Mme Éliane Assassi. Avec cet amendement, nous voulons nous opposer une nouvelle fois au recours au décret pour déterminer des dispositions majeures, sur lesquelles la représentation nationale devrait avoir à se prononcer.
Malgré les efforts de M. le rapporteur en vue de spécifier les attributions de chaque instance de la Société du Grand Paris, nous estimons que les contours des compétences à la fois du directoire, du conseil de surveillance et du comité stratégique ne sont pas très clairs.
Nous ne pouvons laisser le soin à un décret, donc au Gouvernement, de définir dans le secret des cabinets ministériels les compétences, les conditions et les modalités de désignation des membres de ces instances.
Nous craignons une prédominance du directoire, dont les membres seront nommés par l’État, pour diriger et impulser les activités de la Société du Grand Paris.
Cette crainte se trouve confortée par l’instauration d’un préfigurateur, nommé par décret du Premier ministre, et qui concentrera, durant quelques mois, l’ensemble des pouvoirs de la Société du Grand Paris.
Cet alinéa impose également qu’un commissaire du Gouvernement puisse venir s’opposer aux décisions du directoire ainsi qu’à celles du conseil de surveillance, voire des filiales de la Société du Grand Paris.
Nous estimons que l’ensemble de ces dispositions indique très clairement que la Société du Grand Paris sera dirigée in fine par le Gouvernement, ce que nous ne pouvons accepter.
M. le président. L'amendement n° 138, présenté par Mme Bricq, MM. Caffet et Angels, Mmes Campion et Khiari, MM. Lagauche, Madec, Mahéas et Repentin, Mme Tasca, M. Teston, Mme Voynet, MM. Bodin et Assouline, Mme Le Texier, M. Badinter et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10, dernière phrase
Supprimer les mots :
ainsi que les conditions dans lesquelles il peut être il peut être dérogé à la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Si le Gouvernement et la commission veulent manifester des signes d’ouverture, cet amendement n° 138 pourrait leur fournir l’occasion de le faire, car il n’affecte en rien le cœur de ce projet de loi, auquel nous sommes globalement défavorables.
Alors que le texte du Gouvernement ne prévoyait aucune dérogation au régime applicable au futur président de la Société du Grand Paris en matière de limite d’âge, pourquoi vouloir enfreindre la règle commune ? La Société du Grand Paris n’est-elle pas suffisamment dérogatoire au droit commun ?
S’agit-il d’une nouvelle prise de position politique, voire idéologique, préfigurant la future réforme des retraites, par laquelle on va sans doute chercher à reculer l’âge de la retraite ? Mais, si c’est le cas, on pouvait se satisfaire de la limite des soixante-cinq ans ! Or vous voulez aller au-delà de cet âge.
M. Yves Pozzo di Borgo. Vous allez vite y arriver, vous aussi ! (Sourires.)
M. David Assouline. Je ne méprise en aucune façon les personnes de plus de soixante-cinq ans, mais le fait d’avoir du talent ne doit pas les priver du droit au repos, à la vie de famille et aux loisirs, tandis que les plus jeunes ont également le droit de travailler, de faire la preuve de leurs talents, avant d’être, à leur tour, à la retraite !
Monsieur le secrétaire d'État, puisqu’il est question de modernité, de région-capitale, de ville-monde, puisque nous devons entrer en concurrence avec le monde entier et donner de nous une bonne image, quel sens cela aurait-il de confier la présidence de la Société du Grand Paris à une personne de plus de soixante-cinq ans ? La seule explication plausible est que vous pensez à quelqu’un !
Mme Nicole Bricq. À qui ? (Sourires.)
M. David Assouline. Et à quelqu’un qui n’est pas loin d’avoir soixante-cinq ans, ou même qui les a même dépassés !
Mme Éliane Assassi. On sait ! On sait !
M. David Assouline. Une telle dérogation ne contribuera pas à améliorer l’image et la réputation de la classe politique française à l’étranger. En Europe, ces dernières années, les chefs d’État des différents pays ont été des quadragénaires, mais pas en France ! Le nouveau président des États-Unis apporte indiscutablement un « plus » en termes d’image. Mais les parlementaires français, eux, quand ils légifèrent sur la ville-monde, souhaitent faire sauter le verrou de la limite d’âge pour nommer quelqu’un de plus de soixante-cinq ans à la tête du futur établissement public !
M. le président. Veuillez conclure.
M. David Assouline. Vous avez reçu un ordre. Je le comprends à vos sourires et à la décontraction qui règne dans l’hémicycle, ce qui tend à prouver que vous êtes d’accord avec moi. Il serait bon que nous nous accordions pour refuser un tel régime dérogatoire. Cela contribuerait également à changer un peu l’image du Sénat.
Je conclurai en étant plus sérieux et plus direct. Nous sommes tous d’accord : cette mesure dérogatoire est taillée sur mesure pour quelqu’un. Une telle mesure discrétionnaire non seulement nuit à notre image, mais donne à penser qu’il y a anguille sous roche ! Si vous voulez me démentir, il vous suffit d’accepter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 259, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Alinéas 13 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Cet amendement vise à supprimer trois alinéas qui tendent à mettre en place un préfigurateur de l’établissement public de la Société du Grand Paris.
Vous nous expliquez, depuis le début de l’examen du texte, que vous vouliez aller vite, être efficaces. Le Gouvernement a d’ailleurs demandé l’application la procédure accélérée. Alors, je l’avoue, j’ai du mal à comprendre ! S’il s’agit d’aller vite, à quoi bon nommer un préfigurateur qui devra être remplacé dans les jours ou dans les semaines qui suivront par un président de directoire plus durablement nommé ?
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
Mme Dominique Voynet. Et je ne comprends pas non plus pourquoi il faudrait procéder par voie législative pour mettre en place une mission de préfiguration, ce qui est banal dans l’administration. Je ne me souviens pas que l’on ait procédé ainsi pour les préfigurateurs des agences régionales de santé. On a simplement nommé, pour chaque région, des personnes chargées de préparer un travail, qui demandait effectivement un petit plus de temps.
Je crains que, en l’occurrence, monsieur le secrétaire d’État, les choses ne soient plus triviales. Ces trois alinéas renforcent encore le pouvoir de l’exécutif aux dépens de celui des collectivités locales. La création d’un préfigurateur, nommé par décret du Premier ministre, revient à désigner un proche, une personne fiable.
Nous commençons à avoir l’habitude de voir le chef de l’État placer des amis ou des personnes à sa convenance à la tête des institutions de notre pays. Il est indispensable, pour la démocratie, d’éviter ce genre de pratiques. Nous nous souvenons tous de la mésaventure de l’EPAD, l’établissement public d’aménagement de La Défense. Mais je pourrais donner d’autres exemples.
Nous ne fonctionnons pas sur la base de rumeurs et il faut dire les choses clairement. Certains anciens ministres, qui ont plus de soixante-cinq ans, mènent des campagnes très actives, et nous ne savons pas exactement s’ils ont envie d’effectuer le travail technique de la phase préalable ou s’ils guignent la présidence de la Société du Grand Paris. C’est le cas, bien sûr, de M. André Santini. On le voit d’ailleurs plutôt comme président que comme préfigurateur. On ne sait pas s’il est vraiment votre candidat ou si son service de presse, très bien organisé, fait ce qu’il faut pour le laisser croire… D’autres noms circulent.
Ce qui est certain, c’est qu’on ne comprend pas bien à quoi servent les alinéas 13 à 15, qui affaiblissent la crédibilité de l’État en cette période. C’est pourquoi nous vous proposons de les supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission, après un travail assez long sur l’article 8, a pris quatre dispositions essentielles.
Premièrement, elle n’a pas voulu que le projet de loi arrête la composition précise du conseil de surveillance. Elle a donc renvoyé à un décret en Conseil d’État le soin de définir précisément les conditions de nomination au sein de cette instance.
Monsieur Dallier, nous aurons le temps, d’ici à la commission mixte paritaire et à la publication du texte, d’arriver à une composition permettant de jeter des ponts…
M. Jean-Pierre Caffet. Avec les lobbys ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. … entre les différentes factions.
M. Jean-Pierre Caffet. Parce qu’il y a des factions ?
Mme Nicole Bricq. Ce ne sont pas les Montaigu et les Capulet, tout de même !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. À vous écouter, depuis maintenant vingt-deux heures, on le croirait !
Mme Nicole Bricq. Qui a sorti la dague ?
M. Jean-Pierre Caffet. Nous avons fini par le penser, à force de vous entendre !
M. Dominique Braye. Jusqu’à présent, c’est surtout vous qui parlez ! Vous ne faites même que ça !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Deuxièmement, la commission a élaboré un système à trois niveaux : un directoire, un conseil de surveillance, aussi réduit que possible, et un comité stratégique qui comprendra toutes les forces vives s’intéressant au développement et au rayonnement de la région-capitale.
Troisièmement, nous avons voulu, et cela nous paraît important, que la Société du Grand Paris et ses filiales soient soumises au contrôle économique et financier de l’État, ce qui doit rassurer certains d’entre vous.
Quatrièmement, la commission a prévu la désignation d’un préfigurateur et a encadré ses compétences de manière à pouvoir faire démarrer la Société du Grand Paris dans les meilleurs délais, tout en permettant à la discussion sur la composition exacte du conseil d’administration de se poursuivre.
Compte tenu de ces éléments, la commission est défavorable à l’amendement n° 45, car les représentants de l’État n’occuperaient qu’un tiers des sièges.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 136 et à la confusion entre les fonctions de directeur général de l’établissement public et de directeur général du Syndicat des transports d’Île-de-France.
M. David Assouline. Ce n’était pas une mauvaise idée : il a moins de soixante-cinq ans ! (Sourires.)
Mme Nicole Bricq. En plus, c’est une femme ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Comme beaucoup d’élus locaux de la région, j’ai eu de très mauvais rapports avec le directeur général du Syndicat des transports d’Île-de-France.
Mme Nicole Bricq. C’était avec celui qui avait été nommé par l’État !
M. Jean-Pierre Fourcade. Non, je parle du directeur actuel ! C’est un très mauvais souvenir ! Mais cette considération personnelle n’est évidemment entrée pour rien dans l’avis de la commission.
M. Jean-Pierre Caffet. Ah bon ? (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements nos 253 et 255.
Quant à l’amendement n° 183 rectifié de M. Dallier, il reçoit également un avis défavorable de la commission puisque le syndicat mixte est un syndicat d’étude. On ne peut pas demander à un syndicat d’étude de désigner des représentants au sein d’un établissement public à caractère industriel et commercial appelé à gérer une forte dotation en capital et à lancer des opérations. Ce sera peut-être envisageable lorsque nous aurons changé le mode de fonctionnement du syndicat mixte « Paris-Métropole », mais aujourd’hui ce n’est pas possible.
La commission est défavorable aux amendements identiques nos 46 et 184, qui visent à supprimer la majorité de l’État au sein du conseil de surveillance.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 137.
Pour ce qui est de l’amendement n° 139, qui vise à prévoir la présence de deux députés et de deux sénateurs au sein du comité stratégique, la commission y est favorable.
Mme Nicole Bricq. Quelle victoire !
M. Jean-Pierre Caffet. Deux amendements acceptés !
M. Yves Pozzo di Borgo. Deux bouteilles de champagne ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Bien entendu, pour que les choses soient claires, il doit y avoir un représentant de la majorité et un représentant de la minorité pour chaque assemblée. Quant à la parité homme-femme, l’idée est plus compliquée à mettre en œuvre.
M. Jean-Pierre Caffet. C’est le Conseil d’État qui y pourvoira !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. En tout cas, elle mérite d’être retenue, et je le dis pour que cela figure au procès-verbal.
L’amendement n° 47, qui vise à supprimer le décret en Conseil d’État, n’est pas acceptable. La commission y est donc défavorable.
L’amendement n° 138 tend à supprimer la dérogation prévue pour le futur président de la Société du Grand Paris au régime communément applicable en matière de limite d’âge. Je suis personnellement favorable à cet amendement, mais je n’ai pas été suivi par la majorité de la commission spéciale.
M. David Assouline. Sagesse ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission spéciale est défavorable à cet amendement, monsieur Assouline. Mais, rassurez-vous, je n’ai aucune candidature à l’esprit, surtout pas la mienne !
M. David Assouline. C’est pourquoi vous avez été mis en minorité ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission spéciale est également défavorable à l’amendement n° 259, qui tend à supprimer le préfigurateur, parce qu’il lui semble que cette formule est une bonne idée. Je viens d’en faire l’expérience avec les agences régionales de santé : les préfigurateurs ont été nommés le 1er octobre 2009, soit six mois avant que les agences commencent à fonctionner. Ils ont réalisé un excellent travail de conception, de mise en place, de préparation des accords avec les caisses de sécurité sociale et les établissements hospitaliers. Cela va dans le bon sens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Blanc, secrétaire d’État. Un assez grand nombre d’amendements ont pour objet la suppression de la majorité accordée aux représentants de l’État. J’y serai naturellement défavorable, pour les raisons que je vous ai exposées il y a un moment.
D’autres amendements réintègrent, d’une façon ou d’une autre, la notion de « STIF à deux têtes » dont j’avais entendu parler à l’Assemblée nationale. Compte tenu de ce que je vous ai expliqué sur notre souci d’efficacité, je ne peux également qu’y être défavorable.
M. Jean-Pierre Caffet. Nous pouvons aussi vous laisser entre vous ! C’est peut-être ce que nous ferons !
M. Christian Blanc, secrétaire d’État. Je vais maintenant prendre les amendements un par un.
L’amendement n° 45 vise à supprimer la majorité accordée aux représentants de l’État au sein du conseil d’administration ; l’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement n° 136 tend à instaurer ce fameux « STIF à deux têtes » ; j’y suis donc également défavorable.
Si l’amendement n° 253 était adopté, la nomination des membres du directoire devrait intervenir sur proposition des collectivités locales ; c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.
L’amendement n° 255 tend également à supprimer la majorité accordée aux représentants de l’État au sein du conseil de surveillance : avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 183, comme cela est souvent arrivé, monsieur Dallier, je suis d’accord avec vous sur le fond : il est très important que Paris-Métropole acquière progressivement de la substance. C’est l’espoir qu’avait exprimé le Président de la République dans son discours du 29 avril 2009 en parlant de l’« agora du Grand Paris ». Mais le problème est toujours le même : les statuts actuels de Paris-Métropole ne peuvent lui conférer la représentativité que vous souhaitez.
J’ai entendu ce que vous disiez, de même que M. le rapporteur, au sujet de la commission mixte paritaire qui se réunira prochainement : un certain nombre d’évolutions interviendront peut-être d’ici là. J’ignore si les choses iront aussi vite, mais je l’espère.
M. le rapporteur a aussi rappelé que l’organisation des instances dirigeantes serait fixée par décret en Conseil d’État. Un décret pourra être publié dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Rien n’empêche que, d’ici un an ou dix-huit mois, un décret plus précis prenne en compte l’évolution de la situation.
Je comprends donc très bien votre préoccupation et je la partage, monsieur Dallier, mais je suis obligé, en l’état actuel des choses, d’émettre un avis défavorable sur votre amendement.
L’amendement n° 46 tend à supprimer la majorité accordée aux représentants de l’État au sein du conseil de surveillance : avis défavorable. Idem pour les amendements nos 184 et 137.
L’amendement n° 139 recueille un avis favorable : en effet, l’idée de passer d’un député et un sénateur à deux députés et deux sénateurs est excellente, car elle permettra la désignation, dans chaque assemblée, d’un représentant de la majorité et d’un représentant de la minorité. J’y vois une avancée démocratique, comme on dit parfois.
Sur l’amendement n° 47, l’avis est défavorable, car l’objectif qu’il vise est contraire au partage des compétences entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, tel qu’il est prévu par la Constitution dans ses articles 34 et 37.
L’amendement n° 138 recueille un avis défavorable, sans autre commentaire.
M. David Assouline. Pas même à titre personnel ?
M. Christian Blanc, secrétaire d’État. Sans commentaire aucun !
Enfin, en ce qui concerne l’amendement n° 259, je tiens à rappeler que la mesure définie aux alinéas 13 à 15 vise à l’efficacité.
Madame Voynet, je vous ai attendue en vain hier : je vous avais fixé un rendez-vous, parce que je comptais faire une déclaration sur la politique environnementale sous-jacente au projet du Grand Paris, mais je pense que vous en avez eu connaissance.
Vous le savez mieux que quiconque, l’autorité environnementale dispose d’un délai incompressible de trois mois pour se prononcer sur l’étude d’évaluation environnementale qui lui aura été soumise. Afin de ne pas retarder l’ouverture du débat public et de respecter la chronologie que je vous ai présentée, il nous est apparu souhaitable – c’est même la raison principale qui a motivé l’introduction de cette disposition – de prévoir l’existence d’un préfigurateur dont la mission principale consistera à saisir l’autorité environnementale.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 136.
Mme Nicole Bricq. Je vais vous étonner, mes chers collègues, mais je comprends que mon amendement recueille un avis défavorable de la part de la commission et du Gouvernement.
En effet, depuis le début de cette discussion et quelle que soit l’heure, monsieur le rapporteur, vous vous placez toujours dans une logique d’affrontement. En fin de compte, vous voulez qu’il y ait un gagnant et un perdant. (M. Jacques Gautier proteste.) Mais si !
Nous avons proposé de faire cohabiter les équipes administratives et techniques du STIF et de la Société du Grand Paris. Une telle mesure aurait déjà le mérite de permettre à l’ensemble des protagonistes, qu’il s’agisse de l’État ou de la région, de réaliser des économies et surtout de partir de l’existant. Telle est notre logique à nous : nous voulons fédérer les équipes plutôt que les opposer, car nous savons comment les technostructures sont habituées à lutter les unes contre les autres, nous connaissons les dommages causés par les esprits de chapelle. Et nous en souffrons tous, notre collègue Dallier a raison sur ce point.
C’est l’amélioration du service rendu aux Franciliens qui devrait nous réunir, ainsi que l’optimisation de l’emploi des deniers publics. Mais tel n’est visiblement pas votre objectif : vous voulez vraiment qu’un projet l’emporte sur un autre et, à partir de là, que le combat continue !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l’amendement n° 183 rectifié.
M. Philippe Dallier. Deux arguments ont été opposés à mon amendement.
M. le rapporteur dit qu’un syndicat mixte d’étude ne peut pas désigner de représentant pour siéger au conseil de surveillance. Mais, monsieur le rapporteur, des associations d’élus, de maires notamment, désignent bien des représentants pour siéger, comme cela est prévu par toute une série de textes, dans d’innombrables instances. Je ne vois aucun obstacle juridique à ce qu’un syndicat mixte désigne des représentants.
Quant à vous, monsieur le secrétaire d’État, vous m’affirmez régulièrement depuis un certain temps que vous approuvez l’orientation que je dessine, et j’y suis sensible, mais vous n’osez pas franchir le pas. Après tout, qu’aurions-nous à y perdre ? Pas grand-chose ! La commission mixte paritaire se réunira dans un mois ; s’il faut revenir sur cette disposition, il sera toujours possible de le faire à cette occasion ; mais nous aurions au moins donné une indication claire !
Encore une fois, le Président de la République souhaite que ce syndicat mixte devienne l’agora qui réunit tous les maires de la zone dense. À partir du moment où mon amendement prévoit que les représentants seront désignés en respectant les équilibres politiques, vous avez la garantie que tout gouvernement, quel qu’il soit, disposera d’une large majorité au sein du conseil de surveillance. Franchement, vous ne courez pas un grand risque !
Si cette solution n’est pas retenue, nous renverrons au décret le soin de déterminer les élus locaux qui siégeront. Mais qui les désignera ? Des associations de maires existent bien dans pratiquement chacun des départements, tantôt de droite, tantôt de gauche, mais huit départements sont concernés : faudra-t-il multiplier le nombre des représentants des élus au sein du conseil de surveillance ? Et si ce ne sont pas des représentants des maires, qui va désigner ces élus locaux ? Il n’y a plus d’instance ! La seule qui existe aujourd’hui, c’est ce syndicat mixte.
Puisque le Président de la République indique que telle est la voie à suivre, je vais être, si j’ose dire, plus royaliste que le roi et vous proposer de suivre ses indications !
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. En rédigeant l’amendement n° 255, qui vient d’être rejeté, je ne m’étais pas permis d’aller aussi loin que vient de le faire Philippe Dallier parce que j’anticipais les arguments qui me seraient opposés.
En effet, aujourd’hui, Paris-Métropole ne représente pas encore toutes les collectivités territoriales intéressées par le projet du Grand Paris. C’est pourquoi mon amendement tendait à préciser que le conseil de surveillance devait être composé de « représentants de l’État », dont je souhaitais qu’ils ne soient pas majoritaires, « de parlementaires, de représentants de la région d’Île-de-France et de chaque département de cette région, d’un représentant du Syndicat des transports d’Île-de-France, ainsi que d’un représentant des communes et établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’aménagement ou d’urbanisme ».
Mon idée était de mobiliser largement l’ensemble des collectivités territoriales autour d’un projet qui devrait effectivement intéresser l’ensemble de la zone dense.
Vous n’avez pas souhaité retenir cette idée et vous ne souhaitez pas davantage une représentation de Paris-Métropole.
Je déplore qu’on ne sache pas encourager, par la loi, la montée en puissance d’institutions que l’on prétend pourtant promouvoir. Dans ce projet de loi, les établissements publics de coopération intercommunale continuent à n’être que très chichement représentés. Or, nous le savons, le fait intercommunal, qui s’est imposé naturellement sur la plus grande partie du territoire national, rencontre toujours beaucoup de difficultés à trouver sa place en Île-de-France.
Tout au long de cet article 8, nous pouvons nous rendre compte que les établissements publics de coopération intercommunale ne seront pas représentés au sein du conseil de surveillance, sinon à la marge. Je me réjouis de voir que la place des députés et des sénateurs sera renforcée, mais aurons-nous à cœur de faire en sorte que les présidents de communauté d’agglomération soient, eux aussi, bien représentés au sein du conseil de surveillance et du comité stratégique ? Rien n’est moins sûr ! D’autant que vous avez insisté, en commission, sur le fait que vous souhaitiez ne pas augmenter exagérément le nombre des membres de ce comité et y conserver une place prépondérante aux représentants de l’État !
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Je reconnais à notre collègue Philippe Dallier une véritable cohérence, mais surtout une certaine pugnacité dans les propos.
Comme je l’ai déjà signalé, Paris-Métropole est un syndicat d’étude et les collectivités territoriales qui en sont membres le sont sur la base du volontariat. Ce n’est donc pas une institution. Toutefois, tout comme vous, monsieur Dallier, je pense que ce syndicat aurait toute légitimité à siéger au sein du conseil de surveillance de la SGP au regard de ce qu’il représente et, nous sommes tous d’accord pour le dire, de l’excellent travail d’étude qu’il fournit.
En revanche, dans la mesure où, comme cela a été précédemment observé, il ne rassemble pas toutes les collectivités territoriales, je ne vois pas pourquoi il devrait proposer les élus locaux susceptibles de siéger au sein du conseil de surveillance. Je partage donc votre interrogation : qui les désignera ?
Nous devons trouver une solution pour que à la fois le syndicat d’études Paris Métropole et les collectivités locales, notamment les communautés d’agglomération, qui n’en sont pas membres puissent siéger au conseil de surveillance. C’est sur ce point précis que j’interpelle M. le secrétaire d’État.
M. le président. La parole est à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.
M. Jacques Gautier. Comme cela s’est passé hier, je vais me retrouver plus proche de Mme Assassi que de mon collègue Philippe Dallier, et je le regrette. (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Sur le fond, je partage l’analyse de Philippe Dallier. Nous souhaitons tous que, demain, un nouveau Paris-Métropole, ouvert, consensuel, …
M. David Assouline. Il est ouvert !
M. Jacques Gautier. … puisse représenter les élus de la métropole. Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Au regard de l’ensemble des villes concernées, peu de communes en sont membres.
En revanche, les pouvoirs publics disposent d’interlocuteurs officiels : il s’agit des associations de maires, qui sont affiliées à l’Association des maires de France et ne sont ni de gauche ni de droite. J’en préside une ; Laurent Béteille en préside une autre et il en existe au total six sur les huit départements d’Île-de-France. Chaque fois que l’État a besoin de représentants des communes dans des comités ou des organismes, nous en désignons en respectant les équilibres géographiques et politiques.
Voilà certainement une piste qui nous permettrait d’aboutir, sachant que nous pouvons également compter avec l’Association des maires de l’Île-de-France, l’AMIF. Un certain nombre d’organismes sont donc susceptibles de participer à la désignation des élus locaux siégeant au conseil de surveillance de la SGP, en attendant que Paris-Métropole, dans plusieurs mois, peut-être quelques années, parvienne à le faire.
M. Yves Pozzo di Borgo. Bravo !