentation de 62 000 élèves !
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Yves Krattinger. Cette politique provoque une dégradation sans précédent des conditions de formation des jeunes, tout particulièrement pour ceux qui rencontrent des difficultés.
M. Guy Fischer. Voilà la vérité dans les quartiers populaires !
M. Jacques Mahéas. C’est du jamais vu !
M. Yves Krattinger. Dans une note alarmante, le Centre d’analyse stratégique classe la France en dernière position pour le taux d’encadrement parmi les trente-quatre pays de l’OCDE.
M. Guy Fischer. C’est une honte !
M. Yves Krattinger. Nous avons seulement 6,1 enseignants pour 100 jeunes en formation, de la maternelle à l’université. Et encore, ce sont des chiffres de 2007 !
La situation est très alarmante à l’école primaire, pour l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul. Il est impossible, dans ces conditions, de personnaliser les parcours et de tenir compte de la diversité des élèves.
C’est l’avenir de la jeunesse de France qui se trouve hypothéqué.
Le deuxième exemple a trait aux hôpitaux. Les réductions budgétaires entraînent des suppressions de postes, qui provoquent la saturation des urgences, les difficultés d’entretien des locaux et du matériel, la médecine à plusieurs vitesses.
M. Robert Hue. On ferme des services !
M. Yves Krattinger. La qualité des services hospitaliers et l’égal accès aux soins pâtissent lourdement de vos orientations.
Le monde hospitalier tire la sonnette d’alarme, mais vous ignorez le ressenti des soignants, des patients et des familles.
M. Jean-Luc Fichet. C’est vrai !
M. Yves Krattinger. C’est la santé des Français qui est en danger.
Le troisième exemple porte sur la sécurité. Citoyens, policiers et gendarmes partagent la même inquiétude quant à la diminution des effectifs.
Vos ruses sur les statistiques de la délinquance ne peuvent masquer les suppressions de postes et de brigades, et leur conséquence : l’éloignement de la police et de la gendarmerie des populations qu’elles sont censées protéger.
M. Guy Fischer. C’est de la triche !
M. Yves Krattinger. Monsieur le Premier ministre, c’est la sécurité des citoyens qui n’est plus assurée.
Les élections cantonales des 20 et 27 mars suscitent, dans les territoires, de nombreux débats sur ces problèmes. C’est une échéance que vous escamotez !
Les enseignants, les personnels hospitaliers, les gendarmes sont, avec d’autres, les soldats de la République.
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Yves Krattinger. Ils sont au service de l’égalité.
Devant la gravité de la situation, acceptez-vous un moratoire sur le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans ces services essentiels à la vie de nos concitoyens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur Krattinger, à votre question : « acceptez-vous un moratoire ? », la réponse est non. La révision générale des politiques publiques a un sens, un objectif, une méthode et s’inscrit dans un calendrier.
Le sens – nous l’assumons –, c’est d’avoir moins de fonctionnaires, mais mieux payés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Guy Fischer. Parlons-en ! À combien s’élève la hausse de leurs rémunérations, monsieur le ministre ?
M. François Baroin, ministre. L’application du principe de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite a pour corollaire la redistribution, sous la forme de bonifications indiciaires, des économies réalisées.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y aura de grosses primes pour les chefs qui seront performants dans la réduction de la dépense publique !
M. François Baroin, ministre. Cela a permis de redistribuer près de 2 milliards d’euros à l’ensemble des fonctionnaires de notre pays, soit, en moyenne, 800 euros par agent. Permettez-moi de vous dire que, dans un pays comme le nôtre, si cette réforme n’avait pas été acceptée, cette redistribution n’aurait jamais eu lieu.
La première vague de la RGPP a entraîné la suppression de 100 000 postes. La deuxième permettra d’en supprimer 100 000 autres.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Guy Fischer. Allez, 200 000 postes, qui dit mieux ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Supprimons plus de postes d’enseignants !
M. Guy Fischer. Quelle honte !
M. François Baroin, ministre. D’ici à la fin de la législature, nous ramènerons le nombre de fonctionnaires à celui de 1990.
M. François Marc. Avec 16 % de précaires !
M. François Baroin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, qui de sérieux parmi vous peut soutenir que le pays ne fonctionnait pas bien à l’époque puisque c’est vous qui étiez aux affaires ? Je vous retourne le compliment et vous renvoie à votre responsabilité !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez été souvent aux affaires depuis !
M. François Baroin, ministre. Monsieur Krattinger, les exemples que vous avez pris ne sont pas forcément pertinents en raison de l’effet de ciseaux lié à l’évolution démographique, et tout cela est maîtrisé.
Pour ma part, je vous citerai deux autres exemples.
Le premier, que vous devez connaître en votre qualité local, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle arrogance !
M. François Baroin, ministre. … c’est la mutualisation des moyens au sein des services de contrôle de légalité des préfectures. Elle a permis des suppressions de postes tout en renforçant ce service public rendu aux collectivités territoriales.
M. Guy Fischer. C’est faux !
M. Jean-Pierre Sueur. Cela s’est fait dans la précipitation !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est une vue de l’esprit !
M. Simon Sutour. L’essentiel est d’y croire !
M. Bernard Vera. Mais personne n’y croit !
M. François Baroin, ministre. Le second exemple vous fera peut-être encore moins sourire, parce qu’il est encore plus spectaculaire.
La direction générale des douanes et droits indirects, placée sous mon autorité et la tutelle du ministère, a vu le nombre de ses agents se réduire pour atteindre 18 000. Elle pratique le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux à plus de 60 %. Autrement dit, c’est l’une des directions qui apporte la plus grande contribution dans ce domaine.
Or le bilan de l’action douanière qu’en tant que ministre du budget j’ai eu l’occasion de présenter cette année n’a jamais affiché d’aussi bons résultats depuis quinze ans !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Soyez donc plus performants dans la collecte des impôts, cela vous permettra de payer les personnels !
M. François Baroin, ministre. Cela montre que l’on peut tout à la fois réduire la voilure et le périmètre, augmenter le traitement des agents et obtenir de meilleurs résultats dans le cadre des missions de service public qui leur sont confiées ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Anne-Marie Payet et M. Yves Pozzo di Borgo applaudissent également.)
la poste
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Danglot. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Claude Danglot. Ma question s’adresse à M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.
Monsieur le ministre, voilà plus d’un an, les sénateurs de gauche menaient une bataille parlementaire historique pour sauver le service public postal. Dans tout le pays, des voix se sont élevées, les manifestations d’usagers et de salariés se sont multipliées contre le projet de privatisation de l’entreprise publique, le peuple a demandé un référendum et plus de deux millions de personnes ont exprimé leur opposition à votre projet.
Vous avez, avec votre majorité, insulté les organisateurs de la votation citoyenne et les nombreux élus locaux qui les ont soutenus. Vous avez nié la portée de ce mouvement et vous l’avez méprisé en parlant de « manipulations ».
Vous avez manœuvré jusqu’au bout pour arracher une majorité au Sénat. Pour cela, vous avez tenté de rassurer sur les conséquences du changement de statut. Votre prédécesseur, M. Estrosi, a même sorti de son chapeau le concept d’entreprise « imprivatisable ».
Aujourd’hui, les craintes d’hier se confirment.
M. Bernard Vera. Hélas !
M. Jean-Claude Danglot. Le précédent contrat de présence postale, signé pour la période 2007-2010, a validé plus de 6 000 fermetures de bureaux de poste et 6 600 suppressions d’emplois.
Vous nous avez illusionnés avec les 17 000 « points contact ». En réalité, dans mon département du Pas-de-Calais, entre 2005 et 2010, 816 emplois ont été supprimés.
M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
M. Jean-Claude Danglot. Pour 2011, on prévoit déjà, en termes de postes, 100 facteurs et 59 guichetiers en moins.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Eh oui !
M. Jean-Claude Danglot. Alors qu’en 2008 on comptait 115 remplaçants, aujourd’hui, on en compte 23 pour tout mon département !
Le rythme effréné des suppressions de bureaux de poste ou leur transformation en simples « points contact » laissent orphelins des pans entiers de territoires sans même que les élus locaux soient consultés ou avertis.
Pis, le Président de la République a tenu, dans le Cher, à des propos véritablement insultants envers les maires ruraux, …
M. Jean-Claude Carle. Mais non !
M. Pierre Hérisson. Les maires l’ont soutenu !
M. Jean-Claude Danglot. … allant jusqu’à leur proposer de distribuer le courrier eux-mêmes s’ils n’étaient pas contents !
M. Guy Fischer. Scandaleux !
M. Jean-Claude Danglot. Les usagers ne sont pas les seules victimes de cette politique assassine. Les coupes claires dans les effectifs, les restructurations tous azimuts, les pressions de la direction…
M. Jean-Claude Carle. Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Claude Danglot. … entraînent une souffrance au travail inacceptable.
Les soixante-dix suicides enregistrés témoignent du véritable drame humain qui se déroule sous vos yeux. Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas quant aux conséquences délétères de la privatisation de France Télécom.
MM. Alain Gournac et Pierre Hérisson. La question !
M. Jean-Claude Danglot. Monsieur le ministre, nous vous demandons donc de convoquer dans les plus brefs délais le P-DG de La Poste, Jean-Paul Bailly, …
M. Pierre Hérisson. Très bon P-DG !
M. Jean-Claude Danglot. … à qui vous avez renouvelé votre confiance, car il doit rendre des comptes et s’engager à revenir à une conception digne du service public, des personnels et des usagers ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie.
M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Monsieur Danglot, contrairement à ce que vous suggérez, nous n’avons pas affaibli La Poste ; nous l’avons consolidée, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela se voit !
M. Éric Besson, ministre. … en lui donnant les moyens de s’adapter à deux évolutions que vous connaissez.
Il s’agit, premièrement, de la concurrence d’internet.
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. Éric Besson, ministre. Celle-ci est réelle et n’est pas le fait du Gouvernement.
Il s’agit, deuxièmement, de l’ouverture à la concurrence.
La loi du 9 février 2010, qui a porté changement du statut de La Poste, a renforcé cette dernière en tant que grande entreprise publique. Il est prévu que son capital doit obligatoirement être détenu par des personnes publiques. Ce principe est figé dans la loi ! Il n’y a donc pas de prétendue privatisation, comme vous le suggérez, puisque aucun actionnaire privé ne peut entrer au capital.
Par ailleurs, et de façon concomitante, la loi permet de procéder à une augmentation de capital. Nous allons ainsi apporter 2,7 milliards d’euros d’argent public à La Poste.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. À La Banque postale !
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. Éric Besson, ministre. Par ailleurs, la loi sanctuarise les quatre missions de service public exercées par La Poste, auxquelles nous sommes tous très attachés : la distribution du courrier, le transport de la presse, la collecte du livret A et l’aménagement du territoire.
En ce qui concerne cette dernière mission, vous y avez fait allusion, il est expressément indiqué, et c’est la toute première fois, que La Poste doit maintenir ses 17 000 points de contact sur le territoire. Ce n’est pas une illusion, c’est une réalité. Où est la prétendue disparition du service public ?
M. Jean-Claude Danglot. Je vous ai donné des chiffres !
M. Éric Besson, ministre. Enfin, nous sommes particulièrement attentifs à ce que La Poste tiennent les engagements que l’on attend d’une grande entreprise publique.
La Poste respecte, d’abord, ses engagements envers ses agents. Chaque année, elle recrute près de 4 000 personnes, ce qui n’est pas rien. Son P-DG suit personnellement, avec le soutien d’une petite équipe qu’il a constituée à cet effet, les questions relatives aux conditions de travail, notamment au stress, …
M. Jean-Claude Danglot. Alors c’est encore plus grave !
M. Éric Besson, ministre. … eu égard aux drames individuels que avez rappelés à juste titre et que nous suivons tous avec beaucoup d’attention.
La Poste respecte, ensuite, ses engagements envers ses clients. Elle continue à moderniser ses bureaux de poste et à améliorer la qualité de service, par exemple en réduisant les files d’attente.
La Poste respecte, enfin, ses engagements envers les territoires. Le Sénat est très vigilant à juste raison sur ce point. Les 170 millions d’euros que l’État apporte dans le cadre du prochain contrat de présence postale territoriale vont contribuer à cette mission.
Monsieur le sénateur, nous sommes tous très attachés au service public postal. Le Gouvernement et la majorité entendent donner à La Poste les moyens de son développement et de sa modernisation. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Alors, tout va bien…
M. le président. La parole est à M. Jacques Gautier. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jacques Gautier. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants.
En 2008, le stationnement en métropole de nos forces armées était principalement orienté vers le nord-est du territoire et s’étendait sur 471 communes différentes, avec des déploiements diversifiés et hétérogènes des formations militaires, qui disposaient chacune de soutien individualisé.
En application des conclusions du Livre blanc sur la défense nationale et la sécurité et dans le cadre de la loi de programmation militaire, le Gouvernement a donc engagé une profonde réforme de notre politique de défense, ambitieuse et difficile, car elle touche au cœur des hommes et des femmes de votre ministère, mais aussi au cœur de nos territoires.
Rappelons-le, la révision du format des armées, la mutualisation des services et la création des bases de défense génèrent des économies qui bénéficient directement à la revalorisation de la condition des personnels, mais aussi à l’équipement de nos forces.
M. Didier Boulaud. Ce n’est pas encore fait !
M. Jacques Gautier. Ces restructurations de la défense concernent aussi, naturellement, la réduction des emprises. Il est, en effet, prévu que plusieurs centaines de terrains et bâtiments seront cédés sur la période 2009-2014 dans le cadre d’une réflexion globale adaptée à chaque territoire, avec un effort particulier d’accompagnement pour les zones concernées.
Chacun de nous ici sait combien l’implantation d’une unité militaire rime avec bassins de vie pour nos villes, nos départements et nos régions.
Monsieur le ministre d’État, vous étiez la semaine dernière à Cambrai pour la fermeture de la base aérienne. Pourriez-vous nous préciser quels accompagnements de reconversion et de redynamisation économique sont prévus en vue de limiter l’impact de ces fermetures sur nos collectivités locales et de préserver l’avenir de nos communes ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Didier Boulaud. L’avenir, elles n’en ont pas !
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État.
M. Alain Juppé, ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants. Monsieur le sénateur, comme vous venez de le rappeler, nos armées se sont engagées depuis 2009 dans une transformation radicale. Cette réforme, la plus importante accomplie depuis plusieurs décennies, aboutira, d’ici à 2015, à la fermeture de 82 unités, …
M. René-Pierre Signé. Ah ça !
M. Alain Juppé, ministre d'État. … 22 régiments, 11 bases aériennes, 1 base aéronavale et 6 centres de la Délégation générale pour l’armement, la DGA.
M. Simon Sutour. Massacre à la tronçonneuse !
M. Alain Juppé, ministre d'État. Ces fermetures ne sont pas une fin en soi. Elles visent, bien évidemment, à rendre notre outil de défense plus compact, plus réactif et plus opérationnel. Vous l’avez dit, la plus grande partie des économies réalisées sera redéployée au profit de l’équipement de nos troupes. On peut déjà constater en Afghanistan, comme vous l’avez fait vous-même, me semble-t-il, que cet équipement s’est beaucoup amélioré depuis quelques années.
M. René-Pierre Signé. Nous sommes une nation guerrière !
M. Alain Juppé, ministre d'État. Parfaitement conscients que la fermeture d’une unité sur un territoire peut être un véritable traumatisme économique et social, nous avons prévu un budget de 320 millions d’euros sur la période 2009-2014 pour accompagner ces transformations.
Vous avez cité la base de Cambrai. Je m’y suis rendu la semaine dernière, répondant à l’invitation du sénateur Jacques Legendre et du député-maire de Cambrai. Nous avons signé un contrat de redynamisation de sites de défense dans lequel l’État apporte 14 millions d’euros et les collectivités territoriales à peu près la même somme. Cela va nous permettre de créer un outil de formation pour 170 apprentis et un centre de liquidation des factures qui emploiera 420 personnes.
Je pourrais donner d’autres exemples de ces reconversions. C’est ainsi qu’à Toulouse-Francazal est mis en place un aérodrome civil pour compenser la fermeture de l’aérodrome militaire, tandis que des internats d’excellence sont créés à Sourdun, Noyant ou Montpellier.
Vous le voyez, nous avons prévu un accompagnement qui revêt une forme particulière dans les bassins d’emploi les plus fragiles.
Le ministère de la défense, vous le savez, cède ses emprises aux communes pour un euro symbolique. Sur les 200 emprises qui seront concernées sur la période de 2009 à 2014, à peu près la moitié d’entre elles seront éligibles à cette procédure de gratuité.
Je termine en signalant qu’au-delà des territoires, il faut aussi accompagner les personnels. Nous sommes très vigilants pour faciliter les mutations des personnels militaires et civils qui doivent changer d’affectation – on dénombre 50 000 mutations entre 2009 et aujourd’hui – ou pour faciliter leur reconversion.
J’ai fait de la réussite de cette réforme ma priorité. Je n’y parviendrai que si l’ensemble de la communauté de défense se mobilise. C’est la raison pour laquelle je suis présent sur le terrain, à la rencontre de nos militaires, comme je le serai demain, à Toulon, par exemple, pour la marine nationale. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
conflits d'intérêts
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Le 26 janvier dernier, la commission « Sauvé » a remis un rapport au Président de la République, intitulé « Pour une nouvelle déontologie de la vie publique ».
Aussitôt connu, ce rapport a été vivement critiqué par la majorité. Le Premier ministre lui-même n’a pas été le moins sévère. Relevant l’une des propositions, qui consiste à interdire à un membre de Gouvernement d’être « responsable d’un parti politique », il a déclaré : « C’est juste le contraire de la démocratie ».
Cette proposition fait, il est vrai, explicitement référence au cas de l’ancien ministre du budget qui cumulait sa fonction avec celle de trésorier de l’UMP. Je rappelle que c’est tout de même ce précédent qui avait motivé la demande du Président de la République à la commission « Sauvé ».
La mise en cause récente d’une autre ministre de la République semble précipiter les choses. Lors du Conseil des ministres du 9 février, le Premier ministre a présenté les premières orientations de ce qui pourrait être un texte de loi. Sur les vingt-neuf mesures que compte le rapport, il a mentionné celle qui vise la déclaration d’intérêts applicable aux membres du Gouvernement et aux conseillers des cabinets ministériels.
Le chef du Gouvernement a, du reste, indiqué que cette mesure pourrait être mise en œuvre sans attendre le projet de loi. Elle est en effet urgente compte tenu du rythme précipité, à l’approche de l’élection présidentielle, des départs des membres des cabinets ministériels, souvent vers le secteur privé.
Nous craignons qu’il ne s’agisse que d’un contre-feu à une actualité pressante. De plus, la méthode qui consiste à sélectionner une mesure pour décrédibiliser les autres est une vieille ficelle politicienne.
L’annonce faite le 9 février doit se traduire vite et pleinement dans un texte sans qu’on écarte a priori les pistes qui gênent. S’il s’agit d’un texte de loi, sa rapide mise en débat au Parlement sera un gage de transparence démocratique. La République en a grand besoin.
Le Gouvernement est-il prêt à cet exercice et dans quels délais ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Madame le sénateur, c’est le Président de la République qui a sollicité le vice-président du Conseil d’État pour rédiger un rapport sur la définition des frontières concernant les conflits d’intérêts.
Voilà quelques jours, le Premier ministre a annoncé au Conseil des ministres son intention de déposer, dans les toutes prochaines semaines, un texte. Ce dernier permettra à la représentation nationale, s’agissant des conflits d’intérêts, de bien faire la part des choses dans l’exercice des responsabilités publiques. Au-delà des fonctions ministérielles, sont concernés les postes occupés dans les cabinets ministériels, l’ensemble de la haute fonction publique et la magistrature.
Il n’est pas douteux que la représentation nationale s’intéressera à son propre cas, qu’à l’Assemblée nationale, le groupe animé par Mme Grosskost et M. Balligand formulera des propositions concernant les députés et qu’au Sénat, M. Hyest, accompagné par des membres de l’opposition, en émettra à son tour.
Cela permettra de dégager une possibilité de consensus pour promouvoir une plus grande transparence. Nous irons dans la bonne direction, tirant les leçons des besoins de la société et de la nécessité de l’absence définitive de porosité entre le milieu privé et le milieu public.
L’une de vos remarques portait sur la situation d’un membre du Gouvernement, chef de parti. Je voudrais l’étendre à celle d’un membre de Gouvernement responsable d’exécutif. Il est aussi de la responsabilité des politiques, élus au suffrage universel, qui incarnent la nation, d’exprimer nos souhaits en matière démocratique.
Il n’appartient pas au vice-président du Conseil d’État de dire qu’il y a conflit d’intérêts privés lorsque quelqu’un cumule la responsabilité d’un exécutif local et celle d’une mission publique nationale. Dans ce cas de figure, nous sommes dans le public-public.
Je vous réponds donc oui, madame le sénateur, nous ferons des choix. Contrairement à Gide pour qui « Choisir, c’est renoncer », nous ne renoncerons pas à aller vers une plus grande transparence.
M. Simon Sutour. Ce n’est pas grand-chose !
M. François Baroin, ministre. Nous ne renoncerons pas à déposer un texte que nous souhaitons le plus consensuel possible. Nous ne renoncerons pas à avoir une démocratie vivante dans laquelle tout le monde pourra participer aux affaires de notre pays ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)