compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Anne-Marie Payet,
M. Daniel Raoul.
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Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
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Convocation du Parlement en session extraordinaire
M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date du 22 juin 2010 portant convocation du Parlement en session extraordinaire.
Je donne lecture de ce décret :
« Le Président de la République,
« Sur le rapport du Premier ministre,
« Vu les articles 29, 30, 48 et 50-1 de la Constitution,
« Décrète :
« Article 1er – Le Parlement est convoqué en session extraordinaire le 1er juillet 2010.
« Article 2 – L’ordre du jour de cette session extraordinaire comprendra :
« 1. La déclaration du Gouvernement sur les orientations des finances publiques pour 2011, suivie d’un débat et d’un vote sur cette déclaration en application de l’article 50-1 de la Constitution.
« 2. L’examen et la poursuite de l’examen des projets de lois suivants :
« - projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ;
« - projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public ;
« - projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;
« - projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale ;
« - projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État ;
« - projet de loi relatif à la reconversion des militaires ;
« - projet de loi tendant à l’élimination des armes à sous-munitions ;
« - projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2009 ;
« - projet de loi de réforme des collectivités territoriales ;
« - projet de loi relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et la Belgique tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur les revenus ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Bahreïn en vue d’éviter les doubles impositions ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre la France et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative et juridique réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Malaisie tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kenya en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d’Arabie saoudite relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure et de défense civile ;
« - projet de loi autorisant la ratification du traité entre le Royaume d’Espagne, la République française, la République italienne, le Royaume des Pays-Bas et la République portugaise, portant création de la force de gendarmerie européenne EUROGENDFOR ;
« - projet de loi autorisant la ratification de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la Bosnie-et-Herzégovine, d’autre part ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Jersey relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale et à l’imposition des pensions ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth des Bahamas relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des îles Turques-et-Caïques relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Bermudes relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des îles Caïmans relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Gibraltar relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Saint-Marin relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Liechtenstein relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté d’Andorre relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Guernesey relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’île de Man relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des îles Vierges britanniques relatif à l’échange de renseignements en matière fiscale ;
« - projet de loi autorisant l’adhésion à la convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Roumanie relatif à l’assistance et à la coopération en matière de protection et de sécurité civiles dans les situations d’urgence ;
« - projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d’Allemagne concernant l’échange de renseignements sur les titulaires du certificat d’immatriculation de véhicules contenus dans les fichiers nationaux d’immatriculation des véhicules dans le but de sanctionner les infractions aux règles de la circulation ;
« 3. Une séance de questions par semaine.
« Article 3 – Le Premier ministre est responsable de l’application du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
« Fait à Paris, le 22 juin 2010
« Par le Président de la République,
« Signé : Nicolas Sarkozy
« Le Premier ministre,
« Signé : François Fillon »
Acte est donné de cette communication.
L’ordre du jour de cette session extraordinaire vous sera communiqué à l’issue de la conférence des présidents, qui se réunira à dix-neuf heures.
3
Communication du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 21 juin 2010, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État et la Cour de cassation avaient adressé au Conseil constitutionnel deux décisions de renvoi de deux questions prioritaires de constitutionnalité (2010-26 QPC, 2010-27 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
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Dépôt d'un rapport
M. le président. M. Dominique Latournerie, président de la Commission nationale des accidents médicaux, a transmis au Sénat, en application de l’article L. 1142-10 du code de la santé publique, le rapport pour 2008-2009 de la Commission nationale des accidents médicaux.
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des affaires sociales et sera disponible au bureau de la distribution.
5
Dialogue social dans la fonction publique
Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique (n° 529).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen d’un texte soumis à des évolutions successives depuis son adoption en conseil des ministres le 1er avril 2009.
Aujourd’hui, ce projet de loi comporte trois parties bien distinctes.
La partie traitant de la rénovation du dialogue social, qui fut l’objet du texte initialement déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, constitue la transcription d’accords signés entre les partenaires sociaux, dit « accords de Bercy ».
La partie relative aux infirmiers met en œuvre un engagement du Président de la République, introduit par lettre rectificative le 23 février dernier.
Enfin, ce texte contient quelques dispositions relatives au statut des fonctionnaires, qui vont dans le sens des évolutions souhaitées par le Gouvernement et qui ont été insérées par voie d’amendements en commission ou en séance publique, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.
En première lecture, sur proposition de la commission des lois, le Sénat a adopté le premier volet du projet de loi, relatif aux accords de Bercy, en veillant à ne pas porter atteinte à la diversité des fonctions publiques. Ces négociations, conduites avec succès par le Gouvernement, ont abouti de façon significative à un projet modernisant le cadre légal du dialogue social dans ses diverses composantes : critères de représentativité des syndicats ; conditions d’accès aux élections professionnelles ; uniformisation à quatre ans de la durée du mandat des délégués dans les organismes consultatifs des trois fonctions publiques ; élargissement du champ de la négociation ; fixation des conditions de validité des accords signés entre le Gouvernement et les partenaires sociaux.
L’unité ne signifie nullement l’unification : le Sénat a considéré que la rénovation entreprise ne devait pas conduire à niveler les particularismes des trois fonctions publiques, même si leur convergence devait rester une nécessité absolue. C’est pourquoi il a retenu l’avancée proposée par l’Assemblée nationale qui permet à chaque collectivité territoriale de maintenir dans les comités techniques le vote des représentants de l’employeur, en étendant la règle aux comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Sur l’initiative de la commission des lois, la Haute Assemblée a renforcé l’articulation entre le Conseil commun de la fonction publique et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, le CSFPT. À cet effet, elle a prévu la présence de droit du président du CSFPT au sein de l’instance inter-fonctions publiques et a précisé la compétence matérielle du Conseil commun de la fonction publique, en excluant l’examen des textes spécifiques à chaque fonction publique, notamment les décrets d’application des modifications du statut général.
Ce faisant, je l’affirme de nouveau aujourd’hui, nous n’avons voulu ni affaiblir le Conseil commun de la fonction publique ni nous opposer aux convergences nécessaires entre les trois versants de la fonction publique. Simplement, nous avons été animés par le souci de reconnaître l’identité de chacun et de préserver un fonctionnement harmonieux des trois statuts.
Le Sénat a procédé à des ajustements techniques et a complété le volet relatif au dialogue social : en instituant la faculté de promouvoir un agent titulaire d’un mandat syndical à temps plein sans que celui-ci se heurte à la nullité d’une nomination pour ordre ; en prévoyant la consultation des comités techniques de la fonction publique territoriale sur l’action sociale mise en place par les collectivités ; en prévoyant la prise en compte des résultats des élections aux comités consultatifs nationaux pour la répartition des sièges au Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière entre les organisations syndicales.
Par ailleurs, le Sénat a précisé la période d’applicabilité du régime transitoire et clarifié le calendrier d’effet des nouvelles dispositions. Il a ainsi modifié le dispositif d’entrée en vigueur des nouvelles règles de désignation des membres des instances consultatives dans les trois versants de la fonction publique.
Ces ajustements proposés par le Gouvernement doivent lui permettre d’organiser, en deux temps, l’harmonisation des cycles électoraux. Ainsi, une première étape sera franchie au milieu de l’année 2011 avec l’organisation des élections dans la fonction publique de l’État et la fonction publique hospitalière. Ensuite, la convergence avec la fonction publique territoriale aura lieu à la fin de l’année 2014, au terme des mandats de ses instances.
Le deuxième volet du projet de loi concerne la fixation des conséquences, pour leur retraite, de l’accession en catégorie A des personnels infirmiers et paramédicaux du secteur public. La commission des lois s’en est remise à la commission des affaires sociales, saisie pour avis, et à son rapporteur, Mme Sylvie Desmarescaux, que je remercie d’avoir traité de cette partie sensible du texte.
J’avais cependant tenu à formuler quelques observations et interrogations quant à la mise en œuvre de cette réforme, s’agissant notamment de la nécessité de mettre à la disposition des intéressés la totalité des informations utiles pour l’exercice de ce droit d’option. Devant la commission des affaires sociales et, plus longuement encore, lors de l’examen du texte en séance publique, Mme Roselyne Bachelot s’est employée à apporter les précisions nécessaires et s’est engagée à ce que les informations soient à la disposition des intéressés dès la publication des décrets d’application.
Le Sénat a donc adopté l’article 30 sans modification.
M. Jacques Mahéas. Prudence !
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Fruit du débat parlementaire, le projet de loi comporte aujourd’hui une troisième et substantielle partie rassemblant, par le jeu de la navette, des dispositions très diverses.
Sur l’initiative du Gouvernement, les députés ont adopté les fondements législatifs de la nouvelle politique salariale : d’une part, l’intégration de la performance individuelle du fonctionnaire et de l’intéressement collectif, d’autre part, la création d’un grade à accès fonctionnel dans la catégorie A.
Le Sénat a complété ce volet quelque peu « fourre-tout ».
Ainsi, il a accru la protection des agents de la fonction publique territoriale par l’extension du suivi médical post-professionnel aux agents soumis à des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques.
Par ailleurs, il a reporté de deux ans la date de présentation au Parlement du bilan global de l’expérimentation de l’entretien professionnel d’évaluation dans la fonction publique territoriale, ce dispositif ayant lui-même dû être reporté faute de publication des textes réglementaires d’application relatifs à cette expérimentation. Il a en outre procédé aux mêmes reports concernant la fonction publique hospitalière.
Il a prévu la déconcentration de l’évaluation des directeurs des soins.
Le Sénat a également harmonisé la durée du temps partiel de droit avec l’allongement de la durée maximale du cumul d’activités pour création ou reprise d’entreprise, portée à deux ans par la loi du 3 août 2009. Logiquement, il a supprimé la consultation de la commission de déontologie sur cette demande, accordée de droit.
Il a régularisé le transfert des personnels du service technique interdépartemental des installations classées de la préfecture de police de Paris, à la suite de la nouvelle organisation territoriale de l’État en Île-de-France.
Enfin, le Sénat a habilité le Gouvernement, sur sa demande, à codifier par voie d’ordonnances les lois fixant le statut des fonctionnaires.
Les dispositions restant en discussion, soumises à la commission mixte paritaire réunie le 8 juin dernier, ne constituaient pas des points de blocage entre les deux assemblées. C’est pourquoi la commission mixte paritaire est parvenue rapidement à un accord en reprenant le texte voté par le Sénat en première lecture, sous réserve de quelques précisions et rectifications rédactionnelles.
En définitive, le texte aujourd’hui soumis au vote de la Haute Assemblée aura permis de procéder à divers ajustements et de prendre en compte les retards réglementaires ainsi que les incidences de différentes réformes. Il offre un cadre favorable à la conduite d’un véritable dialogue social, moderne et vivant au sein de la fonction publique, avec des syndicats à la légitimité confortée.
Avant de conclure, je tiens à attirer de nouveau l’attention du Gouvernement sur la situation des personnels infirmiers et sur la nécessité de permettre très rapidement à ces agents d’exercer leur droit d’option en toute transparence et forts de la meilleure information.
La commission mixte paritaire n'a pas manqué de souligner l’importance de l'ouverture des discussions sur le dispositif en vue de son adaptation à l’ensemble des infirmières des trois fonctions publiques.
Mes chers collègues, je vous propose d’adopter le texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par un amendement tendant à corriger une erreur matérielle que j’ai déposé à l’article 11 et par un amendement rédactionnel que le Gouvernement présentera à l’article 34. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est avec un très grand plaisir que je me retrouve aujourd’hui parmi vous pour cette phase finale de l’examen du projet de loi relatif à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.
Vous le savez, ce texte résulte d’un accord historique conclu le 2 juin 2008 avec six organisations syndicales sur huit.
M. Jacques Mahéas. Non, pas tout le texte !
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Malgré différents amendements qui nous poussaient dans un autre sens, monsieur Mahéas, une première novation aura consisté à transposer, aussi fidèlement que possible, au niveau législatif un accord intervenant dans le champ de la fonction publique. Nous devons tous partager cet objectif de fidélité aux accords, qui marque une nouvelle pratique du dialogue social dans la fonction publique.
Je souhaite que nous puissions ainsi ouvrir une nouvelle voie dans l’élaboration de règles fondées sur la concertation et le compromis.
Plus que jamais, en effet, le dialogue social est indispensable. Nous vivons un temps de profondes réformes, qu’elles soient budgétaires, administratives ou statutaires. Le Gouvernement a donc le devoir de donner toute sa place au droit de participation des agents publics à l’organisation et au fonctionnement du service public, et ce en affirmant très clairement deux principes : d'une part, que l’élection soit la source de toute représentativité ; d'autre part, que la négociation prenne le pas sur la confrontation.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ces deux principes se trouvent au cœur du projet de loi sur lequel vous devez vous prononcer aujourd’hui.
L’élection sera désormais le fondement de la représentativité syndicale. C’était déjà le cas dans la fonction publique territoriale comme dans la fonction publique hospitalière. Désormais, ce le sera également dans la fonction publique de l’État, ce qui est très positif.
Par ailleurs, tout syndicat légalement constitué depuis plus de deux ans pourra se présenter aux élections professionnelles. Il s’agit là d’un signe fort d’ouverture.
La culture de la négociation doit se généraliser dans la fonction publique à tous les échelons pertinents de l’administration. Ce principe me semble tout aussi déterminant que le précédent. Il convient à la fois d’élargir le champ de la négociation au-delà des questions salariales et de fixer les conditions dans lesquelles un accord signé sera désormais considéré comme valide.
Si les principes doivent être refondés, il faut également moderniser l’organisation et le fonctionnement du dialogue social.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite attirer plus particulièrement votre attention sur deux points.
En premier lieu, le texte crée un nouveau conseil commun aux trois versants de la fonction publique. Cela m’apparaît comme une innovation essentielle pour garantir l’unité de la fonction publique ; j’emploie ce terme à dessein, car il ne s’agit nullement d’« unification ». Je réaffirme avec force qu’il n’entre nullement dans la volonté du Gouvernement de déposséder les conseils supérieurs actuels de leurs attributions. Sur ce point, nos débats ont été sans ambiguïté et plusieurs amendements ont été adoptés en ce sens.
Chaque versant de la fonction publique possède son histoire, son originalité, sa spécificité. Il faut reconnaître ces différences et savoir les conserver lorsqu’elles se justifient. Toutefois, n’oublions pas que ce qui nous rassemble est bien plus important que ce qui nous distingue : servir l’intérêt général transcende chacune des trois fonctions publiques.
À travers le Conseil commun de la fonction publique, l’unité de la fonction publique n’en sera que mieux affirmée, car les employeurs territoriaux et hospitaliers pourront s’exprimer, dès l’origine, sur les textes concernant les trois versants de la fonction publique, ce qui n’était pas le cas auparavant.
En second lieu, le paritarisme numérique ne sera plus une obligation. Il n’existe plus depuis près de vingt ans dans la fonction publique hospitalière, sans que le dialogue social s’en trouve pour autant affaibli. Il existe dans la fonction publique de l’État, mais de façon si formelle qu’il est difficile de trouver un seul défenseur de cette façon de procéder.
J’en viens à la fonction publique territoriale, qui fut au cœur de nos débats et sur laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous se sont exprimés. Le Gouvernement a entendu les points de vue des élus et des représentants du personnel ; il vous propose d’y maintenir l’essentiel des principes du paritarisme. Ainsi, deux collèges sont prévus à tous les niveaux, l’un accueillant les représentants des employeurs, l’autre ceux des agents. Naturellement, les collectivités territoriales resteront totalement libres de maintenir un paritarisme numérique, si elles le souhaitent.
Par ailleurs, à la suite d’une délibération, c’est-à-dire en toute indépendance, mais aussi en toute transparence, la collectivité sera libre de prévoir, d'une part, le vote des représentants du personnel, d’autre part, l’avis des représentants de la collectivité.
La seule évolution porte bien sur ce point : une obligation est remplacée par une faculté. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner à cette tribune, la philosophie qui sous-tend ce texte consiste à privilégier la souplesse.
Le Gouvernement est particulièrement respectueux de la libre administration des collectivités locales. Je le dis en tant que secrétaire d'État, mais aussi en tant qu’élu local, plus précisément de maire.
Pour entrer pleinement en vigueur, cette rénovation du dialogue social suppose de définir une période transitoire, qui sera utile pour faire évoluer les règles de validité des accords. Vous le savez, jusqu’à présent, aucune règle n’existait en la matière. Nous avons souhaité engager un processus qui, à terme, nous permettra de passer à des accords majoritaires.
Une période transitoire étant toutefois nécessaire, seront valides, dans un premier temps, les accords réunissant au moins 20 % des représentants des agents sans faire l’objet d’une opposition de plus de 50 % de ces mêmes représentants. Cette période transitoire permettra également d’organiser une convergence des dates d’élections aux comités techniques et aux commissions administratives paritaires dans les trois versants de la fonction publique.
Reconnaissons ici que la fonction publique de l’État s’inspire de ce qui existe déjà, de façon très satisfaisante, dans la fonction publique hospitalière comme dans la fonction publique territoriale. Il s’agit néanmoins d’une opération complexe puisqu’il faut unifier les durées des mandats et synchroniser les élections à la fonction publique de l’État, qui se déroulaient au fil de l’eau. Plusieurs dizaines de milliers d’instances sont ainsi concernées.
Par conséquent, une solution pragmatique a été envisagée, qui suppose de procéder en deux temps. Tout d'abord, à la mi-2011 sera organisée la constitution des nouvelles instances de la fonction publique de l’État et de la fonction publique hospitalière, dont le mandat devrait s’achever de façon naturelle à la fin de 2011. Ensuite, il s’agira de laisser la fonction publique territoriale poursuivre ses mandats jusqu’à leur terme naturel, à la fin de 2014, date à laquelle il est prévu d’organiser des élections générales sur les trois versants de la fonction publique.
Vous le voyez, il s’agit là d’un projet de loi d’importance (M. Jacques Mahéas s’exclame.), qui témoigne de la place que le Gouvernement entend accorder au dialogue social dans notre République.
Je souhaite que votre assemblée sache entendre le consensus syndical qui a présidé à la signature des accords de Bercy …
M. Jacques Mahéas. Ce n’est pas vrai !
M. Georges Tron, secrétaire d'État. … et que nous soyons tous capables, quelle que notre sensibilité politique, de reconnaître à la fois la novation et les avancées dont ces accords sont porteurs, car il s’agit bien d’accords, monsieur Mahéas.
Toutefois, je le précise d’emblée pour anticiper les propos que je devine, …