Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Michelle Demessine, M. François Fortassin.
2. Demande d'un avis sur un projet de nomination
4. Communication du Conseil constitutionnel
5. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d'un projet de loi
MM. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Éric Doligé, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; MM. Claude Lise, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Christian Cointat, rapporteur pour avis de la commission des lois.
MM. Jean-Etienne Antoinette, Denis Detcheverry, Mme Gélita Hoarau, MM. Louis-Constant Fleming, Adrien Giraud, Richard Tuheiava, Daniel Marsin, Mme Odette Terrade.
MM. Robert Laufoaulu, Georges Patient, Michel Magras, Serge Larcher, Soibahadine Ibrahim Ramadani, Claude Lise, Jean-Paul Virapoullé, Jacques Gillot.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.
Modification du calendrier budgétaire
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances
Amendement n° II-250 de M. Jacques Gillot. – MM. Jacques Gillot, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet.
Amendement n° II-251 de M. Jacques Gillot. – MM. Georges Patient, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet.
Amendement n° II-253 de M. Serge Larcher. – MM. Serge Larcher, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-254 de M. Serge Larcher. – Retrait.
Amendement n° II-10 de la commission. – M. Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Marc Massion, rapporteur spécial. – Retrait.
Amendement n° II-249 de M. Jacques Gillot. – MM. Jacques Gillot, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Mme la ministre, M. Charles Revet. – Retrait.
Adoption des crédits.
Article additionnel avant l'article 77
Amendement n° II-206 rectifié de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, et sous-amendements nos II-358 rectifié de M. Jean-Paul Virapoullé et II-381 de M. Claude Lise. – Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; MM. Jean-Paul Virapoullé, Claude Lise, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre, MM. le président de la commission, Jean Louis Masson, Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales ; MM. Jacques Gillot, Éric Doligé, rapporteur spécial. – Adoption du sous-amendement no II-358 rectifié.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. – Rejet du sous-amendement no II-381.
M. Jacques Gillot, Mme la présidente, M. le président de la commission, Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. – Retrait de l’amendement no II-206 rectifié modifié.
Amendements nos II-265, II-266 de M. Richard Tuheiava et II-8 de la commission. – MM. Richard Tuheiava, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement no II-265 ; rejet de l’amendement no II-266 ; adoption de l’amendement no II-8.
Amendements nos II-267 à II-269 de M. Richard Tuheiava et II-229 de M. Éric Doligé. – MM. Richard Tuheiava, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre, MM. Éric Doligé, Michel Magras, Christian Cointat, Bernard Frimat, Daniel Marsin, le président de la commission. – Rejet de l’amendement no II-267 ; adoption des amendements nos II-268 et II-229, l’amendement no II-269 étant devenu sans objet.
Amendement n° II-9 rectifié de la commission. – M. Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Adoption.
Amendement n° II-270 de M. Richard Tuheiava. – MM. Richard Tuheiava, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Jean-Paul Virapoullé. – Rejet par scrutin public.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 77
Amendement n° II-252 de M. Jacques Gillot. – MM. Jacques Gillot, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-260 de M. Jean-Etienne Antoinette. – MM. Jean-Etienne Antoinette, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-207 rectifié de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, et sous-amendement no II-378 de M. Claude Lise. – Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; M. Claude Lise.
Amendement n° II-259 de M. Claude Lise. – M. Claude Lise.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre, MM. Adrien Giraud, Thierry Repentin, Serge Larcher. – Rejet du sous-amendement no II-378 ; adoption de l’amendement no II-207 rectifié, l’amendement no II-259 devenant sans objet.
Amendement n° II-258 de M. Serge Larcher. – MM. Serge Larcher, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet.
Amendements nos II-261 et II-262 rectifié de M. Jean-Etienne Antoinette. – MM. Jean-Etienne Antoinette, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet de l’amendement no II-261 ; adoption de l’amendement no II-262 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 77 bis
Amendements identiques nos II-208 de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis, et II-255 de M. Serge Larcher. – Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; MM. Serge Larcher, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Amendement n° II-209 de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. – Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; MM. Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-210 de Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. – Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; MM. Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Mmes Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis ; la ministre.
Amendement n° II-256 de M. Serge Larcher. – MM. Serge Larcher, Éric Doligé, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Article 77 quinquies. – Adoption
Articles additionnels après l'article 77 quinquies
Amendement n° II-222 rectifié de M. Georges Patient. – MM. Georges Patient, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Jean-Etienne Antoinette. – Rejet.
Amendement n° II-230 rectifié de M. Éric Doligé. – MM. Éric Doligé, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos II-263 et II-264 de M. Jean-Etienne Antoinette. – MM. Jean-Etienne Antoinette, Marc Massion, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Serge Larcher. – Rejet des deux amendements.
Suspension et reprise de la séance
Sport, jeunesse et vie associative
MM. Michel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances ; Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission de la culture ; Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture.
M. François Fortassin, Mme Françoise Férat, Christian Demuynck, Claude Biwer, Jean-Jacques Lozach, Jean-François Voguet, MM. David Assouline, Claude Bérit-Débat, Mme Claudine Lepage, M. Christian Demuynck.
Mme Chantal Jouanno, ministre des sports ; M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Amendement n° II-204 de M. Christian Demuynck. –M. Christian Demuynck. – Retrait.
Amendement n° II-22 de la commission. – M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. – Retrait.
Adoption des crédits.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat
6. Saisine du Conseil constitutionnel
8. Loi de finances pour 2011. – Suite de la discussion d'un projet de loi
Recherche et enseignement supérieur
MM. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances ; Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission de la culture ; Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture ; Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission de l’économie.
Mme Françoise Laborde, MM. Ivan Renar, Laurent Béteille, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Serge Lagauche, Mmes Marie-Hélène Des Esgaulx, Bernadette Bourzai, M. André Ferrand, Mme Marie-Christine Blandin, MM. David Assouline, Jean-Luc Fichet.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ; M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Amendement n° II-248 de M. René Beaumont. – MM. Pierre Bordier, Philippe Adnot, rapporteur spécial ; Mme la ministre. – Retrait.
Amendement n° II-276 de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Philippe Dominati, rapporteur spécial ; Mme la ministre, M. Jean-Pierre Plancade, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Ivan Renar, Jacques Legendre. – Adoption.
Adoption des crédits de la mission, modifiés.
Mme Marie-Agnès Labarre.
Amendements identiques nos II-152 de M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis, et II-285 rectifié bis de Mme Marie-Thérèse Hermange. – MM. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis ; Philippe Dominati, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; le ministre, Jacques Legendre, président de la commission de la culture ; Daniel Raoul, Philippe Adnot. – Rejet, par scrutin public, des deux amendements.
Amendement no II-286 rectifié bis de Mme Marie-Thérèse Hermange.
Amendements nos II-243 rectifié, II-232 rectifié et II-233 rectifié de M. Philippe Adnot. – M. Philippe Adnot. – Retrait de l’amendement no II-243 rectifié.
MM. le président de la commission, le ministre, Philippe Adnot. – Retrait des amendements nos II-286 rectifié bis et II-233 rectifié ; rejet, par scrutin public, de l’amendement no II-232 rectifié.
Adoption, par scrutin public, de l'article.
Article additionnel après l'article 78
Amendement no II-234 rectifié de M. Philippe Adnot. – M. Philippe Adnot. – Retrait.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Michelle Demessine,
M. François Fortassin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Demande d'un avis sur un projet de nomination
M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, M. le Premier ministre, par lettre en date du 30 novembre 2010, a demandé au président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de libertés publiques, sur le projet de nomination par M. le Président de la République de M. Éric Molinié à la présidence de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité.
Cette demande d’avis a été transmise à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
Acte est donné de cette communication.
3
Dépôt d'un avenant
M. le président. M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, l’avenant n° 1 à la convention « santé et biotechnologies » publiée au Journal officiel le 20 juillet 2010.
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la commission des affaires sociales et à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Il est disponible au bureau de la distribution.
4
Communication du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 30 novembre, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2010-96 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
5
Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).
Outre-mer
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Outre-mer » (et articles 77 à 77 quinquies).
La parole est à M. Marc Massion, rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre présentation des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011 s’articule en deux parties.
Tout d’abord, je vous exposerai le cadrage global du budget de la mission et son premier programme. Puis, Éric Doligé vous présentera de manière plus détaillée l’évolution des crédits du second programme et, rapidement, les articles rattachés à la mission.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je souhaiterais faire un point sur l’état d’application de la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, votée le 27 mai 2009.
Si la grande majorité des décrets d’application sont aujourd’hui parus, dix-huit mois après l’adoption de la LODEOM, trois mesures restent toutefois encore inapplicables, faute de décrets d’application : l’aide au fret pour les entreprises, le groupement d’intérêt public censé régler le problème de l’indivision et le dispositif de transparence des prix pratiqués par les transporteurs aériens. Outre ces mesures, de nombreux décrets d’application ne sont parus que dans le courant de l’année 2010, ce qui explique que les dispositifs concernés ne produisent pas encore leur plein effet.
Venons-en au projet de budget pour 2011. Il constitue une rupture par rapport aux budgets des trois années précédentes.
En effet, pour la première fois depuis la stabilisation de sa maquette, en 2008, la mission « Outre-mer » voit ses crédits diminuer dans le projet de loi de finances pour 2011 par rapport aux crédits votés dans la loi de finances initiale pour 2010. La baisse reste toutefois limitée puisqu’elle s’élève à 0,5 % en autorisations d’engagement et à 2,3 % en crédits de paiement. Cette contraction des dotations porte exclusivement sur les crédits du programme Conditions de vie outre-mer et sera détaillée par Éric Doligé.
En dépit de ce constat, le sort de la mission « Outre-mer » reste enviable au sein du budget général de l’État. En effet, entre 2008 et 2011, le montant des autorisations d’engagement de la mission aura globalement augmenté de 22,9 % et celui des crédits de paiement de 15 %.
Une rupture peut également être relevée en matière de dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer ». En effet, depuis 2008, le montant des niches fiscales rattachées à la mission n’a cessé de progresser. À cet égard, la LODEOM a conduit à une augmentation globale de ce montant, puisque les niches créées ont coûté légèrement plus que les niches supprimées ou réduites.
Les mesures que nous avons votées la semaine dernière dans la première partie du projet de loi de finances pour 2011 et celles que nous examinerons la semaine prochaine dans sa seconde partie devraient conduire, pour la première fois, à la diminution de ces niches. Celle-ci ne pourra être constatée qu’en 2012 puisque la réduction des niches fiscales portera sur les revenus de l’année 2011.
En 2011, la dépense fiscale outre-mer continue donc d’augmenter, quoique à un rythme ralenti. Elle progressera de 1,9 % entre 2010 et 2011 pour s’établir à 3,24 milliards d’euros.
Venons-en au premier des deux programmes de la mission, consacré à l’emploi outre-mer. Deux éléments majeurs se dégagent de son analyse.
Premièrement, comme d’habitude, les crédits consacrés au remboursement à la sécurité sociale des exonérations de charges spécifiques à l’outre-mer sont sous-budgétisés. Il devrait manquer, d’après les besoins identifiés par les organismes de sécurité sociale, 63 millions d’euros en 2011. Il est donc à craindre, comme c’est arrivé en 2007, en 2008 et en 2009, que le Gouvernement ne soit amené à ouvrir, en cours de gestion ou par loi de finances rectificative, les crédits nécessaires.
La commission des finances vous présentera donc un amendement pour remédier partiellement à cette sous-budgétisation. Cet amendement tend à transférer les crédits consacrés à l’agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna vers les exonérations de charges sociales.
Je vous rassure, mes chers collègues, et je m’adresse notamment à M. le sénateur de Wallis-et-Futuna : l’objectif est non pas du tout de remettre en cause cet établissement, mais de soulever le problème de sa gestion par le ministère de l’outre-mer, lequel n’est pas en mesure de l’assurer de manière satisfaisante. Il nous semble que cette gestion devrait être assumée par le ministère en charge de la santé, mais je développerai ce point lors de la présentation de l’amendement.
Deuxièmement, concernant le programme Emploi outre-mer, on constate que, si les crédits augmentent, c’est en raison de la montée en puissance du service militaire adapté, le SMA. Ce dispositif d’intégration des jeunes ultramarins non diplômés, à travers une formation citoyenne, militaire et professionnelle, a fait ses preuves par le passé, de sorte que le Président de la République a annoncé en 2009 le doublement du nombre de jeunes bénéficiaires. Nous avions formulé des inquiétudes sur ce point en constatant que le budget consacré au SMA ne connaissait pas, parallèlement, un doublement.
Le projet de loi de finances pour 2011 est de nature à apaiser nos inquiétudes.
D’une part, les crédits consacrés au SMA augmentent fortement : ils progressent ainsi de 40,5 % en autorisations d’engagement et de 37,1 % en crédits de paiement, pour s’élever à 201 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 181 millions d’euros en crédits de paiement.
D’autre part, nous savons désormais que les nouveaux publics du SMA seront non plus seulement des jeunes non diplômés, mais aussi des personnes, parfois diplômées, en situation de chômage de longue durée. Elles recevront des formations d’une durée plus courte que les actuels volontaires du SMA, ce qui permet de doubler le nombre de bénéficiaires du dispositif sans doubler les moyens qui lui sont affectés. Il faudra toutefois, dans nos contrôles à venir, vérifier que le dispositif du nouveau SMA est aussi efficace que l’ancien.
Je cède maintenant la parole à Éric Doligé pour présenter au Sénat les autres orientations de ce projet de budget.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je prends la suite de Marc Massion, qui vous a présenté le cadrage global du budget de la mission et de son premier programme.
J’en viens au second programme de la mission, intitulé « Conditions de vie outre-mer » et composé en réalité d’actions très disparates. Je me concentrerai sur les points les plus marquants.
Les crédits de ce programme diminuent assez fortement en 2011 : ils baissent ainsi de 6 % en autorisations d’engagement et de 10,4 % en crédits de paiement. Deux raisons expliquent principalement cette baisse.
Tout d’abord, les crédits consacrés au fonds exceptionnel d’investissement, le FEI, créé par la LODEOM pour participer aux investissements des collectivités territoriales d’outre-mer, passent de 40 à 10 millions d’euros. Le Gouvernement justifie cette baisse par la sortie du plan de relance. Je relève toutefois que la création du FEI a précédé le plan de relance et qu’il était alors, dès sa création, doté de 40 millions d’euros.
Ensuite, la seconde raison qui explique la diminution des crédits est la fin des versements au titre de l’ex-fonds pour la reconversion de l’économie de Polynésie française, prévue par la convention du 25 juillet 1996 dans le cadre de l’arrêt des essais nucléaires. Cette fin était programmée pour 2011 et conduit à une baisse des crédits de 30 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 46 millions d’euros en crédits de paiement.
En matière de logement, les effets de la LODEOM ne se font pas encore sentir. Seuls 6 200 logements neufs ont été construits en 2009, pour des besoins estimés depuis fort longtemps à 45 000 logements par an.
Outre la crise économique, deux raisons expliquent ce retard. D’une part, les décrets d’application de la LODEOM pour le recentrage de la défiscalisation sur le logement social ne sont parus qu’au début de l’année 2010. Les opérateurs ont donc attendu la mise en place du nouveau dispositif, qui devrait monter en charge progressivement. D’autre part, la nouvelle possibilité de cumul de la défiscalisation et des crédits de la ligne budgétaire unique, ou LBU, pour le financement des opérations de logement nécessite un temps d’adaptation des procédures. Beaucoup d’informations remontent du terrain pour nous signaler des difficultés de mise en œuvre de la nouvelle réglementation issue de la LODEOM tant au niveau local qu’au niveau du ministère des finances.
Nous avons besoin d’être rassurés sur ce point, madame la ministre, et nous proposerons des amendements en la matière.
D’après les informations que vous nous avez transmises, les premiers chiffres disponibles pour 2010 indiquent un décollage par rapport à 2009. Espérons-le !
Le dernier élément de ce programme est la réforme du dispositif de continuité territoriale, qui regroupe 51,6 millions d’euros de crédits. Cette réforme n’a pas encore pu entrer pleinement en vigueur, les décrets d’application de la LODEOM n’étant parus qu’il y a une dizaine de jours. Vous pourrez probablement, madame la ministre, nous donner des informations plus détaillées sur ce point.
Le nouveau fonds de continuité territoriale doit par ailleurs être géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, l’ADOM, seul opérateur de la mission, dont le nom et les compétences ont été modifiés et dont les crédits vont quadrupler pour cela en 2011. Or nous avons très peu d’informations sur cette agence, dont la performance était jusqu’à aujourd’hui assez limitée. C’est pourquoi la commission a confié à la Cour des comptes une mission de contrôle sur l’ADOM, en application de l’article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances.
J’en viens aux articles rattachés.
L’article 77 réforme la dotation globale de développement économique, la DGDE, versée chaque année par l’État à la Polynésie française. Cette dotation, d’un montant fixe de 151 millions d’euros par an, fonctionne mal. Elle n’existe qu’en vertu d’une convention passée entre l’État et le territoire et, malgré cinq avenants en sept ans – presque autant que de changements de gouvernement durant cette période –, le contrôle de l’utilisation des fonds s’est révélé très difficile.
L’article 77 tend donc à une réforme bienvenue en créant, à la place de la DGDE, trois dotations distinctes, dont le montant total sera égal au montant actuel versé au territoire : tout d’abord, une dotation globale d’autonomie, attribuée à la collectivité de la Polynésie française pour financer son fonctionnement, sur le modèle de la dotation globale de financement, la DGF, qui évoluera d’ailleurs au même rythme que cette dernière ; ensuite, une dotation d’investissement versée directement par l’État aux communes polynésiennes – c’est là la nouveauté –, car, comme l’avaient relevé nos collègues Christian Cointat et Bernard Frimat, dans un rapport fait au nom de la commission des lois, le financement des communes par la collectivité polynésienne engendre actuellement effets pervers et clientélisme ; enfin, un concours financier, dont les modalités resteront fixées par une convention, servira uniquement à financer les investissements structurants de la Polynésie française.
Cette réforme me paraît aller dans le bon sens. Elle doit permettre de pérenniser l’effort de l’État envers la Polynésie, de l’inscrire dans la loi et non dans une convention sujette à interprétation, de distinguer les fonds versés pour le fonctionnement et pour l’investissement et, enfin, de remédier aux problèmes de financement des communes polynésiennes.
La commission des finances vous proposera toutefois d’adopter deux amendements qui précisent et stabilisent le dispositif présenté par le Gouvernement.
Quatre autres articles, sur lesquels la commission des finances ne propose pas de modification, ont été ajoutés à l’Assemblée nationale.
L’article 77 bis doit permettre à l’État de céder à titre gratuit des terrains de son domaine privé pour la réalisation d’opérations de logement ou d’aménagements publics. Je ne suis pas certain que ce dispositif, qui existe déjà en Guyane, soit à même de résoudre les problèmes de disponibilité du foncier que l’outre-mer rencontre mais il constitue toutefois un sérieux pas en avant.
L’article 77 ter doit permettre de faciliter la mise en œuvre du dispositif d’aide à la rénovation des hôtels que nous avons voté dans la LODEOM.
L’article 77 quater, quant à lui, met en œuvre un plan d’apurement des dettes sociales des entreprises hôtelières dans les Antilles. La commission des finances a validé ce dispositif, mais souhaite toutefois que ne soit pas multiplié ce type d’apurements et que le paiement des cotisations sociales par les entreprises d’outre-mer reste le droit commun.
Enfin, l’article 77 quinquies doit permettre le déploiement en outre-mer de la télévision numérique terrestre, la TNT, tout en préservant la diversité culturelle des petites chaînes de télévision.
Sous le bénéfice de ces diverses observations et des amendements qu’elle vous présentera, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Outre-mer » ainsi que les cinq articles rattachés à cette mission.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011 ont été excellemment présentés par Eric Doligé et Marc Massion, rapporteurs spéciaux, et je les en remercie. La commission des affaires sociales a donné un avis favorable à leur adoption. Je n’évoquerai aujourd’hui que quelques-uns des sujets qui la concernent plus directement.
La santé est le premier sujet sur lequel je m’attarderai. Le Gouvernement a annoncé, il y a deux ans et demi, un plan santé pour l’outre-mer, et le comité interministériel de l’outre-mer, ou CIOM, a parlé de « faire de la santé une activité de pointe outre-mer ». Certes, le déploiement des études médicales est en cours et le numerus clausus a été très légèrement augmenté, mais les actions mettent du temps à se concrétiser sur le terrain.
Ainsi, que l’on prenne l’exemple de la télémédecine, des réseaux de téléenseignement et de visioconférences, de la mise aux normes sismiques des hôpitaux, de la révision des coefficients géographiques et de la valorisation des surcoûts relatifs aux activités déséquilibrées, ou encore de la lutte contre la drépanocytose, on nous indique soit qu’ils seront instruits ultérieurement, soit, dans le meilleur des cas, qu’ils feront l’objet d’un état des lieux, d’un bilan général ou d’études.
Sur ce point, justement, 20 000 euros, ce qui est dérisoire, étaient prévus en 2010 pour financer une étude afin de caractériser les décès infantiles des départements d’outre-mer et les comparer à ceux de la métropole. Est-il besoin de rappeler que les taux de mortalité infantile et maternelle sont dramatiquement élevés outre-mer ? En est-on vraiment encore à devoir « caractériser ces décès » ?
Plus largement, la première tranche du plan Hôpital 2012 n’est destinée qu’à hauteur de 2,2 % à l’outre-mer, ce qui me semble loin d’être suffisant au regard des besoins.
Ma première question, madame la ministre, est donc la suivante : quelles actions concrètes seront menées en 2011 sur le terrain pour améliorer la santé publique outre-mer ? Nous examinerons tout à l’heure un amendement sur la vente de tabac dans les départements d’outre-mer, qui va, me semble-t-il, en ce sens.
Le logement est le second sujet que je souhaite aborder. Je ne reviendrai pas sur le diagnostic et sur l’état des lieux que tout le monde connaît et partage. Quelques éléments sont certes positifs : le décret sur la surcharge foncière a été adopté récemment et les crédits destinés au Fonds régional d’aménagement foncier urbain, le FRAFU, sont en nette augmentation en 2011.
Toutefois, deux problèmes majeurs subsistent. Tout d’abord, les engagements de la LBU sont stables en 2011 mais les crédits de paiement sont en baisse de 10 %. Le Gouvernement assure que la programmation sera respectée. On peut s’en étonner, alors que les crédits pour 2010 sont presque entièrement consommés. Comment, dans ces conditions, résoudre la crise aiguë du logement avec des crédits en baisse ?
Le nouveau dispositif de défiscalisation du logement social pose encore de nombreux problèmes d’application concrète, qui risquent de retarder les opérations, que ce soit en termes d’agrément, de procédure ou de cumul avec la LBU. Le rapport de nos collègues députés Gaël Yanno et Claude Bartolone du 29 septembre 2010 sur l’application de la LODEOM est très éclairant à cet égard.
La commission des affaires sociales a déposé plusieurs amendements pour fluidifier les procédures. Ils constituent un premier pas, un signal, et j’espère qu’ils pourront être largement adoptés.
Nos territoires connaissent des contraintes fortes, liées au climat, à la géographie, parfois à l’histoire, si bien que l’action publique est déterminante pour permettre à tous de se loger.
Madame la ministre, vous avez rencontré, le 12 novembre 2010, des représentants des bailleurs sociaux. J’ai également auditionné certains d’entre eux : ils sont très inquiets. Pouvez-vous nous indiquer les conclusions que vous avez tirées de cette réunion et les mesures que le Gouvernement compte adopter pour améliorer la situation ?
Avant de conclure, je dirai quelques mots sur le revenu de solidarité active, le RSA : il va enfin entrer en vigueur le 1er janvier 2011 et doit coexister, durant une certaine période, avec le revenu supplémentaire temporaire d’activité, le RSTA, qui avait été créé à la suite de la crise sociale du printemps 2009.
Madame la ministre, il ne me semble pas que le décret prolongeant le RSTA ait été publié : quand comptez-vous le faire et quelles dispositions contiendra-t-il exactement ? Il serait tout de même préférable que les bénéficiaires, qui devront choisir de manière irréversible entre les deux prestations, d’une part, et les gestionnaires, caisse d’allocations familiales et caisse générale de sécurité sociale, d’autre part, soient au courant suffisamment longtemps à l’avance.
En conclusion, madame la ministre, je vous poserai une dernière question. La répartition des crédits du fonds exceptionnel d’investissement, du plan Hôpital 2012, de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, ou encore de l’ancienne dotation de continuité territoriale ne tient pas compte de l’importance démographique de chacun des départements d’outre-mer. Comment expliquer que la Réunion, avec ses 800 000 mille habitants, reçoivent parfois moins, voire nettement moins, que d’autres départements ?
L’outre-mer a besoin de politiques stables et durables. D’importantes annonces ont été faites par le CIOM, voilà maintenant un an. J’espère que l’année 2011 permettra d’avancer avec courage sur la voie des réformes. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Lise, rapporteur pour avis.
M. Claude Lise, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en réponse à la grave crise qu’ont connue nos outre-mer au début de l’année 2009, le Gouvernement a fait des annonces nombreuses et importantes, dans le cadre de la LODEOM et du CIOM. Ces annonces ont suscité des espoirs importants dans nos outre-mer, cela a été dit. Elles tardent cependant vraiment à porter les effets attendus à cause des retards ou de l’absence de mise en œuvre effective des mesures correspondantes.
Au vu de l’évolution non seulement des crédits de la mission outre-mer, mais aussi de l’effort budgétaire global prévu pour 2011, je ne peux que faire part d’une certaine déception.
La déception est encore plus grande quand on analyse les autres mesures du projet de loi de finances qui concernent l’outre-mer, notamment l’article 13 que la Haute Assemblée a adopté la semaine dernière et qui supprime le dispositif de défiscalisation dans le secteur du photovoltaïque, qui est pourtant l’un des secteurs les plus prometteurs pour le développement endogène de nos outre-mer.
Au lieu du développement endogène, tant évoqué lors des débats sur la LODEOM, j’ai le sentiment, madame la ministre, que la logique actuelle est celle d’un « mal-développement » endogène.
Je ne m’attarderai pas sur les crédits de la mission « Outre-mer » inscrits au projet de loi de finances pour 2011, dont l’évolution a déjà été présentée par nos rapporteurs spéciaux. Je relève cependant qu’ils diminuent de 0,5 % en autorisations d’engagement et de 2,3 % en crédits de paiement. Il s’agit de la première diminution réellement affichée depuis trois ans.
Les outre-mer participent donc à la politique de rigueur. Cela n’est pas anormal, j’en conviens. Je considère cependant que, en toute équité, l’effort qui leur est demandé devrait davantage tenir compte de leur « mal-développement » et de la situation économique et sociale très préoccupante qui est la leur.
Je souhaite évoquer plus longuement une problématique essentielle dans nos outre-mer : le logement. Près de 60 000 demandes de logements sociaux sont aujourd’hui en attente dans les quatre départements d’outre-mer. Rapporté à la population de l’hexagone, ce chiffre correspond à près de deux millions de demandes en attente ! C’est dire l’ampleur de l’enjeu !
Le CIOM avait annoncé que le niveau de la LBU serait maintenu. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, il est bien conservé en autorisations d’engagement, ce dont je me réjouis. Les crédits de paiement sont, en revanche, en recul de près de 10 %. En matière de logement social, ils reculent même de près de 34 %. Cette diminution serait justifiée par la sous-consommation chronique des crédits de la LBU, nous dit-on. Je m’étonne de cet argument. On constate en effet, dans le département de la Martinique, que les crédits prévus en 2010 sont déjà consommés à hauteur de 99 % en ce moment !
Par ailleurs, le dispositif de défiscalisation dans le logement social mis en place par la LODEOM n’a pas fait, pour l’heure, la preuve de son efficacité. À ce jour, il n’a permis la construction effective d’aucun logement social. Seuls 829 logements ont été agréés au titre de ce dispositif entre la fin de l’année 2009 et le 30 septembre 2010. Ce bilan est notamment lié à des difficultés d’application. D’une part, les modalités d’instruction des dossiers diffèrent entre LBU et défiscalisation. D’autre part, et surtout, les modalités de cumul entre LBU et défiscalisation posent aujourd’hui problème. Cela a été dit.
Alors que la possibilité de cumul avait été clairement évoquée par votre prédécesseur lors des débats sur la LODEOM, vous avez publié, madame la ministre, une circulaire le 1er juin 2010 qui s’éloigne de l’esprit de la loi. Je ne peux que le regretter car cela freine la réalisation de certaines opérations. Je précise que je ne souhaite pas pour autant que le cumul prenne un caractère systématique.
Je sais que vous avez reçu le 12 novembre 2010 les bailleurs sociaux. À mon tour, je vous demande quelles initiatives vous comptez prendre au cours des prochaines semaines afin que ce dispositif se révèle réellement efficace. Plus généralement, quelles mesures prendrez-vous dans les prochains mois afin d’opérer une réelle relance de la politique du logement social pour répondre à l’ampleur des besoins, tant sur le plan social que sur le plan économique ?
En conclusion, la commission de l’économie a, malgré mes réserves, émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, rapporteur pour avis.
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Albert Einstein nous a appris les charmes de la relativité ; aussi devons-nous être conscients que, dans un monde de disette financière où le budget ne cesse de se contracter par phases successives, tel un cycle sans fin, le statu quo peut apparaître comme une forme de progression. Tel est le cas, du moins pour l’essentiel, du budget destiné à l’outre-mer, tant au niveau de la mission « Outre-mer» qu’à l’échelon global. Cela souligne une nouvelle fois la volonté manifeste de l’État d’assurer un effort soutenu pour l’ensemble des collectivités ultramarines. Nous pouvons donc manifester une certaine satisfaction ou plutôt, pour être plus exact, une satisfaction relative !
La notion d’« économie », dont on nous rebat en permanence les oreilles au point de perdre de vue la finalité du budget – il s’agit de financer du mieux possible des dépenses jugées utiles qui sont l’expression de choix politiques – comporte des effets pervers, masquant souvent, par une lecture immédiate, les résultats à moyen et à long terme.
Pour « gagner » quelques sous, entend-on dire, alors qu’il s’agit non pas de gain, mais d’un renoncement à agir, on peut, par de malencontreux coups de rabot financiers, se priver de l’atteinte des objectifs retenus.
Alphonse Allais disait, sous forme de boutade : « II faut demander plus à l’impôt et moins au contribuable » ! En réalité, ce n’est pas une boutade. Il faut sortir du carcan dogmatique qui nous étouffe et empêche une utilisation optimale des crédits. Alors, on pourra dépenser moins tout en agissant plus.
Je n’entrerai pas dans le détail des crédits prévus pour la mission « Outre-mer » qui ont été excellemment présentés par les rapporteurs spéciaux. Je concentrerai simplement mon intervention sur deux points auxquels la commission des lois est attachée, à savoir les instruments de la dépense et la gestion de celle-ci.
En effet, il ne suffit pas de disposer des moyens de l’action, encore faut-il les utiliser au mieux des besoins et de la façon la plus adaptée à ces nécessités. Or, dans ces domaines, il semble que des progrès substantiels pourraient être réalisés.
Le premier point que j’aborderai concerne les indicateurs de performance. Ces derniers se révèlent rudimentaires ou parcellaires au point de ne pouvoir remplir pleinement leur fonction d’information et d’évaluation.
Compte tenu de l’ampleur de l’effort budgétaire et fiscal déployé, en particulier en matière de défiscalisation et d’allégement des charges sociales, il serait opportun que l’État s’assure de manière beaucoup plus approfondie de l’efficacité économique et sociale des différents instruments financiers utilisés, comme de l’emploi des crédits attribués. Or des interrogations subsistent à ce sujet.
Certes, une évaluation est présentée, mais elle n’est ni suffisante ni très significative à cet égard et ne permet pas au Parlement de mesurer clairement le rendement global et relatif des choix effectués, ni de connaître leur impact réel par rapport aux objectifs poursuivis.
En définitive, cette question est liée à celle de la réorganisation de l’administration centrale chargée de l’outre-mer, qui constitue le deuxième point que je souhaite soulever dans cette brève intervention.
Interministérielle par nature, la politique de l’État en faveur des populations et des collectivités d’outre-mer requiert impérativement une forte coordination et une autorité de pilotage capable d’exercer cette dernière et de veiller à l’intégration correcte de la dimension ultramarine dans toutes les politiques publiques et par tous les départements ministériels. Alors que, trop souvent, l’outre-mer est encore insuffisamment pris en compte, tout semble démontrer que le ministère chargé de l’outre-mer et la délégation générale à l’outre-mer ne disposent pas réellement de cette autorité au sein du Gouvernement pour jouer pleinement ce rôle de coordination et pouvoir peser suffisamment dans les arbitrages interministériels.
Or l’outre-mer a besoin d’une administration centrale solide, qui puisse l’accompagner vers son avenir, une administration qui dispose de véritables capacités d’évaluation et de prospective, une administration qui soit à même d’effectuer l’analyse, évoquée précédemment, de l’efficacité des dispositifs spécifiques en faveur de l’outre-mer.
La réforme déjà effectuée de la délégation générale à l’outre-mer n’est pas satisfaisante et n’a pas atteint ses objectifs. Rattachée au ministère de l’intérieur, cette délégation n’a pas l’autorité suffisante pour assurer sa mission de coordination interministérielle. De plus, ses effectifs ne paraissent pas adaptés aux missions qui devraient être les siennes en termes de conception, de pilotage, d’évaluation et de coordination. Il faut aller plus loin. Je veux en cet instant rendre hommage à notre collègue Marc Massion, dont le rapport traite excellemment de cette question.
La commission des lois plaide donc pour le rattachement direct au Premier ministre de l’administration centrale de l’outre-mer, sous forme d’une délégation interministérielle, d’une mission interministérielle, ou mieux encore d’un secrétariat général à l’outre-mer, à l’instar du secrétariat général aux affaires européennes.
Cette remise à niveau est particulièrement urgente pour accompagner les profondes évolutions en cours outre-mer.
On ne le dira jamais assez, l’outre-mer est une chance pour la France.
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis. Nous ne devons jamais l’oublier, et encore moins quand nos compatriotes ultramarins ont besoin de nous. Et ils ont besoin de nous !
Aussi, sous réserve de ces observations, la commission des lois donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Richard Tuheiava applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Jean-Etienne Antoinette.
M. Jean-Etienne Antoinette. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lorsque je considère le budget qui nous est soumis aujourd’hui, d’aussi loin que ma mémoire politique se le rappelle, il me vient un constat navrant et pathétique, que tous les apparents rebondissements de l’histoire n’arrivent plus à masquer : au fond, pour l’outre-mer, rien de nouveau sous le soleil !
Cette période de l’année ressemble à un long feuilleton télévisé, dont on pourrait rater quatre ou cinq épisodes sans rien perdre du fil de l’intrigue. Rien ne change, en vérité.
Toujours à la même période, en présence pratiquement des mêmes collègues, on reprend les chiffres, et toujours on retrouve les perpétuelles oppositions entre le discours insistant sur le coût de l’outre-mer pour la France, et un autre, peut-être naïf, qui présente ces territoires comme « une chance pour la République ».
Que sommes-nous exactement ? Que sont vraiment les outre-mer pour la France ? Seraient-ils juste un thème de trop dans la liste des sujets que doit traiter le Parlement, et qui agace les rapporteurs de la commission des finances ? Les outre-mer seraient-ils simplement le prix à payer par la France – est-il si élevé ? – pour pouvoir se vanter d’être la deuxième puissance maritime du monde ou de posséder la plus belle réserve de biodiversité des pays d’Europe, ou encore le port spatial de l’Europe ?
À la fin de l’année 2008, j’ai suivi le débat sur le budget de l’outre-mer, déjà très contesté par les parlementaires ultramarins, lors de l’élaboration de la loi de finances de 2009. Et j’ai suivi la crise sociale de 2009, qui avait déjà commencé en Guyane à la fin de l’année précédente. Puis j’ai suivi le vote en urgence de la LODEOM, les états généraux de l’outre-mer et enfin le comité interministériel de l’outre-mer.
J’ai entendu discours, annonces, engagements, espoirs, et j’ai vu la réaffirmation, au sein de la population guyanaise, du contrat qui lie la République et ses territoires périphériques.
Au mois de janvier dernier, l’espoir s’est même traduit par un vote des Martiniquais et des Guyanais pour un maintien de leurs départements dans la République sous le régime en vigueur de l’identité législative !
Aujourd’hui, je ne suis pas le plus déçu. Un dicton cynique ne dit-il pas : « Les promesses n’engagent que ceux qui y croient » ? La vérité est bien là : les lois de finances aiment bien dévoyer, sinon défaire, presque aussitôt ce que les lois pour l’outre-mer, telles la LOOM, la loi d’orientation pour l’outre-mer, la LOPOM, la loi de programme pour l’outre-mer, la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, essaient péniblement de faire.
Aujourd’hui, on atteint le fond du puits. En effet, pire que tout, ce gouvernement qui n’écoute pas la rue – et ce n’est pas moi qui le dis ! – n’écoute bien que la rue dès lors qu’il s’agit de l’outre-mer ! Du moins – n’exagérons rien ! –seulement quand ses cris menacent des intérêts politiques et commerciaux notoirement inéquitables, et qui lui sont particulièrement liés.
Et, dans ces cas-là, on promet tout ce qui peut calmer la foule. On peut même se dépêcher d’inscrire dans une loi les dispositions adéquates. Mais une loi, n’est-ce pas un acte majeur, dévoyé dès lors en une recette miracle ?
Ne serait-il pas aussi tout à fait inconsidéré de diminuer les recettes de l’État, le temps de publier les décrets, en particulier si l’on se donne beaucoup de mal à laisser un peu traîner les choses... La prochaine loi de finances sera venue, la rue se sera calmée, et l’on pourra reprendre tranquillement ce que l’on avait donné, et même plus !
Lorsque j’analyse le projet de loi de finances pour 2011, en particulier le budget de la mission « Outre-mer », je découvre le scénario d’un mauvais feuilleton, indigne d’un État démocratique. J’observe le reniement par l’État de ses valeurs, le déni de ses propres engagements et le mépris pour des citoyens déjà vulnérables, qui sont abusés.
Alors non, aujourd’hui, je ne veux pas entrer dans la bataille des chiffres du budget pour 2011. Nous le savons tous, il diminue. Il doit nous renvoyer au bilan de la LODEOM, et donc à un nouvel exemple des inconséquences de ce gouvernement.
Aujourd’hui, je ne veux pas refaire le procès d’une défiscalisation qui a été privilégiée au détriment de l’aide budgétaire à une structuration véritable des filières de développement économique, et qui dévoile toutes ses limites.
Aujourd’hui, je ne veux pas m’appesantir sur la manière dont le Gouvernement, dans les faits, ne prend aucun compte ni des actuelles conditions de logement des ultramarins sur leur propre territoire ni des problèmes de la formation, de la jeunesse, de l’emploi, du développement économique, ni m’attarder sur les 15 000 foyers qui, en Guyane, vivront encore pour un temps indéterminé sans avoir accès à l’électricité, juste à côté de la base d’où sont lancés pourtant les vecteurs Ariane et d’où le seront bientôt les lanceurs Véga et Soyouz.
Aujourd’hui, je voudrais savoir quel projet du Gouvernement sous-tend tout cela.
Selon moi, ce projet est vide. Il sonne creux. Il se pare des oripeaux du changement institutionnel pour mieux masquer son manque de contenu et son absence totale de perspective.
Sans m’y appesantir davantage, je vais plutôt me projeter dans l’avenir et tenter de parer au désastre qui nous attend.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Etienne Antoinette. En effet, en ces temps où l’on annonce la rigueur, je m’attache à rechercher de nouvelles ressources pour les collectivités territoriales des outre-mer, plus particulièrement pour la Guyane.
Je verrai donc le moment venu, en fonction de l’accueil qui sera réservé aux amendements que j’ai déposés, jusqu’où va la volonté de ce gouvernement de mettre en péril le développement des outre-mer, en fermant toutes les écoutilles, en brouillant toutes les pistes.
Aujourd’hui, j’ai juste envie de vous faire une seule demande, madame la ministre : si vous ne pouvez faire davantage à l’égard des outre-mer, de grâce, au moins ne nous empêchez pas de faire ce que nous pouvons avec ce que nous avons, principalement avec nos ressources naturelles et nos moyens humains ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry. (Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Paul Virapoullé, Adrien Giraud et Charles Revet applaudissent.)
M. Denis Detcheverry. Madame la ministre, vous nous présentez un projet de budget en diminution sensible. Soit ! Compte tenu de la situation des finances de l’État, on peut effectivement penser que des efforts, auxquels chacun doit contribuer, y compris l’outre-mer, sont indispensables. Je suis d’accord à condition que le remède ne soit pas pire que le mal et que, à terme, cela ne coûte pas plus cher.
Au cours de ces deux dernières années, on a beaucoup entendu parler de l’outre-mer, parfois sur fond d’inquiétude, lors de manifestations bruyantes des populations locales, ou sur un ton bien plus positif, comme lors des états généraux de l’outre-mer qui ont mis en exergue non seulement les problèmes de nos territoires, mais aussi leurs incontestables possibilités de développement.
Aujourd’hui, le Gouvernement a décidé que l’année 2011 serait l’année des outre-mer. Je ne peux que m’en réjouir. Au même moment, certaines réalités et décisions auxquelles nous sommes confrontés m’étonnent, voire m’inquiètent.
On entend régulièrement soutenir dans les discours que l’évolution de l’outre-mer passe obligatoirement par la valorisation de son environnement maritime, qui place la France au deuxième rang mondial, par la valorisation de sa biodiversité, qui représente 10 % de la biodiversité mondiale, ainsi que par son intégration géographique grâce au développement des coopérations régionales.
J’adhère totalement à ce programme, comme nombre de mes collègues ultramarins. Mais une question me taraude : comment y parvenir avec des réductions budgétaires ? Comment faire plus avec moins ?
Certes, il est possible d’optimiser les dépenses avec une meilleure gestion, mais il faut rester réaliste. Alors que les objectifs affichés lors des états généraux sont déjà ambitieux, donc difficiles à atteindre, ils pourraient se limiter à de vaines déclarations en raison de telles restrictions.
Une autre source d’inquiétude est la place de l’outre-mer dans la politique européenne. Nous savons que l’Union européenne s’apprête à signer des accords de libre-échange avec le Canada ainsi qu’avec certains États d’Amérique du Sud. Malheureusement, les territoires ultramarins des zones concernées n’ont nullement été associés aux négociations. Quid de la coopération régionale ? Plus généralement, quelle est la place réservée à l’outre-mer au sein de la politique économique européenne ?
À Saint-Pierre-et-Miquelon, malgré mes propositions pour dynamiser et pérenniser les relations et les échanges avec le Canada, les accords de coopération régionale signés en 1994 n’ont toujours rien apporté en matière économique.
Je maintiens ce que je vous ai déjà dit, madame la ministre : la coopération régionale ne pourra exister que si la politique nationale y croit et s’y attèle sérieusement.
Il ressort des récents contacts que j’ai pu avoir avec les provinces du Canada atlantique que cette coopération, à laquelle elles se sont intéressées ces dernières années, leur semble impossible à mettre en œuvre compte tenu du nombre d’obstacles relatifs au montage des dossiers.
En effet, en raison de notre petite taille, certaines compétences incontournables font défaut localement. Je l’ai dit et je le répète, madame la ministre, nous ne pouvons assumer à tous les niveaux l’autonomie que nous confère l’article 74 de la Constitution.
J’en profite pour parler de la télévision numérique terrestre, ou TNT, à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui, par le biais des médias, nous fait rayonner à travers le Canada. Sa gestion risque de mettre fin à ce rayonnement, ainsi qu’à celui de la France, auprès de nos amis canadiens.
Initialement prévue pour offrir un accès gratuit à un plus grand nombre de chaînes avec une meilleure qualité de réception, de son et d’image, la TNT peut produire l’effet inverse à Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, l’arrivée de la TNT est imposée chez nous avec un cryptage des chaînes, dont peut-être la chaîne locale.
Nous ne pourrons donc plus diffuser à travers tout le Canada, comme nous le faisons actuellement et depuis bientôt onze ans, pour environ 600 000 téléspectateurs potentiels. En outre, la population devra investir dans des décodeurs onéreux, ce qui va quelque peu à l’encontre du principe de gratuité de la TNT.
Ce coût sera difficile à assumer, surtout pour les retraités dont la situation n’est pas bien prise en compte depuis quelques années. Je pense notamment à ceux dont la pension est faible – nous en avons parlé à plusieurs reprises. En outre, Saint-Pierre-et-Miquelon se trouve dans la zone dollar et subit en même temps une inflation. Avec des retraites de misère, nos seniors pourront très difficilement s’offrir la TNT.
J’en viens à un autre sujet d’inquiétude. Madame la ministre, voilà un an, dans ce même hémicycle, j’obtenais votre promesse pour la mise en place à Saint-Pierre-et-Miquelon de l’aide au fret à destination des petites entreprises exportatrices de l’archipel. Nous attendons toujours la mise en application de cette mesure dont l’économie locale a crucialement besoin pour avoir une chance d’être compétitive. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Revenons à 2011. À l’heure où je vous parle, je ne sais pas comment cette année de l’outre-mer se déroulera. Comment cela se traduira-t-il dans les faits, que ce soit sur le terrain ou dans l’Hexagone ? Les parlementaires ultramarins que nous sommes n’ont, à ce jour, pas été associés au projet par l’État.
J’espère qu’il y aura notamment une vraie mise en valeur de l’incroyable biodiversité de l’outre-mer, auprès tant de nos compatriotes métropolitains que de nos voisins géographiques respectifs. Même les ultramarins ont besoin de découvrir ou de redécouvrir leur environnement.
Après avoir appris que Saint-Pierre-et-Miquelon avait été oublié par certaines instances nationales, j’ai récemment entrepris de faire connaitre la richesse de la biodiversité de mon archipel auprès des ministères de l’outre-mer, de l’écologie, de la recherche et de l’enseignement supérieur, ainsi qu’auprès du Conservatoire du littoral, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, la FRB, de l’Agence des aires marines protégées et de France nature environnement, ou FNE. J’espère que Saint-Pierre-et-Miquelon sera pris en compte à l’avenir, dans le cadre de l’environnement.
Comme vous pouvez le constater, madame la ministre, je suis très inquiet. Pouvez-vous me rassurer en répondant à ces questions dont dépend l’avenir de l’outre-mer, et plus particulièrement celui de Saint-Pierre-et-Miquelon ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Mme Gélita Hoarau. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, alors que 2011 se veut l’année des outre-mer, à l’occasion de laquelle serait faite la promotion de nos territoires, et l’année pendant laquelle nos diversités, nos richesses en termes de culture, d’institutions, de développement durable, d’économie et d’entreprises seraient mises en lumière, force est de constater que le budget de cette même année fait fi de ces atouts, pis encore, exacerbe nos problèmes et nos difficultés.
À l’instar des autres départements d’outre-mer et de l’ensemble du territoire national, la Réunion subit les effets de la crise monétaire, financière et structurelle. Nous avons assisté, au début de l’année dernière, aux manifestations de cette crise structurelle, lors des mouvements sociaux ayant secoué une partie des outre-mer et sur lesquels je ne reviendrai pas aujourd’hui.
Cette double crise affecte profondément, durablement et peut-être inexorablement, si rien n’est entrepris dès maintenant, les sociétés ultramarines.
Plus qu’ailleurs, les ménages subissent de plein fouet la hausse du chômage. Cette augmentation amène le taux de chômage de la Réunion à un triste record, celui du taux le plus élevé de toute l’Union européenne, soit 29 % ! On peut comprendre que les ménages se trouvent alors dans une situation financière critique, expliquant la hausse de l’endettement.
Plus qu’ailleurs, les entreprises, inscrites dans un tissu économique déjà fragile, ne pourront résister à ces crises, conjuguées aux récentes mesures et réformes gouvernementales ou aux aléas électoraux. Avec la fin des grands travaux à la Réunion, le secteur du bâtiment et des travaux publics, dit BTP, a perdu en l’espace d’un an 22 % de ses effectifs !
Plus qu’ailleurs, les collectivités territoriales sont confrontées au besoin de rattrapage en équipements et infrastructures et à une forte demande sociale, alors que, concomitamment, leurs ressources financières diminuent.
Pour des observateurs réunionnais, cette double crise aura, à terme, de graves conséquences. Je cite la revue Perspectives économiques de la Réunion : « Dans les années qui viennent, la Réunion va traverser une crise majeure identique aux deux ou trois grandes crises qui ont façonné son histoire depuis le début du peuplement. Celle-ci ressemblera sans doute beaucoup à la crise du sucre du 19ème siècle ».
Telles sont les sombres perspectives auxquelles vous nous condamnez alors que des solutions autres, émises par les ultramarins, vous ont déjà été présentées.
De même, l’opinion publique réunionnaise est inquiète et pessimiste pour l’avenir : 81 % des Réunionnais considèrent le chômage comme la préoccupation majeure, 76 % craignent une dégradation du pouvoir d’achat et 70 % pensent que la situation économique est mauvaise. Ces indicateurs datant d’août 2010 sont à leur plus bas niveau jamais recensé jusqu’ici.
Le Gouvernement n’a pas toujours sous-estimé la situation ultramarine, ne serait-ce que dans les discours ou dans les intentions. Ainsi, nous avons eu la stratégie de croissance pour l’outre-mer, la STRACOM, présentée par votre prédécesseur, M. Yves Jégo, il y a plus de deux ans.
On nous annonçait que le Président de la République était, selon le rapport de présentation, le « porteur d’une nouvelle vision pour l’outre-mer fondée sur une volonté de croissance durable » et qu’il s’agissait « de doter nos économies ultramarines de la capacité d’affronter les grands défis de l’époque en fondant la croissance de chaque territoire sur ses singularités ».
Pour de telles ambitions, aussi louables qu’unanimement soutenues, on s’attendait à ce que le budget de l’outre-mer pour 2009-2012 connaisse une progression exceptionnelle.
Ensuite, il y a eu la loi pour le développement économique des outre-mer, dite LODEOM, les états généraux de l’outre-mer et le conseil interministériel pour l’outre-mer, le CIOM, du 6 novembre 2009, visant les mêmes objectifs.
Nous nous attendions donc à des mesures et à un budget à la hauteur de ces buts. Malheureusement, ces intentions ne sont pas suivies de faits.
Vingt et un mois après l’adoption de la LODEOM et un an après le CIOM, certaines dispositions manquent à l’appel.
Où sont les mesures de lutte pour réglementer le fonctionnement du marché, la concurrence et les prix, ainsi que pour faire baisser le coût de la vie ? Où est le développement des productions locales promis avec le développement endogène ? Quels sont les objectifs du Gouvernement et les moyens qu’il propose de mettre en œuvre pour favoriser l’insertion régionale ?
Dans la LODEOM, il était prévu que les compagnies aériennes vous transmettent avant le 1er septembre 2010 un rapport sur leur politique tarifaire. Où est ce rapport, madame la ministre ? Il en est de même de l’étude relative à l’octroi de mer.
Est prévue, en 2011, la publication par le Gouvernement d’un rapport indiquant les mesures qu’il entend prendre ou proposer pour répondre à la situation financière des communes d’outre-mer, dont les villes-capitales, jugée préoccupante du fait de la particularité de la matière fiscale. Où en est ce rapport ?
À ces questionnements qui restent en suspens, s’ajoutent un budget aujourd’hui en diminution pour les outre-mer et, de fait, un désengagement du Gouvernement, bien que vous vous appliquiez, madame la ministre, à soutenir que tel n’est pas le cas.
Ainsi, les crédits de l’État pour l’outre mer, s’élevant à 16 milliards d’euros, subissent une baisse de 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 300 millions d’euros en crédits de paiement.
Ceux de la mission « Outre-mer » diminuent par rapport à 2010 de 0,55 % pour les autorisations d’engagement et de 2,28 % pour les crédits de paiement.
Cette mesure drastique n’épargne aucun domaine, même les secteurs névralgiques considérés comme prioritaires par la LODEOM.
Ainsi, concernant le logement social, vous maintenez l’illusion de crédits constants quand les crédits de paiement ne cessent de diminuer. Vous nous annoncez, madame la ministre, des crédits de 274 millions d’euros en autorisations d’engagement pour 2011, et ce jusqu’en 2013, alors que, conjointement, les crédits de paiement diminuent de 21 millions d’euros de 2010 à 2011.
Or, vous n’êtes pas sans savoir le besoin urgent de logements sociaux en outre-mer. À la Réunion, 22 600 familles sont dans l’attente d’un logement social. Tous les ans, sur les 6 500 nouveaux ménages, plus de 70 % relèvent du logement social.
Cette année, toutes les dotations de la ligne budgétaire unique, ou LBU, affectées à la Réunion ont été utilisées pour la construction de 3 000 logements. Pourtant, 2 000 logements supplémentaires auraient pu être livrés si la demande d’une rallonge de 20 millions d’euros avait été acceptée.
En outre, quelques mois seulement après l’adoption de la LODEOM, les bailleurs sociaux vous ont alertée, madame la ministre, sur les problèmes de la mise en application de la défiscalisation. Lors de votre rencontre en novembre dernier, vous avez annoncé la rédaction d’une nouvelle circulaire. Pouvez-vous nous assurer que cette dernière verra le jour très prochainement et mettra fin aux incertitudes juridiques et aux obstacles administratifs freinant l’instruction des dossiers en attente d’agrément fiscal ?
Bercy est-il prêt à clarifier les modalités de financement du logement social par la défiscalisation, qui doit rester un complément à la LBU et non se substituer à elle ?
Le Fonds régional d’aménagement foncier et urbain, le FRAFU, se voit appliquer le même traitement : 32,5 millions d’euros en autorisations d’engagement mais seulement 25,7 millions d’euros en crédits de paiement. Idem pour la résorption de l’habitat insalubre, la RHI.
Le risque de voir l’État contracter des dettes auprès des opérateurs du logement est bien présent.
Aucun secteur n’est épargné par cet abaissement de crédits. Dans le programme Emploi outre-mer, les crédits de paiement destinés au soutien aux entreprises diminuent de 1,7 %. Jusqu’à hier, il était question que les contrats aidés subissent eux aussi une coupe sévère, puisque le Gouvernement, avec assurance et aveuglement, décide de baisser leur financement de plus de 40 millions d’euros sur un an et de 100 millions d’euros sur deux ans.
Mais, de passage à la Réunion, vous annonciez 1 800 contrats supplémentaires. Est-ce pour la fin de cette année, ou pour 2011, ou jusqu’à 2014 ?
Cet assèchement budgétaire est également dû au rabotage de la défiscalisation des investissements productifs réalisés outre-mer, représentant un crédit pour l’État de plus de 300 millions d’euros pour l’année 2011.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, sur ce même texte, vous avez rappelé l’annonce par le Président de la République, dans la convention outre-mer, de sa volonté de corriger les effets d’aubaine de la défiscalisation, qui, selon le Gouvernement, doit se faire par des mesures radicales, au risque de voir disparaître une filière porteuse d’emplois, d’innovation et d’ambition environnementale : je veux bien sûr parler du photovoltaïque.
Tout cela, madame la ministre, nous pousse à nous interroger sur l’efficacité des mesures classiques utilisées jusqu’à présent pour tenter de résoudre nos problèmes. Ne sommes-nous pas arrivés à la fin d’un cycle où les méthodes classiques, qui reposent sur un peu plus ou un peu moins de défiscalisation, apparaissent comme totalement inopérantes ?
Même si votre budget ne baissait pas et s’il augmentait de 5 ou 10 %, ou plus, ce qui n’est évidemment pas le cas, nos problèmes auraient-ils, pour autant, été résolus ?
Aussi, madame la ministre, le moment n’est-il pas venu de réfléchir à un autre mode de développement pour tout l’outre-mer ?
Telles sont, madame la ministre, les remarques que je voulais formuler à l’occasion du débat sur le budget de la mission « Outre-mer ». Il est évident que cela ne pousse pas à l’optimisme ni à la confiance. Et comme les mesures de rigueur perdureront encore au moins trois ans, on comprend l’inquiétude qui s’empare de la population et des jeunes en particulier, de plus en plus en proie au désespoir et à la colère. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Louis-Constant Fleming.
M. Louis-Constant Fleming. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les documents mis à notre disposition dans le cadre de ce débat nous donnent la mesure de l’effort budgétaire, par habitant et par collectivité d’outre-mer, qui doit être consenti par l’État en 2011.
Cet effort est très inégal, puisqu’il est compris entre 177 euros et 12 441 euros par habitant, selon les cas. Une telle disparité n’a en soi rien pour surprendre : il convient de prendre en compte la situation de chaque collectivité d’outre-mer.
Force est pourtant de constater, madame la ministre, que le document que je viens d’évoquer fait apparaître une anomalie en ce qui concerne la collectivité de Saint-Martin, pour laquelle l’appartenance à la nation se traduira par un effort de solidarité budgétaire de seulement 688 euros par habitant en 2011.
Sans doute la collectivité de Saint-Martin dispose-t-elle, désormais, d’une compétence fiscale lui permettant de collecter des ressources propres mieux adaptées à ses besoins. Toutefois, la Polynésie française, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie disposent également, et depuis beaucoup plus longtemps, de la compétence fiscale. Or l’effort de solidarité nationale y est entre cinq et vingt fois supérieur.
Pour mesurer le soutien à apporter à une collectivité, il faut prendre en considération le niveau de revenu de ses habitants, me direz-vous. Néanmoins, tel n’a pas été le cas, à l’évidence, pour Saint-Martin : de cette collectivité perdure une image de paradis fiscal totalement contraire à la réalité, cette dernière étant elle-même largement imposée par une évolution démographique trop souvent ignorée.
Saint-Martin, madame la ministre, comptait 6 000 habitants en 1980. Aujourd'hui, elle en accueille officiellement 35 000, et plus probablement 40 000.
Ce bouleversement démographique n’a nullement été dû à un afflux massif d’amateurs fortunés de villégiature tropicale, mais bien plutôt à une immigration régionale causée par la misère, l’insuffisance de soins, de formation ou d’espoir de travail et par toutes les calamités liées au sous-développement, dont la situation d’Haïti nous donne le désolant exemple.
Or je suis obligé de le rappeler, c’est l’État, compétent en matière d’immigration, qui, en 1992, a régularisé la situation de milliers d’étrangers ayant, de surcroît, profité du regroupement familial.
La commune de Saint-Martin a ainsi dû faire face à une augmentation massive de sa population, qu’il a fallu prendre en charge sur le plan tant de la santé que de la scolarité, sans oublier, bien sûr, celui du logement. Sur une population estimée à 40 000 personnes, il y a aujourd’hui près de 10 000 enfants en âge scolaire.
La collectivité de Saint-Martin gère seize groupes scolaires, d’écoles maternelles et primaires, ainsi que, depuis le 15 juillet 2007, trois collèges, un lycée et une annexe de lycée. En outre, elle s’apprête à construire un nouvel établissement à la fois collège et lycée en PPP, c'est-à-dire en partenariat public-privé.
Madame la ministre, le résultat statistique de cette situation – la Commission européenne vient encore de le constater –, est que Saint-Martin appartient aux régions les moins favorisées de l’Union européenne, celles où le niveau de revenu par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne européenne et où le taux de chômage est particulièrement élevé.
Pour les régions d’outre-mer se trouvant dans une situation comparable, madame la ministre, l’effort national de solidarité budgétaire est, en moyenne, huit fois supérieur.
L’oubli, par la République et par ses services, de cette partie d’île du nord de la Caraïbe qu’est Saint-Martin n’est pas une nouveauté. Les Saint-Martinois y sont accoutumés. Ils ont eu le courage d’en tirer la conséquence institutionnelle qui s’imposait, en votant pour le nouveau statut d’autonomie qui leur était proposé.
Les Saint-Martinois espéraient cependant, de la part de l’État, un accompagnement attentif et résolu des premiers pas de leur nouvelle collectivité sur la voie de la responsabilité. Cette attente, madame la ministre, a largement été déçue. La mise en œuvre du nouveau statut de Saint-Martin n’a fait l’objet ni de la préparation soigneuse qui eût été nécessaire ni des efforts de mise à niveau que des décennies de négligence avaient rendus indispensables.
Du jour au lendemain, la collectivité s’est trouvée privée de moyens nécessaires à son fonctionnement : elle a perdu l’important instrument de financement des dépenses communales qu’était la ressource d’octroi de mer, ainsi que la garantie des douzièmes provisoires en matière d’impôts directs locaux, dont dépend l’équilibre de trésorerie d’une collectivité locale.
Certaines impositions, telles que la taxe d’habitation, n’ont pu être conservées, faute d’une anticipation des adaptations nécessaires des outils informatiques. Les compensations financières prévues par la loi statutaire de 2007 n’ont pas été assurées. Le plan de rattrapage en matière d’équipements publics prévu par la même loi organique n’a jamais vu le jour.
La liste complète des dysfonctionnements qui ont accompagné la mise en œuvre du nouveau statut de la collectivité de Saint-Martin serait trop longue, madame la ministre, pour le cadre de cette intervention.
Toutefois, la collectivité en éprouve aujourd’hui les effets. Alors qu’elle a accompli, ainsi que les contribuables saint-martinois, des efforts considérables, en termes à la fois de modération de la dépense publique et de mise en place et d’acceptation d’impôts nouveaux, l’impréparation du changement statutaire a conduit à une situation de déséquilibre de trésorerie et de déséquilibre budgétaire, qu’avait annoncés la mission de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration, diligentée sur l’initiative de la collectivité elle-même.
Saint-Martin demande en conséquence à l’État, madame la ministre, une répartition de l’effort de solidarité nationale en faveur des collectivités d’outre-mer qui lui soit moins défavorable, une plus grande vigilance à l’égard de ses besoins spécifiques et un meilleur engagement des services publics dans l’accomplissement des missions qui sont les leurs.
Surtout, Saint-Martin demande le simple respect de ses droits, dont l’un, prévu par la Constitution de la République et réaffirmé par la loi organique statutaire, est que tout transfert de compétences s’accompagne des moyens permettant l’exercice de celles-ci.
La collectivité de Saint-Martin, madame la ministre, doit exercer les compétences qui étaient celles de la commune du même nom. Pour cela, celle-ci bénéficiait de l’importante ressource que représentait, je l’ai rappelé, une fraction du produit d’octroi de mer collecté en Guadeloupe.
Je conçois fort bien qu’il ne puisse plus être demandé à la région Guadeloupe de poursuivre l’effort de solidarité qu’elle accomplissait au profit d’une commune qui était partie intégrante de son territoire. Je ne puis pour autant admettre que le principe constitutionnel de compensation financière des transferts de compétence soit, en ce qui concerne Saint-Martin, passé par pertes et profits.
En reprenant à son compte, en vue du financement des dépenses de nature communale auxquelles la collectivité de Saint-Martin ne peut se dérober, l’obligation constitutionnelle à la pleine compensation d’une charge transférée, l’État contribuera simultanément au rééquilibrage de l’effort budgétaire national en faveur des collectivités d’outre-mer, dans lequel, ainsi que je le rappelais au début de mon intervention, Saint-Martin est bien loin de trouver le juste compte que commanderait la prise en considération de sa situation réelle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Adrien Giraud. (Mme Nathalie Goulet applaudit.)
M. Adrien Giraud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Mayotte entre dans une nouvelle phase de son développement avec l’accession prévue, en avril 2011, de cette collectivité au statut de département d’outre-mer, en conséquence directe de la consultation populaire du 29 mars 2009.
Au mois d’octobre dernier, la discussion au sein de notre assemblée du projet de loi organique relatif au département de Mayotte m’a donné l’occasion de faire le point sur la situation actuelle de notre collectivité et sur les retards de son développement économique et social, avant d’aborder les questions relatives à l’organisation de ce 101e département de la République française.
Madame la ministre, les sociétés évoluent. Les besoins de Mayotte ne sont plus ceux d’hier.
Le Gouvernement a souhaité que la solidarité nationale continue de s’exercer au mieux des intérêts de cette collectivité qui a, encore aujourd’hui, le plus grand besoin d’un accompagnement fort de l’État dans cette phase importante de son évolution et de sa mise à niveau.
Madame la ministre, nous vous demandons, dans toute la mesure du possible, de prendre en compte, dans un premier temps, nos retards dans le domaine des infrastructures indispensables pour nos progrès à venir, à savoir les routes et voies de communications, les hôpitaux et dispensaires nécessaires à l’amélioration de la santé publique, le réseau d’assainissement, ainsi que – j’y reviens une fois de plus – la construction d’un « véritable » aéroport répondant, dans sa conception architecturale, aux attentes tant des élus que de la population.
Cette question devrait faire l’objet d’un nouvel examen permettant autant que possible de rapprocher les points de vue sur ce projet particulièrement important pour l’avenir de Mayotte. Il est évident, en effet, qu’un tel chantier doit se fonder sur un consensus aussi large que possible et ne pas susciter d’inutiles polémiques.
En dépit d’un cadre budgétaire national dont je connais toutes les contraintes, et malgré les efforts déjà accomplis par l’État afin de résorber nos retards de développement, je souhaite que soit octroyé à Mayotte un concours financier spécifique destiné à permettre aux communes de faire face aux lourdes charges de cette période de transition, jusqu’à l’installation, en 2014, de l’organisation départementale et en attendant, bien entendu, l’application progressive de la fiscalité locale, qui apportera aux municipalités les ressources nécessaires à leur fonctionnement.
Madame la ministre, il me semble indispensable qu’une formation adaptée soit apportée à plusieurs catégories de fonctionnaires qui sont, dès à présent, appelés à mettre en œuvre concrètement la départementalisation sur le plan administratif, technique et financier.
Par ailleurs, je souhaite appeler tout spécialement votre attention sur l’état du réseau routier de Mayotte, qui se compose de 90 kilomètres de routes nationales et de 139 kilomètres de voies départementales.
Mme Nathalie Goulet. Ce n’est pas beaucoup !
M. Adrien Giraud. La direction de l’équipement est responsable de la gestion des routes nationales, pour le compte de l’État, et des routes départementales, pour celui de notre collectivité.
Ces routes ont été dimensionnées à une époque où le trafic routier était faible. Elles sont souvent détériorées et déformées faute de moyens d’entretien régulier, à la suite, notamment, des inévitables dégâts résultant de la saison des pluies. L’érosion est alors considérable : c’est pourquoi le réseau routier se dégrade rapidement. Et il faut tenir compte également de l’augmentation importante du trafic des poids lourds entre les principaux pôles économiques.
Quelques aménagements ont déjà été réalisés – je pense aux rocades de M’tsapéré en 2002 et de Passamainty en 2005 – pour désengorger ce trafic très intense.
Partant du constat que des besoins cruciaux perdurent à Mayotte, en particulier en termes d’infrastructures, le treizième contrat de projet État-Mayotte 2008-2014 a retenu comme son quatrième axe la mise en œuvre d’un aménagement équilibré du territoire par la création, l’amélioration et la sécurisation du réseau routier. Le coût prévu de cette action s’élève à 20 millions d'euros pour le réseau national, à la charge de l’État.
À la fin de cette année, un peu plus de 8 millions d'euros auront été consommés, soit la totalité des crédits ouverts entre 2009 et 2010. Il reste donc 12 millions d’euros à honorer pour les prochaines années. Je souhaite obtenir du Gouvernement toutes les assurances sur le respect de ces engagements si importants pour nombre d’entreprises locales, c’est-à-dire pour l’emploi des Mahorais.
S’agissant de la programmation routière, hors ouvrages d’art, concernant le réseau national, les montants d’autorisations d’engagement s’élèvent à 4 millions d’euros par an pour les trois prochaines années.
La dernière étude réalisée par le Centre d’études techniques de l’équipement d’Aix constate que les besoins d’entretien et de régénération du réseau de Mayotte sont de 15 millions d’euros afin, simplement, de réaliser les travaux nécessaires pour remettre et maintenir le patrimoine en état, sans en modifier les caractéristiques.
En ce qui concerne l’amélioration du réseau routier, les besoins sont estimés à 30 millions d’euros, dont un peu plus de 11 millions d’euros sont financés par le contrat de projet État-Mayotte. Près de 20 millions d’euros supplémentaires seront donc nécessaires afin de mettre le réseau routier en état.
Madame la ministre, je n’insisterai pas davantage sur l’état du réseau départemental : on peut évaluer à environ 35 millions d’euros les besoins d’investissements qui seront nécessaires au cours des prochaines années pour assurer la sécurité de ces routes et qui ne peuvent être financés par les communes mahoraises, faute de moyens.
Nous espérons que vous nous apporterez les éclaircissements nécessaires sur l’état actuel de ces dossiers, suivis avec une grande impatience à Mayotte. En effet, leur intérêt économique pour les entreprises rejoint les besoins de la population en termes de sécurité routière et d’amélioration des échanges de toute nature, tant à l’intérieur de la collectivité que dans ses relations avec l’extérieur, en particulier dans le domaine du tourisme.
En conclusion, il est évident que les Mahorais peuvent enfin, dans le cadre départemental, consacrer tous leurs efforts au développement économique, ainsi qu’aux progrès sociaux et culturels de notre collectivité.
La réponse apportée par les Mahorais lors de la consultation du 29 mars 2009 signifie également que le temps est désormais venu de tirer les conséquences de l’évolution politique récente, qui appelle bien évidemment de vigoureuses actions de « rattrapage » lancées et accompagnées par l’État.
Lors de la discussion budgétaire de l’an dernier, j’ai eu l’occasion d’appeler l’attention du Gouvernement sur nos priorités, car nous le savons bien, comme dit le proverbe, « Paris ne s’est pas construite en un jour ». Il s’agit néanmoins pour nous d’urgences économiques et sociales qui s’appellent éducation, modernisation foncière, logement. Je sais pouvoir compter sur la vigilance et l’engagement du Gouvernement pour relever de tels défis avec Mayotte.
Permettez-moi enfin de rappeler, une fois encore, que Mayotte a depuis longtemps formulé le vœu d’accéder au statut de région ultrapériphérique de l’Europe communautaire, au même titre que les actuels départements d’outre-mer.
Madame la ministre, les Mahorais attendent beaucoup de votre action. Je sais que vous aurez le souci de ne pas les décevoir. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les précédents orateurs ayant déjà largement commenté les crédits de la mission « Outre-mer », je ne m’appesantirai guère davantage, notamment compte tenu du temps qui m’est imparti.
Concernant d’autres dispositions du projet de loi de finances pour 2011 qui touchent à l’outre-mer, je salue particulièrement l’effort de maintien de la défiscalisation en faveur du logement social outre-mer.
Cependant, je ne peux que déplorer, encore une fois, le frein politique mis à l’investissement photovoltaïque en outre-mer, sujet qui a déjà été débattu la semaine dernière.
L’arrêt de la défiscalisation dans ce secteur – il est certes modéré par les récents débats parlementaires qui ont permis d’épargner temporairement les petites installations – se situe tout de même à l’opposé des objectifs du Grenelle de l’environnement et de la volonté gouvernementale affirmée au travers de la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, d’aller vers une plus grande autonomie énergétique de l’outre-mer dans le cadre d’un développement économique endogène.
Sur le plan énergétique, nous le savons, les territoires ultramarins sont encore très fortement dépendants des importations pétrolières, avec toutes les conséquences qui en résultent. La commission d’évaluation créée récemment se penchera sur l’impact réel des défiscalisations en matière photovoltaïque, ce qui offrira à la Polynésie française une chance de démontrer l’extrême brutalité de cette mesure dans ce secteur dont la durée de vie n’a été que d’une seule année dans notre fenua, c'est-à-dire notre pays.
Madame la ministre, vous le savez mieux que nous, dans le secteur des énergies renouvelables, la nation a tout à gagner que nos outre-mer puissent être des pôles avancés, à la condition essentielle et préalable que la priorité aux intérêts des départements et collectivités d’outre-mer soit assurée conformément à la Charte des Nations unies ou, tout au moins, que l’exigence onusienne émergente du « partage des bénéfices de la croissance » soit appliquée en faveur des populations ultramarines concernées.
En Polynésie française, la phase de faisabilité d’une centrale-pilote d’énergie thermique des mers offshore d’une puissance de 5 mégawatts est sur le point d’être lancée. Nous la soutenons, tout comme vous, madame la ministre.
Le système d’air conditionné par refroidissement à l’eau de mer, le système SWAC, ou Sea Water Air Conditioning, qui y a été testé pour la toute première fois avec succès voilà déjà plusieurs années, alimente désormais plusieurs établissements hôteliers de renom.
Le développement de l’exploitation des énergies marines, en particulier de l’énergie hydrolienne, fait partie des atouts concurrentiels dont nous pouvons tirer parti.
En d’autres termes, la puissance d’un État viendra de la mer !
On ne le répète pas assez, les outre-mer représentent 97 % de la surface maritime française et la Polynésie représente 49 % de cette surface maritime ultramarine. Je sais donc au nom de quel potentiel je m’exprime devant la nation.
De plus en plus, les outre-mer français prennent conscience de leurs énormes potentiels propres, endogènes et de ce que représenterait, pour la nation, l’union de telles capacités !
Cependant, nous ne sommes ni à la fin du XIXe siècle, période sombre pour une partie de nos outre-mer, ni en 1958, dans un contexte politique de reconstruction nationale, ni encore en 1973, au lendemain du choc pétrolier à la suite duquel la dette publique de la France a pris naissance et où l’on gérait l’outre-mer français – passez-moi l’expression – « à la hussarde » !
En 2010, les lignes ont bougé.
La nation doit avoir et se donner les moyens de ses grandes ambitions. L’outre-mer français en fait-il partie ?
On ne peut pas satisfaire tout le monde, c’est vrai. Serait-ce alors à dire qu’il y aurait « trop de monde » et plus assez de moyens ?
Nos outre-mer réclament un accompagnement institutionnel et financier qui soit cohérent et loyal, suivant leur histoire propre, leurs aspirations ou leur statut institutionnel.
Ils réclament un partenariat renouvelé avec un État qui leur conférerait les outils institutionnels et les moyens financiers de leur développement économique endogène ou de leur décollage propre.
La Nouvelle-Calédonie s’est brillamment, mais non sans douleur, placée dans cette dernière perspective, et nous la saluons fièrement à ce titre. Madame la ministre, le jour viendra, j’en suis convaincu, où la Polynésie française saura prendre cet envol en toute maturité.
Néanmoins, à présent, nous ne pouvons plus supporter, à l’orée des nouveaux défis énergétiques, climatiques, financiers, diplomatiques qui nous attendent en ce début du XXIe siècle, de pâtir en silence d’une politique nationale anachronique envers les outre-mer français, politique qui, en réalité, est pilotée en filigrane tant par les ambitions technologiques d’un puissant lobby militaro-industriel français que par la rigueur budgétaire de Bercy.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Richard Tuheiava. Le véritable problème de fond qui rend difficilement crédible l’esprit même d’un « partenariat renouvelé » entre État et outre-mer français est que les éléments d’appréciation et de discussion dont disposent nos populations et nos élus ultramarins ne sont pas loyalement mis à la disposition de ces derniers, comme s’ils ne devaient pas en avoir conscience, afin d’être maintenus dans une sorte d’ignorance organisée devenue la normalité.
Près de quarante-quatre ans après le premier tir d’expérimentation nucléaire en Polynésie française et quinze ans après l’arrêt définitif des essais nucléaires en 1998, j’ai posé à plusieurs reprises au ministre de la défense la question écrite très simple consistant à savoir si au moins un rapport financier avait été officiellement établi sur les retombées financières, économiques, technologiques, diplomatiques des essais nucléaires pour la région. En effet, 193 expérimentations nucléaires ont été réalisées en Polynésie française pendant une période de quarante ans. Je n’ai obtenu aucune réponse !
Chacun de nous ici sait pourtant que l’industrie des microprocesseurs informatiques, de la fibre optique,…
M. le président. Il vous faut vraiment conclure !
M. Richard Tuheiava. Je termine, monsieur le président !
Toutes les innovations que je viens de citer, auxquelles s’ajoutent les programmes de fusée Ariane et les centrales électriques nucléaires, sont issues de l’expertise française, développée directement à partir des quarante années d’expérimentations en Polynésie française…
C’est cela le point de départ d’un partenariat rénové et loyal avec nous, madame la ministre !
Je poursuivrai mon propos au sujet du projet de loi de finances pour 2011, notamment sur l’article 77 et la dotation globale de développement économique, dans le cadre des explications de vote, puisque le temps qui m’était imparti est épuisé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Marsin.
M. Daniel Marsin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les années 2009 et 2010 ont été riches en événements pour l’outre-mer, d’un point de vue tant économique et social que politique et normatif !
La crise de mars 2009, révélatrice du malaise qui gangrène nos territoires depuis un certain temps, a déclenché une réaction en chaîne de bonnes intentions pour refonder la confiance et encourager la croissance, notamment les états généraux de l’outre-mer, la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer, l’adoption de la LODEOM dans cet hémicycle, ou encore la première réunion du Conseil interministériel de l’outre-mer.
Toujours en quête de reconnaissance et forts de leurs richesses, nos territoires seront à l’honneur en 2011, lors des manifestations de « l’année des outre-mer ». Toutefois, comment donner toute sa portée à ce clin d’œil à l’outre-mer si la crise économique et sociale, à l’échelon local, déstabilise les forces vives et angoisse nos concitoyens ? C’est contre cet état de fait qu’il faudrait lutter par des orientations et des moyens adaptés !
Madame la ministre, vous l’aurez compris, même si je peux me réjouir des manifestations culturelles à venir, sans doute utiles pour une meilleure connaissance des outre-mer et pour la promotion de ces territoires, je regrette amèrement que les arbitrages du projet de loi de finances pour 2011 ne soient pas porteurs d’impulsions de nature à promouvoir le développement endogène, tant scandé lors des états généraux, ou à stimuler la croissance des économies locales.
En effet, des dispositions de telle nature auraient permis de contrer les tendances observées : hausse spectaculaire du chômage en 2009, de plus de 23 %, augmentation de plus de 11 % du nombre de demandes d’emploi en attente, en particulier de celles des jeunes et des seniors, repli de la consommation des ménages, de l’investissement, des échanges commerciaux, avec un recul de 23 % des importations et de 14 % des exportations, paralysie de l’économie et, surtout, crise du secteur du bâtiment et des travaux publics, conséquence inévitable des blocages qui pénalisent la production de logements sociaux.
Malheureusement, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2011 ne me semble pas contenir les impulsions nécessaires pour faire face à une telle situation ; cela est d’autant plus vrai que, au-delà des lignes budgétaires, même rabotées, qui sont affichées, les procédures de traitement des dossiers visent inexorablement, nous semble-t-il, à limiter efficacement la consommation des crédits budgétés.
À propos de lignes budgétaires, madame la ministre, c’est la première année depuis trois ans que votre budget est en légère baisse : moins 0,5 % en autorisations d’engagement et moins 2,3 % en crédits de paiement.
Même s’il ne représente que 16 % de l’effort budgétaire global de la nation envers l’outre-mer – ce qui, nous l’avons déjà dit et répété, ne permet pas d’avoir une vision nette de l’action globale de l’État dans nos territoires, c’est tout de même ce budget qui nous renseigne sur la volonté politique du Gouvernement à agir, résolument ou non, dans les compartiments essentiels de la vie et de la société au sein des extensions ultramarines de la République que constituent nos territoires.
Dans ce cru 2011 du budget des outre-mer, je me contenterai de pointer trois sujets cruciaux : l’emploi, le logement et la continuité territoriale.
D’abord, en matière d’emplois, les chiffres que j’ai rappelés précédemment sont éloquents et alarmants ! Même si les objectifs fixés par le Président de la République sur trois ans pour le SMA, le service militaire adapté, ne seront pas atteints, ce dispositif est efficace ; il connaît un certain succès et constitue un excellent vecteur de qualification pour nos jeunes.
Pour autant, au-delà de la gravité de la situation des jeunes, il ne faudrait pas méconnaître la situation des seniors, qui risque de se dégrader avec la mise en œuvre des nouvelles dispositions relatives aux retraites ; d’où l’impératif d’un développement économique pour répondre à leur demande.
Concernant les crédits consacrés au soutien aux entreprises, aux exonérations de charges patronales, je note l’effort qui est consenti pour apurer la dette de l’État envers les organismes sociaux. Mais, surtout, madame la ministre, il faut tout faire pour éviter qu’elle ne se reconstitue rapidement, une tendance que l’on observe peut-être d’ores et déjà.
Ensuite, sur la question du logement social, je reste vraiment inquiet. Madame la ministre, je vous ai récemment interpellée à ce sujet en mettant l’accent sur les 7 000 logements en attente de construction, la chute de plus de 35 % de l’activité du BTP, la destruction d’emplois, les plans sociaux en cours d’élaboration et les 20 000 Guadeloupéens qui attendent désespérément un logement ! Les réponses que vous m’avez fournies ne m’ont pas satisfait et elles ont d’ailleurs provoqué un profond émoi chez les professionnels du logement, notamment en Guadeloupe.
Or, dans le projet de budget que nous examinons, les crédits consacrés à cette question stagnent en autorisations d’engagement et chutent de plus de 9 % en crédits de paiement ! C’est dire si la crise risque de perdurer, sinon de s’aggraver. J’insiste donc de nouveau sur la nécessité de simplifier la procédure de délivrance des agréments, de débloquer les dossiers en cours et de rassurer les opérateurs immobiliers en affirmant la possibilité de combiner les deux sources de financement que sont la défiscalisation prévue par la LODEOM et la ligne budgétaire, socle du financement du logement social !
Enfin, concernant la continuité territoriale, vecteur symbolique de citoyenneté, de solidarité et d’unité nationales, je regrette que, dix-huit mois après le vote de la LODEOM, les dispositions majeures prévues ne puissent entrer en vigueur !
Madame la ministre, en matière de développement économique, de chômage, de logement, de cherté de la vie, de situation des collectivités territoriales, les clignotants sont au rouge !
Après les espérances suscitées par les conclusions et décisions issues des états généraux de 2009, l’année 2010 se termine sur une réelle déception. Cela a été largement exprimé ce matin.
Que sera 2011 ? Ce projet de budget ne me permet pas d’être optimiste ! Je vous invite, et à travers vous le Gouvernement, à ne pas laisser pourrir la situation, car, croyez-moi, les conséquences pourraient être désastreuses pour tous, et à tout point de vue !
Bien entendu, madame la ministre, je ne voterai pas a priori contre votre projet de budget, car je veux penser que vous entendrez et comprendrez mon appel. Il n’en reste pas moins que j’écouterai attentivement vos réponses à mes interrogations comme à celles de mes collègues. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous aurions dû aujourd’hui examiner un budget audacieux, à la hauteur des promesses qui ont été faites en réponse à la crise sociale qui a durement touché l'outre-mer.
Au lieu de cela, ce budget suit cette année le même chemin que celui que le Gouvernement impose à l’ensemble de nos politiques publiques : la voie de la régression. C’est le moins que l’on puisse dire ! En effet, on observe une diminution des crédits de 46 millions d’euros par rapport à l’an passé.
Il y a eu la crise, me direz-vous. Mais, madame la ministre, la crise ne justifie pas que vous puissiez ainsi vous exonérer des engagements essentiels de l’État car, en dernier ressort, ce sont les populations à risque, celles qui sont les plus fragiles et les plus exposées qui en font les frais !
Déjà, la crise de 2009 a fortement endommagé les finances des collectivités. L’octroi de mer a subi des tirs croisés de toutes sortes et le gel des dotations des collectivités pour trois ans aggravera encore cette situation.
Ce choix paraît difficilement défendable, car il s’agit de résorber en trois ans une trentaine d’années de dérapages non contrôlés en en faisant porter la responsabilité par ceux qui n’y sont pour rien.
À qui la faute ? Elle est imputable, certainement pas à ceux qui, pour la plupart, vivent en dessous du seuil de pauvreté, mais bel et bien aux tenants du capitalisme et du libéralisme dont ce gouvernement est trop souvent le fidèle porte-voix.
Ce budget devait être le reflet des dispositifs qui ont été votés dans le cadre de la loi pour le développement économique des outre-mer. Or, dix-huit mois après sa promulgation, celle-ci n’est que partiellement mise en œuvre.
La ligne budgétaire unique s’amenuise de 21 millions d’euros et les crédits consacrés aux logements sociaux et très sociaux perdent la somme, si l’on peut dire « modique », de 34 millions d’euros. Quand on connaît l’immensité des besoins en outre-mer, les chiffres parlent d’eux-mêmes !
Pour prendre l’exemple cité ma collègue Gélita Hoarau concernant La Réunion, 22 600 familles ont déposé une demande de logement. Or, comme l’a souligné le rapporteur spécial Éric Doligé, en 2009, seuls 6 200 logements ont été construits en outre-mer, alors qu’il en faudrait au minimum 45 000 par an pour faire face aux 60 000 demandes en attente. Ce décalage est dramatique. Qui plus est, il entre encore une fois en contradiction avec la promesse de rallonge budgétaire de 20 millions d'euros, attendue par les bailleurs sociaux.
Ainsi devient-il plus qu’urgent d’augmenter la ligne budgétaire unique, comme il devient essentiel de rectifier le tir quant à la mise en œuvre de la défiscalisation appliquée au logement social, pensée et voulue par le Gouvernement. Au regard des dérives constatées pendant la crise, il nous paraît inopportun, voire indécent, de faire dépendre le logement social des arbitrages d’investisseurs privés.
Le logement social ne peut pas et ne doit pas devenir un instrument de régulation des finances publiques.
Offrir à tous ceux qui en ont besoin un habitat décent contre un loyer adapté et maîtrisé : telle est la politique du logement que nous souhaitons voir mise en œuvre, aussi bien en outre-mer qu’en métropole.
Par ailleurs, les décisions du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009 sont, elles aussi, au point mort : 137 mesures ont été annoncées pour les outre-mer, dont 71 mesures transversales à l’ensemble des collectivités ultramarines. Aujourd’hui, la banane est menacée par des multinationales américaines avides, favorisées par les règles de l’Organisation mondiale du commerce, qui s’appliquent avec tranchant et sans appel.
Le tourisme décline et le chômage atteint des sommets pour les ultramarins. Le taux de chômage est deux fois plus élevé dans les départements d'outre-mer qu’en métropole et augmente six fois plus vite : il atteint 22,7 % en Guadeloupe, 21,2 % en Martinique, 20,6 % en Guyane et 29 % à La Réunion. Mais, surtout, il touche de plein fouet les jeunes, dans des proportions encore plus importantes. Faut-il rappeler que les départements d’outre-mer sont les régions d’Europe où le chômage des jeunes atteint des niveaux record ?
Madame la ministre, face à l’ensemble de ces problématiques, c’est votre responsabilité qui est engagée.
Certes, ce ne sont pas les « plans d’action » qui ont manqué ces dernières années : loi d’orientation pour l’outre-mer, loi de programme pour l'outre-mer, loi pour le développement économique des outre-mer. Au total, la liste est longue des mesures grandiloquentes, qui ont toutes rendu l’âme ou la rendront, puisque ce budget 2011 manque cruellement d’audace !
Madame la ministre, dix-huit mois après le vote de la LODEOM, les dispositions prévues ne sont toujours pas toutes en vigueur et, un an après votre engagement solennel au Sénat, certains décrets d’application ne sont pas encore publiés.
Le nouveau dispositif de continuité territoriale balbutie, les pratiques des compagnies aériennes flottent dans un clair-obscur. Quant au rapport de synthèse prévu par la loi sur les coûts et les prix des transporteurs soumis à l’obligation de service public, les parlementaires attendent toujours, la transparence aussi !
Nous regrettons que, une fois de plus, l’outre-mer soit relégué au second plan et méprisé de la sorte. Au final, ce budget pour 2011 n’est pas à la hauteur des engagements pris. C’est inadmissible !
Nos concitoyens ultramarins méritent bien mieux que le sort que vous entendez leur réserver dans le présent projet de loi de finances. C'est la raison pour laquelle le groupe CRC-SPG votera contre les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)
(M. Roger Romani remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.
M. Robert Laufoaulu. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la discussion sur le budget nous ramène toujours au fondement de cet exercice, la solidarité nationale. Mise en commun selon les moyens, redistribution selon les besoins, telle est la philosophie qui la fonde.
L’examen des crédits de la mission « Outre-mer » est l’occasion de rendre hommage à notre grand pays qui n’oublie pas ses territoires du bout du monde, réfutant l’idée commune selon laquelle « loin des yeux, loin du cœur ».
Mon sentiment de reconnaissance est d’autant plus vif que Wallis-et-Futuna a bénéficié directement de la solidarité nationale, au travers du fonds de secours mis en place dans cette mission « Outre-mer ».
En effet, au mois de mars dernier, un violent cyclone a touché nos îles, causant d’énormes dégâts. Dès le lendemain, madame la ministre, vous avez annoncé l’aide d’urgence, une aide alimentaire et, bien sûr, l’aide pour la reconstruction.
Il reste beaucoup à faire pour effacer complètement les dégâts, mais les familles sont volontaires et enthousiastes dans leurs travaux de reconstruction et reconnaissantes pour l’aide obtenue.
Je veux souligner l’arrivée à Wallis et Futuna, cette nuit, de la TNT, comme partout en outre-mer. Huit chaînes gratuites dans tous les foyers, c’est une ouverture formidable sur le monde. Cette situation est peu commune dans cette région océanienne. C’est encore la solidarité des Français qui le permet.
J’en viens au projet de budget pour 2011. La mission « Outre-mer » voit ses crédits se réduire. La crise est passée par là et l’outre-mer doit naturellement prendre sa place dans l’effort national.
La perspective d’un retour aux moyens antérieurs dès le budget pour 2012 est réjouissante et le sacrifice consenti en ces temps de crise n’en est que mieux accepté.
Pour ce qui concerne plus directement Wallis-et-Futuna, madame la ministre, je souhaite savoir ce qu’il en est de l’aide au fret dont pourra bénéficier ma collectivité selon l’article 24 de la LODEOM. C’est un formidable moyen de dynamiser la production locale, surtout pour la consommation intérieure, et aussi – pourquoi pas ? – une amorce d’exportation qui reste insignifiante aujourd’hui.
Cela m’amène d’ailleurs à vous interroger sur l’insertion de Wallis-et-Futuna dans son environnement régional. Je sais que vous avez demandé à Ubifrance d’assurer un certain nombre de missions fort utiles pour favoriser l’exportation provenant de l’outre-mer. Wallis-et-Futuna pourrait-il bénéficier de cette expertise ?
Ce sont des mesures comme l’aide au fret qui contribuent à étoffer et à renforcer une petite économie locale. Je pense aussi à la prime à la création d’emploi mise en place par l’article 16 de la loi « Girardin », qui a donné de bons résultats. Mais je souhaite vous proposer, madame la ministre, de revoir les modalités de son attribution pour la rendre encore plus performante.
Pouvez-vous aussi me préciser comment évolue le projet de service militaire adapté à Futuna ? Le SMA a fait ses preuves : il a entraîné l’adhésion de tous, et le Président de la République s’est engagé à en doubler les effectifs. Nous comptons beaucoup sur ce dispositif pour former une partie de nos jeunes sur place, notamment ceux qui se voient refuser leur demande d’incorporation dans l’armée.
La formation professionnelle de notre jeunesse constitue un objectif majeur : c’est la garantie d’un emploi. Le dispositif « formation-mobilité » permet à de nombreux jeunes de venir en métropole pour y acquérir les compétences nécessaires pour leur insertion dans le marché du travail.
Une convention du 27 juin 2007 entre l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, la LADOM, anciennement l’ANT, l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer, et le territoire précise les dispositions visant cette formation et donne au Service de l’inspection du travail et des affaires sociales, le SITAS, de Wallis-et-Futuna, la coordination de l’ensemble de préparation à la mobilité.
Cependant, la convention d’objectifs et de moyens 2009-2011 entre le ministère de l’outre-mer et l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité énonce le principe selon lequel cet opérateur de l’État a en charge le suivi intégral des dossiers de formation et la coordination entre les différents acteurs.
Les nouveaux décrets relatifs aux dispositifs de mobilité ont retenu, pour Wallis-et-Futuna, le principe de la gestion dérogatoire.
Compte tenu de ces évolutions réglementaires, sans doute serait-il nécessaire de clarifier les rôles des différents partenaires, c'est-à-dire le SITAS, la LADOM et l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, pour l’intérêt des jeunes Wallisiens et Futuniens, comme l’a souligné le directeur de la LADOM. La situation actuelle semble confuse et pourrait rapidement aboutir à des conflits de compétence.
Madame la ministre, je tiens à exprimer la grande satisfaction des responsables du territoire quant au suivi de nos jeunes stagiaires par la LADOM en métropole. Toutefois, la phase relative à l’insertion dans le marché du travail nous rend pour le moment demandeurs de plus d’informations. Je n’oublie pas non plus le suivi de nos stagiaires dans le cadre de notre dispositif « Quarante cadres pour le territoire ».
Madame la ministre, j’en viens à un sujet difficile, celui de la desserte inter-îles, dont le poids financier devient de plus en plus insupportable pour le budget de la collectivité. Je relaie donc la demande du territoire pour un renouvellement de l’aide supplémentaire accordée à la fin de 2009 pour le fonctionnement de cette desserte.
Le coût annuel prévisionnel pour 2010 de la subvention d’équilibre versée par le territoire représente 300 millions de francs CFP, soit près de 10 % du budget de fonctionnement de la collectivité.
En 2009, la dotation initiale de l’État a atteint 1,455 million d'euros, complétée en fin d’année par un million d’euros supplémentaires, correspondant à un engagement pris par le ministre d’alors, en charge de l'outre-mer, d’imputer à l’État le surcoût de la mise en exploitation du deuxième appareil.
Pour 2010, la dotation de l’État s’élève à 1,6 million d'euros. Les élus souhaitent que l’État puisse apporter en fin d’année un complément de financement équivalent à celui qui a été attribué à la fin de l’année 2009.
La subvention d’équilibre, dénommée depuis 2009 « subvention de fonctionnement », correspond à un engagement pris par le ministre en charge de l’outre-mer. Son montant a beaucoup fluctué ces dix dernières années. Après avoir atteint un sommet de plus de 2 millions d’euros en 2004, pour permettre au budget territorial de revenir à l’équilibre, il s’est stabilisé ces dernières années pour atteindre 506 998 euros en 2008 et en 2009.
En 2010, son montant a été fixé à 470 000 euros, une nette baisse par rapport aux deux années antérieures.
Aussi, compte tenu des charges exceptionnelles auxquelles le territoire a eu à faire face en 2010, notamment avec le cyclone Tomas qui a entraîné, au-delà des dégâts directs et immédiats, une baisse de l’activité économique et le nécessaire financement, notamment, de la reconstruction du réseau téléphonique de Futuna, il serait formidable que l’État puisse apporter, en fin d’année, un complément de financement, de telle sorte que la subvention atteigne un niveau au moins équivalent à celui de 2009.
Dans un tout autre registre, je souhaite, en tant que représentant du Sénat au comité national de l’Initiative française pour les récifs coralliens, l’IFRECOR, dire l’importance de cet organisme pour nos collectivités d’outre-mer.
Ce dernier existe maintenant depuis 1999 et effectue un travail essentiel. Le ministère de l’outre-mer, qui en partage la tutelle avec le ministère de l’écologie, finance les comités locaux, et je l’en remercie. Le prochain comité national fera, la semaine prochaine, le bilan de la deuxième phase, pour la période 2006-2010, de mise en œuvre du plan cadre. Il fera également adopter le contenu et l’animation de la troisième phase, qui courra de 2011 à 2015.
Enfin, puisque le temps m’est compté, je voudrais, d’ores et déjà, avant d’y revenir plus longuement au moment de la discussion de l’amendement que nos rapporteurs spéciaux de la commission des finances ont décidé de déposer, sans concertation et avec ce que je ressens un peu comme du mépris (Exclamations.), aborder le sujet de l’Agence de santé.
Le budget prévu sera sans doute insuffisant, car la communauté hospitalière de territoire, CHT, de Nouméa, vers laquelle nous sommes obligés d’évacuer bon nombre de nos malades, augmente ses tarifs de plus de 5 % chaque année ! Ne pourriez-vous, madame la ministre, nous aider dans nos relations avec la CHT ?
Madame la ministre, à la veille de 2011, année de l’outre-mer, je vous renouvelle ma confiance et voterai ces crédits. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Madame la ministre, il y a une phrase que vous aimez prononcer depuis quelque temps : « L’outre-mer doit s’inscrire également dans l’effort national de maîtrise de la dépense publique ». C’est une phrase qu’apprécie fortement votre ministre de tutelle, puisqu’il n’a pas hésité à déclarer, s’adressant aux maires ultramarins lors du récent Congrès des maires : « L’État s’impose des règles très strictes pour limiter la casse, les déficits et ce qui peut nous arriver avec Bruxelles ; cela s’applique à tout le monde. L’outre-mer ne peut être totalement exonéré de cet effort national et, sur ce sujet, Marie-Luce Penchard a tenu un discours de vérité, un discours de femme d’État ».
C’est un très bon point pour vous, madame la ministre ! Mais, vous le savez certainement mieux que M. Hortefeux, la situation des outre-mer n’est en rien semblable à celle de la métropole et chaque territoire d’outre-mer présente ses propres particularités. De ce fait, ils méritent une attention différente.
Soyez rassurée, madame la ministre, je ne vais pas vous faire un inventaire à la Prévert de tous les maux des outre-mer, ni vous rappeler le malheureux souvenir des événements qui ont émaillé nos territoires en 2009.
Je souhaite m’inscrire non dans la complainte, mais dans la volonté d’agir avec les moyens que vous êtes censée mettre à la disposition de mon département de Guyane dans cette période de restriction budgétaire.
Les crédits qui lui sont réservés dans le projet de loi de finances pour 2011 s’élèvent, toutes missions confondues, à 1,3 milliard d’euros, soit une baisse notable de 40 millions d’euros par rapport à 2010, sur laquelle je n’épiloguerai pas. Considérons-la comme notre tribut à l’effort national !
Plus que sur l’évolution des chiffres, concentrons-nous sur l’effectivité des actions, sur leur adéquation à la réelle problématique du territoire. Le temps qui m’est imparti m’oblige à n’intervenir que sur quelques questions, que je juge essentielles.
Je commencerai par l’enseignement scolaire dont la situation demeure particulièrement préoccupante, au point qu’un ancien recteur n’a pas hésité à conférer à la Guyane le triste privilège « des plus mauvais résultats de France sur tous les plans ».
Nous vivons des situations ubuesques, dont l’une a récemment poussé de jeunes étudiants à bloquer le rectorat. Ils manifestaient leur colère d’avoir découvert, après s’être inscrits à une formation, en l’occurrence, le brevet de technicien supérieur, BTS Études et économie de la construction, qu’elle ne serait pas lancée. C’était un « BTS fantôme », pour reprendre leurs propres termes… Tout cela témoigne d’une situation catastrophique, qui devrait nécessiter la mise en place d’un « plan Marshall ». Or tel n’est pas le cas, on en est même très loin !
Tout en saluant la pérennisation de la dotation spéciale d’équipement scolaire, je regrette que la mission « Enseignement scolaire » elle-même ne progresse que de 2 %, taux nettement inférieur à la population scolarisable, laquelle progresse de plus de 5 % chaque année. Doit-on continuer, madame la ministre, à enfoncer dans le gouffre de l’illettrisme et des échecs scolaires une jeunesse aussi nombreuse ?
J’en viens à un autre sujet d’importance, le logement, qui est aussi une priorité urgente. Et pour cause ! En Guyane, 15 % de la population vit dans des logements insalubres ou illicites. Ces derniers, au nombre de 19 000, abritent 30 000 personnes. En outre, 13 000 demandes de logements ne peuvent être satisfaites dans le secteur locatif social. Pourtant, 80 % de la population est éligible au logement social.
C’est une véritable crise aigüe du logement à laquelle on assiste et que l’on n’arrive pas à juguler. Il est vrai que vous avez fixé des objectifs encore plus ambitieux que ceux qui figuraient dans la loi instituant le droit au logement opposable, dite loi DALO, soit 5 700 logements locatifs sociaux par an, contre 5 400 pour l’ensemble des DOM, en misant sur une stabilisation de la Ligne budgétaire unique, la LBU, et sur le nouveau dispositif de défiscalisation créé par la LODEOM.
Mais quand on regarde de plus près, on s’aperçoit que vous faites reculer de 30 % les crédits de paiements de la LBU et que les dossiers immobiliers montés en défiscalisation ont du mal à sortir tant la procédure paraît complexe. Il en résulte que, pour l’heure, les résultats sont loin d’être à la hauteur des besoins. En conséquence, madame la ministre, peut-on espérer que votre système de financement du logement social, que vous défendez si bien, deviendra vite opérationnel ?
Madame la ministre, un troisième point m’a fortement interpellé dans l’examen de votre budget. Il s’agit, outre les retards pris dans l’application des mesures de la LODEOM, de la réduction plus que significative de crédits, voire leur suppression. Ils concernaient pourtant des actions qui, selon moi, concouraient ou pouvaient concourir à la politique de développement endogène, dispositif préconisé par le chef de l’État pour sortir les outre-mer de leur non-développement.
Parmi les sujets essentiels, je veux citer le rabotage des niches fiscales avec, notamment, l’exclusion des investissements réalisés dans le secteur photovoltaïque du champ des investissements éligibles à la défiscalisation. C’était, entre autres, pour beaucoup de communes de Guyane encore enclavées, la seule possibilité de fournir en électricité leurs nombreux sites à l’écart. L’amendement que j’ai présenté, à cet effet, même s’il a semblé être entendu par M. Baroin, ancien ministre de l’outre-mer, bien au fait des choses, n’a pas été retenu pour autant.
Je citerai également un autre sujet d’importance, la réduction des crédits du Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI. Ce fonds, créé par l’article 31 de la LODEOM afin de participer au financement d’équipements structurants en partenariat avec les collectivités territoriales d’outre-mer, voit le montant de ses autorisations d’engagement ramené à 10 millions d’euros. Les autorisations d’engagement ouvertes en 2010 s’élèvent à près de 60 millions d’euros pour un montant en provenance du FEI de près de 39 millions d’euros destiné à des opérations de financement d’écoles, de réseaux d’assainissement ou d’infrastructures de transport.
La Guyane a bénéficié, à elle seule, au titre de ce fonds, de 4,9 millions d’euros. Il paraît donc incompréhensible qu’il soit ramené à un tel montant.
Je citerai, enfin, l’appui à l’accès aux financements bancaires auquel je délivre une mention spéciale ! Cette initiative répondait à une demande récurrente des socioprofessionnels locaux. Elle a été relayée par la proposition n° 34 de la mission d’information du Sénat sur la situation des DOM, dont l’objet était : « Étendre aux agriculteurs et aux pêcheurs des départements outre-mer les dispositifs de garantie et d’aide applicables en métropole. »
Tout en saluant cette initiative, il convient d’en limiter la portée : le fonds de garantie ne sera doté que de 5 millions d’euros en crédits de paiement en 2011, et aucun crédit n’est prévu en autorisations d’engagement pour 2011, alors que le fonds était doté de 10 millions d’euros.
En dépit de l’instauration de ce fonds, les banques continuent à voir avec la plus grande frilosité la clientèle venant des secteurs productifs.
Par ailleurs, un certain nombre de dispositifs existant en métropole, les dispositifs OSEO, ne sont toujours pas appliqués aujourd’hui dans les DOM, même s’il existe une convention-cadre de partenariat signée entre OSEO et l’Agence française de développement, l’AFD, dont « l’objet est d’étendre la gamme des produits financiers distribués par l’AFD qui concerne désormais l’ensemble des produits OSEO ». Cela demeure un point à éclaircir ou à clarifier dans les délais les plus brefs si l’on veut réellement faire décoller économiquement « les outre-mer ».
Madame la ministre, mon temps est malheureusement écoulé, et je le regrette, car j’aurais voulu également aborder la situation catastrophique de la santé en Guyane. À ce propos, quid du plan santé outre-mer ?
J’aurais aimé vous parler aussi de l’exploitation aurifère et du rôle qu’elle peut jouer pour la Guyane, de l’orpaillage clandestin et de ses ravages.
Je vous remercie à l’avance de bien vouloir répondre à toutes les questions que je vous ai posées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. –M. Jean-Paul Virapoullé applaudit également.
M. le président. La parole est à M. Michel Magras. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Michel Magras. Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget qui nous est soumis s’inscrit dans le contexte que nous connaissons. Les finances publiques sont en berne cette année, et les perspectives à moyen terme ne poussent pas davantage à l’optimisme.
Dans cette situation, le budget de l’outre-mer accuse donc une diminution raisonnable, que je qualifierai, pour ma part, de contribution républicaine.
Ainsi, il ne sera pas dit demain que l’outre-mer a contribué à l’augmentation du déficit et de la dette publique, au moins en 2011.
En effet, si je récuse, au nom de cette contribution républicaine, l’idée que l’on parle d’effort de la nation lorsqu’il s’agit des dépenses consacrées à l’outre-mer, j’approuve, en revanche, qu’il soit demandé un effort à l’outre-mer comme au reste de la nation. Celui-ci se traduit par une baisse de 0,6 % des autorisations d’engagement et de 2,3 % des crédits de paiement.
Certes, les retards demeurent et, de ce point de vue, je comprends l’amertume de certains de mes collègues. Je la comprends d’autant mieux que la LODEOM votée voilà à peine un an subit, par la force des choses, le « coup de rabot » national.
En rabotant les niches fiscales dont fait partie la défiscalisation outre-mer, l’État espère diminuer son manque à gagner fiscal. Il est vrai que la remise en cause des politiques de développement de manière récurrente n’est pas de nature à favoriser la stabilité du cadre économique, qui est si nécessaire pour susciter la confiance des investisseurs et les inciter à prendre des risques outre-mer.
Je me permets d’insister : si la contribution me semble légitime, il faut néanmoins espérer désormais que l’objectif d’économie de la dépense fiscale ne se traduise pas par la diminution de l’investissement dissuadé par le « coup de rabot ». Dans ce cas, on aurait alors créé un cercle vicieux qui obligerait l’État à rendre d’une main ce qu’il aurait gagné de l’autre.
Vous devez sans doute, au moins pour certains, être étonnés de m’entendre parler ainsi de la défiscalisation. Je crois que chacun ici connaît la position de Saint-Barthélemy, donc la mienne, sur le sujet. En réalité, ce n’est pas tant la défiscalisation en elle-même que je soutiens que la stabilité du cadre économique.
À cet égard, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux que me réjouir des amendements adoptés par l’Assemblée nationale sur l’initiative de Gaël Yanno. Je reste, en effet, persuadé que la défiscalisation ne peut être un outil utile à l’économie qu’à la condition que l’investissement ne soit pas uniquement guidé par l’opportunisme fiscal. C’est pour cela que la collectivité de Saint-Barthélemy a choisi d’autoriser les investissements en défiscalisation dans des secteurs ciblés et en nombre limité.
Ainsi, les dispositions relatives à la transparence et, si j’ose dire, à la moralisation du dispositif, introduites par l’Assemblée nationale, vont dans le sens d’une saine clarification des règles bénéficiant avant tout à l’économie locale. De même, l’augmentation de 2 % du taux de rétrocession s’inscrit dans cette même logique.
Selon moi, ces amendements adressent un message consistant à rappeler l’objectif principal de la défiscalisation, à savoir l’augmentation de l’investissement en outre-mer, la compensation du déficit de capitalisation, et pas seulement la réduction de l’impôt. Il était plus que temps !
C’est à ce prix que l’outre-mer cessera d’être considéré comme un terrain de jeux pour payer moins d’impôts, au mépris de l’intérêt de l’économie locale et du développement durable.
Dans cette même philosophie, j’ai cosigné les amendements présentés par notre collègue Jean-Paul Virapoullé, afin d’introduire un agrément au premier euro pour les investissements dans le domaine du photovoltaïque, car l’accroissement des contrôles est une autre manière de faire des économies en évitant une utilisation détournée des fonds publics.
J’aurais néanmoins souhaité que ce principe d’agrément au premier euro soit étendu à l’ensemble des investissements éligibles. Cela aurait renforcé l’effet de la disposition de la LODEOM, fort opportunément introduite par la commission des finances, qui permet aux présidents de région de rendre un avis sur les projets d’investissement soumis à agrément. En effet, qui mieux que les collectivités locales peut juger de l’opportunité d’un investissement en ayant une vue globale sur l’économie ?
Une entreprise ne devrait pas, en effet, avoir la possibilité d’investir dans un domaine qui ne correspond ni aux besoins réels ni à la volonté politique de la collectivité concernée, d’autant que, lorsqu’on parle de défiscalisation, il s’agit d’argent public. On se situe donc du point de vue non pas uniquement de l’intérêt de l’entreprise, mais aussi de celui de la collectivité.
C’est d’ailleurs pour cela que je vous félicite, madame la ministre, d’avoir préservé le logement social car, même si Saint-Barthélemy n’est pas concernée, s’il est un secteur qui relève de l’action publique et de la solidarité, c’est bien celui du logement.
Pour terminer sur la défiscalisation, permettez-moi de dire quelques mots sur le photovoltaïque, qui a provoqué des remous en métropole comme en outre-mer. Dans ce débat, je distinguerai l’investissement artisanal ou familial des projets photovoltaïques à caractère industriel.
Le premier me semble devoir être encouragé, car il contribue largement à faire évoluer les mentalités et le rapport à l’énergie en favorisant une meilleure gestion de sa consommation. Plus les foyers deviendront autonomes grâce au solaire, plus ils auront conscience de leur consommation dès lors qu’ils en sont les gestionnaires. C’est mon avis. On pourrait donc, outre-mer mieux qu’ailleurs, développer ce type de comportement compte tenu de la disponibilité de l’énergie solaire. Je reste pour autant conscient du coût élevé de l’équipement, mais convaincu que le déplacement de l’avantage fiscal sur le solaire privé pourrait favoriser une baisse des prix.
Je suis moins enthousiaste s’agissant des centrales photovoltaïques. La « surchauffe » provoquée par un surcroît d’investissements évoquée par nos collègues de l’Assemblée nationale montre bien que le secteur est particulièrement dynamique. La suppression de l’avantage fiscal ne devrait donc pas se traduire par un arrêt total des investissements. On sait en outre que, au-delà de 30 % d’énergies renouvelables, la stabilité du réseau électrique n’est plus assurée.
Je partage, là encore, l’avis de mon collègue Jean-Paul Virapoullé. Par son amendement, celui-ci a proposé un compromis afin de ne pas remettre en cause les projets engagés.
J’évoquerai enfin un point qui concerne particulièrement Saint-Barthélemy. Comme j’ai eu à vous l’exposer, madame la ministre, il me plairait que les conditions d’accès au fonds d’échanges à but éducatif, culturel et sportif pour les associations sportives de Saint-Barthélemy puissent être adaptées, afin de tenir compte notamment de leur difficulté à constituer des ligues, eu égard à l’étroitesse de l’île et au nombre de licenciés. Ces associations sont, dès lors, tributaires de fréquents déplacements pour les compétitions et le système actuel contribue à limiter les ambitions, voire à exclure nos jeunes de toute compétition à partir d’un certain niveau.
Madame la ministre, au-delà de ce budget, cette discussion est l’occasion de vous dire ma satisfaction de la politique conduite en faveur de l’outre-mer.
Les engagements du CIOM ont été respectés. Toutes les conditions sont actuellement réunies pour que la LODEOM puisse jouer pleinement son rôle ; je pense en particulier aux dispositions relatives à la continuité territoriale. L’année 2011 sera l’année des outre-mer. Dans la mise en œuvre progressive de la politique de la mer, l’outre-mer a retrouvé la place qu’il mérite, puisque, à cet instant, tous les comités maritimes ont été mis en place et sont en ordre de marche – ce n’est pas le cas sur la façade maritime métropolitaine – et que le secteur du logement, secteur prioritaire, a été préservé.
Je ne reviendrai pas sur la diminution globale des crédits, l’essentiel ayant été dit.
Il va sans dire, madame la ministre, mes chers collègues, que je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Nous voici de nouveau réunis, madame la ministre, pour l’examen du projet de budget de la mission « Outre-mer ».
Comme vous le savez, les départements d'outre-mer cumulent un grand nombre de handicaps structurels économiques et sociaux. Comme vous le savez aussi, cette situation est particulièrement aggravée par la crise à laquelle nous sommes confrontés depuis deux ans.
En 2009, le PIB outre-mer a reculé de 6,5 %, et les investissements de 25 %.
La précarité progresse inexorablement : plus de 20 % des ménages vivent désormais sous le seuil de pauvreté. Le chômage est trois fois plus élevé que dans l’Hexagone et touche particulièrement les jeunes et les plus de 50 ans.
Les collectivités locales sont exsangues. Elles compensent, tant bien que mal, depuis trois décennies, une situation globale de développement défavorable, accentuée par des ressources fiscales extrêmement faibles.
Cette dramatique réalité, madame la ministre, vous la connaissez. Et pourtant tout indique dans les prévisions de la mission « Outre-mer » pour 2011 que vous n’êtes pas parvenue à la faire comprendre à vos collègues de Bercy.
Dans ces prévisions pour 2011, l’outre-mer est en effet perdant sur tous les fronts.
Premièrement, cela a été dit et répété, les crédits de la mission « Outre-mer » diminuent en crédits de paiement de 2,3 %, soit deux fois plus que le reste des dépenses de l’État.
Deuxièmement, la volte-face opérée sur les dispositifs de défiscalisation va, de toute évidence, finir de mettre à mal les investissements privés.
Mais soyons concrets ! Examinons les points clés de votre budget.
Sur le logement, l’État ne respecte pas ses engagements.
Alors que la LBU était censée demeurer le « socle du financement du logement social », vous avez procédé à un véritable « tour de passe-passe » en la remplaçant, dans les faits, par la défiscalisation.
Ainsi, les crédits de paiement consacrés à la construction de logements locatifs sociaux et très sociaux diminuent de 34 millions d’euros. À titre d’illustration, cela équivaut purement et simplement à la suppression de l’ensemble de la LBU pour la Martinique.
La manœuvre peut vous sembler habile, mais, dans la pratique, elle va contribuer à l’accélération de l’effondrement, largement engagé, du secteur du BTP et évidemment à la non-production des logements nécessaires.
Parallèlement, les aides pour l’accession à la propriété diminuent de 8 millions d’euros, et les aides pour l’amélioration de l’habitat privé de 3 millions d’euros.
En matière d’aménagement du territoire, les crédits destinés aux contrats de plan État-région et aux contrats de projet et de développement sont en baisse de 12 millions d’euros !
En ce qui concerne la continuité territoriale, les fonds dédiés sont rognés de 3 millions d’euros, et les moyens des collectivités territoriales amputés de 31 millions d’euros.
Les crédits d’appui à l’accès au financement bancaire diminuent également en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, avec une baisse respective de 18 millions d'euros et de 2,5 millions d'euros.
Même les moyens en faveur de l’emploi, qui est pourtant présenté comme la priorité de ce gouvernement et de votre ministère, se trouvent dégradés. Ainsi, les crédits pour la compensation des exonérations de charges sociales sont réduits de 34 millions d’euros !
Par ailleurs, le décret d’application concernant l’aide au fret prévue par la LODEOM n’est toujours pas sorti, alors que la TVA NPR a été supprimée dès la loi de finances pour 2009.
J’arrête ici cette triste liste pour ce qui est de la mission « Outre-mer ».
Le plus grave, c’est que, parallèlement, sont prises des mesures de remise en cause de la défiscalisation, qui vont bien au-delà du coup de rabot national de 10 %.
En 2006, Nicolas Sarkozy, qui n’était pas encore Président de la République, parlait ainsi de la loi Girardin de 2003 : « Des engagements ont été pris par l’État sur quinze ans, ils doivent être respectés. »
En 2008, deux ans après ce discours, les dispositifs d’exonération des charges sociales et de défiscalisation sont revus à la baisse, et ce sans évaluation préalable.
En 2009, la LODEOM réécrit, une nouvelle fois, ces dispositifs.
Aujourd’hui, un an plus tard, ils sont de nouveau remis en cause dans le projet de loi de finances pour 2011 que nous examinons.
Désormais, la chose est convenue, à chaque loi de finances, hop ! un coup de rabot.
Il est temps que le Gouvernement comprenne que nous avons besoin de dispositifs stables et pérennes pour assurer notre développement. Qu’il pourfende les tricheurs et les profiteurs, c’est nécessaire, et même urgent. Mais, de grâce ! qu’il ne place pas les acteurs économiques des outre-mer dans une situation d’insécurité juridique et financière permanente.
Madame la ministre, les outre-mer, ce sont des territoires et des hommes, pas une variable d’ajustement des politiques budgétaires d’un État qui n’honore pas ses engagements.
L’année 2011, année des outre-mer, devrait être, à mon sens, l’année des retards rattrapés. Malheureusement, j’ai bien peur qu’elle ne soit que l’année des occasions perdues ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – MM. Adrien Giraud et Jean-Paul Virapoullé applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Soibahadine Ibrahim Ramadani.
M. Soibahadine Ibrahim Ramadani. Madame la ministre, je tiens à vous remercier chaleureusement d’avoir réservé à Mayotte votre premier déplacement outre-mer au lendemain de votre reconduction dans vos fonctions.
S’agissant du projet de budget 2011 de l’outre-mer, je note tout d’abord que c’est un budget contraint, qui participe à l’effort national de réduction des déficits publics voulu par le Président de la République.
Les crédits spécifiques de la mission « Outre-mer » obéissent aux mêmes règles d’évolution. Ils s’élèvent à 2,15 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 1,97 milliard d’euros en crédits de paiement, contre respectivement 2,6 milliards d’euros et 1,99 milliard d’euros en 2010.
Toutefois, les projections 2011-2013 des crédits de la mission indiquent une légère tendance à la hausse.
Au sein de ces crédits, la part de Mayotte progresse de 4,2 % en autorisations d’engagement, avec 607,48 millions d’euros en 2011, contre 582,75 millions d’euros en 2010, mais diminue en crédits de paiement, avec 574,64 millions d’euros en 2011, contre 576,10 millions d’euros en 2010.
Ce budget appelle quatre remarques.
Premièrement, 44 % des crédits sont consacrés à l’enseignement scolaire, avec une enveloppe de 252,43 millions d’euros en crédits de paiement ; cette mission est portée par deux mesures fortes.
Il s’agit, d’une part, du doublement des crédits affectés aux constructions scolaires du premier degré, soit 10 millions d’euros issus de la dotation scolaire et du fonds d’aide à l’équipement communal et visant à résorber le déficit antérieur en nombre de salles de classes et à absorber la poussée démographique. Cependant, cette enveloppe est insuffisante si l’on ajoute la nécessité de rénover les écoles en vue de leur rétrocession aux communes en 2013.
Il s’agit, d'autre part, d’un nouvel engagement de l’État, essentiel pour acter la poursuite du financement des constructions et rénovations des collèges et des lycées en vue d’accompagner les évolutions démographiques et de préparer les transferts de compétences.
Deuxièmement, il est à noter le maintien des dotations spécifiques des communes jusqu’en 2011 pour certaines et jusqu’en 2013 pour d’autres, afin de garantir leurs ressources et de préparer l’arrivée de la fiscalité locale de droit commun en 2014. Pour gagner du temps, je ne mentionnerai pas les montants des dotations prévues, tout le monde les connaît.
Je saisis cette occasion pour saluer l’envoi prochain à Mayotte d’une mission chargée d’examiner les difficultés financières de nos collectivités locales, ce qui rejoint le souhait exprimé lors de notre séminaire parlementaire du 26 novembre dernier.
Troisièmement, il faut souligner la montée en puissance des crédits du fonds de développement économique, social et culturel, doté, en 2011, de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2,6 millions d’euros en crédits de paiement, contre 600 000 euros en 2010. Vous le savez, 70 % des crédits du fonds seront affectés au secteur public, et 30 % au secteur privé. Précision importante, ces crédits seront disponibles dès l’installation du département.
En revanche, le montant du fonds exceptionnel d’investissement outre-mer chute de 40 millions en 2010 à 10 millions d’euros en 2011. Les crédits alloués à ce fonds viennent en complément de ceux qui sont déjà affectés au contrat de projet État-Mayotte 2008-2013, lesquels connaissent une hausse de 8,2 % en 2011. À ce propos, une question se pose : où en est la piste longue, après la mise en concession de l’aérogare, l’arrivée récente de la TNT, la télévision numérique terrestre, et prochainement du haut débit en 2011 ?
Madame la ministre, si les crédits inscrits dans ce fonds devaient se révéler insuffisants au regard des besoins nouveaux créés par la départementalisation, il sera toujours possible, je l’espère, d’abonder ces crédits puisque votre plan budgétaire court de 2011 à 2013 et que ce fonds s’étend sur trois ans.
Quatrièmement, la revalorisation de l’allocation des personnes âgées sans retraite interviendra avec effet rétroactif à compter du 1er avril 2010, sous réserve de la parution du décret correspondant, tandis que la revalorisation des allocations pour adultes handicapés et pour élèves handicapés interviendra, dans les mêmes conditions, à compter du 1er janvier 2010.
Je souhaite maintenant aborder rapidement un certain nombre d’autres points.
Comme vous le savez, madame la ministre, l’aquaculture est une filière prometteuse, qui concourt au développement endogène à Mayotte ; c’est pourquoi il est urgent de la soutenir grâce en particulier à une parution rapide du décret relatif à l’aide au fret, prévue par la LODEOM.
Par ailleurs, madame la ministre, pourriez-vous préciser l’état d’avancement du projet de création d’un établissement public foncier arrêté par le CIOM ?
En outre, je salue la création récente de l’Observatoire des mineurs isolés, à la suite des propositions de notre excellente collègue Isabelle Debré, en espérant que l’on pourra ainsi mieux encadrer ces enfants, notamment en matière d’obligation scolaire.
Après la mise en place de la carte vitale, ce qui bloque aujourd’hui c’est l’absence d’une CMU et d’une CMU complémentaire, indispensables, me semble-t-il, pour envisager une mise en vigueur éventuelle de l’aide médicale d’État, l’AME. Sur ces points, pourriez-vous, madame la ministre, nous indiquer les intentions du Gouvernement, dans la lignée de la mission qui séjournera à Mayotte du 6 au 10 décembre prochain ?
Enfin, il est encourageant de noter que le Sénat prolonge, jusqu’au 30 juin 2011, la défiscalisation des projets d’installation de panneaux photovoltaïques en outre-mer dont la puissance est inférieure à 20 kilovoltampères.
Madame la ministre, sous le bénéfice de ces quelques observations, je voterai bien sûr votre projet de budget pour 2011. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si je devais m’en tenir à un exercice de comparaison des crédits de la mission « Outre-mer » votée en 2010 et de ceux qui sont prévus pour 2011, je pourrais me contenter de dire que, dans le contexte budgétaire actuel, vous avez su, madame la ministre, obtenir un arbitrage assez favorable. En effet, votre budget ne baisse que de 2,3 % en crédits de paiement. Je mesure bien les difficultés que vous avez dû surmonter pour arriver à ce résultat.
Mais, vous le savez bien, ce n’est pas ce qu’attendent de moi ceux que je représente au sein de cette Haute Assemblée. Car, à l’évidence, ils souhaitent que je saisisse l’occasion qui m’est donnée d’appeler, une fois encore, l’attention du Gouvernement et du Sénat sur une situation qui, vous le savez aussi, est plus que préoccupante.
La Martinique, en effet, va très mal ! Elle s’enfonce dans une récession de plus en plus inquiétante, qui dépasse déjà les 7 %.
Pratiquement tous les secteurs d’activité sont touchés, avec évidemment pour conséquence une détérioration continue du marché de l’emploi. Le nombre de demandeurs d’emploi a ainsi progressé de 4,1 % en un an, portant le taux de chômage à plus de 25 % ! Un pourcentage qui, s’agissant des jeunes de moins de 25 ans, dépasse 61 % !
Parmi les secteurs les plus affectés se trouve celui du bâtiment et travaux publics, qui connaît cette année une nouvelle réduction de son chiffre d’affaires, après une baisse de 30 % en 2009, la baisse d’activité se faisant surtout ressentir dans le secteur du logement privé.
Le tourisme est aussi confronté à de très grandes difficultés. Il accuse une baisse de plus de 8 % du tourisme de séjour et de 20 % du tourisme de croisière.
Dans ces conditions, la situation sociale ne peut que continuer à se dégrader : un nombre croissant de Martiniquais subit les conséquences du chômage et de l’emploi précaire, le nombre d’allocataires du RMI est reparti à la hausse, un cinquième de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté et, enfin, la situation des retraités se détériore de plus en plus.
Les collectivités territoriales font évidemment le maximum pour jouer le rôle d’amortisseur social. Dans le même temps, elles s’efforcent de soutenir les secteurs économiques en crise, mais elles connaissent presque toutes de grandes difficultés financières. C’est notamment le cas, bien sûr, du département, qui doit faire face à une véritable explosion de la demande sociale alors même qu’il voit geler des dotations déjà insuffisantes et croître une dette de l’État qui atteint plus de 71 millions d’euros.
Aussi, on comprend le sentiment de déception qu’éprouvent les Martiniquais face à la présente loi de finances. Ils estiment, à bon droit, qu’en matière d’économies budgétaires les départements d’outre-mer ont, de façon anticipée, très largement apporté leur contribution.
En effet, la LODEOM, votée en mai 2009, comportait déjà des mesures de restriction en matière de défiscalisation et d’exonération de charges sociales pour les entreprises. Qui plus est, certains dispositifs importants de cette loi ne sont toujours pas applicables ou susceptibles d’être concrètement mis en œuvre, alors même qu’ils ont été présentés comme particulièrement prometteurs. C’est le cas des zones franches d’activité, de l’aide au fret, de l’aide à la rénovation hôtelière et, surtout, du nouvel outil de défiscalisation dans le logement social.
Les économies ainsi réalisées par l’État peuvent être évaluées à près de 900 millions d’euros. On aurait dû en tenir compte dans l’application de la politique actuelle de rigueur.
En effet, ces économies ont été opérées sur des dispositifs trouvant, pour la plupart, leur justification dans la nécessité d’apporter des réponses adaptées à un mal-développement structurel. C’est ce dernier que l’on s’empresse de perdre de vue dès qu’il s’agit de passer des grands effets d’annonce à l’action effective, tout comme on oublie alors les accents lyriques sur ce qu’apportent les outre-mer à la France et à l’Europe pour se livrer aux plus froids raisonnements comptables.
Et ce sont ces raisonnements comptables qui prévalent actuellement dans le cadre d’une politique marquée par une réduction de l’effort global pour l’outre-mer, de près de 1 % en autorisations d’engagement après une baisse de 4,2 % en 2010, et par des coups portés à la défiscalisation. Je regrette évidemment que le Gouvernement soit resté sourd aux propositions d’amendements tendant à sauver un secteur innovant comme celui du photovoltaïque.
Madame la ministre, vous l’avez compris, la déception que je suis obligé d’exprimer ne concerne pas essentiellement votre budget. Je tiens, malgré tout, à m’interroger sur le niveau des crédits inscrits sur la LBU. Je connais le discours sur leur sous-consommation. Je veux cependant attirer votre attention sur le fait que cette année, en Martinique, le CDH du 16 novembre a mis en évidence que 99 % des crédits de paiement délégués étaient déjà consommés et qu’il existait, compte tenu des programmes locatifs sociaux pouvant encore être lancés, un besoin complémentaire en autorisations d’engagement de 10,7 millions d’euros pour 2010.
En réalité, c’est donc l’ensemble de la politique actuellement menée qui s’avère particulièrement décevante face aux enjeux réels du développement des départements d’outre-mer. Elle l’est, évidemment, à la mesure des espoirs suscités par de trop fréquents et bruyants effets d’annonce.
Madame la ministre, ce qu’il faut, c’est une courageuse remise en cause de cette politique. Cela pourrait commencer par une réelle attention portée aux différents amendements qu’il nous a été possible de déposer aujourd’hui.
Ensuite par la mise en œuvre rapide, et sans inutile contrainte procédurale, de tous les dispositifs de la LODEOM et de toutes les mesures du Comité interministériel de l’outre-mer.
Enfin, par l’inscription de crédits supplémentaires, dans le cadre d’un collectif budgétaire, de façon à dynamiser la politique du logement social et à redonner aux collectivités territoriales asphyxiées les moyens de faire face à leurs responsabilités et à celles que l’État les incite à assumer à sa place.
En ce qui concerne la Martinique, vous le comprendrez, madame la ministre, j’ajoute, pour terminer, le souhait que, conformément aux engagements du Président de la République, la collectivité unique sur laquelle les électeurs ont été consultés il y a dix mois fasse l’objet d’un débat au Parlement le plus rapidement possible.
Dans une situation aussi alarmante que celle que connaît la Martinique, on comprendrait difficilement que l’on tarde trop à doter ses élus d’un instrument de nature à accroître l’efficacité des politiques locales de développement.
Un développement qu’il devient urgent de concevoir et de promouvoir à la hauteur de l’engagement des forces vives de la Martinique et des attentes d’une jeunesse impatiente de participer à la construction de son avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce n’est pas facile d’être ministre de l’outre-mer en période de crise. Ce n’est pas facile non plus de diriger ou d’appartenir à la majorité, à l’opposition, mais il faut prendre ses responsabilités ! Je vais, en quelques mots, vous dire ce que je pense.
Je considère que l’effort de l’État à l’égard de l’outre-mer n’a pas fait défaut et les chiffres que nos rapporteurs de la commission des finances ont signalés tant en crédits budgétaires qu’en effort sur la défiscalisation, qui représente pas moins de 3,4 milliards d’euros, montrent que la solidarité nationale continue à jouer en cette période difficile.
Mais connaissez-vous des régions où il n’y a pas de problème ? Connaissez-vous des régions où il n’y a pas de chômage ? même si la situation est plus grave chez nous. C’est la raison pour laquelle je pense qu’il faut poser le décor de notre action pour les mois à venir.
Madame la ministre, ce n’est pas tant au niveau des crédits que sur la mise en œuvre des politiques qu’il faut agir. Le CIOM de l’année dernière a fait naître une grande espérance outre-mer et lorsque nous circulons sur le terrain, nous constatons que tous les efforts faits – je prends l’exemple de la LODEOM – à travers l’amendement « bagasse » et celui sur l’impôt foncier, avec la réorientation des crédits budgétaires et la défiscalisation sur le logement social, ont suscité un grand espoir et sauvé des pans entiers de l’économie locale.
Mais – je le dis parce que je soutiens totalement la majorité, le Président de la République et le Gouvernement – je suis désolé de constater sur le terrain que les efforts que nous faisons ne sont pas bien ressentis par la population. La faute à qui ?
D’abord, les populations de métropole, d’Europe, du monde et des outre-mer sont inquiètes. Les crises se succèdent avec une fréquence rapprochée. C’est vrai ici, c’est vrai chez nous ! Mais, noyées dans l’océan, ces crises font plus mal en outre-mer. L’inquiétude y est plus grande et le vécu est donc ressenti différemment.
À cette condition réelle s’ajoute une seconde raison. Madame la ministre, si vous avez fait personnellement des efforts considérables pour mettre en œuvre la LODEOM, je sais, en tant que parlementaire de longue date, que le ministère de l’outre-mer n’est pas toujours soutenu par les autres ministères comme il devrait l’être !
M. Jean-Jacques Hyest. Effectivement !
M. Jean-Paul Virapoullé. C’est vrai, et je suis là pour le dire !
Il faut que le Gouvernement soit plus solidaire de notre ministre de l’outre-mer. Pourquoi attendre un an pour que les décrets d’application soient publiés ? Pourquoi prendre des circulaires ou des décrets qui ont retardé ou quelque peu dénaturé notre politique de logement social ? Pourquoi nous dire ici même qu’il fallait un groupement d’intérêt public pour l’ensemble de l’outre-mer et aujourd’hui s’apercevoir qu’il en faut un à La Réunion et un autre dans les Antilles !
M. Jean-Jacques Hyest. Ah, ça, on l’avait dit !
M. Jean-Paul Virapoullé. Effectivement, on l’avait dit en commission des lois ! C’est retarder la reprise en main des terres en indivis qui auraient permis au logement de se développer.
Je suis intimement convaincu qu’il faut commencer par procéder à un rééquilibrage entre la décentralisation et la déconcentration. Les préfets d’outre-mer n’ont pas assez de pouvoir.
Tout récemment encore, alors qu’il organisait une réunion de lutte contre l’illettrisme, le sous-préfet délégué à la cohésion sociale a invité le recteur. Ce dernier lui a répondu qu’il ne viendrait pas dans la mesure où il ne dépend pas du préfet. Le sous-préfet ne va tout de même pas envoyer les gendarmes chercher le recteur ! (Sourires.)
M. Christian Cointat. Il aurait dû ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Paul Virapoullé. Nous proposerons prochainement un amendement sur ce sujet.
Cet exemple est réel. Je ne raconte pas d’histoires. Je suis là pour vous dire comment les choses se passent et je suis totalement libre ! Je proposerai, bientôt, sous une forme à déterminer avec le président de la commission des lois, qu’outre-mer les recteurs dépendent des préfets. (M. Claude Lise rit.)
Au CIOM, nous avions décidé, compte tenu de la décentralisation, de renforcer le pouvoir des préfets. Cela n’a pas été fait !
Nous avions également prévu de rapidement mettre en place une politique de la pêche. Nous représentons, dans l’océan Indien, sept fois la Méditerranée. Si ce territoire était chinois ou japonais, il serait la première richesse de la Chine ou du Japon ! Mais nous, nous tournons le dos à la mer ! Cela ne peut pas continuer ainsi. Et je ne parle pas de la Polynésie dont la surface maritime équivaut à celle de l’Europe.
J’appelle aujourd’hui à faire acte de solidarité avec notre ministre et je demande l’organisation d’un deuxième CIOM. Pour cela, je souhaite m’adresser au chef de l’État, que nous soutenons et dans sa politique de gouvernance européenne et dans sa volonté de remettre de l’ordre dans le désordre monétaire, financier et économique international durant sa présidence du G20 : Monsieur le Président, puisque vous avez eu la volonté de faire un CIOM pour clarifier les relations entre la métropole et les outre-mer, faites un bilan d’évaluation au bout d’un an pour que nous puissions y voir clair. Nous verrons ainsi là où ça avance et là où ça bloque.
Aujourd’hui, je soutiens bien sûr le budget de l’outre-mer, qui, en cette période de crise, a été l’un de ceux qui a le moins diminué.
Madame la ministre, je m’adresse à vos collègues du Gouvernement : soyez solidaires de notre ministre de l’outre-mer ! Ne considérez pas son département ministériel comme un ministère de seconde zone ! Donnez-lui un coup de main pour que les décrets soient publiés dans les délais et que les politiques du logement, de la pêche, de la solidarité et de la lutte contre l’illettrisme se mettent en place ! Aidez-le pour que la politique de mise en œuvre des traités européens et de l’article 349 du traité de Lisbonne, qui prévoit des spécificités dans le domaine des échanges commerciaux internationaux et des accords de partenariat économique, ou APE, se mette enfin en place par un règlement, que nous aurons le temps d’élaborer ensemble, madame la ministre !
Je vous soutiens, madame la ministre, et voterai ce budget, tout en mettant des bémols là où il faut. Il est de la responsabilité gouvernementale et il revient au chef de l’État et à la majorité qui le soutient de faire collectivement un effort non pas au niveau budgétaire, mais au niveau de la conception – mieux vaut prévenir que guérir ! – et de la mise en œuvre, en fluidifiant et simplifiant les procédures et les textes afin que les dispositions adoptées par le Parlement ne soient pas dénaturées et que la population ait un ressenti à la hauteur de nos engagements. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme le rapporteur pour avis ainsi que MM. Denis Detcheverry et Adrien Giraud applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Madame la ministre, le projet de budget que vous nous soumettez aujourd’hui s’inscrit dans le contexte de crise internationale qui frappe durement l’ensemble de la France.
À cette même tribune, j’ai eu l’occasion d’affirmer que l’outre-mer était prêt à apporter sa contribution à l’effort de la nation. Mais je ne peux que regretter que la période critique que nous traversons conduise le Gouvernement à proposer un budget d’austérité, exigeant des territoires d’outre-mer qu’ils participent plus que tous les autres à la nécessaire maîtrise des déficits publics.
Une fois encore, cette démarche traduit une certaine vision souvent stigmatisante de l’outre-mer, et il est indéniable que votre projet de budget n’est pas à la hauteur des enjeux des populations ultramarines.
Le sujet d’inquiétude le plus important est sans nul doute l’assèchement, à hauteur de 330 millions d’euros environ, des investissements outre-mer, qui résulte du nouveau coup de rabot de 10 % des dépenses fiscales et de la suppression brutale de la défiscalisation dans le secteur du photovoltaïque.
Au surplus, il s’agit de la quatrième modification en deux ans du régime de défiscalisation, alors même que les investisseurs ont avant tout besoin de stabilité juridique et fiscale, comme le rappelait judicieusement, en 2006, M. Nicolas Sarkozy.
Au final, nous subissons un coup de rabot global, qui est en totale contradiction avec la LODEOM, puisque toutes les activités considérées comme « prioritaires », à savoir l’agroalimentaire, le tourisme ou encore les énergies renouvelables, sont touchées.
En outre, madame la ministre, votre projet de budget reflète une baisse sensible des crédits destinés aux outre-mer, qui est deux fois plus importante que pour les autres dépenses de l’État, lesquelles diminuent en pratique de 1,5 %, contre 2,3 % pour l’outre-mer.
Cette baisse affecte en particulier, comme on pouvait le craindre lors de la discussion de la LODEOM, les crédits de paiement en faveur du logement social, qui diminuent de 31 %, soit 34 millions d’euros.
Ce projet de budget consacre donc la LBU comme la nouvelle variable d’ajustement de la mission « Outre-mer », laissant craindre, à terme, le financement du logement social par la seule défiscalisation. Nous comptons sur votre vigilance, madame la ministre, pour réaffirmer la sanctuarisation de la LBU.
Dans ces conditions, votre objectif affiché de construire 5 700 logements semble irréaliste, poussant les socioprofessionnels à affirmer que ce sont moins de 5 000 logements sociaux qui seront mis en chantier outre-mer, alors que, pour la seule Guadeloupe, 20 000 dossiers sont en attente.
Madame la ministre, dans ce projet de budget, vous affichez également la volonté de donner la priorité à l’activité et à l’emploi. Je rejoins naturellement votre ambition, mais je regrette tout de même qu’elle ne trouve pas de traduction budgétaire convaincante ; en témoignent les crédits dédiés à la compensation des exonérations de charges sociales qui sont en baisse de 34 millions d’euros.
Je me réjouis également de la montée en puissance du plan « SMA 6000 », mais je déplore que l’annonce de ce plan censé doubler en trois ans la capacité de formation se traduise par une diminution de la durée de formation de chaque jeune.
Dans le même ordre d’idées, je ne puis que regretter que les crédits du dispositif passeport-mobilité formation professionnelle diminuent de près de 3 millions d’euros.
Tout cela, vous en conviendrez avec moi, madame la ministre, n’est pas de nature à dissiper les peurs de la jeunesse, une volonté pourtant affichée par le Premier ministre dans son récent discours de politique générale.
Je veux parler de cette jeunesse qui espère l’élaboration d’un véritable plan d’urgence pour l’emploi et la formation des jeunes, abondé notamment par la mobilisation d’une partie des indécents bénéfices réalisés par les compagnies pétrolières aux Antilles.
Sur tous ces points, madame la ministre, la jeunesse de l’outre-mer attend des réponses concrètes et des engagements tenus.
Des réponses concrètes, c’est également ce qu’attendent les collectivités d’outre-mer. Or, sur ce point, à l’instar des crédits consacrés à l’investissement des collectivités locales, qui diminuent de 20 millions d’euros pour les contrats de plan État-région, les actions du Gouvernement sont en net recul.
J’en veux pour preuve les 3,3 millions d’euros prévus, comme en 2010, pour le plan Séisme aux Antilles, mais qui sont largement en dessous des besoins de reconstruction, s’agissant notamment d’établissements scolaires.
J’en veux également pour preuve les 93 millions d’euros qui restent, depuis 2004, à la charge du conseil général de la Guadeloupe, du fait de l’insuffisante compensation des dépenses de RMI, ce qui m’amène à vous interroger sur la révision des bases du calcul des dotations affectées dans la perspective de l’entrée en vigueur du RSA en janvier prochain.
J’en veux, enfin, pour preuve la diminution de 30 millions d’euros du Fonds exceptionnel d’investissement, dont 3 millions d’euros seulement seront consacrés, au titre des crédits de paiement, à de nouveaux chantiers.
Avant de conclure, je souhaite attirer tout particulièrement votre attention, madame la ministre, sur deux sujets brûlants d’actualité.
Le premier, ce sont les projets susceptibles de relancer la commande publique, des projets tant demandés en Guadeloupe, mais qui ne démarrent pas, faute de mobilisation des crédits de l’État. Je veux parler de la reconstruction du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre–Abymes et de la construction des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes prévus au PRIAC, le programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie.
Je sollicite, en conséquence, madame la ministre, une prompte intervention de votre part auprès du ministère des affaires sociales pour faire en sorte que ces crédits soient débloqués dans des délais très brefs.
Le second sujet d’importance concerne le projet de décret prévoyant d’imposer au conseil général de réguler la délivrance des licences de débit de tabac en les limitant à 550 au maximum pour la Guadeloupe.
Une telle mesure induirait des conséquences dramatiques pour ce secteur d’activité en termes d’emplois et ne serait pas non plus sans incidence sur le fonctionnement des services de la collectivité.
Nous voulons améliorer la santé publique et sommes disposés à soutenir Mme Payet en ce sens. Mais, dans l’attente d’une étude de fond, afin de mieux cerner les enjeux de la filière, nous vous demandons, madame la ministre, de surseoir aujourd'hui à l’application de ce décret.
Vous l’aurez, je l’espère, compris, madame la ministre, face à tous ces enjeux, nous n’attendons pas simplement que vous nous écoutiez ; nous attendons des réponses aux préoccupations concrètes de la population de la Guadeloupe et que vous teniez vos engagements.
À défaut, notre sens des responsabilités, plus fort que la sincère considération que nous vous portons, nous obligera à voter contre un tel budget d’austérité, déconnecté des enjeux de notre territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Patrice Gélard applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.)
PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Tasca
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la suite de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », nous en sommes parvenus à la réponse de Mme la ministre.
Vous avez la parole, madame la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la présentation du budget de la mission « Outre-mer » au titre du projet de loi de finances pour 2011 est, pour moi, un moment particulier et un moment de vérité. Il me donne, en effet, l’opportunité de mettre en avant les grandes orientations de l’action de l’État outre-mer.
Je remercie le président de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest, ainsi que son rapporteur, M. Christian Cointat, pour leur accueil le 17 novembre dernier à l’occasion de mon audition devant cette commission.
J’ai déjà eu l’occasion d’échanger aussi avec plusieurs d’entre vous sur les voies et moyens d’optimiser l’action de l’État outre-mer. Je pense en particulier aux différents rapporteurs : M. Éric Doligé pour la commission des finances, M. Claude Lise pour la commission de l’économie et Mme Anne-Marie Payet pour la commission des affaires sociales.
Je vais maintenant essayer de répondre aux interrogations que vous avez formulées sur les différents aspects du budget de la mission « Outre-mer ».
Si le budget de cette mission s’inscrit dans l’effort national de maîtrise de la dépense publique, y compris dans son volet relatif à la dépense fiscale, cette contribution à l’effort national est aujourd'hui juste et bien proportionnée. À ce titre, je remercie MM. Magras et Virapoullé pour leurs propos.
M. Michel Magras a abordé la question de la participation de l’outre-mer à l’effort national. Les territoires ultramarins ne doivent pas, dans le cadre de leur appartenance à la République, être un jour tenus pour responsables en partie de la dette publique. Au contraire, puisque cette baisse n’est que provisoire, nous devons être fiers d’avoir participé à cet effort qui reste dans des proportions mesurées.
Le budget de la mission s’établit à 2,156 milliards d'euros en autorisations d’engagement, soit une légère diminution de 0,55 %, et à 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement, soit une baisse de 2,3 %.
Certains parlementaires ultramarins ont, en première analyse, exprimé des craintes sur cette légère baisse annoncée. À cet égard, je voudrais préciser deux choses.
D’une part, ce budget permet de respecter en 2011 les engagements pris pour l’application de la loi pour le développement économique des outre-mer, dite LODEOM, et du conseil interministériel de l’outre-mer, le CIOM.
D’autre part, cette baisse n’est que provisoire, puisque, dans le cadre du budget triennal 2011-2013, les autorisations d’engagement vont de nouveau augmenter de 2 % et les crédits de paiement de 6,7 %, pour s’établir, dès 2012, à un niveau supérieur aux montants de la loi de finances pour 2010.
J’ai aussi entendu certaines réserves sur la mise en application de la LODEOM et des mesures du CIOM ; je voudrais y répondre très vite.
Les vingt-quatre décrets d’application ont été pris dans l’année qui a suivi l’adoption de la loi, ce qui est tout à fait conforme aux délais habituellement observés.
L’entrée en vigueur de plusieurs de ces décrets a eu des effets notables et immédiats. Je pense notamment à la « prime bagasse », qui a donné un nouveau souffle à la filière canne à sucre, notamment à La Réunion, où l’on estime à 17 % l’augmentation du revenu des planteurs à la suite à la mise en œuvre de cette mesure.
M. Jean-Paul Virapoullé. Absolument !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Je pense à la création des zones franches globales d’activités, qui permet, pour les entreprises éligibles, un abattement de 80 % de l’impôt sur les sociétés, un abattement de 80 % des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, voire 100 % sur la contribution économique territoriale. Ce n’est pas négligeable dans le contexte actuel.
On parle beaucoup des corrections apportées par la LODEOM en faisant croire, à partir d’un chiffrage des plus aléatoires, que ce sont des moyens en moins pour l’outre-mer, alors qu’en réalité il s’agissait de corriger les effets d’aubaine créés par les anciennes lois de défiscalisation. Monsieur Serge Larcher, le Président de la République avait annoncé avant son élection qu’il fallait corriger ces effets d’aubaine.
Il faut aussi parler des nouvelles mesures supplémentaires décidées pour l’outre-mer. On les oublie trop.
Je pense, d’abord, au Fonds exceptionnel d’investissement, qui a permis de lancer des opérations d’infrastructures pour un montant de 200 millions d'euros entre 2005 et 2010.
Je pense, ensuite, au fonds de garantie pour l’agriculture et la pêche, soit 20 millions d'euros sur la période 2010-2012.
Je pense, en outre, à la bonification des prêts accordés par l’Agence française de développement, l’AFD, – 30 millions d'euros – au profit du développement et de l’innovation des petites et moyennes entreprises.
Je pense, enfin, à la dotation exceptionnelle pour l’équipement de Mayotte en constructions scolaires, qui permet de passer de 5 millions d’euros à 10 millions d’euros au total.
Monsieur Georges Patient, il ne faut oublier que la Guyane reçoit pour la première fois une dotation de 10 millions d’euros, le Gouvernement ayant tenu compte de la poussée démographique observée dans ce territoire.
Dans le contexte économique et social que nous connaissons, toutes ces interventions de l’État sont, je le crois, indispensables.
C’est un discours de vérité. Nous avons toujours tenu un discours de vérité et nous continuerons de le faire. Même si ce n’est pas facile, il faut poursuivre cette démarche. Le courage politique est la marque de ce gouvernement. Il est important, en effet, d’établir des relations de sincérité avec la population, en particulier les populations d’outre-mer, car c’est un gage de confiance pour construire l’avenir ensemble.
Je vous confirme aussi que les deux décrets sur la continuité territoriale qui étaient prêts depuis le mois d’avril 2010, mais en attente d’un approuvé communautaire, ont été publiés le 19 novembre dernier.
Le décret sur l’aide au fret, qui est attendu par les opérateurs économiques depuis plusieurs mois, avait été signé par moi-même et devait être publié dans quelques jours. Malheureusement ou heureusement, le remaniement gouvernemental nous a conduits à relancer cette procédure du contreseing. Le décret devrait donc être publié dans les semaines à venir.
Monsieur Laufoaulu, s’agissant de la continuité territoriale, ce décret s’appliquera bien sûr aussi à Wallis et Futuna.
Il restera à prendre le décret de création du groupement d’intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété. Par souci d’efficacité, j’ai souhaité que ce nouvel outil soit le plus adapté possible. C’est pourquoi j’ai demandé à M. André Valat, ancien fondateur et président du groupement d’intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse, le Girtec, de réaliser une mission de préfiguration.
Pour ce qui est de la mise en œuvre des décisions prises lors du conseil interministériel de l’outre-mer, je vous confirme que les trois quarts des cent trente-sept mesures sont réalisées ou très avancées. Un document élaboré par mon ministère a d’ailleurs été adressé à l’ensemble des parlementaires cet été pour faire le point sur l’état d’avancement des décisions qui ont été prises lors dudit conseil.
Le 3 novembre dernier, le Gouvernement a fait adopter par amendement à l’Assemblée nationale une mesure très importante qui permettra à l’État de céder gratuitement ses terrains non bâtis afin de pouvoir construire des logements sociaux. Cette disposition est très attendue des bailleurs sociaux de tous les outre-mer. Sans attendre l’examen de cet article 77 bis, je voudrais apporter quelques précisions sur ce dispositif qui a pu susciter des interrogations de votre part.
Il reprend la logique d’un mécanisme de droit commun qui est inscrit dans le code général de la propriété des personnes publiques et qui permet une décote partielle de la valeur vénale des terrains de l’État lorsqu’ils sont cédés pour réaliser des opérations d’intérêt général, comme la construction de logements sociaux.
Le Gouvernement a souhaité aller plus loin dans un double objectif : d’abord libérer du foncier pour le logement social, mais aussi agir sur les coûts de production. C’est pourquoi il a choisi une cession gratuite, qui permet de répercuter intégralement cette dernière sur le coût des opérations de logement social.
Au surplus, le Gouvernement souhaite faciliter la cession des terrains chaque fois qu’elle correspond à un projet social. Les garanties ont d’ailleurs été renforcées par l’Assemblée nationale en définissant un montant minimal de logements sociaux dans le programme de construction.
Ce seuil de 30 %, proposé par l’Assemblée nationale, est d’autant plus pertinent qu’il existe déjà : il est prévu à l’article 199 undecies C du code général des impôts qui régit la défiscalisation du logement social.
Vous vous êtes également interrogés sur les bénéficiaires potentiels de ce mécanisme. Le champ des bénéficiaires n’est effectivement pas circonscrit par l’article 77 bis, mais il l’est par la destination du foncier appelé à être cédé.
En effet, l’acquéreur s’engage dans un délai très contraint à employer le foncier pour y réaliser des logements sociaux et, éventuellement, des équipements collectifs. De la sorte, les collectivités, les établissements publics fonciers et les bailleurs sociaux sont les bénéficiaires du dispositif.
Qu’il s’agisse de la LODEOM ou du CIOM, le projet de loi de finances pour 2011 traduit sans ambiguïté tous les engagements concernant ces deux dispositifs majeurs sur le plan budgétaire. Il n’existe donc aucune raison objective de tenir un discours anxiogène
Ce n’est pas bon pour l’économie ultramarine. Ce n’est pas bon pour l’image de nos territoires. Cela porte atteinte à la crédibilité de la parole de l’outre-mer. Enfin, nous risquons, avec le temps, de faire le lit de tous ceux qui veulent démontrer qu’il n’y a pas de solution avec le système actuel et que seule la voie qu’ils proposent est la bonne.
C’est pourquoi, si je peux comprendre les divergences d’analyse en fonction des sensibilités politiques, je crois que l’on doit essayer de tenir un discours mesuré, sans passion et responsable. La raison doit toujours l’emporter, si nous voulons rétablir la confiance indispensable à la reprise des activités économiques. Tous ceux qui portent un intérêt à l’outre-mer auront à cœur, me semble-t-il, de partager avec moi cette réflexion.
Mesdames, messieurs les sénateurs, malgré une légère baisse des crédits, ce budget pour 2011 permettra à l’outre-mer, je le redis, de conserver ses capacités d’intervention, en particulier pour ce qui concerne les deux priorités que sont le logement et l’emploi.
L’engagement du Gouvernement en faveur du logement en outre-mer, en particulier du logement social, a toujours constitué une priorité depuis 2007.
Lors du conseil interministériel de l’outre-mer, le Gouvernement a décidé d’intégrer dans la ligne budgétaire unique les crédits exceptionnels du plan de relance et de maintenir à ce niveau la LBU dans le cadre de la programmation triennale des lois de finances.
Cet engagement est tenu, comme vous pouvez le constater à la lecture des documents budgétaires. Malgré un contexte budgétaire difficile, les autorisations d’engagement de la ligne budgétaire unique sont sanctuarisées de 2011 à 2013 à hauteur de 274,5 millions d’euros. La LBU demeure, et demeurera, sans conteste le socle du financement du logement social outre-mer.
Certains ont pu s’interroger sur l’évolution des crédits de paiement entre 2010 et 2011. Je le répète : le montant inscrit au budget correspond au rythme d’exécution des opérations en cours, et non au rythme d’engagement des opérations. Il est d’ailleurs totalement en phase avec l’exécution budgétaire de l’année 2009, au terme de laquelle, je le rappelle, aucune dette n’a été constituée auprès des bénéficiaires des subventions de la ligne budgétaire unique.
S’agissant de la défiscalisation du logement social – je m’attarderai quelque peu sur ce point, qui suscite de nombreuses interrogations –, ce dispositif, vous le savez, est récent.
À ce jour, sur 64 dossiers déposés à l’agrément au niveau central en 2009 et 2010 – qui représentent près de 5 500 logements sociaux –, 20 ont déjà fait l’objet d’un accord de principe, soit 1 629 logements. Bien évidemment, je ne me satisfais pas de ce résultat, car je sais que les besoins sont importants. Ainsi, 4 000 logements sont en attente d’un agrément, lequel devra être donné le plus rapidement possible pour permettre de répondre aux besoins considérables dans ce domaine.
Pour vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs, je peux vous dire que, lors de la réunion que j’ai récemment présidée sur ce thème, nous avons convenu avec les représentants des bailleurs sociaux de critères de traitement prioritaire, au premier rang desquels figurent, pour les départements d’outre-mer, Mayotte et Saint-Martin, les opérations déjà financées au titre de la ligne budgétaire unique.
Au passage, vous observerez que ce critère de priorité, que j’ai proposé, démontre pleinement qu’une opération peut cumuler les bénéfices de la LBU et de la défiscalisation.
Je le dis avec beaucoup de solennité, me faisant l’écho des propos qui ont été tenus ici même sur la LODEOM : le cumul d’une aide budgétaire et d’une défiscalisation n’est en aucun cas interdit ; ce serait contraire à la loi. Il n’est pas non plus systématique ; ce serait également contraire à la loi et à l’esprit de la loi.
Je le reconnais, des interprétations erronées de l’instruction du 1er juin 2010 sur les opérations de construction de logement social ont pu être faites ici ou là. Parce que cela ne correspondait nullement à ma philosophie, j’ai pris l’engagement auprès des bailleurs sociaux de compléter cette instruction pour en faire disparaître toute ambiguïté et rappeler que, en termes de procédures, c’est la décision d’attribution de la LBU qui doit d’abord intervenir.
Je continuerai également à veiller à ce que la défiscalisation, notamment lorsqu’il y a cumul avec la ligne budgétaire unique, ne favorise pas l’inflation des coûts de production. Je le rappelle, la philosophie de la défiscalisation du logement social, l’esprit de la LODEOM, c’est d’augmenter la production de logements sociaux pour répondre aux besoins de nos compatriotes ultramarins. Ce n’est pas nourrir une inflation des coûts – nous avons tous le devoir d’être vigilants sur ce point – et c’est pour cette raison qu’il est nécessaire de définir les conditions pratiques du cumul des financements.
Je le sais, ce sont notamment les opérations en VEFA – vente en l’état futur d’achèvement –, montées de manière exceptionnelle pour faire face à la crise, qui ont des coûts plus élevés, mais cela ne peut être que conjoncturel. Le cumul des aides doit donc être réservé aux opérations qui justifient des surcoûts objectifs – je pense notamment à des fondations spéciales ou à un coût du foncier élevé – ou qui sont conçues pour proposer des loyers inférieurs aux loyers plafonds.
J’ai entendu les critiques sur la complexité des procédures de défiscalisation et j’y ai consacré une longue réunion de travail, le 12 novembre dernier, avec les représentants des bailleurs sociaux d’outre-mer. De manière très approfondie, très pragmatiques, nous avons collectivement porté un diagnostic sur les points de blocage. J’ai formulé des propositions et je peux vous indiquer les orientations qui ont été retenues par le Gouvernement.
Pour ce qui concerne mes services, j’ai donné instruction qu’ils donnent un avis dans le mois suivant la réception du dossier, faute de quoi l’avis sera considéré comme favorable. Afin de clarifier les règles du jeu, mes services compléteront l’instruction du 1er juin 2010. Mon collègue chargé du budget et moi-même avons décidé d’établir un dossier type pour les demandes de défiscalisation. Celui-ci devra bien évidemment être le plus proche possible de celui qui est exigé pour les demandes de subvention au titre de la LBU.
J’ajoute que nous allons également relever le seuil de déconcentration des décisions, fixé actuellement à 10 millions d’euros, ce qui répond, me semble-t-il, à la demande de Mme Anne-Marie Payet, formulée au nom de la commission des affaires sociales.
L’expérience a montré que les procédures intervenant au plan local s’articulent beaucoup plus facilement entre elles et le délai moyen d’instruction y est deux fois plus court que pour l’agrément national.
Toutes ces mesures, et en particulier les agréments pour les dossiers prioritaires, dont la liste m’a été communiquée par les bailleurs sociaux sur la base des critères que nous avons définis ensemble, seront prises – je m’y engage – avant la fin de cette année.
Vous le voyez, depuis plus de trois ans, la détermination du Gouvernement en matière de logement outre-mer demeure intacte, comme en témoigne d’ailleurs le budget que vous examinez aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs.
De retour d’un déplacement à La Réunion, je peux, à titre d’exemple, vous faire le point sur la situation actuelle de ce territoire. L’année dernière, nous y avions financé 2 300 logements. Cette année, nous en financerons 3 600 et nous mettons en chantier 4 300 logements. Je réfléchis d’ailleurs à l’élaboration d’un tableau de bord de suivi, pour permettre à chaque territoire d’apprécier l’évolution des opérations,…
M. Jean-Paul Virapoullé. Très bien !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. … en distinguant celles qui sont financées par l’État, celles qui font l’objet d’un engagement, celles dont le chantier a débuté et celles qui sont réalisées. Ainsi, toute la transparence sera faite et il n’y aura plus d’ambiguïté concernant les chiffres.
M. Jean-Paul Virapoullé. Bravo !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. L’autre priorité de ce budget, cela ne vous surprendra pas, mesdames, messieurs les sénateurs, concerne l’emploi et la formation.
L’augmentation des crédits du programme Emploi outre-mer trouve sa principale explication dans l’accroissement capacitaire du service militaire adapté, le SMA. Le doublement à terme du nombre de stagiaires permettra d’accueillir, dès 2011, 1 000 volontaires de plus, conformément aux engagements pris par le Président de la République en février 2009.
Les crédits supplémentaires alloués au SMA serviront à réhabiliter des infrastructures, à construire des bâtiments et bien sûr à améliorer l’encadrement dont bénéficient ces jeunes.
Je veillerai à ce que le haut niveau d’insertion – je sais que vous y êtes particulièrement attachés – et d’excellence de la formation dispensée par le SMA soit maintenu, notamment grâce à des partenariats avec les acteurs de la formation professionnelle, de la remise à niveau scolaire, ainsi qu’avec les fédérations professionnelles implantées dans les territoires.
En matière de formation professionnelle, je voudrais que nous ayons tous bien à l’esprit le rôle important que joue l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, LADOM.
C’est notamment le cas pour la mise en œuvre de la politique de formation qualifiante en mobilité au profit des jeunes ultramarins. Le passeport-mobilité « formation-insertion professionnelle » prévoit, ainsi, une formation pouvant aller jusqu’à vingt-quatre mois hors du territoire d’origine dès lors que la formation n’est pas dispensée sur place.
Ainsi, en octobre 2010, l’Agence avait déjà pris en charge plus de 7 000 jeunes. Ce chiffre est éloquent, d’autant plus que la qualité est au rendez-vous, puisque ce sont en moyenne sept jeunes sur dix qui obtiennent un diplôme en fin de parcours. Plus remarquable encore dans le contexte ultramarin, près d’un jeune sur deux – 47 %, d’après LADOM – ayant validé sa formation trouve un emploi dans l’année qui suit.
J’ai demandé à LADOM de mobiliser, en 2011, toutes ses marges de manœuvre pour faire mieux encore.
Je voudrais aussi évoquer les jeunes actifs ultramarins qui, je le sais, rencontrent des difficultés pour trouver un emploi durable. Ils pourront bénéficier du revenu de solidarité active. Vous le savez, la loi généralisant le RSA avait fait l’objet, lors de son adoption, d’un large consensus. Pour l’outre-mer, nous avions décidé, en lien avec les collectivités et en raison de la crise de février 2009, de mettre en place un dispositif adapté, à savoir le revenu supplémentaire temporaire d’activité, le RSTA.
Concernant le RSA, je peux vous l’assurer, nous serons prêts, au 1er janvier prochain, à ouvrir cette nouvelle allocation et à gérer la transition du RSTA au RSA pour les bénéficiaires qui en feront la demande. La dotation, monsieur Gillot, sera calculée selon les critères définis pour les départements métropolitains.
S’agissant de la continuité territoriale, dans l’attente des GIP, je souhaite préciser que les moyens de LADOM ont été renforcés pour gérer le dispositif.
Ainsi, l’Agence a été exceptionnellement autorisée à recruter 30 équivalents temps plein supplémentaires, pour assurer les fonctions de guichet, d’instruction et de contrôle. Les moyens humains et financiers seront donc bel et bien là en 2011, comme j’ai pu le vérifier moi-même les 19 et 20 novembre dernier, à l’occasion de l’inauguration de nouvelles antennes de LADOM, respectivement à la Martinique et en Guadeloupe, ainsi qu’en visitant, hier, l’agence de La Réunion.
Je voudrais aussi indiquer que 45,3 millions d’euros sont prévus pour ce dispositif chaque année pendant trois ans. Certes, de nouveaux critères d’allocation de cette aide ont été fixés par la LODEOM ; certes, nos compatriotes d’outre-mer dont les ressources sont les plus faibles sont prioritairement ciblés ; certes, la mise en œuvre de la continuité territoriale pour l’ensemble des départements et collectivités d’outre-mer doit être, je persiste à le dire, plus équitable. J’ai d’ailleurs prévu de mener une évaluation de son fonctionnement au cours de l’été 2011. Si nécessaire, je proposerai des mesures de correction, en particulier pour les territoires du Pacifique.
Je souhaite maintenant ajouter quelques mots sur un dispositif qui joue un rôle clé en matière de création d’emplois dans les entreprises ultramarines, par le renforcement de leur compétitivité.
Il s’agit des crédits du programme 138, qui sont consacrés à la compensation des exonérations de charges sociales. La réduction du coût du travail outre-mer est inscrite dans une politique désormais ancienne de compensation des handicaps structurels.
J’ai eu l’occasion l’année dernière de vous indiquer, mesdames, messieurs les sénateurs, que la LODEOM a amélioré l’efficacité de ce dispositif, en le recentrant, par un mécanisme de dégressivité renforcée pour les bas salaires, sur les petites entreprises de moins de onze salariés et sur les entreprises des secteurs d’activité jugés prioritaires.
Sachez que, pour 2011, le montant inscrit en loi de finances permettra de couvrir les besoins estimés par les organismes de sécurité sociale, sans, et j’insiste sur ce point, créer de nouveaux impayés.
Ce montant de 1,087 milliard d’euros a été retenu au lieu de la somme de 1,150 milliard d’euros demandée par les organismes de sécurité sociale. Je voudrais répondre sur ce point aux deux rapporteurs spéciaux de la commission des finances, et leur dire qu’il n’y a pas de sous-estimation de la part du Gouvernement.
Les organismes de sécurité sociale n’ont, en effet, pas souhaité intégrer dans leurs prévisions l’impact de la réforme des exonérations de charges sociales, estimé à 63 millions d’euros sur l’année 2011.
Il faut pouvoir tirer toutes les conséquences de la LODEOM à l’occasion de l’élaboration du budget de 2011 et c’est ce qui explique nos divergences d’analyses.
Vous m’avez interrogée à plusieurs reprises, mesdames, messieurs les sénateurs, sur la politique de santé menée en outre-mer. C’est d’ailleurs un sujet qui entrait dans le cadre de la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer.
Pour conduire cette politique de santé, nous avons, en complément des dispositifs nationaux, deux guides : les conclusions du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009 et le plan santé outre-mer, plus centré sur l’offre de soins.
S’agissant de ce dernier, de nombreuses actions ont déjà été engagées.
Je pense, par exemple, aux mesures concernant les créances irrécouvrables ou encore la révision engagée des coefficients géographiques, qui permettent de prendre en considération les surcoûts spécifiques aux départements d’outre-mer.
Je pense également au plan Hôpital 2012, dont un volet significatif concerne ces départements, notamment sous l’angle de la mise aux normes parasismiques. Je rencontrerai prochainement mes collègues Xavier Bertrand et Nora Berra à ce sujet.
Concernant les mesures fixées dans le cadre du conseil interministériel de l’outre-mer, je ne reviendrai pas sur le développement des filières hospitalo-universitaires dans l’océan Indien et dans les départements français d’Amérique.
Mais je voudrais insister, en cette journée mondiale de lutte contre le sida, sur le plan national de lutte contre le VIH/sida et les infections sexuellement transmissibles pour la période couvrant les années 2010 à 2014, qui comporte, en son sein, un plan complémentaire et adapté pour les populations d’outre-mer.
Il reprend ainsi l’orientation forte du conseil interministériel de l’outre-mer : l’adaptation de nos outils nationaux aux contextes d’outre-mer. C’est pourquoi des campagnes de prévention et d’information seront désormais adaptées.
De même, le plan comporte des mesures ambitieuses pour que le dépistage du virus de l’immunodéficience humaine, ou VIH, soit plus systématiquement proposé aux populations d’outre-mer – cela correspond à une demande forte, en particulier en Guyane – et qu’il se fasse plus tôt, c’est-à-dire avant que la maladie soit déclarée. L’autorisation, récemment donnée, de réaliser des tests de dépistage rapides va également dans ce sens.
En conclusion, le ministère de l’outre-mer, même s’il n’est pas pilote dans ce domaine – qui relève bien évidemment du ministère de la santé –, soutient aussi des initiatives, le plus souvent associatives, dans le domaine de la santé. Nous apportons ainsi un concours financier significatif au Drépaction, de même que nous soutenons des associations de prévention en matière de VIH/sida.
J’en viens maintenant à un autre volet qu’il me paraît important d’évoquer devant vous : le développement économique et social des outre-mer.
Celui-ci dépend bien évidemment de l’action des collectivités territoriales dont les investissements, je le rappelle, représentent entre deux tiers et trois quarts de la commande publique locale. Ce sont les collectivités territoriales qui, le plus souvent, sont maîtres d’ouvrage des opérations de construction.
Dans cette période de crise économique mondiale, que nous avons connue à la fin de l’année 2008 et durant l’année 2009 et qui, malheureusement, a été aggravée par la crise sociale de 2009 pour les Antilles, la Guyane et La Réunion, il est important, et l’État en a bien conscience, de pouvoir relancer l’économie par la commande publique.
C’est pourquoi l’État continuera, en 2011, à apporter son soutien à travers sa politique contractuelle.
À ce titre, puisque l’on parle beaucoup des crédits de paiement, je voudrais souligner que le volume des crédits prévus pour le financement des contrats de projet et de développement des territoires est en augmentation de 15 millions d’euros par rapport à l’année 2010.
Je rappelle, à cette occasion, l’engagement qui a été pris par le Premier ministre de maintenir au niveau du contrat actuel en Nouvelle-Calédonie l’engagement financier de l’État, hors opérateurs, à hauteur de 370 millions d’euros pour le futur contrat de développement 2011-2015.
Enfin, l’effort financier de l’État en matière de politique contractuelle permettra aussi de garantir une enveloppe pour le futur contrat de développement de Saint-Martin, qui couvrira les années 2011 à 2013, et pour le renouvellement de celui des îles Wallis et Futuna, sans compter, monsieur Denis Detcheverry, l’effort toujours constant consenti en faveur de Saint-Pierre-et-Miquelon.
À cet égard, je voudrais vous indiquer que les dispositifs d’aide aux familles pour couvrir le coût des adaptateurs nécessaires à la réception de la télévision numérique terrestre sont aussi applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon et que, s’agissant du projet de décryptage, je suis en liaison avec le ministère de la culture pour rechercher une solution la moins pénalisante pour les habitants de l’archipel.
Je voudrais dire quelques mots, si vous m’y autorisez, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI.
J’ai bien noté que le montant d’autorisations d’engagement prévu en 2011 est source de perplexité pour certains d’entre vous.
Je crois pourtant qu’aujourd’hui il est de bonne politique de faire d’abord face à certaines échéances. Avant de contracter de nouvelles opérations, il faut réaliser celles qui ont été financées, notamment au titre du FEI. Celui-ci a été doté de 10 millions d’euros d’autorisations d’engagement, mais, sur les années antérieures, ce sont plus de 200 millions d’euros qui ont été mobilisés. À cette date, les opérations sont certes engagées, mais elles sont loin d’être réalisées.
Mme la présidente. Il faudrait conclure, madame la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. De façon plus spécifique, je voudrais mentionner des mesures relatives à certains territoires, en particulier celles qui répondent à des besoins d’accompagnement. Je pense notamment à la dotation globale de développement économique, la DGDE, dont nous aurons l’occasion de reparler lors de l’examen de certains amendements.
Pour conclure mon intervention, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous indiquer que, si les crédits de la mission « Outre-mer » représentent seulement 15 % de l’effort budgétaire en faveur de l’outre-mer, c’est parce que mon ministère n’a pas vocation à devenir le gestionnaire unique des crédits en faveur de ces territoires.
Pour autant, nous devons prendre garde à l’idée selon laquelle nous pourrions traiter les questions relatives à l’outre-mer sans le ministère chargé de l’outre-mer. En effet, compte tenu des évolutions institutionnelles, nous aurons besoin, demain, d’apporter des réponses spécifiques, territoire par territoire, et seul le ministre chargé de l’outre-mer pourra les porter ou les initier dans le cadre de la mise en place des politiques nationales.
Mon rôle est aujourd’hui d’y veiller. Il sera largement renforcé demain, avec le changement de statut prochainement prévu, notamment pour la Martinique et la Guyane. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.)
Modification du calendrier budgétaire
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite faire le point sur le déroulement de notre discussion budgétaire.
Je vous prends à témoin que nous dérapons par rapport au programme. Même les ministres peuvent aller au-delà du temps imparti...
C’est ainsi que nous avons déjà reporté la fin de la discussion de l’article 99 de la mission « Ville et logement », à samedi après-midi, et l’examen de la mission « Politique des territoires ». En outre, compte tenu des 26 amendements qui restent en discussion sur les crédits de la mission « Outre-mer », je suis d’ores et déjà obligé de considérer que les crédits de la mission « Santé », de la mission « Engagements financiers de l’État » et du compte spécial participations financières de l’État, ainsi que de la mission « Provisions », programmées aujourd’hui, seront examinés samedi en fin d’après-midi et, sans doute, samedi soir.
Les prochains décalages seront reportés à dimanche matin, étant entendu que nous avons également un menu particulièrement copieux d’articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances, qui nous oblige à programmer leur examen en séance dimanche après-midi et dimanche soir.
Aussi, je me permets de lancer un appel à la concision dans la présentation des amendements, dans leur discussion et, si possible, dans les explications de vote.
Je vous remercie, mes chers collègues, de votre compréhension et vous prie de me pardonner pour ces précisions. Mais j’ai jugé bon de les apporter afin d’informer ceux de nos collègues qui avaient prévu de siéger en fin de journée sur les missions que je viens de déclarer reportées.
Mme la présidente. Acte vous est donné, monsieur le président Arthuis, de cette modification de l’ordre du jour, qui sera reprise par la conférence des présidents.
Outre-mer (suite)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Outre-mer |
2 155 221 275 |
1 976 569 978 |
Emploi outre-mer |
1 350 829 233 |
1 330 524 697 |
Dont titre 2 |
110 371 766 |
110 371 766 |
Conditions de vie outre-mer |
804 392 042 |
646 045 281 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-250, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
330 000 000 |
330 000 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
330 000 000 |
330 000 000 |
0 |
|
TOTAL |
330 000 000 |
330 000 000 |
330 000 000 |
330 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Cet amendement a pour objet de réinjecter outre-mer les économies réalisées grâce à la nouvelle réforme de la défiscalisation des investissements productifs outre-mer – économie fiscale évaluée à 100 millions d’euros – et à la suppression de la défiscalisation dans les investissements photovoltaïques outre-mer – économie fiscale évaluée à 230 millions d’euros.
En effet, ces décisions auront une incidence directe sur les investissements outre-mer. Aussi, il est proposé d'abonder du même montant – 330 millions d’euros au total – les actions 1, 2 et 8 du programme 123 de la mission « Outre-mer ». Ces crédits viendront à leur tour abonder la ligne budgétaire unique – la LBU –, les contrats de projets État-région – les CPER – et autres contrats de développement, ainsi que le fonds exceptionnel d’investissement, ou FEI, afin que l'investissement outre-mer ne soit pas ralenti encore davantage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. De manière générale, j’indique que la commission des finances n’a pas pu se réunir pour examiner l’ensemble des amendements extérieurs.
Le présent amendement vise à transférer 330 millions d’euros du programme 138, Emploi outre-mer, vers le programme 123, Conditions de vie outre-mer.
Il est censé traduire la réinjection en crédits budgétaires des économies réalisées sur les dispositifs de défiscalisation, notamment dans le domaine du photovoltaïque.
Toutefois, cette réinjection ne peut recueillir un avis favorable de notre part. En effet, la réduction des niches fiscales a pour but, non pas de réinjecter les économies réalisées en crédits budgétaires, mais de réduire le déficit de l’État, qui, je le rappelle, atteindra 92 milliards d’euros en 2011.
Aussi, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. En effet, cette disposition conduirait à un accroissement de la dette à l’égard des organismes sociaux. Dans ces conditions, elle n’est pas acceptable.
Mme la présidente. L'amendement n° II-251, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
57 000 000 |
57 000 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
57 000 000 |
57 000 000 |
||
TOTAL |
57 000 000 |
57 000 000 |
57 000 000 |
57 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Cet amendement a pour objet d'abonder l'action 01, Logement, du programme 123, Conditions de vie outre-mer, de 57 millions d’euros, notamment au profit de la LBU et des autres dépenses à caractère social de ce programme.
En effet, le Gouvernement a réalisé une économie de 57 millions d’euros en ne créant pas le revenu de solidarité active – le RSA – en outre-mer dès 2009, comme en métropole, selon le rapport du député René-Paul Victoria. Il s'agit donc de s'assurer que cette économie réalisée sur les dépenses sociales outre-mer soit réinjectée dans le même secteur.
En compensation, le même montant en autorisations d’engagement et en crédits de paiement est supprimé sur l'action 01 du programme 138 : il reviendra au ministère de l'outre-mer et au ministère de l'économie et des finances de trouver les crédits correspondants afin de compenser aux organismes de sécurité sociale les exonérations de charges.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Notre explication sera exactement la même que celle qui a été donnée voilà un instant par notre collègue Marc Massion. La commission émet un avis défavorable sur ce transfert de 57 millions d’euros du programme 138, Emploi outre-mer, vers le programme 123, Conditions de vie outre-mer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Avis défavorable, pour les motifs que j’ai évoqués lors de l’examen de l’amendement précédent.
Mme la présidente. L'amendement n° II–253, présenté par MM. S. Larcher, Patient, Lise, Gillot, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
25 000 000 |
25 000 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
25 000 000 |
25 000 000 |
||
TOTAL |
25 000 000 |
25 000 000 |
25 000 000 |
25 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Le logement social est depuis longtemps considéré comme une des priorités du budget de l’outre-mer.
Les besoins dans ce domaine sont énormes et ne cessent d’augmenter, alors que l’offre de logement ne cesse de baisser.
Ainsi, pour l’ensemble des départements d’outre-mer, seuls 2 600 logements sociaux neufs ont été financés en 2009, pour un besoin de l’ordre de 45 000 logements. En Martinique, il faudrait construire 2 000 logements sociaux par an. Seuls 664 ont été programmés en 2010 et 134 sont livrés.
Pour répondre à cette situation catastrophique, le Gouvernement a mis en place, en 2009, un dispositif de défiscalisation, unique pour l’outre-mer, devant relayer les crédits de la LBU.
Cette ligne « logement » inscrite sur la mission « Outre-mer » devait par ailleurs être sanctuarisée.
Je tiens à préciser qu’il semblerait que, au moins pour vous, madame la ministre, sanctuariser veuille dire, au mieux, maintenir à l’identique, alors que, pour moi et pour la plupart des élus d’outre-mer, cela signifie maintenir un financement important par le biais de subventions.
Force est de constater aujourd’hui que la mise en œuvre de la défiscalisation dans le logement social ne fonctionne pas et que la LBU perd 21 millions d’euros.
Qui plus est, vous avez signé une circulaire destinée aux préfets des départements d’outre-mer qui indique précisément que « sauf cas particulier, le recours à la défiscalisation doit conduire à une modération de la subvention, voire à une absence totale de subvention ».
Madame la ministre, personne n’est dupe, on perçoit nettement, à travers ces instructions notamment, une volonté de réduire à terme les financements par la LBU.
Mais le logement social ne doit pas dépendre en majorité des investissements privés, car seule une véritable augmentation de la LBU doit permettre à terme aux départements d’outre-mer de combler les besoins en matière de logement social.
Aussi cet amendement vise-t-il à abonder l’action Logement en prélevant 25 millions d’euros sur les crédits destinés à l’aide au fret, puisque, depuis 2009, cette aide était prévue dans le budget, mais n’a jamais été utilisée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Cet amendement vise à transférer 25 millions d’euros du programme Emploi outre-mer vers le programme Conditions de vie outre-mer, et à augmenter de 25 millions d’euros la LBU.
Mon cher collègue, votre intention est tout à fait louable, mais la commission rappelle que, depuis plusieurs années, selon elle, les crédits du programme Emploi outre-mer sont sous-budgétisés. D’ailleurs, la commission propose un amendement pour les majorer, qui sera examiné dans quelques instants.
Par conséquent, réduire le montant des crédits de ce programme ne paraît pas opportun. Aussi, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Avant de vous faire part de la position du Gouvernement, je voudrais formuler deux observations.
Premièrement, les crédits de la ligne budgétaire unique sont bien sanctuarisés, puisqu’ils sont prévus sur trois ans pour le même montant.
Deuxièmement, l’adoption de votre amendement, monsieur le sénateur, entraînerait la non-application du décret concernant l’aide au fret. Or ce décret, qui vient d’être signé, est très attendu par les milieux économiques.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Serge Larcher, l’amendement n° II-253 est-il maintenu ?
M. Serge Larcher. Madame la ministre, je vous prends au mot : puisque vous me dites que le décret vient d’être signé, il n’y a aucune raison que je m’inquiète, d’autant que la parole de l’État est d’or ! (Sourires.)
Dans ces conditions, je retire mon amendement, de même que l'amendement n° II–254.
Mme la présidente. Les amendements nos II-253 et II–254 sont retirés.
L'amendement n° II–254, présenté par MM. S. Larcher, Patient, Lise, Gillot, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
25 000 000 |
25 000 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
25 000 000 |
25 000 000 |
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TOTAL |
25 000 000 |
25 000 000 |
25 000 000 |
25 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
Cet amendement a été retiré.
L'amendement n° II–10, présenté par MM. Doligé et Massion, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
24 823 000 |
24 823 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
24 823 000 |
24 823 000 |
||
TOTAL |
24 823 000 |
24 823 000 |
24 823 000 |
24 823 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Cet amendement vise à transférer 24 823 000 euros du programme Conditions de vie outre-mer vers le programme Emploi outre-mer.
Vous savez que les organismes de sécurité sociale connaissent actuellement des difficultés et subissent d’importantes pertes de recettes.
Le présent amendement a un double objet. Il s’agit, d’une part, de réduire une partie de ces pertes, qui est estimée à 62,9 millions d’euros. Il s’agit, d’autre part, de supprimer, pour un même montant, les crédits de l’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport du programme Conditions de vie outre-mer relatifs au financement de l’Agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna. Notre collègue Laufoaulu s’est exprimé ce matin sur ce sujet.
Nous souhaiterions connaître la position de Mme la ministre, sachant que la commission des finances a proposé cette modification et ce transfert.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Il est tout à fait justifié que les crédits concernant notamment l’Agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna figurent dans le budget du ministère de l’outre-mer, puisque cette agence n’est pas comparable aux agences régionales de santé.
Aujourd’hui, ses missions sont dévolues aux hôpitaux, aux formations en cours et aux professionnels de santé. C’est un outil indispensable pour Wallis-et-Futuna.
De plus, le transfert de crédits ne s’effectuera pas au profit des crédits de la mission « Santé ». Par conséquent, ce serait une charge pour l’État, sauf à considérer que l’Agence serait plus opérationnelle, ce qui n’est pas concevable au regard de son rôle à Wallis-et-Futuna.
Dans ces conditions, je souhaiterais que M. le rapporteur spécial retire cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° II–10 est-il maintenu ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Nous avons voulu, au travers de cet amendement, attirer l’attention de Mme la ministre sur ce qui nous semble être un dysfonctionnement du ministère. En dépit de vos propos, madame la ministre, je continue à penser que la santé à Wallis-et-Futuna relève non pas du ministère de l’outre-mer, mais du ministère de la santé.
Certes, nous n’allons pas décider le 15 décembre de supprimer les crédits pour l’équipement hospitalier de Wallis-et-Futuna. Mais nous souhaitions juste que vous nous disiez si des pistes de réflexion étaient envisagées pour les années à venir.
Bien entendu, nous retirons notre amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° II–10 est retiré.
L'amendement n° II–249, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Emploi outre-merDont Titre 2 |
839 810 |
839 810 |
||
Conditions de vie outre-mer |
839 810 |
839 810 |
||
TOTAL |
839 810 |
839 810 |
839 810 |
839 810 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Cet amendement a pour objet d'éviter la disparition programmée de l'Institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales, l’IFCASS, de Dieppe.
L'IFCASS intervient sur le champ de l'insertion, par la formation et la validation des acquis de l'expérience, au profit d'un public issu essentiellement des DOM-COM. Depuis plus de trente ans, l'IFCASS a accompagné des milliers de jeunes issus des DOM-COM vers l'emploi dans les carrières administratives, sanitaires et sociales.
Il participe ainsi à donner du sens aux notions de solidarité et de continuité territoriale, avec un taux d'insertion avoisinant 80 %.
Aujourd'hui, la Direction générale de la cohésion sociale a acté le désengagement des ministères sociaux en inscrivant dans le projet de loi de finances pour 2011 une subvention divisée par deux. De 1 679 620 euros, elle passerait à 839 810 euros, puis à 0 euro en 2012. Sur un budget de 3 millions d’euros, cette baisse conduit immanquablement à la fermeture de l'établissement dès juin 2011.
Sa sauvegarde consiste donc à rétablir les crédits à hauteur de 1 679 620 euros, qui seraient donc portés, pour la moitié chacun, par le ministère de l'outre-mer et par le ministère du travail, tout en regrettant que celui-ci se désengage et condamne ainsi, à terme, l'existence de cet institut.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. J’ai bien entendu notre collègue, mais je voudrais tout de même rappeler que cet institut ne relève pas de la mission « Outre-mer ». Il forme évidemment un certain nombre de personnes qui sont issues de l’outre-mer, mais ce n’est pas une raison pour que cela soit pris en charge par le budget de l’outre-mer.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. En effet, nous ne souhaitons pas que cette somme de 839 810 euros soit prélevée sur le budget de l’outre-mer et transférée au budget de la formation.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sur ce point particulier, je voudrais vous indiquer, madame la ministre, que, lors de la discussion des crédits de la mission « Ville et logement », un amendement homothétique a été présenté, tendant à extraire des crédits de la mission « Ville et logement » la dotation destinée à cet institut localisé à Dieppe.
Nous considérons que ces crédits ne concernent pas véritablement la mission « Ville et logement », et qu’ils devraient sans doute relever de la sphère de votre ministère.
Nous aimerions connaître votre opinion à ce sujet, car cet institut n’est pas complètement reconnu par la mission « Ville et logement ». Peut-être a-t-il vocation à trouver sa place dans votre propre mission, ce qui supposerait que les crédits de la mission « Ville et logement » soient transférés.
Nous avions imaginé avant-hier soir de sortir ces crédits de la mission « Ville et logement »,…
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … pour que le Gouvernement prenne l’initiative – je parle sous le contrôle de notre collègue Charles Revet –, car il y a là une ambiguïté qui doit être levée.
M. Charles Revet. C’est maritime !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Au regard du rôle que joue l’IFCASS, en particulier pour la formation des ultramarins, nous devons veiller à ce que cet établissement puisse continuer à jouer son rôle.
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Par ailleurs, la question est plus compliquée qu’il n’y paraît, car je ne suis pas sûre que les crédits aient vraiment vocation à être affectés au ministère de l’outre-mer, eu égard aux missions qui ont été dévolues à ce ministère.
En revanche, nous pouvons imaginer un financement entre plusieurs ministères. C’est la réflexion qui est conduite actuellement, et une réunion interministérielle a eu lieu sur ce sujet.
Je voudrais vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs. Tous les moyens sont mobilisés pour que la rentrée scolaire se passe dans de bonnes conditions et que l’année se déroule normalement. Quant à la rentrée 2011, elle sera assurée. En tout cas, j’ai obtenu des engagements de mes collègues sur ce point. Nous avons toute une année pour déterminer les modalités de financement de cette institution.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien ! Rendez-vous l’année prochaine !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gillot, pour explication de vote.
M. Jacques Gillot. J’ai entendu l’intervention de M. le président Arthuis, que je remercie, et la réponse de Mme la ministre.
J’ai bien conscience du sens que l’on voudrait donner à cet amendement : il s’agit de dire que c’est de la solidarité, de la continuité territoriale, qui, selon moi, fait partie de la mission « Outre-mer ».
Ce que nous voulons, c’est la pérennisation de cet institut. Nous demandons à cette fin un financement croisé. Nous aurions souhaité que, dans cette optique, Mme la ministre s’engage à faire tout ce qui est possible pour assurer la pérennité de cet institut, et si d’autres ministères, notamment le ministère du travail, de l’emploi et de la santé, pouvaient intervenir, nous serions satisfaits. Si nous obtenions cette réponse, je pourrais alors retirer mon amendement. Cela dit, cette compétence devrait à mon avis revenir au ministère de l’outre-mer.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Monsieur le sénateur, je vous confirme que nous cherchons à pérenniser le fonctionnement de l’Institut. D’autres moyens financiers peuvent être mobilisés : je pense notamment au Fonds social européen. Des pistes de travail ont été engagées, et nous avons, comme vient de le dire M. le président Arthuis, toute l’année pour agir. En tout cas, je peux vous garantir que la rentrée 2011 sera assurée dans de bonnes conditions.
M. Jacques Gillot. Merci !
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.
M. Charles Revet. Je partage les propos de M. Gillot. Je suis sénateur du département de Seine-Maritime, pour lequel cet institut joue également un rôle très important. Il est nécessaire non seulement pour des formations à l’échelon local, mais aussi pour l’outre-mer.
Je comprends l’inquiétude de mes collègues. Certes, ils sont satisfaits que Mme la ministre cherche à trouver une solution. Mais ils souhaiteraient un engagement de sa part, de façon que, si la solution n’intervient pas au niveau interministériel, le ministère prenne en compte l’année prochaine, dans son budget, le financement de cet institut. Nous serions rassurés. En effet, chercher, c’est bien, mais trouver, c’est parfois plus difficile.
Vous comprenez que, pour l’Institut lui-même et, surtout, pour la mission qu’il remplit, ainsi que pour les personnels concernés, il est important que nous obtenions des garanties pour l’avenir.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Il est trop tôt pour dire aujourd’hui comment cet institut de formation sera financé, d’autant qu’il est possible d’imaginer une participation des collectivités locales ultramarines, qui peuvent aussi être sollicitées, puisque nous sommes dans le cadre d’une formation professionnelle.
Il me paraît difficile, au travers d’un amendement, de régler la question du financement de cet institut de formation qui est indispensable pour nos compatriotes ultramarins.
Mais je peux prendre l’engagement devant la Haute Assemblée que l’Institut continuera de fonctionner, car les autres ministres concernés m’ont donné des assurances en la matière. Nous devons trouver la meilleure formule pour garantir la pérennisation de cet établissement.
Mme la présidente. Monsieur Gillot, l'amendement n° II–249 est-il maintenu ?
M. Jacques Gillot. Eu égard à la volonté affichée de Mme la ministre, je retire mon amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II–249 est retiré.
Nous allons maintenant procéder au vote des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Outre-mer ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion les articles 77, 77 bis, 77 ter, 77 quater et 77 quinquies qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Outre-mer ».
Article additionnel avant l'article 77
Mme la présidente. L'amendement n° II–206, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 77, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 568 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « tabac au détail », sont insérés les mots : «, à compter du 1er janvier 2011, » ;
2° Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Une licence ne vaut que pour un point de vente. » ;
3° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le nombre maximum de licences ainsi accordées est fixé à 540 pour la Martinique, 550 pour la Guadeloupe, 1070 pour La Réunion et 300 pour la Guyane. » ;
4° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2011, seuls les distributeurs agréés peuvent vendre du tabac manufacturé aux personnes mentionnées au premier alinéa. » ;
5° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« À titre transitoire, les détaillants vendant habituellement du tabac manufacturé antérieurement au 1er janvier 2011 et n'ayant pas bénéficié de l'attribution d'une licence au titre de l'année 2011, sont autorisés à poursuivre la vente aux particuliers pendant la période strictement nécessaire à l'épuisement de leur stock et au plus tard jusqu'au 30 juin 2011. »
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne la vente de tabac dans les DOM où, contrairement à la métropole, elle n’est pas soumise à un monopole.
Le Parlement a adopté, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2009, l’article 568 bis du code général des impôts, qui organise une procédure de licences accordées par le conseil général aux débitants de tabac.
Ce dispositif présente le double avantage d’attribuer une nouvelle ressource aux départements, par le biais d’une redevance, et de mettre fin à l’anarchie complète du marché du tabac, tout en respectant les équilibres actuels et les commerces en activité. Il s’agit en définitive de moraliser ce marché et de permettre aux politiques de prévention de s’appliquer aussi outre-mer.
Depuis deux ans, le Gouvernement n’a toujours pas pris le décret d’application de cet article, ce qui crée une insécurité juridique indéniable pour les vendeurs, puisque la cessation d’activité des points de vente dépourvus de licence est fixée, dans l’article même du code, « au plus tard le 1er janvier 2011 ».
Cet amendement vise en conséquence à conforter l’environnement juridique du commerce du tabac dans les DOM et à remédier à l’inertie du Gouvernement sur cette question essentielle de santé publique.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II–358, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
I. - Amendement n° II-206
A. - Alinéas 3 et 9
Remplacer les mots :
1er janvier
par les mots :
1er juillet
B. - Alinéas 6 et 7
Rédiger ainsi ces alinéas :
3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa, une licence peut être accordée pour la vente au détail du tabac dans les galeries marchandes attenantes à des supermarchés ou des hypermarchés aux personnes ayant la qualité de commerçant qui pratiquaient la vente au détail du tabac à titre principal antérieurement au 1er janvier 2010. » ;
C. - Alinéa 11
Remplacer les mots :
30 juin
par les mots :
31 décembre
D. - Compléter cet amendement par deux alinéas ainsi rédigés :
6° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditions d'application du présent article sont définies par décret. »
II. - La perte de recettes résultant du I pour les conseils généraux est compensée à due concurrence par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du II est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Je comprends le souci de ma collègue Anne-Marie Payet de lutter contre le tabagisme outre-mer, et j’ajouterai également à ce problème celui de l’alcoolisme.
Voilà quelques années, j’avais fait voter au conseil général de La Réunion un doublement du prix du paquet de cigarettes. La consommation avait dans un premier temps baissé de 25 %, avant, malheureusement, de reprendre une courbe ascendante, les habitudes l’emportant sur les sacrifices qu’il faut consentir pour acheter un paquet de cigarettes.
Ce sous-amendement a pour but d’améliorer les conditions d’application de l’amendement que vient de présenter Mme Payet. Il vise tout d’abord à accorder une licence aux personnes qui pratiquaient déjà la vente au détail de tabac à proximité des grandes surfaces ; il donne ensuite au Gouvernement la possibilité de prendre un décret pour mettre en œuvre ce dispositif ; il prévoit enfin de reporter de six mois sa date d’entrée en vigueur, du 1er janvier au 1er juillet 2011.
Ce sous-amendement vise à rendre plus cohérent le texte de Mme Payet et à sécuriser l’avenir professionnel des marchands de cigarettes. Car ce ne sont pas des gens qui travaillent au noir ! Ils ont des employés, un chiffre d’affaires, une famille, un revenu, et l’on ne peut pas du jour au lendemain jouer à la loterie avec leur avenir. La cigarette n’a pas été inventée par ces vendeurs, mais par notre société, et sa commercialisation obéit déjà à des règles strictes.
Ce sous-amendement tend donc à adoucir l’application de l’amendement de Mme Payet et, surtout, à donner au Gouvernement quelques mois pour mettre en place les dispositions légales.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II–381, présenté par MM. Lise, Gillot, S. Larcher, Patient, Tuheiava et Antoinette, est ainsi libellé :
Alinéa 3 de l'amendement n° II-206
Compléter cet alinéa par les mots :
et les mots : « accordée au nom du département par le président du conseil général » sont supprimés ;
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. L’amendement présenté par Mme Payet, dont je peux partager l’objectif en termes de santé publique, pose un problème aux conseils généraux d’outre-mer.
En réalité, il a pour conséquence de rendre effectif un transfert de responsabilités, je dirai même un transfert de compétences, auxdits conseils, lequel s’accompagne inévitablement d’un transfert de charges.
Je rappelle que les conseils généraux d’outre-mer ont expressément marqué leur opposition à ce transfert, qu’ils n’ont pas demandé et qui, au vu des difficultés financières qu’ils connaissent en ce moment, serait vraiment très mal venu.
Ce sous-amendement prévoit donc sa suppression : le président du conseil général ne serait plus chargé de délivrer ces licences dans les conditions prévues par le texte de l’amendement n° II–206.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. L’amendement présenté par Mme Payet trouve sa source dans le fait que les décrets d’application d’une loi votée à la fin de l’année 2008 n’ont toujours pas été pris.
Le premier sous-amendement, présenté par M. Virapoullé, tend à assouplir le calendrier.
Le second sous-amendement, proposé par M. Lise, vise pour sa part à retirer aux conseils généraux la délivrance des licences de tabac.
La commission des finances sollicite l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. L’amendement n° II–206 reprend le libellé d’un amendement relatif à la réglementation des licences de tabac outre-mer, qui avait été adopté dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2009.
Actuellement, les conseils généraux d’outre-mer perçoivent les droits de consommation, et il était donc logique qu’ils puissent aussi gérer ces licences.
Le Gouvernement n’est pas resté inactif dans ce dossier, et je remarque d’ailleurs que Mme Payet a repris dans le texte de cet amendement des dispositions du décret qui avait été préparé par nos services.
M. le sénateur Lise, qui est également président de conseil général, vient toutefois de rappeler les questions que se posent les collectivités départementales.
Nous partageons bien évidemment l’objectif de santé publique cher à Mme Payet, dont je salue d’ailleurs l’engagement et la détermination. Pour autant, il faut aussi considérer l’impact économique (M. Claude Lise opine.), l’impact sur les collectivités locales, et c’est pourquoi je comprends tout à fait la démarche de M. Virapoullé, qui souhaite que nous approfondissions l’analyse.
À cet égard, je m’engage à ce qu’un fonctionnaire de mon administration soit mobilisé durant les trois mois à venir pour procéder à une remise à plat complète de ces questions, afin que nous puissions préparer un décret qui permettra tout à la fois de répondre à cet objectif de santé publique que nous partageons tous, compte tenu des conséquences du tabagisme sur la santé, et d’échafauder un dispositif qui recueillera l’assentiment des collectivités, en particulier des conseils généraux, qui auront à gérer les licences de tabac.
Dans ces conditions, je demande à Mme Payet de bien vouloir retirer cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il s’agit d’une question récurrente et il faudrait, là encore, que nous sortions de l’ambiguïté.
D’un côté, le législateur est irréprochable et insère dans les textes qu’il adopte, notamment dans la loi « hôpital, patients, santé et territoires », des objectifs de santé publique. De l’autre, une disjonction apparaît entre la législation et la pratique, et ce fossé nous fait prendre le risque de passer pour des personnes velléitaires ou hypocrites.
Nous devons absolument sortir de cette situation inacceptable, madame la ministre.
Vous avez annoncé sous trois mois la parution d’un décret,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … qui devrait permettre à la loi d’entrer en application.
Sous le bénéfice d’un tel engagement solennel devant le Sénat, à l’occasion du vote des crédits de la mission « Outre-mer », Mme Payet pourrait peut-être retirer son amendement… (Mme le rapporteur pour avis marque son refus.) Dans ce cas, il ne me reste plus qu’à saluer la constance, la détermination et l’engagement de Mme Payet.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Compte tenu de l’importance de la fiscalité sur le tabac, il serait opportun d’unifier, sur tout le territoire français, le régime général des tabacs.
Certaines dispositions qui s’appliquent outre-mer sont fort pertinentes, notamment le fait que les conseils généraux puissent percevoir les droits de consommation.
Nous savons tous que les conseils généraux métropolitains manquent de ressources. Cet amendement est donc l’occasion pour nous d’attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que, si les départements de métropole pouvaient également percevoir ces droits de consommation, cela permettrait de compenser quelque peu les énormes transferts de charges qu’ils subissent, de même que les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle.
L’uniformisation de la réglementation présenterait également l’intérêt de mettre un terme aux multiples régimes dérogatoires qui s’appliquent en matière de vente du tabac. Ainsi, le Parlement a voté la prorogation du régime spécifique applicable à la Corse, au motif que les buralistes de l’île seraient menacés par la concurrence espagnole et italienne. Pourtant, 200 kilomètres de mer les séparent, alors que les buralistes de Moselle se trouvent eux à cinq kilomètres du Luxembourg, où le prix du tabac est encore plus bas qu’en Italie ou en Espagne ! Je ne vois donc pas ce qui justifie la coexistence de cette multitude de régimes différents. Les buralistes de Moselle sont tout aussi respectables que ceux de Corse, et les départements de métropole mériteraient de bénéficier des mêmes dispositions que celles qui s’appliquent aux collectivités d’outre-mer, et dont le Gouvernement ferait bien de s’inspirer pour remédier aux difficultés financières des départements métropolitains.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. J’ai écouté avec attention Mme Payet, qui s’exprimait au nom de notre commission des affaires sociales, de même que MM. Virapoullé et Lise. Je partage globalement le point de vue de ces trois orateurs.
Je trouve en revanche profondément choquant que Mme Payet soit obligée de déposer, au nom de la commission des affaires sociales, un amendement pour que l’on se rende compte qu’une mesure adoptée voilà deux ans par le Parlement n’a toujours pas été mise en œuvre, et pour que Mme la ministre s’engage à l’appliquer dans les trois mois qui viennent.
Malheureusement, ce n’est pas la première fois qu’une telle situation se produit, et ce n’est sans doute pas la dernière. Il se trouve, en l’occurrence, que la victime est un département d’outre-mer, mais ce serait tout aussi choquant s’il s’agissait d’une collectivité métropolitaine.
Vous n’êtes pas sans savoir, madame la ministre, que nombre de lois ne sont pas mises en œuvre plusieurs années après leur adoption, faute pour le Gouvernement d’avoir pris les décrets d’application. Je me demande dès lors pourquoi l’on demande au Parlement de voter des lois si l’on sait pertinemment que les décrets d’application ne paraîtront jamais ! (Mmes Brigitte Bout, Sylvie Goy-Chavent et Bernadette Bourzai applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Je ne comprends pas votre hostilité, madame la ministre.
Nous nous sommes entretenus longuement à ce sujet vendredi. Les présidents de conseils généraux auront une trop grande marge de manœuvre, dites-vous, ils pourront accorder des licences à un euro selon un choix qui sera entaché de favoritisme.
Je vous demande de faire un peu confiance aux présidents des collectivités. Ce sont des gens responsables, qui sauront faire preuve de sagesse et de discernement et appliquer cette mesure avec souplesse.
Rien n’empêche le ministre de leur adresser une circulaire ou un simple courrier pour leur préciser de fixer au départ un prix intermédiaire, afin que la réforme ne soit pas brutale, et prévoir un réajustement annuel pour atteindre le niveau de la métropole, dans dix ans, par exemple.
Mon amendement a été adopté en décembre 2008. L’application de la disposition était prévue au 1er janvier 2011. J’ai laissé deux ans au Gouvernement pour engager les discussions avec les conseillers généraux et ensuite pour publier le décret.
Des projets de décrets ont été préparés par Bercy. Vous avez jugé que leur rédaction n’était pas parfaite sans proposer toutefois de modification. Il y avait trop d’imprécisions, mais, j’en suis certaine, s’il y avait plus de précisions on aurait pu nous reprocher de ne pas laisser suffisamment de liberté de manœuvre aux conseils généraux.
Le délai arrive à expiration et le Gouvernement doit faire preuve de courage pour que l’application soit effective au 1er janvier.
Lors de sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre m’a confortée dans ma position. Je me suis vraiment sentie en phase avec lui en l’écoutant avec toute l’attention qu’il mérite. La pause est la marque des indécis, a-t-il dit, et « notre indécision serait une revanche de la peur, cette peur du changement qui nous a longtemps conduits à célébrer la théorie du “ni-ni” et à louer celle du “temps laissé au temps”.
Ayons le courage, madame la ministre, mes chers collègues, de mener cette réforme à son terme.
J’en viens aux sous-amendements.
Le sous-amendement n° II–358 remet complètement en cause l’amendement de la commission des affaires sociales.
Premièrement, il vise à décaler la date d’entrée en vigueur au 1er juillet 2011.
Deuxièmement, il tend à autoriser une dérogation pour certains commerçants, mais, surtout, il renvoie de nouveau à un décret l’application du mécanisme des licences.
Inutile de vous dire, mes chers collègues, que je ne vois pas pourquoi le Gouvernement prendrait ce décret durant le premier semestre 2011, alors qu’il refuse de le faire depuis plusieurs mois, en remettant en cause non pas l’amendement présenté aujourd’hui, mais la disposition votée il y a deux ans.
En outre, il ne propose même pas d’amendement en conséquence. C’est vraiment illogique, sauf à vouloir bafouer les décisions du Parlement.
Au final, je ne peux donc qu’être défavorable au sous-amendement n° II–358, présenté par Jean-Paul Virapoullé.
S’agissant du sous-amendement n° II–381, je comprends tout à fait les arguments des présidents de conseils généraux, qui sont présents. Ce qui est important, c’est que le mécanisme des licences soit effectif. Je suis donc favorable à ce sous-amendement.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission des finances ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. La commission des finances est bien embarrassée. (Sourires.) M. le président Arthuis l’a dit tout à l’heure, sur le plan législatif, nous avons fait notre travail, mais il semble qu’il y ait un retard de la part de l’exécutif dans l’application.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ça coince !
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Mme Payet demande l’application d’un décret au 1er janvier 2011, alors que le décret n’est pas prêt. Cela semble donc matériellement difficile.
Cela dit, si on accepte les propositions de Mme la ministre, à nos yeux, cet engagement de produire enfin ce décret dans les six mois ne pourrait être pris que pour la dernière fois.
Si, dans un an, vous venez nous dire que vous avez de nouveau nommé un fonctionnaire de votre administration pour faire le point, madame la ministre, cela n’ira pas. Matériellement, vous ne pouvez pas publier le décret maintenant, soit. Mais prenez l’engagement formel que, dans les six mois, ce décret d’application sera pris.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Vous allez jurer, madame la ministre !
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Dans ces conditions, nous souhaiterions que Mme Payet retire son amendement.
Mme la présidente. Madame Payet, l’amendement n° II–206 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Madame la ministre, le décret ne changera pas l’attribution aux conseils généraux. Je ne retire pas mon amendement.
Celui-ci apporte un certain nombre de précisions. Il fixe l’entrée en vigueur au 1er janvier 2011 ; il prévoit qu’une licence ne vaudra que pour un point de vente ; il fixe le nombre de licences par département à un point de vente pour 750 habitants, je rappelle que nous avons pris les conclusions d’un rapport effectué par Bercy. En ce moment, en outre-mer, c’est un point de vente pour 320 habitants. Nous proposons une mesure intermédiaire. En métropole, c’est un point de vente pour 3 500 habitants. Ce que je propose n’est pas brutal ; je pense que c’est tout à fait acceptable.
De surcroît, cet amendement prévoit l’organisation d’une période transitoire de six mois pour les détaillants qui n’obtiendraient pas de licence et qui doivent, bien sûr, pouvoir revendre leurs stocks et, en conséquence, il vise à supprimer le renvoi à un décret, qui devient inutile.
Mme la présidente. Madame le rapporteur, vous pourriez peut-être saisir la suggestion de la commission des finances et donc fixer une date un peu plus éloignée, ce qui permettrait éventuellement au Gouvernement d’émettre un avis favorable.
Mme la ministre ayant évoqué une mission de trois mois, peut-être pourriez-vous rectifier l’amendement en ce sens…
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. On pourrait retenir la date du 1er avril 2011, mais à condition que cela ne renvoie pas encore à un décret. Une mission ayant déjà été réalisée par Bercy, je ne vois pas pourquoi il en faudrait une nouvelle.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Madame la sénatrice, j’ai envie de dire : oui à une nouvelle mission. Nous pourrions effectivement nous contenter de ce décret. Je considère de ma responsabilité de dire qu’il faut compléter cette mission. Pourquoi ? D’abord, en raison de l’objectif de santé publique, qui est noble et que nous partageons tous.
Aujourd’hui, en métropole, il y a un débit de tabac pour 3 000 habitants. Nous fixons ce nombre à un pour 550 habitants en Guadeloupe, un pour 1 000 à la Martinique et un pour 750 pour la Réunion.
Pourquoi l’objectif de santé publique ne pourrait-il pas être le même sur le territoire métropolitain et en outre-mer ?
Nous pourrions envisager, dans le cadre de ce décret, une mesure progressive pour tenir compte, notamment, de la situation économique, et pour avoir à terme les mêmes objectifs de santé publique en métropole et outre-mer.
La santé est un sujet d’intérêt général et, à ce titre, cette question n’a pas été envisagée. Ne serait-ce que sur ce point-là, je pense que cela nécessite de regarder les choses de plus près.
Par ailleurs, lorsque le projet de décret a été soumis aux collectivités, pas de manière officielle, mais lors d’une première approche, nous avons eu, à juste titre, des observations pertinentes et, vous le savez mieux que moi, la présidente du conseil général de La Réunion a saisi officiellement le Gouvernement sur cette question.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Elle a peur de ne pas être réélue !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le président du conseil général de la Martinique et le président du conseil général de la Guadeloupe – ici présents – ainsi que le président du conseil général de la Guyane ont la même position.
Je prends l’engagement ici, devant la représentation nationale, de travailler en profondeur et d’élaborer un décret qui, au bout du compte, sera vraiment applicable dans l’intérêt de l’objectif que nous partageons tous.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Lise, pour explication de vote.
M. Claude Lise. Je voulais réagir tout à l’heure – c’était un point d’ordre – parce que j’ai été très choqué d’entendre, dans les propos qui ont été rapportés, que les présidents de conseils généraux, dans cette affaire, seraient tentés de se livrer à je ne sais quel favoritisme. Ce n’est pas le problème.
Le problème, c’est qu’il s’agit d’un transfert de compétences et de charges contre l’avis des conseils généraux et dans une situation difficile.
Profitant de l’occasion, je veux dire à certains de mes collègues de l’Hexagone que nous percevons non pas la taxe sur les tabacs, mais une taxe additionnelle. Cette disposition – j’en suis d’ailleurs à l’origine – a été prise dans la loi d’orientation pour l’outre-mer, parce que nous avons une insuffisance de ressources. Il ne faudrait pas non plus que l’on se trompe sur les raisons pour lesquelles nous avons le bénéfice de cette taxe additionnelle. Sinon il va falloir revoir pratiquement toutes les ressources.
Je signale qu’aujourd’hui l’État doit 71 millions d’euros au conseil général de la Martinique, plus de 93 millions d’euros à la Guadeloupe et plus de 200 millions d’euros à La Réunion.
Madame la présidente, madame la ministre, les raisons de ces difficultés viennent aussi du fait que certaines dispositions sont votées de manière précipitée et un peu trop partisane, sans avoir poussé la réflexion à son terme. C’est ce qui s’est passé sur cette question. Nous sommes tous d’accord sur l’objectif, mais il y a eu un vote partisan sans que l’on soit allé au bout de la réflexion. Et nous nous sommes rendu compte ensuite qu’il y avait une difficulté dans la mise en œuvre.
Encore une fois, nous sommes d’accord sur l’objectif, mais peut-être faut-il nous donner le temps de trouver une solution juste, équitable et efficace.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gillot, pour explication de vote.
M. Jacques Gillot. Nous sommes tout à fait d’accord, nous le répétons, avec la philosophie de l’amendement de Mme Payet, mais deux chiffres doivent être pris en compte.
Premièrement, il y a les charges qui incomberont au conseil général. Selon la simulation que nous avons faite ensemble, nous devrions embaucher dix personnes pour mener à terme ce dossier. Certains pensent que nous avons déjà de l’argent parce que nous percevons quelques redevances sur la taxe additionnelle : non !
Deuxièmement, c’est le nombre de licences à attribuer. Aujourd’hui, nous partons sur 550. Nous avons téléphoné au service des douanes : pour la Guadeloupe, il y a aujourd’hui 1 200 à 2 000 licences ; pour la Martinique, c’est pareil, et pour La Réunion, entre 1 500 et 2 000.
Nous sommes tout à fait d’accord, mais profitons de cette possibilité, je dirai même de cette sagesse, pour mettre en place au mieux l’amendement de Mme Payet, parce qu’il faut tenir compte du nombre de débits de tabac existant afin de déterminer le nombre de licences.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nos collègues d’outre-mer – j’entendais M. Claude Lise, il y a un instant – doivent considérer qu’il y a sans doute des spécificités ultramarines, mais le principe qui avait été retenu, c’est celui d’une responsabilité transférée au conseil général, la contrepartie étant la perception d’une redevance par les conseils généraux.
La délivrance de ces licences s’accompagnait d’une ressource pour les conseils généraux. C’était bien cela qui était prévu dans le dispositif.
Aussi, je m’étonne que, sur ce point, vous soyez en désaccord. Il y a donc manifestement une incompréhension sur le contenu de cette législation.
Que Mme la ministre consulte les conseils généraux, c’est une bonne manière, mais je tiens à vous dire qu’en France métropolitaine ce n’est pas toujours le cas s’agissant des dispositions que les conseils généraux doivent appliquer.
Cette bonne manière ne doit pas avoir pour conséquence l’ajournement du passage à l’acte…
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … car cette disjonction entre la loi votée et la mise en œuvre fragilise considérablement la démocratie et la République, car c’est l’affichage permanent de l’impuissance politique.
Mes chers collègues, je vous mets en garde contre de telles pratiques, qui participent à une sorte de désenchantement général. Sortons de ces ambiguïtés !
Pour le reste, nous devons tous être bien conscients que notre sac à bonnes nouvelles est épuisé et que, compte tenu de la situation de nos finances publiques, nous sommes dans l’obligation d’être pédagogues et de mettre nos concitoyens, qu’ils soient ultramarins ou métropolitains, en face de leurs responsabilités et des obligations de la République.
Madame la ministre, je le répète, il faut que nous sortions de cette ambiguïté. Il y a vraiment urgence. Si j’avais une Constitution, je vous demanderais de jurer sur la Constitution (Sourires.) que vous prendrez ce décret sous trois mois pour que cette loi devienne effective.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Nous sommes dans une situation quelque peu bloquée, un peu difficile, où les positions sont très variées.
Mme Dini a d’ailleurs exprimé ce que nous ressentons tous, mais le problème dépasse la simple non-parution d’un décret.
Nous avons l’habitude d’éprouver des déceptions ; c’est même une situation classique : un amendement est déposé, le ministre nous dit qu’il est extraordinaire, puis il en demande le retrait en s’engageant à introduire la disposition souhaitée dans un prochain texte. Évidemment, on ne la revoit jamais… C’est à peu près du même tonneau !
J’ai bien entendu les propos qui viennent d’être tenus, et notamment ceux de Mme la ministre. Techniquement, ce décret ne peut pas être publié dans les prochains jours, ou même dans les prochaines semaines. Il faut en effet trois mois pour préparer un tel texte, et sa publication ne pourrait pas avoir lieu avant six mois.
C’est la situation que prend en compte M. Virapoullé dans son sous-amendement n° II-358, auquel Mme le rapporteur pour avis est défavorable. Il nous propose de prévoir un délai supplémentaire de six mois pour l’entrée en vigueur du régime des licences, à la condition que Mme la ministre s’engage à publier le décret.
Par ailleurs, nos collègues présidents de conseil général se trouvent dans une situation délicate, car ils ne savent pas comment ils pourront, dans les conditions actuelles, appliquer dans leur département un décret qui n’existe pas encore…
Mme le rapporteur pour avis souhaite que ce décret entre en application le plus rapidement possible. Or nous avons la certitude que cela ne sera le cas ni en janvier, ni en février, ni en mars. En attendant, nous devons trouver les voies et moyens pour que sa publication ait lieu dans de bonnes conditions.
Mme la ministre a pris l’engagement, à deux reprises, que le décret serait publié à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet, c’est-à-dire dans six mois. Ce délai correspond à celui que propose M. Virapoullé.
Nous devons donc choisir entre ces deux solutions.
Aux termes de la première solution, nous votons le sous-amendement n° II-358, et nous répondons au souhait de Mme la ministre. Il paraît difficile, en revanche, de satisfaire la demande de Mme le rapporteur pour avis, Mme la ministre nous ayant expliqué qu’une publication immédiate était impossible.
Nous tournons en rond, et ce débat peut durer encore longtemps… Souhaitons-nous vraiment demander à M. le président de la commission de reporter l’examen des crédits d’autres missions ?
Je préfère quant à moi la seconde solution : on formalise l’engagement de Mme la ministre en adoptant le sous-amendement de M. Virapoullé, et peut-être, également, celui de M. Lise, s’il s’avère être indispensable. Une fois le sous-amendement n° II-358 adopté, nous pourrions ensuite voter l’amendement n° II-206 de la commission des affaires sociales, qui, ainsi sous-amendé, permettra de consolider encore le texte.
Mme la présidente. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage sur le sous-amendement n° II-358 ?
Mme la présidente. Il s’agit donc du sous-amendement n° II-358 rectifié.
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° II-381.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Je demande la parole, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Je suis allé un peu vite en donnant l’avis de la commission sur le sous-amendement n° II–381. Ses auteurs n’ont pas bien mesuré les conséquences qu’aurait son adoption et le risque que présenterait la modification d’un dispositif que nous avons voté voilà deux ans. C’est pourquoi je les invite à engager un travail de concertation avec le ministère dans la perspective de la publication du décret. En effet, comme l’a rappelé M. le président de la commission, un engagement financier a été pris envers les départements. Nous devons donc faire preuve de prudence !
Le sous-amendement de M. Virapoullé, quant à lui, ne présente pas cet inconvénient.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-381.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
M. Jacques Gillot. Madame la présidente, je demande la parole pour un rappel au règlement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. La procédure de mise aux voix du sous-amendement n° II–381 avait déjà commencé lorsque M. Doligé est intervenu. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. le président de la commission nous a demandé de faire preuve de cohérence : commençons ici-même, dans l’enceinte de l’hémicycle !
Le sous-amendement n° II–358 rectifié de M. Virapoullé, que nous avons voté, modifie le régime d’attribution des licences. Et pourtant il a reçu un avis favorable de la commission !
En outre, pour une fois, je ne partage pas l’avis de M. le président de la commission : la délivrance de licences ne donne lieu à aucune redevance au profit des conseils généraux.
Je le répète, si nous commençons à interrompre la mise aux voix des amendements à la moindre demande de parole, quelle que soit la qualité de l’orateur, le Parlement ne sera bientôt plus digne de ce nom !
Mme la présidente. Mon cher collègue, quelle que soit l’appréciation que vous portez sur les propos de M. Doligé, son intervention a eu lieu avant que ne soit voté le sous-amendement de M. Lise ; seul le sous-amendement de M. Virapoullé avait été adopté. (Marques de dénégation sur les travées du groupe socialiste.)
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je souhaite porter une disposition à la connaissance de MM. Gillot et Lise.
L’article 568 bis de la loi de finances pour 2009, modifié par l’article 100 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dispose en son troisième alinéa : « La délivrance de cette licence est soumise au versement, au profit du département d’outre-mer concerné, d’une redevance annuelle dont le montant est fixé par délibération du conseil général ». Je vous renvoie à ce texte ! (M. Jacques Gillot s’exclame.)
M. Christian Cointat. Le débat sur le tabac devient fumeux ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Le sous-amendement n°°II-358 rectifié dénaturant complètement mon amendement, je retire celui-ci.
Mme la présidente. L’amendement n° II-206 est retiré.
En conséquence, l’amendement II-358 rectifié n’a plus d’objet.
Article 77
I. – Il est créé à compter de 2011 :
1° Une dotation globale d’autonomie pour la Polynésie française ;
2° Une dotation territoriale pour l’investissement des communes de la Polynésie française ;
3° En application de l’article 169 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, un concours de l’État au financement des investissements prioritaires de la Polynésie française.
Ces trois instruments se substituent à la dotation globale de développement économique définie par la convention pour le renforcement de l’autonomie économique de la Polynésie française signée le 4 octobre 2002.
II. – L’État verse annuellement à la Polynésie française une dotation globale d’autonomie.
Son montant est fixé à 90 552 000 € pour l’année 2011. Il évolue à compter de 2012 comme la dotation globale de fonctionnement mentionnée à l’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales. La dotation annuelle fait l’objet de versements mensuels.
III. – Le paragraphe 3 de la sous-section 3 de la section 4 du chapitre III du titre VII du livre V de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complété par un sous-paragraphe 5 ainsi rédigé :
« Sous-paragraphe 5
« Dotation territoriale pour l’investissement des communes
« L. 2573-54-1. – Il est institué une dotation territoriale pour l’investissement au profit des communes de la Polynésie française.
« Cette dotation est affectée au financement des projets des communes et de leurs établissements en matière de traitement des déchets, d’adduction d’eau et d’assainissement des eaux usées.
« Son montant est fixé à 9 055 200 € en 2011. Il évolue à compter de 2012 selon les critères définis à l’article L. 2334-32 pour la dotation d’équipement des territoires ruraux.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
Mme la présidente. L’amendement n° II-265, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un nouvel alinéa rédigé :
Une loi organique transpose, après avis de l'Assemblée de la Polynésie française, ces trois instruments financiers dans la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. L’article 77 introduit une refonte complète du cadre juridique et financier qui relie la Polynésie française à l’État.
Il consacre la suppression de la dotation globale de développement économique, la DGDE, instrument contractuel institué par l’État voilà une quinzaine d’années, pour assumer la « dette nucléaire » à l'égard de la Polynésie française, et il crée trois instruments financiers distincts, dont l’un est destiné à financer le fonctionnement de la Polynésie française.
D’une disposition conventionnelle, qui remonte à 2002, nous passons donc à un dispositif législatif.
Cet article marque un tournant historique dans les relations financières entre l’État et la Polynésie française. Il marque surtout la fin d’une ère politique : il sonne le glas de la DGDE, une dotation annuelle dont le montant constant – 150 millions d’euros – avait été figé dans une convention pour le renforcement de l’autonomie économique de la Polynésie française signée le 4 octobre 2002, sous l’empire d’un accord politique entre le chef de l’État et le président de l’effectif polynésien de l’époque.
La reconversion économique de la Polynésie française à la suite de la fermeture du Centre d’expérimentation du Pacifique, la reconversion post-CEP, a été un échec douloureux, qui laissera des séquelles financières économiques durables en métropole et en Polynésie française, comme vous avez pu le constater vous-même, madame la ministre. C’est incontestable !
Cette reconversion économique et sociale devait être assurée notamment par la DGDE, que nous nous apprêtons, mes chers collègues, à supprimer.
L’histoire aurait pu se passer différemment. C’est pour cela que l’État a sa part de responsabilité politique dans ce processus devenu déviant et pour lui-même et pour la Polynésie française. Ce processus, l’État a reconnu qu’il devait le faire cesser. C’est également incontestable.
En supprimant cette dotation – suppression prévue implicitement à l’article 77 –, nous acterons ni plus ni moins cet échec et cette responsabilité politique partagée de l’État ; mais nous ouvrons aussi la porte législative à une ère politique et financière nouvelle, que nous espérons placée sous l’égide des observations franches et mesurées que j’ai faites au début de mon intervention sur ce partenariat rénové avec la Polynésie française.
Le présent amendement vise à sanctuariser le principe même de la création, par le projet de loi de finances pour 2011, des trois instruments financiers prévus aux deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article 77 qui vont régir à titre principal, pour les dix ou vingt prochaines années, les relations financières entre l’État et la collectivité d’outre-mer de Polynésie française.
Ladite collectivité étant régie par un statut d'autonomie au sein de la République française, il convient de garantir au gouvernement polynésien le triple dispositif financier, au travers d’une loi organique.
À ce stade, et d’après la rédaction actuelle du projet de loi de finances pour 2011, rien ne garantit à la collectivité de Polynésie française qu’une nouvelle loi de finances modificatrice ne viendra pas déstabiliser le dispositif prévu par le présent projet de loi.
En définitive, seule une modification de la loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française permettra de consacrer définitivement, et de manière pérenne, les concours financiers de l’État en faveur de cette collectivité.
Je note, à cet égard, que MM. les rapporteurs spéciaux ont déposé un amendement visant à modifier la rédaction de l’article 77. Ils proposent l’insertion d’un nouveau livre au sein du code général des collectivités territoriales. Cette solution ne me satisfait pas, car il n’est pas normal de suppléer la carence budgétaire de l’État par la création d’un nouveau texte et de porter ainsi atteinte, symboliquement, au statut d’autonomie renforcée de la Polynésie française.
Par anticipation, et s’ils me permettent cette liberté, je leur demande donc de bien vouloir retirer leur amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Mon cher collègue, je prends note de votre requête…
L’amendement n° II–265 vise à sanctuariser, dans une loi organique, les trois nouvelles dotations créées par l’article 77 du présent projet de loi de finances. Par ailleurs, notre collègue Richard Tuheiava a présenté un amendement de repli, l’amendement n° II–266, qui vise à ne sanctuariser dans cette éventuelle future loi organique que la dotation globale d’autonomie. Or le législateur ne peut pas lier les mains du législateur organique. Ces dispositions, si nous les adoptions, seraient sans effet normatif.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° II–265 et, par anticipation, sur l’amendement n° II–266.
La commission propose quant à elle d’inscrire la dotation globale d’autonomie dans le code général des collectivités territoriales, en y créant un livre relatif à la Polynésie française. Ce serait un premier pas vers la sécurisation de cette dotation. C’est l’objet de son amendement n °II–8, qui lui paraît donc plus pertinent.
Je rappelle que les collectivités de Mayotte, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon font chacune l’objet d’un livre.
Si l’on opte pour une loi organique dans le cas de la Polynésie française, il faudra, pour toutes les dotations spécifiques aux autres collectivités d’outre-mer, procéder de la sorte. En effet, pourquoi accorder à la seule Polynésie ce que les autres collectivités pourraient elle aussi réclamer ? Il faudrait alors revoir tous les textes.
C’est pourquoi, je le répète, l’amendement de la commission nous paraît plus pertinent.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le Gouvernement partage l’analyse de la commission et émet lui aussi un avis défavorable, à moins que M. Tuheiava ne retire son amendement.
Mme la présidente. Monsieur Tuheiava, l'amendement n° II-265 est-il maintenu ?
M. Richard Tuheiava. Oui, madame la présidente, je maintiens mon amendement.
Nous sommes là face à un problème purement politique. Nous touchons là, véritablement, au nerf financier qui a fait que la Polynésie est ce qu’elle est aujourd’hui. Nous touchons là également au nerf politique, car, par ce tour de passe-passe, auquel je suis favorable sur le principe, nous fermons la porte à une ancienne ère politique que certains d’entre vous, dans cet hémicycle, connaissent. Il n’est pas possible de sécuriser un aléa financier par la seule création d’un livre au sein du code général des collectivités territoriales.
J’ignore si, parmi vous, mes chers collègues, certains ont lu la partie de ce code relative aux communes en Polynésie française : c’est particulièrement illisible. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai déposé, toujours à l’article 77, un amendement visant à modifier certaines dispositions de ce code.
Il existe un passif. C’est pourquoi je ne peux concevoir que les règles régissant les relations financières entre l’État et la Polynésie française soient reléguées dans un livre particulier du code général des collectivités territoriales.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, en septembre dernier, l’assemblée de la Polynésie française a rendu un avis défavorable sur l’article 77 du projet de loi de finances dans sa rédaction actuelle.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-265.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 112 :
Nombre de votants | 325 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 139 |
Contre | 183 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° II-266, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un nouvel alinéa rédigé :
Une loi organique transpose, après avis de l'Assemblée de la Polynésie française, la dotation globale d'autonomie dans la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Comme je l’ai indiqué plus haut, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° II-8, présenté par MM. Doligé et Massion, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéas 6 et 7
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
II.- La sixième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un livre V ainsi rédigé :
« Livre V
« Polynésie française
« Art. L. 6500. - L’État verse annuellement à la Polynésie française une dotation globale d’autonomie.
« Son montant est fixé à 90 552 000 euros pour l’année 2011. Il évolue à compter de 2012 comme la dotation globale de fonctionnement mentionnée à l’article L. 1613-1. La dotation annuelle fait l’objet de versements mensuels. »
La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Cet amendement a déjà été défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.
M. Richard Tuheiava. Par cohérence avec les positions que j’ai défendues à l’instant, je m’abstiendrai.
Il appartient à la majorité sénatoriale de décider d’avaliser ou non ce que je persiste à considérer comme un tour de passe-passe financier en l’inscrivant dans le code général des collectivités territoriales. Pour ma part, je continue de penser que la voie de la loi organique était la bonne. Nous en tirerons les conséquences sur le plan local.
Mme la présidente. L'amendement n° II-267, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après les mots :
au financement
insérer les mots :
, en tout ou en partie,
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Nous nous situons là dans un autre registre.
Cet amendement vise à ouvrir la possibilité, pour les communes de Polynésie française, dans le cadre de la dotation territoriale pour l’investissement des communes, troisième instrument financier créé par l’article 77, de diversifier les sources de financement de leurs projets en matière de traitement des déchets, d'adduction d'eau potable et d'assainissement des eaux usées.
Il convient donc de préciser que cette dotation n'est pas exclusivement consacrée au financement des investissements communaux dans les matières précitées. Cela n’apparaît pas clairement à la lecture de l’article 77.
En effet, il est tout à fait possible – et souhaitable – pour les communes polynésiennes de prétendre à d'autres sources de financement, provenant soit de subventions accordées par l’exécutif polynésien local, soit de divers dispositifs européens, actuels ou à venir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Madame la présidente, pour la clarté des débats, je suggère que notre collègue présente également ses amendements nos II–268 et nos II–269, qui, comme cet amendement, portent sur l’utilisation de la dotation territoriale pour l’investissement des communes.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-268, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer les mots :
et d'assainissement des eaux usées
par les mots :
, d'assainissement des eaux usées et d'adaptation ou d'atténuation face aux effets du changement climatique
L'amendement n° II-269, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer les mots :
et d'assainissement des eaux usées
par les mots :
, d'assainissement des eaux usées et de construction et de rénovation des écoles de l'enseignement du premier degré
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. En effet, ces amendements visent tous trois à modifier l’alinéa 12 de l’article 77.
L’amendement n° II-268 vise à tenir compte d’une déclaration des communes de Polynésie française sur le changement climatique, qui a été adoptée en août 2010 par les maires des 48 communes polynésiennes – couvrant l’ensemble de l’espace maritime – participant au vingt-deuxième congrès des communes de Polynésie française, à Punaauia, à Tahiti.
Les maires de la Polynésie française ont en effet souhaité s’engager politiquement tous ensemble – c’est historiquement inédit dans les collectivités d’outre-mer – dans la lutte contre les effets du changement climatique à l’encontre de leur population locale et prendre en compte la contrainte climatique dans leurs projets d’investissement structurants.
La plupart de ces projets renvoient à ceux que prévoit l’article 77 en matière de traitement de déchets, d’adduction d’eau potable et d’assainissement des eaux usées.
La déclaration des maires polynésiens du mois d’août dernier a d’ailleurs été reprise par les élus d’outre-mer adhérents à l’Association des communes et collectivités d’outre-mer, qui a tenu son congrès à Nouméa voilà quelques jours.
Il convient de prendre acte de cette forte volonté politique des communes polynésiennes et d’ouvrir le panel des projets visé à l’article 77 pouvant bénéficier de la dotation territoriale pour l’investissement des communes aux projets tendant à l’atténuation du changement climatique et à l’adaptation à cette évolution.
L’amendement n° II-269, quant à lui, tend à ajouter aux secteurs de financement qui pourraient faire l’objet d’une ouverture de la part de la Haute Assemblée les projets de construction et de rénovation des écoles de l’enseignement du premier degré qui, je le rappelle, sont de la compétence des communes en Polynésie française.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II–267, II–268 et II–269 ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. L’amendement n° II-267 vise à étendre, sans limitation, les possibilités d’utilisation de la dotation d’investissement destinée aux communes de Polynésie française à d’autres équipements que ceux qui concernent l’eau et les déchets.
Il laisse trop de liberté aux communes, qui doivent concentrer l’utilisation de la dotation versée par l’État aux équipements les plus essentiels.
L’un des objectifs de la réforme proposée à l’article 77 est justement de mieux flécher l’usage des dotations.
Par conséquent, la commission des finances émet un avis défavorable.
L’amendement n° II-268 a pour objet d’étendre les possibilités d’utilisation de la dotation versée par l’État aux communes polynésiennes aux installations « d’adaptation ou d’atténuation face aux effets du changement climatique ».
Cette proposition d’extension ne peut être accueillie favorablement.
Effectivement, faire face aux effets du changement climatique n’est pas de la compétence des communes polynésiennes.
En outre, les besoins en équipements sanitaires et scolaires sont prioritaires.
Enfin, je le rappelle, la mesure proposée vise à mieux cibler l’usage de la dotation versée par l’État.
L’amendement n° II-269 est très proche de l’amendement n° II-229 de notre collègue Éric Doligé, qui vise à étendre les possibilités d’utilisation de la dotation territoriale aux constructions scolaires. Ce dernier paraît plus complet ; c’est pourquoi, monsieur Tuheiava, je vous propose de vous y rallier.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous propose donc d’appeler en discussion, avant la mise aux voix des amendements nos II-268 et II-269, l’amendement n° II-229.
Cet amendement n° II-229, présenté par M. Doligé, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Compléter cet alinéa par les mots :
et des projets de constructions scolaires préélémentaires et élémentaires
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Cet amendement ayant été présenté par mon collègue Marc Massion, je serai bref.
Il est un peu plus précis que l’amendement n° II-269. Il a pour objet de faire en sorte que les 9 millions d’euros de la dotation territoriale pour l’investissement des communes puissent être utilisés en totalité et à bon escient. Si nous élargissons le champ d’utilisation de cette dotation, nous aurons la certitude que celle-ci sera consacrée à des secteurs prioritaires pour la Polynésie française.
Cet amendement qui, en quelque sorte, récrit l’amendement n° II-269, devrait apporter une réponse aux auteurs des amendements nos II-267 et II-268.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.
M. Richard Tuheiava. Il convient de lever un malentendu. M. Massion et moi-même ne faisons pas la même lecture de l’amendement n° II-267. Ce dernier tend non pas à ouvrir des sources illimitées de financement au bénéfice des communes, mais à faire en sorte que les projets en question ne soient pas uniquement financés par la dotation territoriale pour l’investissement des communes.
Je ne vois pas pour quelle raison la Haute Assemblée voterait à l’encontre de l’intérêt d’une collectivité investie du principe de libre administration des collectivités locales et l’obligerait à financer les projets qu’elle entend réaliser dans les domaines définis à l’article 77 uniquement par le biais de la dotation susvisée.
Pourquoi priver les maires polynésiens, notamment, de la possibilité de rechercher, ce qui peut s’avérer souhaitable, d’autres sources de financement que celles que prévoit l’article 77 ?
L’amendement n° II-267, indolore et inoffensif, ne vise qu’à élargir les sources de financement, à supprimer l’exclusivité, et certainement pas à créer une insécurité vis-à-vis du ministère de l’outre-mer ou d’autres ministères vers lesquels les maires ont tendance à se tourner.
J’en viens à l’amendement n° II-268 et j’ai un pincement au cœur. En effet, les maires de l’ensemble des quarante-huit communes de la Polynésie estiment qu’il est temps, parce qu’ils se trouvent au milieu de l’océan Pacifique, de prendre fait et cause pour la lutte contre le changement climatique et d’inscrire ce défi, quasi partagé avec le reste de l’outre-mer, comme cause municipale pour les prochaines années, ce qui entre directement dans le plan d’action et d’adaptation national actuellement piloté par l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, l’ONERC. Or vous rejetez cet amendement au motif que le changement climatique n’est pas de la compétence des communes. Mais alors il ressort de la compétence de qui ? Il relève de la compétence de tout le monde !
Les collectivités et départements d’outre-mer côtiers sont en première ligne face au changement climatique. C’est un défi qui doit être relevé par la nation, l’Union européenne, les exécutifs locaux des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, mais également par les maires investis du pouvoir de gouvernance de proximité.
Comment pourrai-je expliquer aux quarante-huit maires qui se sont lancés dans une démarche consensuelle en faveur de l’adaptation aux effets du changement climatique et de leur atténuation que le Sénat n’a pas accepté que les projets qu’ils seront amenés à mettre en place dans ce domaine puissent être financés par la dotation territoriale pour l’investissement des communes ?
Aussi, je maintiens les amendements nos II-267 et II-268. Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée et l’incite à prendre pleinement conscience du vote que nous allons émettre.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.
M. Michel Magras. Élu d’une collectivité dotée de l’autonomie, je partage totalement les propos de mon collègue Richard Tuheiava. Par conséquent, je soutiendrai les amendements nos II-267 et II-268.
En revanche, il semble bien que l’amendement n° II-269 soit en quelque sorte satisfait par l’amendement de M. Doligé.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Lors du déplacement que Bernard Frimat, ici présent, et moi-même avons effectué en Polynésie française, nous avons visité une multitude de communes, afin de connaître les préoccupations de leurs habitants.
La Polynésie française comprend un très grand nombre d’îles, et la majorité d’entre elles, notamment l’archipel des Tuamotu – bien évidemment, je ne vise pas les îles Marquises, montagneuses – se situent peu ou prou au niveau de la mer. Par conséquent, les changements climatiques les intéressent au premier chef.
C’est pourquoi je suis un peu surpris que la commission refuse de prendre en compte les dispositions relatives au changement climatique, surtout quand les quarante-huit communes susvisées le demandent, et rejette l’amendement n° II-268. Pourtant, la mesure que celui-ci tend à instaurer me paraît aller de soi. Il est sage d’aller dans le sens des élus concernés en tout premier lieu.
C’est pourquoi, rejoignant les propos de mon ami Michel Magras, je voterai l’amendement n° II-268.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Mon ami Christian Cointat et moi-même ayant un certain nombre de divergences politiques, nous siégeons dans des parties assez éloignées de cet hémicycle. Cependant, nous avons eu l’occasion de travailler ensemble. C’est souvent le cas au sein de missions sénatoriales ou lors de déplacements sur le terrain destinés à rencontrer et à essayer de comprendre des élus confrontés à des problèmes inconnus des départements de l’Hexagone et dont, de ce fait, la pensée est très éloignée des schémas habituels.
Je me réjouis de la prise de position de Christian Cointat. Si j’avais fait la même annonce, elle aurait pu être perçue comme une déclaration partisane de soutien à mon ami Richard Tuheiava…
M. Charles Revet. Oh, monsieur Frimat !
M. Bernard Frimat. Michel Magras comme Christian Cointat partagent la même position. Alors, je me tourne vers vous, chers collègues de l’UMP : essayons de ne pas émettre un vote stupidement politique et de répondre aux préoccupations qui, lorsqu’elles sont exprimées par les quarante-huit maires de Polynésie française, doivent conduire la Haute Assemblée à s’interroger.
Ce n’est pas la ligne politique fondamentale du Gouvernement qui est en jeu. Par conséquent, je vous demande non pas de vous rallier à ma position parce que je conçois que ce soit difficile pour vous (Sourires.), mais de suivre Christian Cointat, ce qui devrait être relativement facile.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Marsin, pour explication de vote.
M. Daniel Marsin. À mon tour, je m’interroge, mais au fur et à mesure des différentes explications, je considère comme bien fondés les amendements que nous examinons.
Monsieur Massion, qu’est-ce qui empêche de voter l’amendement n° II-267 ?
Mais peut-être n’ai-je pas bien compris et, dans ce cas, je demande que l’on m’éclaire pour me permettre de déterminer mon vote.
Par son amendement, notre collègue Richard Tuheiava propose que la dotation territoriale soit affectée au financement, en tout ou partie, des investissements des communes en matière de traitement des déchets, d’adduction d’eau et d’assainissement des eaux usées.
Quel problème cela pose-t-il ? Je ne comprends pas, surtout si cette dotation doit être utilisée pour financer d’autres besoins, y compris ceux qui sont liés au changement climatique ou à la rénovation des écoles !
Cette proposition me semble tout à fait pertinente dans la mesure où elle permet de diversifier les sources de financement possibles. Aussi, je ne vois pas pourquoi cet amendement pose problème.
Je le répète, peut-être ai-je mal compris. Mais alors, j’aimerais qu’on m’explique précisément pourquoi il n’est pas possible de financer un projet avec des fonds provenant de plusieurs sources.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Massion, rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial. L’amendement n° II-267 vise à autoriser les communes de la Polynésie française à diversifier les sources de financement de certains de leurs projets, sans qu’il soit précisé ce à quoi sera utilisé le reste de la dotation territoriale. Or le Gouvernement souhaite que les objectifs soient prioritairement ciblés.
Le fait d’étendre la dotation à des fins inconnues ne nous paraît pas recevable.
L’amendement n° II-268 a pour objet d’autoriser le financement par les communes de Polynésie française d’actions destinées à faire face aux effets du changement climatique. Il n’est pas dans notre intention d’interdire à ces collectivités de s’intéresser à ces problèmes, mais la dotation n’a pas vocation à financer ce type d’actions.
Si l’on permet le financement par cette dotation de toutes sortes d’actions, celui des objectifs prioritaires définis par le Gouvernement sera réduit à la portion congrue.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Le montant cumulé des trois dotations prévues par le présent article s’élèvera, en 2011, à 150 millions d’euros en autorisations d’engagement. Ainsi que l’atteste le dépôt des différents amendements que nous venons d’examiner et les interventions des orateurs, la redistribution de cette dotation aux communes soulève quelques difficultés. En conséquence, le Gouvernement a décidé de flécher 9 millions d’euros pour les attribuer directement aux communes : c’est la dotation territoriale pour l’investissement des communes de la Polynésie française. De cette manière, il a la certitude que celles-ci percevront une part minimale de dotation, alors qu’elles ne recevaient rien jusque-là.
En contrepartie, le Gouvernement a limité l’utilisation de cette partie de la dotation au financement de trois types de projets, notamment les projets d’assainissement. Or, à l’usage, il est apparu que les communes ne seraient peut-être pas en capacité de consommer l’intégralité de ces 9 millions d’euros.
C’est pourquoi j’ai déposé à titre personnel un amendement visant à élargir le champ des opérations éligibles à un financement par la dotation territoriale, en y incluant, outre l’assainissement, certains projets de constructions scolaires. En effet, le manque d’équipements scolaires est évident, le gouvernement de la Polynésie française n’y consacrant peut-être pas suffisamment de moyens.
L’État, comme il le fait lorsqu’il signe une convention avec une région, en fléchant ces 9 millions d’euros sur trois objectifs particuliers, permettra que ces fonds soient consommés intégralement.
Rien n’empêche les communes de conduire un projet global contre le réchauffement climatique en signant des conventions avec l’État ou avec le gouvernement de Polynésie française afin d’obtenir des financements spécifiques.
Il n’est pas dans les intentions de la commission d’empêcher les communes d’agir ; elle veille simplement à ce que l’argent de l’État soit bien utilisé grâce à un fléchage particulier sur les questions d’assainissement et les projets de constructions scolaires, domaines dans lesquels le retard est considérable.
Si l’on décide que cette dotation pourra financer une multitude de projets, notamment l’adaptation aux effets du changement climatique, le risque est qu’elle soit utilisée tous azimuts et qu’elle ne suffise plus pour financer des projets bien précis. Le cas échéant, dans deux ans, il manquera de l’argent pour les écoles et il nous faudra accorder des crédits supplémentaires.
Le changement est positif : auparavant, la dotation globale de développement économique était redistribuée par le gouvernement de la Polynésie française sans que les communes en bénéficient réellement. Désormais, l’État accorde directement aux communes une dotation, à charge pour elles de l’utiliser à des fins bien précises.
Mais, après tout, si l’on préfère qu’elle puisse l’utiliser en toute liberté, pourquoi pas…
M. Richard Tuheiava. Madame la présidente, me permettez-vous de reprendre la parole ?
Mme la présidente. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. Richard Tuheiava. Au préalable, je remercie nos collègues du groupe UMP qui se sont manifestés ouvertement pour soutenir cet amendement.
Je vais essayer d’être encore plus pédagogique pour tenter de clarifier les choses et de lever un malentendu.
L’amendement n° II-267 n’a absolument pas pour objet de permettre l’utilisation de la dotation territoriale pour l’investissement des communes pour financer toutes sortes d’actions. Son seul et unique objet est de permettre aux communes de trouver, pour leurs projets, d’autres sources de financement en sus de cette dotation.
Je ferai une autre observation. Si l’on flèche la dotation vers l’assainissement et les déchets, alors il ne faut pas ajouter les projets de constructions scolaires. Auquel cas, parler de fléchage n’aurait plus de sens. Pour ma part, je demande un fléchage sur les actions à mener face au changement climatique, qui sont politiquement prioritaires à l’échelon communal.
La compétence en matière de changement climatique renvoie à la compétence en matière environnementale. Or, depuis la loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française, les communes se sont vu transférer ces compétences environnementales. En la matière, les édiles municipaux ont la possibilité, voire l’obligation, vis-à-vis de la population, d’assumer leur fonction d’élus de proximité.
Comme je l’indiquais plus haut, la question du changement climatique a fait l’objet d’un consensus historique, en rassemblant l’ensemble des maires des quarante-huit communes de Polynésie. Comment pourrai-je leur expliquer le rejet de ma proposition ? (M. le président la commission s’impatiente.) Comment pourrai-je leur expliquer que leur volonté n’a pas été prise en compte pour des raisons qui ne tiennent pas ?
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cette année, la discussion budgétaire est absolument passionnante. Le Gouvernement a agrémenté le projet de loi de finances de très nombreux articles rattachés et chacun d’eux donne lieu à amendements.
Nous avions prévu de consacrer trois heures à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », nous en sommes à cinq heures et demie de débats, et, à mon avis, nous irons jusqu’à six heures, six heures et demie, sept heures, voire plus.
Le seul problème, mes chers collègues, c’est que nous devons impérativement clore l’examen du projet de loi de finances mardi 7 décembre à minuit. Je ne sais plus comment nous allons pouvoir procéder !
Je demande aux auteurs des amendements d’être extrêmement synthétiques et d’adhérer à une démarche prohibant toute forme de chronophagie. Nous avons des discussions absolument passionnantes, je n’en disconviens pas, mais le Gouvernement a transformé la loi de finances en projet de loi portant diverses dispositions d’ordre économique, social, environnemental, culturel, sportif, etc.
Si nous pouvions achever l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » dans l’heure qui vient, nous nous rendrions un grand service. Ainsi, nous aurions l’espoir de ne devoir travailler que samedi après-midi, samedi soir, dimanche matin, dimanche après-midi, dimanche soir et de pouvoir clore nos débats le 7 décembre à minuit.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Si tant est que cette inquiétude soit sous-jacente à ces amendements, je tiens à préciser qu’il ne s’agit nullement de remettre en cause le principe d’autonomie de la Polynésie française.
Les besoins de la Polynésie française sont immenses, notamment dans des domaines prioritaires. Certaines communes ne disposent même pas d’un réseau d’alimentation en eau potable. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité que les financements soient mobilisés en priorité sur ce type d’investissement. À cette fin, M. Doligé propose d’inclure dans le champ des projets éligibles les équipements scolaires.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos II–267 et II–269.
Concernant l’amendement n° II-268, j’entends votre demande, monsieur Tuheiava, et les remarques de Michel Magras. J’admets tout à fait que des actions doivent être menées pour faire face aux effets du changement climatique ; je rappelle néanmoins que, dans le cadre du contrat de projet, 20 millions d’euros sont prévus pour les investissements dans ce domaine.
Cela étant, sur cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-267.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° II-269 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° II-229.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-9 rectifié, présenté par MM. Doligé et Massion, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle est perçue directement par le fonds intercommunal de péréquation mentionné à l’article L. 2573-51.
La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Cet amendement tend à garantir la stabilité du versement aux communes de la dotation territoriale pour l’investissement des communes.
L’idée ayant présidé à la création de la dotation est que le financement des communes ne doit plus être conditionné par les décisions prises par la collectivité de la Polynésie française. Cela nous rapproche du débat que nous avons eu précédemment.
D’après les informations que Marc Massion et moi-même avons recueillies, la dotation prévue pour les communes devrait alimenter directement le Fonds intercommunal de péréquation, le FIP, géré par les représentants des maires, et ne plus transiter par le budget de la collectivité polynésienne.
Cette précision n’est toutefois pas inscrite dans le dispositif proposé et il semble préférable qu’elle le soit, afin de garantir l’effectivité du dispositif.
Tel est l’objet du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° II-270, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV. - Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° À l'article L. 2573-27, la date : « 31 décembre 2015 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2017 » et la date : « 31 décembre 2020 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2022 » ;
2° Au 3° du III de l'article L. 2573-28, la date : « 31 décembre 2020 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2022 » ;
3° Au IV de l'article L. 2573-30, la date : « 31 décembre 2011 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2013 ».
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Il s'agit ici, de nouveau, d’une question sensible. Toutefois, je tiendrai compte des observations formulées par M. le président de la commission, c'est-à-dire que je m’efforcerai, en présentant cet amendement, d’être synthétique.
La loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française a prévu le transfert aux communes des compétences environnementales que j’ai évoquées il y a un instant, à savoir le traitement des déchets, l’adduction d’eau potable et l’assainissement des eaux usées.
Si ce sujet n’était pas aussi important, je n’aurais pas déposé d’amendement, et, de surcroît, je n’aurais pas retardé nos débats avec un scrutin public.
En fait, pour l’exercice de ces compétences, le code général des collectivités territoriales fixe des échéances – la première, qui concerne le traitement des déchets, est la fin de l’année 2011 –, qui s’appliquent aux quarante-huit communes polynésiennes. C'est la raison pour laquelle l’article 77 prévoit la création, en sus de deux autres dotations, d’une dotation territoriale pour l’investissement des communes.
Un fléchage des crédits a été mis en place précisément pour faire face à cette urgence et permettre aux collectivités de respecter les délais prévus par le code général des collectivités territoriales, à savoir la fin de l’année 2011 pour le traitement des déchets, celle de l’année 2015 pour l’adduction d’eau potable et celle de l’année 2020 pour l’assainissement des eaux usées.
Ce sont ces trois délais que je demande à la Haute Assemblée d’assouplir. Je ne réclame pas d'ailleurs qu’ils soient prolongés sans limite : je propose un ajournement raisonnable, en l’occurrence de deux ans.
En effet, le code général des collectivités territoriales est applicable en Polynésie française depuis deux ans – depuis le 1er mars 2008 très exactement. Nous sommes à la fin de l’année 2010 et les communes n’ont pas encore reçu les fonds nécessaires ! Or nous sommes justement là pour créer un transfert financier à partir du budget de l’État.
Il est anormal que les quarante-huit communes polynésiennes soient assujetties à des délais qui, bien qu’ils soient devenus anachroniques, perdurent.
Certes, on qualifiera peut-être cet amendement de cavalier budgétaire. Messieurs les rapporteurs spéciaux, vous vous demandez sûrement ce que fait cette disposition dans un projet de loi de finances. J’ai déjà évoqué cette question dans le cadre du débat sur la départementalisation de Mayotte. Il était alors une heure trente du matin.
Voilà moins d’un mois que nous avons étendu à l’outre-mer une ordonnance portant ratification de certaines dispositions de ce fameux code général des collectivités territoriales et que ce projet de loi de finances a été déposé, lequel contient des dispositions visant à financer ces compétences nouvelles à partir d’une dotation de l’État.
Je ne suis donc absolument pas hors-sujet. Je crois même qu’il s'agit d’une question pertinente, qu’il convient de poser le plus rapidement possible, car pour les communes polynésiennes le temps est compté. Si nous n’agissons pas au travers de cet amendement, nous le ferons, prochainement, par le biais d’une proposition de loi.
Je soumets donc cet amendement à la sagacité de MM. les rapporteurs, mais m’en remets également à la sagesse du Gouvernement et de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Cher collègue, nous avons laissé passer cet amendement pour que vous puissiez exposer vos motivations. Toutefois, les dates d’entrée en vigueur des compétences que vous évoquez ont été fixées par une loi organique. Vous souhaitez modifier cette dernière au travers de la loi de finances, ce qui n’est pas possible. Votre amendement n’est donc pas recevable.
En outre, nous avons accordé tout à l'heure des crédits qui devraient permettre à ces communes d’appliquer ces dispositions quand elles entreront en vigueur et d’exercer leurs nouvelles compétences.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Virapoullé. À écouter mon collègue de Polynésie française, je tombe des nues !
Quand les responsables polynésiens ont demandé pour leur territoire l’autonomie, j’ai pensé que celle-ci leur permettrait de gérer leurs collectivités de façon responsable et complètement décentralisée. Toutefois, je m’aperçois qu’ils disposent de moins de marge de manœuvre que les élus de ces collectivités décentralisées que sont les départements d’outre-mer.
Par ailleurs, et ce sera ma deuxième observation, dans le domaine des eaux usées, plusieurs maires de la Réunion ont été mis en examen – à tort, à mon avis – parce qu’ils n’ont pu respecter, non par mauvaise volonté, mais pour des raisons techniques tenant à l’instruction des dossiers, les délais prévus par les directives communautaires. Celles-ci sont d'ailleurs applicables outre-mer et non en métropole. Nous mettons donc ces installations aux normes progressivement, alors que nous avions les moyens de le faire d’un seul coup.
Pour avoir été maire pendant très longtemps, je peux certifier que notre collègue, au travers de son amendement, pose un véritable problème. Je ne sais pas comment le résoudre – monsieur le rapporteur spécial, vous êtes mieux informé que moi à cet égard –, mais il faut donner satisfaction à M. Tuheiava sur ce point.
En effet, madame la ministre, quand nos collègues maires de Polynésie nous demandent un peu d’oxygène pour ce qui concerne les délais de mise aux normes de leur collectivité, en matière de déchets ou d’assainissement, et que nous rejetons leur demande, ils pensent que nous les méprisons et que nous ignorons leurs difficultés. Nous ne devons pas entrer dans cette logique. Trouvez le véhicule législatif adapté, mais donnez-leur satisfaction.
Symboliquement, je soutiens l’initiative de M. Tuheiava et voterai son amendement, car nous ne pouvons ignorer les difficultés de nos collègues maires de Polynésie.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-270.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 113 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 170 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 77, modifié.
(L'article 77 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 77
Mme la présidente. L'amendement n° II-252, présenté par MM. Gillot, Antoinette, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 77, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi de finances, le Gouvernement présente un rapport au Parlement relatif aux modalités d'affectation au bénéfice des outre-mer des économies réalisées par les réformes du régime de défiscalisation des investissements outre-mer par la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ainsi que celles de l'indemnité temporaire de retraite et de la taxe sur la valeur ajoutée non perçue récupérable.
La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Cet amendement vise à vérifier que les économies réalisées par les différentes réformes de la défiscalisation des investissements outre-mer, celle de l'indemnité temporaire de retraite et celle de la TVA non perçue récupérable, ont bien été réaffectées à l’outre-mer.
En effet, pour chacune de ces réformes, le Gouvernement s'était engagé à ce que les économies réalisées permettent d'abonder les crédits en faveur des outre-mer.
Enfin, le plafonnement des niches réalisé par la loi de finances pour 2009, dont la défiscalisation des investissements outre-mer, était présenté comme le moyen de financer le revenu de solidarité active, le RSA. Or ce dernier n'entrera en vigueur outre-mer qu'en janvier 2011.
Un rapport d'information remis au Parlement à la suite de cette nouvelle loi de finances permettrait donc d'évaluer l'efficacité, pour les économies ultramarines, de ces réformes successives.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur les modalités de réaffectation au profit de l’outre-mer des économies réalisées par les réformes du régime de défiscalisation des investissements en outre-mer dans les lois de finances pour 2009 et 2010, ainsi que par les réformes de l’indemnité temporaire de retraite et de la TVA dite « non perçue récupérable ».
La réforme de l’indemnité temporaire de retraite a bien fait l’objet de déclarations visant à réaffecter l’économie réalisée au profit de l’outre-mer. Toutefois, la réforme étant extrêmement progressive, aucune des économies que ce dispositif aurait permis de réaliser n’est aujourd’hui clairement identifiée.
Les autres réformes n’ont pas prévu que les fonds économisés soient réaffectés au profit de l’outre-mer.
En outre, la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, a entraîné globalement un coût net pour les finances publiques d’environ 25 millions d’euros en dépenses fiscales supplémentaires. Il n’est donc pas pertinent de demander la réinjection de ces économies.
La commission émet par conséquent un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Je souhaite simplement apporter une précision aux propos du rapporteur.
Monsieur Gillot, l’article 74 de la LODEOM a créé une commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer. Celle-ci est en cours de constitution et, par anticipation, le ministère de l’outre-mer a diligenté une mission d’inspection pour évaluer l’impact de la défiscalisation, notamment la réforme de l’indemnité temporaire de retraite. Aussi, un rapport supplémentaire serait sans doute inutile.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Gillot, l'amendement n° II–252 est-il maintenu ?
M. Jacques Gillot. Dans l’attente des conclusions de la mission d’inspection évoquée par Mme la ministre, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II–252 est retiré.
L'amendement n° II-260, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 77, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2011, une étude présentant les différentes possibilités d'augmenter la participation financière de l'activité spatiale au développement des collectivités territoriales, en particulier guyanaises, tout en préservant sa compétitivité.
La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette.
M. Jean-Etienne Antoinette. L’an dernier, je proposais à la Haute Assemblée d’adopter un amendement tendant à demander une étude sur les possibilités d’une amélioration de la participation du centre spatial de Kourou au budget de la collectivité de Guyane.
Cet amendement avait été suggéré par une proposition de la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer en 2009. Notre collègue Éric Doligé, son rapporteur, avait alors identifié ce problème, tout comme le conseil interministériel de l’outre-mer, qui envisageait, en 2009 également, d’entamer des négociations en vue d’augmenter la contribution du secteur spatial à l’économie guyanaise.
Ma demande de rapport me paraissait légitime, dans la mesure où la dernière étude de l’INSEE sur le sujet, qui remonte à 2008, reposait sur des données datant au mieux de 2003. Il ne me semblait donc pas inopportun de disposer de propositions s’appuyant sur des informations précises comme autant de fondements précieux pour le travail de revalorisation de la participation financière du secteur spatial aux finances de la Guyane.
Dans la loi de finances pour 2010, le Gouvernement s’était engagé à réaliser une telle étude avant le 1er octobre 2010 au sein d’un rapport plus général sur la situation financière des collectivités d’outre-mer. Or ce rapport n’a pas été remis à nos assemblées.
Les besoins de la collectivité de Guyane augmentent sans cesse et le régime de la participation financière du centre spatial à leur développement n’a pas été modifié, alors que les données et les acteurs du secteur ont évolué.
Il serait donc souhaitable que le Gouvernement remette cette année le rapport, qui doit prévoir différentes possibilités d’amélioration de la participation financière du centre spatial de Kourou aux actions de la collectivité de Guyane, et ce sans remettre en cause, bien sûr, la compétitivité des entreprises dans un milieu devenu de plus en plus concurrentiel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. La commission a le plaisir d’émettre un avis favorable sur cet amendement.
En effet, le rapport dont il est question était une préconisation de la mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer ainsi qu’un objectif fixé par les comités interministériels de l’outre-mer. De plus, nous ne disposons que de peu d’informations fiables sur cette question.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. J’aimerais apporter une information complémentaire.
Monsieur Antoinette, il était effectivement prévu qu’un rapport serait rédigé sur le financement des collectivités locales. Celui-ci est en cours de finalisation et il me sera remis avant la fin de l’année. Je serai donc en mesure de vous le transmettre au cours du premier trimestre 2011.
Quant à la contribution du CNES, le Centre national des études spatiales, elle s’élève aujourd'hui à 26,7 millions d’euros pour la période allant de 2007 à 2013. À partir des premiers éléments du rapport, nous avons entamé un travail de revalorisation avec les dirigeants de l’établissement pour élargir les possibilités d’intervention.
Je ne suis donc pas opposée à votre proposition et c’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 77.
Article 77 bis (nouveau)
I. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 3211-7 est supprimé ;
2° Le livre Ier de la cinquième partie est complété par un titre V ainsi rédigé :
« TITRE V
« DISPOSITIONS PARTICULIÈRES AU DOMAINE PRIVÉ DE L’ÉTAT EN GUADELOUPE, EN MARTINIQUE ET À LA RÉUNION
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 5151-1. – Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion, l’État peut procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’avantage financier résultant de la décote est exclusivement et en totalité répercuté sur le prix de revient des logements locatifs sociaux réalisés sur le terrain aliéné.
« L’État peut également procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à l’aménagement d’équipements collectifs. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’acte d’aliénation prévoit en cas de non-réalisation du programme de logements locatifs sociaux ou de l’aménagement d’équipements collectifs dans le délai de cinq ans à compter de l’aliénation la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur, ainsi que le montant des indemnités contractuelles applicables.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » ;
3° Au 3° de l’article L. 5211-1, après la référence : « L. 3111-2, », est insérée la référence : « L. 3211-7, » ;
4° L’article L. 5241-1-1 est abrogé ;
5° La section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre II de la cinquième partie est complétée par un article L. 5241-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 5241-6. – À Saint-Pierre-et-Miquelon, l’État peut procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’avantage financier résultant de la décote est exclusivement et en totalité répercuté sur le prix de revient des logements locatifs sociaux réalisés sur le terrain aliéné.
« L’État peut également procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à l’aménagement d’équipements collectifs. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’acte d’aliénation prévoit en cas de non-réalisation du programme de logements locatifs sociaux ou de l’aménagement d’équipements collectifs dans le délai de cinq ans à compter de l’aliénation la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur, ainsi que le montant des indemnités contractuelles applicables.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » ;
6° La sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre III de la cinquième partie est complétée par un article L. 5342-13 ainsi rédigé :
« Art. L. 5342-13. – À Mayotte, l’État peut procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’avantage financier résultant de la décote est exclusivement et en totalité répercuté sur le prix de revient des logements locatifs sociaux réalisés sur le terrain aliéné.
« L’État peut également procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à l’aménagement d’équipements collectifs. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
« L’acte d’aliénation prévoit en cas de non-réalisation du programme de logements locatifs sociaux ou de l’aménagement d’équipements collectifs dans le délai de cinq ans à compter de l’aliénation la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur, ainsi que le montant des indemnités contractuelles applicables.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
II. – À Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, l’État peut procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements, dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur, ou à la réalisation d’aménagement d’équipements collectifs. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
L’avantage financier résultant de la décote est exclusivement et en totalité répercuté sur le prix de revient des logements locatifs sociaux réalisés sur le terrain aliéné.
L’acte d’aliénation prévoit en cas de non-réalisation du programme de logements locatifs sociaux ou de l’aménagement d’équipements collectifs dans le délai de cinq ans à compter de l’aliénation la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur, ainsi que le montant des indemnités contractuelles applicables.
III. – En Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française et dans les îles Wallis et Futuna, l’État peut procéder à l’aliénation de terrains de son domaine privé à un prix inférieur à la valeur vénale par application d’une décote lorsque ces terrains sont destinés à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements, dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur, ou à la réalisation d’aménagement d’équipements collectifs. Le montant de la décote est fixé à 100 % de la valeur vénale du terrain.
L’avantage financier résultant de la décote est exclusivement et en totalité répercuté sur le prix de revient des logements locatifs sociaux réalisés sur le terrain aliéné.
L’acte d’aliénation prévoit en cas de non-réalisation du programme de logements locatifs sociaux ou de l’aménagement d’équipements collectifs dans le délai de cinq ans à compter de l’aliénation la résolution de la vente sans indemnité pour l’acquéreur, ainsi que le montant des indemnités contractuelles applicables.
IV. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application des II et III du présent article.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-207 rectifié, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 7, 15 et 21, première phrase
Remplacer les mots :
programmes de construction comportant essentiellement des logements, dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur
par les mots :
programmes de construction de logements, dont 50 % au moins de logements sociaux tels que définis au II de l’article 87 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale
II. - Alinéas 26 et 29, première phrase
Remplacer les mots :
programmes de construction comportant essentiellement des logements, dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur
par les mots :
programmes de construction de logements, dont 50 % au moins sont réalisés en logements à vocation sociale tels qu’ils sont définis par la réglementation locale en vigueur
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. L’article 77 bis, introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement, prévoit la mise en œuvre d’un engagement du Président de la République annoncé voilà un an lors du conseil interministériel de l’outre-mer : la cession gratuite de terrains du domaine privé de l’État pour construire des logements sociaux et des équipements collectifs.
Cette mesure est positive et représente un effort financier important de l’État.
L’article pose cependant des problèmes de rédaction.
Tout d’abord, aux termes de ce dernier, les programmes de construction concernés devraient comprendre « essentiellement » des logements, mais aucune précision n’est donnée sur la part que cela représenterait.
Ensuite, parmi ces logements, la barre minimale de logements sociaux est fixée à seulement 30 %.
L’amendement vise à ce que soit respecté l’engagement initial du Président de la République en prévoyant que les programmes de construction qui bénéficieraient d’une cession de terrain à titre gratuit devraient être des programmes de logements comportant au minimum 50 % de logements sociaux.
Je signale qu’un autre alinéa de l’article – et j’y insiste, madame la ministre – prévoit déjà que ces aliénations de terrains peuvent également être destinées à l’aménagement d’équipements collectifs.
Dans ces conditions, je ne vois pas à quoi fait référence le mot « essentiellement ». Madame la ministre, si vous aviez pu nous donner des éléments sur les terrains que le Gouvernement entend céder aux termes de cet article, peut-être aurions-nous mieux compris la formulation choisie.
En tout état de cause, il me semble que le législateur se doit d’encadrer suffisamment un dispositif qui constitue un effort important de l’État. C’est pourquoi il faut prévoir que cette disposition favorise précisément la construction de logements et d’équipements collectifs, et non autre chose.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° II-378, présenté par MM. Lise, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5 de l'amendement n° II-207 rectifié.
Compléter cet alinéa par les mots :
, dont les deux tiers sont réalisés en logements locatifs sociaux visés au 5° du I de l'article 199 undecies C du code général des impôts
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Le présent sous-amendement vise à préciser que, dans la part de 50 % réservée aux logements à vocation sociale, au moins deux tiers doivent être véritablement sociaux. Il s’agit donc d’exclure du programme les habitations financées par des PLS, les prêts locatifs sociaux, ou des PLSA, les prêts sociaux location-accession, de manière à le réserver à des logements locatifs sociaux ou très sociaux.
Mme la présidente. L'amendement n° II-259, présenté par MM. Lise, Antoinette, Gillot, S. Larcher, Patient, Tuheiava et les membres du groupe Socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéas 7, 15, 21, 26 et 29
Remplacer (cinq fois) les mots :
dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux tels qu'ils sont définis par la réglementation locale en vigueur
par les mots :
dont 30 % au moins sont réalisés en logements locatifs sociaux visés au 5°du I de l'article 199 undecies C du code général des impôts
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. L’objet de cet amendement est strictement identique à celui du sous-amendement n° II-378. Si la proportion retenue de logements construits est de 30 %, il s’agit de préciser expressément que les logements sociaux seront exclusivement des logements locatifs sociaux ou très sociaux, ce qui exclut par conséquent les logements intermédiaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° II-378 et sur les amendements nos II-207 rectifié et II-259 ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. Sur le sous-amendement n° II-378 et l’amendement n° II-259 de M. Lise, la commission émet un avis défavorable, car elle considère que le dispositif qu’ils prévoient sera extrêmement difficile à mettre en œuvre.
En effet, comment pourra-t-on, sur la durée, vérifier que toutes les dispositions proposées seront respectées ?
En revanche, l’amendement n° II-207 de la commission des affaires sociales me paraît intéressant.
Tout d’abord, la référence au mot « essentiellement » peut, il est vrai, poser problème et contrevenir à l’objectif de construction de logements sur les terrains cédés par l’État.
Ensuite, la commission des affaires sociales souhaite porter à 50 % la part de logements sociaux, fixée dans le texte, par le Gouvernement, à 30 %. Nous n’y voyons pas d’inconvénient et nous nous en remettons à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Comme l’a rappelé le rapporteur spécial, l’adoption des amendements nos II-259 et II-207, ce dernier étant éventuellement modifié par le sous-amendement n° II–378, pourrait être source de difficultés compte tenu de la complexité des mesures qui y sont visées. Je me permets de vous mettre en garde, mesdames, messieurs les sénateurs, car celles-ci pourraient en effet être très délicates à appliquer.
En effet, lors du débat à l’Assemblée nationale, les députés ont souhaité préciser que, sur les terrains cédés par l’État, il fallait construire prioritairement des logements sociaux. Nous avons entendu leur demande et c’est pourquoi nous avons retenu le taux de 30 %, qui constitue déjà une référence pour la défiscalisation des investissements dans le logement social outre-mer.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à M. Adrien Giraud, pour explication de vote.
M. Adrien Giraud. Je voudrais simplement signaler que l’ensemble des villages de Mayotte se trouvent dans la zone des cinquante pas géométriques, qui sont des terrains de l’État.
Dans ces conditions, madame la ministre, si le taux effectivement retenu pour les logements sociaux est de 30 %, que se passera-t-il ?
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Je dirai simplement un mot sur l’amendement n° II–207 rectifié de la commission des affaires sociales.
Pour avoir eu l’occasion de me rendre, au cours des derniers mois, dans plusieurs départements et collectivités d’outre-mer, je peux témoigner que la représentation nationale doit vraiment tout mettre en œuvre pour y favoriser la construction en plus grand nombre de logements locatifs sociaux.
On a tendance à laisser cette question aux parlementaires ultramarins, en considérant que celle-ci relève de leur seule responsabilité. Nous autres, parlementaires de la métropole, nous sommes malheureusement peu au fait de ces réalités, réalités que nous ne découvrons qu’une fois sur place.
Dans les collectivités ultramarines, les logements sociaux sont construits notamment grâce à la défiscalisation et à la LBU, la ligne budgétaire unique. De fait, leur coût est malheureusement trop élevé, beaucoup plus qu’il ne l’est en métropole.
Pour avoir rencontré des organismes opérant sur ces territoires très spécifiques, je peux vous affirmer que le déficit de foncier y est criant, sans commune mesure avec la situation que nous connaissons en métropole.
Par conséquent, je considère que nous aurions tout intérêt à voter l’amendement de la commission des affaires sociales, car même en fixant la proportion de logements sociaux à 50 % sur les terrains cédés par l’État – et j’espère vraiment que ces cessions seront nombreuses –, le déficit perdurera.
Je souhaiterais donc que nous ne descendions pas en-dessous d’un tel pourcentage.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Larcher, pour explication de vote.
M. Serge Larcher. Je soutiendrai cet amendement dès lors qu’il est bien clair qu’il s’agit du domaine privé de l’État,…
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Tout à fait !
M. Serge Larcher. … et non du domaine public de l’État.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. C’est pour rassurer notre collègue de Mayotte !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-378.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas le sous-amendement.)
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° II-259 n'a plus d'objet.
L'amendement n° II-258, présenté par MM. S. Larcher, Patient, Lise, Gillot, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer les mots :
le délai de cinq ans à compter de l'aliénation
par les mots :
le délai de cinq ans à compter du démarrage des travaux
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Cet amendement vise à prévoir que la résiliation de la vente est effective dans un délai de cinq ans à compter du début des travaux, ce qui permet de mieux prendre en compte les délais de montage de ces opérations, qui peuvent être très complexes. En effet, s’il peut s’écouler entre douze mois et dix-huit mois entre les études, l’appel d’offres et le début des travaux, de nombreux dérapages peuvent se produire une fois le chantier en cours et les délais sont souvent dépassés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Aux termes de l’article 77 bis du projet de loi de finances pour 2011, en cas de non-réalisation, après un délai de cinq ans, des opérations pour lesquelles les terrains de l’État ont été cédés, la cession est annulée.
L’objet de cet amendement est de prévoir que ce délai de cinq ans court à partir non de la cession du terrain, mais du début des travaux de construction. Que se passera-t-il si les travaux ne sont pas engagés ? La vente ne sera alors jamais résolue.
En outre, on peut considérer qu’un projet d’aménagement qui n’est pas réalisé cinq ans après la cession du terrain n’était ni réaliste ni viable.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-261, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - La deuxième phrase du 3° de l'article L. 5142-1 est supprimée.
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette.
M. Jean-Etienne Antoinette. Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° II–262.
Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l'amendement n° II-262, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, et ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - À la deuxième phrase du 3° de l'article L. 5142-1, les mots : « à la date de la première cession gratuite » sont remplacés par les mots : « pour chaque période de dix années à compter de la date de la première cession gratuite ».
... - Les conséquences financières pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Jean-Etienne Antoinette. Ces deux amendements visent à permettre à l’État d’apporter son soutien aux collectivités guyanaises, sans qu’il lui en coûte en termes de dotation ou de revenus fiscaux, tout en leur offrant la possibilité de projeter dans l’avenir leur politique foncière.
Le code général de la propriété des personnes publiques limite actuellement la cession du domaine privé de l’État destinée à la constitution de réserves foncières au profit des collectivités locales de Guyane et de leurs groupements à dix fois leur superficie au moment de la première cession.
Je rappelle cependant que cette première cession, gratuite, existe sous d’autres formes pour la Guyane, où l’État possède près de 90 % du territoire. Or la plupart de ces régimes ne sont assortis d’aucune limitation, qu’il s’agisse de la mise en valeur de terrains agricoles, de terrains affectés à l’aménagement d’équipements collectifs ou à la construction de logements sociaux. Les forêts du domaine privé de l’État peuvent être cédées gratuitement et sans limite si leur rôle social ou environnemental le justifie ou encore si des communautés d’habitants en tirent traditionnellement leurs moyens de subsistance.
Dans ces conditions, pourquoi imposer une limitation pour la seule constitution de réserves foncières ?
Si les collectivités peuvent réaliser des équipements collectifs ou des logements sociaux, elles ne pourraient ni prévoir des projets urbains, une politique d’extension ou d’accueil d’activités économiques ni favoriser le développement des loisirs ou du tourisme.
Cette limitation, qui est une exception au sein du régime de cession gratuite du domaine privé de l’État en Guyane, est particulièrement pénalisante. Fixer pour seuil la superficie de la collectivité bénéficiaire lors du premier transfert a un effet dissuasif : les collectivités hésitent alors à s’engager dans cette voie de peur de compromettre leur avenir.
En supprimant cette limite qui s’apparente à une entrave déguisée de la liberté d’administration des collectivités locales guyanaises, l’État ne prend aucun risque : il peut toujours refuser de céder gratuitement son domaine privé.
Il s’agit simplement de donner plus de flexibilité et de pouvoir aux services déconcentrés de l’État, pour reprendre les propos tenus par Jean-Paul Virapoullé ce matin. De plus, si l’État cède un terrain et que la collectivité ne respecte pas la finalité en justifiant la cession, le mécanisme de l’article L. 5145-1 prévoit le retour automatique et gratuit du bien dans le giron de l’État.
Mes chers collègues, en adoptant cet amendement, vous témoignerez aux collectivités de Guyane votre confiance dans leur capacité à décider de leur avenir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II–261 et II–262 ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Nous ne disposons pas d’éléments sur l’efficacité du dispositif actuel de cession des terrains en Guyane. Par conséquent, nous ne savons pas s’il existe des cas où la limite de superficie prévue par la loi actuelle a été atteinte. Si tel est le cas, la suppression de cette limitation pourrait être envisagée puisque, quoi qu’il arrive, la cession est toujours tributaire d’une décision de l’État.
C'est la raison pour laquelle la commission sollicite l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. L'amendement n° II-261 vise à constituer des réserves foncières. C’est pourquoi prévoir la possibilité de céder des terrains plafonnés à dix fois la superficie des parties agglomérées de la commune et supprimer le plafond des cessions gratuites pour constituer des réserves foncières iraient à l’encontre de l’ambition du Gouvernement et des besoins de la population guyanaise.
Le foncier ne peut être immobilisé pour des réserves foncières. La priorité du Gouvernement est de favoriser la construction de logements sociaux.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
En revanche, les dispositions prévues à l'amendement n° II-262 évitent le risque d’immobilisation du foncier de l’État tout en assouplissant les conditions de transfert.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement et lève le gage.
Mme la présidente. Il s’agit donc de l'amendement n° II-262 rectifié.
Monsieur Antoinette, l'amendement n° II-261 est-il maintenu ?
M. Jean-Etienne Antoinette. Oui, madame la présidente.
Le développement de la Guyane ne se fera pas exclusivement par la construction de logements sociaux. Les collectivités locales ont également besoin de diversifier leurs domaines, notamment par des projets économiques ou touristiques.
Par ailleurs, le préfet a toujours la possibilité d’accepter ou de refuser cette cession. Il s’agit là d’un pouvoir discrétionnaire. L’adoption de l’amendement n° II-261 donnerait aux pouvoirs déconcentrés plus de marge s’ils souhaitent céder aux collectivités locales un terrain d’une plus grande superficie. Avec un accroissement de la population de plus de 3,5 % par an, vous imaginez bien que les besoins d’aménagement de la Guyane sont importants.
Cela étant, je remercie le Gouvernement d’émettre un avis de sagesse sur l'amendement n° II-262 rectifié.
Mme la présidente. Quel est, en définitive, l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur. Pour ces deux amendements, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 77 bis, modifié.
(L'article 77 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 77 bis
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-208 est présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° II-255 est présenté par MM. S. Larcher, Massion, Patient, Lise, Gillot, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 77 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les réductions d’impôt prévues aux articles 199 undecies C et 217 undecies du code général des impôts peuvent être cumulées avec l’octroi de subventions et de prêts pour la construction, l’acquisition et l’amélioration de logements locatifs aidés.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-208.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Lors de l’examen de le LODEOM, le Gouvernement a souhaité introduire un nouveau dispositif de défiscalisation en faveur du logement social. De nombreux parlementaires étaient hésitants, préférant à de nouvelles dépenses fiscales la ligne budgétaire unique, c'est-à-dire les dotations budgétaires. C’est pourquoi le Parlement a également inscrit dans la loi le principe selon lequel la ligne budgétaire unique reste le socle du financement du logement social dans les départements d'outre-mer, à Mayotte, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Parallèlement, le Gouvernement s’est engagé à ce que le nouveau dispositif de défiscalisation en faveur du logement social puisse se cumuler avec les crédits de la ligne budgétaire unique, afin de conserver une souplesse et une efficacité aussi larges que possible.
Pourtant, une circulaire du ministère chargé de l’outre-mer en date du 1er juin 2010 laisse peser un doute. Elle pose en effet comme principe que le recours à la défiscalisation doit conduire à une modération de la subvention, voire à son absence totale. En outre, elle invite les préfets à limiter le recours au double financement.
Cette circulaire est clairement contraire à la volonté du législateur. En ce sens, la commission des affaires sociales rejoint les conclusions du rapport d’information sur la mise en application de la LODEOM que nos collègues députés Claude Bartolone et Gaël Yanno ont remis voilà quelques semaines.
Par conséquent, cet amendement vise à poser le principe d’un cumul entre la défiscalisation et les subventions ou les prêts. Son adoption permettra de lever toute ambiguïté juridique et pratique.
Madame la ministre, vous avez rencontré le 12 novembre dernier des représentants des bailleurs sociaux et êtes arrivée, me semble-t-il, à la même conclusion. La disposition prévue par cet amendement ne pourra donc que vous aider à défendre vos positions lors d’éventuelles discussions interministérielles, notamment avec les services de Bercy.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Larcher, pour présenter l'amendement n° II-255.
M. Serge Larcher. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. La commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques. Toutefois, il ne faudrait pas que l’on assiste à des abus.
J’ai écouté avec beaucoup d’attention les éclaircissements qu’a apportés Mme la ministre sur ce sujet. Le cumul ne doit pas être systématique, mais il faut que cette possibilité existe. Il revient à la loi de le préciser explicitement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Je crois qu’il y a une incompréhension.
La circulaire du 1er juin dernier ne remet pas en cause le principe du cumul du financement du logement social en outre-mer, à savoir la ligne budgétaire unique et la défiscalisation. J’ai eu l’occasion de répondre à plusieurs reprises sur ce sujet, notamment lors de questions d’actualité au Gouvernement. J’ai apporté de nouvelles garanties aujourd'hui en indiquant qu’une circulaire complémentaire serait rédigée afin de lever toute ambiguïté juridique. Cela étant, si l’adoption de cet amendement permet d’apporter une nouvelle précision de nature à rassurer la représentation nationale, le Gouvernement y est favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-208 et II-255.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 77 bis.
L'amendement n° II-209, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 77 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le huitième alinéa du I de l’article 217 undecies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Son assiette peut être différente de celle prévue au II de l’article 199 undecies C. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de nature technique.
L’assiette de dépenses éligibles à la défiscalisation et à l’impôt sur le revenu a été définie par un décret du mois de janvier 2010. Elle est plus restrictive que celle qui a été définie antérieurement pour l’impôt sur les sociétés. Or les services fiscaux semblent appliquer les dispositions prévues dans ce décret non seulement pour l’impôt sur le revenu, mais aussi pour l’impôt sur les sociétés.
Cette interprétation modifie l’équilibre des projets en cours et limite de fait les programmes de construction éligibles à l’impôt sur les sociétés.
Par conséquent, cet amendement vise à inscrire dans la loi que ces assiettes peuvent être différentes, selon qu’il s’agit de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Rien dans la loi n’implique que le décret déterminant l’assiette de la défiscalisation du logement social ait un impact sur les dossiers en cours au titre des autres dispositifs de défiscalisation prévus pour l’impôt sur les sociétés.
Par conséquent, si un problème d’interprétation se pose, il convient que le Gouvernement s’engage à le résoudre. C’est pourquoi la commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. La question renvoie à l’assiette pour le calcul de la subvention au titre de la ligne budgétaire unique et pour l’agrément au titre de la défiscalisation.
La réunion qui s’est tenue le 12 novembre dernier, rue Oudinot, avait pour objet de régler cette question de l’assiette et de faire en sorte qu’elle puisse être identique. Sur ce sujet, le ministère de l’outre-mer et le ministère du budget envisagent de constituer un seul et même dossier, un dossier type. En partant sur des bases identiques, nous éviterons cette difficulté.
Ces précisions étant apportées, je vous suggère, madame le rapporteur pour avis, de retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est, en définitive, l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur. Même avis.
Mme la présidente. Madame le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-209 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-209 est retiré.
L'amendement n° II-210, présenté par Mme Payet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 77 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le VII de l’article 199 undecies C du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les mots : « délivré par le ministre chargé du budget » sont supprimés ;
2° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :
« Dans les départements d’outre-mer, lorsque le montant total du programme immobilier est inférieur ou égal à quinze millions d’euros, cet agrément est délivré par le directeur régional des finances publiques du département dans lequel les logements sont réalisés. En Nouvelle-Calédonie, dans les collectivités d’outre-mer concernées et au-delà de ce montant dans les départements d’outre-mer, cet agrément est délivré par le ministre chargé du budget. » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le dossier de demande de cet agrément préalable est constitué des mêmes documents que celui destiné à la demande de subvention au titre de la ligne budgétaire unique. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Cet amendement concerne l’agrément que l’État accorde avant une défiscalisation destinée au logement social.
Cet agrément est essentiel et je ne souhaite pas le remettre en cause.
Simplement, les bailleurs sociaux sont confrontés aux lourdeurs de l’administration centrale. Ainsi, Bercy bloque aujourd'hui de nombreux dossiers de manière injustifiée.
Cet amendement vise donc à augmenter le nombre de dossiers traités par les préfectures au niveau local en relevant le seuil de la déconcentration des dossiers de 10 millions d’euros à 15 millions d'euros pour un programme.
En outre, il prévoit que les différents dossiers demandés par l’administration pour la ligne budgétaire unique et pour la défiscalisation soient composés des mêmes documents. Il s’agit d’une mesure de simplification.
Ces deux éléments ont également été discutés lors de la réunion que vous avez eue, madame la ministre, avec les bailleurs sociaux le 12 novembre.
Cet amendement, qui me paraît aller, une fois encore, dans le sens de vos conclusions, ne peut que vous aider dans vos discussions interministérielles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Cet amendement soulève plusieurs objections de la part de la commission des finances.
D’une part, cette question ne relève pas de la loi. Comme l’indique l’exposé des motifs de l’amendement, c’est aujourd’hui un simple arrêté qui fixe la répartition entre le niveau central et le niveau déconcentré. On peut penser que l’administration fiscale est la mieux à même de savoir quelle procédure est la plus efficace.
D’autre part, il n’y a pas, semble-t-il, de raison de traiter de manière spécifique le logement social au regard de la procédure d’agrément.
La commission des finances est donc assez réservée sur cet amendement, et, en son nom, je demanderai à Mme Payet de bien vouloir le retirer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Je voudrais apporter une précision. Comme je l’ai dit tout à l’heure, les ministères du budget et de l’outre-mer se sont mis d’accord, au cours de la réunion interministérielle du 12 novembre, pour mettre au point ce dossier type.
De plus, nous acceptons le principe du relèvement du seuil de 10 millions d'euros au niveau de l’instruction des dossiers, de manière à faciliter la procédure et à réduire les délais d’instruction. L’affaire est en cours de discussion.
Au vu de ces éléments, sans doute pourriez-vous, madame le rapporteur pour avis, retirer votre amendement.
Mme la présidente. Madame le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-210 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. Compte tenu des engagements qu’a pris Mme la ministre, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-210 est retiré.
Article 77 ter (nouveau)
L’article 26 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le décret mentionné à la première phrase du présent alinéa tient compte, pour la détermination du montant de l’aide, de l’absence de classement des hôtels à Saint-Pierre-et-Miquelon. » ;
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice de l’aide n’est pas conditionné au bénéfice des dispositions prévues aux articles 199 undecies B et 217 undecies du code général des impôts. » ;
3° Le 3° est abrogé. – (Adopté.)
Article 77 quater (nouveau)
Les entreprises exerçant une activité de caractère hôtelier installées et exerçant leur activité au 1er avril 2009 dans les départements de la Guadeloupe et de la Martinique, ainsi qu’à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, peuvent bénéficier, dans le cadre de l’application des dispositions de l’article 32 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, de plans d’apurement pouvant inclure des dettes échues jusqu’au 31 décembre 2009 et les cotisations à échoir au titre de l’année 2010.
Dans le cadre de ces plans, la possibilité d’abandon partiel prévue au II du même article 32 est ouverte pour les dettes de cotisations patronales de sécurité sociale échues au 31 octobre 2009.
Les moindres ressources effectivement constatées pour les organismes sociaux donnent lieu à compensation par l’État à hauteur de l’abandon partiel mentionné au précédent alinéa à compter de la réception par l’État des pièces justificatives.
Les cotisations patronales de sécurité sociale dues au titre de l’année 2010 sont prises en compte dans les plans d’étalement des paiements pour un montant égal à celui déclaré pour la même période durant l’année 2009. Le solde des cotisations patronales effectivement dues au titre de l’année 2010 est remboursé ou acquitté avant la fin du premier semestre de l’année 2011.
La validité des plans est subordonnée au reversement effectif, à bonne date, de la part salariale des cotisations, au respect des obligations relatives aux déclarations et au versement des cotisations et contributions sociales auxquelles est tenu un employeur au titre de l’emploi de personnel salarié ainsi qu’au paiement et au respect des échéances de ces plans.
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.
Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis. L’article 77 quater, introduit à l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, prévoit de prolonger les plans d’apurement des dettes sociales pour le secteur hôtelier des Antilles. Ces plans avaient été adoptés dans la LODEOM.
Madame la ministre, je souhaite vous poser plusieurs questions sur cet article. Pourquoi la Guyane et la Réunion ne sont-elles pas concernées ? Pourquoi Saint-Martin et Saint-Barthélemy le sont-ils, alors qu’ils ne l’étaient pas dans la LODEOM ? Plus précisément, comment prolonger des dispositifs pour les entreprises de ces deux dernières collectivités alors qu’elles ne bénéficiaient pas du plan initial ?
Par ailleurs, puisque cela entre dans le champ de compétences de notre commission, nous nous sommes interrogés sur la compensation par l’État des pertes de recettes des organismes de sécurité sociale. L’article la conditionne à la réception par l’État de « pièces justificatives ». Or ces pièces ne sont mentionnées nulle part ailleurs.
Les mystères de l’article 40, auquel nous sommes également soumis, font que notre amendement, qui visait à supprimer cette condition, a été déclaré irrecevable. C’est pourquoi je suis amenée, madame la ministre, à vous interroger sur les modalités d’application de cet article : comment l’État entend-il compenser aux organismes de sécurité sociale la perte de recettes consécutive à cet article ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le principe de la compensation que vous évoquez, madame le rapporteur pour avis, a été retenu dans le cadre des dispositions prises notamment pour faire face à la crise de 2009, laquelle avait été à l’origine de difficultés pour les entreprises ultramarines.
Ce dispositif a été effectivement mis en place. Nous avons décidé de le proroger, à titre exceptionnel, d’une année. Dans le cadre du budget pour 2011, les enveloppes ont été dimensionnées en vue de prendre en compte cette mesure dérogatoire pour une année supplémentaire.
Mme la présidente. L'amendement n° II-256, présenté par MM. S. Larcher, Patient, Lise, Gillot, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, seconde phrase
Remplacer les mots :
avant la fin du premier semestre de l'année 2011
par les mots :
avant la fin du second semestre de l'année 2011
II. - Les conséquences financières pour l'État et la Sécurité sociale résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. J’ai déposé cet amendement après m’être entretenu avec des professionnels de l’hôtellerie aux Antilles. Ce secteur est dans une situation très difficile. Elle est la conséquence des énormes problèmes auxquels il a dû successivement faire face, du cyclone Dean à la grève du début de l’année 2009, en passant par l’affaire du chlordécone.
Tous ces événements ont fini par faire une très mauvaise publicité pour les Antilles, provoquant une telle désaffection de la clientèle, métropolitaine, en particulier, que nos structures hôtelières sont aujourd’hui en très grande difficulté.
Cet amendement, qui vise à y remédier, a pour objet de repousser le remboursement du solde des cotisations patronales effectivement dues au titre de l'année 2010 du premier semestre 2011 au second semestre 2011.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. On nous demande, une fois encore, de reporter un délai. La commission des finances veille à ce que le paiement des cotisations patronales et salariales acquittées en outre-mer demeure bien conforme au droit commun.
Grâce à des plans d’apurement, les dettes sociales d’un certain nombre d’entreprises ont été diminuées, voire supprimées. Pour celles dont les dettes demeurent, il serait quand même assez logique qu’elles les paient dans les temps. Nous avons accordé un délai, et on nous en redemande un nouveau ! Nous ne sommes pas favorables à cette demande et souhaitons que la date proposée, la fin du 1er semestre 2011, soit maintenue.
La commission des finances est défavorable à votre amendement, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Je voudrais compléter les propos de M. le rapporteur spécial pour rappeler un chiffre : l’ensemble des exonérations de charges sociales représentent déjà plus de 1 milliard d'euros pour 2011.
Un effort important a été fait, notamment dans le secteur touristique, puisque nous avons repoussé d’une année le terme de ces plans d’apurement. Ce n’est pas en reportant encore ce délai qu’on va résoudre les problèmes des entreprises ultramarines ni aider l’économie en outre-mer. Il faut employer d’autres leviers pour soutenir l’activité économique. La solution que vous proposez, monsieur le sénateur, n’est pas forcément celle qui permettra de sauver les entreprises ultramarines.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Serge Larcher, pour explication de vote.
M. Serge Larcher. Les réponses de M. le rapporteur spécial et de Mme la ministre sont des réponses mécaniques qui ne tiennent pas compte de la réalité ! Il n’est pas question de ne pas payer ! Il est question de tenir compte d’une réalité !
Je vous ai donné des éléments, madame la ministre. J’ai entendu vos propos. Fort bien ! Vous les répéterez devant les professionnels de l’hôtellerie lors de votre prochain déplacement en Martinique !
Moi, ce que je vous dis, c’est qu’il faut prendre en compte leurs difficultés. Je n’invente rien ! Il y a une réalité dont il faut tenir compte !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 77 quater.
(L'article 77 quater est adopté.)
Article 77 quinquies (nouveau)
I. – Dans les départements d’outre-mer, les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, les éditeurs de services de télévision en clair à vocation locale diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique en application de l’article 96 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dont le produit d’exploitation est inférieur à 5 millions d’euros hors taxes, bénéficient jusqu’au 31 décembre 2013 d’une aide au financement d’une partie de leurs coûts de diffusion. Cette aide est versée annuellement de façon dégressive. Le montant cumulé de l’aide sur trois ans ne peut excéder 200 000 € par bénéficiaire.
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article et notamment le plafond de cette aide. – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 77 quinquies
M. le président. L'amendement n° II-222 rectifié, présenté par MM. Patient, S. Larcher, Gillot, Antoinette, Lise, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 77 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La seconde phrase du second alinéa de l'article 48 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer est supprimée.
II. - Les conséquences financières résultant pour le département de la Guyane de la suppression de sa part de dotation globale garantie, sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - Les conséquences financières résultant pour l'État du II sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Sur la question de la répartition de l’octroi de mer, la Guyane se distingue des autres départements d’outre-mer puisque le conseil général bénéficie, aux côtés des communes, d’une part correspondant à 35 % du montant total de la « dotation globale garantie » de la taxe d’octroi de mer. Cette part a été plafonnée, à partir de 2005, à 27 millions d’euros, montant perçu par le département en 2003.
Exceptionnelle à l’origine, cette disposition prise par une loi de finances en 1974 à la suite des difficultés financières du conseil général s’est vu conforter par une nouvelle loi en 2004. C’est une disposition « unique et inique » qui a permis à l’État de récupérer des recettes destinées aux communes pour résorber le déficit du conseil général, plutôt que de prendre les mesures adaptées relevant de la solidarité nationale, instituant ainsi une péréquation entre collectivités pauvres.
En effet, cette mesure pénalise très lourdement les communes de Guyane. Les plus pauvres de France, elles disposent de 334 euros par habitant, contre une moyenne de 394 euros dans les autres départements d’outre-mer. Elles sont, pour la plupart, en situation de déficit et tout ce qu’on leur propose, ce sont des prêts de restructuration aux taux du marché.
Dans son rapport sur la situation des départements d’outre-mer, la mission sénatoriale a évoqué cette question en soulignant « qu’elle pouvait être utilement réétudiée en cherchant toutefois des ressources de substitution au département ».
Mon amendement tend à compenser cette perte pour le conseil général par une augmentation à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement. Cela ne serait que justice, car la dotation globale de fonctionnement accordée au département de la Guyane est inférieure à la moyenne des départements appartenant à la même strate démographique.
En 2007, elle était de 216 euros par habitant, contre 278 euros en moyenne pour la strate. La dotation globale de fonctionnement accordée au département de la Guyane en 2010 s’établit à 244 euros par habitant, contre 411 euros par habitant pour la moyenne des trois autres départements d’outre-mer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Cet amendement porte sur la répartition du produit de l’octroi de mer en Guyane. Actuellement, avant redistribution aux communes, le département bénéficie d’un prélèvement à hauteur de 27 millions d'euros. L’amendement vise à supprimer ce prélèvement.
Le dispositif proposé pose problème, car, s’il était adopté, il réduirait les ressources du département de la Guyane à hauteur de 27 millions d’euros sans proposer aucune ressource de substitution.
En outre, la suppression de ce prélèvement, qui date de 1977, déstabiliserait les finances départementales. Décider d’avoir immédiatement recours au financement de l’État pose évidemment problème.
La commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Monsieur le sénateur, nous avons eu l’occasion d’évoquer ce sujet à plusieurs reprises. Vous posez la question de la dotation globale de fonctionnement de la Guyane. Elle a été calculée au même titre que les autres dotations pour l’ensemble des régions françaises.
Cela étant, pour la Guyane, l’objectif consiste plutôt à mesurer l’impact qu’aura demain la mise en place de la collectivité unique dès lors que cette dernière exercera de nouvelles compétences et qu’elle aura fait ses choix.
C'est la raison pour laquelle, lors de l’entretien qui s’est déroulé en présence du chef de l’État, ce dernier a demandé que le ministère de l’outre-mer examine, conjointement avec le ministère de l’intérieur, les conditions de l’attribution éventuelle d’une dotation, dans la mesure où un impact se révélerait évident lors de la mise en place de la collectivité. Nous en sommes là.
Pour l’instant, il ne m’est donc pas possible d’émettre, au nom du Gouvernement, un avis favorable sur votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote.
M. Georges Patient. Permettez-moi d’insister. Les communes de Guyane sont, en effet, dans une situation particulière, voire dérogatoire au droit commun. On l’a bien vu, s’agissant de l’octroi de mer : leur situation n’est pas celle des communes des autres départements d’outre-mer – Martinique, Guadeloupe et Réunion –, qui perçoivent entièrement cette dotation.
Il y a encore une autre mesure unique et inique qui est celle de la part superficiaire de la dotation globale de fonctionnement.
Tout à l’heure, certains ont demandé que le droit commun s’applique à tous les départements de France, quels qu’ils soient, métropolitains ou d’outre-mer. La Guyane en est donc !
Or voilà une décision qui pénalise encore les communes de Guyane. La dotation superficiaire est plafonnée uniquement pour les communes de Guyane à hauteur de 3 euros, alors qu’elle a même été portée à 5 euros pour les communes de montagne de métropole.
Si l’on ajoute aux 27 millions d’euros du prélèvement du conseil général les 16 millions d’euros de la dotation superficiaire, cela représente tout de même 43 millions d’euros qui échappent ainsi aux communes de Guyane. Lorsque l’on connaît leur situation financière difficile, on est en droit de s’interroger sur cette forme de discrimination.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette, pour explication de vote.
M. Jean-Etienne Antoinette. La situation en Guyane est assez particulière, pour ne pas dire spécifique.
Pourquoi insistons-nous ? D’une certaine façon, vous nous dites que la balle est dans notre camp et que la solution est à trouver entre le conseil général et les communes.
Je souhaite faire un bref rappel historique. En effet, en 1977, les conseils généraux et leur exécutif étaient en réalité incarnés par les préfets. La décision fut donc prise à l’époque par le Gouvernement. C’est pour cette raison que nous insistons pour que cette compensation puisse venir de la dotation globale de fonctionnement, et non au détriment des communes ou du conseil général.
À mon sens, il faut reverser les 27 millions d’euros aux communes qui en ont réellement besoin sans pour autant priver le conseil général des moyens financiers qui lui sont également nécessaires.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-222 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-230, présenté par M. Doligé, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 77 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au III de l'article 88 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007, la date : « 1er janvier 2011 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2012 ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'Agence française du développement du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Il s’agit d’une demande de report d’un an, concernant la mise en œuvre de la taxe additionnelle sur les carburants en Guyane.
Un certain nombre d’éléments me conduisent à vous faire cette proposition : les tensions existant sur les prix en Guyane, les efforts considérables réalisés par la collectivité, enfin la mission parlementaire conduite par M. Ollier, qui a constaté la situation.
En outre, nous avons souhaité attendre la position de la Commission européenne sur la dérogation à l’application de la directive relative aux carburants. En effet, toute cette problématique vient du fait qu’il a été demandé à la Guyane de se mettre en conformité avec la réglementation européenne pour les carburants.
Comme chacun sait, compte tenu de sa position géographique, la Guyane ne peut pas s’approvisionner facilement sur le continent sud-américain. Appliquer de surcroît des normes en matière de carburants qui soient conformes aux exigences européennes crée des surcoûts.
Nous pouvons constater que la situation en Guyane est caractérisée par un certain nombre d’aberrations. Le Gouvernement a donc engagé des discussions pour voir s’il était possible d’obtenir une dérogation, raison pour laquelle nous demandons une année de sursis.
Je suis habituellement opposé aux reports, mais je vous demande ce soir de voter cet amendement, à titre exceptionnel.
M. Charles Revet. C’est la sagesse !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. Cet amendement touche un sujet sensible pour nos compatriotes guyanais, à savoir les prix de l’essence. Il fait suite à plusieurs reports de l’entrée en vigueur de cette taxe. Il serait par conséquent souhaitable, madame la ministre, d’obtenir du Gouvernement un engagement ferme sur la date d’entrée en vigueur de la taxe et l’échéancier de remboursement proposé pour l’Agence française de développement.
Sous ces réserves, l’avis est favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable, madame la présidente, et je lève le gage.
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° II-230 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 77 quinquies.
L'amendement n° II-263, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 77 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2011, une étude sur les possibilités de participations financières de l'État autres que fiscales ayant pour objectif l'évolution des prix à la baisse des abonnements aux services numériques payés par les consommateurs finaux, dans une perspective de garantir la continuité numérique et l'égal accès de tous aux moyens de communication entre les résidents en territoire ultra marin et ceux de métropole.
L'amendement n° II-264, présenté par MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 77 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2011, une étude présentant les conséquences de la défiscalisation des câbles sous-marins assurant le trafic des données numériques vers les territoires ultra-marins sur le prix des abonnements aux services numériques payés par les consommateurs finaux.
La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette, pour présenter les deux amendements.
M. Jean-Etienne Antoinette. Je profite de cette intervention pour revenir sur l’amendement qui vient d’être adopté. J’approuve ce report, mais il faudra néanmoins se poser un jour la question des intérêts. Qui va les payer ? Nous pouvons certes repousser le remboursement du prêt, mais il reste que les intérêts de ce dernier devront être payés.
Mais j’en viens à mes deux amendements.
L’importance du développement et du désenclavement numérique de l’outre-mer n’est plus à démontrer. Intégrer nos territoires au réseau commun, c’est réduire l’éloignement qui caractérise bien trop souvent nos relations avec la métropole. La continuité territoriale est bien évidemment constituée par la mobilité des personnes, c’est-à-dire la possibilité, pour les résidents d’outre-mer, de se déplacer et d’étudier sur tout le territoire français. Mais la proximité quotidienne, réelle et tangible, est également assurée par le raccordement aux moyens modernes d’information et de communication.
Entre nos terres éloignées, la continuité – avec la métropole et au sein de nos régions, particulièrement la Guyane ou la Polynésie, où la population est répartie en une géographie complexe – passe par l’accès aux technologies numériques.
Or, si les territoires sont reliés, encore faut-il que les populations d’outre-mer puissent avoir accès à la téléphonie et l’Internet à des prix abordables.
Les offres en cette matière pour les populations d’outre-mer demeurent plus chères qu’en métropole, et pour un service moindre. Ainsi, les prix que fixent les opérateurs pour une connexion à l’Internet, les appels illimités et la télévision par ADSL, varient entre 69 euros et 89 euros. En métropole, des offres identiques sont deux fois moins chères, puisque comprises entre 29 euros et 39 euros !
L’isolement géographique, la taille réduite du marché, l’absence de concurrence effective bénéficiant au consommateur, sont les causes identifiées de cet important décalage.
La réponse de la loi pour le développement économique des outre-mer pour le désenclavement numérique des collectivités d’outre-mer est la défiscalisation, sous des conditions assez restrictives, de la pose des câbles sous-marins de communication.
Cette mesure est-elle nécessaire ? Certainement. Il faut développer ces moyens d’accès au haut débit, mais la seule défiscalisation ne promet aucune amélioration rapide pour la continuité numérique.
Sur le marché de la pose, de l’entretien et de la mise à niveau des câbles d’acheminement des données numériques, seul un petit nombre d’acteurs aux compétences très spécifiques peuvent intervenir.
Ces infrastructures sous-marines sont développées par des consortiums internationaux d’opérateurs privés, au terme de processus de gestation longs et complexes nécessitant un investissement financier important, de l’ordre de la centaine de millions d’euros.
Or le coût de construction d’un câble sous-marin est couvert par les seuls revenus tirés de la demande locale pour les services « haut débit ». Le recours à ces câbles a donc pour conséquence que les prix payés par les consommateurs pour utiliser ces services sont plus élevés en outre-mer qu’en métropole.
Nous demandons donc une étude sur les possibilités de participations financières positives de l’État ayant pour objectif l’évolution à la baisse des prix des abonnements aux services numériques payés par les consommateurs ultramarins.
Nous espérons que les propositions qui en résulteront seront rapidement appliquées afin d’assurer un égal accès aux services numériques à nos concitoyens d’outre-mer et de métropole.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc Massion, rapporteur spécial. L’amendement n° II-263 vise à demander au Gouvernement un rapport sur les actions pouvant être mises en œuvre pour réduire le prix des services numériques en outre-mer.
Je rappelle que des initiatives sur ce sujet ont déjà été prises : la pose des câbles sous-marins de télécommunications a été défiscalisée, et une disposition a été introduite dans le présent projet de loi de finances sur la télévision numérique terrestre.
L’avis de la commission est donc défavorable.
L’amendement n° II-264 vise à demander au Gouvernement un rapport sur les conséquences de la défiscalisation de la pose de câbles sous-marins, que nous avons votée dans la LODEOM.
Ce dispositif de défiscalisation est relativement récent - la loi pour le développement économique des outre-mer a été adoptée il y a dix-huit mois -, et il concerne des opérations très lourdes à mettre en œuvre.
Par conséquent, un rapport me semble prématuré. En outre, cela pourra être une question traitée dans le cadre du comité de suivi de la mission commune d’information sur les DOM.
L’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Pour compléter les propos de M. le rapporteur spécial, je rappellerai que l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, a bien évidemment soulevé toutes ces questions dans son rapport, et a également indiqué qu’il ne fallait pas envisager une intervention de l’État. Je crois qu’il est préférable de privilégier les règles de concurrences.
Nous devons permettre aux populations ultramarines de bénéficier d’une offre beaucoup plus large. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre des lois de défiscalisation, à subventionner et favoriser la réalisation de ces câbles sous-marins.
Il n’est donc pas nécessaire de donner suite à votre amendement concernant la demande d’aide financière en faveur de nos compatriotes ultramarins.
S’agissant des conséquences de la défiscalisation, j’ai dit tout à l’heure qu’une commission d’évaluation des politiques publiques avait déjà mission de mesurer l’impact de la défiscalisation en outre-mer. Un rapport supplémentaire serait donc redondant.
Pour cette raison, j’émets aussi un avis défavorable sur l’amendement n° II-264.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Etienne Antoinette, pour explication de vote.
M. Jean-Etienne Antoinette. Madame la ministre, vous savez très bien que le marché de la téléphonie et de l’Internet est étroit outre-mer, en particulier en Guyane. Par conséquent, la concurrence ne fera pas baisser le prix de la communication, dans la mesure où le marché n’a pas atteint une taille critique. Je pense donc qu’il nous faut imaginer d’autres voies, que notre demande d’étude supplémentaire aiderait à déterminer. Et cela ne mange pas de pain !
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Larcher, pour explication de vote.
M. Serge Larcher. Nous arrivons, après six heures de débats, presque au terme de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ». Madame la ministre, j’apporterai une explication de vote au nom du groupe socialiste et apparentés.
Nous avons attendu et travaillé toute cette après-midi, espérant que nous obtiendrions quelques satisfactions sur nos amendements. Nous n’avons pas trouvé, dans le projet de budget, les réponses que nous attendions. On ne peut pas demander plus à ceux qui ont moins, même si nous reconnaissons que nous devons aussi, dans les départements d’outre-mer, prendre notre part de solidarité dans la crise actuelle.
Malgré toute la sincère considération que nous avons pour vous, madame la ministre, l’intérêt bien compris de nos départements et des outre-mer commande de voter contre votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Charles Revet. Vous avez tort !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».
Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante.)
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et article 87 quater).
La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la ministre des sports, madame la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative, permettez-moi tout d’abord de vous adresser mes chaleureuses salutations, à l’heure où vous allez défendre devant le Parlement, pour la première fois, et en compagnie de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative – trois membres du Gouvernement, quel honneur ! – le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Comme je l’ai souligné devant la commission des finances, cette mission a toujours été modeste. Mais, cette année, il est plus adéquat de dire qu’elle se réduit comme peau de chagrin.
Ainsi, l’ancien programme de soutien de la mission, le programme 210, Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative, a disparu pour être fusionné au sein du programme 124, Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative, figurant dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Madame la ministre, j’ai bien reçu la réponse de vos services pour justifier cette évolution. D’après leurs explications, la mutualisation de moyens au sein d’un programme support unique aux ministères sociaux vise, avant tout, une gestion plus économe dans un contexte budgétaire fortement contraint. Cela permettrait également une simplification des procédures ainsi qu’une meilleure utilisation des ressources humaines.
Néanmoins, je voudrais faire deux observations.
D’une part, sur le plan des principes, la construction d’un programme de soutien unique relève davantage d’une vision administrative et du respect des périmètres ministériels, d’ailleurs remis en cause à l’occasion du récent changement de gouvernement, que de la logique de mission propre à la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.
D’autre part, sur un plan pratique, ce changement aboutit à vider la mission « Sport, jeunesse et vie associative » d’une grande partie de sa substance, plus précisément de la moitié de ses crédits et de la totalité de ses emplois.
Dans un tel format, avec seulement 420,9 millions d’euros de crédits de paiement, se pose la question de la pertinence même du maintien de la mission, qui représente pourtant une véritable politique publique et possède donc sa propre légitimité.
Pour en venir aux crédits eux-mêmes, les deux programmes subsistants, le programme 219, Sport, et le programme 163, Jeunesse et vie associative, suivent deux trajectoires très différentes. La diminution globale de 6,3 % des crédits de paiement de la mission résulte, en effet, de la conjonction de deux évolutions fortes et opposées, déjà constatée en 2010 : alors que les crédits du programme Sport subissent une baisse importante, de 19,1 %, ceux du programme Jeunesse et vie associative affichent une forte augmentation, de 10 %.
Sans doute, madame la ministre, ferez-vous valoir que ce budget doit s’apprécier en consolidant, outre les crédits du programme Sport, les moyens affectés à l’établissement public CNDS, le Centre national pour le développement du sport, ainsi que le financement du programme support.
Ainsi considéré, l’effort financier de l’État en faveur du sport diminue de 3 %, ce qui est difficile pour la plupart des acteurs mais ne paraît pas complètement anormal en période de restriction budgétaire.
Toutefois, la tendance lourde de déresponsabilisation du ministère et de débudgétisation, au travers de l’utilisation, à tout-va et pour tout type d’action, du CNDS, s’accentue encore ; j’y reviendrai en présentant l’amendement n° II-22 de la commission des finances.
J’aborderai un tout dernier point sur le sport. À propos du problème du Stade de France, déjà étudié à de nombreuses reprises, je relève que le budget affecté à la pénalité à verser par l’État au consortium gestionnaire au titre de l’absence de club résident passe de 7,5 millions d’euros en 2010 à 5 millions d’euros en 2011, sans que cette diminution soit expliquée dans les documents budgétaires. Madame la ministre, disposez-vous d’éléments pour justifier cette évolution ?
J’en viens maintenant au programme 163, Jeunesse et vie associative.
Je relève, tout d’abord, la poursuite de l’effort financier engagé sur ce programme depuis l’année dernière. L’augmentation des crédits de 10 % à périmètre constant que j’ai évoquée fait suite à une hausse de plus de 60 % en 2010, ce qui fait figure d’exception dans le contexte budgétaire actuel. Les crédits du programme s’élèvent ainsi à 212,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.
Ensuite, ce budget reflète des choix politiques clairs, prioritairement engagés autour des deux outils que sont le service civique, d’une part, et le FEJ, le fonds d’expérimentations pour la jeunesse, d’autre part. Même s’il est permis de s’interroger sur les conséquences de certains choix, qui affectent notamment les postes FONJEP et les projets éducatifs locaux, il faut bien constater que l’accroissement des moyens ne s’est pas accompagné d’une logique de saupoudrage, de nombreuses actions considérées comme non prioritaires subissant des diminutions de crédits parfois notables.
J’évoquerai plus en détail le service civique en présentant l’amendement de la commission des finances.
Pour leur part, les crédits du FEJ diminuent, passant de 45 millions d’euros à 25 millions d’euros. Cette évolution s’inscrit dans une trajectoire globale et doit être tempérée par la réserve existante, de l’ordre de 30 millions d’euros. Toutefois, cette évolution pose clairement la question de la pérennité d’une telle structure.
En outre, nous ne savons pas ce que deviendront les expérimentations une fois qu’elles auront été évaluées, surtout si elles sont concluantes. Or il s’agit là d’une question d’importance : l’objectif d’autonomie financière à terme est-il assigné aux acteurs des expérimentations, ou bien ce dispositif est-il inflationniste par nature, en créant de la dépense publique ?
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d’adopter les crédits de cette mission, modifiés par l’amendement n° II-22 de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du RDSE, de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Martin, rapporteur pour avis.
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Madame la ministre des sports, je veux tout d’abord vous dire combien nous sommes satisfaits de voir que le sport relève désormais d’un ministère de plein exercice. Pour tous ceux qui, comme nous, attachent une certaine importance au sport, nous en sommes ravis !
Néanmoins, je ne ferai pas preuve d’une grande originalité en disant que le budget « Sport » du projet de loi de finances pour 2011 s’inscrit, comme en 2010, dans un cadre budgétaire très contraint.
En effet, après une baisse de plus de 7 % de 2009 à 2010, les crédits de paiement du programme 219, Sport, sont encore en forte baisse, de 15 %.
Pour la première fois depuis la création de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », le budget du programme 219 est inférieur à celui du programme 163, Jeunesse et vie associative, mais aussi à celui du Centre national pour le développement du sport, dont les crédits devraient s’élever à 247,4 millions d’euros en 2011.
Vous êtes, certes, à la tête d’un ministère de plein exercice, mais vous devrez gérer un budget fortement en baisse, inférieur donc à celui dont dispose le président du CNDS : c’est pour le moins étrange !
J’évoquerai, tout d’abord, les politiques menées par le ministère au titre de la promotion du sport pour tous.
Il s’agit principalement de la politique de soutien aux actions nationales des fédérations sportives, dotée de 21,6 millions d’euros en 2011. Celle-ci vise à remplir certains objectifs fixés à la politique sportive, notamment en faveur des publics prioritaires comme les personnes handicapées ou les publics socialement défavorisés.
La promotion du handisport doit effectivement constituer une priorité pour le ministère. C’est un moyen d’intégration extraordinaire pour les personnes handicapées, notamment lorsqu’il est pratiqué dans des clubs qui les réunissent avec les valides. Lorsque l’on a la chance de voir des images de telles compétitions à la télévision, un constat s’impose : on vibre tout autant de leurs victoires et de leurs exploits !
M. Claude Bérit-Débat. Joël Jeannot !
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Les ressources prévisionnelles affectées au CNDS sont, quant à elles, estimées à 247,4 millions d’euros pour 2011 et sont donc nettement supérieures à celles qui sont affectées au ministère des sports.
Les subventions accordées par le CNDS constituent un instrument essentiel de financement, à l’échelon territorial, de la politique du sport pour tous. Par ailleurs, elles prennent en compte les grands objectifs correspondant aux orientations générales fixées par le ministère. Au vu de l’importance des sommes engagées, je crois qu’il serait utile, madame la ministre, que nous disposions d’informations plus précises sur le contrat de performance du Centre, et sur sa capacité à remplir les objectifs qui lui sont fixés.
S’agissant du sport de haut niveau, nous disposons d’un budget en forte baisse, de presque 20 %.
La raison en est simple : la suppression du droit à l’image collective, le DIC, a entraîné la disparition des crédits qui y étaient attachés. Un « DIC sinon rien » a souhaité nous dire l’État, ce que j’avais annoncé en séance publique l’année dernière devant ceux qui le pourfendaient.
Tout cela dans un contexte de crise du football – ne parlons pas des états généraux ! Les clubs professionnels ont en effet perdu environ 180 millions d’euros la saison dernière, dont 40 millions d’euros seraient imputables à la suppression du DIC. Pourtant, en dépit du fait qu’il s’agit d’une industrie dont la main-d’œuvre est très bien payée, et à ce titre critiquée, elle est importante pour notre économie. Une étude récente a ainsi montré que l’ensemble de la filière pèse 4,3 milliards d’euros et représente environ 25 000 emplois, et des emplois qui ne sont pas délocalisables.
Les multiples rapports sur le sport professionnel, notamment ceux de M. Éric Besson et de Philippe Séguin, contenaient de nombreuses propositions de soutien à cette filière qui pourraient se substituer au DIC. Madame la ministre, avez-vous des premières idées en la matière ? Je pense aussi à la retraite des sportifs.
S’agissant de la lutte contre le dopage, qui constitue un cheval de bataille de la commission de la culture, depuis une dizaine d’années, je suis toujours très favorable à l’attribution d’une ressource affectée à l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD. En effet, s’agissant d’une autorité indépendante, il apparaît souhaitable qu’elle dispose d’une ressource propre. Y êtes-vous favorable ? Où en êtes-vous sur ce dossier ?
Enfin, 700 000 euros sont consacrés à la prévention et à la lutte contre les incivilités dans le sport. Cette somme est affectée au soutien des fédérations de supporters et aux contrats locaux de sécurité. Je suis extrêmement satisfait de ces engagements, en dépit de la modestie des sommes concernées. En effet, les actions prévues localement correspondent aux préconisations que j’avais faites dans mon rapport sur les associations de supporters et sont également conformes aux propositions du récent Livre vert du supportérisme récemment remis à Rama Yade. Au-delà des dispositifs répressifs, il faut en effet engager et soutenir le dialogue avec les supporters dans une démarche ouverte et pédagogique ainsi que créer des instances locales de dialogue qui s’appuient sur des chartes élaborées par les clubs.
Toutes ces dispositions vont dans le bon sens.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le rapporteur pour avis, il faudrait songer à conclure.
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Je conclus, madame la présidente.
Madame la ministre, vous sentez-vous tenue par les préconisations du rapport et comptez-vous les mettre en œuvre ?
En conclusion, et en dépit des baisses de crédits constatées, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a donné un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs au sport de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le programme Jeunesse et vie associative regroupe 212,4 millions d’euros en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2011, soit une hausse de 10 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2010.
Cette progression confirme celle à laquelle nous avions assisté l’année dernière, avec une hausse de plus de 60 % des crédits.
Il y a eu une prise de conscience gouvernementale en 2010 – je l’avais reconnue – de l’importance des sommes nécessaires au soutien des politiques en faveur de la jeunesse et de la vie associative. J’avais aussi espéré que l’on ne vide pas les autres politiques de leur substance pour financer le service civique, qui est un dispositif onéreux.
Je suis au désespoir de vous le dire, mais le risque est loin d’être écarté en 2011. En effet, la hausse des crédits est liée uniquement à la montée en puissance du service civique, au détriment de bien d’autres actions en faveur de la jeunesse.
Ainsi, hors service civique, le programme 163 s’établit en 2011 à 115 millions d’euros, contre 147 millions d’euros en 2010, soit une baisse de plus de 20 %.
Pour financer le service civique, on a donc déshabillé beaucoup de monde, avec un biais systématique et répétitif : les victimes de ce déséquilibre sont les actions menées localement par les services déconcentrés.
Ces derniers, déjà perturbés par la révision générale des politiques publiques, et les associations locales sont clairement les laissés-pour-compte de la politique de la jeunesse et de la vie associative.
Rentrons dans le détail de l’analyse.
Le service civique est plutôt bien financé. Le soutien en sa faveur s’établit pour 2011 à 97,4 millions d’euros. Les modalités de ce financement sont à peu près conformes à ce qui avait été anticipé. En revanche, l’objectif des 10 % de jeunes d’une classe d’âge bénéficiant du service civique ne sera clairement pas atteint en 2014 et semble, pour l’heure, avoir été reporté aux calendes grecques.
Le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse voit ses crédits baisser de plus de 40 %, mais je reconnais que les reports des crédits des années précédentes feront que l’année 2011 sera finalement le point culminant de ce fonds.
À cet égard, des précisions sur l’action du Fonds seraient très utiles pour les parlementaires, au vu de l’indigence du « bleu budgétaire » en la matière. J’espère aussi que l’instabilité ministérielle qui caractérise ce secteur, avec deux ministres et un haut-commissaire en un an, ne nuira pas à la continuité de l’action menée.
Par ailleurs, de nombreuses actions emblématiques du ministère voient leurs crédits nettement diminuer, voire disparaître.
Le programme national « Envie d’agir », qui représente 3,2 millions d’euros en 2010, semblait avoir été supprimé par une circulaire du 12 août dernier. On a cru comprendre qu’il pourrait être maintenu, via un abondement en exécution, éventuellement sur les crédits de la sous-action Soutien aux actions locales. Je reste très sceptique sur la crédibilité d’une telle information dans un contexte où le soutien aux actions locales est déjà fortement réduit. Qu’en est-il de ce dispositif et, au cas où il serait maintenu, à qui prendra-t-on les crédits ?
Encore plus inquiétant, les crédits de paiement dédiés aux politiques partenariales locales sont fixés à hauteur de 12,7 millions d’euros en 2011, contre 22 millions d’euros en 2010. C’est quasiment la moitié des subventions destinées aux services déconcentrés et aux associations locales qui disparaissent. Or ces associations sont fondamentales pour l’animation locale, notamment dans les zones rurales très fragilisées.
Ce sont ainsi près de 2 500 associations locales qui risquent de perdre leur subvention d’État. Nombre d’entre elles arrêteront leur activité, d’autres la réduiront très fortement.
Une nouvelle fois, l’État se désengage massivement au détriment du maillage associatif local, déjà désemparé face à la RGPP. Vers qui ces associations vont-elles se tourner ? Nous le savons tous, vers les collectivités territoriales, déjà étranglées par le financement des compétences transférées. Je crois qu’il faut véritablement pousser un cri d’alarme sur ces crédits locaux, qui quasiment disparaissent.
Je trouve de plus paradoxal que la mise en place d’un service civique qui s’appuie à 80 % sur les acteurs associatifs s’accompagne d’une liquidation de ces mêmes structures associatives.
D’autres actions, qui nous tiennent tous à cœur, voient aussi leurs crédits diminuer, notamment le soutien à la rénovation des centres de vacances, qui est réduit à la portion congrue du fait d’une baisse de ses crédits de 26 %, ou encore le nombre de bourses pour les brevets d’aptitude aux fonctions d’animateur ou aux fonctions de directeur, respectivement le BAFA et le BAFD, qui va baisser de 30 %, alors qu’il s’agit d’un dispositif utile en faveur de publics en difficulté.
Pour conclure, seuls les dispositifs d’État voient leurs crédits se stabiliser : les offices franco-québécois et franco-allemand pour la jeunesse, l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, l’INJEP, et le Centre d’information et de documentation jeunesse, le CIDJ. En un mot, tout pour l’État central, rien pour les services déconcentrés et les opérateurs locaux ! C’est apparemment l’esprit de la nouvelle décentralisation…
En conclusion, et en dépit de mes préconisations, la commission de la culture, de la communication et de l’éducation a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la jeunesse et de la vie associative au sein de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mes premiers mots seront pour féliciter M. le ministre, Mme la secrétaire d’État et pour vous, madame la ministre des sports, qui accédez à un ministère de plein exercice, ce que les sportifs attendent depuis très longtemps et dont ils sont – je le sais – très satisfaits !
Vous êtes, en même temps, championne et compétitrice, ce qui est un heureux présage, notamment pour le sport de haut niveau, qui apprécie votre nomination ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mon préjugé est, quant à moi, extrêmement favorable. En effet, l’action remarquable que vous avez menée dans vos précédentes fonctions, en particulier la façon dont vous avez pu, avec brio, régler le problème de la présence de l’ours dans les Pyrénées, me laisse penser que vous aurez encore des succès dans un domaine qui est beaucoup plus facile. (Sourires.)
Certes, on peut déplorer de voir le budget du sport se réduire comme peau de chagrin.
M. Jean-Pierre Plancade. Pas la peau de l’ours !
M. Jean-François Voguet. Non, pas la peau de l’ours ! (Sourires.)
M. François Fortassin. Ce n’est en effet pas la peau de l’ours, en l’occurrence !
Toutefois, le sport français est relativement en bonne santé, malgré certaines péripéties.
Concernant le programme Jeunesse et vie associative, les crédits – cela a été déjà souligné – augmentent de 10 %. Il s’agit d’une hausse importante.
Pour le service civique, la loi du 10 mars 2010 nous est particulièrement chère, puisqu’on la dit à une proposition de notre groupe, le RDSE, qui avait obtenu un très large consensus.
Nous regrettons d’observer le désengagement de l’État à l’égard du mouvement associatif, des missions de service public qu’il génère et, surtout, de la cohésion sociale. Le tissu associatif est en assez grand péril malgré les interventions des collectivités territoriales. De plus, ces dernières sont aujourd’hui à la recherche de ressources fiscales, quelque peu incertaines.
Madame la ministre, au-delà du budget, je vais exprimer un certain nombre de souhaits que votre charisme et votre autorité devraient nous permettre de réaliser. (Sourires.) Vous pourrez, me semble-t-il, prendre plusieurs initiatives bienvenues.
Tout d’abord, s’agissant de la violence dans les stades, phénomène qui concerne essentiellement le football - d’autres sports peuvent, de ce point de vue, être considérés comme exemplaires -, il faut rappeler un certain nombre d’évidences qui auraient besoin, à mon sens, d’être martelées.
Premièrement, l’arbitre doit absolument être respecté.
Deuxièmement, le recours à la vidéo peut permettre d’éviter beaucoup de contestations.
Troisièmement, il peut être opportun qu’au football le carton jaune pour faute technique répétée ou simulation soit synonyme d’exclusion, comme c’est déjà le cas au rugby ou au basket-ball.
De manière plus générale, peut-être faudrait-il faire admettre que les spectateurs du rugby, qui ne sont pas forcément plus malins que ceux du football, ont un comportement plus intelligent que ces derniers ! Cela, je crois qu’il faut le souligner. (Sourires.)
M. Claude Bérit-Débat. Vive le Sud-Ouest !
M. François Fortassin. Il serait également nécessaire de rappeler que les compétitions sportives, quelles qu’elles soient, sont synonymes de fêtes et que, à ce titre, elles ne peuvent pas s’accompagner de violences.
Par ailleurs, nous souhaiterions que la lutte contre le dopage soit intensifiée, mais, surtout, qu’elle s’applique également dans toutes les disciplines. En effet, aujourd’hui, si beaucoup de sportifs, notamment dans le cyclisme, se font « épinglés » dans certains sports, c’est parce que les contrôles y sont nombreux, l’absence de cas de dopage dans telle ou telle discipline pouvant attester simplement l’absence de contrôle !
Je ne suis pas certain que, lorsque des garçons s’effondrent sur le terrain alors qu’ils sont théoriquement en pleine santé, la mort soit forcément naturelle…
En outre, porter un maillot de l’équipe de France est un honneur qui n’est pas dénué, non plus, de retombées financières. Il faudrait expliquer à ces jeunes gens que, pour les très grandes compétitions sportives, de niveau mondial, il n’est pas scandaleux de leur demander de pratiquer dans un club français, voire de payer des impôts en France, durant l’année de sélection.
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. François Fortassin. Au demeurant, nous pourrions prendre exemple sur nos amis australiens ou néo-zélandais.
M. Claude Bérit-Débat. Eh oui !
M. François Fortassin. Il m’est un peu difficile de parler ce soir des Australiens, mais ils ont été tellement bons samedi dernier que je les salue ! (C’est vrai ! sur les travées socialistes. - Sourires.) Nos amis australiens ou néo-zélandais, pour prendre donc leur exemple, réussissent, lors des coupes du monde, à faire revenir tous leurs joueurs qui souhaitent être sélectionnés, et ces derniers réintègrent l’équipe sans problème. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas faire de même au football, notamment.
Enfin, il convient de promouvoir les sports collectifs au niveau scolaire, car ils constituent un élément de socialisation et présentent un caractère ludique - ces sports se pratiquent généralement avec un ballon -, sans parler de l’adresse gestuelle nécessaire au rugby, par exemple, pour maîtriser le paramètre rebondissant aléatoire. (Sourires.)
En dépit de certaines inquiétudes et déceptions quant à l’avenir du sport et à la politique en faveur de la jeunesse, mais aussi eu égard aux espoirs que nous nourrissons, le groupe du RDSE ira de l’abstention positive à l’acceptation. (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l’UMP, ainsi qu’au banc des commissions.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mon collègue Claude Biwer soulèvera tout à l'heure des questions préoccupantes à propos notamment du programme Sport. Aussi souhaiterais-je, pour ma part, insister sur le service civique, dans le court laps de temps qui m’est imparti.
Le service civique, je le rappelle, donne aux jeunes la chance de réaliser une mission au sein d’une association, d’une collectivité, d’une ONG, afin de rendre service à la collectivité et de contribuer au renforcement du lien social. Bref, il permet de faire vivre les valeurs du pacte républicain, …
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Françoise Férat. … et il nous faut le soutenir.
Toutefois, le démarrage du service civique n’a malheureusement pas rencontré le succès escompté, puisque, sur les 10 000 « embauches » prévues l’année dernière, seules 8 500 candidatures ont été adressées au ministère, et toutes, bien entendu, ne seront pas retenues. La pertinence des crédits demandés à ce titre pose donc problème.
Une fraction modique des crédits affectés, en 2011, à l’Agence du service civique, l’ASC, pourrait donc servir à financer la rénovation des stades, en vue de l’accueil, par la France, de l’Euro 2016. C’est du moins la proposition de bon sens de M. le rapporteur spécial.
En outre, je partage le scepticisme de notre collègue Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis, concernant l’insuffisance des moyens budgétaires à moyen terme.
En effet, si le Gouvernement se fixe l’objectif d’intégrer 10 % d’une classe d’âge, soit 75 000 jeunes, d’ici à 2014, ce qui constitue une vision extrêmement optimiste, la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 n’anticipe pas les moyens adéquats pour y parvenir.
Une augmentation des crédits à hauteur de 50 millions d’euros par an jusqu’en 2014 serait insuffisante pour couvrir les coûts de ce programme. Comment allons-nous le financer ?
Mme la présidente. Il faudrait conclure, ma chère collègue.
Mme Françoise Férat. Je pense qu’il est difficile de recourir aux bénéficiaires du service civique, notamment les collectivités et les associations. Il convient donc que l’État trouve, dans son propre budget, un équilibre financier raisonnable, en revoyant soit ses objectifs, soit les moyens prévus pour les atteindre.
Telle est, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, la réserve que je voulais émettre sur ce programme en particulier, mais celle-ci ne remet pas en cause mon soutien au budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Madame la présidente, mon collègue Alain Dufaut qui, en raison du retard pris par les débats, a été obligé de rentrer dans son département, m’a chargé de me faire aujourd’hui son interprète.
Mes chers collègues, nous voici une nouvelle fois réunis pour débattre du budget des sports et, de manière plus générale, des problèmes d’actualité du sport français.
Je tiens, tout d’abord, à vous souhaiter, à mon tour, madame la ministre, plein succès dans cette nouvelle mission ministérielle. Nous vous connaissons et nous savons votre volonté, votre détermination à faire évoluer positivement le sport français et à trouver les solutions nécessaires aux problématiques du sport et de sa pratique.
Soyez assurée que le Sénat, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, présidée par Jacques Legendre, et, en son sein, les sénateurs spécialistes des problèmes sportifs, sont disposés à vous aider et à travailler avec vous et vos collaborateurs.
Nous sommes ici pleinement convaincus de la nécessité de promouvoir la pratique physique et sportive à tous les niveaux, car elle est porteuse d’épanouissement et crée les conditions de nature à favoriser, chez les jeunes, un meilleur accès à la vie sociale, voire, quelquefois, une meilleure intégration.
Le rapporteur de la loi relative à la lutte contre le trafic de produits dopants souhaite, tout d’abord, revenir sur le fléau du dopage pour saluer et rendre hommage à l’ancien président de l’AFLD, l’Agence française de lutte contre le dopage, Pierre Bordry, qui vient de quitter son poste et avec qui nous avons toujours travaillé dans de bonnes conditions. Il est vrai que le Sénat a toujours été leader dans ce combat et a toujours su défendre un sport sain.
Il convient, bien sûr, de garantir à l’AFLD un financement pérenne, afin que les contrôles se poursuivent et soient toujours à la pointe de la lutte contre la fraude sportive.
À cet égard, le laboratoire de Châtenay-Malabry, que le monde entier nous envie, doit disposer des moyens de recherche moderne pour détecter les nouvelles techniques de dopage. Les contrôleurs de l’AFLD doivent être de plus en plus nombreux et de plus en plus performants sur les différentes compétitions.
De plus, nous devons obtenir de l’UCI, l’Union cycliste internationale, une totale liberté sur les nécessaires contrôles du Tour de France, pour mettre un terme à des dérives qui font que l’on ne sait plus vraiment, depuis une dizaine d’années, si le vainqueur du Tour de France mérite son titre. De Floyd Landis à Lance Armstrong, puis, désormais, à Alberto Contador, c’est l’épreuve la plus médiatique et la plus populaire du monde qui est discréditée et son image ternie.
Si la subvention de 7,8 millions d’euros attribuée à l’AFLD est reconduite dans le budget de 2011, elle doit lui être versée intégralement et en une seule fois, et pas, comme l’avait indiqué un collaborateur de l’ancien ministre, en plusieurs fois, ce qui, dans la conjoncture actuelle, laisse planer des incertitudes sur le versement du solde.
L’AFLD doit effectivement avoir une parfaite visibilité sur ses moyens financiers pour pouvoir lancer dès aujourd'hui les programmes de recherche qu’impose son combat.
La dernière transposition du code mondial antidopage s’est faite par ordonnance. Trois décrets ont été élaborés, deux arrêtés ont déjà été publiés, et il convient de publier rapidement le troisième.
À l’instar de la lutte contre le dopage qui doit rester l’une des priorités de votre ministère, il convient, madame la ministre, d’accentuer aussi la lutte contre les violences dans le sport.
Nos jeunes se construisent souvent avec des icônes sportives qui, malheureusement pour certaines, n’ont d’icône que les apparences. Il en va de même des pseudo-supporters qui, pour certains, relèvent plus de la rubrique des faits divers que de celle des sports.
Mais le comportement de certains individus ne doit pas empêcher les autres de venir en famille et de profiter du spectacle. Il est anormal que certains matchs doivent être joués sans les supporters – les vrais ! – de l’équipe reçue, comme ce fut le cas, le mois dernier, lors du match PSG-OM. Il faut absolument éradiquer ce phénomène des violences et interdire de stade tous ceux qui n’ont rien à y faire.
À propos du football, je tiens à saluer l’organisation des états généraux du football, qui devront permettre d’aplanir la situation et de garantir à la fois une assise pour les équipes professionnelles et une sécurité pour les équipes amateurs. Ce sont elles, en effet, qui accueillent chaque année des milliers de jeunes enfants amoureux du sport, et leurs dirigeants bénévoles doivent en être remerciés. Ils ne peuvent ni ne doivent être montrés du doigt par les commentateurs comme la cause des problèmes du football français, ainsi qu’on l’a encore entendu à la fin de l’été.
Sans le monde amateur, le monde professionnel n’est et ne sera rien. C’est sur la formation des jeunes que le football français doit axer sa réforme.
Enfin, et pour terminer sur le rôle éducatif du sport, je tiens à réaffirmer mon souhait de voir le sport être plus encore mis en avant dans nos quartiers, tout particulièrement le sport féminin.
À l’heure où les droits des femmes sont malheureusement remis en cause par certains, il convient de permettre aux jeunes filles d’avoir une activité sportive émancipatrice, révélatrice de talent et génératrice de solidarité.
Je pense surtout, bien sûr, aux jeunes filles issues de l’immigration qui, par une pratique sportive, peuvent sortir de leur milieu familial et ainsi connaître une vraie émancipation. Des fédérations, comme celle du volley-ball, ont lancé, dans les quartiers défavorisés, des actions très intéressantes en s’appuyant sur les clubs locaux et leurs éducateurs.
Pour conclure, je rappellerai que vous allez être confrontée, madame la ministre, à des événements sportifs internationaux comme l’Euro 2016. Or nous ne devons pas décevoir le monde du sport. La préparation de cet événement doit donc être exemplaire, ne serait-ce que pour atténuer l’image calamiteuse que notre équipe de France a donnée lors du dernier Mondial, en Afrique du Sud.
La construction et la rénovation des stades de football qui vont accueillir l’Euro 2016 doivent être mises en œuvre dans les délais prévus, et les financements de l’État qui s’ajouteront aux contributions des collectivités territoriales ne doivent en rien pénaliser le budget des sports. Il doit s’agir de financements exceptionnels.
Pour ce faire, l’État doit remettre, avant le 30 juin 2014, un rapport sur les incidences financières de ces stades de l’Euro 2016, notamment sur l’utilisation des crédits du CNDS.
Soyez assurée, madame la ministre, qu’ici, au Sénat, nous serons très vigilants sur la bonne répartition entre l’État, les collectivités territoriales, les entreprises et tous ceux qui participeront à la dynamique de l’Euro 2016.
Tels sont, madame la ministre, rapidement évoqués quelques dossiers qui feront l’actualité prochaine du sport français. Vous pouvez compter sur l’appui total du Sénat et de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication pour vous aider à les faire aboutir et contribuer ainsi à la réussite du sport français. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits destinés au sport connaîtront en 2011 une diminution importante par rapport à 2010, de 10 % environ, ce qui représente une baisse de près de 22 millions d’euros. Nous savons cependant que cette diminution est compensée par l’augmentation à hauteur de 20 millions d’euros des ressources du CNDS, grâce à la majoration du produit de la taxe sur les paris sportifs.
Toutefois, à titre personnel, je regrette un peu que l’accroissement des crédits extrabudgétaires se soit traduit, au fil des années, par une baisse des crédits budgétaires, ce qui n’est pas conforme à la volonté du législateur : lorsque le Parlement vote des ressources extrabudgétaires – la première fois qu’il l’a fait, je siégeais à l'Assemblée nationale ! –, c’est pour qu’elles viennent augmenter les crédits destinés au sport, et non pas pour s’y substituer.
Je regrette également la réduction substantielle des crédits affectés à l’action Promotion du sport pour le plus grand nombre, qui, en deux ans, a perdu plus de la moitié de ses crédits, passant ainsi de 26 millions d’euros en 2009 à 11 millions d’euros en 2011.
Avant de parler des besoins exprimés au niveau local, intéressons-nous d’abord à l’une des mesures nationales relatives au sport : l’accueil du championnat d’Europe de football en 2016.
On sait que la vétusté de nos stades constitue une préoccupation majeure dans cette perspective. Les financements promis par le Gouvernement, à savoir 150 millions d’euros, sont modestes eu égard au coût réel de la mise aux normes fixée par la FIFA, la Fédération internationale de football, et mériteraient donc d’être mieux budgétisés si la France veut honorer l’Euro 2016.
On pourrait, par exemple, réaffecter les économies réalisées à la suite de la suppression du droit à l’image collective des sportifs professionnels, qui représentent environ 30 millions d’euros, à la rénovation des stades. Peut-être, madame la ministre, pourrez-vous nous éclairer sur ce sujet.
Au lieu de faire ce choix, on demande au CNDS de financer la rénovation de très grandes installations, alors qu’il ne dispose que d’une réserve de 50 millions d’euros, soit le tiers de l’engagement financier de l’État pour la rénovation des stades.
On attendait plutôt du CNDS qu’il finance les clubs sportifs locaux, et ce conformément à sa mission de rendre le sport « accessible à tous ». Or les petits clubs, créateurs de lien social, qui sont parfois de très bon niveau, connaissent de nombreuses difficultés, notamment financières.
Ainsi, comme je vous l’ai dit récemment, madame la ministre, la commune de 600 habitants que j’administre a la chance d’avoir un club de triathlon-duathlon qui a connu d’excellents résultats, puisque, deux années consécutives, il a été sacré champion de France. Mais notre club a toutes les peines du monde à subvenir à ses besoins financiers pourtant réduits, et ce malgré le soutien de notre modeste commune.
En effet, les marges de manœuvre des collectivités territoriales sont faibles et vont même s’amenuisant. Les sponsors, premières victimes des coupes budgétaires en temps de crise, se font rares, et les subventions du CNDS s’orientent vers les actions sociales du sport en direction, par exemple, des publics cibles ou encore des quartiers prioritaires.
Les clubs sportifs locaux ont du mal à subsister, d’autant que les bénévoles sont de plus en plus difficiles à trouver. Madame la ministre, il faut absolument faciliter l’accès des petits clubs aux subventions.
Je note par ailleurs que ces clubs ne savent plus quels sont leurs interlocuteurs pour parler de ces questions depuis que, par suite d’une fusion, les directions départementales de la jeunesse et des sports sont devenues les directions départementales de la cohésion sociale. Il faudrait engager une meilleure communication à ce sujet pour ne pas risquer de désorienter ou de décourager les dirigeants de ces petits clubs.
Je saisis cette opportunité pour vous confirmer mon invitation, madame la ministre. Venez les rencontrer dans mon village pour marquer votre soutien à ceux qui œuvrent pour le sport là où les moyens sont rares. Vous verrez combien il est difficile de boucler la boucle ! J’espère que nous pourrons un jour évoquer tout cela de vive voix.
Je le répète, le monde du sport a besoin non seulement de lisibilité pour connaître ses interlocuteurs, mais surtout de souplesse et de moyens, pour jouer son rôle de cohésion sociale à l’échelon local.
Les crédits consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs doivent, en principe, permettre à l’Agence française de lutte contre le dopage de faire face à ses lourdes responsabilités en 2011. Ce combat est d’autant plus important que le dopage ne concerne pas uniquement les cyclistes et le Tour de France ; il concerne également de nombreux autres sports, y compris des sports amateurs. La lutte contre le dopage doit donc être impitoyable pour des raisons non seulement morales, mais également de santé publique. C’est une priorité !
Sous le bénéfice de ces observations, je voterai, bien sûr, ces crédits, en espérant obtenir des réponses à mes interrogations, car je dois moi aussi répondre à d’autres interrogations, en d’autres lieux ! (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
M. Jean-Jacques Lozach. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, suite au récent remaniement ministériel, nous ne sommes plus face à un découpage du ministère avec le sport d’un côté et la santé de l’autre. L’autonomie du sport est à nouveau affirmée avec un ministère de plein exercice. Cette configuration ayant toujours eu notre faveur, nous nous en félicitons.
Malheureusement, je constate que cette émancipation est trompeuse, car elle masque un budget en pleine régression. Je me souviens pourtant du discours très ambitieux que votre prédécesseur, Mme Rama Yade, avait tenu le 6 septembre dernier à la Sorbonne sur les nouveaux défis du modèle sportif. Ce jour-là, elle affichait clairement sa volonté de faire progresser la cause du sport en France. Mais elle a quitté le Gouvernement sans avoir concrétisé la moindre avancée significative.
J’avais particulièrement regretté que le ministère cède aux exigences des sportifs les plus fortunés, en normalisant une pratique alors illégale, celle de la rémunération des agents sportifs par les clubs et non plus par leurs employeurs eux-mêmes. Les craintes que j’avais exprimées ici lors du débat ont trouvé une nouvelle justification a posteriori dans le comportement calamiteux des joueurs de l’équipe de France de football lors de la Coupe du Monde 2010.
Dans ce milieu, l’obsessionnel rapport à l’argent devient particulièrement malsain, et la loi du 9 juin 2010 encadrant la profession d’agent sportif ne constitue pas, en raison de ses insuffisances, un réel obstacle aux dérives pernicieuses du « sport business », lesquelles se déploient au détriment des vertus intrinsèques de ce phénomène de société.
Madame la ministre, je ne souhaite pas que l’avenir vous réserve un sort identique à celui de Mme Rama Yade, et donc qu’un fossé abyssal se creuse entre les objectifs exprimés et le bilan constaté. Je me permets de vous souhaiter bonne chance pour votre nouvelle mission !
Malheureusement, celle-ci sera très difficile à mener à bien avec les moyens financiers qui sont mis à la disposition de votre ministère. En effet, les crédits consacrés par l’État au sport en 2011 diminuent de 15 % par rapport à ceux qui ont été votés dans le budget pour 2010 et qui s’élevaient à 243,7 millions d’euros ; ils chutent donc de plus de 27 millions cette année.
Pour pallier la nouvelle dégradation des crédits de l’État, le Centre national pour le développement du sport est une nouvelle fois appelé à la rescousse, avec ses crédits extrabudgétaires ; c’est le cas pour la construction ou la rénovation des stades accueillant l’Euro 2016.
Nous vivons un tournant historique car, pour la première fois, avec 247 millions d’euros, la dotation du Centre national pour le développement du sport est supérieure aux crédits ministériels stricto sensu. La situation est cocasse, car le président de cet organisme public, qui, officiellement, n’est pas comptable de la politique sportive de notre pays devant l’opinion publique, se retrouve à gérer une enveloppe financière supérieure au budget d’intervention du ministre !
La question de la gouvernance du sport est en jeu. Dans le cadre du partenariat entre l’État, les collectivités territoriales et le mouvement sportif, il importe de redonner à l’État toute sa place. Le sport est encore loin d’être la « grande cause nationale » annoncée par le Président de la République en 2007 !
L’action n° 2, Développement du sport de haut niveau, enregistre une chute de près de 20 %. C’est un mauvais signe pour une année préolympique, même si, par ailleurs, le plan de rénovation et de modernisation de l’Institut national des sports et de l’éducation physique se poursuit.
Si, cet été, tout le monde s’est réjoui sur les plateaux de télévision des succès français aux championnats d’Europe d’athlétisme et aux championnats d’Europe de natation, le ministère n’affiche pas, avec un tel budget, sa volonté de voir cette réussite se confirmer à l’occasion des jeux Olympiques de Londres en 2012.
Si l’État se désengage du financement du sport autre que le sport spectacle, qui doit intervenir en faveur du « sport pour tous » ? Une fois encore, on se tournera vers les collectivités territoriales, indispensables pour accompagner le bénévolat associatif. Mais nous savons pertinemment qu’elles n’ont plus actuellement les moyens de maintenir leurs interventions. Pourtant, ce sont les collectivités, essentiellement les communes, qui assurent plus de 70 % des financements publics du sport. Face à leur implication, les 10 millions d’euros consacrés au sport dans le plan de relance 2009 ne pèsent pas lourd...
Par ailleurs, comment ne pas regretter la stabilité du budget consacré à l’Agence française de lutte contre le dopage alors que ses missions évoluent ? En effet, l’adaptation du code du sport au code mondial antidopage nécessite des contrôles à l’entraînement plus nombreux et une réponse adaptée à la judiciarisation croissante des affaires liées à ces contrôles.
La démission tumultueuse de l’ancien président de cette agence, Pierre Bordry, était un signal d’alerte.
Il existe des solutions pour un budget du sport plus élevé. Il serait notamment judicieux d’augmenter les taux de prélèvement sur les jeux et les paris en ligne ; une hausse de 0,5 point amènerait 45 millions d’euros supplémentaires.
M. Claude Bérit-Débat. Eh oui !
M. Jean-Jacques Lozach. La loi du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne devait apporter une bouffée d’oxygène au financement du sport. Malheureusement, il n’en est rien.
Je souhaite également vous interroger sur l’utilisation des 24 millions d’euros économisés du fait de la suppression du droit à l’image collective.
Comme le suggérait mon collègue député Henri Nayrou, ne serait-il pas opportun d’utiliser une partie de cette somme pour créer un fonds de compensation pour la retraite des sportifs professionnels ? Cela permettrait d’ouvrir la voie à un véritable statut du sportif de haut niveau, dossier sur lequel nous connaîtrons, je l’espère, des avancées prochaines.
Enfin, nous souhaitons bonne chance à la candidature d’Annecy pour la désignation par le Comité international olympique,...
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. Jean-Jacques Lozach. ... le 6 juillet prochain, de la ville organisatrice des jeux Olympiques d’hiver de 2018.
M. Jean-Claude Carle. Merci !
M. Jean-Jacques Lozach. Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’Union européenne a introduit le sport dans le champ des compétences communautaires. Nous voudrions voir la France prendre le leadership du combat éthique pour la préservation de l’intégrité dans le sport, problématique qui dépasse largement la simple question du dopage.
Le sport passionne au plus haut degré une quantité inouïe de personnes, partout dans le monde. Nous souhaitons qu’à l’avenir, dans notre pays, cet enthousiasme soit préservé, grâce à une ambition forte et aux moyens qui vont de pair.
Madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, à l’écoute de mon propos, vous avez compris les raisons pour lesquelles le groupe socialiste ne votera pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, tous les ans, depuis la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, des modifications de périmètre des programmes masquent la baisse des moyens pour les actions traditionnelles de cette mission.
Cette année, les programmes et les actions sont complètement bouleversés. La mission même est amputée du programme Conduite et pilotage, qui, l’an passé, représentait la moitié des dépenses. C’est un changement de périmètre considérable ! On nous dit qu’il s’agit d’un redéploiement vers une autre mission budgétaire, mais 420 millions ont disparu et il nous est impossible de vérifier la hauteur des transferts.
Devant tant d’opacité, nous sommes en droit de nous interroger. On nous avait tellement vanté les vertus de la LOLF en nous assurant que les parlementaires auraient une plus grande lisibilité des politiques publiques ! La question de la sincérité du budget est même posée.
Je ne peux que soutenir notre collègue Michel Sergent, qui note, dans le rapport de la commission des finances, que « ce changement aboutit à vider la mission d’une grande partie de sa substance ». Nous sommes donc en droit de nous interroger sur la pertinence et le maintien de cette mission. Une telle structure budgétaire et de si faibles dépenses ne peuvent plus porter de réelles politiques publiques dignes de ce nom.
Nous pouvons d’autant plus nous poser la question qu’en raison de la baisse des ressources du programme Sport il s’agit dorénavant d’un budget uniquement de soutien au sport de haut niveau ; 80 % des dépenses sont en effet consacrées à cette seule politique. Cette structure de dépenses est d’ailleurs à rapprocher des textes de loi adoptés depuis sept ans, qui visent tous à favoriser la professionnalisation et la financiarisation du sport.
Tout va toujours dans le même sens et toujours en faveur des mêmes !
Quant au programme Jeunesse et vie associative, il se spécialise aussi, 60 % des dépenses étant consacrées à deux dispositifs d’action publique seulement. En disant cela, je ne critique pas les sommes dévolues à ces programmes, même si je m’interroge sur la pertinence de certaines actions. En revanche, je constate avec regret, et une certaine colère, la disparition quasi complète des politiques nationales qui ont fondé l’action publique pendant des années dans le domaine de la jeunesse, du sport et de la vie associative.
Ce ministère a disparu ; il a été démantelé, écartelé, et ses missions disparaissent peu à peu. Certes, il reste un ministère des sports, et aujourd’hui de plein exercice et, madame la ministre, sachez que je m’en félicite, mais il est pratiquement sans administration et sans réels moyens d’intervention.
Par-delà votre profession de foi, vous savez, j’en suis persuadé, ne pas disposer des moyens suffisants pour soutenir le sport amateur, les fédérations, les équipements, la préparation olympique et la lutte contre le dopage.
Nous craignons que les secteurs de la jeunesse et de la vie associative, pourtant si essentiels à la vie sociale, ne soient totalement vampirisés par le grand ministère qui en assure la tutelle. Les missions de ce secrétariat d’état, rabougries, se limitent désormais au seul service civique, sans pour autant tenir les engagements dans ce domaine car il ne fonctionne pas, ou à l’organisation d’expérimentations diverses, sans les moyens nécessaires à l’extension de celles qui s’avéreraient utiles. À quoi cela servira-t-il donc ? Quel gâchis !
Mais revenons maintenant au budget, celui des sports pour commencer.
Nous sommes vraiment très loin des promesses du Président de la République, qui annonçait 3 % du budget pour le sport, puisque, pour la première fois depuis sa création, le budget des sports diminue officiellement. En effet, alors que la baisse était d’habitude masquée par des transferts, cette année, par souci de transparence ou par cynisme, le document budgétaire constate une chute de 14 %.
Certes, madame la ministre, vous n’avez pas préparé ce recul, mais, hier, vous étiez solidaire du Gouvernement et, demain, vous porterez le fardeau des conséquences de ce recul. Les dépenses d’interventions de votre ministère chutent lourdement, de 22 % ; c’est considérable !
Pour avoir une réelle vision des dépenses en faveur du sport, il faut intégrer les fonds du Centre national pour le développement du sport. Ils s’élèveront à 247 millions d’euros, au lieu de 239 millions d’euros en 2010, si du moins les jeux et les paris sportifs électroniques ont le rendement attendu, mais ce n’est pas assuré.
Toutefois, cette hausse virtuelle de 8 millions d’euros ne compense ni la perte de 33 millions d’euros sur votre budget, ni l’évolution des charges dévolues au Centre national pour le développement du sport. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, j’ai déposé un amendement visant à augmenter et à déplafonner les prélèvements sur la Française des jeux au profit de ce centre.
À ce propos, je voudrais vous dire mon inquiétude concernant les dérives des dépenses mises à la charge du CNDS. De plus en plus, il est utilisé comme un budget bis, et masque mal, par ailleurs, le désengagement de l’État. Madame la ministre, il est temps d’en revenir aux orientations qui ont présidé à sa création, en lui retirant tout financement de politiques et d’investissements nationaux.
Enfin, je ne saurais taire mon désaccord sur le désengagement total de votre ministère dans le domaine du développement du sport pour tous. Vous ne disposez plus d’un réel budget dans ce domaine. Il a été divisé par quatre en quelques années, et les rares dépenses vont aux fédérations, qui utilisent ces fonds en faveur de la promotion de leur sport.
Ainsi n’existe-t-il plus de politiques publiques nationales pour aider au développement des activités physiques et sportives non seulement des jeunes, mais aussi des femmes, des seniors et des handicapés et, plus généralement, des populations en difficulté.
Seul le haut niveau intéresse dorénavant votre ministère, madame la ministre. Nous le déplorons et dénonçons une telle dérive.
J’aborderai enfin le budget du programme Jeunesse et vie associative.
Tout d’abord, peut-on encore parler de politique publique dans les domaines de la vie associative et de l’éducation populaire, compte tenu de l’extrême modicité des sommes allouées ?
Ces crédits, pourtant essentiels au maintien du lien social dans nos villes et nos campagnes, seront divisés par deux.
Ainsi, dans le domaine de l’action locale, après des années de stagnation et de baisse, le nouveau désengagement massif de l’État étranglera la vie associative et déséquilibrera la situation sociale de territoires déjà fragilisés.
Pour ce qui concerne les actions menées en faveur de la jeunesse, la quasi-totalité des crédits sont destinés à assurer le financement du service civique.
Par conséquent, je voterai contre le projet de budget de cette mission regroupant les programmes Sport et Jeunesse et vie associative. Il scelle en effet la disparition des politiques publiques en faveur du plus grand nombre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Madame la présidente, monsieur, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ce budget est déroutant. C’est en effet la première fois que le programme 219, Sport, accuse une telle baisse ; c’est aussi la première fois que les ressources qui lui sont affectées sont inférieures à celles du Centre national pour le développement du sport, le CNDS, lesquelles s’élèveront à 247 millions d’euros.
À périmètre constant, la baisse affichée est de 15 %, ce qui pourrait prêter à sourire si les conséquences n’étaient pas aussi dramatiques. On me répondra que le périmètre a évolué et qu’en conséquence les choses sont plus complexes, certains crédits figurant désormais sur d’autres lignes budgétaires.
Soyons sérieux ! La LOLF a été votée pour que les parlementaires puissent contrôler plus efficacement les dépenses de l’État. Or voici maintenant que cet outil est détourné de son objet ! Pour que son vote ait un sens, le Parlement doit rester un acteur essentiel du budget et contrôler aisément son évolution. Il faut cesser de rendre les choses floues et, donc, moins contrôlables, ce qui revient à mépriser le rôle de parlementaire qui est le nôtre.
Contrôler ce budget, disais-je.
Ce budget est donc en baisse. Pourtant, le candidat Sarkozy avait affirmé, au cours de sa campagne de 2007, que le sport serait promu « grande cause nationale ». Des paroles, encore des paroles, mais nous en avons entendu tellement d’autres !
C’est tellement vrai que l’on voit le sport spectacle privilégié, au détriment du sport pour tous. Certes, il nous faut des stades, mais c’est le CNDS qui financera la modernisation en la matière, dans la perspective de l’Euro 2016. En réduisant le budget global de l’État et en faisant peser cette nouvelle charge sur le CNDS, lequel finance traditionnellement les politiques d’accès de tous au sport, ce sont bien les politiques sociales que vous remettez en cause, madame la ministre.
Les causes de mécontentement sont nombreuses. Mon collègue a évoqué tout à l’heure l’Agence française de lutte contre le dopage, dont les ressources figurent au sein de l’action n° 3, Prévention par le sport et protection des sportifs.
Le budget prévisionnel de l’Agence pour 2011 me semble plus qu’insuffisant au regard des trois défis qu’elle aura à relever. Pour mener à bien son action, 8,3 millions d’euros auraient été nécessaires, ce qui représentait une augmentation de 540 000 euros, soit 6,9 %. Cependant, vous avez choisi, madame la ministre, de lui refuser cette perspective.
L’Agence n’aura donc pas les moyens de fonctionner correctement. Pourtant, si l’on veut réconcilier les Français avec certains sports, il faut doter l’Agence française de lutte contre le dopage de moyens suffisants. C’est d’ailleurs d’autant plus vrai que cette agence, comme le souligne la jurisprudence du tribunal arbitral du sport, a gagné en crédibilité.
Au-delà de cette énième réduction du poids de l’État dans la politique sportive, j’aborderai la question de sa gouvernance.
Examinons sérieusement les chiffres. Le poids économique du sport en France s’élève à 35 milliards d’euros, dont 50 % est financé par les ménages, 30 % par les collectivités, 10 % par l’État et 10 % par les entreprises privées. Sans doute faudrait-il adapter la gouvernance du sport français aux réalités contributives. En d’autres termes, l’État, qui prétend avoir son mot à dire sur tout, devra accepter de discuter plus sérieusement avec tous les acteurs.
Telles sont les raisons, entre autres, qui nous conduisent à rejeter ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mon camarade Jean-Jacques Lozach ayant bien montré les lacunes de ce budget en matière sportive, je m’attacherai, pour ma part, à évoquer le programme 163, Jeunesse et vie associative.
Au premier coup d’œil, ce programme paraît préservé, les crédits qui lui sont consacrés affichant une hausse de 10 %.
Pourtant, si l’on y regarde de plus près, on constate que cette augmentation est essentiellement due à la montée en puissance du service civique volontaire, qui absorbe plus de 45 % des crédits du programme, alors que ceux qui sont destinés aux autres actions diminuent.
Bien loin des engagements présidentiels et des promesses faites lors de la Conférence nationale de la vie associative, nous sommes confrontés à un désengagement massif de l’État de la vie associative.
On sacrifie tout simplement le mouvement d’éducation populaire et le tissu associatif, qui structurent la vie sociale de notre pays.
Je pense notamment à la Ligue de l’enseignement, très présente dans mon département, la Dordogne, ainsi qu’aux nombreuses associations sportives qui jouent un rôle à la fois éducatif et social fondamental.
Les crédits de l’action n° 1, Développement de la vie associative, baissent en effet de 6,3 %, et ceux de l’action n° 2, Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, de près de 20 %.
Agir de la sorte, c’est faire fausse route ! Il suffit de comparer les chiffres pour s’en persuader.
Ainsi, le service civique bénéficiera en 2011 à 15 000 jeunes, pour un budget de 97,4 millions d’euros, tandis que l’action n° 2, Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, qui s’adresse à tous les jeunes, disposera d’un budget de seulement 76,5 millions d’euros.
Peut-on comparer une politique destinée à tous les jeunes, tout au long de leur jeunesse, aux quelques mois de volontariat associatif de quelques-uns ? À l’évidence, non ! Ce choix, je ne peux donc l’accepter, surtout au moment où les associations connaissent une situation très difficile. D’abord, elles ont de plus en plus de mal à attirer des bénévoles, et ce n’est pas le service civique qui permettra de résoudre le problème ! Ensuite, elles ont, tout simplement, énormément de mal à trouver les financements nécessaires à leur fonctionnement.
Leur dernier déboire en date remonte, bien sûr, à la décision de non-renouvellement des contrats aidés et des contrats uniques d’insertion. Les finances locales étant aujourd’hui fortement contraintes, les collectivités ne peuvent plus leur garantir, autant qu’elles le faisaient jusque-là, de ressources, parce qu’elles sont elles-mêmes étranglées.
Nos associations et leurs bénévoles attendent donc un message fort. À la lecture de ce budget, ils auront du mal à se sentir soutenus, ce que nous ne pouvons que regretter. C’est la raison pour laquelle, notamment, notre groupe ne votera pas ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un concert de louanges a accompagné le vote à la quasi-unanimité, voici quelques mois, de la proposition de loi déposée par notre collègue Yvon Collin et visant à instituer le service civique.
Je ne m’étendrai pas sur les bienfaits de ce nouveau dispositif. Il convient toutefois de ne pas galvauder le formidable enthousiasme qu’il a engendré, en assurant des conditions satisfaisantes d’accueil et de prise en charge des jeunes volontaires.
Une telle problématique se pose d’ailleurs avec une acuité particulière dans le cadre des services civiques effectués à l’étranger. Au cours d’un déplacement en Haïti en juillet dernier, j’ai eu l’occasion de discuter avec de jeunes volontaires ayant rencontré des conditions d’intervention particulièrement difficiles.
Madame le ministre, pouvons-nous compter sur une session de formation et un accueil dignes de ce nom ? (Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État, opine.)
J’évoquerai avec satisfaction la récente signature de la convention avec l’AEFE, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, ouvrant aux établissements français à l’étranger la possibilité d’accueillir des volontaires. Cette possibilité très opportune gagnerait pourtant à être rapidement étendue au-delà des établissements en gestion directe.
La montée en puissance financière de ce dispositif, avec une progression spectaculaire de 143 % des crédits dévolus à la sous-action Service civique est bienvenue.
Toutefois, le service civique ne doit pas « cannibaliser » le budget du programme Jeunesse et vie associative.
Mme Maryvonne Blondin. C’est tout le problème !
Mme Claudine Lepage. En effet, à périmètre constant, ce programme subit une baisse de plus de 20 %. En réalité, on déshabille Pierre, à savoir les services déconcentrés et les associations de jeunesse et d’éducation populaire, tant au niveau national qu’à l’échelon local, pour habiller Paul, c'est-à-dire le service civique. (Sourires.)
Pourtant, il est assurément contre-productif, et même légèrement pervers, de « faire payer » aux associations le développement du service civique, alors que la réussite même du dispositif passe par un renforcement du maillage associatif.
Nous ne pouvons accepter une politique de la jeunesse à deux vitesses. Bien que le service civique constitue une excellente mesure, il ne concernera cette année que 15 000 jeunes. Pourtant, la sous-action qui lui est dédiée absorbe autant de crédits que l’action n° 2, Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, laquelle s’adresse pourtant à tous les jeunes de 3 à 30 ans.
Le service civique est une très belle idée, qui permettra à notre jeunesse de manifester son attachement à la communauté nationale et aux valeurs qui la fondent. Pour germer, une conscience doit bénéficier d’un terreau favorable. La pleine réussite du service civique passe donc par un accompagnement des 12-16 ans destiné à leur apporter une ouverture culturelle et citoyenne qui leur donnera le goût de l’engagement collectif ou individuel.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Claudine Lepage. Parce que le budget que nous examinons ce soir ne prévoit pas cet investissement d’avenir, il est, j’ai le regret de le constater, parfaitement incohérent ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, dans le contexte général de réduction des dépenses publiques qui marque le projet de budget pour 2011, le programme Jeunesse et vie associative constitue une exception – il faut le souligner, le répéter, le marteler, même –, dans la mesure où les crédits qui lui sont affectés augmentent d’environ 10 %.
Une telle progression témoigne du respect des engagements pris par le Président de la République il y a un an, en Avignon, dans le cadre du plan « Agir pour la jeunesse ».
Le Sénat, sous l’impulsion de son président, Gérard Larcher, a très tôt pris conscience de l’importance de mettre en place une véritable politique en faveur des jeunes âgés de 16 à 25 ans.
C’est dans cet esprit qu’a été créée la mission d’information sur les politiques en faveur des jeunes, dont notre collègue Raymonde Le Texier était la présidente.
Le Président de la République n’a d’ailleurs pas manqué de reprendre certaines de nos propositions dans son plan « Agir pour la jeunesse ».
Plus largement, il me semble important de rappeler que l’action gouvernementale menée depuis 2007 en faveur de 16-25 ans témoigne d’une ambition jamais vue précédemment.
Sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy, un plan global a été proposé, afin de répondre à l’ensemble des difficultés et attentes des jeunes et des familles. Enseignement supérieur, formation, culture, logement, emploi et éducation, ont été au cœur des actions conduites par le Gouvernement.
Dès lors, face au décrochage scolaire et à la difficulté de trouver un emploi, une formation, une orientation ou un logement, l’État s’est engagé. Et la mission dont nous débattons ce soir ne reflète pas cet effort. Ce sont plus de 75 milliards d’euros qui sont consacrés à la politique de la jeunesse.
Pour ma part, je regrette qu’il n’y ait pas un ministère de plein exercice chargé de la gestion de la totalité des crédits affectés aux politiques menées en faveur des jeunes.
Ces efforts, nécessaires, ne sont que le premier pas vers le retour de la confiance entre le monde politique et la jeunesse, qui a depuis trop longtemps le sentiment d’être délaissée.
Parmi les dispositifs mis en œuvre depuis 2007, et qui ont rencontré un véritable succès, le service civique occupe une place prépondérante. Grâce à une initiative de notre collègue Yvon Collin, nous avons mis en place un dispositif original et valorisant.
Ce budget est ainsi marqué par la montée en puissance du service civique et par la prolongation, jusqu’en 2013, du Fonds d’expérimentations pour la jeunesse. Plus précisément, ce dernier est crédité de 25 millions d’euros. Il permettra de soutenir et d’évaluer des actions et démarches innovantes en faveur de l’insertion sociale des jeunes.
Le service civique, doté de près de 98 millions d’euros, permettra, quant à lui, de valoriser l’engagement citoyen, fortement attendu par les jeunes âgés de 16 à 25 ans.
Lors de la troisième édition des Rendez-vous du Sénat, le président Gérard Larcher et le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication ont choisi de mettre en exergue le thème de la jeunesse.
À cette occasion, comme lors des nombreuses rencontres effectuées dans le cadre du tour de France que je réalise afin de valoriser le service civique, nous avons pu constater, une fois encore, le fort intérêt des jeunes pour ce dispositif, comme leur dynamisme.
Alors que M. le rapporteur spécial souhaite retirer près de 2 millions d’euros à ce programme, au motif que ses crédits reposeraient sur une hypothèse trop optimiste de volontaires en 2011, je crois, pour ma part, qu’il est des priorités qu’il convient de sanctuariser. Le service civique en fait partie. (M. Charles Revet acquiesce.)
J’ajouterais même que l’ambition et l’optimisme sont des vertus que nous ne saurions oublier ou mettre de côté en ces périodes difficiles.
M. François Fortassin. Très bien !
M. Christian Demuynck. Une montée en charge et l’engagement de 15 000 jeunes dès 2011 ne peuvent donc pas remettre en cause cette ligne budgétaire. Ces engagements financiers ne sont que la traduction de notre volonté politique. Le Gouvernement donne ainsi priorité à cette ambitieuse réforme.
Il faut savoir tenir ses engagements. Les jeunes le méritent ! N’oublions pas que, derrière ces crédits, c’est une génération qui espère.
J’aimerais également, monsieur le ministre, saluer le respect de la parole donnée. En effet, bien que le dispositif « Envie d’agir » ait été un temps supprimé, je me félicite que les dispositions prises lors de l’examen du budget en commission, par le précédent ministre de la jeunesse et des solidarités actives, soient tenues et que vous ayez maintenu ces crédits et, donc, le dispositif.
Toutefois, plutôt que de créer de l’inquiétude chez les jeunes – ceux-ci pensent que, sans ligne de crédit spécifiquement attribuée au dispositif, vous n’en assurerez pas la continuité –, je souhaite que nous leur envoyions un signal positif en l’inscrivant clairement dans le budget. J’ai donc déposé un amendement dans ce sens.
En pérennisant ce programme de soutien à l’initiative et à l’esprit d’entreprise, qui comprend des dispositifs tels que « Défi Jeunes » et « Projets Jeunes », nous adressons effectivement, comme nous le faisons depuis 2007, un signal fort en leur direction.
« Envie d’agir » s’appuie au quotidien sur des initiatives et des acteurs locaux.
Outre le maintien des postes cofinancés par le Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, dits « postes FONJEP », pour lesquels 25 millions d’euros sont dédiés au financement de l’emploi associatif, et la formation des bénévoles par le biais du Conseil du développement de la vie associative – le CDVA – et grâce à une hausse exceptionnelle de 3 millions d’euros annoncée par le Premier ministre en 2009, concrétisée en 2010 et maintenue en 2011, « Envie d’Agir » est une réponse concrète aux attentes des jeunes et des acteurs de terrain.
Notre responsabilité d’élus appelle à ce que nous regardions en face les difficultés qui frappent une population composée de lycéens, d’étudiants, d’apprentis, de jeunes actifs ou de jeunes en rupture.
Plus encore, au-delà des difficultés d’aujourd’hui, il nous incombe surtout de créer les espoirs de demain.
Bien que le mot « budget » rime avec « crédits », « crise » et « chiffres », je sais que nos jeunes concitoyens souhaitent qu’il rime davantage avec « espoir ».
En nous engageant en faveur de la jeunesse, nous donnons un signe à l’avenir, et c’est l’avenir que nous construisons.
Dès lors, madame la ministre, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, je voterai naturellement les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Mme Chantal Jouanno, ministre des sports. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis ravie de me présenter à nouveau devant la Haute Assemblée,…
M. Jean-Claude Carle. Ravis, nous le sommes aussi !
Mme Chantal Jouanno, ministre. … pour défendre, cette fois-ci, la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Comme vous l’avez rappelé, monsieur Pierre Martin, – et je m’en félicite aussi – le sport a retrouvé un ministère de plein exercice, ce qui nous donne certaines responsabilités et nous oblige à construire une politique globale dans ce domaine. Je pense notamment à la défense des valeurs du sport.
Avant d’aller plus loin dans les détails, je tiens à préciser que nos objectifs sont clairs.
Notre première priorité est d’avoir une nation sportive. Quand 48 % des Français pratiquent un sport, ce taux atteint, au Danemark, 64 % de la population.
Nous devons donc, en particulier via le CNDS, nous adresser aux publics les plus éloignés du sport. On a cité tout à l’heure les femmes, notamment les femmes des quartiers dits défavorisés, mais il faut également penser aux jeunes de ces quartiers ou aux personnes en situation de handicap, dont nous n’avons pas suffisamment parlé.
Notre deuxième priorité est, bien évidemment, d’avoir une nation qui gagne.
Il ne s’agit pas de gagner pour gagner ! À travers le sport, c’est une image de la France que nous donnons.
Nous nous fixons donc vraiment pour objectif, à quelques mois des jeux Olympiques de 2012, de figurer parmi les cinq meilleures nations au monde, que ce soit aux jeux Olympiques ou aux jeux Paralympiques.
Dans ce contexte, nous avons une obligation toute particulière pour bien préparer le championnat d’Europe de football de 2016, l’Euro 2016, mais aussi pour faire aboutir la candidature d’Annecy à l’organisation des jeux Olympiques d’hiver de 2018 ou encore la candidature de la France à l’accueil de la Ryder cup.
Enfin, monsieur Fortassin, je défendrai un sport sain. Quand on a un ministère de plein exercice, on se doit de défendre l’ensemble des valeurs du sport !
Les sportifs ont un devoir d’exemplarité, du fait de l’image qu’ils véhiculent auprès des jeunes. Pour notre part, nous avons l’obligation de lutter contre toutes les dérives, qu’elles concernent les sportifs ou les supporters. Je pense à la lutte contre le dopage dans tous les sports, aux risques de corruption – il ne faut pas les négliger dans l’ensemble des sports et à tous les niveaux –, aux phénomènes de violences et à certains problèmes, que l’on peut parfois observer, de discrimination.
Je voudrais maintenant, mesdames, messieurs les sénateurs, rentrer dans le détail des observations que vous avez formulées.
J’entends bien les critiques sur le fait que la présentation du budget ne vous en facilite pas l’examen.
La mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne contient que deux programmes et les indispensables crédits de soutien des politiques du sport se trouvent relégués dans une autre mission. Évidemment, cet état de fait ne favorise pas la lisibilité de la politique du sport et n’est pas cohérent avec la création d’un ministère de plein exercice.
J’accepte donc tout à fait les critiques de M. Michel Sergent à ce sujet. Nous devons travailler ensemble à une présentation lisible, vous permettant d’avoir une vision claire des orientations que nous retenons.
Autre difficulté, on ne peut pas apprécier les moyens consacrés à la politique en faveur du sport sur la seule base du programme 219 et de la partie du programme support correspondant au sport, en oubliant le CNDS. Il faut tenir compte des moyens extrabudgétaires, qui ont augmenté de 19 %, pour un budget total de 270 millions d’euros.
Je voudrais juste rappeler à MM. Jean-Jacques Lozach et Jean-François Voguet que le CNDS est un établissement public à caractère administratif, un établissement public d’État, dans lequel nous avons la majorité et qu’en conséquence, nous devons piloter. Pour avoir présidé un établissement public à caractère industriel et commercial – un EPIC –, je sais combien l’État se doit de piloter directement et strictement ce type d’établissement.
Le CNDS n’a donc aucune autonomie vis-à-vis du ministère.
Or le Centre a vu ses moyens augmenter, notamment grâce aux nouveaux prélèvements sur les paris sportifs, qui sont portés à 1,5 % l’année prochaine et atteindront 1,8 % l’année suivante.
J’ajoute – et je m’en félicite – que vous avez adopté l’amendement du sénateur François Trucy qui permet, par le CNDS, de financer la préparation de l’Euro 2016, pour un montant total de 150 millions d’euros, et ce sans réduire les actions que le Centre mène en matière de développement du sport pour tous, notamment son soutien au fonctionnement de plus de 30 000 associations.
Donc, soyons clairs, nous ne toucherons pas au financement du Centre s’agissant de cette politique de développement du sport pour tous, l’augmentation globale des moyens du CNDS qui lui sont consacrés avoisinant 6 %.
J’accepte aussi la critique – j’en accepte beaucoup, de ces critiques ! – adressée par plusieurs d’entre vous sur ce qui apparaît comme une débudgétisation.
Il est vrai que nous assurons la continuité des moyens, notamment pour la politique en faveur du sport pour tous, par l’intermédiaire du CNDS. Il est tout aussi vrai que nous devons travailler ensemble pour améliorer la lisibilité que nous pouvons vous offrir sur la politique menée par le Centre. Cela passe non seulement par la présence des rapporteurs aux réunions de son conseil d’administration, mais peut-être aussi, plus généralement, par une réflexion sur les modes d’évaluation des actions menées.
Par conséquent, appréciés globalement à travers le programme 219, le programme support et le budget du CNDS, les moyens de la politique du sport sont en légère hausse en 2011. C’est tout de même un point positif dans le contexte budgétaire global !
Je voudrais d’ailleurs rappeler à M. David Assouline, qui a beaucoup insisté sur ce point, que le budget avoisinait 510 millions d’euros en 2001, qu’il s’élevait à 750 millions d’euros en 2007 et qu’il atteint, aujourd’hui, presque 850 millions d’euros. Globalement, et depuis plusieurs années, les moyens augmentent !
En contrepartie, les ressources consacrées à la politique du sport pour tous ne baisseront pas, pas plus que les moyens de l’Agence française de lutte contre le dopage, qui sont stables. Nous avons effectivement une réflexion à mener sur la façon de garantir ces ressources dans la durée et nous travaillerons sur ce sujet l’année prochaine.
Avant de clore mon propos, je voudrais répondre rapidement à quelques questions qui m’ont été posées.
Monsieur Sergent, vous m’avez interrogée sur les indemnités prévues dans le cadre de la concession du Stade de France. La décision budgétaire prend en compte les discussions en cours pour la prochaine saison, en espérant que leur issue soit positive…
Certaines interrogations ont également porté sur le fait que les crédits liés à la suppression du DIC ne se retrouvent pas dans le budget.
Sur ce sujet, il nous faut mener une réflexion globale. Plusieurs rapports ont été élaborés et ils abordent trois pistes : la retraite des sportifs, la TVA sur la billetterie et la formation. Nous devons travailler sur cette question cette année – en particulier pour le rugby –, étant précisé que les difficultés que connaît le secteur du sport professionnel, notamment le football, étaient antérieures à la suppression anticipée du DIC.
J’ai également été questionnée sur la suite à donner au Livre vert du supportérisme. Prenant tout juste mes fonctions à la tête du ministère, je vais prendre connaissance de ce rapport. Toutefois, ce phénomène est d’ores et déjà l’un des points clés sur lequel nous allons travailler, cette année, en matière de prévention des dérives, notamment dans les stades.
M. Christian Demuynck, au nom de M. Alain Dufaut, m’a interrogée sur le versement de la subvention à l’Agence française de lutte contre le dopage. Celle-ci sera octroyée en une fois en 2011, et non en plusieurs versements.
Quant aux décrets relatifs à la transposition des dispositions de lutte contre le dopage, je viens de signer le troisième décret, qui doit désormais être en attente de la signature du Premier ministre. Sa parution ne saurait tarder.
Tels sont, très brièvement, les éléments que je souhaitais vous communiquer, mesdames, messieurs les sénateurs, pour répondre à vos différentes questions.
Globalement, c’est bien un budget stable que j’ai le plaisir de vous présenter et que je vous demande d’adopter. Cette stabilité est un signe positif dans un contexte budgétaire relativement contraint. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Le projet de budget pour 2011 que Mme Jeannette Bougrab et moi-même vous proposons d’examiner aujourd’hui traduit les choix stratégiques du Gouvernement en faveur de la jeunesse.
Il constitue l’un des volets d’une politique globale, volontariste et portée par l’ensemble des ministres de ce Gouvernement, comme M. Christian Demuynck l’a d’ailleurs très bien décrit. Le fil conducteur de cette politique est de permettre à notre jeunesse d’accéder à l’autonomie, de donner les moyens à nos jeunes de se réaliser.
Permettre à nos jeunes d’accéder à l’autonomie, c’est ce que nous faisons depuis trois ans maintenant, en investissant massivement dans la formation, qui est le meilleur rempart contre le chômage et la précarité.
Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, 39 milliards d’euros au total auront été investis, sur l’ensemble du quinquennat, dans la modernisation de nos universités. Le budget de l’éducation nationale, que vous avez adopté hier, s’élève à plus de 60 milliards d’euros et reste le premier budget de l’État.
Permettre à nos jeunes d’accéder à l’autonomie, c’est également ce que fait le Gouvernement, en améliorant comme jamais les conditions de vie des étudiants, avec la création d’un dixième mois de bourse depuis cette rentrée, l’augmentation sans précédent des bourses pour les étudiants, de l’ordre de 20 % pour les plus défavorisés d’entre eux, la création en trois ans de 40 000 places nouvelles pour le logement étudiant.
Permettre à nos jeunes d’accéder à l’autonomie, c’est aussi leur donner les moyens de se réaliser par le travail. C’est la raison pour laquelle nous avons étendu le RSA aux jeunes.
Permettre à nos jeunes d’accéder à l’autonomie, c’est encore favoriser l’égalité des chances, avec les internats d’excellence ou les écoles de la deuxième chance.
Permettre à nos jeunes d’accéder à l’autonomie, c’est enfin faire émerger une génération engagée et permettre à notre jeunesse de se mettre au service de l’intérêt général, de la Nation et des grandes causes qui nous concernent tous. C’est tout l’objet du service civique.
En rapprochant l’éducation de la jeunesse et de la vie associative, le Président de la République a voulu donner un nouvel élan à cette politique ; il a souhaité en renforcer la cohérence, multiplier les complémentarités et les synergies de notre action. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, je crois qu’il y a véritablement continuité et complémentarité entre les deux départements ministériels, entre l’école, la jeunesse et la vie associative.
Qu’est-ce qu’éduquer, sinon accompagner progressivement l’enfant vers l’âge adulte, l’autonomie et la responsabilité ? Qu’est-ce que former, sinon donner à la jeunesse de notre pays les moyens d’être un acteur à part entière de la société par l’exercice des responsabilités civiques, mais aussi par son travail ? De ce point de vue, quelle est la mission de l’éducation nationale, sinon d’amener les jeunes à exprimer leur audace et leur créativité au profit de la société tout entière ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous disposons aujourd’hui des moyens de ce nouvel élan.
Dans un contexte d’effort sans précédent de maîtrise des dépenses publiques, je tiens à souligner l’augmentation exceptionnelle de 10 % dont bénéficiera le projet de budget l’année prochaine – M. Demuynck l’a souligné très justement. C’est un signal fort adressé à notre jeunesse mais également à la vie associative, dont je suis convaincu qu’elle constitue un atout majeur pour la cohésion sociale de notre pays. (Nouvelles exclamations ironiques sur les mêmes travées.)
Ce projet de budget est construit autour de trois grandes priorités.
Notre première priorité est de renforcer le soutien aux initiatives et à l’engagement des jeunes. Cet objectif est au cœur du plan « Agir pour la jeunesse », qui a été présenté par le Président de la République en septembre 2009. Avec ce plan, c’est un effort massif que nous avons décidé en faveur de l’engagement citoyen des jeunes, notamment en mobilisant les moyens nécessaires pour la mise en place du service civique, qui constitue, nous l’assumons pleinement, une priorité.
Le service civique, c’est d’abord une manière résolument moderne de soutenir la volonté d’engagement de notre jeunesse, d’accompagner des jeunes qui souhaitent mettre toute leur énergie au service de la Nation, qui veulent servir l’intérêt général et les grandes causes qui nous concernent tous : la solidarité, l’éducation pour tous, la santé, l’environnement, la culture, l’action humanitaire.
Je ne peux pas laisser dire, monsieur Voguet, que ce service civique ne fonctionne pas. (M. Jean-François Voguet s’exclame.) Il m’a suffi, avec Jeannette Bougrab, d’écouter les témoignages, voilà quelques jours, des premiers volontaires du service civique pour comprendre à quel point leur mission les avait transformés : elle leur a été profitable et le sera pour toute leur vie professionnelle et personnelle.
Le service civique, c’est ensuite un témoignage fort de la confiance que la France accorde à sa jeunesse. Avec ce dispositif, l’État encourage, accompagne une expérience décisive qui valorise le parcours citoyen de nos jeunes et renforce leur insertion professionnelle.
Dans le projet de budget pour 2011, nous disposons de sommes importantes, puisque le service civique prend de l’ampleur, avec plus de 8 500 missions agréées en 2010. Il s’agit d’accompagner cette montée en puissance avec 15 000 jeunes volontaires en 2011 et 20 000 en 2012 ; en 2011, 97 millions d’euros seront alloués au dispositif.
Il n’est donc nullement question de galvauder le service civique, madame Lepage.
Il s’agit aussi de valoriser les compétences acquises lors de ces expériences si enrichissantes pour nos jeunes. Avec Jeannette Bougrab, je souhaite, par exemple, mieux accompagner la sortie du service civique. Nous avons eu l’occasion de nous en entretenir avec Martin Hirsch voilà quelques jours.
Nous avons également prévu d’accompagner, dans le cadre de conventions pluriannuelles d’objectifs, les associations qui participeront à cette dynamique du service civique, qu’il s’agisse d’associations d’éducation populaire comme la Ligue de l’enseignement, ou d’associations qui ont été à l’origine même de l’initiative, comme Unis-cités.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, loin de réduire les moyens des associations, le service civique joue au contraire le rôle d’accélérateur, de « dynamiseur » de la vie associative. Il ne pénalise pas la vie associative ; il lui donne une nouvelle dimension et lui confère des moyens importants.
Plusieurs d’entre vous s’étaient mobilisés et avaient interpellé mon prédécesseur sur le programme national « Envie d’agir ». Je veux être clair : ce dispositif sera maintenu. Son évaluation nous a en effet montré qu’il participait à l’engagement et à la formation des jeunes dans notre pays.
Je veux vous rassurer : « Envie d’agir » était doté de 3,2 millions d’euros l’an dernier ; il sera à nouveau doté de 3,2 millions d’euros. Mon prédécesseur, Marc-Philippe Daubresse, s’y était engagé devant l’Assemblée nationale le 12 novembre dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances. Avec Jeannette Bougrab, je respecterai pleinement cet engagement.
Je vous précise d’ailleurs que celui-ci s’est d’ores et déjà traduit concrètement, puisque les enveloppes prévisionnelles de crédits, communiquées aux directions régionales chargées de la jeunesse pour la préparation de leur budget pour 2011, ont été augmentées en conséquence.
Nous allons assurer la continuité de ce financement par un redéploiement des crédits en interne – je dis cela à l’intention de M. Demuynck. Une nouvelle circulaire, qui déterminera précisément les modalités du dispositif, sera signée prochainement.
La deuxième priorité de notre action, c’est de mieux accompagner l’insertion et l’autonomie de nos jeunes.
Pour mettre en œuvre une politique volontariste, nous disposons depuis mars 2009 d’un outil profondément novateur : le Fonds d’expérimentations pour la jeunesse.
Ce fonds, qui vise à améliorer l’insertion sociale et professionnelle des jeunes de 16-25 ans, sera doté en 2011 de 118 millions d’euros, émanant à la fois de contributions de l’État mais aussi de personnes morales, de droit public ou de droit privé, qui s’associent pour définir, financer et piloter un ou plusieurs programmes expérimentaux.
D’ores et déjà, ce fonds a démontré sa grande efficacité ; il a en effet révélé le trésor d’initiatives que recèle le terrain. Depuis sa création en mars 2009, près de 400 expérimentations sur le territoire national ont été sélectionnées sur des thématiques extrêmement variées : assurer la formation initiale des jeunes, les accompagner dans leur accès à l’emploi ou lors de ruptures dans leur parcours social et professionnel, les soutenir dans leurs projets, favoriser les démarches des jeunes vers l’autonomie par les pratiques artistiques ou culturelles.
Devant toute la richesse et la diversité de ces projets, notre responsabilité est bien sûr d’accompagner ce dispositif, mais aussi d’en évaluer l’efficacité.
C’est cette méthode, alliant innovation expérimentale, suivi et évaluation, que j’ai retenue pour cette priorité.
Le Fonds d’expérimentations pour la jeunesse a par ailleurs permis le lancement de deux appels à projets spécifiques : l’un visant à développer un « livret de compétences », et l’autre tendant à expérimenter des dispositifs de ressources pour les jeunes. Ce fonds est donc extrêmement pertinent.
Par ailleurs, avec des crédits à hauteur de 29 millions d’euros au sein de ce projet de budget pour 2011, nous sommes en mesure de reconduire les politiques engagées : le renforcement de l’accès à la formation des jeunes, notamment dans les réseaux des centres départementaux et régionaux d’information jeunesse ; le développement de la mobilité des jeunes, grâce aux actions qui sont menées avec l’Office franco-allemand ou l’Office franco-québécois pour la jeunesse.
Enfin, notre troisième priorité est un soutien constant au développement de la vie associative.
Dans le contexte que vous connaissez, nous avons décidé de maintenir les subventions annuelles et pluriannuelles aux associations partenaires du ministère à hauteur de 10 millions d’euros.
Les subventions dites « postes FONJEP » sont également maintenues au même niveau, soit 25 millions d’euros.
Le financement de la formation de bénévoles, notamment par le biais du Conseil du développement de la vie associative, a été reconduit.
Je suis fier d’appartenir à un gouvernement qui, depuis trois ans, est en permanence à l’écoute du monde associatif, et qui a également permis aux collectivités territoriales de continuer à financer le sport et la culture,…
M. Jean-François Voguet. Heureusement !
M. Luc Chatel, ministre. … malgré la réforme qui prévoit une spécialisation des niveaux de compétence.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous voulons aussi aider le monde associatif à se développer. Un certain nombre de chantiers majeurs ont été engagés, et nous entendons les concrétiser : la refonte du Conseil du développement de la vie associative, la transformation du Conseil national de la vie associative en un haut conseil à la vie associative, la refonte du soutien à la formation des bénévoles, la reconnaissance et la valorisation du bénévolat.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes totalement mobilisés pour libérer les énergies. La jeunesse comme la vie associative débordent de créativité. Notre pays, qui construit son avenir, ne saurait faire vivre son idéal républicain sans faire fructifier ces deux formidables atouts. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.
État B
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Sport, jeunesse et vie associative |
418 032 637 |
429 508 386 |
Sport |
204 614 065 |
216 105 618 |
Jeunesse et vie associative |
213 418 572 |
213 402 768 |
Mme la présidente. L'amendement n° II-204, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
- |
- |
|||
Sport |
3 200 000 |
3 200 000 |
||
Jeunesse et vie associative |
3 200 000 |
3 200 000 |
||
TOTAL |
3 200 000 |
3 200 000 |
3 200 000 |
3 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. En proposant d’abonder les crédits du programme Jeunesse et vie associative, nous souhaitions garantir à tous ceux qui ont soutenu « Envie d’agir », et qui se sont mobilisés à ce titre, que le dispositif serait effectivement prolongé.
Toutefois, étant donné que vous venez de vous engager très clairement à poursuivre cette initiative remarquable et que vos intentions sont donc précisées, monsieur le ministre, je retire cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-204 est retiré.
L'amendement n° II-22, présenté par M. Sergent, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
- |
- |
|||
Sport |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Jeunesse et vie associative |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d’assurer une toute petite partie du financement par l’État du programme de construction et de rénovation des stades de football.
En effet, même si le Sénat a introduit dans le projet de loi de finances un article 45 bis nouveau visant à ce qu’un prélèvement de 0,3 % alimente pendant cinq ans le Centre national pour le développement du sport, le financement de l’opération « Grands stades » au travers du CNDS s’apparente au bout du compte à une opération de débudgétisation de 150 millions d’euros.
Il aurait pourtant suffi de maintenir, au sein du programme Sport, une partie des crédits économisés sur le droit à l’image collective pour trouver la somme correspondante.
Nous proposons donc d’abonder de 2 millions d’euros l’action n° 2, Développement du sport de haut niveau. Cette somme est certes largement insuffisante, mais l’amendement vise à poser un principe de responsabilité de l’État. Les crédits proviendraient, au sein du programme Jeunesse et vie associative, de l’action n° 4, Actions particulières en direction de la jeunesse.
En effet, la question de la pertinence des 75 millions d’euros de crédits demandés pour 2011 au titre du service civique est posée. L’année dernière, M. Hirsch avait vigoureusement défendu ici même une ligne budgétaire très optimiste, tablant sur une moyenne de 10 000 volontaires sur l’année. Or cet objectif ne sera pas atteint, et loin de là, puisque, d’après les chiffres communiqués le mois dernier par Marc-Philippe Daubresse, votre prédécesseur immédiat, seuls 8 500 jeunes avaient posé leur candidature le mois dernier, sans même parler d’embauches.
Je voudrais donc rappeler à tous que, poussé à un certain stade, le volontarisme peut confiner à la tromperie et nuire à la crédibilité des meilleurs projets.
J’ai donc la faiblesse de penser que, pas plus en 2011 qu’en 2010, le financement du service civique ne serait mis en péril par un prélèvement de 2 millions d’euros.
Enfin, nous devons nous demander si l’objectif d’intégrer 10 % d’une classe d’âge, soit 75 000 jeunes, a encore un sens, eu égard au coût d’une telle mesure. Il faudrait en effet mobiliser 500 millions d’euros, une somme qui dépasserait la totalité des crédits que le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit d’allouer à la mission.
Telles sont les justifications de cet amendement d’humeur, ou d’appel, qui vise aussi, madame la ministre, à faire en sorte que vous trouviez dans votre budget les moyens de rénover et de construire les grands stades, sans qu’il soit besoin de recourir à la débudgétisation.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, ministre. Cet amendement, d’humeur ou de principe, monsieur le rapporteur spécial, vise à rappeler les règles budgétaires et à alerter le Gouvernement sur le financement de la rénovation et de la construction des stades dans la perspective de l’Euro 2016.
Je rappelle néanmoins, d’une part, que le Sénat a déjà adopté l’amendement n° I-40 rectifié, présenté par M. Trucy, qui donne au Gouvernement des marges de manœuvre pour financer ce chantier, et, d’autre part, que l’article 87 quater dispose qu’un rapport sera remis au Parlement sur les conséquences financières pour le CNDS du financement des grands stades.
Aussi, je vous propose de retirer cet amendement, monsieur Sergent.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-22 est-il maintenu ?
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Mme la ministre ayant répondu à mes interrogations, je le retire, madame la présidente. Nous continuerons néanmoins de suivre avec attention cette question. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-22 est retiré.
Nous allons maintenant procéder au vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion l’article 87 quater, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Sport, jeunesse et vie associative
Article 87 quater (nouveau)
Un rapport faisant le point sur l’incidence financière des travaux de construction et de rénovation des stades qui accueilleront l’Euro 2016 sur les crédits du Centre national pour le développement du sport, ainsi que sur les transferts de charges induits pour les collectivités, est remis au Parlement avant le 30 juin 2014.
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux ; ils seront repris à vingt-deux heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures trente, est reprise à vingt-deux heures trente, sous la présidence de M. Bernard Frimat.)
PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Saisine du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution par plus de soixante députés du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
7
Conférence des présidents
M. le président. Mes chers collègues, la conférence des présidents, qui s’est réunie aujourd’hui, a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 2 décembre 2010
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 (n° 110, 2010-2011) :
- Culture (plus article 68 quater) (une heure trente) ;
- Médias, livre et industries culturelles (plus article 76) (deux heures) ;
. compte spécial : avances à l’audiovisuel public ;
- Travail et emploi (plus articles 88 à 94, 94 bis, 95 à 97) (deux heures) ;
- Conseil et contrôle de l’État (zéro heure trente) ;
- Direction de l’action du Gouvernement (une heure) ;
- Pouvoirs publics (zéro heure trente) ;
- Budget annexe : Publications officielles et information administrative (zéro heure quinze).
Vendredi 3 décembre 2010
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 :
- Économie (plus article 73 ter) (une heure quarante-cinq) ;
. compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ;
- Aide publique au développement (deux heures) ;
. compte spécial : engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique ;
. compte spécial : accords monétaires internationaux ;
. compte spécial : prêts à des États étrangers ;
- Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales (plus articles 68 et 68 bis) (quatre heures) ;
. compte spécial : développement agricole et rural ;
- Gestion des finances publiques et des ressources humaines (une heure) ;
. compte spécial : avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ;
. compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ;
. compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l’État ;
- Régimes sociaux et de retraite (zéro heure trente) ;
. compte spécial : pensions (plus article 100) ;
- Remboursements et dégrèvements (zéro heure quinze).
Samedi 4 décembre 2010
À 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 :
Discussions reportées :
- Ville et logement (plus articles 98 et 99) (suite) ;
- Politique des territoires (une heure trente) ;
- Engagements financiers de l’État (zéro heure trente) ;
. compte spécial : participations financières de l’État ;
- Provisions (zéro heure quinze) ;
- Santé (plus articles 86 bis à 86 nonies) (une heure trente).
(Le délai limite pour le dépôt des amendements à ces missions est expiré).
Éventuellement, discussion des articles de la seconde partie non joints aux crédits.
(Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est fixé au vendredi 3 décembre 2010, à 11 heures).
Dimanche 5 décembre 2010
À 10 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 :
- Suite de la discussion des articles de la seconde partie non joints aux crédits.
Lundi 6 décembre 2010
À 10 heures, à 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 :
- Suite de la discussion des articles de la seconde partie non joints aux crédits.
Mardi 7 décembre 2010
À 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2011 :
- Éventuellement, suite et fin de la discussion des articles de la seconde partie non joints aux crédits ;
- Explications de vote sur l’ensemble du projet de loi de finances ;
(Il est attribué à chaque groupe un temps d’intervention de dix minutes et de cinq minutes à la réunion administrative des sénateurs non inscrits.
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance le lundi 6 décembre, avant 17 heures) ;
Scrutin public à la tribune.
Élection d’un questeur du Sénat, en remplacement de M. Philippe Richert.
Le scrutin secret (majorité absolue au premier ou deuxième tour, majorité relative au troisième tour) aura lieu, en salle des conférences, au début des explications de vote sur l’ensemble du projet de loi de finances pour 2011.
JOURNÉES SÉNATORIALES D’INITIATIVE
Mercredi 8 décembre 2010
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
1°) Désignation de deux membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, en remplacement de MM. Jean-Claude Etienne et Christian Gaudin ;
2°) Désignation de trois membres de la Délégation sénatoriale à la prospective, en remplacement de MM. Jean-Claude Etienne, Christian Gaudin et Michel Thiollière ;
Ordre du jour réservé au groupe RDSE
3°) Proposition de loi constitutionnelle tendant à renforcer la fonction de représentation par le Sénat des collectivités territoriales de la République, présentée par M. Yvon Collin et les membres du groupe du RDSE (n° 58, 2010-2011) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 7 décembre 2010) ;
- au jeudi 2 décembre 2010, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 8 décembre 2010, le matin) ;
4°) Proposition de loi relative aux télécommunications, présentée par MM. Daniel Marsin et Yvon Collin et plusieurs de leurs collègues (n° 676, 2009-2010) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 7 décembre 2010) ;
- au lundi 6 décembre 2010, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission de l’économie se réunira pour examiner les amendements le mercredi 8 décembre 2010, le matin) ;
À 18 heures 30 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat
5°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées (texte de la commission, n° 132, 2010-2011) (demande du groupe UMP) ;
6°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires (texte de la commission, n° 130, 2010-2011) (demande du groupe UMP) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune ;
La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 7 décembre 2010).
Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est expiré.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements à ces deux textes le mercredi 8 décembre 2010, le matin).
Jeudi 9 décembre 2010
De 9 heures à 13 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UMP
1°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées et de la deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires ;
À 15 heures :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste
2°) Proposition de loi relative à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements, présentée par MM. Jean-Pierre Bel, Claude Haut, Yves Krattinger, Gérard Miquel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (n° 62, 2010-2011) ;
Sont jointes à cette proposition de loi les deux propositions de loi suivantes :
- Proposition de loi relative à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements, présentée par MM. Yvon Collin, M. Jean-Michel Baylet et plusieurs de leurs collègues du groupe RDSE (n° 64, 2010-2011) ;
- Proposition de loi relative à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements, présentée par Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Marie-France Beaufils, Odette Terrade, M. Jean-François Voguet, Mmes Mireille Schurch, Éliane Assassi, Josiane Mathon-Poinat et les membres du groupe CRC-SPG (n° 107, 2010-2011) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 8 décembre 2010) ;
- au mercredi 8 décembre 2010, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance à la proposition de loi n° 62.
La commission des finances se réunira pour examiner les amendements à ce texte le jeudi 9 décembre 2010, le matin) ;
À 21 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat
3°) Débat d’orientation sur la défense anti-missile dans le cadre de l’OTAN (demande du groupe socialiste) ;
(Il a été décidé d’attribuer un temps de parole de vingt minutes au représentant du groupe socialiste, ainsi qu’au président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ;
Conformément au droit commun défini à l’article 29 ter du règlement, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposeront, dans la discussion générale, d’un temps global de deux heures ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 11 heures, le mercredi 8 décembre 2010).
SEMAINES RÉSERVÉES PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Lundi 13 décembre 2010
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
À 14 heures 30 et le soir :
1°) Débat préalable au Conseil européen des 16 et 17 décembre 2010 (demande de la commission des affaires européennes) ;
(La conférence des présidents a décidé d’attribuer, à la suite de l’intervention liminaire du Gouvernement de dix minutes, un temps d’intervention de huit minutes au président de la commission des affaires européennes, au président de la commission des affaires étrangères, ainsi qu’à chaque groupe (cinq pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe) ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 10 décembre 2010 ;
À la suite de la réponse du Gouvernement, les sénateurs pourront, pendant une heure, prendre la parole (deux minutes maximum) dans le cadre d’un débat spontané et interactif comprenant la possibilité d’une réponse du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes).
2°) Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit (texte de la commission, n° 21, 2010-2011).
(La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 10 décembre 2010) ;
Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est expiré).
Mardi 14 décembre 2010
À 9 heures 30 :
1°) Vingt et une questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 989 de Mme Maryvonne Blondin à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Statut des aidants familiaux) ;
- n° 992 de M. Bernard Fournier à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé ;
(Secours et assistance médicale lors des manifestations sportives) ;
- n° 1029 de M. Roland Courteau à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Centre d’alerte tsunami en Méditerranée) ;
- n° 1033 de M. Éric Doligé à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Missions de prévention des SDIS) ;
- n° 1035 de Mme Patricia Schillinger à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale ;
(Places en IME dans le périmètre de Saint-Louis) ;
- n° 1043 de M. Jean Boyer à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Développement durable du photovoltaïque) ;
- n° 1044 de M. René Vestri à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;
(Disproportion des indemnisations financières accordées aux victimes du système judiciaire) ;
- n° 1048 de M. Jacques Mézard transmise à Mme la ministre des sports ;
(Déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés) ;
- n° 1054 de M. Michel Boutant à M. le secrétaire d’État chargé du logement ;
(Nouveau prélèvement sur les organismes HLM) ;
- n° 1062 de M. Claude Bérit-Débat à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Capacités d’intervention du poste de police de la ville de Coulounieix-Chamiers) ;
- n° 1064 de M. Gérard Bailly à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Cautionnement des banques par l’État) ;
- n° 1065 de Mme Odette Terrade à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ;
(Situation au centre régional de documentation pédagogique de l’académie de Créteil) ;
- n° 1070 de Mme Christiane Kammermann transmise à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Difficultés rencontrées par les Français de l’étranger pour obtenir des renseignements administratifs) ;
- n° 1076 de Mme Françoise Férat à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ;
(Évolution du parcours de découverte des métiers et des formations pour les collégiens) ;
- n° 1080 de M. Michel Teston à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Désenclavement de l’Ardèche) ;
- n° 1081 de M. Thierry Repentin transmise à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Évolution de la présence de la gendarmerie nationale en Savoie) ;
- n° 1082 de M. Yves Daudigny à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Avenir des contrats uniques d’insertion) ;
- n° 1084 de M. Bernard Piras à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Financement d’une partie de la suppression de la taxe professionnelle par le contribuable ou la collectivité) ;
- n° 1085 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Dysfonctionnements dans la distribution d’électricité à Paris) ;
- n° 1090 de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Absence de versement de la taxe locale d’équipement) ;
- n° 1096 de M. Hervé Maurey à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Transférabilité des contrats d’assurance sur la vie) ;
À 14 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
2°) Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit ;
De 17 heures à 17 heures 45 :
3°) Questions cribles thématiques sur l’avenir de la filière photovoltaïque ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 12 heures 30) ;
À 18 heures, le soir et la nuit :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
4°) Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit.
Mercredi 15 décembre 2010
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
À 14 heures 30 :
1°) Suite éventuelle de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit ;
2°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances rectificative pour 2010 (A.N., n° 2944) ;
(La commission des finances se réunira pour le rapport le 13 décembre 2010, le matin.
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 14 décembre 2010) ;
- au mercredi 15 décembre 2010, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des finances se réunira pour examiner les amendements le jeudi 16 décembre 2010, le matin) ;
Le soir :
3°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 ;
(Conformément au droit commun défini à l’article 29 ter du règlement, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposeront, dans la discussion générale, d’un temps global de deux heures ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 14 décembre 2010) ;
4°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2011 ;
(Conformément au droit commun défini à l’article 29 ter du règlement, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposeront, dans la discussion générale, d’un temps global de deux heures ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 14 décembre 2010).
Jeudi 16 décembre 2010
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
1°) Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2010 ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures) ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
3°) Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2010.
Vendredi 17 décembre 2010
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :
- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2010.
Lundi 20 décembre 2010
À 14 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat
1°) Question orale avec débat n° 1 de Mme Catherine Morin-Desailly transmise à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ;
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 17 décembre 2010.
Conformément à l’article 82, alinéa 1, du règlement, l’auteur de la question et chaque orateur peuvent utiliser une partie du temps de parole pour répondre au Gouvernement) ;
2°) Suite de la deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relative aux recherches impliquant la personne humaine (n° 426, 2009-2010).
(Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est expiré).
Mardi 21 décembre 2010
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 939 de Mme Anne-Marie Payet à Mme la ministre de la santé et des sports transmise à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale ;
(Aménagement du congé parental pour les naissances multiples) ;
- n° 1010 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Services d’aide à domicile) ;
- n° 1069 de M. Jean-Luc Fichet à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Avenir de la sous-préfecture de Morlaix) ;
- n° 1074 de M. Roland Ries à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Frontaliers ayant travaillé en Allemagne) ;
- n° 1083 de M. Marc Laménie à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé ;
(Rachat de trois sociétés autrichiennes par le Laboratoire français du Fractionnement et des Biotechnologies) ;
- n° 1086 de M. Alain Fouché à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Avenir des contrats aidés) ;
- n° 1089 de Mme Anne-Marie Escoffier à Mme le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Recours contre le refus de transmettre une demande ACCRE) ;
- n° 1093 de Mme Nicole Bonnefoy transmise à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique ;
(Situation des zones ayant une couverture en téléphonie mobile qualifiée d’«acceptable») ;
- n° 1095 de M. Daniel Reiner à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Frais et mobilité bancaire des consommateurs) ;
- n° 1100 de M. Jean-Claude Carle à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;
(Droit de recours des tiers en matière d’urbanisme) ;
- n° 1101 de M. François Marc à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Concurrence et développement de l’Internet mobile très haut débit) ;
- n° 1105 de Mme Bernadette Dupont à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur ;
(Avenir économique des métiers de bouche) ;
- n° 1106 de Mme Claudine Lepage à Mme la ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes ;
(Problèmes de harcèlement moral dans les postes à l’étranger) ;
- n° 1107 de M. Yves Détraigne à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ;
(Exonération des heures supplémentaires des enseignants) ;
- n° 1108 de M. Jean-Marc Todeschini à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Stratégie de déneigement des routes nationales et des autoroutes de l’Est de la France) ;
- n° 1113 de M. Alain Fauconnier à Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Déploiement numérique de la télévision numérique dans les zones rurales) ;
- n° 1115 de Mme Mireille Schurch à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Conséquences de l’arrêt des aides de l’État aux CAE en cours d’année) ;
- n° 1123 de Mme Bernadette Bourzai à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Liaison TGV entre Brive et Lille) ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
À 14 heures 30 :
2°) Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale, portant réforme de la représentation devant les cours d’appel (n° 43, 2010-2011) ;
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 8 décembre 2010, le matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 6 décembre 2010, à 11 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 20 décembre 2010) ;
- au jeudi 16 décembre 2010, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mardi 21 décembre 2010, le matin) ;
Le soir :
3°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010 ;
(Conformément au droit commun défini à l’article 29 ter du règlement, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposeront, dans la discussion générale, d’un temps global de deux heures ; les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 20 décembre 2010).
Mercredi 22 décembre 2010
Ordre du jour fixé par le Gouvernement
À 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la reconversion des militaires (n° 611, 2009-2010) ;
(La commission des affaires étrangères se réunira pour le rapport le mardi 7 décembre 2010, à 17 heures (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 6 décembre 2010, à 11 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 21 décembre 2010) ;
- au lundi 20 décembre 2010, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires étrangères se réunira pour examiner les amendements le mardi 21 décembre 2010, l’après-midi) ;
2°) Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer (n° 134, 2010-2011) ;
(La commission des affaires étrangères se réunira pour le rapport le mardi 7 décembre 2010, à 17 heures (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 6 décembre 2010, à 11 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe (les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 21 décembre 2010) ;
- au lundi 20 décembre 2010, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires étrangères se réunira pour examiner les amendements le mardi 21 décembre 2010, l’après-midi) ;
3°) Navettes diverses.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
J’indique par ailleurs que le Sénat suspendra ses travaux en séance plénière du jeudi 23 décembre 2010 au dimanche 9 janvier 2011, du samedi 19 février au dimanche 27 février 2011, du samedi 12 mars au dimanche 20 mars 2011, du samedi 16 avril au lundi 25 avril 2011.
8
Loi de finances pour 2011
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).
Recherche et enseignement supérieur
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (et article 78).
Mes chers collègues, selon les estimations faites par le service de la séance, si tous les intervenants respectent leur temps de parole, nous pouvons espérer achever cette discussion vers deux heures.
La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. (M. Adrien Gouteyron applaudit.)
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances. J’ai la chance de rapporter, avec mon collègue Philippe Dominati, une mission prioritaire en termes budgétaires. Ainsi, pour 2011, ses crédits de paiement, qui s’élèvent à 25 milliards d'euros, sont en légère progression par rapport à 2010. Cela s’explique notamment par la dynamique de la dépense de personnel, qui ne connaît pas les contraintes appliquées aux masses salariales des autres ministères : pour les programmes rattachés au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, les crédits de personnel sont, à périmètre constant, en hausse de 3,6 %.
Cette évolution s’explique notamment par le relèvement de la contribution de l’État au compte d’affectation spéciale « Pensions », la mise en œuvre des mesures générales de la fonction publique et la poursuite du plan Carrières. Cette augmentation est compensée en partie par une réduction des dépenses de fonctionnement et d’investissement de la mission.
Je rappelle que, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques que nous venons de discuter, la mission ne sera pas soumise, entre 2011 et 2014, à la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Cette exonération profite également aux opérateurs de la mission, dont le plafond d’emplois « explose » suite au passage à l’autonomie de la majorité des établissements universitaires. À ce titre, je précise qu’après les trente-huit établissements passés aux responsabilités et compétences élargies en 2010, trente et un établissements supplémentaires accéderont à l’autonomie en 2011.
L’année 2010 n’est pas seulement marquée par le vote de la loi de programmation, mais aussi par la mise en place du programme d’investissements d’avenir décidé au travers de la première loi de finances rectificative pour 2010.
Je rappelle que plus de 60 % du produit de l’emprunt national est destiné à la recherche et à l’enseignement supérieur : 21,9 milliards d'euros sur 35 milliards d'euros. La majeure partie de ces fonds, soit 16 milliards d'euros, est non consomptible : seuls les intérêts financiers correspondant à la rémunération du dépôt de ces fonds au Trésor pourront être utilisés.
Cette remarque sur la limitation du volume des crédits directement affectés aux acteurs de la recherche étant faite, je souhaite appeler l’attention sur la nécessité d’être extrêmement vigilant sur l’incidence de ce programme sur les comportements des opérateurs de recherche. En effet, il ne faudrait pas que les financements de l’emprunt national conduisent ces derniers à négliger les appels à projets de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, ou de l’Union européenne. Il serait plus que regrettable que l’emprunt national conduise à un repli des organismes au lieu d’engendrer une démultiplication de leurs capacités d’action et un renforcement de leur position. Ce risque existe, j’ai pu le constater. La tentation est forte d’aller au plus rapide, au plus proche, au plus facile. La possibilité de recourir au grand emprunt ne doit pas amener nos opérateurs de recherche à renoncer à se porter candidats à des appels d’offres de l’Union européenne ou de l’ANR, car alors nous aurions substitué la facilité à l’effort et nous n’aurions pas atteint notre objectif. Je me permets d’insister sur ce point, qui me paraît essentiel.
M. Adrien Gouteyron. C’est très important !
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. S’agissant des programmes qu’il me revient plus particulièrement de commenter, je souhaiterais formuler les observations suivantes.
Concernant le programme relatif aux formations supérieures et à la recherche universitaire, deux remarques me paraissent importantes.
La première concerne les modalités de financement des universités et le rôle joué par le nouveau modèle d’allocation des moyens, dénommé SYMPA. La multiplication des canaux de financement extérieurs au modèle, notamment l’importance des moyens susceptibles d’être alloués au titre du programme d’investissements d’avenir, suscite une inquiétude chez le rapporteur spécial de la commission des finances, particulièrement attaché à la prise en compte de la dimension qualitative des établissements d’enseignement supérieur.
Les modalités actuelles de répartition des moyens nous semblent être de nature à affaiblir le dispositif que nous avions mis en place en vue de récompenser les efforts et la qualité. En outre, la compensation en faveur des établissements universitaires insuffisamment dotés ne se fait pas.
Ma deuxième remarque concerne un nouvel aspect de l’autonomie des universités en 2011, à savoir la dévolution du patrimoine immobilier aux universités qui le souhaitent. Il a été annoncé, voilà quelques jours, que cinq établissements devraient devenir propriétaires de leur patrimoine l’année prochaine ; je m’en félicite.
Toutefois, je rappelle que le volet financier de la dévolution du patrimoine est extrêmement compliqué et n’est pas stabilisé à ce jour. Je constate que Bercy rejoint les propositions figurant dans le rapport que j’ai rédigé, au printemps dernier, avec mon collègue Jean-Léonce Dupont : une contribution annuelle récurrente de l’État et une soulte versée en un ou deux ans, afin de prendre en compte l’état particulièrement dégradé de ce patrimoine. Je souhaite que Mme la ministre nous donne tout à l’heure davantage de précisions sur les critères qui seront utilisés pour calibrer l’intervention de l’État.
S’agissant du programme 231 « Vie étudiante », la mesure marquante est le versement d’un dixième mois de bourse aux étudiants, à la suite de l’allongement de la durée de l’année universitaire. Sur le principe, cela ne me gêne pas, bien au contraire. En revanche, je considère que les modalités de financement de cette mesure auraient pu être mieux définies. Je souligne que le dernier décret d’avance examiné par la commission comprenait des crédits destinés à couvrir la dépense supplémentaire occasionnée par le versement du premier demi-mois supplémentaire en septembre dernier, soit 78 millions d’euros qui n’avaient pas été budgétés en loi de finances initiale de 2010.
Je rappelle que, depuis deux ans, la programmation budgétaire est insuffisante en matière d’aides sociales. Pour 2011, je constate que le ministère a amélioré ses modalités de prévision, mais je doute que l’exercice soit parfait, compte tenu de l’évolution quelque peu erratique du nombre de boursiers depuis deux ou trois ans. Madame la ministre, le financement des aides sociales constitue-t-il toujours « une impasse budgétaire », pour reprendre une expression que vous aviez utilisée devant notre commission en juin dernier ?
S’agissant du programme 187 « Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources », je me félicite de ce que le partenariat entre l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, et les instituts techniques agricoles n’a pas été modifié.
S’agissant du programme « Enseignement supérieur et recherche agricole », je constate que la réduction des dépenses de fonctionnement souhaitée par M. le Premier ministre se répercute en partie sur les lignes « investissements » des subventions pour charges de subvention publique, qui sont considérées dans leur totalité comme des dépenses de fonctionnement.
Enfin, s’agissant du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », je remarque que le rapprochement entre la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte est désormais effectif. Toutefois, je reste circonspect sur les modalités de cette association, notamment en ce qui concerne le Palais de la découverte, qui se trouve également impliqué géographiquement dans une autre opération d’envergure, le projet de Grand Palais des arts et des sciences. Je souhaiterais obtenir de votre part, madame la ministre, quelques précisions sur le devenir du Palais de la découverte, qui connaît de fortes tensions internes. Je vous serais également reconnaissant de m’indiquer si Universcience sera éligible à un quelconque financement au titre du programme d’investissements d’avenir.
Au bénéfice des remarques et des questions que j’ai pu formuler, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, rapporteur spécial.
M. Philippe Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, c’est la première fois qu’il me revient de rapporter la mission « Recherche et enseignement supérieur » au nom de la commission des finances, aux côtés de Philippe Adnot. J’ai plus particulièrement la charge d’exposer l’évolution des crédits de cinq programmes davantage orientés vers la recherche que vers l’enseignement supérieur.
Parmi ceux-ci, le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » est le plus important par la taille. Il finance les plus importants organismes publics de recherche, parmi lesquels le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, le Commissariat à l’énergie atomique, le CEA, ou encore l’Institut national de la recherche en informatique et en automatique, l’INRIA.
Ce programme regroupe 5,132 milliards d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit 20,4 % des crédits de paiement de la mission. Il affiche une diminution de 1,5 % de ses crédits de paiement à périmètre constant par rapport à 2010, essentiellement en raison d’une baisse de 68 millions d’euros des crédits budgétaires de l’Agence nationale de la recherche. Cette contraction peut surprendre, après plusieurs années de montée en puissance de cette agence, traduction d’un choix politique clair : faire émerger et développer une « culture de projets » au sein du monde français de la recherche.
Madame la ministre, vos services nous ont indiqué que cette évolution des crédits visait essentiellement à éviter des « doublons » entre la mission « Recherche et enseignement supérieur », la MIRES, et l’emprunt national. Je prends acte de ces explications, mais je souhaiterais obtenir quelques précisions à cet égard, l’emprunt national n’ayant pas vocation, normalement, à se substituer aux crédits budgétaires.
Par ailleurs, l’ANR ayant été désignée comme le principal opérateur des actions du programme d’investissements d’avenir, elle gérera, à ce titre, 17,9 milliards d’euros de crédits, pour l’essentiel non consomptibles. Ses effectifs croîtront de 65 équivalents temps plein travaillé, pour atteindre 156 équivalents temps plein travaillé. Pouvez-vous nous expliquer, madame la ministre, comment l’ANR entend assurer ses nouvelles missions ?
Les autres opérateurs du programme, bien que leurs crédits soient orientés à la hausse, devront néanmoins faire preuve de rigueur dans leur gestion, afin d’assumer, d’une part, les conséquences financières de la poursuite du plan Carrières, dont bénéficieront les chercheurs, et, d’autre part, pour certains d’entre eux, l’évolution de la part de leurs crédits qui devront être mis en réserve.
En ce qui concerne le programme « Recherche spatiale », j’évoquerai tout d’abord l’évolution de la dette de la France à l’égard de l’Agence spatiale européenne, l’ESA, au sujet de laquelle la commission des finances, sur l’initiative de Christian Gaudin, avait demandé une enquête de la Cour des comptes.
Comme la promesse en avait été faite l’an dernier, les crédits budgétaires de cette agence vont augmenter, mais pas autant qu’on l’avait annoncé devant la commission des finances du Sénat : ils seront de 755 millions d’euros en 2011, au lieu des 770 millions d’euros attendus ; ce chiffre est à comparer aux 685 millions d’euros par an qui étaient prévus jusqu’en 2010.
Surtout, et c’est inquiétant, cette ligne ne suffira pas à commencer à combler le « trou » de la dette à l’égard de l’ESA. Au contraire, cette dette devrait passer à 450 millions d’euros à la fin de 2010, puis à 500 millions d’euros à la fin de 2011. Les documents budgétaires font toujours apparaître une dette ramenée à zéro fin 2015, mais au prix d’un nouvel effort financier – plus de 800 millions d’euros par an dès 2012 – et, bizarrement, d’une diminution des sommes que l’ESA réclamera à la France à compter de 2012.
Madame la ministre, j’avoue être sceptique devant cette dernière hypothèse. Pouvez-vous nous confirmer que les appels de fonds de l’ESA diminueront réellement de manière significative à compter de 2012, même en tenant compte de la prochaine conférence ministérielle de cette agence ?
Pour ce qui concerne les actions purement nationales, ce projet de budget, qui est le premier du nouveau contrat État-Centre national d’études spatiales pour la période 2011-2015, offre une illustration concrète du caractère prioritaire de la recherche spatiale aux yeux de l’État. En effet, pour ses programmes en propre, le CNES enregistre une augmentation de 15 millions d’euros, soit de 2,6 %, de sa dotation, ce qui le place parmi les opérateurs de la MIRES les plus favorisés par l’État.
En revanche, plusieurs opérateurs du programme « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables » ne connaissent pas la même évolution de leurs crédits.
C’est le cas, dans une certaine mesure, de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, dont les crédits diminueront de 30 millions d’euros, baisse qui devrait être compensée par l’instauration d’une nouvelle redevance. Le caractère régulier et incontestable de cette redevance devra être particulièrement garanti, l’IRSN ne pouvant se passer des crédits budgétaires supprimés sans compensation à due concurrence.
C’est aussi le cas du CEA, dont l’augmentation des crédits ne fait que traduire la budgétisation du dividende, de l’ordre de 104 millions d’euros, qu’il tirait jusqu’à présent de sa participation dans AREVA.
C’est enfin, et surtout, le cas de l’IFP Énergies nouvelles, dont la dotation affiche une diminution de 20 millions d’euros, c’est-à-dire de 12 %. Je note qu’un rapport d’étape de la révision générale des politiques publiques recommande à cet institut de développer ses ressources extérieures. Je relève toutefois que l’IFP Énergies nouvelles sera, en 2011, l’un des très rares opérateurs de recherche dont plus de la moitié du financement n’aura pas pour origine une subvention étatique. Il n’est donc pas prouvé que cette réduction de crédits n’affectera pas cet établissement performant ; à mon sens, les prochains budgets devraient en tenir compte…
J’évoquerai brièvement les avances remboursables de la filière aéronautique. Leur diminution de plus de moitié résulte là aussi, au moins en partie, d’un transfert de charges vers le grand emprunt, en particulier pour le programme de l’Airbus A350.
S’agissant du programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle », le mode de financement d’OSEO Innovation est grandement simplifié dans le présent projet de loi de finances. En effet, tout passe désormais par ce programme, du fait de l’épuisement de la réserve qu’OSEO tirait de sa fusion avec l’ancienne Agence de l’innovation industrielle, l’AII, en 2008. Cette budgétisation entraîne une importante augmentation apparente de crédits dans ce projet de budget, de 170 millions à 285 millions d’euros. Toutefois, si l’on tient compte de l’effet de périmètre dont j’ai parlé, cette augmentation correspond en réalité à une diminution de 26 millions d’euros des crédits d’intervention de l’agence. Il s’agit là d’une évolution particulièrement dommageable, et je ne souhaite pas que le soutien aux PME innovantes subisse, l’année prochaine, de nouvelles coupes claires.
Enfin, le programme « Recherche duale » n’appelle pas de remarques particulières.
Sous le bénéfice de ces observations, je rejoins mon collègue Philippe Adnot pour recommander l’adoption sans modification des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, depuis cinq ans, des réformes importantes ont été engagées et ont modifié en profondeur le paysage de l’enseignement supérieur et de la recherche dans notre pays. Bien entendu, j’ai conscience que tout n’est pas réglé pour autant, notamment en termes d’investissements ou de carrières des chercheurs.
Ces réformes ont été accompagnées d’un effort budgétaire sans précédent sur cinq ans. Ces crédits sont complétés par les moyens tirés de l’emprunt national, dont les deux tiers, soit 21,9 milliards d’euros, sont consacrés à ces secteurs.
Au total, en tenant compte des crédits budgétaires et extrabudgétaires, du crédit d’impôt recherche et des partenariats public-privé, l’ensemble des moyens nouveaux de la MIRES augmenteront de 15 % en 2011. Permettez-moi, madame la ministre, de vous en féliciter !
La dépense intérieure de recherche et développement est passée de 2,1 % à 2,21 % du produit intérieur brut entre 2006 et 2009, soit une hausse de 5,2 %. Cependant, ce niveau est encore sensiblement inférieur à l’objectif de 3 % du PIB.
Nous nous réjouissons que la MIRES bénéficie d’une préservation des emplois, tous les départs à la retraite étant compensés, et d’une priorité donnée à l’attractivité des carrières. Alliée aux réformes structurelles, cette priorité accordée aux ressources humaines doit nous permettre de conforter notre système de recherche et d’enseignement supérieur.
À ce propos, pouvez-nous nous confirmer, madame la ministre, que les départs à la retraite seront bien compensés pour cette mission ? En effet, ce point a été fortement contesté au sein de la commission. Pour ma part, je me suis contenté d’indiquer que je n’avais aucune raison de mettre en doute la parole qui avait été donnée.
En 2011, les établissements publics de recherche seront soumis à un ajustement des subventions ou dotations qui leur seront versées. Cela devrait permettre à ces établissements d’améliorer, et ainsi d’optimiser, leur gestion.
À ce sujet, la commission souhaite vivement que les taux de mise en réserve réduits appliqués en 2009 et reconduits en 2010 restent en vigueur en 2011. Il s’agit d’un enjeu essentiel pour les organismes. Je pense, par exemple, à l’INSERM, qui joue remarquablement bien son rôle de coordonateur de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé et s’est d’ailleurs vu confier la mise en œuvre du plan Cancer 2. Mais, hors plan Cancer, ses crédits n’augmentent que de 0,5 %, et son dispositif postdoctoral subit une diminution. Cela vient renforcer la nécessité d’appliquer des taux de mise en réserve réduits. Je serai attentif à votre réponse sur ce point, madame la ministre.
Par ailleurs, je voudrais vous faire part de certaines préoccupations.
La première, je dois vous le dire, a trait à notre incompréhension des décisions concernant l’Agence nationale de la recherche. Je fais miennes les observations formulées à l’instant par M. Dominati sur l’évolution de ses crédits, surprenante à l’heure où cet organisme est emblématique du virage souhaitable de la recherche française vers un accroissement de la part du financement sur projets. En 2011, ses moyens d’intervention enregistreront une baisse de 68 millions d’euros. L’argument selon lequel une partie des projets que l’agence est conduite à financer feraient doublons avec ceux qui sont prévus dans le cadre de l’emprunt national semble n’être que très partiellement recevable, dans la mesure où ces projets ne correspondraient, semble-t-il, qu’à 8 % ou 10 % des baisses de crédits en question.
Jusqu’à il y a deux ans, les taux de sélection des projets de recherche, s’établissant entre 25 % et 30 %, étaient conformes aux standards internationaux. Ils sont passés à 20 % en 2010. Je crains que, avec cette décision, ils ne descendent encore, ce qui pourrait porter atteinte à la crédibilité même de l’ANR et provoquer une démobilisation et un manque d’engouement de la part des chercheurs.
Cependant, je me réjouis des décisions consistant à fixer à 50 % le taux des « projets blancs », à organiser une programmation triennale et à fixer à 20 % le taux du préciput. Pour conclure sur ce chapitre, madame la ministre, je souhaite ardemment que les crédits de l’ANR soient reconsidérés et confortés pour 2012.
Deuxièmement, je souhaiterais évoquer la situation des établissements vertueux, en m’appuyant notamment sur l’exemple de l’IFP Énergies nouvelles.
Cet institut se porte bien, certes, mais il pourrait se porter mieux. Pourquoi dis-je cela, madame la ministre ? Parce que, depuis quelques années, cet organisme fait des efforts constants en matière de gestion et conduit une politique active de développement de ses ressources propres. Or, il lui est demandé un effort budgétaire largement supérieur à ce qu’exige le cadre général d’encadrement des dépenses de l’État, puisque ses crédits devraient baisser de 12 % en 2011, de 15 % en 2012 et de 17 % en 2013. Sur la même période, au titre du contrat de performance, il est demandé à cet établissement d’élargir ses thématiques de travail et de renforcer, en particulier, son engagement dans le secteur des nouvelles énergies. Cela m’inquiète, madame la ministre : si je comprends parfaitement que chaque organisme doive faire un effort pour participer au redressement des finances publiques, il serait tout de même regrettable de donner l’impression de punir les établissements vertueux ! C’est pourquoi, madame la ministre, je vous invite à réviser la prévision de financement de cet organisme pour 2012 et 2013.
Un troisième sujet de préoccupation tient à la réforme du dispositif en faveur de la jeune entreprise innovante présenté à l’article 78, rattaché à la mission « Recherche et enseignement supérieur ». J’y reviendrai tout à l’heure à l’occasion de la discussion d’un amendement tendant à supprimer cet article que Jean-Léonce Dupont et moi-même avons déposé au nom de la commission.
Par ailleurs, la mise en place d’un brevet communautaire étant dans une impasse, notre commission soutient la proposition du commissaire européen Michel Barnier d’utiliser la procédure de coopération renforcée. Pensez-vous que celle-ci ait une chance d’aboutir un jour ?
Enfin, j’ai souhaité porter une attention particulière à la politique de diffusion de la culture scientifique, ce volet essentiel des missions de la recherche ayant une importance décisive pour attirer les jeunes vers les carrières scientifiques et pour intéresser à la science l’ensemble de la société. Chaque chercheur doit considérer que cette dimension fait partie intégrante de ses missions, comme l’avait si bien compris le regretté Georges Charpak.
La fusion au sein de l’établissement public Universcience des deux grands opérateurs de la culture scientifique et technique, la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte, doit permettre de renforcer la qualité et la complémentarité des offres de ces établissements et de dégager des synergies. Notre commission souhaite qu’Universcience, en tant qu’opérateur du programme 186 « Recherche culturelle et culture scientifique », accorde davantage d’importance à la publication et à la diffusion des résultats des recherches dans le domaine de l’archéologie. En effet, comme le souligne l’Institut national de recherches archéologiques, l’INRAP, elles en sont la principale justification, puisqu’elles en constituent la valorisation. Cet établissement s’est vu confier la gestion du réseau national. Madame la ministre, j’insiste sur l’importance de cette mission, ses actions devant irriguer l’ensemble de nos territoires.
En conclusion, mes chers collègues, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a donné un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2011 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » destinés à la recherche. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. Je vous prie une nouvelle fois de bien vouloir respecter vos temps de parole, mes chers collègues !
La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer l’effort pluriannuel sans précédent dont bénéficient l’enseignement supérieur et la recherche, effort qui montre clairement – et ce dans une continuité à laquelle l’État ne nous a pas toujours habitués – que ces secteurs constituent une réelle priorité pour notre pays. Surtout, cette priorité s’accompagne de profondes réformes structurelles et, lorsque je regarde, une fois n’est pas coutume, dans le rétroviseur, je mesure l’importance du chemin parcouru.
Étant chargé de rapporter les crédits pour 2011 des programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante », je relève que leur évolution est marquée par la poursuite de l’accession à l’autonomie, qui concernera trente et une universités au 1er janvier 2011 et entraînera un transfert de la masse salariale et des dépenses de fonctionnement. À cet égard, vous le savez, madame la ministre, les universités s’inquiètent des modalités de prise en compte du glissement vieillesse-technicité, jusqu’alors globalisé au sein du budget de l’État. Je souhaite que cette question soit traitée avec toute l’objectivité nécessaire, l’État devant assumer la part de financement qui lui revient, et les universités les conséquences de leurs décisions en matière de recrutement et de gestion des ressources humaines.
S’agissant du plan pour la réussite en licence, destiné à remédier au taux d’échec bien trop élevé des étudiants, ne pensez-vous pas que l’efficacité du dispositif d’orientation active suppose l’harmonisation des indicateurs de performance des universités en matière d’insertion professionnelle ? Beaucoup reste à faire pour transmettre des informations de qualité aux étudiants et à leurs familles, même si de nombreuses universités en ont pris conscience.
Par ailleurs, il existe de grandes marges de progrès pour les enquêtes d’insertion professionnelle des étudiants. L’enquête nationale sur l’insertion professionnelle des diplômés de master 2007, dont les résultats ont été rendus publics en octobre dernier, semble présenter des failles et ses conclusions sont peu utilisables. Je m’étonne de la prise en compte d’un critère d’insertion trente mois après l’obtention du diplôme… Pouvez-vous, madame la ministre, nous préciser comment vous envisagez d’améliorer ce type d’enquêtes ?
S’agissant du nouveau modèle d’allocation des moyens aux universités, le système SYMPA, certains s’interrogent sur sa capacité à donner une chance de développement à toutes les universités, alors même qu’il n’a pas été procédé aux redéploiements d’effectifs envisagés initialement. Comment comparer les universités si les indicateurs de performance ne prennent pas en compte le taux d’encadrement relatif de chaque établissement ? Ne pensez-vous pas nécessaire d’analyser l’incidence des indicateurs et de mettre en place un contrôle de leur application ? Ainsi, il conviendrait par exemple de prévoir que le critère relatif au nombre d’étudiants présents aux examens porte sur la présence à la fin du premier semestre, et non à un simple test de contrôle continu qui semble quelquefois faire office d’examen.
Dans le cadre des réformes engagées, notre commission insiste pour que l’enseignement supérieur reste accessible à tous les jeunes. Pouvez-vous, madame la ministre, nous préciser quelle stratégie est envisagée afin que les universités de proximité soient « tirées » par les établissements les plus dynamiques et par les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, les PRES, et qu’elles trouvent pleinement leur place dans un système en mutation ?
Un premier bilan de l’application des propositions que Philippe Adnot et moi-même avons avancées dans notre rapport de juin 2010 sur la dévolution du patrimoine immobilier des universités montre que nombre de celles-ci sont suivies, à l’exception regrettable de celle de mutualiser une partie des produits liés à la cession de biens.
Une priorité a heureusement été accordée au logement étudiant ces dernières années, mais nous savons que seul le parc locatif privé peut couvrir l’essentiel des besoins en la matière. C’est pourquoi j’appelle de mes vœux l’instauration d’une garantie contre les risques locatifs, dont le Gouvernement a annoncé l’expérimentation.
Pour ce qui concerne les aides sociales, je me réjouis de la mise en place progressive du dixième mois de bourse, en contrepartie de l’allongement effectif de l’année universitaire. Je regrette, en revanche, la forte baisse des aides à la mobilité et des crédits du fonds national d’aide d’urgence, ainsi que la diminution de la subvention au réseau des œuvres. N’aurait-il pas mieux valu limiter la progression des aides au mérite, madame la ministre ?
En outre, je m’interroge sur les modalités de rapprochement entre les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, les CROUS, et les PRES. Ne conviendrait-il pas de transformer les CROUS en agences territorialisées qui offriraient une palette plus large de services aux étudiants ?
Par ailleurs, il me semble nécessaire de rassurer les étudiants sur la pérennité du Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes, le FSDIE, qui est une des sources de financement majeures des activités des associations étudiantes. Or la charte relative à la dynamisation de la vie associative liée aux universités, élaborée au printemps 2009 et qui a vocation à faire reculer l’opacité dans l’emploi du fonds concerné, n’a toujours pas été signée. Quelles garanties pouvez-vous nous apporter sur cette question ?
Les mesures permettant un décloisonnement des acteurs de la recherche vont dans le bon sens. Dans son dernier rapport annuel, l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche préconise le renforcement du pouvoir d’orientation des conseils scientifiques des universités et de la souplesse de gestion des laboratoires. J’aimerais savoir quelles suites seront données à ces propositions.
Enfin, il apparaît nécessaire que les classements internationaux prennent aussi en compte des résultats tels que le taux d’insertion des étudiants ou le nombre de brevets déposés – le critère du nombre des citations dans des publications est réducteur – ou la contribution à la croissance du pays. La réflexion européenne doit s’approfondir sur ce point, car l’établissement des classements est un véritable chantier scientifique.
Je conclurai mon intervention en indiquant que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a donné un avis favorable à l’adoption des crédits affectés à l’enseignement supérieur, à la recherche universitaire et à la vie étudiante pour 2011. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Michel Houel, rapporteur pour avis.
M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, avant de vous donner mon opinion sur les crédits de la mission « Enseignement supérieur et recherche », j’évoquerai brièvement le contexte dans lequel ils s’inscrivent.
La crise que nous connaissons nuit au développement de la recherche. Cela est tout d’abord vrai en France, où l’investissement global en recherche et développement oscille autour de 2 % du PIB, loin de l’objectif de 3 % de la stratégie de Lisbonne. Cela est également vrai en Europe, où les dépenses en recherche et développement des grandes entreprises ont chuté de 2,6 % en 2009, ce qui a incité la Commission européenne à présenter une nouvelle stratégie européenne intitulée « Union de l’innovation », dont les orientations devraient être débattues lors du Conseil européen de décembre prochain. Mme la ministre pourra peut-être nous dire ce qu’elle en pense.
Tous ces chiffres sont inquiétants quand on les compare avec ceux de la Chine, qui compte désormais 35 millions de scientifiques et de techniciens, dont 1,36 million de chercheurs travaillant à temps plein, ce qui classe ce pays au tout premier rang mondial.
Je voudrais partir de ce constat pour insister sur l’impératif de rendre notre pays attractif pour les chercheurs étrangers. Madame la ministre, je sais que ce sujet n’est pas de votre compétence, mais je profite de cette occasion pour l’aborder néanmoins. J’ai eu dernièrement l’occasion de visiter le site de l’École supérieure d’électricité, à Gif-sur-Yvette, où des échanges avec de jeunes chercheurs m’ont permis d’appréhender ce problème. Je tiens à attirer votre attention sur les difficultés qu’éprouvent ces chercheurs étrangers à obtenir des papiers pour venir chez nous poursuivre des recherches de haut niveau.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission de l’économie. Oui !
M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission de l’économie. Notre pays s’honorerait et se grandirait s’il facilitait leur venue, sans parler des bénéfices qu’il en retirerait à moyen et long termes en matière de dynamisation et de rayonnement de notre recherche.
M. Ivan Renar. Très bien !
M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission de l’économie. Plus que jamais, il nous faut donc investir dans la connaissance et l’innovation. De ce point de vue, le projet de budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est, cette année encore, à la hauteur. Comme les trois précédentes années, il enregistre une hausse, de 468 millions d’euros cette fois, pour s’établir à 25,2 milliards d’euros. Cette tendance remarquable à l’augmentation confirme la volonté du Président de la République de mettre la recherche et l’innovation au centre de notre projet de société. Le chef de l’État est ainsi en passe de tenir son engagement d’augmenter de 9 milliards d’euros durant son mandat le budget consacré à l’enseignement supérieur et à la recherche.
Quelques sujets d’inquiétude doivent toutefois être mentionnés. En effet, les économies demandées aux établissements publics scientifiques et technologiques au titre de la maîtrise de la dépense publique s’élèveront à 42,3 millions d’euros, auxquels s’ajoutera une mise en réserve de crédits voulue par le Premier ministre.
Il en résulte des contraintes budgétaires pouvant être assez fortes pour certains grands organismes de recherche. Ainsi, si l’INSERM, dont nous avons rencontré le président, M. André Syrota, disposera formellement de 22,9 millions d’euros supplémentaires, son budget, en termes réels, enregistrera une baisse de 10 millions d’euros et sa dotation de fonctionnement un recul de 12 millions d’euros. La situation budgétaire de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et de l’IFP Énergies nouvelles sera également très tendue. Madame la ministre, pouvez-vous nous rassurer sur le maintien de la capacité de ces organismes à assurer leurs missions ?
Je souhaiterais enfin évoquer le financement des investissements d’avenir, qui font l’objet de deux programmes spécifiques de la MIRES. Sur 35 milliards d’euros débloqués, celle-ci récupère pas moins de 21,6 milliards d’euros, soit 62,5 % du total des crédits ouverts. Cela devrait permettre de financer de grands projets structurants pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation, selon les trente-cinq conventions qui ont été passées au terme de la première tranche d’appels à projets.
Tout cela nous réjouit, madame la ministre. Cependant, des interrogations demeurent sur l’ampleur de l’« effet de levier » attendu pour la croissance et l’emploi, du fait des coinvestissements privés et publics. Reste, par ailleurs, à évaluer les retours sur investissement pour l’État. Peut-être aurez-vous des précisions à nous apporter sur ces points ?
Telles sont les quelques observations que m’a inspirées la mission « Recherche et enseignement supérieur ». L’évolution globalement positive de ses crédits, pour la quatrième année consécutive, et le complément de financement substantiel que constitue, pour ce secteur, le grand emprunt, doivent être soulignés. Ces éléments font de moi un rapporteur heureux et ont incité la commission de l’économie à donner un avis très favorable à l’adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais aborder brièvement les quatre thèmes suivants : l’orientation générale de la mission « Recherche et enseignement supérieur », la contraction des moyens mis à la disposition des établissements publics à caractère scientifique et technologique, le dispositif du crédit d’impôt recherche et certains aspects budgétaires de l’enseignement supérieur.
S’agissant, tout d’abord, des crédits de la MIRES, je voudrais nuancer fortement l’autosatisfaction que vous avez manifestée, madame la ministre. Depuis 2007, vous répétez à l’envi que la recherche est une priorité nationale et qu’elle va bénéficier à ce titre de 9 milliards d’euros de crédits supplémentaires sur cinq ans, pour atteindre l’objectif de 3 % du PIB consacré aux dépenses de recherche et développement, fixé par la stratégie de Lisbonne.
Or, que constate-t-on ? La réalité des chiffres est moins souriante que le discours ! Selon l’OCDE, la France affecte à la recherche 2,02 % de son PIB. Notre pays est donc très en retard…
Je passe sur la présentation des crédits en autorisations d’engagement privilégiée par Mme la ministre dans les communications officielles ; elle ne me semble pas correspondre à la sincérité, au sens de la loi organique relative aux lois de finances, attendue de l’exécutif. Cette remarque vaut d’ailleurs pour tous les ministères cette année. Il est bien difficile de s’y retrouver dans les différents programmes et missions.
On nous annonce un effort supplémentaire de 412 millions d’euros en faveur de la recherche en 2011. Pour parvenir à cette somme, il faut ajouter au budget de la recherche, à périmètre constant, des crédits qui n’ont pas grand-chose à voir avec la recherche ou qui présentent un caractère virtuel. Il en est ainsi des 189 millions d’euros de dividendes versés par AREVA, des 145 millions d’euros imputables à un jeu d’écritures sur le crédit d’impôt recherche, ainsi que des crédits du plan Cancer, qui sont transférés à l’INSERM. Dans ces conditions, la progression effective des crédits consacrés à la recherche n’est donc, à périmètre constant, que de 0,9 % à 1 %, soit un taux de croissance légèrement inférieur à celui de l’inflation sur un an.
Enfin, il faut relativiser l’importance des crédits provenant du grand emprunt, car ce ne sont pas autant de crédits supplémentaires pour la recherche : pour la part « non consomptible », majoritaire, seuls les intérêts sont mobilisables ! De plus, ces crédits ne concernent que dans une très faible mesure l’exercice 2011.
Les EPST paient un lourd tribut au coup de rabot. Les présentations ne parviennent pas à masquer les coupes opérées dans les budgets de fonctionnement des établissements de recherche, à hauteur de 12 millions d’euros, et les mises en réserve qui sont demandées à ceux-ci. Madame la ministre, comment voulez-vous passer des contrats de performance avec, par exemple, l’IFP Énergies nouvelles, établissement pourtant remarquable, et l’IRSN, tout en diminuant leurs moyens ? Vous leur demandez la lune !
J’en viens maintenant au crédit d’impôt recherche.
Les différents rapports rendus récemment sur le sujet convergent dans leurs analyses sur les avantages et les limites de ce dispositif, dont le coût a connu une très forte augmentation, pour approcher aujourd’hui 5 milliards d’euros. Or, est-on sûr que cette somme est utilisée au mieux ?
Certes, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, des initiatives ont été prises afin de contrer les dérives éventuelles et les effets d’aubaine. J’avais d’ailleurs souhaité présenter un amendement d’appel tendant à concentrer les efforts sur les PME et les PMI.
Les abus des sociétés de conseil qui aident les entreprises, surtout les plus petites, à élaborer leurs dossiers de demande de crédit d’impôt recherche en échange de rémunérations excessives devraient être réprimés.
Il est en outre nécessaire de stabiliser le régime de ce dispositif, afin que les acteurs économiques puissent inscrire leurs politiques de recherche et développement dans la durée.
Je suggère enfin, madame la ministre, de clarifier les paramètres du crédit d’impôt recherche, notamment en alignant le guide de ce dernier sur le manuel de Frascati, qui fait référence au sein de l’OCDE.
Je conclurai en évoquant le programme « Formations supérieures et recherche universitaire », qui est emblématique de la MIRES. L’évolution de ses crédits aurait dû permettre de lutter contre l’échec en licence. Or il est prévu qu’ils baissent de 2 % ; ce choix pour le moins contestable marque l’échec du plan spécifique mis en œuvre en 2008.
Pour finir, l’honnêteté intellectuelle m’oblige à rappeler l’avis favorable de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’adoption des crédits de la mission, mais également mon opposition, à titre personnel, à un projet de budget que je considère non conforme à l’esprit de la LOLF. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, en période de crise économique, de recul de l’activité et de l’emploi, la relance de la recherche et de la formation par l’enseignement supérieur est fondamentale. C’est donc un budget très important pour l’avenir que nous examinons aujourd’hui.
L’enseignement supérieur et la recherche sont des moteurs essentiels de la croissance. Ils assurent l’élévation du niveau d’études des générations actuelles et futures. Ils permettent de développer de nouveaux métiers et de créer des emplois. Ils sont un outil indispensable pour dynamiser la coopération internationale en matière de savoir et d’innovation.
Il est essentiel que ces deux secteurs d’activité soient sanctuarisés, épargnés par les coupes sévères infligées à la plupart des autres missions du projet de loi de finances pour 2011.
Je me réjouis que cette mission échappe à la règle de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux, voulue par la RGPP, même si je rêve toujours de la création de nouveaux postes.
Bien que les documents budgétaires, nouvelle version, soient peu lisibles, les crédits de la MIRES apparaissent cette année en augmentation. Les prévisions pour les prochaines années semblent aussi encourageantes. Mais une telle évolution est plus que nécessaire si nous voulons nous hisser à la hauteur de nos ambitions, ou même tout simplement revenir au niveau de 2002 : le budget de la recherche représentait alors 2,23 % du PIB.
Madame la ministre, vous nous annoncez que l’effort en faveur de la recherche atteindra 2,21 % du PIB en 2011, mais d’autres analystes sont moins optimistes. Quoi qu’il en soit, nous sommes loin derrière les États-Unis, dont l’effort consacré à la recherche oscille entre 2,5 % et 3 % du PIB, ou encore du Japon, dont les crédits affectés à ce poste dépassent 3,5 %. Plus inquiétant, nous restons bien en deçà de l’objectif que nous nous étions fixés : atteindre les 3 % du PIB. Les dépenses de recherche n’augmentant pas suffisamment, nous nous trouvons relégués à la quatorzième place du classement international établi par l’OCDE.
À cet égard, la réforme du crédit d’impôt recherche, en 2008, n’a pas tenu toutes ses promesses. Certes, la dépense devrait atteindre 5 milliards d'euros, alors qu’elle s’élevait seulement à 400 millions d’euros en 2003. Cette augmentation nous permet de respecter les objectifs européens, qui nous imposent, au-delà de la recherche publique, d’intensifier les efforts de recherche et développement des entreprises.
Bien que je sois favorable à ce dispositif, je m’inquiète des effets d’aubaine dont bénéficient les plus grandes entreprises et leurs filiales, alors même qu’elles n’augmentent pas suffisamment leurs dépenses de recherche. Le crédit d’impôt recherche doit soutenir un renouveau de la politique industrielle et d’innovation de la France.
J’observe, par ailleurs, qu’une stagnation, voire un recul, du nombre d’emplois dans la recherche est à craindre. Une gestion managériale, propre à l’entreprise, serait trop éloignée de ce qui convient à la recherche. Il faudrait d’ailleurs que le Parlement exerce un meilleur contrôle sur ce dispositif.
Aujourd’hui encore, de trop nombreux chercheurs quittent notre pays, et ceux qui restent en France s’inquiètent de l’insuffisante prise en compte de leurs préoccupations. Un renforcement de la concertation serait sans doute bénéfique.
Les études universitaires de haut niveau forment les « cerveaux » de demain, mais tous les jeunes docteurs fraîchement diplômés n’obtiennent pas pour autant, tant s’en faut, un poste de chercheur ou de maître de conférences. Nombre d’entre eux font leurs valises et partent, pour quelques années ou définitivement, vers des laboratoires européens, américains ou japonais. Cette fuite des cerveaux est d’autant plus alarmante qu’elle dure déjà depuis plusieurs années.
La recherche et l’innovation françaises doivent faire face, il est vrai, à une montée en puissance de la concurrence, traditionnelle ou issue des pays émergents. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il me semble essentiel d’encourager les programmes de recherche communs entre les États membres de l’Union européenne. Consolider l’Europe de la recherche doit être une priorité. La mutualisation des efforts nationaux est essentielle pour éviter la déperdition de moyens.
S’agissant des universités, en cette fin d’année 2010, cinquante et un établissements sur quatre-vingt-trois sont déjà autonomes, et vingt-quatre autres le deviendront au 1er janvier prochain : la France comptera alors soixante-quinze universités autonomes, soit 90 % de l’ensemble. C’est une bonne chose, et cela devrait contribuer à faire émerger de nouvelles niches d’excellence scientifique, à favoriser le recrutement de chercheurs de haut niveau et à valoriser l’engagement des personnels. Il serait intéressant de faire un premier bilan de l’application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, car il semble que les universités soient encore, à ce jour, trop inégalement traitées.
Élue de la Haute-Garonne, je ne peux que me réjouir des crédits accordés à l’université de Toulouse dans le cadre du plan Campus, enfin signé au mois de juin dernier. Le montant de ce plan s’élève à 525 millions d’euros.
Néanmoins, je regrette que la recherche de l’excellence se fasse dans un trop petit nombre d’universités et dans une perspective parfois trop élitiste. Dans les autres établissements, qui représentent 90 % de la recherche universitaire et 95 % des étudiants, les moyens diminuent.
Il faut prendre en compte les besoins de la recherche et de l’enseignement supérieur partout sur le territoire national. C’est malheureusement un travers bien français que de privilégier les grandes structures, en oubliant le vivier qui nourrira la recherche de demain.
Le traitement réservé aux instituts universitaires de technologie, les IUT, me préoccupe. Les IUT sont la composante de l’université la plus à la pointe en termes de professionnalisation. Leur fort ancrage local, notamment, concourt à ce résultat. Pourtant, depuis plus d’un an, les présidents d’IUT ne cessent de nous alerter sur leur situation. S’ils bénéficiaient auparavant d’une dotation d’État, ils doivent désormais négocier leurs moyens avec chaque présidence d’université. Il semble que la circulaire explicitant la règle d’attribution de crédits à leur profit n’est pas toujours respectée. L’absence d’augmentation, voire la baisse, de leur budget est inquiétante. La diminution et la disparité des moyens alloués aux IUT peuvent, en effet, porter atteinte au caractère national des diplômes qu’ils délivrent.
Madame la ministre, monsieur le ministre, si les efforts budgétaires sont encourageants, le chemin est encore long. Il reste beaucoup à faire pour rattraper le retard que nous avons accumulé en matière de recherche et pour enfin insuffler à nouveau du dynamisme et de la modernité à l’enseignement supérieur français. C’est pourquoi je m’abstiendrai sur les crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, « engagement tenu » : chaque année, une propagande soutenue essaie de faire accréditer l’idée qu’un effort exceptionnel serait consenti en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche !
Les universités et les organismes de recherche seraient noyés de crédits, et il ne tiendrait qu’à eux de se saisir de cette manne pour financer leurs projets Selon un leitmotiv du Gouvernement, l’enseignement supérieur et la recherche bénéficieront de 9 milliards d’euros supplémentaires entre 2008 et 2012, conformément à la volonté du Président de la République. Si la répétition fixe la notion, le discours résiste mal à l’épreuve des faits !
Chercheurs, enseignants-chercheurs, personnels administratifs et étudiants constatent chaque jour, sur le terrain, l’absence d’efforts significatifs en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Bien que les chiffres annoncés donnent à croire que l’enseignement supérieur et la recherche sont, cette année encore, largement privilégiés, l’examen des documents budgétaires permet d’apprécier autrement la réalité du financement de ce secteur essentiel pour l’avenir du pays.
Ainsi, l’augmentation de l’effort budgétaire, pour la période 2007-2012, est exprimée en autorisations d’engagement et non pas en crédits de paiement, correspondant aux sommes réellement dépensées chaque année. De plus, les chiffres affichés s’appuient sur ceux qui figuraient dans la loi de finances initiale et ne tiennent aucun compte des annulations, virements, transferts, gels de crédits ou redéploiements. Les budgets exécutés sont inférieurs aux budgets votés.
Et que dire des changements de périmètre de la MIRES ! L’intégration dans le budget de la mission de l’Agence nationale de la recherche, en 2008, et le transfert de la charge des retraites des personnels aux opérateurs ont engendré une augmentation mécanique des moyens affectés. Toutefois, ces ressources supplémentaires ne peuvent être considérées comme nouvelles, dans la mesure où elles ne font qu’accompagner le transfert de charges.
La volonté du Gouvernement d’afficher des moyens en augmentation le conduit également à intégrer dans son calcul des sommes totalement virtuelles, tel les intérêts de l’opération Campus. Les sommes figurant à ce titre dans les lois de finances de 2009 et de 2010 n’ont été ni mises à disposition des universités ni capitalisées sur la dotation initiale, et les crédits figurant dans le projet de budget pour 2011 ne seront, selon toute vraisemblance, pas consommés, les projets Campus n’étant pas suffisamment avancés pour connaître un début d’exécution dès l’année prochaine.
De même, il y a fort à parier que les moyens extrabudgétaires provenant des investissements d’avenir – l’ex-grand emprunt –, estimés à 3,5 milliards d’euros, ne seront pas utilisés dès 2011, compte tenu du temps nécessaire pour évaluer les projets répondant aux appels d’offres, engager les démarches administratives et consommer les crédits.
L’augmentation effective de la dotation budgétaire pour la recherche publique et l’enseignement supérieur n’atteint que 0,5 % par rapport à 2010. En euros constants, les moyens des universités et des organismes de recherche seront donc en baisse.
Le CNRS a vu ainsi la dotation de ses laboratoires baisser de 12 % en moyenne, une fois retranchés les crédits attachés à la masse salariale et aux grands équipements.
Plus grave encore, le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie, le CSRT, souligne que « le seuil critique est atteint pour un fonctionnement minimum des établissements publics à caractère scientifique et technologique et des établissements publics à caractère industriel ou commercial. Cela risque de se traduire par un appauvrissement réel de certains laboratoires, de certaines disciplines ou de certains projets engagés. »
Au regard de ces éléments, on ne s’étonnera guère d’apprendre que le taux de croissance de la dépense intérieure de recherche et de développement de la France est le plus bas de l’OCDE. Au-delà des manifestations d’autosatisfaction du Gouvernement, y a-t-il lieu de se réjouir du classement de notre pays, qui se situe désormais à la quatorzième place internationale en termes d’effort de recherche ?
La seule augmentation d’ampleur, représentant près de 40 % de l’effort affiché, porte sur le crédit d’impôt recherche. La pertinence de ce dispositif fiscal suscite pourtant de plus en plus d’interrogations, au point que les députés de la majorité ont souhaité l’amender.
Selon la Commission européenne, les entreprises françaises ont globalement réduit leurs budgets de recherche de 4,3 % en 2009, soit bien plus que celles des autres pays de l’Union européenne. Au cours des trois dernières années, la progression de la dépense de recherche et développement de nos entreprises a été l’une des plus faibles de l’Union européenne. Ainsi, on constate que le crédit d’impôt recherche, qui coûtera à la nation plus de 5 milliards d’euros en 2011, n’a qu’une influence limitée sur l’évolution de l’effort de recherche du secteur privé. L’effet d’aubaine n’a pas disparu : si cette disposition fiscale rencontre le succès auprès des entreprises, notamment les plus grandes d’entre elles, c’est trop souvent parce qu’elle permet un allégement considérable de leur imposition. Un rapport récent de la commission fiscale du MEDEF, dont la presse a fait état ces derniers jours, le confirme.
Concernant les personnels, le secteur de la recherche et de l’enseignement supérieur ne devrait pas être soumis, dans les trois prochaines années, à la règle de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux. Selon le discours officiel, les emplois y seraient sanctuarisés. Dans les faits, la contrainte budgétaire pesant sur les organismes de recherche et les universités risque bien de les amener à faire des choix entre le financement des activités d’enseignement et de recherche, la revalorisation des carrières et le remplacement des personnels partant à la retraite. Le principe de fongibilité asymétrique ne peut qu’inciter les opérateurs à réduire leur masse salariale.
L’insuffisance de perspectives d’emploi s’avère d’autant plus inquiétante que la fuite des cerveaux se confirme. Les chercheurs expatriés sont de moins en moins enclins à revenir en France. En outre, l’absence de programmation pluriannuelle de l’emploi scientifique entretient la désaffection des jeunes pour les carrières scientifiques. Faut-il le rappeler, selon les prévisions du ministère, le nombre de doctorants, toutes disciplines confondues, baisserait de près d’un tiers entre 2007 et 2017. Le pays pourrait ainsi connaître une pénurie d’enseignants-chercheurs dans certaines disciplines, notamment en sciences humaines et sociales.
Madame la ministre, le véritable premier investissement d’avenir devrait être le recrutement de chercheurs et d’enseignants-chercheurs. Développer le potentiel scientifique et la recherche du pays sur le long terme, s’attacher à faire progresser les connaissances : telles devraient être les priorités des priorités, d’autant que la mise en œuvre des projets présentés pour répondre aux nouveaux appels d’offres liés aux investissements d’avenir nécessite des personnels permanents qualifiés.
J’aborderai brièvement la question du cursus étudiant.
Malgré les milliards d’euros prétendument versés aux universités, les étudiants ne connaîtront guère d’amélioration de leurs conditions d’études. Alors que la lutte contre l’échec en premier cycle universitaire avait fait l’objet d’une attention particulière, les moyens affectés à la formation initiale et continue du baccalauréat à la licence seront amputés de 109 millions d’euros. Cette baisse de crédits ne sera évidemment pas compensée par les seuls 40 millions d’euros supplémentaires affectés au plan pour la réussite en licence.
Comment interpréter cette diminution des moyens affectés au premier cycle, lequel conditionne la poursuite d’études et l’obtention de diplômes ? Ce désengagement est d’autant plus préoccupant que les universités, confrontées à la réduction de leurs dotations et de leurs effectifs enseignants, auraient employé une partie des crédits jusqu’alors affectés au plan pour la réussite en licence à d’autres fins.
Selon l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, aucun des objectifs de ce plan censé répondre à l’échec des jeunes en premier cycle universitaire ne sera atteint prochainement. Ce constat n’est guère surprenant, puisque l’amélioration de la réussite en licence n’a jamais donné lieu à des mesures d’ampleur, telles que le recrutement d’enseignants-chercheurs et de personnels administratifs, afin de remédier au sous-encadrement des étudiants de premier cycle.
Par ailleurs, la vie étudiante demeure le parent pauvre du budget. Le versement d’un dixième mois de bourse, qui correspond à un engagement pris par le Président de la République voilà deux ans déjà, ne sera toujours pas effectif en 2011. Cette mesure est pourtant très attendue, quand de nombreux jeunes connaissent des situations précaires, peu compatibles avec la poursuite d’études. Je rappelle que les 100 000 boursiers les plus défavorisés voient le montant de leur allocation stagner à 4 370 euros par an. En outre, 95 millions d’euros font défaut pour que les étudiants boursiers puissent bénéficier du versement intégral d’une mensualité supplémentaire ; cette somme est à mettre en regard des 5 milliards d’euros affectés au crédit d’impôt recherche.
Madame la ministre, à vous écouter, l’enseignement supérieur et la recherche crouleraient sous les crédits : 4,7 milliards d’euros supplémentaires en 2011, 9 milliards de plus sur la période 2007-2012 ! Qui dit mieux ? Mais comment, dans ces conditions, expliquer le recul de la France en matière d’effort de recherche, tant public que privé ?
La manipulation des chiffres, les présentations optimistes et biaisées ne suffisent pas à dissimuler que l’engagement du Président de la République de consacrer 3 % du PIB à la recherche d’ici à 2010, conformément à la stratégie de Lisbonne, ne sera pas tenu, tant s’en faut, puisque nous ne parvenons pas encore à revenir au niveau de 2002, à savoir 2,23 % du PIB.
Au-delà des cocoricos, le projet de budget de la MIRES pour 2011 s’inscrit dans la continuité des précédents. Il révèle vos véritables choix : aide sans condition au secteur privé, réduction des moyens de l’enseignement supérieur et de la recherche publics, mise en concurrence des laboratoires et des équipes, subordination du secteur public aux entreprises, recomposition du paysage universitaire autour de quelques pôles à visibilité internationale, mise en œuvre d’une politique de recherche en créneaux favorisant les thématiques porteuses, à court terme, d’innovations.
Voilà l’antipolitique – au sens des Antimémoires ! – de la recherche et de l’enseignement supérieur que vous proposez ! Nous ne pouvons que nous opposer à ces orientations, qui affaiblissent notre système de recherche et d’enseignement supérieur, et fragilisent notre pays sur le plan international. Aussi ne voterons-nous pas ce projet de budget.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le projet de budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » s’inscrit lui aussi dans un contexte difficile, lié à la crise économique et à ses effets évidemment négatifs sur l’incitation à l’investissement.
Cette contrainte pèse sur les dépenses de recherche et développement des entreprises tant françaises qu’européennes, alors même que la préparation de l’avenir nécessiterait au contraire un plus grand effort d’investissement dans la recherche.
Si dans son ensemble le budget de l’État est élaboré sous le signe de la rigueur, la recherche et l’enseignement supérieur restent néanmoins privilégiés, même si les attentes, énormes, ne sont pas toujours satisfaites. Pour le Gouvernement, ce secteur demeure bien prioritaire.
En ce qui concerne le crédit d’impôt recherche, je ne partage pas les critiques qui ont été formulées par de précédents intervenants. Ce dispositif, qui a été modifié voilà maintenant un peu plus de deux ans, a permis de relancer fortement la recherche dans les entreprises de notre pays. En tant qu’élu d’un département où la recherche tient une place particulièrement importante, j’y suis naturellement très attaché.
Mme Lagarde, qui est favorable au maintien en l’état du crédit d’impôt recherche, s’est déclarée prête à « prendre le risque de laisser subsister des abus occasionnels, minoritaires, au bénéfice d’un système qui est, dans la majorité des cas, utile, efficace, nécessaire pour l’innovation dans nos entreprises ». Elle s’est engagée, devant l’Assemblée nationale, à faire réaliser une étude sur les conditions d’optimisation du dispositif. Je pense que c’est une bonne chose.
Je voudrais appeler l’attention sur les conséquences dommageables que pourrait avoir une révision brutale ou inconsidérée du crédit d’impôt recherche en termes d’activité de recherche et développement et de compétitivité pour certains sites de mon département. En obérant durablement la maîtrise de certaines technologies clés, une telle réforme porterait atteinte à la compétitivité, au développement et, plus globalement, au positionnement de la France dans le secteur des grands systèmes de défense, aéronautiques ou de transports.
Par ailleurs, je souhaite vous féliciter, madame la ministre, pour l’opération Campus, ce plan de grande ampleur en faveur de l’immobilier universitaire qui représente un investissement de 5 milliards d’euros.
Parmi les douze campus sélectionnés, le projet du plateau de Saclay, dans mon département de l’Essonne, est porté par vingt et un établissements d’enseignement supérieur et organismes de recherche. Le lancement des appels d’offres et le début du dialogue compétitif avec les partenaires privés a eu lieu en septembre dernier, et la signature des contrats de partenariat interviendra à la fin de l’année 2011. Il s’agit de faire émerger un campus d’excellence qui sera la vitrine de la France et renforcera l’attractivité et le rayonnement de l’université française et du cluster du plateau de Saclay.
Je profite de cette occasion pour exprimer le souhait, madame la ministre, que puissent se concrétiser les projets de modernisation des laboratoires d’écologie du Muséum national d’histoire naturelle situés à Brunoy et d’implantation dans cette commune qui m’est particulièrement chère du conservatoire botanique de la région d’Île-de-France.
Enfin, je voudrais attirer votre attention, madame la ministre, sur un problème qui peut paraître secondaire et quelque peu déplacé dans un débat budgétaire : les abus du bizutage.
Pour des raisons personnelles, je suis particulièrement sensible à cette question. J’ai noté que vous aviez demandé au recteur de l’académie de Poitiers de vous remettre un rapport sur les week-ends d’intégration et assimilés, leurs dérives et les moyens d’y remédier. Nous devons être vigilants et mettre un terme, par la réglementation, à des pratiques qui sont à la fois inquiétantes et inadmissibles. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je tiens à saluer à mon tour l’augmentation des moyens budgétaires consacrés à la recherche.
En effet, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » augmenteront de 2 % en 2011, avec 468 millions d’euros en crédits de paiement, et de 15 % si l’on prend en compte les moyens extrabudgétaires et la montée en puissance du crédit d’impôt recherche – malgré un encadrement plus strict de ce dispositif –, ainsi que le développement des partenariats public-privé.
S’il en était besoin, la conjoncture actuelle, marquée par une difficile reprise économique, confirme la nécessité de renforcer la recherche et l’innovation et d’adapter les formations à l’évolution des métiers vers la croissance verte, les nouvelles technologies et énergies, les nouvelles formes de mobilité, la santé, le développement du numérique…
Dans la droite ligne de la stratégie de Lisbonne et du plan de relance, la recherche constitue un élément fondamental de la reprise de la croissance économique et de l’attractivité de la France.
L’augmentation des moyens alloués à la recherche et à l’enseignement supérieur est donc salutaire, même si certains choix de répartition des crédits – je pense, notamment, à la forte baisse des dotations de l’IFP Énergies nouvelles ou de l’Agence nationale de la recherche – sont critiquables.
Après ces propos liminaires, je souhaiterais insister sur deux points : les stratégies territoriales de l’enseignement et de la recherche, d’une part, la nécessaire poursuite des efforts en matière d’accompagnement des étudiants et d’amélioration de la vie étudiante, d’autre part.
Un soutien marqué aux pôles de compétitivité est indispensable pour renforcer l’effort national en faveur de la recherche et le dynamisme du tissu des PME innovantes. Nous avons adopté cette année la loi relative au Grand Paris, qui renforce la constitution d’un campus d’excellence sur le plateau de Saclay. C’est une bonne chose, mais c’est l’ensemble des projets thématiques d’excellence qui doivent pouvoir être retenus dans le cadre des investissements d’avenir. J’avais déjà soulevé, l’année dernière, un certain nombre de questions et d’inquiétudes à ce sujet.
J’espère que l’année 2011 verra enfin émerger les projets retenus au titre du plan Campus, afin que soit consolidée la visibilité des universités et des écoles françaises dans le monde, ainsi que l’ancrage territorial de ces pôles de formation d’excellence. L’association au financement d’opérateurs privés me semble non seulement constituer une solution financièrement intéressante, mais aussi favoriser la cohabitation, dans les locaux universitaires, des étudiants et des entreprises locataires. Ce type de rapprochement géographique offre l’occasion de développer des passerelles entre les deux secteurs.
Enfin, concernant le territoire normand, je me réjouis de la prochaine création du pôle de recherche et d’enseignement supérieur de Normandie, qui rassemblera les universités de Caen, du Havre et de Rouen, ainsi que deux écoles d’ingénieurs.
À l’instar de ce qui se fait ailleurs, cette coopération doit permettre aux enseignants et aux chercheurs de travailler de concert en vue de favoriser les transferts de technologies par le biais de pôles de compétitivité et de développer une approche territoriale globale des formations proposées en Normandie.
Je suis convaincue que ces démarches d’association sont favorisées par la poursuite du processus d’accession à l’autonomie des universités. Celles de Rouen, du Havre et de Caen font en effet partie des vingt-quatre qui deviendront autonomes à compter du 1er janvier 2011. À cette date, 90 % des universités bénéficieront de ce statut. Madame la ministre, il faut s’en féliciter. Nous souscrivons à cette démarche, qui permet une gestion plus adéquate, plus dynamique, plus réactive des moyens et des services des stages, d’insertion professionnelle, de documentation, etc. Toutefois, nous restons bien sûr vigilants quant aux critères de calcul de l’efficience des universités, lequel conditionne le montant des moyens alloués.
Je tiens maintenant à souligner les efforts consentis au titre de la politique d’accompagnement des étudiants.
Je pense, en particulier, à la revalorisation des plafonds d’éligibilité aux bourses accordées sur critères sociaux, qui sont passés de 27 000 euros en 2007 à 32 930 euros en 2010, et à l’allongement de la durée de versement, qui sera portée à dix mois à partir de la rentrée de 2011, contre neuf mois et demi cette année et neuf mois en 2009.
Toutes ces mesures vont dans la bonne direction, celle de la justice sociale et de l’accessibilité des universités pour tous, même si certaines inquiétudes subsistent, qui ont été largement évoquées tout à l'heure par notre collègue Jean-Léonce Dupont.
L’action relative au logement étudiant fait, quant à elle, l’objet d’avancées notables, face à des besoins considérables. En effet, le parc social ne peut accueillir que 7 % de l’ensemble des étudiants. Néanmoins, des efforts ont été entrepris pour améliorer l’offre. Ainsi, à la rentrée de 2010, le parc des CROUS comptait près de 3 000 chambres supplémentaires, pour un total de 161 500 places. Comme vous l’avez souligné, madame la ministre, nous nous rapprochons de objectif fixé dans le rapport Anciaux d’une capacité d’accueil de 185 000 chambres à l’horizon de l’année 2016.
Les efforts doivent donc se poursuivre en la matière, quitte à faire preuve d’inventivité : par exemple, des bâtiments militaires ou même des conteneurs, au Havre, ont été transformés en logements étudiants. Vous avez d'ailleurs vous-même inauguré ces conteneurs réaménagés en septembre dernier, madame la ministre.
Pour résumer, nous soutenons l’effort de la nation en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche et invitons à renforcer encore l’appui aux stratégies territoriales de développement de la recherche et de l’enseignement, ainsi que l’accompagnement de la vie étudiante.
Concernant l’enseignement universitaire, je souhaite mettre l’accent sur deux points essentiels.
En premier lieu, madame la ministre, vous aviez souhaité agir en faveur de la culture à l’université. Vous nous aviez annoncé une étude et un diagnostic. Qu’en est-il aujourd’hui ? Quels projets concrets comptez-vous développer pour favoriser l’accès à la culture des étudiants ? Comme le sport, il s'agit d’un enjeu essentiel pour la vie étudiante et l’épanouissement de nos jeunes en formation, mais aussi d’un lien entre l’université et les collectivités territoriales, notamment les villes et les régions, qui exercent la compétence culturelle.
En second lieu, j’ai souligné à plusieurs reprises, et je le fais de nouveau aujourd’hui, l’importance de l’élévation du niveau en langues étrangères à l’université.
J’espère que l’autonomie des universités favorisera l’enseignement de certaines matières en langues étrangères, notamment les plus parlées d’entre elles, comme cela se pratique de façon intensive dans certaines écoles de commerce. On se plaint de la trop faible employabilité de nos universitaires. Or les entreprises dont les activités dépassent les frontières nationales sont souvent amenées à travailler en anglais. Elles exigent un bon niveau de langue, exigence à laquelle les universitaires ne sont pas toujours à même de satisfaire. L’apprentissage des langues, quelles que soient les dominantes enseignées, est donc absolument indispensable ; il doit être encouragé et renforcé.
De même, j’espère que l’autonomie des universités favorisera la multiplication des échanges Erasmus, encore réservés à un trop faible nombre d’étudiants aujourd’hui. En effet, ces échanges, qu’ils soient universitaires ou qu’ils concernent la recherche, sont fondamentaux, car ils permettent une ouverture sur l’Europe ou le monde, l’apprentissage d’une langue étrangère ou encore la découverte de pédagogies nouvelles. Il faut soutenir avec force leur développement.
Enfin, je voudrais profiter de la présence de M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique pour évoquer un sujet qui me tient à cœur.
Les sénateurs membres du groupe d’études « Médias et nouvelles technologies », que j’ai l’honneur de présider, sont inquiets de la disparition annoncée du Forum des droits de l’internet, une instance de réflexion et de recherche sur les bonnes pratiques qui a fait ses preuves, dans un univers mouvant dont on peine encore à définir les règles. Un tel outil est indispensable pour avancer. Or le Forum des droits de l’internet devait être transformé en un conseil national du numérique qui, pour l’instant, n’a pas vu le jour. Je voudrais en savoir davantage sur ce point, car nous avons besoin d’un organisme de référence en la matière. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, dans un contexte de restrictions budgétaires, tout signe d’exception, si minime soit-il, suscite force satisfaction et fait taire les critiques. Le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche semble, à première vue, bénéficier d’un tel effort : la mission « Recherche et enseignement supérieur » reste, nous rassure-t-on, la première priorité du Gouvernement.
Oui, l’enseignement supérieur et la recherche sont le moteur de la croissance, l’assurance d’élever le niveau d’études des générations actuelles et futures, la seule voie de salut vers la société de la connaissance, l’unique outil efficace pour ne pas rester à l’écart de la compétition, mais aussi de la coopération internationale en matière de savoir et d’innovation.
Nos universités et nos grandes écoles ne sont pas des lieux dans lesquels l’ascenseur social fonctionne. La France demeure prisonnière d’un système élitiste. Les grandes écoles continuent à concentrer les aspirations à l’excellence, au détriment des universités, et la mobilité sociale y est très limitée.
La France occupe désormais le quatorzième rang mondial pour la recherche et le dix-huitième en matière d’innovation. Elle est en recul constant par rapport aux autres pays.
En outre, nous sommes toujours très éloignés de l’objectif des 3 % du PIB consacrés à la recherche, fixé pour cette année lors du Conseil européen de Lisbonne. Il faut d’ailleurs rappeler que la stratégie de Lisbonne visait à faire de l’économie de l’Union européenne « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010 ». Or nous sommes en 2010 : l’Union européenne n’a pas gagné ce pari, et la crise n’est pas seule responsable de cet échec.
Sur le plan budgétaire, plusieurs interrogations pèsent sur la mise en œuvre du grand emprunt et son articulation avec les dispositifs déjà en vigueur pour favoriser la recherche et l’excellence.
Entre le plan de relance, l’opération Campus et le grand emprunt, des moyens exceptionnels et extrabudgétaires particulièrement importants semblent affectés à la recherche et à l’enseignement supérieur, ce qui, en soi, est très positif.
Toutefois, que doit-on penser quand la perspective de moyens nouveaux est systématiquement compensée par une baisse des ressources budgétaires votées par le Parlement, quand l’empilement des dispositifs financiers se fait de plus en plus incohérent, opaque et peu lisible pour les acteurs du système, quand les crédits destinés à des investissements d’avenir ou à des plans de réussite financent, en réalité, des conventions en cours ou pallient les carences en matière de crédits de fonctionnement ?
Le 29 octobre dernier, Le Monde faisait état d’une note confidentielle de l’IGAENR, l’Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, portant sur l’évaluation du nouveau dispositif « plan pour la réussite en licence » lancé à la fin de 2007. Cette note révèle que de 50 % à 75 % des 110 millions d’euros débloqués ont été utilisés pour financer des dépenses de fonctionnement et d’investissement n’ayant que peu à voir avec ce plan.
M. Serge Lagauche. Que doit-on penser lorsque l’on constate que, en 2009 et en 2010, les intérêts des opérations Campus, qui s’élevaient respectivement à 157 millions d’euros et à 164 millions d’euros, ont été inscrits dans le budget mais jamais mis à disposition ni capitalisés sur la dotation initiale, gonflant ainsi artificiellement les crédits de la MIRES et jetant un doute sur la sincérité de la présentation budgétaire pour 2011 ?
Comment ne pas s’étonner de voir le crédit d’impôt recherche représenter 40 % de l’effort affiché, les remarques de la Cour des comptes ayant été curieusement oubliées ?
De fait, le dispositif du crédit d’impôt recherche comporte toujours un biais exagéré en faveur des grandes entreprises et ses réformes successives n’ont pas donné la priorité aux entreprises qu’il était censé aider, à savoir les jeunes entreprises innovantes et les PME.
Se pose de plus l’épineux problème de la régulation budgétaire : le budget exécuté est souvent très éloigné du budget voté par les assemblées et très inférieur à celui-ci, à force d’annulations, de transferts, de gels et de redéploiements de crédits. L’exercice du contrôle est extrêmement difficile.
La conclusion s’impose que les moyens nouveaux ne sont pas aussi importants qu’il pouvait paraître de prime abord ! De fait, l’effort affiché cette année inclut 238 millions d’euros de partenariats public-privé, qui ne démarreront qu’en 2013 ou en 2014 au plus tôt, les intérêts des opérations Campus, jamais versés encore, et la niche fiscale du crédit d’impôt recherche !
L’effort budgétaire revendiqué par le Gouvernement consiste donc à afficher des chiffres très hétérogènes pour aboutir à un résultat sans lien avec la réalité. L’augmentation des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », hors CIR, partenariats public-privé et intérêts virtuels des opérations Campus, c’est-à-dire en ne prenant en considération que ce qui revient in fine aux établissements d’enseignement supérieur et aux organismes de recherche, ne dépassera pas 4,4 milliards d’euros sur le quinquennat en cours, soit la moitié des 9 milliards d’euros de moyens nouveaux promis par le chef de l’État lors de son élection.
Au moment où il est demandé aux établissements d’enseignement supérieur et aux organismes de recherche un effort important de transformation, d’autonomisation, de prise en charge de nouvelles compétences, de regroupement autour de projets innovants, de réalisation rapide de projets immobiliers, d’amélioration de la performance en matière de réussite et d’insertion professionnelle, les financements, majoritairement attribués sur appels à projets, ne semblent être la contrepartie d’aucune réforme de fond.
On aurait pu envisager, par exemple, un renforcement de l’égalité des chances dans l’accès à l’enseignement supérieur, en particulier pour les grandes écoles, qui ne doivent pas rester ce lieu de reproduction des héritiers du savoir et de l’argent. L’excellence doit être accessible à tous ceux qui ont le talent et la volonté de se l’approprier.
Par ailleurs, la déclaration selon laquelle la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux ne sera pas appliquée, qu’il s’agisse d’enseignants-chercheurs ou de personnels administratifs ou techniques, ne répond absolument pas à la réalité des besoins de fonctionnement des universités. Il faut aussi créer de nouveaux emplois ! Quel gâchis que cette absence de débouchés dans le secteur public, lorsqu’on voit s’allonger les périodes d’emploi précaire de nos jeunes docteurs, à travers la multiplication des postes de post-doc et des bourses.
Le manque d’enseignants et de personnel administratif demeure et s’amplifiera : les projections à l’horizon de 2016 font état, avant réforme des retraites, du départ à la retraite de 9 842 professeurs des universités sur les quelque 18 000 en poste et d’environ 9 500 maîtres de conférence, soit un quart de l’effectif du corps. Avec en moyenne moins de 1 000 emplois créés par an jusqu’en 2007 et une baisse du nombre d’emplois en 2009, le renouvellement du corps enseignant ne pourra être assuré dans dix ans. En régions, dans les jeunes universités, il n’est pas rare de voir l’encadrement réduit à 80 % de l’effectif théorique, voire moins.
Se pose en l’espèce la question de l’équitable répartition sur le territoire des ressources allouées par l’État. Il ne s’agit pas uniquement d’une question de moyens, mais aussi d’un problème de justice sociale et d’efficacité. La collecte de fonds auprès des entreprises, notamment via les fondations et les partenariats public-privé, encore balbutiante, risque de rester insuffisante au regard des besoins et concentrée sur les universités implantées dans les grandes villes, où sont également installées les grandes entreprises.
À cet égard, l’attribution de la médaille Fields cette année à deux chercheurs français, preuve de la grande qualité de l’école mathématique française, est riche d’enseignements. En effet, une part de ce succès réside dans les spécificités de l’organisation de la recherche en mathématiques, qui se caractérise par une place réduite du CNRS en nombre de chercheurs et, corrélativement, un rôle central des universités, la répartition de très bons centres de recherche sur tout le territoire national, des pratiques vertueuses pour le recrutement et la gestion des carrières des chercheurs et des universitaires, ainsi que par une tradition très forte de transmission aux générations suivantes.
Il faut tirer les leçons d’une telle réussite, car le développement des grandes universités ne doit pas avoir pour corollaire l’abandon d’universités plus petites, lesquelles restent le vivier de recrutement des écoles doctorales.
M. Jacques Legendre. C’est vrai !
M. Serge Lagauche. C’est pourquoi nous sommes toujours inquiets quant aux perspectives de dévolution du patrimoine immobilier, qui sont importantes cette année. L’État joue-t-il son rôle d’accompagnateur en la matière, notamment en ce qui concerne la capacité des établissements à assurer la maîtrise d’ouvrage, point faible des universités candidates ? Où en sommes-nous dans la définition des schémas directeurs immobiliers ?
Il faut en effet conditionner la dévolution à la promotion d’une véritable vision stratégique, indissociable de l’exercice des politiques scientifiques et pédagogiques. Il ne suffit pas de disposer d’un patrimoine immobilier pour créer des campus reconnus internationalement.
Les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, qui encouragent les établissements à mutualiser et à gérer les écoles doctorales en commun, vont dans le bon sens, mais ils donnent lieu pour l’instant à deux dérives : leur nombre ne réduit pas la dispersion de la carte universitaire et aucune ambition scientifique et pédagogique ne semble présider à leur apparition. La Cour des comptes et l’IGAENR ont récemment souligné ces carences, en particulier les insuffisances en matière de valorisation de la recherche.
La mise en œuvre du dispositif licence, master, doctorat, ou LMD, requiert aussi des moyens qui soient à la hauteur des ambitions. Or ces moyens ne sont pas au rendez-vous !
La première ambition est de réussir enfin la massification et la démocratisation de l’enseignement supérieur. Comment y parvenir quand la dépense par étudiant est inférieure en France à ce qu’elle est dans de nombreux autres pays occidentaux ? Certes, l’OCDE reconnaît que cette dépense a progressé en France de 12 % entre 2000 et 2007, mais malgré cela notre pays se situe juste au-dessus de la moyenne de l’OCDE, soit environ 12 700 dollars par étudiant, contre 27 000 dollars aux États-Unis et 21 000 dollars en Suisse.
Quant au taux d’échec massif à l’issue de la première année universitaire – il oscille entre 40 % et 50 % –, il est la marque d’une spécificité française, toujours selon l’OCDE : une proportion considérable d’étudiants abandonnent leurs études longues pour être réorientés avec succès vers un enseignement plus court, de type STS – sections de techniciens supérieurs – ou IUT.
Des taux d’abandon aussi élevés sont le signe que le système éducatif ne répond pas de façon adéquate aux besoins de ses bénéficiaires. Dès lors, on a du mal à comprendre la stagnation des crédits du plan pour la réussite en licence et, de manière générale, des crédits destinés au dispositif LMD, dont la progression ne dépasse pas 1,8 %.
Enfin, il importe de sanctuariser la politique d’aide aux étudiants et à leurs familles, s’agissant du logement et de la fiscalité, ainsi que du dixième mois de bourse. Vos annonces en ce sens sont contradictoires à plus d’un titre. Vous donnez d’une main ce que vous retirez de l’autre ! Faut-il le rappeler, les loyers ont doublé dans le secteur privé depuis 1994 et l’APL, l’aide personnalisée au logement, comprise entre 150 euros et 250 euros par mois, est souvent la seule allocation perçue par les étudiants.
Quant au dixième mois de bourse, comptez-vous agir pour l’année scolaire 2011-2012 comme pour celle de 2010-2011, c’est-à-dire en procédant à un ajustement en cours d’exécution budgétaire ? La question est importante.
À mes yeux, le système actuel des aides directes – les bourses – et indirectes comporte trop d’injustices. Il semble désormais indispensable de poser la question sensible de l’augmentation des droits d’inscription, qui ne devront en aucun cas servir à pallier l’insuffisance des crédits de l’État.
Si l’État doit s’efforcer d’inciter les universités à développer une bonne formation générale et professionnelle des étudiants, soutenue par une bonne orientation, il doit aussi s’assurer qu’elles stimulent et garantissent une recherche fondamentale de qualité et une recherche appliquée de pointe, à même de rayonner sur l’économie et de favoriser la création d’entreprises innovantes.
C’est un travail de longue durée, exigeant toujours plus de moyens, mais il faut le mener à bien si l’on veut parvenir un jour à atteindre l’objectif de la stratégie de Lisbonne. L’effort du Gouvernement est insuffisant pour réaliser une telle ambition.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, les enquêtes publiques et les rapports parlementaires ou administratifs confirment tous que le crédit d’impôt recherche est un dispositif efficace et vertueux.
Ainsi, l’Inspection générale des finances, dans un rapport réalisé en juillet 2010, souligne la pertinence du crédit d’impôt recherche et en préconise la stabilité au moins jusqu’en 2013, car à cette date une évaluation économétrique portant sur plusieurs années consécutives permettra de valider définitivement son efficacité.
Les excellents rapporteurs spéciaux Philippe Adnot et Philippe Dominati eux-mêmes ont qualifié le crédit d’impôt recherche d’outil fiscal précieux à conforter dans le temps. Ils indiquent dans leur rapport que son économie générale ne doit pas être modifiée.
Je voudrais pouvoir m’en tenir là, mais je sens malheureusement la nécessité de souligner deux évidences : d’abord, le dispositif du crédit d’impôt recherche a fait la preuve de son efficacité ; ensuite, les aides à la recherche et au développement doivent être stables et s’inscrire dans la durée pour être efficaces.
S’agissant de l’efficacité du dispositif, j’en suis tellement convaincue que j’ai l’impression d’enfoncer des portes ouvertes en rappelant notamment que le crédit d'impôt recherche est une aide simple, ne nécessitant pas de démarches longues et complexes ni de négociations interminables. Il est devenu, pour les start-up, un levier essentiel pour transformer la haute technologie en main-d’œuvre et en chiffre d’affaires, notamment dans les secteurs des biotechnologies et des nanotechnologies.
L’apport du crédit d'impôt recherche dans l’évolution de l’emploi qualifié est indéniable. Il se traduit par l’embauche de jeunes docteurs, permettant à ces derniers de valoriser leur formation supérieure. Ce dispositif engendre des économies indirectes, par une réduction du chômage, et des gains indirects, en termes de cotisations de sécurité sociale ou pour la retraite, d’impôt sur les sociétés, etc.
Le crédit d'impôt recherche permet de retenir nos élites. Il encourage en outre les collaborations de recherche et amorce un cercle vertueux. C’est un facteur clé de succès pour l’innovation.
Le crédit d'impôt recherche accélère les partenariats public-privé et la sous-traitance au bénéfice des PME. Il attire les entreprises internationales ; à cet égard, quarante nouveaux centres de recherche se sont implantés en France en 2009.
Ce dispositif constitue vraiment le catalyseur de la confiance entre tous les partenaires publics et privés de l’innovation. Il est un véritable instrument de politique économique.
Que l’on me permette de citer quelques chiffres clés : 12 949 entreprises ont bénéficié du crédit d’impôt recherche au titre de 2008, dont 8 000 PME indépendantes ; les quarante nouveaux centres de recherche créés en 2009 que je viens de mentionner ont généré 2 115 emplois nouveaux, selon les chiffres indiqués par Mme Lagarde ; les secteurs industriels sont les bénéficiaires du dispositif, à concurrence de près des deux tiers de la dépense fiscale ; les dépenses relatives à la coopération avec la recherche publique prises en compte dans l’assiette du crédit d'impôt recherche ont augmenté de près de 20 % et celles qui sont liées à l’embauche de jeunes docteurs ont plus que doublé ; le crédit d'impôt recherche pourrait engendrer une hausse du PIB de 0,3 point, c’est-à-dire que, pour un euro de dépense fiscale, le PIB augmenterait d’au moins deux euros au bout de quinze ans.
J’en viens maintenant à la nécessaire stabilité du dispositif : il y va de l’efficacité même du crédit d’impôt recherche, qui ne peut en effet stimuler la dépense de recherche et développement des entreprises, programmée à moyen et long termes, que s’il est perçu comme suffisamment stable.
Parce qu’il facilite la budgétisation pluriannuelle des projets de recherche, le crédit d'impôt recherche est devenu, au sein même des directions de recherche et des laboratoires, un véritable instrument stratégique de gestion.
En modifiant sensiblement les règles, le législateur décourage les investisseurs et détruit leur confiance dans les dispositifs de l’État. Amputer le crédit d’impôt recherche, ce serait renoncer à faire de la France une terre d’accueil de l’innovation.
D’une manière pragmatique, il faut bien comprendre que les budgets des entreprises sont établis au mois d’octobre pour l’année suivante. Ainsi, les budgets pour l’année 2010 ont été validés en octobre 2009, et ils incluent forcément les avantages fiscaux utilisés pour investir dans de nouvelles forces productives, avec notamment la perspective de bénéficier du crédit d'impôt recherche au premier trimestre de l’année suivante. Modifier le système, c’est donc faire peser un risque de trésorerie sur les entreprises, dans un contexte de crise toujours prégnant.
Par conséquent, le maintien en l’état du crédit d'impôt recherche est une nécessité qui doit faire loi pour au moins toute la durée de la législature. C’est une question stratégique : l’effet de levier qu’il permet est considérable pour la croissance de demain. Ce dispositif n’est pas une niche fiscale, je l’affirme, c’est un investissement collectif en faveur de l’avenir de la croissance et de l’emploi dans notre pays. Il ne doit pas y avoir de coup de rabot aveugle et systématique : la recherche n’est pas une dépense comme les autres, elle est la promesse de recettes à venir. Les pouvoirs publics ne doivent pas donner l’impression d’hésiter ou de regretter d’avoir fait un tel choix stratégique.
Enfin, madame, monsieur les ministres, je voudrais appeler votre attention sur la nécessité d’une plus grande formalisation des méthodes de contrôle mises en œuvre par les experts du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. En effet, lorsqu’ils interviennent sur saisine de l’administration fiscale dans le cadre d’une vérification au titre du crédit d’impôt recherche, on observe aujourd’hui un certain nombre de disparités dans les pratiques et une application imparfaite du principe du contradictoire. Par conséquent, je souhaiterais que vous nous indiquiez quelles mesures vous entendez prendre pour remédier à cette situation. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, mon propos portera sur les moyens des universités, l’environnement partagé par les chercheurs, les enseignants, les étudiants et l’ensemble des personnels qui font vivre ces établissements.
Aujourd'hui, un tiers au moins du patrimoine immobilier universitaire est jugé vétuste. Chacun d’entre nous peut s’en rendre compte lors de ses visites sur les sites universitaires de son département. Ce constat est malheureusement si vrai que le Président de la République en est convenu le 29 novembre 2007, en annonçant le plan Campus.
Pourtant, madame la ministre, trois ans après, sur le terrain, il y a loin de l’autosatisfaction que vous affichez aux réalités.
Cette année encore, vous nous présentez une évolution impressionnante des crédits de la mission, mais, en y regardant de plus près, on découvre des techniques de présentation des chiffres qui expliquent que, entre les annonces et la réalité, les moyens « s’évaporent », sans compter les changements de périmètre des lignes budgétaires et le transfert progressif du paiement des retraites vers les opérateurs de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Une première technique consiste à annoncer, sur une année, des crédits qui ne sont pas dépensés cette année-là mais seront à nouveau inscrits l’année suivante. Une autre est de comptabiliser dans les autorisations d’engagement les montants des financements privés, correspondant à des partenariats public-privé, alors que ceux-ci ne sont pas encore conclus. Par ailleurs, ces partenariats ne sont pas sans poser des problèmes de principe, sur lesquels je reviendrai.
S’agissant du recyclage des crédits, il est envisagé pour 2011 d’affecter 270 millions d’euros à des chantiers dont les universités seront maîtres d’ouvrage. Il convient cependant de noter que, en 2009 et en 2010, vous nous annonciez, madame la ministre, 157 millions d'euros et 164 millions d'euros respectivement, qui n’ont finalement pas été présentés aux universités ni dépensés dans le cadre de l’opération Campus.
Or, pour 2011, ce n’est pas le faible degré d’avancement des projets du plan Campus qui permet d’envisager que ces 270 millions d'euros seront mobilisés pour des opérations d’envergure, même si vous expliquez que cela permettra « d’accélérer le début des travaux ». Peut-être en ira-t-il ainsi, mais 2011 ne verra pas forcément la consommation des crédits…
Nous sommes par ailleurs bien loin du montant de 5 milliards d’euros correspondant à l’effort consenti par l’État pour l’opération Campus et qui est censé servir de repère à nos concitoyens puisque, communication oblige, le Gouvernement le répète inlassablement année après année. En réalité, cette somme représente un capital, obtenu pour partie par le désengagement de l’État, qui a réduit sa participation dans le groupe EDF à hauteur de 3,7 milliards d'euros et fait appel au grand emprunt pour 1,3 milliard d'euros de plus. La somme de 270 millions d'euros correspond au produit de l’intérêt de ces 5 milliards d'euros, qui dorment tout en faisant du bruit médiatique… Mais n’est-ce pas là l’essentiel ?
L’effort affiché pour 2011 inclut également les partenariats public-privé pour 238 millions d’euros, après 110 millions d'euros en 2009 et 420 millions d'euros en 2010, soit un total de 760 millions d'euros affichés mais, pour le moment, purement virtuels. Le principe étant la prise en charge par le partenaire privé de la totalité de la dépense initiale pendant trois à quatre ans, la personne publique ne commence à s’acquitter d’un loyer qu’à partir de la livraison. À ce titre, en 2011, l’effort de l’État relatif aux remboursements des emprunts liés aux partenariats public-privé n’apparaît que pour 14,33 millions d’euros. L’essentiel viendra après les élections de 2012…
Je rappelle que le groupe socialiste est très réservé sur ce mode de financement, qui aboutit à privatiser le patrimoine des universités au profit d’investisseurs privés, lesquels n’ont ni les mêmes droits, ni les mêmes devoirs, ni les mêmes préoccupations surtout que le secteur public en matière d’aménagement universitaire du territoire Je pense en particulier aux antennes des universités en milieu rural, dont Jean-Luc Fichet parlera tout à l’heure.
En conclusion, les universités savent que, dans le contexte général de la politique conduite par le Gouvernement, elles doivent envisager l’avenir avec la plus grande prudence. De l’État, elles attendent pourtant des engagements pluriannuels pour accompagner leurs initiatives. Mais, ne se faisant guère d’illusions, les universités restent beaucoup plus mesurées que le Gouvernement quant à la réalité du caractère exceptionnel de l’effort qui serait consenti dans la loi de finances de 2011. J’ajoute qu’elles sont encore plus contrariées quand cet effort prend la forme d’annonces de bourses qui sont en réalité des exonérations de droits ne coûtant rien à l’État, mais ne leur rapportant rien. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. André Ferrand.
M. André Ferrand. Monsieur le ministre, j’espère que vous ne m’en voudrez pas de m’adresser spécialement à Mme la ministre.
M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. C’est une preuve de goût ! (Sourires.)
M. André Ferrand. Madame la ministre, je tiens tout d’abord à saluer à mon tour votre action et celle de votre ministère.
Chacun s’en rend compte, les choses ont commencé à sérieusement bouger dans le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche, au sens le plus large du terme.
L’autonomie enfin accordée aux universités a libéré à la fois les initiatives et l’ambition, trop longtemps bridée, d’aller vers l’excellence, indispensable pour bien figurer dans la compétition mondiale.
Des objectifs ont été clairement fixés et affichés, et des moyens exceptionnels par ces temps de contraintes pour nos finances publiques ont été alloués.
Madame la ministre, je me félicite de ce que vous ayez été reconduite à ce poste, afin de poursuivre une indispensable action réformatrice, qui a commencé à porter de beaux fruits.
Si j’interviens aujourd’hui à cette tribune, c’est avant tout pour vous remercier d’avoir, avec votre collègue le ministre des affaires étrangères et européennes – il s’agissait alors de M. Kouchner –, soutenu un projet destiné à accélérer l’internationalisation de notre enseignement supérieur grâce à un partenariat triangulaire entre lycées français de l’étranger, universités étrangères et pôles de recherche et d’enseignement supérieur – PRES –, candidats au financement « initiatives d’excellence » du grand emprunt.
Vous le savez, le projet est né d’un double constat : d’une part, il est nécessaire d’internationaliser encore davantage notre enseignement supérieur ; d’autre part, chaque année arrivent aux portes de notre enseignement supérieur quelque 7 000 bacheliers étrangers issus de notre réseau de lycées français à l’étranger, qui, dans une bien trop grande proportion, entament leurs études supérieures ailleurs que dans notre système, alors qu’ils sont parfaitement francophones et partagent notre culture, dont leurs études secondaires les ont imprégnés. Il y a là une vaste pépinière de talents étrangers que nous ne devons plus laisser échapper !
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Absolument ! Très bien !
M. André Ferrand. À partir de ces données et grâce à une réflexion menée en commun avec des représentants des deux équipes ministérielles et des deux administrations, la vôtre, madame la ministre, et celle du Quai d’Orsay, a été conçu ce partenariat à trois. Le PRES désigne les pays cibles, c'est-à-dire les lycées français de l’étranger dont il souhaite plus particulièrement attirer les élèves. On identifie alors l’université étrangère qui deviendra le partenaire local au sein duquel on créera des filières d’excellence, destinées d’abord aux anciens élèves du lycée, mais aussi à tous les étudiants qui satisferaient aux conditions requises. Ces filières bilingues, voire trilingues, seront bi-diplômantes, et leurs étudiants auront tout loisir de poursuivre éventuellement leurs études dans les différents établissements membres du PRES, après concours ou non, selon le cas.
Évidemment, la plus grande souplesse présidera à ces montages et des adaptations prendront en compte les particularités, les contraintes et les priorités de chacune des trois catégories d’acteurs. Ils seront en quelque sorte à géométrie adaptée.
Le Commissariat général à l’investissement, qui jouera un rôle déterminant dans la sélection des projets éligibles au programme des investissements d’avenir, a été parfaitement tenu informé de ce projet et, avec toute la réserve qui convient, il l’a reçu avec beaucoup de bienveillance. Cependant, il est clair que de tels dispositifs peuvent prospérer indépendamment du cadre de l’emprunt national.
Avec M. Kouchner, vous avez bien voulu désigner deux chargés de mission qui, avec cœur, se sont depuis quelques semaines mis à la disposition des PRES afin de les aider à préparer leurs projets. Ils ont déjà commencé à appuyer nombre d’entre eux, qui ont spontanément manifesté leur intérêt, et sont aussi prêts à assister ceux qui n’auraient pas encore été convaincus.
Je souhaite aussi rappeler, madame la ministre, que les trois grandes entreprises françaises auxquelles le projet a été soumis ont toutes réagi positivement. Elles ont fait connaître leur soutien de principe et ont, elles aussi, désigné un interlocuteur disposé à étudier avec les partenaires universitaires les conditions de leur engagement à leurs côtés.
Au moment où les porteurs des projets « initiatives d’excellence » mettent la dernière main à leurs dossiers, votre appui personnel et celui de vos équipes sont plus que jamais indispensables pour assurer le succès de cette opération.
Vous contribuerez ainsi à achever, au bénéfice de notre pays, l’extraordinaire travail commencé par notre réseau de lycées français dans le monde, qui, je le répète, met à votre disposition, chaque année, 7 000 bacheliers étrangers !
Il va sans dire que le groupe UMP votera ce projet de budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Claude Biwer applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la ministre, comme chaque année, vous nous parlez avec virtuosité d’un « effort exceptionnel ». Pas d’application de la RGPP, dites-vous. Fort bien, mais la baisse des moyens des organismes rogne les possibilités de postes.
Comme chaque année, les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis ont travaillé à la loupe, mais ils n’ont pas fait toute la lumière sur quelques points obscurs.
Comme chaque année, vous avez recours à un subterfuge. Aujourd'hui, les revenus des intérêts du capital du grand emprunt servent de prétexte à la réduction des moyens de l’ANR ; hier, c’était le milliard d’euros du Grenelle de l’environnement. Le rapporteur pour avis de la commission de la culture Jean-Léonce Dupont se contente habilement de vous citer, madame la ministre : « S’agissant du milliard d’euros promis à l’occasion du Grenelle de l’environnement, la ministre a précisé à votre commission qu’il “est plus que dépensé, dépassé, puisque nous y serons dès 2011. Les organismes ont réorienté leur programmation vers les priorités du Grenelle”. » Ce fut donc une « grenellisation » des dépenses, et pas du tout pas 1 milliard d'euros supplémentaire.
Pas moins de 40 % de ce que vous appelez l’« effort budgétaire » est englouti dans le crédit d’impôt recherche, soit 3,5 milliards d'euros de plus pour cette niche fiscale ! Est-ce là le rôle de votre ministère ? Le crédit d’impôt recherche est une aide aux entreprises, un mécanisme de renforcement de l’attractivité, mais, dans ces proportions, cela devient un renoncement de la sphère publique à faire des choix stratégiques. Alors que nos chercheurs sont sommés de justifier le moindre centime dépensé pour avoir le droit de poursuivre leurs travaux, abus et effets d’aubaine que pointait la Cour des comptes vont revenir.
Je tiens à saluer l’axe « développement durable » du grand emprunt, même si le concept recouvre trop de projets. Cependant, la priorité donnée à la seule valorisation scientifique à court terme et à la production de bénéfices empêche une véritable vision d’avenir. La société ne pourra se satisfaire de la consommation de sommes astronomiques qui n’enrichit que certains et ne permet d’anticiper les crises que par un « toilettage » des technologies d’hier.
Madame la ministre, je tiens également à vous faire part de mon inquiétude concernant la restructuration de la diffusion de la culture scientifique. Même la commission des finances se dit « perplexe sur les modalités de mise en œuvre de cette réorganisation ». Vous savez que le Palais de la découverte a des besoins importants et qu’Universcience ne dispose pas du personnel permettant d’instruire les demandes de subventions. Quant aux collectivités, autres financeurs importants de la culture scientifique, elles ont été mises au pain sec.
La délégation de moyens, revue à la baisse, qui interviendra risque de faire de nombreuses victimes dans les régions. Je suis convaincue qu’un opérateur comme Universcience peut difficilement, en temps de pénurie, être une bonne agence de moyens pour les centres de culture scientifique, technique et industrielle, les CCSTI, sauf à vouloir faire peser sur lui le courroux des autres opérateurs.
Le développement de l’intéressement et des primes au mérite constitue un autre point important. Outre le problème de fond, je pense que la compétition peut décourager les coopérations. Nous devons faire face à un effet imprévu, discriminatoire pour les femmes. Ces primes ne concernent que la recherche et il n’est effectivement pas opportun de les appliquer à l’enseignement, mais les femmes étant moins présentes dans la recherche que dans l’enseignement, elles se trouvent défavorisées. À l’université de Lille, sur quatre-vingt-seize primes d’excellence, cinq seulement sont allées à des femmes. Madame la ministre, il faudrait veiller à ne pas pénaliser les carrières des femmes universitaires.
Enfin, je tiens à rappeler l’importance de l’expertise, qui doit être mieux soutenue et revue. Les instances publiques, comme les citoyens, doivent pouvoir faire appel à des chercheurs compétents, mais aussi indépendants. Nous en sommes encore très loin, malgré les dispositions votées lors du Grenelle de la recherche, et, contrairement à ce que vous avez répondu à M. de Rugy le 22 juin 2010, il n’y a pas de statut juridique du lanceur d’alerte.
Pour les écologistes, la recherche doit produire de la connaissance. Elle doit s’appuyer sur un secteur public solide, disposant de personnels possédant des contrats stables et doté d’un financement pérenne. Les demandes, les observations, les alertes, les besoins non marchands de la société civile doivent trouver une réponse.
Quant aux efforts du privé, ils sont bienvenus, seuls ou en partenariat, autonomes ou soutenus, mais ils ne sauraient devenir un prétexte inconditionnel de consommation de l’argent public ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, je concentrerai mon propos à la vie étudiante.
Nous savons tous à quel point les conditions de vie des étudiants sont l’une des causes essentielles de l’échec qui gangrène notre système universitaire, lors du premier cycle en particulier.
En 2007, une étude avait déjà révélé que les dépenses des étudiants s’étaient accrues de 23 % en cinq ans. Alors que cette tendance se poursuit, les aides n’ont augmenté que de 6 %. Autant dire que les étudiants sont les premiers concernés par la baisse du pouvoir d’achat : neuf étudiants sur dix ont en effet vu leur pouvoir d’achat diminuer fortement.
Un étudiant sur deux est obligé de se salarier pour financer ses études. Chaque année, ils sont 20 % à abandonner leur cursus faute de financement. On ne peut pas, d’un côté, afficher sa volonté de permettre à un plus grand nombre de lycéens d’avoir le baccalauréat et, de l’autre côté, ne pas se donner les moyens d’aider les jeunes qui en ont le plus besoin, souvent issus des milieux les plus en difficulté, à suivre des études supérieures !
Au-delà de ce que j’appellerai des « bricolages », qui témoignent, certes, d’une bonne volonté, vous n’avez jamais pris de décision à la hauteur de l’enjeu pour améliorer de façon nette et visible les conditions de vie des étudiants.
Cette année, les crédits de l’action 01, Pilotage et animation, du programme 231, Vie étudiante, qui concerne les aides directes, augmentent enfin. Vous prévoyez 574 000 boursiers en 2011. Le chiffre est, certes, en augmentation, mais il faut savoir que la majorité de ces nouveaux boursiers seront ce que l’on appelle des boursiers « échelon zéro ». Ces boursiers ne perçoivent pas de bourse, ils sont simplement exonérés du paiement des droits d’inscription. C’est déjà très appréciable, j’en conviens. Mais je constate aussi qu’il s’agit d’un beau tour de passe-passe de votre part, puisque l’État ne compense pas ce manque à gagner !
Vous gonflez donc les chiffres à peu de frais, tandis que l’aide pour les boursiers les plus pauvres plafonne, perdue dans cette augmentation générale. Là où il faudrait « mettre le paquet », on n’avance pas ! Cet artifice est à l’aune de l’ensemble du budget du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur, qui souffre d’un manque patent de sincérité !
Pour autant, tout n’est pas négatif. Il est vrai que vous souhaitez enfin concrétiser votre promesse d’accorder un dixième mois de bourse pour répondre à l’allongement du calendrier universitaire : il était temps ! L’année dernière, cette promesse était restée lettre morte. Seulement, mesquinerie oblige, le financement de ce dixième mois s’étale sur deux ans. (Mme la ministre sourit.) Vous passez donc sous silence le fait que, cette année, les boursiers toucheront leur bourse à taux plein pendant neuf mois plus un demi-mois.
Mais pour moi, il y a pire ! Les aides à la mobilité s’établissent à 23,7 millions d’euros contre 31,89 millions d’euros l’année passée. Or, pour mettre vos actes en accord avec ce que vous annoncez, parfois de façon éclatante, il aurait fallu augmenter sensiblement ces crédits. Au-delà de la baisse des crédits, je m’insurge contre ce décalage.
On le sait, les séjours et études à l’étranger sont un atout majeur dans la construction d’un profil professionnel. Dans le monde d’aujourd’hui, dans l’Europe que nous construisons, la mobilité est un atout essentiel pour nos jeunes, pour la place de la France et pour notre compétitivité. Négliger cet atout est un aveu quant à votre manière de concevoir l’investissement pour l’avenir, qui est une nécessité absolue et en aucun cas une dépense inutile !
Que dire du logement ? Alors que la spéculation reprend de plus belle et que le montant des loyers devient inabordable pour tous les Français, et pour les jeunes en particulier, les étudiants sont de plus en plus nombreux à chercher à se loger.
On recense aujourd’hui 150 000 chambres pour 2 millions d’étudiants, dont 550 000 boursiers. Nous n’avons donc même pas de quoi loger le tiers des boursiers de notre pays ! Comment s’étonner que certains étudiants, en dépit des aides qu’ils perçoivent, éprouvent des difficultés à suivre leurs études dans de bonnes conditions ?
Les constructions de logements promises sont régulièrement revues à la baisse, y compris par rapport à vos propres engagements. Vous avez annoncé 40 000 logements pour 2014, mais, selon les chiffres dont je dispose, le budget prévisionnel n’autorise que 3 500 nouveaux logements pour les cinq années à venir et 8 400 réhabilitations.
La jeunesse est notre avenir. Si l’on veut avoir une jeunesse éduquée, hautement qualifiée, il faut lui donner les moyens de vivre dignement pendant son temps d’études et de formation. Voilà une dépense utile et nécessaire, car c’est de l’investissement !
Madame la ministre, votre projet de budget pour la recherche et l’enseignement supérieur ne prend pas ce cap. C’est une raison supplémentaire qui conduira le groupe socialiste à ne pas le voter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, la mission « Enseignement supérieur et recherche » verra, en 2011, ses crédits de paiement progresser de plus de 25 milliards d’euros, soit une hausse de 431 millions d’euros par rapport à 2010.
Si l’on admet une augmentation hors inflation de 1,7 %, l’évolution des crédits est bien inférieure au montant défini par la programmation budgétaire pluriannuelle, qui prévoyait des hausses successives de 3 % en 2010 et de 3,6 % en 2011.
Madame la ministre, je profiterai de ce débat budgétaire pour insister sur l’avenir de l’immobilier des universités, nerf de la guerre de l’autonomie que vous avez voulu mettre en place et élément essentiel pour l’avenir de l’enseignement supérieur en France. Avec 1,204 milliard d’euros en 2011, l’immobilier enregistre une baisse de crédits de 12,2 % en euros courants.
Madame la ministre, alors que vous venez d’annoncer une dévolution du patrimoine à cinq universités, alors que le Parlement est en train de discuter, au pas de charge, d’une proposition de loi visant à accélérer le transfert des biens immobiliers de l’État, les crédits que vous consacrez au patrimoine universitaire sont en net recul, affichant une baisse de 166,3 millions d’euros pour la sécurité et la maintenance des bâtiments.
De nombreux interlocuteurs ont pourtant souligné la nécessité que l’autonomie s’accompagne d’une aide importante pour réhabiliter les bâtiments. C’est le cas, par exemple, de la Cour des comptes, qui pose comme condition préalable à la dévolution immobilière la remise à niveau du patrimoine avant transfert ! La Cour réclame « un pilotage central » par le ministère et « des moyens d’expertise à la hauteur des enjeux ». Rien de tout cela ne nous a été proposé jusqu’à maintenant.
Le plan Universités du troisième millénaire, U3M, n’a pas été honoré. L’État n’a pas tenu les engagements qu’il avait pris dans les contrats de plan État-régions pour la période 2000-2006, qui prévoyaient 40 milliards d’euros sur la période pour tous les partenaires. Seuls 17,6 milliards d’euros ont été versés au titre des lois de finances de 2000 à 2006. Et encore ce chiffre doit-il être revu à la baisse en raison des annulations de crédits en 2002 et 2003.
Ce manque de crédits ne date certes pas d’hier. L’immobilier universitaire a très longtemps pâti du non-respect des engagements de l’État. Toujours est-il que, aujourd’hui, la situation est grave puisque 35 % du patrimoine universitaire est considéré comme vétuste.
Cette nécessité de financement était également l’une des conclusions du rapport de MM. Dupont et Adnot sur l’autonomie immobilière des universités.
Pour pallier la carence publique, et conformément à la loi du 7 août 2007, le Gouvernement a lancé, en janvier 2008, le plan Campus à hauteur de 5 milliards d’euros, financés par les recettes sur les cessions des titres d’EDF pour 3,7 milliards d’euros et par des partenariats public-privé. En 2010, 421 millions d’euros seront versés au titre de ces partenariats. Pour 2011, nous devrions nous situer autour de 250 millions d’euros.
Comme je l’avais dénoncé lors de l’examen de la proposition de loi relative à la dévolution du patrimoine de l’État aux universités, ces partenariats ne semblent pas sans conséquences à terme sur l’université française. Il s’agit non de caricaturer, mais bien de s’interroger sur la réalité de la situation. Ces contrats de partenariat, qui impliquent certains grands groupes de BTP, ressemblent fort à une privatisation rampante du patrimoine immobilier universitaire.
Par ailleurs, la mise en place de pôles universitaires d’excellence ne peut pas se faire au détriment des autres universités Cela pose la question des inégalités entre les universités, donc entre les territoires. Ajoutées à des partenariats public-privé qui iront forcément vers les universités les plus attractives, pour ne pas dire les plus rentables, et à un budget de l’État qui ne permet pas de contrebalancer le déséquilibre de ce plan, les inégalités ne pourront qu’être plus fortes.
Ce déséquilibre est d’autant plus prégnant pour les petites structures, IUT ou universités, implantées sur des territoires ruraux. Ce manque de financements de la part de l’État risque de remettre en cause la démocratisation de l’université et la politique d’aménagement du territoire de notre pays.
Permettez-moi de m’arrêter un instant sur la question de la démocratisation de l’université. En France, l’enseignement supérieur est de qualité. Sa diversité permet à des étudiants de plus en plus nombreux d’acquérir une formation professionnelle universitaire. Les IUT, les BTS sont des diplômes importants qui ouvrent sur des débouchés professionnels et qui sont essentiels au dynamisme et à l’attractivité de nombreux territoires.
Or, aujourd’hui, le risque est grand de voir les collectivités territoriales contraintes de soutenir financièrement les établissements universitaires. C’est déjà le cas dans certains départements. Si une collectivité veut qu’un nouvel établissement soit implanté sur son territoire, elle doit s’engager à financer une partie de ses dépenses d’investissement, mais aussi de fonctionnement. C’est ce qui s’est passé lors de l’installation d’un département de génie civil à l’IUT de Morlaix.
Le présent projet de budget, en ne donnant pas aux universités les moyens qu’elles attendent pour réaliser les travaux de réfection de leurs bâtiments, ne fera qu’accélérer le processus de sélection entre les territoires, selon que les collectivités locales auront, ou non, les moyens financiers d’attirer des étudiants.
Accompagnée par un projet de budget en berne, la logique du partenariat public-privé me semble être une machine à broyer les plus faibles. Nous sommes face à la mise en place d’une université française à plusieurs vitesses. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’avez compris, le projet de budget triennal de l’État est placé sous le signe d’une réduction des déficits publics.
Néanmoins, et je me tourne vers la gauche de l’hémicycle, l’enseignement supérieur et la recherche demeurent la priorité des priorités. Ce secteur continue, en effet, de se voir accorder des moyens exceptionnels dans un contexte extrêmement contraint.
Ce projet de budget est tourné vers la poursuite des réformes engagées, notamment celles de l’autonomie des universités et de la réorganisation du système de recherche. Il est destiné à permettre la revalorisation des carrières et à reconnaître l’engagement des personnels.
Cette priorité se manifeste également avec les investissements d’avenir, qui concentrent de très importants moyens sur l’innovation et le capital humain, moteurs de la croissance de demain.
Avec ce projet de budget, nous pouvons dresser un constat. Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, sur la période 2007-2012, 9 milliards d’euros auront été investis dans l’enseignement supérieur, hors investissements d’avenir, plan de relance et opération Campus. Je le dis à l’attention de MM. Renar et Lagauche et de tous les intervenants qui m’ont interrogé sur cette promesse, lors de la discussion générale.
En 2011, le secteur bénéficiera de près de 4,7 milliards d’euros de moyens supplémentaires. L’effort en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche mobilise l’ensemble des leviers de financement : les crédits de paiement, en progression de 468 millions d’euros ; la poursuite de la montée en puissance du crédit d’impôt recherche, avec une progression de la créance fiscale de 145 millions d’euros ; un effort immobilier sans précédent à travers les partenariats public-privé en faveur de l’immobilier universitaire, qui représentent 238 milliards d’euros en 2011 ; les intérêts de l’opération Campus, qui permettront de réaliser 270 millions d’euros d’investissements supplémentaires en 2011.
Ces actions sont complétées, au titre des investissements d’avenir, par 3 581 millions d’euros de crédits qui seront effectivement débloqués dès 2011 pour la première tranche de financement. Ces crédits, monsieur Raoul, sont bien des crédits « frais » dont disposera le secteur en 2011. Ils sont tangibles et incontestables. Je ne doute d’ailleurs pas qu’ils seront intégralement dépensés.
Ces moyens seront mis en place dès les premiers mois de l’année et nous veillerons avec vigilance, monsieur Houel, à ce qu’ils aient un effet économique positif.
Les moyens nouveaux qui seront débloqués pour l’année 2011, rapportés aux crédits budgétaires et au crédit d’impôt recherche, le CIR, au titre de l’année 2010, représentent une augmentation de 15 % des moyens du secteur.
Le présent projet de budget conforte l’augmentation inédite des moyens de l’enseignement supérieur et de la recherche depuis 2007. La traduction de ces engagements tenus, c’est tout d’abord la dépense intérieure de l’éducation. Nous choisissons à dessein cet indicateur, car il ne peut pas être remis en cause. La dépense intérieure de l’éducation retrace la dépense effectivement réalisée au travers de la lecture des comptes des universités agrégées. Elle s’élevait, en 2009, à 10 219 euros par étudiant pour l’université, contre 8 548 euros en 2007. Elle a donc connu une progression de 19 % sur la période.
La dépense intérieure de recherche connaît elle aussi une belle progression en 2009, avec une hausse de 2,5 % en un an.
L’effort de recherche progresse également, monsieur Raoul, pour s’établir à 2,21 % du PIB, notamment grâce à l’effort de recherche réalisé dans les laboratoires publics et dans le secteur privé malgré la crise. Cette donnée continuera à évoluer positivement, et vous pourrez bientôt en voir les conséquences, notamment avec des investissements d’avenir. Je tiens à rassurer Mme Blandin sur ce point : les engagements du Grenelle de la recherche en faveur de la recherche environnementale seront tenus.
Le projet de budget pour 2011 est marqué par trois priorités.
La première priorité est de renforcer l’attractivité des carrières dans l’enseignement supérieur et de la recherche. Le secteur de la recherche et de l’enseignement supérieur, parce qu’il est prioritaire, ne sera pas soumis, pour les années 2011, 2012 et 2013, à la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.
Les moyens en faveur des personnels seront en augmentation de 311 millions d’euros, dans la continuité des mesures annoncées. L’État financera « rubis sur l’ongle » les engagements pris à ce titre.
II s’agit de mieux reconnaître la mission d’enseignement des enseignants-chercheurs comme des chercheurs, de promouvoir l’excellence scientifique, de valoriser les fonctions administratives et techniques, et de reconnaître l’engagement des personnels d’encadrement.
La deuxième priorité de ce projet de budget est d’accompagner la réforme des universités et de favoriser la réussite des étudiants, monsieur Assouline. Il soutient une politique sociale inédite, au service de la réussite des étudiants, avec deux faits marquants.
Le premier est l’octroi d’un dixième mois de bourses, versé en deux ans, en contrepartie de l’allongement de la durée de l’année universitaire. Monsieur Assouline, lors des mouvements qui ont marqué la réforme des retraites, l’UNEF avait souligné à quel point la rentrée était encore tardive dans un certain nombre d’universités, franciliennes notamment …
M. David Assouline. Et alors ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Le second fait marquant est la priorité donnée au logement étudiant, afin d’atteindre les objectifs fixés par le rapport Anciaux. Avec 8 523 réhabilitations et 4 938 constructions livrées pour l’année universitaire 2010-2011, les objectifs du rapport Anciaux sont tenus, et même dépassés. Sur quatre ans, 44 000 chambres ont été livrées grâce à un effort budgétaire soutenu.
Vous avez raison, monsieur Dupont, de souligner que la garantie des risques locatifs doit être mise en œuvre. Nous y travaillons avec Benoist Apparu.
Les crédits du projet de budget du ministère pour 2011 viennent par ailleurs conforter l’autonomie des universités et stimuler leurs initiatives en matière de formation et de recherche. Le modèle d’allocation des moyens, monsieur Dupont, en est l’un des éléments d’incitation dont nous disposons et il doit naturellement tenir compte des taux d’encadrement par rapport à l’activité et des performances comparées des universités.
Monsieur Dupont, vous avez également souligné que la réussite de l’autonomie passe par un traitement équilibré de la question de la masse salariale. C’est un sujet de tout premier ordre, car il croise plusieurs problématiques : la nécessaire lisibilité donnée aux universités sur ce que l’État leur financera ; la responsabilité de leur choix de gestion et la soutenabilité à moyen terme de leurs décisions ; enfin, la maîtrise des finances publiques.
Au-delà des mesures dites techniques, telles que le point fonction publique et les pensions, je sais que les universités autonomes s’interrogent sur les conséquences du vieillissement de leurs personnels, que l’on appelle le glissement-vieillesse-technicité, ou GVT.
Après le passage aux compétences élargies, il revient à chaque université de piloter la gestion de sa masse salariale, dans la limite de son budget, en intégrant le GVT comme un des facteurs d’évolution de la masse salariale, comme le ferait n’importe quel autre établissement public, entreprise ou collectivité locale.
La couverture financière systématique du GVT par l’État serait antinomique avec un nouveau régime de responsabilité fondé sur l’autonomie. D’une part, elle impliquerait de maintenir des moyens de contrôle a priori approfondis sur les déterminants de la masse salariale de toutes les universités ; d’autre part, elle conduirait à réduire les dotations de l’État à chaque fois que le GVT constaté serait négatif. Ce serait la négation du principe de responsabilité.
Pour autant, une réflexion est ouverte avec la conférence des présidents d’université, la CPU, pour aboutir à une approche partagée de cette question et prendre mieux en compte le GVT dans les choix de budgétisation et d’allocation. Cela passe aussi par la nécessité d’accélérer la montée en compétences des universités sur le pilotage de la masse salariale.
En outre, après l’effort exceptionnel des années précédentes en matière immobilière, l’année 2011 permet de poursuivre les opérations programmées sur l’ensemble du territoire et de faire émerger douze campus labellisés « opération Campus », dont celui de Saclay, cher à M. Béteille, et neuf campus prometteurs et innovants.
L’année 2011 permettra également d’initier la dévolution du patrimoine immobilier pour quelques universités : Poitiers, Clermont I, Toulouse I, Paris VI et Corte. C’est un nouveau champ de l’autonomie qui s’ouvre, cher à l’ensemble des sénateurs présents dans cet hémicycle.
Messieurs Adnot et Dupont, rien n’est encore écrit sur la question de la mutualisation des produits de cessions entre universités. Nous pouvons y travailler. J’ajoute que sur ce point, le Gouvernement vous a proposé une forme de mutualisation des produits de cessions pour un site majeur, celui de Saclay, que vous avez refusée, lors de l’examen de l’article 30 du projet de loi de finances. Nous souhaitions que l’intégralité des produits de cessions liés aille aux opérations de Saclay, parmi lesquelles, vous le savez, figurent plusieurs équipements mutualisés.
La troisième priorité de ce projet de budget est la poursuite de l’augmentation des moyens pour la recherche.
Les crédits budgétaires augmenteront pour trois actions prioritaires.
La première est de tenir les engagements internationaux de la France sur les grandes infrastructures de recherche et sur l’Agence spatiale européenne, connue sous le signe anglais de ESA. Je vous rassure d’ailleurs, monsieur Dominati, sur l’adéquation des moyens dédiés à cette agence sur la période triennale, le respect des appels de fonds pour financer des programmes ambitieux et la tenue de la cible d’une dette ramenée à zéro à horizon 2015. La programmation budgétaire a été construite sur ces bases.
La deuxième action prioritaire est d’augmenter des moyens des organismes de recherche, notamment la revalorisation des carrières des chercheurs et des personnels administratifs et techniques. Néanmoins, ces organismes devront réaliser des efforts de gestion parallèlement à cette revalorisation. Des marges existent, monsieur Houel, sans affecter le potentiel de recherche : délégation globale de gestion pour mutualiser la gestion des unités mixtes, plateformes de mutualisation, rationalisation des fonctions, achats, autant de sujets sur lesquels nous travaillons étroitement avec l’ensemble des organismes de recherche.
Les moyens nouveaux concernent notamment l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, qui gérera les moyens du plan cancer 2, le Centre national d’études spatiales, le CNES, dont la progression est dynamique, et le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, le CEA.
Plusieurs d’entre vous m’ont fait part de leur inquiétude sur l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, ou IRSN. Il n’y aura pas de manque à gagner pour l’établissement, puisque l’économie réalisée de 30 millions d’euros est compensée à due concurrence par la mise en place d’une redevance sur l’expertise.
Quant à l’Institut français du pétrole, l’IFP, devenu IFP Énergies nouvelles, la révision générale des politiques publiques, la RGPP, a identifié des marges de manœuvre importantes qui documentent les économies à réaliser.
Monsieur Plancade, je souscris à votre demande de limiter la mise en réserve que doivent réaliser les organismes. Dans l’attente des arbitrages qui vont être rendus, je ne peux qu’inviter le Sénat à faire valoir ce point auprès du ministère du budget. (M. David Assouline s’exclame.) La représentation nationale a son mot à dire, monsieur le sénateur.
La troisième action prioritaire consiste à doter de manière pérenne OSEO et le CEA, préalablement financés par les moyens extrabudgétaires. Monsieur Raoul, vous contestez l’importance de cet effort. Pourtant, l’État apporte bien des moyens supplémentaires – 329 millions d’euros au total – et assure ce faisant une véritable sécurité quant au financement du CEA et d’OSEO.
L’Agence nationale de recherche, l’ANR, et la dynamique de financement sur appels à projets sont au cœur d’un paysage de recherche moderne.
MM. Dominati et Plancade ont évoqué les moyens de l’ANR et la contraction des budgets pour l’année 2011. L’année prochaine, l’Agence attribuera 772 millions d’euros de financements dits « classiques », soit 68 millions d’euros de moins qu’en 2010, notamment du fait du remboursement de l’avance accordée au titre du plan de relance. Mais l’ANR disposera de 17,5 milliards d’euros supplémentaires à attribuer par ailleurs, dans le cadre des investissements d’avenir. Les moyens de cette agence augmentent donc dans des proportions considérables.
Le financement sur projets est « boosté », et l’ANR est le maître d’œuvre des investissements d’avenir. Elle dispose des moyens, notamment en emplois, pour mener à bien ce grand projet. Elle met l’accent sur les projets les plus innovants et encourage les meilleurs laboratoires, avec la poursuite de l’augmentation des programmes « blancs » : en 2010, ils représenteront 50 % des financements de l’agence, contre 35 % en 2009, et ce conformément aux engagements pris par le Gouvernement.
La volonté de l’ANR de favoriser les projets les plus innovants se traduit également par la poursuite de l’augmentation du préciput, qui passe de 15 % à 20 % dès lors que les laboratoires présentent des projets avec l’intégralité des coûts qui leur sont rattachés.
Enfin, la programmation de l’ANR deviendra triennale, ce qui constitue une garantie pour les chercheurs. Cela permettra à ces derniers de mieux l’articuler avec la stratégie nationale de recherche et de mettre en œuvre les feuilles de route des alliances. Cela leur permettra aussi de travailler dans une plus grande sérénité, avec une meilleure visibilité, ce qui est d’autant plus nécessaire qu’ils doivent prévoir leurs projets à l’avance.
La recherche privée sera également soutenue afin d’accompagner la reprise économique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nombre d’entre vous m’ont interrogée sur le dispositif du crédit d’impôt recherche, qui fait l’objet de plusieurs amendements. C’est un point sur lequel je souhaite revenir, car le CIR constitue l’un de nos meilleurs atouts en termes de stimulation de recherche et développement et d’attractivité. Je remercie Mme Des Esgaulx de l’avoir si bien expliqué.
Les dépenses de recherche et développement privé ont progressé, malgré la crise, de 4,1 % entre 2007 et 2008, et de 1,1% entre 2008 et 2009, alors que ces dépenses sont souvent procycliques. M. Éric Besson vous en parlera mieux que je ne saurais le faire. Cela montre que le crédit d’impôt recherche a joué un rôle puissant d’amortisseur de la crise.
Les investissements étrangers sont dynamiques. Les partenariats public-privé progressent. Ainsi, au Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, les contrats avec les PME ont augmenté de 29% en un an, et 38% des brevets publiés en 2009 sont d’ores et déjà transférés à un industriel. Par ailleurs, le nombre d’entreprises utilisant l’incitation « jeunes docteurs » du CIR a doublé entre 2006 et 2008, avec près de 700 entreprises utilisatrices.
Fort de ces résultats, le Gouvernement souhaite stabiliser le dispositif du crédit d’impôt recherche, ce qui n’exclut pas de renforcer nos moyens de contrôle. Cette stabilité est un signal important envoyé aux entreprises. Nos échanges sont nourris sur le sujet. Je fais confiance à la sagesse des parlementaires pour tenir compte de ces éléments, conserver toute l’attractivité d’un dispositif qui ne doit pas être compliqué, et trouver un accord avec les députés sur le sujet, notamment sur la question des frais de fonctionnement.
Je n’ai que peu évoquer la question de la coopération internationale, et j’espère que M. Ferrand ne m’en tiendra pas rigueur.
En ce qui concerne le brevet européen, monsieur Plancade, je tenais à vous faire savoir que l’État a décidé de s’engager sur la voie d’une coopération renforcée, permettant à ce brevet européen de voir enfin le jour.
M. David Assouline. Et la mobilité ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. En conclusion, ce projet de budget pour 2011 marque une ambition inédite : un État engagé comme jamais aux côtés de ses universités et de ses organismes de recherche, avec 9 milliards d’euros injectés sur la période 2007-2012 ; des universités mobilisées pour favoriser la réussite des étudiants ; une recherche publique qui valorise l’excellence ; des carrières attractives pour l’ensemble des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche ; enfin, une recherche privée dynamisée et encouragée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. David Assouline. N’en jetez plus !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs spéciaux, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, à cette heure avancée de la nuit, je brosserai, en quelques mots, les grandes lignes des deux programmes qui relèvent de la compétence de mon ministère.
Je commencerai par le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle », du moins pour la petite partie qui me concerne.
Chacune le sait, et Valérie Pécresse vient de le rappeler, il nous faut développer la recherche et l’innovation. Pour cela, nous avons besoin d’un cadre stable, compétitif et attractif, que nous mettons en place au travers de trois grands dispositifs.
Le premier, c’est le crédit d’impôt recherche, qui connaît un succès incontestable, comme Mme Des Esgaulx l’a fort bien souligné.
Son impact est reconnu tant sur l’industrie et les PME qu’en termes d’attractivité du territoire. Il atteint maintenant pleinement son objectif, puisqu’il est utilisé par la quasi-totalité des entreprises ayant une activité de recherche et de développement. L’effort doit désormais consister à le stabiliser.
Les amendements adoptés à l’Assemblée nationale et au Sénat ont permis d’apporter un certain nombre de modifications et de précisions qui ne mettent pas en cause l’architecture générale du système.
Le deuxième dispositif s’appuie sur les jeunes entreprises innovantes, les JEI.
C’est l’un des moyens mis en œuvre pour favoriser l’innovation. Efficace, il a été adopté et plébiscité par les jeunes entreprises. Je tiens à le dire ici : malgré un nécessaire recentrage, ce dispositif est préservé, car il permet de créer des conditions attractives en France pour les entreprises innovantes. Celles-ci n’ont désormais plus besoin de traverser la Manche ou l’Atlantique pour trouver les conditions favorables à leur développement.
Depuis sa mise en place en 2004, le dispositif JEI a bénéficié à plus de 3 100 entreprises. Il connaît une montée en charge continue : 1 300 entreprises bénéficiaires au départ, plus de 2 400 en 2010, soit une augmentation moyenne de près de 13 % par an. Les exonérations de cotisations sociales consenties à ces jeunes entreprises ont suivi cette montée en charge : supérieures à 60 millions d’euros en 2004, elles atteindront près de 145 millions d’euros en 2010.
L’adaptation proposée par le Gouvernement au Parlement ne remet pas en cause le dispositif. L’État soutient également les entreprises innovantes par bien d’autres voies, notamment via cet acteur essentiel qu’est OSEO. Ses moyens budgétaires sont relativement préservés, avec une importance donnée aux innovations de rupture et aux projets de croissance.
Le troisième dispositif regroupe l'ensemble des mécanismes axés autour du renforcement des coopérations, car coopérer est devenu indispensable pour innover.
La coopération s’effectue, d’abord, au niveau national, grâce aux pôles de compétitivité. Près de 900 projets de recherche et de développement des pôles ont été financés depuis 2005, pour un montant de dépenses de recherche et développement de près de 4,6 milliards d’euros, dont 1,1 milliard d’euros apportés par l’État.
Après une évaluation positive de la première phase de la politique des pôles en 2008, l’État a décidé d’affecter 1,5 milliard d’euros au lancement d’une seconde phase courant sur la période 2009-2012.
Les pôles de compétitivité sont, par ailleurs, au cœur des investissements d’avenir et joueront un rôle central dans la quasi-totalité des actions engagées dans ce cadre.
Cette nécessaire coopération se fait, ensuite, au niveau européen, grâce au programme Eurêka qui doit nous permettre de coordonner l’utilisation des budgets de recherche et de développement nationaux. Les évaluations dont il a fait l’objet montrent que les objectifs sont atteints.
Avec ce qu’il me reste de voix, j’en viens maintenant au programme 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables ».
L’énergie a été clairement identifiée comme un axe prioritaire dans le cadre de la Stratégie nationale de recherche et d’innovation. Il s’agit d’un exercice de prospective scientifique qui s’est déroulé l’an dernier et dont les grandes orientations avaient été présentées par Valérie Pécresse le 8 juillet 2009.
La nouvelle organisation de la recherche dans le domaine de l’énergie s’appuie aujourd’hui à la fois sur une vision stratégique et sur une coordination opérationnelle.
Tout d’abord, la Stratégie nationale de recherche énergétique établit des priorités d’action à court terme – 2020 –, à moyen terme – 2030 – et à long terme – 2050.
Cette stratégie est en cours d’élaboration par mes services, en association avec ceux du ministère de la recherche. Nous solliciterons l’année prochaine l’avis du Comité stratégique à la recherche en énergie, mis en place en septembre dernier, en vue d’une adoption effective conjointe entre Valérie Pécresse et moi-même.
Ensuite, pour la mise en œuvre de cette stratégie, nous pourrons nous appuyer sur une coordination opérationnelle. La nouvelle Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie, créée en juillet 2009, vise à mieux coordonner et à renforcer l’efficacité des recherches menées par les divers organismes publics nationaux. Elle participera à la mise en œuvre de la stratégie nationale et à l’Alliance européenne sur la recherche en énergie, l’EERA.
Notons par ailleurs que les établissements se mobilisent. Les changements de noms récents du CEA, devenu Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, et de l’IFP, devenu IFP Énergies nouvelles, ne sont ainsi pas seulement des actes symboliques.
Confirmant les propos de Valérie Pécresse, je veux dire à MM. les rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis que la baisse de la subvention versée à l’IFP Énergies nouvelles sera compensée par la recherche tout à la fois de ressources propres supplémentaires – appels à des projets nationaux et européens, partenariats avec l’industrie – et de nouvelles sources d’économie. L’« audit RGPP », qui met en avant la gestion de l’établissement, aidera à identifier certaines pistes de réduction de dépenses. Enfin, une cession d’actifs non stratégiques est prévue.
Nous avons également déployé un effort considérable en faveur de programmes technologiques opérationnels. Avec la mise en place du programme « Investissements d’avenir », plus de 5 milliards d’euros sont ainsi mobilisés au titre du grand emprunt national en faveur des technologies de l’énergie.
Pour réussir ce pari industriel et pour orienter les programmes de recherche technologique vers des produits susceptibles de répondre aux défis de demain, mes services travaillent depuis plusieurs mois, en liaison étroite avec le ministère du développement durable, à l’élaboration de plans d’action par filières.
Le Gouvernement souhaite ainsi poursuivre une politique de l’énergie ambitieuse, au service d’une industrie conquérante qui accompagne notre transition vers une économie décarbonée.
Par ailleurs, je tiens à répondre à Mme Des Esgaulx qui nous a interrogés, Valérie Pécresse et moi-même, sur les méthodes de contrôle mises en œuvre par les experts du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Une réflexion interministérielle a été engagée en 2010 avec la création d’un comité de coordination auquel participent le ministère de la recherche, mais aussi l’administration fiscale, la direction générale des finances publiques, la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, l’administration de l’industrie, OESO, et l’Agence nationale de la recherche. Vos préoccupations, madame, ont été prises en compte et seront satisfaites.
Enfin, je veux confirmer officiellement à Mme Catherine Morin-Desailly ce que je lui confiais en aparté tout à l’heure juste après son intervention. Oui, nous préparons activement le lancement du Conseil national du numérique, dont j’avais annoncé la création en présentant le plan France numérique 2012. Dans quelques jours, au plus tard dans quelques semaines, je serai, madame, à même de répondre complètement aux légitimes préoccupations que vous avez exprimées, au regard notamment des modalités d'organisation de cette nouvelle instance. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. –M. Claude Biwer applaudit également.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Recherche et enseignement supérieur |
25 359 241 401 |
25 183 501 754 |
Formations supérieures et recherche universitaire |
12 479 760 441 |
12 272 043 804 |
Dont titre 2 |
1 592 911 187 |
1 592 911 187 |
Vie étudiante |
2 080 046 559 |
2 082 299 549 |
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
5 128 192 129 |
5 127 810 228 |
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
1 244 058 803 |
1 243 966 157 |
Recherche spatiale |
1 392 128 045 |
1 392 024 372 |
Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables |
1 332 094 807 |
1 371 173 467 |
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
1 086 991 121 |
1 076 027 218 |
Dont titre 2 |
99 752 400 |
99 752 400 |
Recherche duale (civile et militaire) |
196 709 760 |
196 695 111 |
Recherche culturelle et culture scientifique |
121 734 645 |
121 425 844 |
Enseignement supérieur et recherche agricoles |
297 525 091 |
300 036 004 |
Dont titre 2 |
178 521 272 |
178 521 272 |
M. le président. L’amendement n° II-248, présenté par MM. Beaumont, Braye, Bizet, Dulait, Trillard et Bordier, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
+ |
- |
+ |
- |
|
Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Vie étudiante |
||||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
||||
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
||||
Recherche spatiale |
||||
Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables |
||||
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle Dont Titre 2 |
||||
Recherche duale (civile et militaire) |
||||
Recherche culturelle et culture scientifique |
||||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Pierre Bordier.
M. Pierre Bordier. Cet amendement tend à abonder de 5 millions d’euros supplémentaires les crédits de l’action 01, Enseignement supérieur, du programme 142, Enseignement supérieur et recherche agricoles.
Il s’agit en effet de soutenir l’École nationale vétérinaire d’Alfort, l’ENVA, qui s’est engagée dans une indispensable démarche de rénovation portant à la fois sur les volets pédagogique, immobilier et de mise en sécurité. Pour le renouvellement de son accréditation européenne en 2013, l’ENVA doit mener à bien la construction d’un « pôle à risques biologiques », dont le coût est estimé à 20 millions d’euros. Or la dotation attribuée par le ministère chargé de l’agriculture ne permet de financer le projet qu’à hauteur de 15 millions d’euros environ. L’École a donc impérieusement besoin d’une enveloppe supplémentaire de 5 millions d’euros.
Tel est l’objet du présent amendement, qui tend donc à transférer 5 millions d’euros de l’action 15, Pilotage et support du programme, du programme 150, Formations supérieures et recherche universitaire, au programme 142, Enseignement supérieur et recherche agricoles.
Ce virement est d’autant plus logique que l’ENVA est membre fondateur du pôle de recherche et d’enseignement supérieur Université Paris-Est, comprenant des unités mixtes de recherche et des unités labellisées par l’université Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne. L’École d’Alfort a d’ailleurs demandé son rattachement à cette dernière.
Le transfert proposé, tout en répondant à un besoin urgent pour la réalisation d’un projet susceptible de conditionner l’accréditation européenne de l’ENVA, s’inscrit par ailleurs dans le rapprochement souhaitable entre l’enseignement vétérinaire et l’Université.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. À l’évidence, la construction d’un pôle à risques biologiques est à la fois une idée particulièrement intéressante et un projet très important. Dès lors, une question se pose : pourquoi n’est-elle pas prise en compte dans le cadre des investissements d’avenir du grand emprunt ? (M. Daniel Raoul applaudit.) Nombre d’investissements bénéficient des fonds de ce grand emprunt sans être nécessairement aussi ambitieux qu’un pôle à risques technologiques.
Une telle demande nous paraît donc légitime. Cela étant, parce qu’il s’agit d’un projet essentiel à notre pays, je pense que la méthode de financement proposée n’est pas la plus efficace et qu’il vaudrait mieux passer par le biais des investissements d’avenir. Je me tourne donc vers Mme la ministre pour lui demander son avis.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Bordier, vous le savez, l’État consacre un effort exceptionnel à la rénovation de l’École nationale vétérinaire d’Alfort. En effet, sur trois ans, ce sont 15 millions d'euros qui seront consacrés à un très beau projet de rénovation, de mise en sécurité et de création d’un laboratoire de nécropsie.
Ces crédits sont le fruit d’un constat partagé entre l’État et l'établissement et sont versés conformément à l’échéancier de paiement prévu : 4 millions d'euros en 2010, 5 millions d'euros en 2011, et le solde en 2012 pour la rénovation entière de l’ENVA.
Je rappelle d’ailleurs que c’est sur l’initiative du Sénat que nous avions accepté de financer ces programmes sur le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche et non sur celui du ministère de l’agriculture, qui aurait pu tout aussi bien être mis à contribution.
L’échéancier de paiement de ces travaux ne justifie pas, à mon sens, un abondement supplémentaire pour 2011. Bien entendu, cela ne préjuge pas l’éventualité de voir survenir des dépassements de coût ou des redimensionnements. Comme l’a dit en substance M. le rapporteur spécial, l’ENVA peut très bien, compte tenu de son rayonnement national et international, se porter candidate sur des projets scientifiques liés aux investissements d’avenir : dès lors, les diverses modalités de financement seraient étudiées en temps voulu ; mais ce n’est pas, me semble-t-il, d’actualité.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, le gage que vous proposez pour financer la majoration de ces crédits me conduit à demander le retrait de l’amendement. À l’heure où les universités doivent préparer leur passage à l’autonomie, il serait malvenu de réduire leurs moyens de 5 millions d’euros.
Je souhaite, comme vous, que l’échéancier de rénovation de l’ENVA soit respecté. Je favoriserai l’émergence d’un projet d’investissement d’avenir sur Maisons-Alfort. Néanmoins, je le répète, il ne me paraît pas justifier de priver l’université de crédits pour les affecter à l’ENVA, qui aura de toute façon du mal à les dépenser.
M. le président. Monsieur Bordier, l'amendement n° II-248 est-il maintenu ?
M. Pierre Bordier. Non, je le retire, monsieur le président. Cependant, le problème reste entier. Au final, il manquera toujours 5 millions d’euros, quel que soit l’échéancier retenu.
M. le président. L'amendement n° II-248 est retiré.
L'amendement n° II-276, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2 |
||||
Vie étudiante |
||||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
3 600 000 |
3 600 000 |
||
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
||||
Recherche spatiale |
||||
Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables |
||||
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle Dont Titre 2 |
||||
Recherche duale (civile et militaire) |
||||
Recherche culturelle et culture scientifique |
3 600 000 |
3 600 000 |
||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
3 600 000 |
3 600 000 |
3 600 000 |
3 600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Le ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur et le ministère de la culture et de la communication ont décidé de confier à Universcience un rôle de pôle de référence en matière de diffusion de la culture scientifique. Cet opérateur apparaît le plus à même d’utiliser de façon optimale les crédits auparavant gérés par l’administration centrale et attribués aux dispositifs dédiés en la matière.
Pour accompagner cette évolution, il est proposé, par le présent amendement, de procéder au transfert de 3,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement du programme 172, Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires, vers le programme 186, Recherche culturelle et culture scientifique. Ce mouvement de crédits s’accompagne également du transfert d’un emploi.
Cette somme correspond aux crédits que la direction générale pour la recherche et l’innovation consacre, à partir de l’action 01 du programme 172, aux principaux dispositifs de culture scientifique et technique. Ces crédits permettent le financement des centres de culture scientifique, technique et industrielle. Je crois savoir, madame la ministre, que cet amendement vous convient. Vous pouvez donc constater que nous sommes bien disposés à votre égard. (Sourires.)
Monsieur le président, puisque j’ai la parole, permettez-moi de réagir à un propos tenu par Mme la ministre dans sa réponse aux orateurs.
Madame la ministre, vous avez déclaré que le Sénat avait rejeté le système, que vous aviez qualifié de « mutualisation », des produits de cessions. Je considère pour ma part qu’il s’agissait plutôt d’un système de « non-mutualisation » : En effet, si l’on garde par devers soi les actifs universitaires qui valent très cher, comment peut-on mettre en œuvre le principe de mutualisation avec les détenteurs d’actifs universitaires d’une faible valeur ?
Une réelle mutualisation aurait consisté à regrouper dans un fonds national le produit des cessions d’actifs réalisées, quelle que soit leur valeur. Ainsi, lorsque l’on cède un actif à un prix très élevé, plutôt que de faire de l’enrichissement sans cause, on en place une partie dans un pot commun, ce qui permet par la suite à tout le monde de pouvoir se défendre.
Vous nous accusez d’être contre la mutualisation parce que nous avons refusé un dispositif qui s’apparentait en fait à une non-mutualisation. Ce reproche ne passe pas, madame la ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Dominati, rapporteur spécial. Cet amendement vise à transférer 3,6 millions d’euros du programme 172, dont je suis rapporteur, vers le programme 186, dont s’occupe mon collègue Philippe Adnot.
Ce transfert correspond à la volonté de confirmer le rôle d’Universcience en matière de diffusion de la culture scientifique en lui confiant des missions jusqu’ici assurées par l’administration centrale du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Pour mémoire, Universcience est le nom d’usage de l’établissement public issu du rapprochement du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie. L’amendement a pour objet de faciliter la réorganisation du dispositif de diffusion en transférant à Universcience des tâches qui relevaient de l’administration centrale.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement qui permet d’inscrire dans le projet de loi de finances une évolution de gestion qui est prévue pour 2011. Il conforte le nouveau positionnement d’Universcience, qui devient un pôle de référence en matière de diffusion de la culture scientifique. Ainsi, il allouera désormais aux centres de culture scientifique, technique et industriel les crédits qui étaient jusqu’à présent distribués par l’État.
Monsieur Adnot, je tenais à vous dire, en réponse à votre observation, que le déménagement d’écoles vers Saclay nécessite des crédits considérables. Si les écoles qui vendent leurs locaux à Paris pour s’installer à Saclay n’apportaient pas avec elles le produit de la cession de leurs actifs, les crédits de l’université seraient amputés par ces déménagements. Or la rénovation de cette université me tient particulièrement à cœur. Je veux qu’elle soit au centre du plateau et l’arrivée de nouvelles écoles ne doit pas constituer un handicap.
M. Laurent Béteille. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Plancade. Je voterai bien évidemment cet amendement. Mais permettez-moi de profiter de cette explication de vote pour revenir sur les pôles d’excellence.
Il faut plus que jamais rechercher l’excellence. Hier soir, Mme la ministre et moi-même avons assisté, à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, à une remise de diplôme, au demeurant assez prestigieuse. J’ai alors appris, et cela devrait nous faire réfléchir, que l’année dernière, en Inde, on a produit plus de thèses de recherche que dans toute l’Union européenne, les États-Unis et le Canada réunis. Il faut donc absolument faire un effort supplémentaire dans ce domaine.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Je vous prie de m’excuser, mais je limiterai mon propos à l’objet de cet amendement ! (Sourires.)
Universcience n’a pas assez d’argent pour subvenir aux besoins du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l’industrie. On ne peut que se réjouir que vous lui en donniez ! Vous avez même prévu le transfert d’un emploi pour assurer la gestion des demandes d’instruction des subventions.
Toutefois, je le répète, notre groupe reste particulièrement sceptique sur le fait qu’un nouvel opérateur central devienne agence de moyens pour tous les centres de culture scientifique installés en région. C’est comme si l’on demandait au théâtre de l’Odéon de continuer à monter des pièces tout en instruisant les dossiers des théâtres de province.
Tant que vous n’aurez pas distingué ce qui relève de la décentralisation et ce qui ressortit au pôle central, nous ne pourrons pas vous accompagner. Par conséquent, nous nous abstiendrons sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Je partage l’avis de Marie-Christine Blandin. Je souhaite que Universcience devienne un pôle d’excellence de la culture scientifique. À cette fin, elle doit avoir les moyens de faire fonctionner le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l’industrie.
Dans le même temps, ce pôle doit pouvoir aider les centres de culture scientifique de tout le pays. Ce n’est pas toujours simple, car les expositions organisées à la Cité des sciences et de l’industrie sont parfois trop importantes pour être accueillies par de petits centres de culture scientifique.
Si Universcience était financé par la création d’un budget supplémentaire, il n’y aurait pas de problème. Mais la LOLF nous oblige à transférer les crédits. En l’occurrence, ces transferts se feront au détriment des universités, des laboratoires…
M. Jean Arthuis. C’est le fatum !
M. Ivan Renar. Ah ! Le fatum, monsieur Arthuis !
Je n’irai pas jusqu’à voter contre l’amendement, parce que je me réjouis que l’on aide la Cité des sciences et de l’industrie, dont la direction est très méritante. Mais pour toutes les raisons que j’ai évoquées, je m’abstiendrai, non sans regret.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Je suis, moi aussi, très favorable à Universcience, mais je partage un peu la crainte, peut-être provinciale, de mes collègues. Je voudrais au moins avoir la garantie que la concentration de crédits au sein de Universcience ne risque pas de se traduire par un avantage significatif donné aux équipements de la capitale.
Je voterai l’amendement, mais je resterai très vigilant sur ce point. Je me réserve la possibilité de revenir, le cas échéant, sur ce sujet lors de la discussion du prochain projet de loi de finances.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion l’article 78 et l’amendement portant article additionnel après l’article 78, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Recherche et enseignement supérieur
Article 78
L’article 131 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) est ainsi modifié :
1° Le I est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « dans la double limite, d’une part, des cotisations dues pour la part de rémunération inférieure à 4,5 fois le salaire minimum de croissance, d’autre part, d’un montant, par année civile et par établissement employeur, égal à trois fois le plafond annuel défini à l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, et dans les conditions prévues au V du présent article. Les conditions dans lesquelles ce montant est déterminé pour les établissements créés ou supprimés en cours d’année sont précisées par décret. » ;
2° À la fin de la première phrase du premier alinéa du V, les mots : « au plus jusqu’au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l’entreprise. » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « à taux plein jusqu’au dernier jour de la troisième année suivant celle de la création de l’établissement. Elle est ensuite applicable à un taux de 75 % jusqu’au dernier jour de la quatrième année suivant celle de la création de l’établissement, à un taux de 50 % jusqu’au dernier jour de la cinquième année suivant celle de la création de l’établissement, à un taux de 30 % jusqu’au dernier jour de la sixième année suivant celle de la création de l’établissement et à un taux de 10 % jusqu’au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l’établissement. »
M. le président. La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, sur l’article.
Mme Marie-Agnès Labarre. Nous ne saurions nous opposer à la limitation du dispositif de l’article 78 concernant les jeunes entreprises innovantes, pourtant coûteux pour l’État et pour la recherche publique.
Cependant, cela ne doit pas nous faire perdre de vue l’essentiel. C’est bien une maigre concession, qui perd en crédibilité avec l’examen du budget de la recherche et de l’enseignement supérieur.
Vous affichez votre volonté de préserver notre capacité nationale de recherche et d’innovation. Tête haute devant les décombres de notre société industrielle vendue au moins-disant salarial, vous claironnez que l’éducation et la recherche sont notre salut.
Si la France de demain se joue bien là, on pouvait donc s’attendre à une augmentation du financement de la recherche publique et des moyens alloués aux laboratoires d’enseignement supérieur.
Dans les faits, vous mélangez les autorisations d’engagement et les crédits de paiement pour pouvoir afficher un « effort exceptionnel » qui ne trompe personne. En changeant le périmètre de la Mission interministérielle de recherche et d’enseignement supérieur, la MIRES, en lui transférant les cotisations de retraites, vous réussissez cette année encore à augmenter artificiellement votre projet de budget tout en réduisant, en euros courants, les crédits réellement affectés aux laboratoires. Ce faisant, vous aggravez les conditions de travail des enseignants et des chercheurs, qui « cherchent mais ne trouvent jamais », selon les mots flatteurs du Président de la République.
Vous corsetez les universités que vous mettez en concurrence sous couvert d’autonomie. Vous contraignez ainsi les universités à se tourner, pour survivre, vers des formes de partenariats avec les entreprises, car à vos yeux les « fondations » des mécènes tels que MM. Bouygues, Bolloré ou Lagardère, parfaitement désintéressées, ont vocation à piloter la recherche et à se substituer à l’État ! Cet État qui n’a plus d’argent depuis que les riches sont dispensés de payer l’impôt, depuis qu’il a vendu ses meubles – pardon, nos meubles ! – aux grands groupes à vils prix et qu’il rembourse avec l’argent public les pertes des banques privées et des actionnaires.
Vous soumettez une nouvelle fois la recherche publique – ce qui nous choque toujours, mais ne nous surprend plus – à des impératifs dictés par les intérêts des grands groupes industriels. Vous la liquidez en l’obligeant à se soumettre à des appels d’offres orientés, en liant son financement aux aléas du crédit d’impôt recherche et du grand emprunt.
Belle supercherie que ces sommes « mises à disposition » par le grand emprunt : elles sont en réalité de 60 % inférieures à ce qui était annoncé, et elles ne pourront même pas être utilisées à 50 % en 2011.
En revanche, vous exigez le remboursement, dès 2011, du plan de relance lancé en 2009, alors que le plan Campus n’a pas encore vu le jour ! Vous supprimez bel et bien des crédits dits « de réserve », qui n’étaient inscrits au budget que pour en être retirés. Au total, ce sont 860 millions d’euros qui ont été effacés depuis 2007 !
De plus, vous inscrivez bien avant terme les intérêts des emprunts en leasing que vous contractez auprès des majors de la construction, en vertu de ce que vous nommez abusivement un « partenariat public-privé » !
Belle trouvaille que ce crédit d’impôt recherche qui passe à côté du rabot des niches fiscales. Il a coûté 4 milliards d’euros en 2010 et pèsera encore pour plus de 2 milliards d’euros en 2011. Mais à qui profite-t-il ?
Pour trouver la réponse, il suffit de chercher qui en sont les plus ardents promoteurs. Les universités ? Non, bien sûr ! Le service après-vente est assuré par les consultants en placements financiers à fort rendement, dont l’un d’entre eux affirme : « L’expérience de plus de vingt années de nos consultants pluridisciplinaires, notre expertise, ainsi que notre démarche structurée et complète vous donneront la possibilité de bénéficier du crédit d’impôt recherche en atteignant un triple objectif : bénéficier d’un rendement maximal avec un niveau de sécurité total et à un juste prix. » Et M. le Premier ministre d’y faire écho sur le site www.paradis-fiscal.fr... une dénomination qui ne s’invente pas !
Voilà la recherche française ramenée du rang de phare de l’intelligence nationale à celui d’auxiliaire de profits pour les groupes !
Alors, oui, les milliards d’euros pleuvent, mais pas là où nous souhaitions les trouver : ni sur la recherche publique ni sur la recherche fondamentale ! En réalité, la recherche nationale est tout à la fois en liquidation et en récession ! Et c’est grave !
C’est grave, parce que la recherche publique est notre avenir et, en lui coupant les ailes, nous nous interdisons de l’orienter librement. Les priorités du Gouvernement seront celles des financiers. L’estimation du profit encouragera ou condamnera les filières de recherche.
Le pouvoir laissé aux industriels et l’absence de cadrage politique soumettent les producteurs aux exigences de rentabilité, une notion ô combien éloignée de l’intérêt général !
Les domaines de l’énergie renouvelable, des véhicules électriques ou des médicaments génériques montrent que ceux qui n’ont pas d’intérêt immédiat à développer des technologies émergentes allant dans le sens de l’intérêt général ne les développent pas s’ils n’y sont pas contraints.
Par ailleurs, le passé récent le démontre, lorsque la puissance publique démissionne, abandonne son savoir-faire, exporte ses cerveaux et brade ses outils de recherche, c’est non plus la science, mais le marché qui pilote l’avancée technologique.
L’État s’interdit ainsi de percevoir, à la fois pour le bien public, pour le progrès social et pour l’équilibre de son budget, le juste retour de ses investissements. Voilà votre vision de l’avenir, une vision qui est lourde de conséquences !
De mon point de vue, seule la puissance publique dispose de la légitimité qui permet de concilier innovation, sécurité et défense de l’intérêt général. Nous ne devons abandonner cette responsabilité à aucun prix. Voilà pourquoi nous devons financer abondamment et honnêtement, sur fonds publics, la recherche publique !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-152 est présenté par MM. Plancade et J.L. Dupont, au nom de la commission de la culture.
L'amendement n° II-285 rectifié bis est présenté par Mme Hermange, M. P. Dominati, Mlle Joissains, Mme Dumas, MM. du Luart, Milon et Lefèvre, Mmes Bruguière, Lamure et Des Esgaulx et M. Chatillon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-152.
M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis. L’article 78 du projet de loi de finances pour 2011 vise à réformer le dispositif d'exonération des cotisations sociales accordées aux jeunes entreprises innovantes.
Cet article prévoit, d'une part, un plafonnement des exonérations sur les hauts salaires et, d'autre part, un mécanisme de sortie progressive du dispositif. L’entreprise concernée bénéficierait du même taux d'exonération de la première à la quatrième année, puis ce taux diminuerait progressivement durant les quatre années suivantes avant de s’éteindre.
Le coût de ce dispositif a, je le sais, augmenté ces dernières années, mais cela témoigne de la nécessité de soutenir le développement des jeunes entreprises innovantes.
Tel est, par exemple, le cas du secteur des jeux vidéo, dans lequel les entreprises sont déjà fortement attirées par les dispositifs fiscaux proposés par certains pays étrangers.
Le dispositif des JEI a été créé par la loi de finances de 2004, il est donc normal qu’il monte en puissance. En outre, vous le savez, les entreprises ont besoin de règles stables, de visibilité.
Enfin, les entreprises concernées n’ont pas été avantagées par la réforme du crédit d’impôt recherche et, de surcroît, elles pâtiront de la baisse des crédits d’intervention d’OSEO.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission de la culture, de l'éducation et de la communication vous propose, mes chers collègues, de supprimer l’article 78.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l'amendement n° II-285 rectifié bis.
M. Philippe Dominati. Je tiens à remercier le président de la commission des finances d’avoir accepté de me suppléer à cette heure tardive pour donner l’avis de la commission des finances…
En qualité de rapporteur spécial, j’avais défendu en commission, avec Philippe Adnot, un amendement de suppression de l’article 78. Je partage donc les motivations de la commission de la culture.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, vous l’aurez compris, je supplée les rapporteurs spéciaux pour exposer l’avis de la commission des finances, qui se soucie, comme chacun d’entre nous, de l’équilibre des comptes publics et du niveau du déficit public.
Depuis l’institution du régime spécifique des jeunes entreprises innovantes, il a été mis en place un mécanisme de crédit d’impôt recherche avantageux qui constitue, à l’instar d’autres dispositifs, un puissant levier dans la mesure où il représente un crédit d’impôt de 30 % des dépenses de recherche et développement.
La réduction progressive des exonérations de cotisations sociales nous semble être de nature à rééquilibrer le dispositif. C’est pourquoi la commission des finances a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Besson, ministre. En dépit de l’heure tardive, permettez-moi de vous exposer les raisons précises pour lesquelles le Gouvernement ne peut soutenir ces deux amendements identiques de suppression, malgré l’attachement qu’il porte, à l’instar de leurs auteurs, aux jeunes entreprises innovantes.
Comme cela a été rappelé, lorsque le dispositif des JEI a été mis en place en 2004, le mécanisme du crédit d’impôt recherche était moins avantageux pour les entreprises. Depuis la réforme du CIR, intervenue en 2008, le soutien aux jeunes entreprises innovantes a été considérablement renforcé. Ainsi, le taux du crédit d’impôt recherche a été porté à 30 % des dépenses de recherche et développement, avec un taux majoré pour les entreprises qui y recourent pour la première fois, ce qui est le cas des jeunes entreprises innovantes.
À l’issue de la réforme de 2008, le résultat est là : le nombre d’entreprises bénéficiant du CIR a fortement augmenté et représente désormais l’une des premières dépenses fiscales de l’État, avec un coût supérieur à 4 milliards d’euros en 2008, contre 1,8 milliard d’euros en 2007. Les PME, et, parmi elles, les jeunes entreprises innovantes, en sont les premières bénéficiaires.
Dans ce nouveau contexte, et compte tenu de l’impératif de maîtrise des finances publiques, il est devenu nécessaire de mieux articuler les différents dispositifs financiers d’aide à l’innovation.
Nous sommes, je le rappelle, dans un cadre global qui impose que les efforts soient partagés par tous. Avec l’article 78 du présent projet de loi de finances, le Gouvernement, veut recentrer le dispositif des jeunes entreprises innovantes en le plafonnant et en instaurant une sortie progressive.
Les conséquences de la réforme qui vous est proposée ne sont pas aussi « terribles », aussi graves qu’on a pu l’entendre. Combiné au crédit d’impôt recherche, le dispositif proposé restera extrêmement intéressant pour les jeunes entreprises innovantes. L’exonération totale de cotisations sans dégressivité continuera de s’appliquer pleinement pendant les quatre premières années d’existence de la JEI, des années durant lesquelles ces jeunes entreprises sont les plus vulnérables.
J’ajoute que la part des cotisations qui ne sera pas à l’avenir exonérée pourra être réintégrée dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche, ce qui est de nature à limiter les conséquences que pourrait avoir la réforme sur la situation de ces entreprises.
Sous le bénéfice de ces explications, je demande aux auteurs de ces deux amendements identiques de bien vouloir les retirer ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de la culture.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Les membres de la commission de la culture se préoccupent, eux aussi, de l’emploi. Lors d’un déplacement au Canada, au printemps dernier, nous avons constaté, avec consternation, que de jeunes entreprises innovantes françaises de jeux vidéo avaient décidé de s’installer à Montréal ou au Québec. Elles ont créé un nombre important d’emplois, dont certains sont occupés par des Français qui ont choisi de s’expatrier pour trouver du travail. Tant mieux pour Montréal ! Dommage pour notre pays ! Il est triste de voir des entreprises s’expatrier, surtout lorsqu’elles évoluent dans un secteur aussi dynamique que celui des jeux vidéo. J’ai eu l’occasion, avec M. le ministre de la culture, de visiter certaines de ces entreprises, implantées dans le département du Nord. Et je préfère évidemment les voir prospérer chez nous.
Monsieur le ministre, bien que le dispositif des JEI soit assez coûteux, je voterai les deux amendements identiques de suppression de l’article 78. Je crains en effet que la réforme que vous proposez n’incite certaines jeunes entreprises à faire profiter d’autres pays de leur créativité.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Le dispositif des JEI a en effet connu une importante montée en puissance depuis sa création. Mais je vous rappelle, mes chers collègues, que l’innovation reste une aventure ! Pour lancer une entreprise, il faut du temps. Dans tous les business plans qui sont validés dans des incubateurs d’entreprises ou des technopoles, on s’efforce d’avoir une vision à six, sept, voire huit ans. Et n’oublions pas le taux de mortalité de ces entreprises !
L’article 78 prévoit un plafonnement des exonérations sur les hauts salaires. À cet égard, monsieur le ministre, je vous recommande, la lecture – qui n’est pas habituelle pour moi – d’une étude de l’Institut Montaigne consacrée au brain drain.
Tout le monde se plaint de la fuite des cerveaux, notamment de l’appropriation, par les laboratoires américains, des docteurs que nous avons formés grâce aux crédits français de l’enseignement supérieur et de la recherche. Si l’on n’est pas capable d’offrir des salaires relativement élevés à ces docteurs dans les JEI, on va accélérer encore cette fuite des cerveaux.
Par ailleurs, nombre d’intervenants l’ont souligné, les entreprises ont besoin de stabilité en ce qui concerne tant le crédit d’impôt recherche que les autres dispositifs relatifs à l’innovation.
Monsieur le président de la commission des finances, si vous êtes aux abois, faites donc le ménage du côté du crédit d’impôt recherche ! Regardez l’optimisation fiscale à laquelle se livrent certains groupes et les effets d’aubaine qui s’ensuivent !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous avons voté des amendements de contrôle !
M. Daniel Raoul. Certes, mais l’innovation est un facteur important et elle sera sans doute une porte de survie pour l’économie, notamment pour l’industrie, qui ne représente plus que 16 % du PIB. L’article 78 porte un mauvais coup aux jeunes entreprises innovantes, d’autant qu’elles vont pâtir, de surcroît, de la baisse des crédits d’intervention d’OSEO.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.
M. Philippe Adnot. En commission des finances, M. Dominati et moi-même avons déposé des amendements identiques, mais nous avons été battus. Pour respecter la règle en vigueur dans la commission, je pensais ne pas participer au vote. Mais voilà que le Gouvernement demande un scrutin public !
La commission des finances et la commission de la culture ayant des avis contraires, comment voteront les sénateurs de la majorité ? Comment s’effectuera le partage et qui décidera dans quel sens les uns et les autres doivent voter ?
Suivant l’exemple que vous avez montré la semaine dernière, monsieur Arthuis, en quittant le banc des commissions pour défendre un amendement auquel la commission des finances était opposée, mais qui a finalement été adopté, je me sens autorisé, contrairement à ma première idée, à voter les amendements de suppression de l’article 78. Et, pour expliquer ma position, je reprendrai vos arguments et ceux de M. le ministre.
Monsieur le président de la commission des finances, voilà peu, en faisant voter la suppression de la réduction d’impôt de 5 % au titre du crédit d’impôt recherche pour les entreprises qui dépensent plus de 100 millions d’euros pour la recherche, vous avez dégagé une somme disponible de 200 millions d’euros.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Oui !
M. Philippe Adnot. Les 50 millions d’euros qui sont nécessaires ce soir pour préserver l’équilibre des finances sont donc disponibles, même si vous affirmez que ce n’est pas la même chose.
Pardonnez-moi, mais, en qualité de président de conseil général, je sais bien que, dans un budget global, il est parfaitement possible, lorsque 200 millions d'euros d’économies ont été réalisés dans un domaine, d’affecter 50 millions d'euros à un autre domaine.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non !
M. Philippe Adnot. Si, c’est possible, monsieur Arthuis, peut-être pas au sein du budget de l’enseignement supérieur, mais en tout cas dans le budget global. Tous ceux qui affirment que nous n’avons pas les moyens de couvrir cette dépense se trompent. Grâce à vous, monsieur Arthuis, nous disposons donc d’une marge de manœuvre !
Monsieur le ministre, vous avez déclaré que le dispositif actuel était maintenu pendant les quatre premières années de la vie de l’entreprise, années durant lesquelles les entreprises sont le plus vulnérables. C’est effectivement entre trois et cinq ans que les besoins de trésorerie des entreprises sont les plus importants. Et c’est à ce moment-là que vous voulez les étrangler ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit !
Mme la ministre de l’enseignement supérieur, par une action remarquable, obtient que l’on finance, à hauteur de 1 milliard d’euros, la valorisation de la recherche, donc la maturation de projets, la naissance d’entreprises nouvelles. Le Gouvernement demande à M. Retailleau un rapport sur la création des entreprises de taille intermédiaires, les ETI. Et c’est précisément au moment où l’on consacre autant de moyens à la création d’entreprises et à leur développement pendant les quatre premières années que vous décidez de réformer le dispositif d’exonération ? Ce n’est pas possible !
Mes chers collègues, tous les sénateurs de la majorité qui sont présents s’apprêtaient à voter les amendements identiques de suppression de l’article 78. Je ne sais donc pas comment les choses vont se passer. Que chacun se débrouille avec sa conscience !
Madame la ministre, je souhaite la suppression de l’article, car je présenterai, après cet article, un amendement de repli qui vise à insérer un article additionnel et qui devrait vous convenir.
Le dispositif des JEI repose sur deux supports : un allégement des charges sociales et un allégement de la fiscalité, qui représente à peu près 20 millions d'euros. L’amendement de repli que je vous propose vise à conserver ce système pendant huit ans. Mais cela suppose, bien entendu, que l’État respecte sa parole.
Or, madame la ministre, monsieur le ministre, ce soir, vous reniez la parole de l’État. Certaines jeunes entreprises innovantes, fortes des engagements que vous aviez pris, ont passé des contrats d’embauche avec des chercheurs. Elles vont demain devoir les licencier, et ce au moment le plus délicat, le plus difficile pour elles !
Pour toutes ces raisons, il faut adopter les amendements identiques de suppression de l’article 78. Sinon, il faudra voter les amendements de repli et, à défaut, l’amendement portant article additionnel après l’article 78.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-152 et II-285 rectifié bis.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 144 :
Nombre de votants | 321 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 149 |
Pour l’adoption | 146 |
Contre | 151 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-286 rectifié bis, présenté par Mme Hermange, M. P. Dominati, Mlle Joissains, Mme Dumas, MM. du Luart, Milon et Lefèvre, Mme Bruguière, M. Revet, Mmes Lamure et Des Esgaulx et M. Chatillon, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L'article 131 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 est ainsi modifié :
1° À la première phrase du V, les mots : « au plus jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'entreprise » sont remplacés par les mots : « à taux plein jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'établissement » ;
2° Après la première phrase du V, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Elle est ensuite applicable à un taux de 75 % jusqu'au dernier jour de la huitième année suivant celle de la création de l'établissement, à un taux de 50 % jusqu'au dernier jour de la neuvième année suivant celle de la création de l'établissement, à un taux de 30 % jusqu'au dernier jour de la dixième année suivant celle de la création de l'établissement et à un taux de 10 % jusqu'au dernier jour de la onzième année suivant celle de la création de l'établissement. » ;
3° Après le V, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'exonération prévue au I est applicable :
« - aux entreprises crées entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2017 ;
« - aux entreprises existantes à la date du 1er janvier 2004, dès lors qu'elles ont moins de douze ans à cette date. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° II-243 rectifié, présenté par M. Adnot et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après le VII de l’article 131 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …- En cas de changement de contrôle, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, d’une société ayant le statut de jeune entreprise innovante ou ayant perdu ce statut depuis moins de quatre ans, la société rembourse à l’État l’ensemble des avantages financiers dont elle a bénéficié au titre de l’application du présent article. »
L'amendement n° II-232 rectifié, présenté par MM. Adnot, du Luart, Retailleau et J.L. Dupont et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
six
II. - Alinéa 3
Après les mots :
sont remplacés par les mots et
rédiger la fin de cet alinéa :
deux phrases ainsi rédigées : « à taux plein jusqu'au dernier jour de la quatrième année suivant celle de la création de l'établissement. Elle est ensuite applicable à un taux de 80 % jusqu'au dernier jour de la cinquième année suivant celle de la création de l'établissement, à un taux de 60 % jusqu'au dernier jour de la sixième année suivant celle de la création de l'établissement, à un taux de 30 % jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'établissement. Ces dispositions sont applicables pour les entreprises créées après le 1er janvier 2011. »
L'amendement n° II-233 rectifié, présenté par MM. Adnot, du Luart, Retailleau et J.L. Dupont et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le mot :
trois
par le mot :
six
II. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé
...° Il est ajouté un X ainsi rédigé :
« X. - Ces dispositions sont applicables pour les entreprises créées après le 1er janvier 2011. »
La parole est à M. Philippe Adnot, pour défendre ces trois amendements.
M. Philippe Adnot. Après la présentation de ces trois amendements, la commission et le Gouvernement feront leur marché dans les propositions que je vais leur soumettre !
L’amendement n° II-243 rectifié a pour objet, d’une part, de maintenir inchangés les avantages liés au statut de jeune entreprise innovante et, d’autre part, d’instaurer un remboursement à l’État des avantages qu’il a octroyés en cas de vente, soit lorsque la société bénéficie toujours du statut de jeune entreprise innovante, soit au cours des quatre années suivantes. Ainsi, si les entreprises changent de contrôle, les efforts faits par l’État pour créer de la richesse ne seront pas gaspillés.
Je tenais à exposer cet amendement pour montrer que nous défendons les intérêts de l’État et que nous ne souhaitons pas le gaspillage de l’argent public. Mais j’ai bien conscience qu’il est imparfait. Son application poserait en effet problème en cas de vente d’une entreprise en France. C’est pourquoi, après vous avoir demandé de le considérer comme un amendement d’appel, je le retire.
L’amendement n° II-232 rectifié vise à faire évoluer les taux, afin que la potion soit plus acceptable.
L’amendement n° II-233 rectifié est de même nature.
À chacun de se faire une opinion sur ces amendements. En vérité, monsieur le président, c’est l’amendement n° II-234 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après l’article 78, qui a ma préférence.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. L’amendement n° II-286 rectifié bis de Mme Marie-Thérèse Hermange est encore plus coûteux que le dispositif en vigueur ! Par conséquent, l’avis de la commission des finances y est totalement défavorable, à moins que l’objectif ne soit d’accroître la dépense publique !
M. Jean-Pierre Plancade. C’est exagéré !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Tout dépend de l’objectif poursuivi ! (Sourires.)
Pour développer la recherche, comme l’ensemble des activités, et retrouver de la compétitivité, je considère qu’il est urgent d’étatiser les recettes des branches santé et famille de la protection sociale, et de leur substituer un impôt de consommation. M. Besson connaît bien cette question.
Je remercie M. Philippe Adnot d’avoir retiré l’amendement n° II-243 rectifié, ce qui nous fait gagner du temps !
L’amendement n° II-232 rectifié vise, d’une part, à augmenter le plafonnement des exonérations par société, qui passerait ainsi de trois à six fois le montant du plafond de la sécurité sociale et, d’autre part, à rendre plus progressive la « sortie en sifflet » du dispositif.
La démarche adoptée par le Gouvernement est conservée, mais elle se poursuivrait à un rythme plus modéré.
Cet amendement n’atteignant pas tout à fait l’objectif de meilleure maîtrise de la dépense publique, l’avis du Gouvernement nous sera précieux. Quoi qu’il en soit, monsieur Adnot, la commission vous demandera vraisemblablement de bien vouloir le retirer.
Quant à l’amendement n° II-233 rectifié, il tend à assouplir une partie du dispositif, puisque les nouvelles dispositions ne seraient appliquées qu’aux jeunes entreprises innovantes créées après le 1er janvier 2011.
La commission n’ayant pas examiné cet amendement, elle n’a pu en chiffrer le coût. Mais sans doute réduirait-il presque à néant les économies escomptées pendant au moins quatre ans. Dans ces conditions, sauf avis très favorable du Gouvernement, la commission est très réservée.
M. Philippe Dominati. Je retire l’amendement n° II-286 rectifié bis !
M. le président. L’amendement no II-286 rectifié bis est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-232 et II-233 ?
M. Éric Besson, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements pour les raisons qui viennent d’être avancées par M. le président de la commission des finances.
Je tiens à la disposition de M. Adnot des explications plus précises sur les raisons qui m’auraient conduit à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° II-243 rectifié, si celui-ci n’avait pas été retiré.
M. le président. Mes chers collègues, je vous indique que je suis saisi, par le Gouvernement, d’une demande de scrutin public sur l’article 78 et sur tous les amendements qui restent en discussion.
Dans ces conditions, monsieur Adnot, les amendements nos II-232 rectifié et II-233 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Philippe Adnot. Lors du précédent scrutin public, il n’a manqué que six voix pour que les amendements identiques nos II-152 et II-285 rectifié bis de suppression de l’article 78 soient adoptés. Une telle situation mérite que nous nous interrogions.
Je retire l’amendement n° II-233 rectifié qui, vous l’avez compris, visait à demander à l’État de respecter sa parole.
En effet, des jeunes entreprises innovantes, sur la foi des engagements du Gouvernement, ont procédé à des embauches. Et voilà que, en cours de route, tout s’écroule ! Elles vont devoir se séparer de certains personnels, payer des indemnités de licenciement, ce qui risque d’entraîner leur chute. Pour ma part, je déplore que le Gouvernement ait une telle conception de la parole donnée !
En revanche, je maintiens l’amendement n° II-232 rectifié. Il ne nous manquait que six voix lors du précédent scrutin, cela vaut la peine de se battre !
M. le président. L’amendement n° II-233 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-232 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 115 :
Nombre de votants | 309 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 155 |
Pour l’adoption | 147 |
Contre | 150 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 78.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va donc être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 116 :
Nombre de votants | 336 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l’adoption | 179 |
Contre | 139 |
Le Sénat a adopté.
Article additionnel après l'article 78
M. le président. L'amendement n° II-234 rectifié, présenté par MM. Adnot, du Luart, Retailleau et J.L. Dupont et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :
Après l'article 78, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les I et II de l'article 44 sexies A du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. L’allègement de charges accordé aux jeunes entreprises innovantes comprend deux exonérations : une sur les charges sociales et l’autre sur la fiscalité des entreprises.
Au début de leur activité, ces entreprises ne dégagent aucun bénéfice. Et lorsqu’elles en réalisent enfin, après six, sept ou huit ans d’existence, il n’est pas anormal qu’elles disposent alors de moins d’avantages.
Après avoir consulté de nombreux responsables de JEI, il me paraît acceptable de demander à ces entreprises de participer à l’effort national, mains en maintenant ce qui est pour elles essentiel, c’est-à-dire leur capacité à employer des collaborateurs de très haut niveau pour poursuivre leurs activités innovantes.
À l’issue des votes qui viennent d’avoir lieu, dans un souci de pas alourdir la séance, mais aussi pour laisser au Gouvernement le temps de réfléchir à la proposition que je viens de lui faire, je vais retirer l’amendement. Cette proposition représente une diminution de 20 millions d’euros de dépense fiscale par rapport aux dispositions prévues dans les précédents amendements. Il s’agit donc, en quelque sorte, d’un partage fifty-fifty !
Madame la ministre, monsieur le ministre, d’ici à la commission mixte paritaire, peut-être pourriez faire un geste pour montrer aux futures entreprises performantes de notre nation que vous n’êtes pas complètement insensibles à leur devenir ?
Dans l’espoir que vous ferez la démonstration que vous vous préoccupez de ces entreprises, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° II-234 rectifié est retiré.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 2 décembre 2010, à onze heures vingt, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (n° 110, 2010-2011).
Examen des missions :
Culture (+ article 68 quater)
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 7) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (Patrimoines, transmission des savoirs) (avis n° 114, tome III, fascicule 1) ;
M. Serge Lagauche, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (Création, cinéma) (avis n° 114, tome III, fascicule 2).
Médias, livre et industries culturelles (+ article 76)
Compte spécial : avances à l’audiovisuel public
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 17) ;
M. Joseph Kerguéris, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (Audiovisuel extérieur – avis n° 112, tome VIII) ;
Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (Audiovisuel - Avances à l’audiovisuel public – avis n° 114, tome VI, fascicule 1) ;
M. David Assouline, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (Presse – avis n° 114, tome VI, fascicule 2).
MM. Philippe Nachbar et Serge Lagauche, rapporteurs pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (Livre et industries culturelles – avis n° 114, tome VI, fascicule 3).
Travail et emploi (+ articles 88 à 94, 94 bis, 95 à 97)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 31) ;
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 113, tome VII).
Conseil et contrôle de l’État
M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 6) ;
M. Simon Sutour, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Justice et accès au droit – avis n° 116, tome IV).
Direction de l’action du Gouvernement
M. Yves Krattinger, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 9) ;
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) – avis n° 113, tome II) ;
M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Protection des droits et libertés – avis n° 116, tome VIII).
Pouvoirs publics
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 20) ;
M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Justice et accès au droit – avis n° 116, tome IV).
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
M. Bernard Vera, rapporteur spécial (rapport n° 111, annexe n° 33).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 2 décembre 2010, à deux heures vingt.)
Le Directeur adjoint
du service du compte rendu intégral,
FRANÇOISE WIART