M. le président. Je constate que ces amendements ont été adoptés à l’unanimité des présents.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 6 bis.
Article 7
(Non modifié)
Au quatrième alinéa de l’article 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, après le mot : « civiles », sont insérés les mots : «, lorsqu’ils bénéficient d’une ordonnance de protection en vertu de l’article 515-9 du code civil ». – (Adopté.)
Article 8
(Non modifié)
Au deuxième alinéa de l’article 226-10 du code pénal, les mots : « déclarant que la réalité du fait n’est pas établie » sont remplacés par les mots : « déclarant que le fait n’a pas été commis ».
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié, présenté par M. Courteau, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Sueur, Yung, Bodin et Mirassou, Mmes M. André, Blondin, Cartron, Lepage, Schillinger, Ghali et Printz, M. Mazuir et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
du code pénal, les mots :
insérer les mots :
« de relaxe ou de non-lieu déclarant » sont remplacés par les mots : « de relaxe ou de non-lieu, déclarant » et les mots :
La parole est à Mme Virginie Klès.
Mme Virginie Klès. Il s’agit d’un amendement de clarification tendant à l’ajout d’une virgule.
Une règle de grammaire barbare, appelée, dans mon enfance, « mise en apposition », exige un nombre pair de virgules entre le sujet et son verbe.
Aux termes de la rédaction actuelle, le non-lieu « déclarerait » que les faits de dénonciation calomnieuse sont inexacts, alors que ce doit être la décision d’acquittement qui procède à une telle déclaration.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Ne prétendant pas être un excellent grammairien, je souhaite connaître l’avis du Gouvernement !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Ne voyant pas l’intérêt de cette rectification, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 20 rectifié. (Protestations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Virginie Klès. C’est de la grammaire !
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article additionnel après l'article 8
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Yung, Mme Lepage, M. Courteau, Mmes Klès et Bonnefoy, MM. Sueur, Bodin et Mirassou, Mmes M. André, Blondin, Cartron, Schillinger, Ghali et Printz, M. Mazuir et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code pénal est ainsi modifié :
1° L'article 225-10-1 est abrogé ;
2° À l'article 225-25, les mots : «, à l'exception de celle prévue par l'article 225-10-1, » sont supprimés.
II. - Au 5° de l'article 398-1 du code de procédure pénale, la référence : « 225-10-1, » est supprimée.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Le présent amendement a pour objet d’abroger le délit de racolage passif institué par l’article 50 de la loi du 18 mars 2003. Depuis lors, le fait de racoler, activement ou passivement, est punissable de deux mois de prison et de 3 750 euros d’amende.
La création de cette infraction devait permettre de lutter contre les troubles à l’ordre public, notamment les nuisances dont les riverains se plaignaient, et d’éradiquer les réseaux étrangers de proxénétisme.
Nous partageons avec la majorité l’objectif de lutter contre ces réseaux mafieux de proxénétisme et de traite des personnes prostituées. Pour autant, nous sommes opposés au délit de racolage passif, injuste, inefficace et dangereux.
Il est injuste parce qu’il n’est pas défini, étant constitué par une simple négation, une absence d’action, qui, par ailleurs, ne cause préjudice à personne.
De plus, il soumet les personnes prostituées à un régime spécial. Or la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui de 1949, ratifiée par la France, exige l’abrogation de toute disposition ou pratique conduisant à les inscrire dans les registres spéciaux ou à les soumettre à des conditions exceptionnelles de surveillance.
Une simple application du droit commun est possible. La stigmatisation des prostituées par le biais de la création d’articles spécifiques nous semble infondée. Il suffit de mettre en œuvre les dispositions existantes relatives aux atteintes à la moralité ou à la tranquillité publique – tapage nocturne, exhibition sexuelle ou trouble au bon voisinage.
Par ailleurs, le délit de racolage passif est inefficace. Il n’a en rien contribué à lutter contre le trafic d’êtres humains ou le proxénétisme. Depuis son entrée en vigueur, aucun procès pour traite des êtres humains n’a eu lieu.
Ce délit est enfin dangereux parce qu’il conduit les personnes prostituées à se rendre dans des zones de plus en plus lointaines, des zones de non-droit. Des femmes dont les camionnettes sont saisies et non restituées sont obligées de travailler dehors, dans des conditions beaucoup plus dangereuses. Elles sont ainsi fragilisées, en particulier lors la négociation, si j’ose dire, du préservatif.
La France est un pays abolitionniste dans lequel la prostitution n’est pas interdite. Or l’introduction du délit de racolage passif dans notre droit l’a fait glisser progressivement vers un régime prohibitionniste. La confusion entre la répression du racolage et celle de la prostitution s’est ainsi installée.
Le comportement des policiers s’est, par ailleurs, radicalisé – gardes à vue abusives, fouilles humiliantes ou contraventions injustifiées. Vous le savez, il faut faire du chiffre… Pour illustrer mon propos, je souhaite vous citer, mes chers collègues, le cas d’une femme prénommée Evelyne, qui a été interpelée vingt-six fois en deux mois et demi. Sa comparution immédiate a eu lieu le 30 décembre 2004 ; elle a été condamnée à trois mois de prison, mais cette condamnation a été cassée pour vice de forme.
Au mois de février dernier, lors de l’examen de la proposition de loi renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, une députée du groupe UMP Mme Chantal Brunel avait déposé un amendement similaire à celui que je vous présente. Nos motivations divergent quelque peu, mais, sur le fond, nos positions convergent.
Mme Brunel avait retiré son amendement en séance publique, Mme Morano lui ayant promis la mise en place d’un groupe de travail.
Plus de trois mois ont passé. Quid de ce groupe de travail ? S’est-il réuni ? Quelles sont ses conclusions ?
N’ayant à l’heure actuelle obtenu aucune information supplémentaire, nous souhaitons la suppression du délit de racolage passif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Cette thématique n’ayant été abordée que par la voie d’un amendement extérieur, la commission des lois n’a pu ni organiser d’auditions sur ce sujet très important, qui mérite une réflexion approfondie, ni réaliser les recherches nécessaires. C’est uniquement pour cette raison que j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Le Sénat doit examiner au mois de septembre le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure. Ce sera le moment de vérifier la pertinence du dispositif adopté.
M. Richard Yung. Mais il s’agit des violences faites aux femmes !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Alors tout est dans tout et réciproquement !
Lors du vote de la disposition en cause, certains avaient émis des doutes.
Monsieur Yung, je préférerais que vous retiriez votre amendement, quitte à en présenter un similaire dans le cadre de l’examen du projet de loi que j’évoquais à l’instant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Le groupe de travail que j’avais annoncé à l’Assemblée nationale a été constitué ; il s’est réuni dix jours après l’intervention de Mme Brunel et doit rendre ses conclusions avant la fin de ce mois.
M. le président. La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.
Mme Michèle André. Voilà quelques semaines, nous interrogions, dans cet hémicycle, le ministre de l’intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la question du racolage passif. Si j’ai bonne mémoire, sur presque toutes les travées, nous nous étions prononcés en faveur de la suppression du délit de racolage passif, estimant que le but poursuivi n’avait pas été atteint.
L’ensemble des associations, quelles que soient leur façon de penser, leur philosophie, leur action en matière d’accompagnement des personnes prostituées, demandent instamment au Gouvernement de revenir sur le délit de racolage passif.
Notre pays est en train de passer de l’abolitionnisme à la prohibition. En soumettant les personnes prostituées à des pénalités, nous en faisons des victimes de violences.
Faut-il encore attendre et instituer de nombreux groupes de travail pour confirmer cette analyse ? Celui que vous avez mis sur pied, madame la secrétaire d’État, doit, selon vos dires, remettre ses conclusions à la fin du mois. C’est demain !
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Effectivement, en France, la prostitution n’est pas interdite, elle est même admise fiscalement – chacun le sait –, ce qui est d’ailleurs assez paradoxal.
Le délit du racolage passif est mal défini. Quels critères retenir ? Par ailleurs, depuis sa mise en place, l’efficacité de cette disposition n’est pas avérée.
Comme l’a dit M. Yung, on renvoie les personnes prostituées dans des zones difficiles et dangereuses.
Pour ma part, je voterai l’amendement n° 21.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9
Le 3° de l’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire est complété par un e et un f ainsi rédigés :
« e) À la protection à l’encontre du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin violent ou d’un ancien conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin violent ;
« f) À la protection de la personne majeure menacée de mariage forcé. » – (Adopté.)
Article 9 bis
(Non modifié)
L’article 66-1 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution est ainsi rédigé :
« Art. 66-1. – Les articles 62, 65 et 66 de la présente loi ainsi que les articles L. 613-1 à L. 613-5 du code de la construction et de l’habitation ne sont pas applicables à l’expulsion du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin violent ordonnée par le juge aux affaires familiales sur le fondement de l’article 515-9 du code civil. » – (Adopté.)
Article 10
(Non modifié)
I. – Après le premier alinéa de l’article 5 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Des conventions sont également passées avec les bailleurs de logements pour réserver dans chaque département un nombre suffisant de logements à destination des personnes victimes de violences, protégées ou ayant été protégées par l’ordonnance de protection prévue aux articles 515-9 et suivants du code civil. »
II. – Le premier alinéa de l’article 4 de la même loi est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Il prend également en compte les besoins des personnes victimes de violences au sein de leur couple ou au sein de leur famille, menacées de mariage forcé ou contraintes de quitter leur logement après des menaces de violences ou des violences subies effectivement. Le présent alinéa s’applique aussi au conjoint victime lorsque celui-ci est propriétaire de son logement. »
M. le président. L'amendement n° 10 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Collin, Barbier et Plancade, Mme Escoffier et MM. Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
un nombre suffisant de logements
Insérer les mots :
, répartis géographiquement,
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L'article 10 tend à réserver, dans chaque département, des logements destinés aux victimes de violences conjugales. Ces logements doivent être répartis sur l’ensemble d’un département, en tenant compte non seulement de la répartition démographique des populations, mais aussi des problèmes différents, notamment économiques, que peuvent rencontrer les victimes de violences dans les zones les moins peuplées.
C’est pourquoi le législateur doit veiller à ce que ces logements dédiés soient répartis en milieu urbain, dans les villes les plus importantes des départements, comme en zone rurale et sur les territoires à moindre densité de population.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Cet amendement me paraît satisfait par le droit positif. Par conséquent, la précision qu’il vise à introduire ne semble pas utile. Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Depuis la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion du 25 mars 2009, les femmes victimes de violences font partie des personnes prioritaires pour ce qui concerne l’accès à un logement social.
Le droit au logement opposable est géré à l’échelon départemental, sauf en Île-de-France, où il relève du niveau régional. Mais la pratique révèle que l’État privilégie un logement dans la commune d’origine.
L’article 10 de la présente proposition de loi prévoit la passation de conventions spécifiques avec les bailleurs pour réserver les logements en cause.
Madame Laborde, les dispositions de votre amendement, dont je comprends l’intérêt, risquent néanmoins d’être inopérantes et de freiner la conclusion de quelques conventions. Certains bailleurs, comme les offices communaux ou intercommunaux, ne pourront répondre à l’objectif de répartition géographique sur l’ensemble du département, ce qui nuira à la conclusion de ces conventions.
Par ailleurs, flécher de manière trop précise la localisation de ces logements limitera la fluidité et la rotation des habitations au sein du parc HLM.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 10 bis A
L’article L. 822-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1°Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une convention passée entre l’État et les centres régionaux des œuvres universitaires vise à la réservation d’un nombre suffisant de logements à destination des personnes majeures victimes de violences inscrites dans un établissement scolaire ou universitaire qui sont protégées ou qui ont été protégées par l’ordonnance de protection prévue aux articles 515-9 et suivants du code civil. » ;
2° À la seconde phrase du sixième alinéa, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ». – (Adopté.)
Article 10 bis B
Un rapport remis par le Gouvernement sur la mise en place d’une formation spécifique en matière de prévention et de prise en charge des violences faites aux femmes et des violences commises au sein du couple est présenté au Parlement avant le 30 juin 2011. Cette formation serait destinée aux médecins, aux personnels médicaux et paramédicaux, aux travailleurs sociaux, aux agents des services de l’état civil, aux agents des services pénitentiaires, aux magistrats, aux avocats, aux personnels de l’éducation nationale, aux personnels d’animation sportive, culturelle et de loisirs et aux personnels de police et de gendarmerie.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Nous souhaitions inscrire dans la loi la formation initiale et continue de tous les professionnels qui se trouvent confrontés aux violences faites aux femmes au sein des couples.
Je le répète, nous touchons là à un point essentiel : il est de la plus haute importance, selon nous, que ces professionnels disposent d’une connaissance approfondie de ce phénomène particulièrement complexe, pour mieux dépister les violences et mieux accueillir, assister et accompagner les victimes. Mes chers collègues, n’oublions surtout pas que ces violences sont d’un type particulier !
D'ailleurs, cette demande faisait l’objet de l’article 4 de la proposition de loi n° 118 déposée par les membres du groupe socialiste. Elle figurait également en bonne place dans la première proposition de loi de 2006, puis dans celle qui suivit, en 2007. C’est dire si, pour nous, cette formation a toujours été une préoccupation constante !
En effet, comme les associations l’ont fait remarquer, nous pouvons regretter le manque de coordination entre les différentes administrations et les personnels confrontés aux violences intrafamiliales.
Très souvent, les formations dispensées sur la question sont aussi en nombre limité et effectuées sur la base du volontariat, donc par les personnes les plus motivées. Pour certaines professions, il existe bien une formation initiale, à laquelle sont associées des formations complémentaires, dans le cadre de la formation continue. Toutefois, ces dernières, à ma connaissance, ne sont pas obligatoires.
Je conviens que la liste des personnels devant obligatoirement bénéficier d’une formation initiale et continue telle que nous l’avions établie dans notre proposition de loi était relativement restrictive. Je souscris tout à fait aux propos de M. le rapporteur et des membres de la commission des lois, qui soulignent la nécessité d’y ajouter les personnels de l’éducation nationale, comme le prévoit l’article 11 A du présent texte, mais aussi les agents de service de l’état civil, les policiers municipaux et les agents de l’administration pénitentiaire, sans oublier – j’insiste sur ce point – les avocats, ou encore les agents d’animation sportive ou culturelle.
Néanmoins, il faut préciser que de telles dispositions sont confrontées à l’irrecevabilité financière, en application de l’article 40 de la Constitution. Nous nous satisferons donc de l’article 10 bis B, qui précise qu’un rapport sur la mise en place d’une formation spécifique sera remis par le Gouvernement au Parlement avant le 30 juin 2011.
En outre, je crois savoir que le Gouvernement a pris des engagements. Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais, tout simplement, savoir précisément lesquels.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l’article.
Mme Mireille Schurch. L’article 10 bis B est en effet important.
Le cinquième des femmes victimes de violences physiques et le tiers des victimes de violences sexuelles n’ont ni porté plainte, ni enregistré de main courante, ni parlé à qui que ce soit.
Trop souvent, les femmes victimes de violences restent murées dans leur silence. Le rapport sur l’évaluation du plan global 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes indique que « des lacunes subsistent dans le repérage des femmes victimes de violences, étape pourtant fondamentale dans un contexte de sous-estimation de ces violences. » Toutes les femmes que nous avons rencontrées ont mis l’accent sur la nécessité de former les professionnels et de leur fournir un outil méthodologique d’aide à l’entretien.
Les députés ne s’y sont pas trompés, puisqu’ils ont souhaité que des formations spécifiques puissent être dispensées à l’ensemble des personnes appelées à prendre en charge les victimes de violences.
Pourtant, ces dispositions ont été déclarées irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, tout comme les amendements visant le même objet que nous avions déposés en commission et en séance.
Il est vrai que le Parlement doit être informé, qu’il doit disposer de données exactes, connaître la situation, avertir d’autres acteurs et les associer aux efforts. C’est pourquoi nous sommes favorables à l’article 10 bis B, dans sa rédaction actuelle.
Toutefois, une forte volonté politique est nécessaire pour que le recul de ces violences devienne une priorité. C’est pourquoi nous estimons que la présente proposition de loi doit prévoir des formations systématiques pour les professionnels concernés, en particulier les juges, les policiers et les médecins. Le rôle des parlementaires est de veiller à ce que des programmes spécifiques soient conçus pour ces personnels et dotés de fonds suffisants.
Il s’agit de donner les moyens nécessaires, afin de mieux détecter les violences, pour que les victimes prennent la parole. Policiers, gendarmes, assistantes sociales, médecins, magistrats, les professionnels et les personnels de ces différentes administrations voient encore trop souvent leurs actions, qui peuvent être contradictoires, insuffisamment coordonnées.
La lutte contre la violence domestique implique une action concertée et décloisonnée des pouvoirs publics et des professionnels en contact avec les victimes.
En région Auvergne, des formations ont été dispensées dans tous les départements aux référents « violences intrafamiliales » des brigades de gendarmerie, voire, en Haute-Loire, aux représentants de la police ; aux intervenants à domicile, mais aussi aux infirmiers et aides-soignants, formés à la détection des violences, notamment dans le Cantal ; enfin, aux assistants sociaux et aux associations.
Toutefois, il reste très difficile de créer des formations communes. En 2009, une stratégie progressive de maillage du territoire a été mise en place, notamment dans les zones rurales qui sont dites « blanches » car elles sont moins concernées par les actions dans ce domaine.
Toutefois, à ce jour, en France, seuls trente-deux départements ont désigné un référent « violences conjugales ».
De plus, les actions menées en région Auvergne étaient soutenues par le biais du groupement régional de santé publique, le GRPS, qui a inscrit dans ses formations un programme à part entière sur l’impact de la violence conjugale sur la santé des femmes.
Là encore, de nombreuses pistes sont compromises par la révision générale des politiques publiques, car, avec la disparition du GRSP cette année et la mise en place des ARS, les agences régionales de santé, les orientations du nouveau dispositif ne sont pas connues à ce jour.
Comment dès lors espérer faire de la prévention via la formation des médecins ou des urgentistes dans les CHU, les centres hospitaliers universitaires, qui rencontrent 50 % des victimes sans détecter les problèmes de violence auxquels ces dernières sont confrontées et les traitent pour des maux divers sans aller à l’essentiel ?
C’est pourquoi nous regrettons que le Gouvernement, qui n’est pas soumis aux aléas de l’irrecevabilité de l’article 40, n’ait pas inscrit dans un texte législatif ce mécanisme de formation systématique. En effet, ce serait là assurer un maillage complet du territoire, afin de mieux repérer les violences dont sont victimes les femmes.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, sur l'article.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Il me semble important, comme notre collègue vient de le souligner, que cette formation soit commune et pluridisciplinaire. D'ailleurs des missions communes relatives à la situation des enfants maltraités sont obligatoirement menées dans les départements depuis la loi de 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineurs et à la protection de l’enfance, dispositif qui n’est pas systématiquement appliqué. Il faut donc non pas des formations distinctes pour les policiers ou pour les travailleurs sociaux, mais une approche pluridisciplinaire.
En matière de prévention, je voudrais évoquer une expérience que j’ai découverte lorsque je m’occupais de protection de l’enfance, afin de souligner que la maternité peut être un lieu de prévention, dès lors que 800 000 naissances s’y produisent chaque année.
Ainsi, à Draguignan, lors de consultations de gynécologie, un médecin à l’écoute des dysfonctionnements pouvant survenir au sein des couples a mis en place une sorte d’équipe et réunit tous les intervenants autour d’une table, afin de poser un diagnostic adéquat et de proposer une ordonnance avant qu’un drame ne survienne. Madame la secrétaire d'État, je vous invite, si vous en avez la possibilité, à vous rendre sur place.
M. le président. Mes chers collègues, au début de l’examen des articles de cette proposition de loi, M. le président de la commission des lois a précisé les contraintes, notamment horaires, auxquelles est soumise la présente discussion. Je me suis moi-même efforcé de les rappeler à la reprise de la séance. Or je constate que nous ne pourrons achever l’examen de ce texte dans les horaires impartis, c'est-à-dire avant minuit.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je rappelle que la conférence des présidents avait proposé d’achever l’examen de ce texte demain, à partir de dix-neuf heures parce que la journée est réservée à l’initiative parlementaire et que d’autres textes doivent être débattus auparavant.
Il ne reste plus que vingt-deux amendements à examiner, et nous pourrons toujours être plus concis si le temps nous manque !
M. le président. La suite de la discussion est donc renvoyée à la prochaine séance.