M. le président. L'amendement n° 277, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Cet amendement, certes en contradiction complète avec les propos qui viennent d’être tenus, est dans le droit-fil de notre position.

L’article 9 ne corrige pas les imperfections du Fonds national de garantie des calamités agricoles.

Certes, l’assurance privée couvre un certain nombre de dommages, mais elle coûte chère. De plus, elle présente l’inconvénient majeur d’être organisée par culture. Or les risques agricoles sont très variables selon la production. Nombre des agriculteurs qui sont confrontés à de très nombreux aléas climatiques et sanitaires n’ont plus les moyens financiers de s’assurer ou de faire face aux dommages qu’ils subissent.

Selon nous, le système de solidarité nationale de gestion des risques doit être modifié, mais il ne convient pas de privatiser la couverture de ces risques. Le principe directeur doit être la solidarité de l’ensemble des acteurs économiques. Il est nécessaire de créer un régime d’assurance mutuelle qui pourrait couvrir les risques sanitaires, phytosanitaires et environnementaux. Cette assurance mutuelle devrait être souscrite par tous les agriculteurs et concerner l’ensemble des productions. Son financement devrait être assuré à part égale par les agriculteurs, l’État, les entreprises en amont et en aval de l’agriculture, les banques et les assurances agricoles.

Loin de résoudre les difficultés actuelles, l’article 9 les ignore en se tournant vers les assurances privées. C’est pourquoi nous en demandons la suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Mon opinion est absolument opposée à celle de Marie-Agnès Labarre. Si le présent projet de loi ne prévoyait pas l’assurance, telle que définie par M. le président de la commission et par M. le ministre, nous n’aurions pas fait œuvre utile. Je rappelle en cet instant le travail réalisé depuis plusieurs années par M. Soulage dans le domaine de l’assurance climatique, clé de voûte de ce texte.

Je suis donc formellement opposé, au nom de la commission, à la suppression de l’article 9.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Partageant l’opinion que M. le rapporteur a exprimée avec véhémence, je n’argumenterai pas davantage. J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 277.

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. Nous ne sommes pas étonnés par la réponse véhémente du rapporteur.

Ce dont parle M. Retailleau, chacun d’entre nous peut y être confronté. Il ne s’agit pas de donner des leçons à qui que ce soit, ce n’est pas du tout mon intention. Mais l’absence de réponse ne fait-elle pas « enrager » ?

Quand bien même ces gens auraient été assurés, l’auraient-ils été pour la bonne chose ? Pour être tous des assurés, nous le savons, un sinistre arrive toujours dans les conditions qui ne sont pas prévues. Vous croyez dur comme fer que votre solution assurantielle va résoudre les problèmes, en réalité, ce n’est pas le cas.

Est-il normal que nous, les politiques, nous ne soyons pas capables de répondre à un événement aussi sévère que la tempête Xynthia ? Avec ce qui leur est arrivé, les gens ne peuvent plus travailler, ils perdent leur outil de travail, leur source de revenus.

Et nous sommes totalement démunis parce que des personnes, à Bruxelles, prennent toutes sortes de décisions ! Je ne suis pas systématiquement anti-Bruxelles, mais aucune solution n’est proposée alors que l’on devrait pouvoir répondre à cette détresse, c’est humainement possible.

Les délais sont dépassés et nous n’avons pas de réponse à apporter. Je suis persuadée que l’assurance ne résoudra pas tous les problèmes qui se posent à nous dans des cas comme celui-là.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. D’un côté, les ultrapessimistes considèrent que l’assurance, en tout état de cause, ne répondra jamais à la problématique posée. De l’autre, les plus optimistes, comme nous, veulent aller plus loin.

Les textes européens nous en empêchent, dites-vous, monsieur le ministre. Didier Guillaume, à qui j’en ai parlé tout à l’heure – il aura sans doute l’occasion de s’en expliquer lui-même – estime, lui, que la marge de manœuvre existe réellement.

Monsieur le ministre, j’ai suivi attentivement votre démarche compassionnelle à l’égard du département de  M. Retailleau – que je conçois d’ailleurs très bien. Mais ce n’est pas le seul et unique département qui ait été frappé par un événement climatique. En disant cela, je regarde mon collègue Gérard César et je pense intensément à Jean-Louis Carrère. Dans les Landes, successivement, à trois ou quatre ans…

M. Gérard César, rapporteur. Dix ans !

M. Jean-Jacques Mirassou. … ou dix ans d’intervalle, deux tempêtes ont frappé ces départements. Au moment où je parle, les indemnités relatives aux premiers dégâts ne sont pas, loin s’en faut, arrivées dans l’escarcelle des forestiers.

Je vous le dis sans intention polémique, monsieur le ministre, vous qui avez visité l’autre jour le Lot-et-Garonne, qui n’est pas si loin des Landes, poursuivez un peu plus vers l’Ouest et allez constater sur le terrain que la situation ne s’est pas améliorée dans un département où la sylviculture occupe une place déterminante d’un point de vue sociétal – c’est une véritable culture – mais aussi commercial et financier !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 277.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Comme je vous l’avais annoncé, monsieur le président, j’invite les membres de la commission à se réunir dans quelques instants, en salle de commission, pour examiner les derniers amendements au projet de loi.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 9 (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Discussion générale

6

Nomination de membres d'une commission mixte paritaire

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant engagement national pour l’environnement.

La liste des candidats établie par la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Jean-Paul Emorine, Bruno Sido, Dominique Braye, Daniel Dubois, Paul Raoult, Thierry Repentin, Mme Évelyne Didier ;

Suppléants : MM. Louis Nègre, Dominique de Legge, Ambroise Dupont, Mme Esther Sittler, MM. Daniel Raoul, Roland Ries et Raymond Vall.

7

Article 9 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Article 9

Modernisation de l'agriculture et de la pêche

Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 9.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Articles additionnels après l'article 9

Article 9 (suite)

M. le président. L'amendement n° 670, présenté par M. César, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 6, seconde phrase

Remplacer la référence :

L. 361-2

par la référence :

L. 361-3

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard César, rapporteur. Il s'agit de la correction d'une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 670.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 278, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 14

insérer un alinéa ainsi rédigé :

« 4°- Une contribution assise sur les bénéfices des industries agroalimentaires, des centrales d'achat, et des grands distributeurs. »

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. L’article 9 vise à réformer le dispositif de soutien à l’assurance récolte et à l’indemnisation des calamités agricoles.

Mes chers collègues, nous vous avons exposé les différentes raisons pour lesquelles nous n’approuvons pas ce dispositif. Selon nous, il aurait été opportun de créer un système garantissant une mutualisation des risques, mais je ne reviendrai pas sur ce point.

À travers cet amendement de repli, nous entendons réintroduire cette solidarité.

En effet, parmi les ressources du Fonds national de gestion des risques, aucune contribution de l’aval de la filière agricole n’est prévue.

C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons d’introduire une contribution assise sur les bénéfices des industries agroalimentaires, des centrales d’achat et des grands distributeurs.

Parce qu’il est important que tous les risques financiers et assurantiels ne soient pas toujours à la charge des producteurs et des éleveurs, nous vous demandons d’adopter notre amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Cet amendement tend à faire participer les acteurs de l’industrie agroalimentaire et de la distribution au financement du Fonds national de gestion des risques en agriculture.

Nous pensons que cette extension est exagérée. En outre, la rédaction de cet amendement est trop vague : elle ne fixe pas avec précision le taux de la contribution qui est mentionnée ni ne détermine son assiette.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. La couverture des risques repose sur une contribution versée soit par la profession agricole, soit par la solidarité nationale. Nous ne devons pas la faire reposer sur les industries agroalimentaires, les centrales d’achat ou les distributeurs : contribuent ceux qui peuvent bénéficier en retour du Fonds.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 278.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 156 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 16

Remplacer les mots :

un évènement sanitaire, phytosanitaire ou environnemental

par les mots :

l'apparition d'un foyer de maladie animale ou végétale ou d'un incident environnemental.

II. - En conséquence, procéder au même remplacement dans le reste de l'article.

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Aux termes de l’article 9 du projet de loi, le Fonds national de garantie des calamités agricoles, le FNGCA, serait désormais remplacé par un Fonds national de gestion des risques en agriculture.

Or le choix des mots est important ! Le terme « garantie » était fort, même si les « calamités » restaient bien sûr du domaine de l’exceptionnel. Désormais, nous passons à une « gestion de risques », ce qui s’inscrit tout à fait dans la philosophie générale de ce texte.

En l’occurrence, selon l’exposé des motifs du projet de loi, il s’agit de fournir aux entreprises agricoles des « outils de couverture des risques performants et élargis ».

Toutefois, l’élargissement aux aléas sanitaires et environnementaux ne saurait conduire à une sorte de « sur-responsabilisation », voire de stigmatisation des agriculteurs. Surtout, il ne saurait entraîner un surcoût trop important pour nombre d’exploitations. Avant de pouvoir souscrire à une assurance, encore faut-il dégager un revenu, et c’est là que le bât blesse !

Or la première section de ce Fonds introduit une confusion entre ce qui relève des risques exogènes, qui surviennent indépendamment des pratiques culturales, et les menaces potentiellement issues d’erreurs humaines ou industrielles, en contribuant au financement de l’indemnisation des pertes économiques liées à un événement sanitaire, phytosanitaire ou environnemental.

Cette confusion est d’autant plus dangereuse que le terme « événement » reste, lui aussi, très vague, et qu’il est susceptible d’autoriser des interprétations par trop divergentes, qu’elles soient trop extensives ou inutilement restrictives.

Comme le soulignait tout à l’heure l’une de nos collègues, dans tout contrat d’assurance, ce sont toujours les lignes écrites en tout petits caractères qui posent problème lorsque les accidents surviennent…

Notre amendement vise donc à clarifier et à sécuriser les missions de la première section de ce Fonds de garantie, en les rendant cohérentes avec l’article 71 du règlement n° 73/20009 de la Communauté européenne, qui évoque « l’apparition d’un foyer de maladies animales ou végétales ou d’un incident environnemental ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Cet amendement tend à réduire la portée de la première section du Fonds national de garantie et des risques agricoles, en limitant l’intervention de celui-ci à l’apparition d’un foyer de maladie animale ou végétale ou à la survenue d’un incident environnemental. Or le texte déposé par le Gouvernement et adopté par la commission prévoit un domaine d’action plus large, à savoir les événements sanitaires, phytosanitaires ou environnementaux.

Je crois préférable de conserver une rédaction qui s’adaptera mieux aux risques qui sont susceptibles d’apparaître dans ce domaine et qui, comme on a pu le constater, ne sont pas toujours prévisibles.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, même si nous sommes curieux de connaître la position du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement a la même position que la commission.

Madame Herviaux, je souscris tout à fait à votre argumentation. Toutefois, si nous utilisons des mots trop précis dans un contrat assurantiel ou dans un texte de loi, nous risquons de restreindre le champ d’application du dispositif.

M. Gérard César, rapporteur. Voilà !

M. Bruno Le Maire, ministre. Si nous visons l’apparition d’un foyer de maladie animale, nous ne pourrons couvrir les exploitants qui se trouvent à proximité de celui-ci et qui sont les premiers à souffrir de son apparition, c'est-à-dire ceux qui, précisément, ne bénéficient pas aujourd’hui des dispositifs du FNGCA.

Par exemple, si apparaissent des cas de grippe aviaire, les exploitations directement touchées seront indemnisées, mais pas celles qui sont proches du foyer épidémique et qui peuvent en être affectées, par exemple parce que la consommation de volailles diminuera. Nous avons donc intérêt à conserver la formulation la plus large possible, me semble-t-il.

Comme je sais, madame Herviaux, que vous êtes animée des meilleures intentions en défendant cet amendement, comme d’habitude d'ailleurs, je vous suggère de le retirer.

M. le président. Madame Herviaux, l'amendement n° 156 rectifié est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. J’hésite, monsieur le président, même si je comprends bien l’argumentation développée par M. le rapporteur et M. le ministre.

Vous souligniez tout à l’heure, monsieur le ministre, que, à l’époque où intervenait le Fonds de garantie, certains exploitants n’étaient pas couverts, ou alors seulement à hauteur de 20 % ou 30 % de leurs pertes.

Si l’amendement risque de restreindre le dispositif d’indemnisation, je veux bien le retirer afin de montrer que nous souhaitons aller dans le sens d’un renforcement de la protection des agriculteurs.

M. le président. L'amendement n° 156 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 157 rectifié, présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur, Teston et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par les mots :

lorsque les moyens techniques de lutte préventive ou curative employés habituellement dans l'agriculture, compte tenu des modes de production considérés, n'ont pu être utilisés ou se sont révélés insuffisants ou inopérants

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. L’exposé des motifs de votre projet de loi, monsieur le ministre, précise que l’État devra veiller à un développement satisfaisant des outils assurantiels et à une saine concurrence entre sociétés d’assurance. Nous partageons cet objectif.

Le projet de loi ne prévoit pas de conditionner l’indemnisation des pertes aux moyens de lutte préventive utilisés comme cela est le cas pour les calamités agricoles. Nous estimons, quant à nous, que la gestion des risques ne peut se limiter à un développement de l’assurance sans réflexion sur les moyens de prévention. Dans son rapport réalisé en 2004, le député UMP Christian Ménard indiquait déjà que la gestion conjoncturelle avait trop largement prévalu sur une politique ambitieuse de prévention.

Force est de constater que les actions conduites à ce titre par le Fonds national de garantie ne mobilisaient qu’une très faible part des ressources disponibles. La dépense moyenne au titre de la prévention, qui était inférieure à 0,4% des dépenses pendant les années 1980, s’est effondrée dans les années 1990, pour ne plus représenter que 0,03 % des dépenses, somme affectée à la réalisation de quelques programmes d’étude d’ampleur très limitée.

Certes, pendant la même période, l’État et les collectivités locales ont réalisé d’importants investissements de prévention, notamment dans le cadre des contrats de plan. Toutefois, la différence entre les niveaux d’équipement de prévention, des grandes régions fruitières, notamment, démontre que l’action de promotion et d’incitation coordonnée à de tels investissements a été quasiment inexistante.

Ces carences – ces défaillances pourrait-on dire parfois – soulignent plus que jamais l’urgence d’établir un lien plus fort entre le maintien d’une indemnisation et la mise en œuvre des pratiques de prévention les plus efficaces.

S’en tenir à la rédaction actuelle reviendrait à décourager les initiatives et les comportements les plus prévoyants, en indemnisant indifféremment les exploitants agricoles quels que soient leurs efforts de prévention des risques.

Cet amendement vise donc à encourager les pratiques les plus responsables et à soutenir les modes d’intervention plus économes et plus efficaces à long terme.

M. le président. L'amendement n° 604, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par les mots :

, lorsque toutes les dispositions préventives et curatives ont été prises et se sont révélées insuffisantes ou inopérantes.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 157 rectifié ?

M. Gérard César, rapporteur. Il est bien sûr souhaitable que les agriculteurs mettent en œuvre tous les moyens utiles de lutte préventive ou curative.

Toutefois, les règles relatives aux fonds de mutualisation sanitaires, phytosanitaires et environnementaux sont encore en cours de constitution. Les États généraux du sanitaire, dont les groupes de travail viennent de rendre leurs premières conclusions, laissent ouvertes deux options, l’adhésion à un fonds de mutualisation pouvant être facultative ou obligatoire.

Il nous semble prématuré d’inscrire dans la loi une conditionnalité de cet ordre alors même que le décret prévu par l’alinéa 17 peut préciser les conditions d’intervention du fonds. Nous attendons le rapport final des États généraux du sanitaire.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Au-delà des excellents arguments développés comme d’habitude par le rapporteur, je voudrais attirer l’attention de Mme Herviaux sur les risques liés à cet amendement.

À partir du moment où le fonds de mutualisation touche tous les risques, y compris les risques sanitaires, des problèmes pratiques peuvent se poser. Certes, il est possible d’envisager des moyens de lutte préventive en matière de risques climatiques. S’agissant des couloirs de grêle, par exemple, on peut demander aux agriculteurs d’installer des filets anti-grêle pour pouvoir bénéficier du fonds de mutualisation. Je vous rejoins sur ce point.

En revanche, nous sommes incapables d’évaluer le risque sanitaire portant sur l’agriculture française l’année prochaine ou dans deux ans. C’est d’ailleurs tout le problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui. Notre seule certitude, confirmée par l’AFSSA, c’est que les risques sanitaires vont s’accroître. Ainsi, les épidémies qui sévissaient une fois tous les quinze ans, interviennent désormais tous les cinq ans et, dans dix ans, nous risquons d’en subir une par an, sans savoir précisément laquelle. Dès lors, la prévention est impossible à mettre en œuvre.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. J’aurais voté des deux mains l’amendement précédent, parce que je trouve que la notion d’événement sanitaire est juridiquement très vague. Mais je pense également que l’amendement 157 rectifié est relativement intéressant.

Pour avoir récemment assisté à l’assemblée générale d’un groupement de défense sanitaire, je crois que le travail accompli par les membres de ces groupements est remarquable.

L'amendement, quant à lui, s’appliquerait à ceux qui refusent, malgré les instructions gouvernementales, les vaccins pour leurs bêtes. C’est le cas dans un certain nombre de départements où des agriculteurs refusent de faire vacciner leurs bêtes contre la fièvre catarrhale et qui, de ce fait, exposent les autres agriculteurs et exploitants à un risque qui pourrait être endigué. Il faudrait donc exclure du bénéfice du fonds ceux qui violent délibérément des règlements.

Cela dit, en ce qui concerne les moyens de lutte, je pense que l’amendement est rédigé de façon beaucoup trop générale.

M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Mme Odette Herviaux. Ce problème est extrêmement complexe.

Bien que je comprenne votre argument, chère collègue, la vaccination n’est pas toujours l’alpha et l’oméga.

Ainsi, dans le cas du porc, par exemple, la vaccination systématique sur notre territoire rendrait cette viande impropre à l’exportation. Pour pouvoir lutter à armes égales avec d’autres producteurs, il a fallu parvenir à une garantie sanitaire telle qu’on soit amené à supprimer la vaccination. L’organisation des groupements de producteurs a fait en sorte que cela soit le cas.

Peut-être en effet serait-il bon d’attendre le rapport des États généraux du sanitaire. Vous voyez, monsieur le rapporteur, les rapports ont parfois une utilité…

Toutefois, nous avons intérêt à maintenir et à renforcer certaines pratiques existantes. En conséquence, je maintiens mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 605, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéas 18, 19 et 20

Supprimer ces alinéas.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 404, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Supprimer le mot :

climatique

La parole est à M. Bruno Retailleau.

M. Bruno Retailleau. Cet amendement vise à supprimer le mot « climatique ». La suppression de ce seul mot aurait des conséquences importantes.

La rédaction actuelle du projet de loi prévoit d’indemniser au titre des calamités agricoles les dommages d’importance exceptionnelle résultant de phénomènes naturels climatiques. Or, la submersion marine, plus communément appelée « tsunami », peut résulter d’un simple mouvement de terrain en mer, ce qui ne constitue pas du tout un phénomène climatique. Pour autant, ce mouvement de terrain peut déclencher une submersion marine sur des dizaines de milliers d’hectares.

La suppression du mot « climatique » permettrait d’élargir le champ de l’indemnisation aux phénomènes naturels et de prendre en compte une gamme de risques beaucoup plus large.

Les tsunamis, contrairement à une idée reçue, ne se produisent pas uniquement dans des contrées lointaines : 25% d’entre eux se produisent dans le bassin méditerranéen, le reste dans les mers du nord et d’autres mers plus exotiques.

Il serait souhaitable de prendre en compte des risques qui sont de plus en plus fréquents.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. L’article L. 361-2 du code rural prévoit actuellement que les calamités agricoles sont définies comme des dommages dus à des variations anormales d’intensité d’un agent naturel. Le présent projet de loi fait référence, pour sa part, à un agent naturel climatique.

Qu’est-ce qu’un agent naturel climatique ? C’est tout le problème qui est posé.

Cet amendement propose de revenir au texte en vigueur du code rural au motif que des agents naturels non strictement climatiques peuvent être à l’origine de dommages aux cultures répondant aux critères des calamités agricoles. On l’a constaté malheureusement lors de la récente tempête Xynthia sur les côtes atlantiques.

Je m’interroge sur cet amendement et sur les conséquences qu’il pourrait avoir. Je souhaiterais donc recueillir l’avis du Gouvernement, qui pourrait peut-être indiquer si les cas de submersion marine relèvent effectivement des risques climatiques et donc du champ du Fonds national de gestion des risques en agriculture.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable car, en supprimant le mot « climatique » de cet alinéa, nous ouvririons le champ du Fonds d’intervention contre les calamités agricoles de manière extraordinairement large.

M. Gérard César, rapporteur. Eh oui !

M. Bruno Le Maire, ministre. Or, le Fonds a malheureusement déjà du mal à pourvoir aux calamités causées par des phénomènes climatiques. Cet amendement rendrait la situation très difficile.

Je précise par ailleurs, à l’intention de Bruno Retailleau, que la troisième section est consacrée à l’indemnisation pour les productions ne bénéficiant pas d’assurance contre les aléas climatiques. S’agissant de cette indemnisation, il est prévu que le Fonds couvre l’ensemble des sinistres, en particulier les excès d’eau et les pluies violentes, dès lors qu’il s’agit d’inondations conduisant à une submersion du terrain.

Les calamités agricoles causées par la tempête Xynthia auraient donc bien été couvertes par cette nouvelle rédaction.