M. Thierry Foucaud. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à entendre certains, nous ne serions plus en situation de crise et la reprise poindrait, mais il faudrait néanmoins se préparer à examiner un collectif budgétaire cet hiver, peut-être un autre au printemps, et, pour faire bonne mesure, pourquoi pas un autre avant la fin de l’année, en plus de celui que le Parlement examinera, comme c’est la tradition, dans la foulée du projet de loi de finances initiale, en l’occurrence pour 2011.
Histoire de marquer la différence, ce collectif budgétaire comporte un certain nombre de mesures, dont je parlerai plus avant dans cette intervention, mesures qui aboutissent à un résultat immédiatement compréhensible : l’accroissement du déficit de l’État, celui-ci passant, en 2010, de 116 milliards d’euros à 149 milliards d’euros, soit bien huit milliards de plus que le déficit constaté à la fin de 2009.
Quelques esprits chagrins auraient tendance à critiquer de prime abord cette situation, alors même que, en vertu d’engagements européens validés par la grâce de la ratification parlementaire du traité de Lisbonne – au mépris de l’opinion exprimée par le suffrage universel – nous devrions plutôt nous situer dans la perspective d’une réduction programmée de ce déficit.
Comme le dit à qui veut l’entendre le Président de la République, nous serions sortis de la crise, en grande partie grâce à son intervention déterminée, et une bonne part du déficit pour 2009 serait intimement liée à l’action menée contre les effets de la crise.
À la vérité, monsieur le ministre, puisque nous avons l’occasion de constater qu’une fois encore le déficit budgétaire atteindra des records et que l’on fera tourner avec constance et conviction les planches à imprimer les bons du Trésor et les titres obligataires de la dette publique, cette discussion devrait, pour nous, être l’occasion de revenir sur le bilan remarquable de l’action gouvernementale depuis 2007 et ce fameux printemps où, selon un slogan désormais quelque peu désuet, « tout devenait possible ».
Eh bien oui, les promesses ont été tenues et les engagements respectés : tout était possible et tout est devenu réalité, mais, d’abord et avant tout, le pire.
Hausse du pouvoir d’achat des ménages ? Je ne sais pas où le Président de la République a pu trouver la moindre statistique prouvant que le pouvoir d’achat est reparti à la hausse, mais ce n’est que par quelques transferts sociaux d’urgence et, surtout, par les produits du capital et de la propriété que la situation des ménages semble s’être améliorée.
Du côté des retraités, aux retraites gelées sur l’indice des prix, et du côté des salariés, confrontés de plus en plus nombreux sinon aux plans de licenciement, à tout le moins au chômage technique, pas grand-chose à se mettre sous la dent, même pas ces fameuses « heures sup’ » défiscalisées, dont vous n’osez d’ailleurs plus guère parler aujourd’hui.
À moins que l’on n’impute une partie de la hausse des salaires à celle de la rémunération des traders et des dirigeants d’entreprise, lesquels accumulent bonus, primes exceptionnelles, retraites chapeau et parachutes dorés !
En 2009, le nombre des chômeurs de catégorie A a progressé de 22 %, ce qui ne constitue d’ailleurs qu’un élément de la situation générale du monde du travail actuel, confronté à la précarisation galopante, aux incertitudes du lendemain, à une gestion patronale arbitraire qui, près de trente ans après les lois Auroux, continue d’avoir une essence purement monarchique.
Et permettez-moi de trouver indécent le discours de M. Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi, qui se félicitait de n’enregistrer, pour 2009, « que » 450 000 suppressions d’emploi, au lieu des 700 000 attendues ! Pourtant, 450 000 à 500 000 suppressions d’emploi, cela représente plus de 1 000 chômeurs supplémentaires par jour !
Dans la France de 2010, on continue de licencier pour assurer la rentabilité des investissements et le niveau des dividendes. On se sert même parfois des concours de l’État pour monter des plans sociaux sur fonds publics !
Lorsque l’on considère le rôle du Fonds stratégique d’investissement dans les affaires Nexans ou Trèves, par exemple, on se dit qu’il y a décidément quelque chose qui ne va pas dans la politique industrielle de ce gouvernement !
Mes chers collègues, si nous étions vraiment sortis de la crise, nous n’aurions sans doute pas constaté la chute libre des mises en chantier de logements neufs, sociaux ou pas, que nous avons observée en 2009, ni l’essoufflement des ventes de voitures neuves, malgré les incitations publicitaires que ne manquent pas de multiplier les constructeurs. Et nous n’aurions sans doute pas à déplorer non plus le fait qu’un million de chômeurs ayant épuisé tout droit à indemnisation seront appelés à « basculer », dans le courant de l’année, sous le régime du revenu de solidarité active.
Au-delà de l’indécent discours de certains membres de la majorité – MM. Bertrand et Lefebvre, notamment – qui considèrent qu’un million de chômeurs en fin de droits sur l’année, ce n’est jamais que 150 000 chômeurs de plus par rapport aux autres années, la vérité nous impose de dire que la gestion des situations difficiles va être transférée aux collectivités territoriales, aux départements en particulier, sans que les moyens nécessaires soient prévus pour compenser les dépenses nouvelles. Ensuite, il se trouvera toujours un sémillant porte-parole de l’UMP pour critiquer la « folie fiscale » des gestions locales de gauche, sans considérer plus avant la réalité.
Et quelle est-elle, cette réalité ?
Non seulement les politiques menées depuis 2007 n’ont pas résolu, loin de là, la situation de l’emploi, mais, sous bien des aspects, elles ont même contribué à l’aggraver.
On peut toujours froncer les sourcils devant Carlos Ghosn qui délocalise la production de la plupart des modèles de Renault en Espagne, en Slovénie ou ailleurs, mais c’est oublier un peu vite que l’actionnaire de référence qu’est l’État se dispense, depuis plusieurs années, notamment depuis 2002, date à laquelle le mouvement de délocalisation s’est accéléré, d’intervenir de quelque façon que ce soit dans la gestion du groupe. Sans doute parce que les avisés gestionnaires de l’Agence des participations de l’État – objet si désiré par certains de nos collègues – ne s’inquiètent, depuis longtemps, que du niveau du dividende versé au budget général, quel que soit le coût social ou économique de ce dividende.
Ainsi, une bonne partie du déficit commercial désormais chronique de notre pays réside précisément dans le retour en France des voitures « françaises » fabriquées à Bursa ou à Novo Mesto.
S’il fallait prouver encore l’absence d’une véritable politique industrielle, nous pourrions aussi évoquer la situation de Total, société éminemment stratégique dans notre économie. Rappelons, pour mémoire, que ce groupe est né de la fusion de deux anciennes sociétés à base française, Total et Elf, d’une part, la société belge PetroFina, d’autre part.
Nous avons ainsi vu naître un géant du pétrole – avec en aval de nombreuses activités dans tous les secteurs de la chimie –, un géant qui, au fil du temps, s’est désengagé du territoire national, en réduisant progressivement ses capacités de raffinage, comme le montre l’affaire toute récente de la raffinerie de Dunkerque. Pressé par l’opinion, et risquant de payer la facture lors du scrutin régional, le Gouvernement a obtenu que Total examine le devenir du site après que l’on aura passé l’écueil électoral. Je crains, hélas, que cela ne suffise pas !
On nous avait aussi promis, en 2007, que, grâce à la croissance, la situation économique allait s’améliorer. Il est évident que le Gouvernement avait fondé de grands espoirs sur la loi de modernisation de l’économie, le LME, dont il convient, à ce stade du débat, d’esquisser le bilan.
Je commencerai par les auto-entrepreneurs : 300 000 de nos compatriotes ont tenté l’aventure et réalisé un chiffre d’affaires cumulé de 500 millions d’euros. Allons à l’essentiel : 500 millions d’euros, cela représente 0,025 % du produit intérieur brut, soit un peu plus de deux heures de l’activité économique du pays…
Ce qui est indéniable, c’est que les artisans régulièrement inscrits au registre du commerce se sont trouvés face à une concurrence déloyale, quoique ponctuelle dans la plupart des cas. Et si quelques millions d’euros de recettes nouvelles sont venus alimenter les caisses de l’État et de la sécurité sociale, nous sommes bien loin, très loin de la révolution idéologique promise par Hervé Novelli !
Évoquons la suppression des marges arrière, autre disposition de la LME. La crise qui touche les producteurs de lait et la filière des fruits et légumes, dont le présent texte porte d’ailleurs une trace incongrue avec l’article 8, est venue opportunément nous rappeler que, si l’on privait les grandes enseignes de la distribution de la possibilité d’exercer une de leurs pratiques coercitives, elles en appliquaient immédiatement d’autres, notamment en pesant à la baisse sur les prix à la production.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : le revenu agricole s’est effondré, chutant de 37 % en 2009, sans que les consommateurs, en bout de chaîne, constatent de baisse du prix des produits frais, par exemple du lait, mais aussi du pain
En ce qui concerne la banalisation de la distribution du livret A, nous sommes en plein paradoxe.
L’ouverture à la concurrence, voilà une dizaine de mois, a, dans un premier temps, entraîné un accroissement du nombre des livrets ouverts et du montant des dépôts, mais il y a un « hic », monsieur le rapporteur général : ce mouvement a accompagné la lente mais constante dégradation du nombre de logements mis en chantier, notamment des logements sociaux.
Bref, tout ce qui peut permettre, faute d’utilisation des sommes disponibles, à M. Apparu, promu au Gouvernement à la grande surprise de Mme Boutin (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG), d’annoncer un plan pour le logement sentant quelque peu le réchauffé…
La loi de modernisation de l’économie, l’un des pivots de la thématique sarkozyste, n’a donc pas eu beaucoup d’effets sur la situation économique. Elle a d’ailleurs littéralement volé en éclats avec le développement de la crise financière ! Les déficits ont alors gagné en importance, prenant leurs aises avec l’argent public et franchissant la barre fatidique des 100 milliards d’euros annuels – plus que l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés réunis – pour atteindre le niveau de 141 milliards d’euros dans le collectif de la fin de l’année 2009.
La dette publique galope, même si le compteur affolé ne figure plus sur le plateau de Mme Chabot, comme lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2007. Et nous risquons de l’accroître encore avec le présent projet de loi de finances rectificative !
Monsieur le ministre, quelques mauvais esprits, dont nous sommes, considèrent d’ailleurs qu’une bonne part du déficit que nous avons constaté en 2007, en 2008 et en 2009, et que nous risquons d’observer encore en 2010, aurait pu être évitée. Sans la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, connue sous l’appellation de loi TEPA, nous aurions sans doute constaté un résultat légèrement différent.
Cela coûte cher de payer un bouclier fiscal à un millier de privilégiés qui continuent pourtant de préférer les investissements spéculatifs, comme cela coûte cher de permettre à quelques familles particulièrement aisées d’optimiser la gestion de leur patrimoine grâce aux donations entre vifs, d’alléger la douleur d’avoir perdu un parent proche grâce à la baisse des droits de succession, de réduire l’impôt de solidarité sur la fortune et, plus généralement, de multiplier niches, exemptions et régimes dérogatoires divers !
Lors du débat que nous consacrons tous les ans à la dépense fiscale, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, nous constatons que le seul poste budgétaire qui progresse constamment, et souvent très vite, est la mission « Remboursements et dégrèvements », dont ma collègue et amie Marie-France Beaufils est le rapporteur.
L’impôt sur le revenu est ainsi perverti et détourné de sa finalité. Aujourd’hui, compte tenu des mesures prises, on peut dire qu’il existe un type d’impôt sur les sociétés par entreprise, tant est grande la variété des dispositifs d’exonération, d’allégement, d’évasion fiscale ou d’assiette !
Il suffit de considérer ce que rapporte à Renault ou à Total le régime du bénéfice mondial consolidé ! Ce qui semble positif pour la compétitivité de ces groupes ne l’est manifestement pas autant pour l’emploi en France !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est bien parce que l’État a décidé, voilà déjà un certain temps, de prendre à sa charge une part importante de ce qui incomberait aux entreprises que notre pays connaît cette situation de déficit budgétaire durable et de dette publique confortée.
Certes, on peut toujours soutenir que ce collectif comporte des mesures qui sont en rupture avec certaines habitudes du passé, reprenant ainsi le « cela ira mieux demain » que nous avons déjà si souvent entendu.
Rendez vous compte ! Nous aurions trouvé les coupables de la crise financière de 2008, ceux-là même qui – comme l’indique le texte – par leurs actes inconséquents, ont provoqué les tensions interbancaires, l’explosion des déficits publics et la mise en œuvre de plans de sauvetage, à grand renfort d’argent public. Ces coupables, ce sont les traders, caste privilégiée d’acteurs de salles de marchés électroniques, scandaleusement rémunérés en fonction de la spéculation qu’ils organisent.
À la vérité, la taxe prévue par l’article 1er du présent texte semble bien relever du symbole. Elle représente le millième de ce que l’État était prêt à garantir pour sauver le secteur financier et elle est de peu de poids dans un déficit ayant atteint les niveaux que l’on sait, et qui ont été rappelés voilà quelques instants.
En outre, comme la taxe ne figure que dans ce collectif et pas dans la loi de finances initiale, nul doute que les banques auront tôt fait de trouver les moyens d’éviter de la payer. D’autant que ces mêmes banquiers avaient tenté, dans un premier temps, d’en affecter le produit au financement du système de garantie mutuelle que les sommets du G20 ont recommandé.
Je crois même me souvenir que quelques-uns de nos collègues avaient envisagé, sans doute en toute magnanimité, de gager la nouvelle taxe sur la suppression de la taxe sur les salaires payée par les banques ! Mais, en annonçant à l’avance les mesures que l’on envisage, on crée sans doute les conditions qui permettent aux intéressés d’y échapper !
En conclusion, le présent projet de loi de finances rectificative, largement consacré au grand emprunt, ne rompt aucunement avec les errements qui, depuis trop longtemps, entraînent les comptes publics sur une pente périlleuse, et la France dans le même temps. Il prépare sans doute, à sa manière, la nouvelle purge d’austérité qui nous semble promise pour les années à venir, du fait des engagements européens que j’ai évoqués. Pour toutes ces raisons, nous ne le voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à peine avions-nous entamé l’examen du projet de loi de finances pour 2010 que le Gouvernement annonçait le présent collectif budgétaire. Et la loi de finances tout juste votée, le conseil des ministres adoptait, le 20 janvier, le projet de loi de finances rectificative qui nous est soumis aujourd’hui, essentiellement destiné à « loger » l’emprunt annoncé par le Président de la République devant les parlementaires réunis en Congrès, à Versailles, le 22 juin 2009.
Monsieur le ministre, pour la sincérité des comptes, il eût été certainement préférable d’effectuer cet exercice lors de la discussion du projet de loi de finances initiale, car l’emprunt alourdit le déficit pour 2010 et pèse sur la dette, même si vos services l’ont pourtant habilement réaménagée en fin d’année dernière.
Ensuite, on nous annonce, une fois les élections régionales passées, une trajectoire des finances publiques destinée à faire entrer notre pays dans l’épure maastrichtienne dès 2013. Il faudrait être bien naïf pour croire à une telle fable. La trajectoire, qui a d’ailleurs été rectifiée – à la fin de l’année dernière, M. François Fillon, Premier ministre, avait fixé l’échéance à 2014 –, est qualifiée de « virtuelle » par M. le rapporteur général lui-même.
Cela nous ramène au contexte dans lequel s’inscrit le présent collectif budgétaire. De ce point de vue, la crise grecque est un révélateur de nos faiblesses. À ce stade, nous pouvons déjà en tirer deux leçons.
Première leçon, ce sont les mécanismes du marché qui, après avoir causé l’éclatement de la bulle en 2007 du fait des spéculations sur les dettes privées, provoquent à présent des spéculations sur la dette publique.
Aujourd’hui, comme hier, après trois G20 et de multiples réunions et sommets, rien n’a avancé en matière de régulation financière, pas plus en Europe qu’outre-Atlantique. La directive sur les « fonds alternatifs » est toujours encalminée à Bruxelles, et c’est bien timidement que l’on s’est penché sur les agences de notation.
Le constat est tout de même paradoxal : alors que les États sont venus au secours des marchés au nom de leurs contribuables respectifs, assumant ainsi en dernier ressort le risque systémique, ces mêmes marchés invitent aujourd'hui les contribuables à se serrer la ceinture !
M. Michel Sergent. Eh oui !
Mme Nicole Bricq. Aujourd'hui, c’est le cas de Grèce. Demain, ce sera celui d’autres pays qui ont peut-être moins menti, mais qui – nous le savons tous – sont dans l’œil du cyclone.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et quelles conséquences tirez-vous de ces évidences ?
Mme Nicole Bricq. D’ailleurs, pourquoi les marchés se gêneraient-ils ? Ils obéissent à leur propre rationalité, celle du profit à court terme, qui n’a pas encore rencontré de véritable obstacle.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Et qu’envisagez-vous de faire ?
Mme Nicole Bricq. Seconde leçon, la sortie de crise sera néanmoins plus compliquée que prévue, l’Union européenne et ses États se révélant incapables de réguler les marches.
Tout comme ils se révèlent également incapables de mener, par des choix économiques coordonnés, des politiques de croissance de long terme, d’effectuer l’assainissement budgétaire nécessaire et – c’est le point essentiel pour nous – de répartir les efforts le plus justement possible.
Nous demandons au Gouvernement d’arrêter les cocoricos sur le thème : « La France s’en sort mieux que les autres pays. » La réalité est connue. Notre économie, à l’instar des autres économies européennes, stagne sur un rythme de croissance des plus mous. Le chômage s’accroît. La société vieillit. Nos finances publiques sont dans un état calamiteux.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est de l’autodénigrement !
Mme Nicole Bricq. Voilà plusieurs mois, nous avons dénoncé les assertions du Gouvernement selon lesquelles le déficit serait imputable à la seule crise.
En effet, malgré une croissance, certes modérée, mais somme toute convenable, de plus de 2 % par an, les déficits et la dette étaient fortement aggravés dès 2008, du fait à la fois des dépenses non contenues et des pertes de recettes consécutives à d’inutiles, coûteuses et injustes baisses d’impôts.
Depuis, dans son rapport annuel, la Cour des comptes a montré que le déficit structurel équivalait à la moitié du déficit. Monsieur le ministre, vous contestez cette démonstration, mais vos arguments ne nous ont jusqu’à présent pas convaincus.
C'est la raison pour laquelle nos amendements visent pour partie à supprimer des mesures fiscales présentant les défauts que je viens d’indiquer, c'est-à-dire l’inutilité, le coût excessif et le caractère injuste.
Et encore n’avons-nous pas été exhaustifs ! Nous aurions pu y ajouter la baisse de la TVA dans la restauration, une nouvelle dépense fiscale non compensée, contrairement aux engagements du Gouvernement, et la défiscalisation des heures supplémentaires, dont le maintien est proprement criminel en période de chômage.
C’est dans un contexte budgétaire défaillant, avec une perspective de sortie de crise plus qu’aléatoire, qu’intervient l’emprunt.
Le 22 juin, le Président de la République posait la question des secteurs stratégiques et prioritaires pour préparer, selon ses propres termes, l’avenir de la France « une fois la crise refermée ». Comme le montrent les événements récents, à l’exception des marchés financiers, la crise n’est pas une parenthèse que l’on pourra aisément « refermer ».
Nul ne conteste, et surtout pas notre groupe, les impératifs de recherche, d’innovation et la nécessité de mettre l’accent sur les universités. Toutefois, on peut s’étonner que le secteur du logement social, pourtant sélectionné par la commission Rocard-Juppé, ne soit pas considéré comme relevant des dépenses d’avenir. Notre collègue Thierry Repentin, président de l’Union sociale pour l’habitat, s’est exprimé sur ce point. Je laisse le soin à mes collègues du groupe membres de la commission de l’économie et de la commission de la culture d’évoquer les priorités retenues.
Permettez-moi tout de même un petit retour en arrière. En 2007, dès l’arrivée au pouvoir du nouveau Président de la République et de son nouveau gouvernement, nous avions dénoncé l’absence de prise en compte du retard accumulé de notre appareil productif, notamment de notre industrie. À ce titre, nous avions critiqué les choix effectués en 2007, en particulier la distribution de cadeaux fiscaux qui ont encouragé seulement la thésaurisation et la rente, et certainement pas la productivité de notre pays.
Et le même gouvernement nous propose maintenant de mettre en œuvre un emprunt dont la rentabilité n’est pas assurée ! De toute manière, le dispositif s’appréciera sur le long terme et son effet sur la croissance potentielle – c’est M. le rapporteur général qui l’écrit – est quasi nul.
En revanche, il y a une certitude : l’emprunt entraîne un surcroît de charges d’intérêt…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Qui seront compensées !
Mme Nicole Bricq. … et envoie un mauvais signal à nos partenaires européens. Je pense en particulier au pays le moins enclin à mener une politique coopérative, c'est-à-dire à l’Allemagne.
N’eût-il pas été préférable, pour financer ces dépenses d’avenir, de revenir sur les dépenses fiscales les plus improductives ? On aurait ainsi évité d’ajouter de l’emprunt à l’emprunt « ordinaire ». Je le rappelle, en 2009, nous avons emprunté 225 milliards d’euros…
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
Mme Nicole Bricq. La charge financière de l’emprunt est gagée sur la réduction de même ampleur des dépenses, soit 500 millions d’euros en 2010. Elle s’impute sur les dépenses de tous les ministères. En 2011, la régulation budgétaire portera sur 1,2 milliard d’euros. Cela s’apparente tout de même à une politique de gribouille ! (Mme Nathalie Goulet s’exclame.)
Faut-il considérer le budget de l’État comme celui des dépenses du passé ? Faut-il considérer que l’on peut, comme vous le faites, justifier la suppression de 14 000 postes dans l’éducation nationale en 2009 et de 16 000 postes en 2010 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Parce que, selon vous, il faudrait en créer toujours plus ?
Mme Nicole Bricq. S’agit-il de dépenses du passé ? À cette question, nous répondons bien évidemment « non », et vous sans doute « oui » …
Et que dire des mécanismes de gouvernance proposés pour gérer l’emprunt ? Ils ne sont ni plus ni moins qu’une débudgétisation qui prive le Parlement du pouvoir de contrôle et d’évaluation que lui confère la Constitution en son article 24. Nous avons eu ce débat ici il y a peu.
Le Gouvernement a tout simplement fait le choix d’un fonds de trésorerie pour évacuer la question budgétaire.
Monsieur le rapporteur général, par vos amendements, vous tentez tant bien que mal de mettre le pied dans la porte à la fois en amont, par un droit de regard du Parlement sur les conventions avec les opérateurs destinataires des fonds, en aval en vous efforçant d’assurer un suivi budgétaire et, entre les deux, en essayant de séparer la prise de décision de l’évaluation.
Nous ne mettons pas en cause vos efforts, qui sont louables,…
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Merci !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien !
Mme Nicole Bricq. … mais nous doutons légitimement de leur efficacité, tant la gouvernance et le choix des projets par un jury international s’apparentent à une « agenciarisation » de l’État, phénomène que vous avez pourtant maintes fois dénoncé, monsieur le rapporteur général. Pour nous, il s’agit d’un euphémisme qui masque la privatisation de la sphère publique. (M. le rapporteur général s’exclame.)
Dans un contexte annoncé d’austérité budgétaire, il ne reste au Parlement que les dépenses de fonctionnement, c'est-à-dire celles que vous qualifiez de « dépenses du passé »… Autant dire que le Parlement n’a plus aucune marge de manœuvre !
Au demeurant, les crédits d’investissement du budget de l’État n’ont fait que diminuer d’année en année. Aujourd'hui, ils représentent 6 milliards d’euros à peine. La baisse est constante sous tous les gouvernements de droite qui se sont succédé depuis 2002.
Et vous n’avez rien fait pour redresser la barre. Le recours à cet emprunt exceptionnel n’efface pas votre inaction cumulée depuis huit ans. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)
L’autre point notable du collectif est l’introduction d’une taxe sur les bonus. Fragile dès le départ, le dispositif imaginé par le Gouvernement pour que la taxe soit indolore pour les banques – le mécanisme qui nous avait été proposé initialement était tout de même bien celui-là – a été heureusement démonté par nos collègues députés. En effet, ils ont obtenu l’affectation de la totalité du produit de la taxe au budget, et non pas au paiement de ce qui était dû, c'est-à-dire l’application de la directive, qui prévoit de relever le plafond du fonds de garantie des dépôts.
À ce stade, nous faisons trois observations.
D’abord, même légèrement élargi par la commission des finances à la chaîne hiérarchique, le périmètre est encore, pour nous, beaucoup trop étroit. Il devrait comprendre les gestionnaires des fonds alternatifs. En commission, nous avons regretté que M. le rapporteur général se soit arrêté sur sa lancée. Il nous a confié avoir hésité, mais il a fini par pencher du côté de la solution la plus étroite.
Le périmètre doit s’apprécier dans un dispositif plus large, concernant la place des rémunérations variables des salariés de ces établissements. Bien entendu, comme il s’agit non seulement de bonus mais aussi de bonus supérieurs à 27 500 euros, il n’est pas question ici de viser l’huissier de la banque ; cela se saurait ! En revanche, les mandataires sociaux, eux, devraient être concernés. C’est l’objet d’un premier amendement que nous vous présenterons.
Ensuite, la taxe sur les bonus ne saurait être déductible au titre de l’impôt sur les sociétés, ce qui sinon priverait l’État d’une recette qui est tout de même estimée à 90 millions d’euros. C’est l’objet d’un deuxième amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce serait une double taxe ! Une taxe sur une taxe !
Mme Nicole Bricq. Le dispositif proposé ne règle pas la question de la cotisation supplémentaire que doivent verser les établissements pour porter la garantie des dépôts à 100 000 euros, comme cela est prévu par la directive 2009/14/CE.
Le Gouvernement doit nous dire si la directive s’applique de droit ou s’il faut la transposer. Si cette transposition n’est pas encore faite, peut-être le Gouvernement a-t-il d’ores et déjà envisagé la procédure qu’il retiendra pour ce faire, c'est-à-dire une ordonnance ou un texte réglementaire.
Nous ne voulons pas que le fléchage vers Oséo du produit de la taxe ampute d’autant les crédits budgétaires. C’est l’objet d’un troisième amendement.
Enfin – pour nous, c’est l’essentiel –, le mécanisme proposé occulte la recherche d’un mécanisme pérenne de prévention des crises financières.
Depuis plusieurs mois, nous défendons la mise en œuvre d’une mesure proposée notamment par le directeur général du FMI, M. Dominique Strauss-Kahn : une assurance contre le risque systémique dont le coût serait proportionnel au risque pris.
Encore évoqué lors du G7 des ministres des finances qui s’est tenu voilà quelques jours au Canada, le principe semble en être accepté, au moins au stade des déclarations, mais à la condition, dixit Mme Christine Lagarde, que le dispositif soit mis en œuvre pour tous et en même temps. Force est de le constater, cette condition aboutit a l’impuissance à agir pour la régulation.
C’est pourquoi nous redéposons un amendement visant à demander au Gouvernement un rapport sur la mise en œuvre d’une telle prime d’assurance systémique. C’est notre manière à nous, membres de l’opposition, de demander que les contribuables ne soient pas les assureurs des risques pris par les marchés financiers. Peut-être existe-t-il des manières plus fines, mais, pour l’heure, elles n’ont pas été soumises au débat public, et nous attendons qu’elles le soient.
En conclusion, l’actualisation des comptes publics ne lève pas le doute sur la sincérité de nos finances. L’emprunt n’est pas de nature, même à moyen terme, à assurer notre rebond économique. La taxe sur les bonus telle qu’elle nous est présentée ne constitue ni réparation pour le passé ni prévention pour le futur.
Ce constat nous conduira donc très logiquement à repousser ce collectif budgétaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
(M. Roger Romani remplace Mme Catherine Tasca au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roger Romani
vice-président
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici saisis du premier collectif budgétaire de l’année 2010, qui ne sera assurément pas le dernier.
Tout comme la loi de finances que nous avons adoptée voilà à peine plus d’un mois et demi, ce projet de loi de finances rectificative vise, dans un contexte de sortie de crise – nous l’espérons – à soutenir le retour de la croissance en privilégiant les dépenses d’investissements.
Le groupe UMP approuve pleinement cette démarche.
Dans un contexte de forte crise économique qui a plombé nos déficits et a vu s’effondrer les recettes fiscales de l’État, il était primordial d’orienter massivement notre effort vers l’investissement, qui deviendra producteur de richesses, tout en poursuivant parallèlement la réduction de nos dépenses de fonctionnement grâce à la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques.
Le plan engagé l’an passé a apporté une première réponse en faisant le choix d’une relance essentiellement ciblée sur l’investissement, alors que certains nous demandaient d’augmenter les dépenses courantes.
La réforme de la taxe professionnelle, qui allégera l’impôt local payé par les entreprises à caractère industriel, jusque-là lourdement imposées sur leurs investissements, a constitué une seconde étape.
Dans la continuité de cette démarche, le Gouvernement nous propose aujourd’hui de mettre en place un grand emprunt national afin de financer un plan exceptionnel d’investissements publics à hauteur de 35 milliards d’euros, qui, par un effet de levier sur les entreprises, les collectivités territoriales et l’Union européenne – elles participeront au financement de certains projets –, devrait conduire à un investissement total estimé à 60 milliards d’euros.
De telles sommes, mes chers collègues, engagent fortement notre responsabilité. Si elles étaient utilisées à mauvais escient, c’est-à-dire sans espoir de retour sur investissement par la création de richesses, le grand emprunt ne serait qu’un emprunt de plus qui ne ferait qu’accroître nos déficits.
Son coût, non-consomptibilité aidant, varie de 2 milliards d’euros à 5 milliards d’euros par an et demeure donc raisonnable. Les trois principales agences de notation estiment qu’il ne devrait pas avoir d’impact négatif sur la qualité de la signature de la France. Elles jugent, en effet, que la France peut emprunter de 20 milliards d’euros à 30 milliards d’euros supplémentaires sans se mettre dans une position trop délicate.
Or la somme qui sera levée sur les marchés s’élèvera à 22 milliards d’euros, puisque 13 milliards d’euros proviendront du remboursement par les banques des aides que l’État leur avait consenties.
Par ailleurs, le groupe UMP se félicite du choix judicieux du recours au marché plutôt qu’à l’épargne publique. Un emprunt auprès des particuliers aurait été forcément beaucoup plus coûteux, pour être incitatif et convaincre les ménages.
Ces nouvelles dépenses d’investissement ne sont, en outre, selon le Gouvernement, pas incompatibles avec l’objectif fixé de réduire le déficit public à moins de 3 % d’ici à 2013. Le Gouvernement nous dit avoir réussi à résoudre la quadrature du cercle : ces investissements accroîtront, certes, le déficit budgétaire de 35 milliards d’euros en 2010, ce qui portera le déficit total à près de 150 milliards d’euros, mais l’impact sur le déficit public au sens de Maastricht sera faible.
En effet, les 500 millions d’euros de charge d’intérêts créés par l’emprunt seront intégrés à la norme de dépenses. Ils seront donc compensés par une réduction équivalente des dépenses de l’État. Nous nous en félicitons.
Ensuite, ces dotations généreront des actifs pour une certaine proportion d’entre elles, entre 50 % et 75 %, cela dépendra des conventions pluriannuelles entre l’État et les organismes gestionnaires des fonds. Elles ne devraient donc pas être considérées comme des dépenses publiques au sens maastrichtien du terme.
Ces actifs prendront la forme de prises de participation, prêts et avances remboursables, et, pour les actifs non consomptibles, seuls les intérêts seront dépensés.
Ce choix de privilégier la création d’actifs s’inscrit dans la continuité du plan de sauvetage des banques à travers la Société de financement de l’économie française et la Société de prise de participation de l’État. Les intérêts des prêts aux banques ont d’ailleurs rapporté des sommes considérables inscrites au budget de l’État, il convient de le rappeler.
Si cette débudgétisation offre l’avantage de créer des revenus pour la puissance publique, elle présente toutefois l’inconvénient d’échapper au contrôle budgétaire du Parlement. C’est effectivement une préoccupation.
Gardons-nous, par conséquent, de transformer le financement du plan d’investissement en un monstre financier opaque et trop complexe. C’est le vœu que nous formulons.
Voilà pourquoi il importe, à notre sens, de prévoir des contrôles à chaque niveau et d’assurer, notamment, le suivi budgétaire et la transparence du processus de sélection des projets dont la rentabilité devra être examinée avec soin.
Le Parlement devra remplir sa mission de contrôle, au-delà du rôle dévolu au commissaire général à l’investissement et au conseil de surveillance coprésidé par Alain Juppé et Michel Rocard, dont le rapport de novembre 2009 a largement inspiré le projet de grand emprunt.
Le groupe UMP se félicite, par conséquent, que les députés aient proposé de créer deux nouveaux « jaunes » budgétaires, l’un pour informer le Parlement de l’emploi et de la gestion des crédits de l’emprunt national, l’autre pour présenter un rapport décrivant les conséquences sur les finances publiques des investissements d’avenir.
Nous soutenons également la proposition de nos collègues députés de transmettre aux commissions des finances, avant leur signature, les conventions passées entre l’État et les organismes attributaires des crédits consacrés aux investissements d’avenir.
Nous ne connaissons pas encore le détail des choix de projets d’investissement. Néanmoins, le choix des secteurs bénéficiant du plan d’investissement nous semble pleinement pertinent. Il recueille l’assentiment et le plein soutien du groupe UMP.
Retenir l’enseignement supérieur, la formation et la recherche, l’industrie et les PME, le développement durable et le numérique répond à la volonté de soutenir l’innovation et de cibler des activités d’avenir fortement créatrices de valeur ajoutée.
Nous nous réjouissons que le Gouvernement non seulement entende combler le retard de la France en matière d’investissements – je rappelle que notre pays figure parmi les derniers pays de l’OCDE en termes de progression des dépenses globales pour la recherche et développement depuis 2000 –, mais souhaite également faire de la France l’un des leaders mondiaux dans ces domaines.
Cette approche sectorielle s’inspire des programmes des années soixante et soixante-dix, qui ont fait du nucléaire, du TGV, d’Airbus ou d’Arianespace, jusqu’à aujourd'hui encore, les fleurons de notre technologie et des moteurs de notre économie.
Le plan qui nous est proposé est d’une ambition presque sans précédent au regard de l’ampleur des montants engagés, lesquels dépassent très largement ceux des grands projets des années soixante et soixante-dix que j’évoquais.
Le choix de secteurs d’investissement stratégiques va réorienter de manière ambitieuse notre économie vers l’innovation et nous spécialiser dans une économie verte et de la connaissance.
L’enjeu consiste donc à passer d’une économie des ressources à une économie à la fois des savoirs et du développement durable.
Cette formule se traduit très concrètement par l’utilisation des sciences et techniques afin de tirer le maximum de profits du minimum de ressources, d’autant que ces dernières, n’en doutons pas, se feront de plus en plus rares à l’avenir !
La formidable croissance des pays émergents depuis la fin des années quatre-vingt dans un contexte de plus en plus mondialisé, qui voit le développement des moyens et réseaux de transports, mais aussi de l’économie virtuelle via internet, constitue bien le bouleversement majeur de l’économie mondiale à l’aube du xxie siècle.
La montée en puissance de la Chine, de l’Inde ou du Brésil remet en question les vieux équilibres stratégiques mondiaux en se traduisant par une compétition accrue sur les matières premières qui risque de précipiter la pénurie des ressources énergétiques et d’accélérer le dérèglement climatique.
La réforme de notre modèle de croissance hérité des Trente Glorieuses, époque où la consommation de masse semblait illimitée et circonscrite à la fraction occidentale de la population mondiale, est désormais nécessaire.
Le choix de la recherche, de l’industrie et des PME au sein des pôles de compétitivité, du numérique et du développement durable devrait donc être déterminant pour l’avenir de notre économie.
La deuxième grande mesure de ce collectif est la mise en œuvre de la taxation des bonus des opérateurs de marché.
Cette mesure fait suite à la crise financière qui avait contraint l’État à intervenir pour sauver les banques de la faillite alors même que leur comportement n’avait pas été vertueux, c’est le moins que l’on puisse dire, puisqu’il était à l’origine de cette crise.
Une réflexion avait alors été engagée sur la possibilité de taxer les bonus perçus par les traders ayant pris des risques jugés souvent trop excessifs.
Le Président de la République, dont le groupe UMP tient à saluer l’action déterminante, avait ainsi convaincu ses partenaires du G20, à Pittsburgh, en août 2009, d’adopter des règles communes en matière d’encadrement des bonus.
Il nous est aujourd’hui proposé de voter pour concrétiser cet engagement.
La Grande-Bretagne, l’autre grande place financière européenne, s’est elle aussi engagée à rapidement faire de même. Le gouvernement allemand, quant à lui, vient d’adopter il y a tout juste une semaine un projet de loi visant à encadrer les bonus des dirigeants du secteur bancaire.
Cela prouve bien que le choix de la France était le bon.
Mais ce choix est également celui de limiter la taxation : il n’est en effet pas envisageable d’alourdir la fiscalité des banques de manière trop importante.
Nous partageons donc le point de vue du Gouvernement et nous pensons qu’une pression fiscale trop élevée pourrait être contre-productive, sachant que le secteur bancaire se situe dans un contexte de forte compétition internationale.
En outre, ce secteur est déjà assujetti chez nous à une fiscalité « pérenne » significative, qui vient d’ailleurs d’être alourdie, puisque la réforme de la taxe professionnelle se traduira par une taxation supplémentaire de 150 millions d’euros.
Par ailleurs, 100 millions d’euros en 2010, qui deviendront 150 millions d’euros dans les prochaines années, découleront de la mise en œuvre de la contribution pour frais de contrôle au profit de la Banque de France créée par la loi de finances pour 2010.
Enfin, je rappelle l’existence de la taxe de 14 % sur les salaires, qui est propre à la France.
Le groupe UMP approuve également le choix des députés d’affecter les 360 millions d’euros que cette taxe devrait rapporter à l’établissement public Oséo pour permettre le financement de nos PME.
Les fonds propres d’Oséo, dont les interventions se sont sensiblement accrues du fait de la crise, seront ainsi renforcés par une contribution des banques qui sont à l’origine de cette crise. Il y a là une certaine morale.
Mme Nicole Bricq. Cela n’a rien à voir avec la morale !