M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales. Chers collègues, vous proposez de réécrire l’alinéa 4 de l’article 1er qui traite du fameux comité de pilotage.
En commission, nous avons tenté justement de réécrire cet alinéa pour répondre à deux objectifs.
Nous avons ainsi, premièrement, tenu compte de la codification des objectifs assignés à l’assurance vieillesse dans le code de la sécurité sociale, deuxièmement renforcé le caractère opérationnel et stratégique des missions du comité de pilotage.
Nous estimons que le libellé de la commission donne un meilleur équilibre au texte concernant le comité de pilotage. J’insiste sur le fait que ce comité veillera au bon équilibre financier du système puisqu’il sera chargé, je le répète, d’une procédure d’alerte identique au comité de pilotage de l’ONDAM, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.
Je tiens à le réaffirmer une fois de plus, ce comité ne se substitue en rien à l’exécutif ni bien évidemment au législatif, qui gardent toutes leurs prérogatives. Pour toutes ces raisons, la commission se déclare défavorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable aux trois amendements.
Pour les deux premiers amendements, comme je l’ai expliqué, il n’y a pas dessaisissement du Parlement, bien au contraire.
Sur le dernier amendement, même si l’ambition est tout à fait noble, les objectifs nous apparaissent difficilement quantifiables et de ce fait, plus prosaïquement, plus modestement, si je peux m’exprimer ainsi, nous en restons aux objectifs qui sont prévus dans le texte.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 860. (Marques de lassitude sur les travées de l’UMP.)
M. Guy Fischer. Cela fait très longtemps que je n’ai pas parlé, chers collègues. (Sourires.)
Cet amendement n° 860 est un amendement de repli par rapport à notre amendement de suppression du comité de pilotage des régimes de retraite créé par l’article 1er du projet de loi.
Ce comité de pilotage ne suscite guère d’enthousiasme, et pour cause. Comment nous, parlementaires, pourrions-nous accepter d’être dépossédés et, à travers nous, les citoyens, du pouvoir de décision sur des questions aussi fondamentales que le respect des objectifs du système de retraite par répartition et la garantie de sa pérennité financière ?
Nous défendons au contraire le maintien du contrôle législatif sur les mesures correctrices concernant les régimes de retraite. C’est au Gouvernement et au Parlement, et non à ce comité de pilotage, qu’il revient de prendre les décisions en la matière.
Du reste, on voit bien que ces décisions que l’on fait prendre par des comités de pilotage nous reviennent un jour ou l’autre, un peu comme les recommandations de la Cour des comptes qui, bien souvent, se retrouvent dans des textes législatifs, réécrites.
Aucun contournement du Parlement ne saurait être toléré sur cette question. En ce sens, on ne peut que s’étonner et s’inquiéter de voir que la présidence de ce comité de pilotage est confiée au ministre en charge de la sécurité sociale.
D’autant que cette indication, étonnement, figure non pas dans le projet de loi déposé par le Gouvernement, mais dans l’étude d’impact, qui précise aussi que les ministres de tutelle en feront également partie.
Double incongruité, quand on sait que c’est ce même comité de pilotage, présidé par le ministre en charge et composé des ministres de tutelle, qui sera consulté en 2018 par le Gouvernement sur un projet de réforme destiné à maintenir l’équilibre du système de retraite au-delà de 2020 !
Nos concitoyens ont bien raison de se faire du souci !
En somme, c’est un peu le Gouvernement qui conseillera le Gouvernement ! C’est cela, monsieur le secrétaire d’État ?
De plus, c’est à la faveur d’un décret et non selon un mode de désignation démocratique, que seront fixées la composition exacte et les modalités d’organisation de ce comité. Le recours au décret, c'est-à-dire à la seule décision de l’exécutif, est en contradiction avec les règles minimales de transparence.
Aussi, si comité il doit y avoir - bien qu’au regard d’une partie de ses missions et de sa composition même sa coexistence aux côtés du COR paraît superflue - il ne saurait avoir un rôle décisionnaire et doit être cantonné dans un simple rôle de proposition.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 861.
Mme Annie David. Je tenais à vous rappeler en quoi consistait cet amendement, car je ne suis pas sûre que les explications du secrétaire d’État et du rapporteur aient bien permis de le comprendre.
Nous vous proposions d’inscrire dans les missions de ce comité l’objectif qualitatif de veiller à « la pérennité d’un système de retraite fondé sur l’épanouissement des hommes et des femmes dans leurs activités non professionnelles ».
Par votre refus, mes chers collègues, vous déniez aux salariés le droit à l’épanouissement s’il se situe en dehors de la sphère du travail. En clair, l’épanouissement ne vaut rien en dehors de la seule valeur qui compte, celle que l’on peut monnayer, celle qui est relative à notre capacité à créer de la richesse matérielle et quantifiable.
Mais vous faites là une erreur fondamentale : il ne peut y avoir de bonne réforme des retraites, même financière, si celle-ci ne vise pas à la réalisation de chaque individu et si elle ne reconnaît pas la nécessité d’assurer le bonheur individuel et collectif de tout citoyen à chaque moment de sa vie.
Les choses sont donc clairement énoncées : la politique du Gouvernement en matière de retraite ne vise pas, ni ne veut prendre en compte le critère du bien-être.
Dans son livre Éloge de l’oisiveté publié en 1932, Bertrand Russell affirmait, et je ne pourrais le dire mieux que lui : « Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l’aisance et la sécurité. Nous avons choisi, à la place, le surmenage pour les uns et la misère pour les autres : en cela, nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n’y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment. » Il renchérissait ainsi : « Croire que le travail est une vertu est la cause de grands maux dans le monde moderne [...] la voie du bonheur et de la prospérité passe par une diminution méthodique du travail. »
M. Nicolas About. Quel rapport avec l’amendement ?
Mme Annie David. C’est le bien-être des salariés, monsieur le ministre ! (Rires sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.) Je veux dire, monsieur le président About. Mais je ne fais peut-être qu’anticiper…
Depuis 1932, de conquêtes sociales en révoltes, un long chemin a été parcouru : il a permis de définir le droit à des repos hebdomadaires, à un temps de travail limité, à des congés payés et à un temps de vie délié de la contrainte du travail.
Comment peut-on aujourd'hui opérer de telles régressions, nier cet héritage ? Après des décennies de luttes et d’acquis sociaux, faut-il réellement revenir aux problématiques du début du XXe siècle ? Comment peut-on encore se retrouver à réaffirmer l’évidence, c'est-à-dire que chacun à droit à la retraite dans des conditions qui ne soient pas celles de la misère ou de l’éreintement ? Il faut vraiment que les agressions soient sévères pour que nous en soyons arrivés là !
Reconnaître le droit à l’épanouissement, c’est accorder à chacun le droit de profiter de sa retraite en bonne santé, d’un temps qui ne l’aliène ni ne le brise plus ; c’est affirmer que le travail ne doit pas épuiser toutes les ressources possibles d’un individu, le rejetant seulement quand il n’est plus exploitable, et sans plus s’en préoccuper.
Après l’asservissement du corps et de l’esprit au travail et à la contrainte productive, chacun doit pouvoir partir à la retraite avant que le corps ne soit rattrapé par la maladie, la fatigue, particulièrement quand cette dernière trouve son origine dans des conditions de travail harassantes.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue, car votre temps de parole est épuisé.
Mme Annie David. Monsieur le président, j’ai droit à cinq minutes pour une explication de vote, et non à trois !
M. le président. Vérification faite, ma chère collègue, c’est, en effet, une erreur de chronomètre. (Exclamations amusées.) Il vous reste une minute et trente secondes. Veuillez donc poursuivre, ma chère collègue. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Éric Doligé. Vous applaudissez la machine ?
Mme Annie David. Je voulais évoquer pour terminer Paul Lafargue, gendre de Marx et auteur du Droit à la paresse (Rires), mais j’abrégerai en vous demandant d’adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 66, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer le mot :
juillet
par le mot :
juin
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Le comité de pilotage, tel qu’il est prévu dans le dispositif de la commission des affaires sociales du Sénat, s’apparente au comité d’alerte créé par la loi du 13 août 2004 pour l’assurance maladie. Ce dernier doit rendre chaque année, au plus tard le 1er juin, un avis sur le respect de l’ONDAM. Par souci de cohérence, il faudrait que le comité de pilotage des régimes de retraite rende son rapport à la même date. La situation étant déjà assez compliquée, il ne faut pas faire l’économie d’une mesure cohérente !
M. Claude Bérit-Débat. C’est le bon sens !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Effectivement, il est logique de faire coïncider les deux dates. La commission est donc favorable à cet amendement. (Oh ! sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Lorsque l’on nous propose une mesure cohérente, nous sommes d’accord ! Le Gouvernement est donc également favorable à cet amendement. (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Applaudissements sur certaines travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Jean-Patrick Courtois. Quel succès !
M. Ladislas Poniatowski. Oui, beau succès !
M. le président. L'amendement n° 68, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer l'année :
2018
par l'année :
2025
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Monsieur le secrétaire d'État, chers collègues de la majorité, nous nous réjouissons que l'amendement n° 66 ait été adopté. Nous vous évitons de commettre des erreurs sur des articles que nous ne voterons pas : c’est dire notre sérieux !
M. Éric Doligé. N’en rajoutez pas !
Mme Christiane Demontès. La question soulevée par l’amendement n° 68 est celle de l’horizon de la réforme et non celle de la date à laquelle l’équilibre est atteint.
L’enjeu est de proposer une réforme juste, efficace, équilibrée, qui garantisse dans la durée le rétablissement de l’équilibre financier et qui rassure et redonne confiance aux jeunes, aux actifs et aux retraités.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez assuré que votre projet de loi garantissait le financement jusqu’en 2018. Après, c’est l’inconnu ! C'est d’ailleurs la raison pour laquelle vous avez fixé un nouveau rendez-vous en 2018 pour revoir le dispositif. Devons-nous comprendre que, à cette date, il faudra imaginer de nouveaux reculs, par exemple de l’âge de départ à la retraite ?
En fait, le financement de l’équilibre jusqu’en 2018 s’assimile très clairement à une belle opération de maquillage !
Les 18,6 milliards d’euros attendus des seules mesures d’âge reposent sur des hypothèses irréalistes. Pour remédier aux écarts prévisibles, il est déjà prévu de ponctionner plus l’UNEDIC pour donner à la CNAV. Vous allez devoir faire main basse sur le Fonds de réserve pour les retraites qui, je le rappelle, ne devait être utilisé qu’à partir de 2020 pour lisser le financement des retraites des baby-boomers de l’après-guerre, qui deviennent aujourd'hui des papy-boomers et des mamy-boomers !
Mais même ces mauvaises actions ne suffiront manifestement pas. L’encre du projet de loi à peine sèche et les comptes officiellement à l’équilibre, selon vos dires, et voilà qu’une une nouvelle estimation du déficit des régimes, révélée jeudi dernier par le quotidien Les Échos, fait s’écrouler tout l’édifice ! En effet, l’ardoise se révèle beaucoup plus lourde qu’initialement prévue, et ce au moment où Nicolas Sarkozy annonce des comptes équilibrés en 2018, et même excédentaires !
En réalité, monsieur le secrétaire d'État, votre réforme est déséquilibrée avant même d’avoir été adoptée !
M. Guy Fischer. C’est vrai !
Mme Christiane Demontès. Nous ne cesserons de le répéter, le bouclage financier de la réforme des retraites relève de plus en plus de l’équation impossible. Et vous continuez de nous seriner que le projet est financé. Mais il ne l’est pas ! Si vous voulez des idées, nous pouvons vous en donner.
M. Éric Doligé. Gardez-les !
Mme Christiane Demontès. Rendez aux Français les 100 milliards d’euros d’allégement de charges que vous avez offerts aux entreprises et aux plus riches. Cessez de tailler dans les dépenses et exigez, comme nous l’avons déjà proposé à plusieurs reprises, que l’effort soit justement réparti entre les revenus du capital et les revenus du travail.
Nous pouvons trouver 80 milliards d’euros de façon pérenne et équilibrée. Oui, nous en avons fait la démonstration et notre président Jean-Pierre Bel l’a répété. Oui, une politique alternative est possible, et nous tenons à votre disposition les éléments de la démonstration. Oui, une retraite universelle et choisie est possible, qui nécessite d’aller à rebours de votre projet comptable de régression sociale. Oui, les conditions de la pérennité et de la visibilité sont possibles !
Ce sont tous ces éléments qui expliquent la nouvelle date que nous vous proposons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Dans le projet de loi, la perspective est fixée à l’année 2018. L’amendement qui tend à repousser cette date à 2025 est contraire à l’esprit de la réforme. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes raisons.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Je ne comprends pas qu’un débat ne s’engage pas à la suite de l’intervention de notre collègue Christiane Demontès. (Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Tout à l’heure, M. le secrétaire d’État s’est écrié qu’il n’allait tout de même pas s’excuser de vouloir équilibrer les comptes des caisses de retraite.
Encore faudrait-il avoir un débat sur la question de la dette publique et du déficit important de nos régimes de retraite ! Les problèmes que nous rencontrons s’expliquent essentiellement par trois éléments, comme vient de le démontrer Christiane Demontès : la faiblesse de la croissance, la politique fiscale très injuste menée par le Gouvernement et un chômage de masse.
Aux 100 milliards d’euros de baisses d’impôts accordées entre 2000 et 2010 – ce n’est pas nous qui avons inventé ce chiffre, nous le trouvons dans un rapport parlementaire auquel des membres de la majorité ont travaillé –, il faut ajouter 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales.
Monsieur le secrétaire d'État, pour nous, le moteur des recettes, c’est l’emploi, une fiscalité plus juste, la volonté de mettre en place une croissance durable, une nouvelle efficacité économique et sociale et, surtout, la justice fiscale. Voilà ce qui différencie nos propositions des vôtres !
Mais aujourd’hui, quelle est la préoccupation essentielle de la majorité ? Trouver le moyen de sortir la résidence principale du calcul de l’ISF. C’est invraisemblable !
Nous sommes toujours dans la même situation : à chaque fois que nous faisons des propositions solides pour taxer les stock-options ou instituer un impôt sur les banques, des mesures qui se pratiquent dans d’autres pays européens, et même à côté de chez nous, vous nous répondez que ce n’est pas possible. C’est bien un débat de fond !
M. Christian Cointat. Nous sommes les seuls à avoir l’ISF ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Charles Revet. Dites cela sur le terrain, vous verrez !
M. Martial Bourquin. Mes chers collègues, dès que l’on vous dit quelques vérités, vous vous fâchez ! Vous demanderez la parole après mon intervention pour me contredire, mais, en attendant, laissez-moi parler !
M. Christian Cointat. Parlez, parlez !
M. Martial Bourquin. À chaque fois que nous voulons aborder les questions de fond, vous nous dites que ce n’est pas possible et qu’il n’y a que votre politique qui vaille.
M. Jean-Patrick Courtois. Exactement !
M. Martial Bourquin. Nous formulons des propositions, mais nous n’obtenons jamais que l’on en débatte. M. Bel a dit les problèmes que pose votre réforme des retraites, tout comme M. Fischer et Mme Demontès. Mais aucune réponse du rapporteur, aucune réponse du Gouvernement !
Dans ce pays, depuis quelques années, il n’y en a que pour quelques-uns, les plus privilégiés ; les autres, ceux qui sont en bas, parce qu’ils sont plus nombreux, doivent payer sans cesse, encore et toujours. (Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Voilà le problème dans ce pays : il n’y a plus de justice, plus d’égalité, plus de solidarité ! Vous êtes en train d’écorner la République ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Dès lors, rien d’étonnant à ce que les manifestations d’aujourd’hui aient connu une ampleur inégalée. Nos concitoyens, y compris au sein de votre électorat, se rendent compte de cette injustice fondamentale, de cette véritable iniquité.
Il est encore temps de vous réveiller et de voir que tout cela va trop loin. D’ailleurs, certains d’entre vous le pensent. Réagissez et demandez qu’une réflexion soit engagée pour trouver d’autres solutions plutôt que de toujours ponctionner les mêmes. Arrêtez donc de vous en prendre systématiquement aux plus démunis d’entre nous ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Nous sommes les représentants du peuple. Par conséquent, vous savez que, parmi vos électeurs, il y a aussi des gens qui souffrent. Mais, avec vos propositions, vous représentez uniquement les banquiers et les financiers ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. L'amendement n° 67, présenté par Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher et Le Menn, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après le mot :
rend
insérer les mots :
au Gouvernement et au Parlement
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Nous vous le répétons avec constance : nous n’avons pas besoin d’un énième comité qui se substitue au Gouvernement et au Parlement.
Le Conseil d’orientation des retraites, le GIP Info Retraite, cher à notre ami Claude Domeizel, et la commission de garantie des retraites remplissent à l’heure actuelle les missions prévues par l’article 1er. Il est ainsi inutile de créer une structure supplémentaire qui ne fera qu’apporter de la confusion à la confusion.
C’est au Gouvernement et au Parlement et non au comité de pilotage qu’il revient de prendre des décisions garantissant la pérennité financière et l’équité des régimes de retraite par répartition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il est ici proposé que le comité de pilotage remette son avis sur la situation financière des régimes de retraite au Gouvernement et au Parlement.
Cette précision est utile. La commission a donc émis un avis favorable. (Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis favorable. (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Jacques Mirassou. Gauchistes ! (Sourires.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 863, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il veille également à la progression du niveau de vie des retraités et du niveau des pensions de retraite.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Le « maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités » est un objectif à faible portée. Tout le monde souhaite que nos retraités, qui ont consacré leur vie au travail et souvent dans des conditions très difficiles, puissent bénéficier de ce qui leur est dû.
Un niveau de vie satisfaisant, c’est évident, mais satisfaisant au regard de quels critères et satisfaisant pour qui ? Voilà les questions que nous nous posons.
Si, pour vous, survivre est satisfaisant, nous préférerions, nous, que les retraités vivent décemment, sans atteinte à leur dignité. Or vivre dignement, ce n’est pas vivre sous le seuil de pauvreté. Pourtant, on le sait, 600 000 retraités se trouvent aujourd’hui en dessous de ce seuil. En France, une nouvelle catégorie est en effet apparue il y a quelques années : les retraités pauvres, au premier rang desquels figurent bien entendu les femmes.
Le cumul des mesures des lois de 1993 et de 2003 devrait provoquer une baisse moyenne du taux de remplacement en 2020 de près de 40 % !
L’allongement de la durée de cotisation prévue par le présent projet de loi conjugué au très fort taux de chômage des personnes de plus de 50 ans, étant donné nos capacités actuelles d’emploi des salariés âgés, aura pour effet mécanique de diminuer encore le niveau des pensions.
À la suite du rendez-vous de 2008, la suppression pour les salariés âgés de 57 ans de la dispense de recherche d’emploi et de certaines dispositions spécifiques nous conduit à déposer cet amendement.
Selon la CNAV, en moyenne, près de 40 % des seniors s’inscrivent à l’ANPE à la suite d’un licenciement économique, contre 23,5 % pour la totalité des inscrits. En outre, ils ont été les premiers à payer les frais de la crise financière. Rappelons en effet que 680 000 licenciements sont intervenus sur la période 2008-2009. Autant dire que la situation des seniors ne va pas s’arranger !
On n’embauche pas les seniors, c’est une réalité, car, comme l’a récemment déclaré M. Wauquiez, « ils coûtent trop cher ». C’est la raison pour laquelle ils ne doivent pas pâtir des comportements délibérés des entreprises, qui refusent de les embaucher, et qu’ils doivent avoir, comme tout le monde et malgré tout, un niveau de pension qui leur permette de vivre au-dessus du seuil de pauvreté.
M. Jean-Jacques Mirassou. Décemment !
M. Guy Fischer. Cet amendement vise donc à affirmer l’objectif de progression du niveau de vie des retraités pour leur permettre de vivre décemment, dignement, car le but ici est non pas de survivre, mais bel et bien de vivre.
Compte tenu de l’importance d’un tel amendement, nous demandons un scrutin public.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La disposition proposée figure déjà à l’article 1er A. Introduire une nouvelle fois cette précision alourdirait inutilement le texte.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Cela étant, je veux apporter quelques précisions.
Selon le rapport du COR, le niveau moyen des pensions devrait progresser de l’ordre de 20 % au-delà de l’inflation d’ici à 2030.
En outre, l’INSEE, qui a pris en compte l’ensemble des éléments, indique que le niveau de vie des retraités est aujourd’hui supérieur à celui des actifs.
M. Guy Fischer. Ce n’est pas vécu ainsi !
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour être précis, il s’agit de 23 970 euros par an pour les retraités, contre 23 060 euros pour les actifs. Nous disposons donc de deux indications précises l’une pour le présent, avec les moyennes fournies par l’INSEE, l’autre pour l’avenir, avec les prévisions du COR.
Enfin – vous le savez déjà, mais le passé permet d’éclairer l’avenir –, le taux de pauvreté des personnes âgées a été divisé par plus de 3,5 depuis 1970. Cette situation est d’ailleurs en grande partie liée à notre décision de revaloriser le minimum vieillesse. Je rappelle sans aucun esprit polémique que cette mesure n’avait pas été votée par l’opposition !