compte d’affectation spéciale : développement agricole et rural

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Articles additionnels avant l’article 51

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural », figurant à l’état D.

État D

(en euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Développement agricole et rural

114 500 000

119 500 000

Développement et transfert en agriculture

52 100 000

51 600 000

Recherche appliquée et innovation en agriculture

62 400 000

67 900 000

Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer un article additionnel avant l’article 51, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Article 37 et état D
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Sécurité

Articles additionnels avant l’article 51

Mme la présidente. L'amendement n° II-64, présenté par MM. César, Soulage, Fortassin et Pastor, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :

Avant l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le II de l'article 1604 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de l'exercice budgétaire 2010, une part du produit de la taxe est reversée par les chambres départementales d'agriculture aux chambres régionales d'agriculture à hauteur de 4 % minimum de la recette fiscale totale régionale, déduction faite des versements au fonds national de péréquation des chambres d'agriculture. Cette part est portée à 7 % minimum à compter de l'exercice 2011 et 10 % minimum en 2012. »

II. - Les sixième à dernier alinéas de l'article L. 221-9 du code forestier sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Une part du produit de la taxe perçue sur tous les immeubles classés au cadastre en nature de bois est reversée par les chambres départementales d'agriculture aux chambres régionales d'agriculture à hauteur de 33 % de la recette fiscale, déduction faite des versements au fonds national de péréquation et d'action professionnelle des chambres d'agriculture mentionnés au deuxième alinéa du présent article et à l'article L. 141-4.

« Cette part est portée à 43 % en 2011.

« Ces crédits sont affectés à la réalisation d'un plan pluriannuel régional de développement forestier établi et mis en œuvre par les acteurs de la production forestière et par les chambres d'agriculture. Le contenu de ce plan et les modalités de sa validation par l'autorité administrative sont fixés par décret. »

III. - Au deuxième alinéa de l'article L. 514-1 du code rural, après les mots : « pour 2009 » sont insérés les mots : « et pour 2010 ».

IV. - En conséquence faire précéder cet article de l'intitulé :

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

La parole est à M. Gérard César, rapporteur pour avis.

M. Gérard César, rapporteur pour avis de la commission de l’économie. Nous souhaitons donner aux chambres d’agriculture les moyens d’exercer leurs missions. À cette fin, nous proposons d’augmenter de 1,5 % le taux de la taxe afférente, qui, je le rappelle, est payée par les agriculteurs. C’est une mesure très raisonnable, mais nécessaire pour tenir compte de l’inflation.

M. Michel Charasse. Pour une fois que M. César propose d’augmenter les taxes payées par les paysans ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Le présent amendement a un double objet.

Il s’agit, d’une part, de fixer le taux d’augmentation maximal de la taxe que chaque chambre départementale d’agriculture peut inscrire à son budget. Le dispositif tend, en fait, à reconduire le taux d’augmentation existant, qui est déjà de 1,5 %.

Il s’agit, d’autre part, d’accroître le taux de reversement du produit de la taxe aux chambres régionales d’agriculture. Le choix de le porter à 4 % en 2010, à 7 % en 2011 puis à 10 % en 2012 répond à une montée en puissance de l’échelon régional au sein des chambres d’agriculture. Le degré de mutualisation a été négocié par les professionnels et il correspond à l’approche du Gouvernement.

La commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Pour les raisons indiquées par M. César et par M. le rapporteur spécial, le Gouvernement émet un avis favorable.

Cet amendement est d’autant plus justifié que des missions nouvelles sont confiées aux chambres d’agriculture, liées au Grenelle de l’environnement ou relatives à la collecte de la taxe d’équarrissage.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-64.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 51.

L'amendement n° II-134, présenté par M. Repentin, Mme Herviaux, M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Fauconnier, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Avant l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement avant le 31 mars 2010 un rapport sur les conditions de mise en œuvre sur le territoire national de la prime à la surface herbagère et sur les conséquences de sa décision de non renouvellement des contrats de prime herbagère agroenvironnementale sur la situation économique des exploitations notamment celles situées en zones de montagne.

II. - En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Dans le cadre du bilan de santé de la politique agricole commune, le Gouvernement français a pris la décision d’augmenter les soutiens à l’élevage à l’herbe et aux zones fragiles.

Comme nous l’avons déjà vu au cours de ce débat, le Gouvernement devait d’abord prélever à cette fin 760 millions d’euros sur les aides découplées en 2010, 700 millions d’euros étant destinés à revaloriser les droits à paiement unique sur les surfaces en herbe.

Il devait également faire en sorte que l’augmentation progressive de la modulation des fonds du premier au deuxième pilier libère des moyens supplémentaires, de l’ordre de 584 millions d’euros, pour la prime herbagère agro-environnementale, la PHAE, soit 110 millions d’euros pour 2009 et 474 millions d’euros au total pour 2010, 2011 et 2012.

Or, monsieur le ministre, contrairement à ce qui avait été annoncé, vous avez décidé de ne plus renouveler les contrats PHAE à partir de 2010 et de les remplacer par la nouvelle prime à l’herbe, sur laquelle nous n’avons malheureusement que très peu d’informations.

C’est déjà plutôt une mauvaise nouvelle, puisque nous attendions des moyens supplémentaires.

Le remplacement de la prime herbagère agro-environnementale par cette prime à l’herbe risque, de surcroît, de désavantager les zones d’élevage extensif, notamment, mais non exclusivement, dans les départements de montagne, puisque la surface et le taux de chargement en bétail seront pris en compte.

Ainsi, on prévoirait un taux maximal pour un seuil de chargement égal ou supérieur à 0,8 unité de gros bétail par hectare sur les cinquante premiers hectares, soit 75 euros par hectare, puis un taux dégressif au-delà.

Certains départements ont déjà fait leurs comptes et estiment que l’entretien des prairies permanentes risque d’en souffrir et que l’équilibre économique de certaines exploitations pourrait être compromis.

Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé, lors de votre audition par la commission au Sénat, le 24 novembre dernier, à ce que les exploitants qui touchaient la prime herbagère agro-environnementale ne perdent pas un euro avec la nouvelle prime. Mais ce genre de promesses, comme dans le cas de la taxe professionnelle, nous laisse quelque peu méfiants…

Selon vous, monsieur le ministre, la revalorisation de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, ou ICHN, devrait, par ailleurs, permettre de maintenir les grands équilibres dans les zones de montagne.

Des doutes et des incertitudes subsistant, nous pensons qu’il serait salutaire et utile que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur les conditions de mise en œuvre de ce nouveau paiement à l’herbe et sur les conséquences de la suppression de la prime herbagère agro-environnementale, notamment dans les zones d’élevage extensif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Ce sujet a été évoqué à plusieurs reprises cet après-midi. Quelque bonne que soit l’intention de faire procéder à une évaluation de l’application du nouveau dispositif, il me paraît difficile et pour le moins prématuré de fixer l’échéance au 31 mars 2010, soit dans trois mois. De surcroît, nous venons de réduire les crédits de l’administration centrale du ministère.

M. Jean-Pierre Sueur. On peut sous-amender !

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. Néanmoins, c’est un sujet qui mériterait d’être réexaminé lors de la discussion budgétaire de l’année prochaine. En tant que rapporteur spécial, je suis disposé à inclure les résultats d’une enquête sur pièces et sur place dans le prochain rapport de la commission des finances.

Pour l’heure, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Sur cette question sensible et importante de la PHAE, j’ai pris un engagement lourd, et les actes plaideront mieux qu’un rapport.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-134.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » et des crédits du compte spécial « Développement agricole et rural ».

Sécurité

Articles additionnels avant l’article 51
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article additionnel après l'article 59 ter

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Sécurité » est dotée, pour 2010, de 16,649 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et de 16,397 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une augmentation de 1,3 % par rapport à 2009.

Avec 14,084 milliards d’euros, les dépenses de personnel constituent 85,9 % de ces crédits. La mission « Sécurité » est donc, avant tout, une mission de personnel, et cette caractéristique forte induit une vraie rigidité de son pilotage.

En 2009, la mission a connu une évolution importante avec le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur. Cette évolution ne remet en cause ni le statut militaire de la gendarmerie ni le dualisme policier ; elle consiste en un rattachement organique et opérationnel en vue d’améliorer l’efficacité de la politique de sécurité.

Du point de vue de la lutte contre la délinquance, un infléchissement notable de la performance doit être relevé depuis les mois de mars et d’avril 2009.

En effet, le nombre de crimes et délits constatés entre janvier 2009 et septembre 2009 a crû de 0,45 % par rapport à la même période de 2008.

Plus particulièrement, sur la même période, le nombre des atteintes volontaires à l’intégrité physique a progressé de 4,08 %. En zone police, cet indicateur s’est plus fortement dégradé, avec une augmentation de 4,61 %, qu’en zone gendarmerie, où elle a atteint 2,12 %.

Ces résultats rompent certes avec la tendance à l’amélioration continue et incontestable des résultats depuis 2002, mais il est encore trop tôt pour savoir si cette dégradation est passagère ou destinée à être durable. Les données tout récemment rendues publiques par l’Observatoire national de la délinquance, l’OND, incitent d’ailleurs à beaucoup de mesure dans le jugement.

Ainsi, en octobre 2009, la délinquance générale a de nouveau reculé, de 5,94 %, par rapport au mois d’octobre 2008, tandis que le nombre des escroqueries et des infractions économiques et financières, notamment, a chuté de 9,75 %.

Concernant cette mission, je veux une nouvelle fois souligner l’importance de la coopération internationale qu’elle sous-entend, via le service de coopération technique internationale de police, le SCTIP. Le savoir-faire, l’expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent un atout à valoriser à l’échelon international. La coopération en matière de sécurité produit non seulement des conséquences positives sur la sécurité intérieure, mais elle permet aussi de créer ou d’entretenir des relations avec des pays qui sont parfois tenus en marge des relations internationales. Il s’agit donc là d’un levier diplomatique à ne pas sous-estimer.

Le programme « Police nationale » comporte 8,915 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une hausse de 1,9 %. Ce programme enregistre une réduction de ses effectifs de 1 390 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, avec un plafond d’emplois fixé à 144 790 ETPT. Cette baisse des effectifs s’inscrit dans une programmation triennale portant sur la période 2009-2011 et prévoyant, à son terme, la suppression de 4 000 postes de policier.

Un motif de satisfaction réside dans la reprise de l’effort d’investissement au sein du programme : les crédits de paiement progressent de 5,8 % et les autorisations d’engagement enregistrent une très forte hausse, de 88,2 %.

Cette augmentation des autorisations d’engagement s’explique essentiellement par la mobilisation de 61 millions d’euros supplémentaires pour l’investissement immobilier et de 88 millions d’euros supplémentaires consacrés à la modernisation technologique de la police.

Il faut souhaiter que ces mesures soient de nature à dissiper un certain malaise au sein de la profession de policier, malaise qui s’est encore aujourd’hui même exprimé par des rassemblements syndicaux, monsieur le ministre.

Le programme « Gendarmerie nationale » est doté de 7,665 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une légère hausse de 0,7 %.

Comme la police, la gendarmerie connaîtra, en 2010, une réduction de ses effectifs : son plafond d’emplois est fixé à 98 155 ETPT, soit une baisse de 1 354 ETPT. Ici aussi, ce mouvement s’inscrit dans une programmation triennale prévoyant, à son terme, la suppression de 3 000 emplois de gendarme.

Il faut toutefois le souligner, le projet de loi de finances pour 2010 prévoit les mesures nécessaires permettant un déroulement de carrière identique pour les sous-officiers et les officiers de gendarmerie et pour les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale.

La réalisation du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées, le PAGRE, rénové, débouchera sur un équilibre entre la police et la gendarmerie en 2012, date de la mise en œuvre complète du protocole « corps et carrières » de la police nationale. Cette information me semble tout à fait importante.

Par ailleurs, l’opération en Afghanistan explique, pour une très large part, les surcoûts prévisionnels des opérations extérieures, les OPEX, pour la gendarmerie nationale en 2009. Alors que l’autorisation initiale de dépense était fixée à 15 millions d’euros, un surcoût de 21,7 millions d’euros est à déplorer.

En matière de sécurité, il convient de sortir des querelles sémantiques qui ont trop souvent brouillé la réflexion sur la question de la police de proximité. La récente mise en place des unités territoriales de quartier, les UTEQ, et des compagnies de sécurisation illustre une façon plus moderne d’aborder ce sujet : de manière dépassionnée et essentiellement pragmatique.

Les premiers résultats de ces unités sont d’ailleurs encourageants. À l’inverse de la police de proximité telle qu’on a pu la connaître dans sa version précédente, dont le fonctionnement induisait, en particulier, la création de locaux de police coûteux en effectifs et peu utiles au regard, notamment, du nombre de plaintes, ce nouveau mode d’action ne fige pas la capacité opérationnelle des forces de police. Il ne la disperse pas non plus ! Or la police de proximité doit avant tout être évaluée du point de vue de l’efficacité opérationnelle.

Les crédits consentis aux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » contribueront d’autant plus à l’efficacité de nos forces de sécurité que celles-ci continueront d’avancer sur la voie de la rationalisation de leurs moyens. Je veux ici insister très fortement sur ce point. En effet, le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur ne peut en aucun cas être une fin en soi : il constitue une étape sur un chemin encore long.

Dans le cadre du rapprochement entre les deux forces, la priorité doit désormais être donnée à la chasse aux doublons. Les gains espérés du rattachement de la gendarmerie ne pourront être pleinement perçus qu’à cette seule condition, impérative.

Dans le domaine du renseignement et de la collecte de l’information, par exemple, est-il encore judicieux d’éparpiller nos moyens entre deux structures parallèles ?

De même, en matière de police scientifique et technique, est-il rationnel de conserver six laboratoires de police nationale et un laboratoire de gendarmerie nationale, l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, l’IRCGN ? Une plus grande concentration des moyens s’imposerait pourtant dans ce domaine particulièrement sensible et porteur de résultats en termes d’amélioration du taux d’élucidation des affaires.

Nos forces de sécurité s’appuient aujourd’hui sur des unités d’intervention de très haut niveau, qui ont su faire, à maintes reprises, la démonstration de leur efficacité, de leur maîtrise technique et de leur sang-froid. Mais comment justifier aujourd’hui la superposition redondante de l’unité « Recherche, assistance, intervention, dissuasion », ou RAID, et du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, le GIGN ? Je sais que de tels propos blessent certaines oreilles, mais il faut rationnaliser l’organisation et ne pas s’attacher uniquement aux symboles !

La police et la gendarmerie ne sont pas au terme de leur processus de mutation. En aucun cas elles ne peuvent rester au milieu du gué. Le scénario souhaitable me paraît être, au minimum, une spécialisation de ces deux forces sur des secteurs géographiques et de compétences distincts : à la police, par exemple, la police judiciaire et le renseignement ; à la gendarmerie, la sécurisation des zones non urbaines et la lutte contre la délinquance routière.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je ne suis pas du tout d’accord !

M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial. La réflexion mérite certes d’être poursuivie, mais le statu quo n’est pas permis. Au-delà des traditions et des situations historiquement établies, il s’agit aujourd’hui d’imaginer une nouvelle étape dans la modernisation de nos forces de sécurité, de faire bouger les lignes en fonction d’une analyse précise et objective des besoins et, finalement, de concevoir une gendarmerie encore plus efficace dans des missions repensées.

En conclusion, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits proposés pour la mission « Sécurité » et pour chacun de ses deux programmes. (M. le président de la commission des finances applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des lois, en remplacement de M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, en remplacement de M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Sécurité » seront encadrés en 2010, comme ils l’étaient déjà en 2009, par trois textes : la loi de programmation des finances publiques, qui tend à plafonner, à l’horizon de 2011, les dotations en autorisations d’engagement et en crédits de paiement de la mission ; la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui implique une participation de l’ensemble des services de l’État à l’objectif de maîtrise des dépenses publiques ; le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dit LOPPSI.

Monsieur le ministre, ce dernier texte, qui encadre les moyens de la sécurité intérieure pour la période 2009-2013, a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 mai 2009, mais n’a toujours pas été inscrit à l’ordre du jour ! Pourtant, 2010 est sa deuxième année d’exécution et une partie importante des crédits d’investissement de cet exercice est adossée à ce projet de loi.

Le projet annuel de performance du budget pour 2010 renvoie ainsi à de nombreuses reprises à un texte que nous sommes encore loin de connaître sous sa forme définitive. Je sais que vous n’y êtes pour rien, monsieur le ministre, mais il serait fort souhaitable qu’il puisse être enfin examiné par le Parlement le plus rapidement possible. Sinon, il faudra élaborer un nouveau texte !

Les crédits de la mission ayant déjà été exposés, j’insisterai sur trois points particuliers.

Tout d’abord, le contexte actuel de contrainte budgétaire implique, pour maintenir de bons résultats, davantage d’efficacité encore dans l’action des forces de l’ordre. Cela passe nécessairement par une collaboration plus approfondie entre la gendarmerie et la police. À cet égard, il ne me semble pas souhaitable, je tiens à le dire, d’aller au-delà de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale, qui est un texte d’équilibre. Pour ma part, monsieur le rapporteur spécial, je m’oppose à ce qu’il y ait une seule force de police judiciaire. Cela ne me semble pas correspondre à la volonté du Gouvernement et du Parlement. (M. Jean Faure, rapporteur pour avis, applaudit.)

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La loi de finances de 2009 et la loi du 3 août 2009 ont organisé le rattachement budgétaire, organique et fonctionnel de la gendarmerie nationale au ministre de l’intérieur. La coopération passe déjà par une mutualisation de plus en plus poussée des moyens.

Cependant, comme j’ai pu le constater, il existe encore des incompréhensions entre policiers et gendarmes sur le rapprochement qui est en train de s’opérer. Regrouper, comme vous envisagez de le faire, monsieur le ministre, les forces d’intervention de la police nationale serait déjà un grand progrès.

Tout en allant plus loin dans la coopération sur le terrain, il conviendra donc de poser clairement les limites du rapprochement, afin qu’aucune des deux forces ne se sente menacée dans sa spécificité.

Par ailleurs, je voudrais insister sur la nécessité d’une amélioration des outils technologiques dont disposent la police et la gendarmerie pour lutter contre la délinquance.

Le constat en a été fait : la période de janvier à septembre 2009 a été marquée par une légère augmentation des faits de délinquance – la situation s’est toutefois améliorée depuis – et la délinquance de proximité a également cessé de baisser cette même année.

Cette stabilisation n’est pas particulièrement étonnante, tant la baisse a été forte au cours des dernières années. Néanmoins, il faut y voir le signe qu’il est nécessaire de poursuivre dans la voie de la modernisation des moyens employés par la police et la gendarmerie. M. Courtois met l’accent sur le recours aux moyens modernes, notamment l’utilisation des empreintes digitales et des empreintes génétiques, pour améliorer le taux d’élucidation des délits et des crimes.

Bien entendu, une telle évolution implique davantage de moyens. Il convient d’explorer la possibilité d’instaurer une taxe sur les assurances, qui permettrait à la police scientifique et technique, lorsqu’elle retrouve le butin d’un cambriolage, par exemple, de récupérer une partie de la somme que les assurances, sans son intervention, auraient eu à débourser. Comme M. Courtois a pu le constater, les compagnies d’assurances elles-mêmes ne sont pas hostiles à cette idée. Un tel dispositif pourrait-il être prochainement élaboré, monsieur le ministre ?

Je voudrais enfin évoquer la vidéosurveillance. Comme le montre le rapport d’information élaboré par MM. Jean-Patrick Courtois et Charles Gautier, la vidéosurveillance a trop souvent été développée de manière empirique, voire anarchique, sans réflexion approfondie sur son utilisation et sans que les images filmées soient suffisamment exploitées dans des procédures judiciaires.

C’est pourquoi je note avec satisfaction que les futures mises en œuvre de cette technologie s’appuieront sur des principes de bon sens, tels qu’un maillage suffisant du territoire surveillé et une liaison systématique avec les forces de l’ordre. Seront ainsi déployés, en 2010, soixante-quinze systèmes municipaux « types » de vidéosurveillance urbaine, raccordés à des centres de supervision eux-mêmes reliés au commissariat ou à la gendarmerie.

Le rapport précité concluait également à la nécessité d’informer davantage le public de l’existence des systèmes de vidéosurveillance, afin que le contrôle démocratique indispensable à la préservation des libertés publiques puisse s’exercer.

Il préconisait, enfin, de confier à la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la mission d’autoriser et de contrôler l’ensemble de ces systèmes. Le rapport d’information de M. Yves Détraigne et de Mme Anne-Marie Escoffier sur la vie privée et les mémoires numériques a également repris cette préconisation. Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, de quelle manière il sera tenu compte de ces recommandations ?

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Faure, rapporteur pour avis.

M. Jean Faure, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir perdu 1 200 emplois en 2009, la gendarmerie devrait encore en perdre 1 300 en 2010, par la stricte application de la révision générale des politiques publiques. Cette évolution nous inquiète pour le maillage du territoire, qui nous paraît essentiel, et certains d’entre nous se sont déjà fait l’écho de réductions d’effectifs ou de menaces de fermeture de brigades. Il ne faudrait pas mettre en péril l’équilibre actuel, même si nous ne nous opposons nullement à la RGPP.

En ce qui concerne la participation de la gendarmerie aux opérations extérieures, les OPEX, il est de tradition d’inscrire au budget des sommes qui ne correspondent pas à la réalité des dépenses, monsieur le ministre. Les effectifs concernés sont nombreux : actuellement, près de 430 gendarmes français participent à des OPEX, notamment dans les Balkans, en Afrique ou en Géorgie. De plus, 150 gendarmes vont partir en Afghanistan. Or, 15 millions d’euros de crédits sont prévus au titre des OPEX, et l’on sait très bien que cette dotation sera tout à fait insuffisante pour couvrir les dépenses. En effet, pour la seule mission en Afghanistan, on prévoit déjà un surcoût de 15 millions d’euros en 2009 et de 12 millions d’euros en 2010. Faute de financement suffisant, ces crédits seront prélevés sur d’autres postes, par redéploiements.

Je considère donc, monsieur le ministre, qu’il serait souhaitable de mieux évaluer le coût prévisible des OPEX et, en cas de dépassement, de les financer sur un fonds interministériel, à l’image de ce qui est prévu pour les armées.

Enfin, j’évoquerai la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane. J’ai eu la chance d’effectuer un « stage d’immersion » d’une semaine dans ce département français grand comme le Portugal ou le Népal, recouvert à 96 % par la forêt amazonienne et qui accueille la base spatiale de Kourou. Les quelque 900 gendarmes présents sur place accomplissent un travail colossal. Je tiens à saluer leur dévouement, leur humanisme et leur compétence, d’autant que les moyens dont ils disposent ne me semblent pas être à la mesure de leur mission.

Si l’opération « Harpie » a donné des résultats, on ne détruit qu’une dizaine de sites d’orpaillage illégaux par an alors que 800 ont été dénombrés. De plus, les orpailleurs illégaux reviennent quelques jours après avoir été chassés. Un véritable problème de souveraineté se pose donc, et le retrait des 350 soldats chargés d’accompagner la mission « Harpie » et de participer à la surveillance de la base de Kourou constituerait à mon sens un signal très négatif.

Je terminerai en exprimant mon désaccord avec certaines des conclusions de M. de Montesquiou. Si j’approuve pleinement votre jugement sur les crédits, mon cher collègue, votre analyse me paraît ne pas tenir compte de tout le travail accompli par le Sénat lors de l’élaboration de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale. L’encre de ce texte n’est pas encore sèche que déjà sont remises en cause un certain nombre des dispositions que nous avions réussi à imposer, notamment au travers de l’adoption ou de la reprise des dix-huit amendements qu’avait déposés la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Certes, vous avez raison de dénoncer les doublons, mais l’exercice a ses limites : à force d’en voir partout, on pourrait en venir à remettre en cause le bicaméralisme ! Il faut savoir que la démocratie a un prix et qu’il est très important d’avoir une force de sécurité à statut militaire et une force de sécurité à statut civil. La gendarmerie ne doit pas être cantonnée à sanctionner les excès de vitesse : l’exercice de la police judiciaire, qui a toujours fait partie de ses missions, doit lui être conservé. Une authentique démocratie doit laisser à l’autorité judiciaire le libre choix entre deux services ! (Applaudissements au banc des commissions.)