M. le président. Sur ces articles, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Le vote est réservé.
article 14
M. Michel Boutant. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article vise à prévoir le versement d’une redevance à Réseau ferré de France. Lors de l’examen de ce texte, nous avions présenté des améliorations de la péréquation ferroviaire, et notamment deux propositions fortes, attendues par les élus de terrain.
Nous avions d’abord souhaité élargir le champ de la concertation prévue pour les futures lignes à grande vitesse à la compensation des préjudices socio-économiques et fiscaux que l’implantation des lignes à grande vitesse engendre pour les communes traversées. Nous avions en effet souhaité que les concessionnaires d’infrastructures ferroviaires paient une taxe au profit des communes traversées, au prorata des emprises de ces infrastructures sur leur territoire.
Compte tenu des incidences financières engendrées pour les communes traversées par les lignes à grande vitesse et du fait que le marché des voies de chemin de fer s’ouvre à la concurrence et peut donc être assimilé à une activité économique, cette mesure nous semble normale et justifiée.
Elle était demandée par l’ensemble des maires des communes traversées par les lignes à grande vitesse ; elle l’est toujours. Elle permettrait de compenser les pertes de revenus et de recettes fiscales relatives à la disparition d’autres taxes.
Par ailleurs, nous avions aussi proposé de fixer à 10 000 euros par kilomètre la valeur locative des lignes de TGV. Le Gouvernement avait même souhaité étudier notre proposition.
Rien de semblable n’a été fait, c’est pourquoi si nous avions eu à nous prononcer, nous nous serions abstenus sur cet article, bien qu’il contienne une disposition intéressante. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit par mon collègue Michel Boutant. Pour ma part, je tiens à préciser que l’article 1er tend à transposer plusieurs directives qui ne satisfont pas les élus socialistes que nous sommes.
En effet, la directive 2007/58/CE modifiant la directive 91/440/CEE propose l’ouverture à la concurrence, au plus tard en 2010, des services ferroviaires de transport international de passagers, avec la possibilité de prendre et de laisser des voyageurs en cours de route dans un même pays. Par conséquent, il suffit qu’un train relie Bruxelles à Vintimille pour qu’il puisse entrer dans la concurrence et prendre des passagers en France.
Les États membres avaient la possibilité de restreindre ce cabotage, qui ne doit être qu’accessoire au service international, s’il met en péril l’équilibre économique d’un service exercé dans le cadre d’un contrat de service public.
Mais surtout, ils auraient dû pouvoir autoriser une autorité compétente à effectuer un prélèvement sur tous les services ferroviaires de transport de passagers dans le but de contribuer au financement des compensations d’obligations de service public. Un tel dispositif permettrait de réaliser une péréquation, si tant est que nous obtenions à terme un schéma national des infrastructures ferroviaires, promis dans le cadre du Grenelle.
En fait de péréquation, le Gouvernement ne nous propose rien dans cet article 14, sinon un faible prélèvement qui n’est rien à côté des propositions que nous lui avions faites par voie d’amendement.
M. Roland Courteau. Absolument !
M. Claude Domeizel. C’est la raison pour laquelle nous sommes inquiets, nous qui souhaitons développer, voire rouvrir des lignes, certes désaffectées pour les unes, encore déficitaires pour les autres, mais pleines de potentiel si l’on en croit les récentes expériences de réouvertures de lignes en France.
Je voudrais vous citer un exemple. Dans mon département, nous nous sommes mis d’accord sur la réouverture de la ligne reliant Saint-Auban à la préfecture, Digne. Depuis des années, le conseil général, le conseil régional, les communes desservies et les élus nationaux se battent pour faire aboutir ce projet nécessaire à l’essor de la ville préfecture et de l’essentiel du département.
Si nous avons bien compris, monsieur le ministre, devant l’indigence de la redevance prévue à l’article 14, les grandes lignes seront privilégiées, au détriment du trafic ferroviaire local.
M. Roland Courteau. Eh voilà !
M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
M. Claude Domeizel. Dans ces conditions, il n’est pas besoin d’être grand clerc pour deviner que les collectivités territoriales seront laissées seules pour assurer le financement de ce type de projet. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Simon Sutour. C’est dramatique !
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, vous comprendrez mon inquiétude et celle de mes collègues du groupe socialiste, car l’étude qui va être engagée pour la réouverture de la ligne que j’évoquais, à laquelle participent financièrement le conseil général, le conseil régional, RFF et l’État, risque d’être un marché de dupes.
Plus généralement, mes chers collègues, comment peut-on imaginer que les collectivités, à qui vous coupez les vivres, seront en mesure de suivre le mouvement de la demande en matière de transports collectifs ? Les moyens que vous leur consentez sont loin d’être à la hauteur des ambitions affichées dans le Grenelle.
Vous comprendrez, dans ces conditions, notre opposition à l’article 14 du projet de loi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Sur ces articles, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Le vote est réservé.
Article 23 quinquies
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a adopté, sur la proposition de son rapporteur, ce nouvel article 23 quinquies définissant le régime d’autorisation de services réguliers de transport routier d’intérêt national exploités à l’occasion de services réguliers de transport routier international de voyageurs.
Je regrette une nouvelle fois, après de nombreux orateurs, que le Gouvernement n’ait pas jugé utile que ce texte fasse l’objet de deux lectures par chacune des assemblées.
Cette disposition est importante et il est dommage que les parlementaires qui n’ont pas fait partie de la commission mixte paritaire n’aient pu en prendre connaissance. En effet, ce dispositif reprend, pour le transport routier de personnes, les dispositions introduites à l’article 1er sur le cabotage à l’occasion d’un service de transport ferroviaire international.
L’autorisation de prendre et de déposer des voyageurs à des arrêts situés en France sur le trajet d’un service international pourra être délivrée à condition que ces dessertes intérieures « de cabotage » présentent un caractère « accessoire » au regard de l’ensemble du trajet et qu’elles ne portent pas atteinte à l’équilibre économique d’un contrat de service public de transport de personnes.
L’État, le cas échéant sur saisine d’une collectivité intéressée, pourra limiter voire interdire des services de cabotage s’ils compromettent cet équilibre économique. Un décret définira la procédure d’autorisation, notamment les modalités de consultation des autorités organisatrices de transport qui pourraient être concernées – les régions, les départements, le Syndicat des transports d’Île-de-France, etc.
Cette disposition s’intègre dans un titre additionnel totalement nouveau par rapport au projet de loi initialement déposé par le Gouvernement ayant trait au transport routier.
C’est l’illustration parfaite du double langage qui prévaut en matière écologique : préservation de la planète et libéralisme poussé à son paroxysme ! Vous oubliez que les deux sont antagoniques, que le libéralisme pousse au pillage des ressources naturelles et que la maîtrise publique dans le secteur des transports constitue un levier majeur en termes d’environnement.
M. Jean Desessard. Absolument !
Mme Mireille Schurch. Nous souhaitons que le Gouvernement soit vigilant sur toutes les mesures qui permettront de lutter contre l’avantage concurrentiel de la route résultant de conditions sociales déplorables et de l’absence de prise en compte des externalités négatives. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Sur ces articles, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Le vote est réservé.
Article 26
M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec les articles 26 à 28 du projet de loi, nous abordons la réforme de l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’ACNUSA. C’est l’irruption du trafic aérien dans une discussion jusqu’à présent centrée sur le trafic ferroviaire…
Il était effectivement urgent de réformer l’ACNUSA afin de lui permettre d’exercer son autorité et de sanctionner de manière effective et incontestable les méfaits de la pollution sonore à proximité des aéroports.
Nous nous étions déjà mobilisés sur ce sujet à l’occasion du Grenelle II. Le texte qui nous avait alors été proposé nous avait semblé beaucoup plus cohérent que celui qui nous est soumis aujourd'hui.
Il n’aura échappé à personne que, à quelques semaines d’intervalle, dans deux textes différents, nous sommes amenés à prendre, sur un même sujet, l’ACNUSA, des mesures qui ne se ressemblent que très peu. Nous attribuons ce dysfonctionnement à la précipitation qui a présidé à l’examen de ce texte, précipitation qu’ont déjà dénoncée mes collègues.
Le groupe socialiste est donc contre cet article, qu’il juge moins satisfaisant que les dispositions du Grenelle II et qui, en outre, traduit un dysfonctionnement.
M. le président. Sur ces articles, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Michel Teston, pour explication de vote.
M. Michel Teston. Le projet de loi qui nous est soumis vise à transcrire une série de dispositions du troisième paquet ferroviaire, ainsi qu’une partie d’une directive relevant du premier paquet. Il prévoit d’abord l’ouverture à la concurrence des services internationaux de transport de voyageurs, à compter du service d’hiver, c'est-à-dire le 13 décembre 2009, ainsi que la possibilité, sous certaines conditions, de prendre et de déposer des voyageurs dans les gares françaises situées sur le trajet d’un service international.
Le texte crée également les conditions de développement des opérateurs ferroviaires de proximité, ce qui se traduit notamment par la fin du monopole de la SNCF en matière d’entretien des lignes à faible trafic, réservées aux transports de marchandises.
Le projet de loi prévoit en outre la création d’une autorité administrative indépendante chargée de la régulation. Son rôle sera de garantir un accès équitable et non discriminatoire de tous les opérateurs aux réseaux.
Les deux derniers titres du projet de loi contiennent des dispositions relatives à des concessions routières et aux conditions de travail des personnels navigants de l’aviation civile.
Je rappelle d’abord que le groupe socialiste a voté contre ce texte le 9 mars dernier. En effet, malgré l’adoption de quelques-uns de nos amendements – je rappelle qu’ils visaient respectivement à instaurer la certification des conducteurs de train, à réintégrer dans la loi d’orientation des transports intérieurs l’expression « service public de transport ferroviaire » et à affirmer le rôle de RFF en tant que gestionnaire du réseau ferré national –, ce texte ne contient pas d’avancée réelle sur l’importante question des relations entre RFF et la SNCF. Pis, l’adoption en mars dernier de l’amendement n° 131 du Gouvernement fait craindre une filialisation, à terme, des missions de gestion du trafic et des circulations sur le réseau ferré national.
Seule la mise en place d’une organisation différente, en particulier le fait de faire de RFF une filiale de la SNCF, pourrait constituer une solution, sans introduire un nouveau morcellement du système ferroviaire. Cela suppose toutefois la reprise progressive par l’État de la dette de RFF. Je rappelle que nous attendons un rapport du Gouvernement sur les solutions à mettre en place pour y parvenir, puis des signes concrets de mise en œuvre de la solution retenue.
Cela dit, l’ouverture à la concurrence des services internationaux de transport de voyageurs prévue dans le présent projet de loi constitue le point de désaccord majeur pour le groupe socialiste. À l’instar de la directive qu’elle vise à transcrire, cette disposition est inspirée par la croyance absolue qu’il n’y aurait pas d’autre solution pour développer ces services. Le groupe socialiste est en total désaccord avec cette orientation. Nous redoutons en effet un écrémage des lignes considérées comme rentables, avec une forte concurrence sur ces quelques linéaires, alors que les opérateurs historiques devront continuer, partout en Europe, à assurer le transport sur des lignes peu ou non rentables.
Pour nous, la solution est la coopération entre les grands opérateurs ferroviaires européens. Ces services existent. Il s’agit d’Eurostar, de Thalys, de Lyria, d’Alleo, d’Artesia et d’Elipsos. D’autres partenariats de ce type sont possibles.
En septembre dernier, l’Assemblée nationale a apporté un certain nombre de modifications au projet de loi, lesquelles ne répondent pas à nos attentes.
En outre, le 22 septembre, en totale violation des droits du Parlement, le Gouvernement a fait adopter un amendement visant à transférer des actifs du STIF, le Syndicat des transports parisiens et de la région d’Île-de-France, à la RATP, plaçant celle-ci en situation délicate par rapport au règlement OSP.
Cet amendement a été adopté à l’Assemblée nationale alors que le projet de loi avait déjà été examiné au Sénat. Or ce texte ayant été déclaré d’urgence, le Sénat a été privé de la possibilité d’examiner la disposition introduite par l’amendement incriminé avant la réunion de la commission mixte paritaire.
M. Guy Fischer. C’est scandaleux !
Mme Annie David. C’est inacceptable ! (Mme Catherine Procaccia proteste.)
M. Michel Teston. Certains représentants de la majorité sénatoriale ont l’air de trouver que le débat n’est pas assez long !
Mme Catherine Procaccia. Il est surtout répétitif !
M. Simon Sutour. Et ce n’est pas fini !
Mme Annie David. Prenez donc la parole si vous ne voulez pas qu’il soit répétitif !
M. Michel Teston. Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, le 27 octobre dernier, les parlementaires du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG ont défendu des amendements visant à supprimer cette disposition. Ils ont tous été rejetés.
Monsieur le ministre, le groupe socialiste avait décidé de voter contre ce projet de loi pour les raisons que j’ai évoquées dans cet hémicycle en mars dernier et que je viens de rappeler brièvement. Ce n’est pas ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, qui va nous faire changer d’avis, bien au contraire ! Nous voterons donc contre les conclusions du rapport de la commission mixte paritaire. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en trente-deux ans de vie sénatoriale, je n’avais jamais vu l’examen des conclusions d’un rapport d’une commission mixte paritaire donner lieu à autant d’étincelantes démonstrations (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG), …
M. Guy Fischer. Dont acte !
M. Jean-Pierre Fourcade. … et à autant d’avis argumentés sur le fond. Tous les problèmes de transport ont été abordés, ainsi que la question de la dette et celle de la concurrence… J’en donne acte volontiers à mes collègues de l’opposition.
Pour ma part, je tiens à dire trois choses précises.
Premièrement, le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.) Alors que la France prétend être tout à fait favorable à la construction européenne, elle est dans les tout derniers – elle est le vingt-cinquième ou le vingt-sixième des vingt-sept États de l’Union européenne – à transposer les directives européennes en droit interne.
Chers collègues de l’opposition, les reproches que vous faites au texte du Gouvernement s’adressent en fait au Conseil européen et à la Commission, …
M. Guy Fischer. Pas seulement !
M. Jean-Pierre Fourcade. … dont les conceptions sont différentes des vôtres. C’est bien naturel. Parce que nous n’avons pas les mêmes conceptions que vous, nous voterons ce texte.
Deuxièmement, monsieur le ministre, j’ai été sensible à un certain nombre des arguments avancés par mes collègues d’Île-de-France sur l’adoption à l’Assemblée nationale de l’amendement concernant la RATP. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Une telle pratique ne doit pas se renouveler, car elle est mauvaise. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) En tant qu’ancien élu régional ayant une certaine expérience, comme l’a rappelé M. Dominati, je me permettrai de vous dire qu’il n’est pas convenable d’introduire dans un texte déclaré d’urgence une disposition aussi importante par voie d’amendement.
M. Guy Fischer. Le Sénat n’a pas pu l’examiner !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je souhaite donc, monsieur le ministre, que vous disiez au Premier ministre de la part du groupe UMP que, sur un sujet aussi sensible que les transports, cela ne se fait pas d’introduire une nouvelle disposition dans le texte …
Mme Annie David. Il n’en demeure pas moins que vous allez voter ce texte !
M. Jean-Pierre Fourcade. … dans des conditions aussi peu convenables pour le Parlement. Et c’est un élu du groupe UMP qui vous charge de le lui dire ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Troisièmement, la grande différence entre vous et nous, mes chers collègues, porte sur l’introduction de la concurrence au sein de nos systèmes de transport. Vous pensez, vous, qu’une coopération oligopolistique entre les grandes organisations européennes est préférable. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) C’est ce que M. Teston a déclaré à quatre reprises !
Vous préférez la coopération oligopolistique entre les grands systèmes européens plutôt que l’introduction de la concurrence. Il me semble malheureusement que vous avez oublié un élément essentiel, c’est que nous ne sommes pas seuls en Europe ! Il faudra bien vous faire à la concurrence lorsque des sociétés hollandaises, allemandes, italiennes et espagnoles s’empareront de parts de marché. Il va bien falloir que vous compreniez que l’introduction de la concurrence dans le secteur des transports internationaux est nécessaire à l’évolution de nos ensembles de transport.
Je veux bien que l’on cherche à protéger les collectivités territoriales – comme je l’ai entendu dire – et à ne pas leur imposer de charges supplémentaires – comme l’a souvent dit notre ami M. Haenel –, je veux bien également que l’on cherche à ne pas laisser les usagers sur le quai, parce qu’une grève est annoncée trop tardivement (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG) ou en raison de dysfonctionnements du système. Mais l’introduction de la concurrence tant dans le domaine du fret que dans celui des transports internationaux de voyageurs me paraît importante. Le Gouvernement a accepté de remettre un rapport sur ces questions au Parlement, nous verrons dans quelques années ce qu’il en est.
Comme je l’ai déjà dit, nous voterons ce texte, monsieur le ministre, mais n’oubliez pas l’adresse au Premier ministre que je vous prie de transmettre au nom du groupe UMP. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Comme je l’ai dit tout à l’heure, si nous ne devions avancer qu’une seule raison – il y en a bien sûr plusieurs – pour justifier notre opposition à ce projet de loi, nous évoquerions l’adoption à l’Assemblée nationale de l’amendement sur le STIF et sur la RATP, comme vient de le dire M. Fourcade, dont je salue l’intervention. Si je tiens à nouveau à évoquer l’adoption de cet amendement, c’est parce qu’elle est la raison essentielle de mon opposition résolue, en tant qu’élu parisien, à ce projet de loi.
Monsieur Fourcade, même si je salue votre intervention, je dois dire que j’ai déjà entendu le discours que vous avez tenu. Je ne suis pas un ancien sénateur, mais, depuis 2004, année où je suis devenu membre de cette assemblée, j’ai souvent entendu les parlementaires de la majorité protester auprès du Premier ministre et s’élever contre le fait de devoir perpétuellement jouer les godillots. Ainsi, vos protestations figurent au Journal officiel et vous pouvez les montrer à vos électeurs, mais cela ne vous empêche pas de voter des deux mains les textes qui vous sont soumis. Si vous voulez que cela cesse un jour, ne les votez pas !
Mme Nicole Bricq. Ne votez pas la suppression de la taxe professionnelle !
M. David Assouline. Vous servirez ainsi non pas l’UMP ou la gauche, mais le Parlement et la démocratie.
Mme Nicole Bricq. Ne votez pas le lancement du grand emprunt non plus !
M. David Assouline. Monsieur le président, je rappelle que l’article 2 bis A, que le Sénat n’a pas pu examiner, a été inséré à l’Assemblée nationale en cours d’examen du projet de loi par voie d’amendement et que cet amendement faisait sept pages. Ce n’est pas rien ! L’article ainsi inséré modifie profondément le paysage des transports en commun de toute l’Île de France. Je suis indigné !
J’ai cherché à comprendre les raisons d’un procédé aussi brutal. La seule raison qui nous a été donnée, c’est qu’il fallait aller vite et qu’il était urgent de transposer les directives européennes.
Or je constate que l’échéance d’entrée en vigueur du règlement dit « OSP » sur l’ouverture à la concurrence des services publics de transport était connue depuis le 3 décembre 2007. Et vous voulez nous faire croire que vous ne l’avez découverte que récemment, une nuit, à l’Assemblée nationale !
À la veille de l’entrée en vigueur de ce règlement, vous bouleversez de fond en comble les principes de gouvernance des transports en Île-de-France, et ce sans aucune concertation, ni avec le président du STIF, également président du conseil régional d’Île-de-France, ni avec les départements, ni avec la Ville de Paris, ni avec les associations d’usagers !
Mes chers collègues, avec ce texte, le Gouvernement dépouille le STIF, et à travers lui les collectivités locales franciliennes, de ses missions et de ses moyens, notamment des capacités d’emprunt qui lui permettraient d’investir massivement dans les transports publics dans l’intérêt de tous.
J’ai bien entendu l’argument qui a été avancé par M. Fourcade. Selon lui, pour les Européens convaincus que nous sommes, il est très regrettable que notre pays soit dans les tout derniers à transposer les directives communautaires en droit interne.
M. Jean-Pierre Fourcade. C’est vrai !
M. David Assouline. Mais vous savez, monsieur Fourcade, c’est beaucoup plus simple dans les pays où il n’y a pas de services publics !
En France, nous avons des services publics. Et lorsque certains envisagent de les remettre en cause, il est normal que nous réclamions un véritable débat et la mise en place de garde-fous !
Mon cher collègue, j’espère que vous êtes comme nous attaché à la défense du service public. Se déplacer, recevoir du courrier, aller à l’école ou bénéficier de soins sont des enjeux très importants, et ce n’est pas parce qu’il existe une directive européenne que nous devrions obtempérer aveuglément.
Le service public est notre identité fondamentale ! Nous sommes connus dans le monde entier, notamment en Europe, pour avoir quelque chose de plus que les autres sur ce point. D’ailleurs – tout le monde s’accorde pour le reconnaître –, si notre pays a plutôt mieux résisté que d’autres à la crise financière internationale, c’est grâce à son modèle social ! (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)
Le règlement OSP vise avant tout les modalités d’exploitation des services de transport de voyageurs, en prévoyant à terme l’ouverture des réseaux à la concurrence.
Mme Catherine Procaccia. Le temps de parole est terminé !
M. David Assouline. Mais est-ce une raison pour bouleverser en profondeur l’organisation des transports en Île-de-France ?
Car, monsieur le ministre, telles seront bien les conséquences de l’amendement du Gouvernement, qui concerne des sujets fondamentaux, comme la gestion de l’infrastructure et la propriété des biens, dont il n’est nullement question dans le règlement OSP. Avec cet amendement, la RATP devient le gestionnaire de l’infrastructure pour les lignes de métro et pour les lignes de RER qu’elle exploite, ainsi que le bénéficiaire de l’essentiel des biens affectés au réseau de transport. Les modalités financières de ce transfert de propriété sont renvoyées pour l’essentiel à un décret en Conseil d’État, ce qui laisse peu de visibilité sur l’amputation du budget du STIF.
Mme Catherine Procaccia. Le règlement vaut pour tout le monde, monsieur Assouline !
M. David Assouline. Après le coup de force qui s’est produit nuitamment à l’Assemblée nationale, vous pouvez bien me laisser m’exprimer encore deux minutes !
Le fait que les modalités financières du transfert de propriété soient renvoyées à un décret en Conseil d’État est l’un des principaux griefs que nous formulons aujourd’hui à l’encontre de ce projet de loi. D’ailleurs, nous envisageons de le déférer au Conseil constitutionnel. (Vives marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. David Assouline. Je conclus, monsieur le président, car je préfère répondre positivement à votre demande plutôt qu’à celle d’une majorité vociférant, refusant le débat et se bornant à voter tous les textes présentés par le Gouvernement !
Monsieur le ministre, en présentant ce projet de loi, vous déclarez la guerre aux élus franciliens. C’est pourquoi nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite m’exprimer à la fois sur la forme et sur le fond.
Sur la forme, je ferai remarquer, comme cela a été souligné par plusieurs orateurs, que le recours à la procédure d’urgence nous a privés d’un débat en deuxième lecture, notamment sur la disposition relative au STIF, qui a fait tant couler d’encre et tant dépenser de salive aujourd'hui. La frustration de tous les sénateurs, de gauche comme de droite, était perceptible, et la nôtre est très vive.
Le recours à une telle procédure a empêché une nouvelle discussion et le fait que le Gouvernement ait déposé un amendement extraordinairement long sur un sujet d’une telle ampleur…