Article 15
I. - La section 12 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du même code, telle qu’elle résulte du I de l’article 9, est intitulée : « Procédure » et comprend l’article L. 311-50.
II. - Au second alinéa de l’article L. 311-50 du même code, les mots : « du juge de l’exécution sur les mesures mentionnées à l’article L. 331-7 » sont remplacés par les mots : « de la commission imposant les mesures prévues à l’article L. 331-7 ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures prévues à l’article L. 331-7-1 ».
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 41, présenté par M. Leclerc, est ainsi libellé :
Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - À la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 311-50 du code de la consommation, les mots : « de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « du premier incident de paiement non régularisé à peine de forclusion. Le simple dépassement du découvert autorisé ne constitue pas un incident de paiement non régularisé tant que le découvert reste inférieur au montant maximum autorisé par le contrat initial entre le prêteur et le bénéficiaire du crédit. »
La parole est à M. Dominique Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Cet amendement a pour objet, d’une part, de restaurer la sécurité juridique en clarifiant la définition du point de départ du délai de forclusion, et, d’autre part, de ne pas décourager les prêteurs d’adopter une attitude tolérante en cas de non-remboursement d’une première échéance, spécialement en matière de crédit renouvelable.
Une clarification s’imposait à cet égard. En effet, la jurisprudence dominante conduit à condamner toute mansuétude du prêteur, puisque les prêteurs tolérants sont déclarés forclos dès lors qu’ils n’ont pas pris d’initiative judiciaire rapide pour contraindre l’emprunteur au remboursement du crédit. Il convient que les prêteurs ne soient pas incités à agir en justice dès la première échéance impayée et qu’une tolérance de leur part ne risque pas d’être sanctionnée par la perte intégrale et automatique de leurs droits.
Mme la présidente. Les amendements nos 42 et 103 sont identiques.
L’amendement n° 42 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L’amendement n° 103 est présenté par M. Béteille.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Dans la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 311-50 du même code, les mots : « de l’événement » sont remplacés par les mots : « du premier incident de paiement non régularisé ».
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° 42.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Cet amendement a pour objet de définir précisément le point de départ du délai de forclusion, qui peut être marqué par un « incident de paiement non régularisé ».
Cette clarification permettrait de réduire le contentieux entre prêteurs et emprunteurs. Il est important, de mon point de vue, que le délai biennal de forclusion trouve un point de départ indiscutable. La notion de « défaillance de l’emprunteur » peut se comprendre de plusieurs manières, et il serait opportun de dissiper la confusion sur ce point.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Béteille, pour présenter l’amendement n° 103.
M. Laurent Béteille. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Dominati, rapporteur. Ces trois amendements tendent à préciser de manière objective le point de départ du délai de forclusion de deux ans applicable aux actions du prêteur contre l’emprunteur, en retenant la notion de « premier incident de paiement non régularisé ».
Les deux amendements identiques de Mme Des Esgaulx et de M. Béteille se distinguent de celui de M. Leclerc en ce qu’ils ne comportent pas de précision spécifique sur la notion de découvert bancaire.
La question de la forclusion et de son régime fait débat depuis longtemps, mais la jurisprudence semble l’avoir clarifiée en partie et trouvé un équilibre.
La commission spéciale s’est déclarée ouverte à l’introduction de toute précision qui s’avérerait nécessaire, mais s’est interrogée sur le caractère opérationnel du dispositif présenté au travers de ces amendements. Pour cette raison, elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Leclerc, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
Je comprends bien entendu l’objectif de clarification que vous visez en proposant une définition du point de départ du délai de forclusion de deux ans prévu par le code de la consommation. Certes, la Cour de cassation a défini le point de départ du délai de forclusion comme étant le « premier incident de paiement non régularisé », cependant le dispositif présenté ne me paraît pas particulièrement adéquat ni efficace, en particulier pour les cas où il y a caution.
En effet, dans cette hypothèse, la notion de premier incident de paiement non régularisé n’est pas opérationnelle. Elle est peu protectrice pour la caution ayant payé la dette en lieu et place de l’emprunteur : si le dispositif présenté était adopté, le délai dont il dispose pour se retourner contre ce dernier serait très raccourci.
Ce raccourcissement du délai accentuerait en outre la pression s’exerçant sur l’emprunteur, puisque le prêteur, ayant moins de temps devant lui pour résoudre le contentieux par voie de médiation, de régularisation ou, parfois, de renégociation, devra très vite, sauf à encourir le risque de forclusion, engager une action judiciaire.
Si je comprends le sens de ces amendements, je ne suis donc pas certaine qu’ils constituent une bonne réponse au problème soulevé. Je propose de demander à la Chancellerie de réfléchir à une meilleure définition du point de départ du délai de forclusion, ne portant pas préjudice à la caution et n’exposant pas l’emprunteur à des poursuites judiciaires très précoces. Il est au contraire souhaitable de mettre en place un mécanisme qui permette de faciliter le recours à la médiation et à la renégociation des modalités du prêt, voie préférable à l’engagement de procédures judiciaires longues et dont l’issue n’est parfois favorable à aucune des deux parties.
Au bénéfice de cette proposition, je suggère à leurs auteurs de retirer ces amendements. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Philippe Dominati, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Leclerc, l’amendement n° 41 est-il maintenu ?
M. Dominique Leclerc. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 41 est retiré.
Madame Des Esgaulx, l'amendement n° 42 est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 42 est retiré.
Monsieur Béteille, l'amendement n° 103 est-il maintenu ?
M. Laurent Béteille. Compte tenu des précisions apportées par Mme la ministre, je le retire.
Il faut effectivement clarifier la situation, dans l’intérêt de tous, emprunteurs, prêteurs et cautions, comme vous l’avez souligné, madame la ministre. Le flou qui existe actuellement doit être levé.
Madame la ministre, j’ai pris note de votre engagement. J’espère que les changements à venir au sein de la Chancellerie n’empêcheront pas qu’il soit tenu… Nous comptons sur vous pour qu’il en soit ainsi.
Mme la présidente. L'amendement n° 103 est retiré.
Je mets aux voix l'article 15.
(L'article 15 est adopté.)
TITRE II
AUTRES DISPOSITIONS RELATIVES AU CRÉDIT
CHAPITRE IER
CONTRAT DE CRÉDIT IMMOBILIER ET ASSURANCE EMPRUNTEUR
Article 16
Le 1° de l'article L. 312-2 du code de la consommation est ainsi rédigé :
« 1° Pour les immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation :
« a) Leur acquisition en propriété ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en propriété ;
« b) Leur acquisition en jouissance ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en jouissance ;
« c) Les dépenses relatives à leur réparation, leur amélioration ou leur entretien lorsque le montant du crédit est supérieur à 75 000 € ;
« d) Les dépenses relatives à leur construction. » – (Adopté.)
Article 17
I. - Le 4° bis de l'article L. 312-8 du même code est ainsi rédigé :
« 4° bis Mentionne que l'emprunteur peut souscrire auprès de l'assureur de son choix une assurance dans les conditions fixées à l'article L. 312-9. »
II. - L'article L. 312-9 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « offre » est remplacé par le mot : « propose », les mots : « ou exige de lui » sont supprimés, et le mot : « collective » est remplacé par les mots : « de groupe » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un prêteur ne peut pas refuser en garantie un autre contrat d'assurance emprunteur dès lors que ce contrat présente un niveau de garantie équivalent au contrat d'assurance de groupe qu'il propose. »
Mme la présidente. L'amendement n° 84 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Mélot, Dumas, Hummel, Bout, Sittler et Desmarescaux et MM. Cambon, Revet et Gournac, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du 2° du II de cet article, supprimer les mots :
en garantie
et remplacer les mots :
de garantie
par les mots :
de couverture
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 17.
(L'article 17 est adopté.)
Article additionnel après l'article 17
Mme la présidente. L'amendement n° 15, présenté par Mmes Bricq et Chevé, MM. Sueur, Angels, Anziani, Collombat et Fauconnier, Mme Ghali, MM. Guérini, Hervé, Patriat, Raoul, Teulade, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 2422 du code civil est abrogé.
II. - L'article L. 313-14 du code de la consommation est ainsi rédigé :
« Art. L. 313-14. - Les dispositions de la présente section s'appliquent aux opérations de crédit consenties à titre habituel par toute personne physique ou morale relevant des dispositions du chapitre Ier relatif au crédit à la consommation. »
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement visant à supprimer le dispositif de l’hypothèque rechargeable ne vous surprendra pas, mes chers collègues, puisque nous sommes déjà intervenus à plusieurs reprises sur ce sujet.
Il s’agit pour nous de protéger l’emprunteur contre les risques de ce type de crédit, que la crise financière internationale a révélés au grand jour.
Le mécanisme de l’hypothèque rechargeable s’inspire en fait des modèles américain et britannique. L’idée du Gouvernement était de dynamiser l’hypothèque « en prenant en compte l’évolution de la vie, avec ses aléas et ses désirs : ce n’est plus maison ou voiture, mais maison et voiture ». Tout le monde aura reconnu l’auteur de ce slogan publicitaire pour un projet que la majorité avait soutenu…
Malheureusement, la fin du film ne fut guère glorieuse : nombreux ont été ceux qui ont vu leur maison saisie. On ne peut donc que se féliciter de l’insuccès du recours facilité à l’hypothèque rechargeable : nous l’avons échappé belle ! Chaque jour, la conjoncture économique vient nous conforter dans notre opinion : la chute des prix de l’immobilier aurait eu des conséquences dramatiques si les emprunteurs s’étaient tournés vers ce mécanisme.
Je sais, monsieur le rapporteur, que vous nous objecterez que des différences techniques existent entre le système français et celui qui est en vigueur aux États-Unis. C’est heureux ! Toutefois, comparaison n’est pas raison, et je préférerais que l’on protège un peu plus nos concitoyens contre de telles pratiques. Tel est précisément l’objet de notre amendement, mais nous sommes sans illusions sur le sort qui lui sera réservé…
M. Charles Revet. Quel fatalisme !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Dominati, rapporteur. Mon cher collègue, l’hypothèque rechargeable, mise en place en 2006, est un dispositif intelligent et souple. Il permet en effet à l’emprunteur de réaffecter en partie l’hypothèque immobilière, en fonction des remboursements déjà intervenus, à la garantie d’autres prêts.
De surcroît, contrairement à ce qui se passe outre-Atlantique, un garde-fou a été instauré, puisqu’il n’est pas possible de réévaluer la valeur du bien apporté en garantie. L’emprunteur ne peut arguer de la croissance du marché immobilier pour demander un relèvement de l’hypothèque.
Au demeurant, on ne compte qu’environ 10 000 dossiers pour l’ensemble du territoire.
M. Daniel Raoul. Heureusement !
M. Philippe Dominati, rapporteur. On ne peut donc pas dire que ce mécanisme ait eu une forte incidence, quelle qu’elle soit.
Mme Nicole Bricq. Mais pourquoi le maintenir, si cela ne fonctionne pas !
M. Philippe Dominati, rapporteur. Dans le contexte économique actuel, je considère qu’il s’agit d’un produit innovant, doté d’une certaine souplesse et qui peut rendre un grand nombre de services. Ces trois points justifient selon moi le maintien de ce dispositif, sur lequel on peut bien sûr porter une appréciation différente.
Nous avons longuement débattu de cet amendement au sein de la commission. Je vous confirme, monsieur Raoul, que l’avis de celle-ci est défavorable, mais le débat reste ouvert. Si un fort déséquilibre apparaissait dans l’avenir, il appartiendrait au Parlement et au Gouvernement de prendre les dispositions qui s’imposent. Pour l’heure, il faut laisser sa chance à ce mécanisme.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Nous maintenons cet amendement de principe.
Monsieur le rapporteur, vous nous indiquez qu’à ce jour il n’a été recouru à l’hypothèque rechargeable que dans quelque 10 000 cas. Si ce dispositif ne rencontre pas le succès, pourquoi le maintenir ? Il faut lui laisser sa chance, dites-vous, car, dans un contexte plus favorable, cela pourrait fonctionner. Mais cette chance dont vous parlez représente en fait un risque supplémentaire pour les emprunteurs !
On a d'ailleurs eu la démonstration des conséquences que la mise en œuvre d’un tel mécanisme, qui n’est pas identique au modèle américain ou britannique mais s’en inspire très fortement, pouvait entraîner. Je n’aurai pas la cruauté de rappeler que, au moment de sa création, en 2006, ses promoteurs arguaient qu’il fallait imiter ceux qui dominaient la finance, c’est-à-dire les Anglo-Saxons !
Je sais bien que vous faites du maintien de ce dispositif une position de principe, pourtant il serait tout de même plus raisonnable, pour l’heure, de le supprimer, quitte à en revoir ultérieurement le mécanisme. Mais vous préférez attendre la sortie de crise et la reprise pour repartir dans la même voie et les mêmes excès, sans tirer aucun enseignement de ce qui se passe depuis des mois. Cela, nous ne pouvons l’accepter !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Madame Bricq, je ne peux pas vous laisser dire que l’on poursuit dans la même voie, comme si rien ne s’était passé.
Toute l’action du Président de la République, toute l’action que je mène, à Bruxelles et ailleurs, sur toutes ces questions de réglementation financière visent précisément à changer les règles du jeu et à faire en sorte que les différents acteurs, qui ont une propension naturelle à continuer à travailler comme avant, avec des instruments très sophistiqués et très spéculatifs et en s’accordant de forts bonus, modifient leur comportement. Il est de notre responsabilité d’établir de nouveaux modes de régulation.
La supervision bancaire européenne et la mise en œuvre des préconisations du rapport de Larosière sont des illustrations de notre détermination à changer les règles pour que les mêmes excès ne puissent se reproduire. Je n’épiloguerai pas davantage, mais je ne voulais pas laisser subsister le moindre doute quant à notre volonté de prévenir le renouvellement des erreurs passées.
M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement n'est pas adopté.)
CHAPITRE II
REGROUPEMENT DE CRÉDITS
Article 18
I - Les sections 7 et 8 du chapitre III du titre Ier du livre III du code de la consommation deviennent respectivement les sections 8 et 9, et les articles L. 313-15 et L. 313-16 deviennent respectivement les articles L. 313-16 et L. 313-17.
II. - Au chapitre III du titre Ier du livre III du même code, il est inséré une section 7 ainsi rédigée :
« Section 7
« Regroupement de crédits
« Art. L. 313-15. - Lorsque les crédits mentionnés à l'article L. 311-2 font l'objet d'une opération de crédit destinée à les regrouper, le nouveau contrat de crédit est soumis aux dispositions du chapitre Ier du titre Ier du livre III.
« Lorsqu'une opération de crédit destinée à regrouper des crédits antérieurs comprend un ou des crédits immobiliers dont la part relative ne dépasse pas un seuil fixé par décret en Conseil d'État, le nouveau contrat de crédit est soumis aux dispositions du chapitre Ier du titre Ier du livre III. Lorsque cette part relative dépasse ce seuil, le nouveau contrat de crédit est soumis aux dispositions du chapitre II du titre Ier du livre III.
« Lorsqu'une opération de crédit est destinée à regrouper des crédits mentionnés à l'article L. 312-2, le nouveau contrat de crédit est également soumis aux dispositions du chapitre II du titre Ier du livre III.
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités selon lesquelles les opérations de crédit mentionnées aux alinéas précédents sont conclues, afin de garantir la bonne information de l'emprunteur. »
Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.
Mme Odette Terrade. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous souhaitons rappeler, à cet instant, les effets pervers du malendettement ou du surendettement des ménages.
Lorsque les ménages sont en situation de difficulté financière chronique ou durable, les conditions de crédit qui leur sont faites sont particulièrement rigoureuses. Alors que l’on envisage la mise en place du fichier positif, tout se passe, en matière de crédit à la consommation, comme si les ménages étaient, à l’instar des établissements de crédit à qui ils s’adressent, soumis à une notation déterminant la qualité des services financiers auxquels ils peuvent prétendre.
Dans ce contexte, une activité financière particulière se développe depuis quelques années : le rachat de crédits. Cette activité rencontre un certain succès, soutenu par des campagnes publicitaires assez agressives tant sur les réseaux électroniques que dans certains titres de la presse populaire et familiale. M. Mercier y a tout à l’heure fait allusion.
Nos concitoyens les plus modestes, les ménages appartenant aux couches moyennes précarisées, confrontés à la faible progression de leur pouvoir d’achat et à la croissance, autrement plus rapide, tant de leurs charges quotidiennes que de leurs diverses mensualités de remboursement constituent le cœur de cible des officines spécialisées dans le rachat de crédits.
Les opérations de rachat de crédits sont présentées de façon particulièrement alléchante, en utilisant la thématique traditionnelle de la simplification : un seul créancier, un prélèvement unique à date fixe au lieu de plusieurs à dates variables, une plus grande souplesse dans la gestion du budget familial, etc. Tous les arguments sont bons ! Cette présentation avantageuse donne souvent à croire que le montant total des remboursements à effectuer se trouvera réduit.
Or, ces officines ne sont bien évidemment pas des sociétés philanthropiques. Leur mode de fonctionnement est fort simple : il consiste à étaler sur une période plus longue que la durée des différents crédits en cours le remboursement du même capital et à accroître, de ce fait, le volume des intérêts.
Une telle opération ne réduit aucunement la dette d’un ménage, quelles qu’en soient les modalités. Elle ne fait que la rendre plus supportable, précisément grâce à l’allongement de la durée d’amortissement.
Le rachat de crédits peut même se révéler désavantageux, car lorsque l’amortissement de certains crédits est pratiquement achevé, il n’y a souvent aucun intérêt immédiat à les inclure dans une opération globale, le remboursement du capital résiduel s’en trouvant alourdi.
Comme la publicité mensongère est particulièrement dommageable en matière financière, nous proposons que les conditions de l’opération de rachat de crédits soient clairement spécifiées au demandeur, qui doit souvent affronter, dans l’urgence, les plus grandes difficultés. Quand on est sur la corde raide et que survient un événement inattendu mettant en cause le fragile équilibre du ménage, tout est possible, surtout le pire !
C’est pourquoi les officines de rachat de crédits doivent jouer « cartes sur table » et faire état, dans l’offre initiale, de l’ensemble des frais exposés, quelle que soit leur nature. Cela inclut, entre autres, les indemnités de remboursement anticipé souvent réclamées par les prêteurs quand le crédit est soldé de manière prématurée. L’emprunteur ne doit décider éventuellement de recourir à l’opération de rachat qu’en toute connaissance de cause.
Puisque nous allons bientôt parler de la moralisation des pratiques d’intermédiation financière, autant rappeler dès maintenant qu’il serait peut-être intéressant que les autorités de place se penchent plus attentivement encore sur l’activité des officines de rachat de crédits, leur déontologie, leurs pratiques commerciales et la teneur de l’information qu’elles diffusent auprès du public.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. Je souhaite appeler l’attention sur la très grande diversité des prestataires de services qui interviennent dans ce domaine du rachat de crédits : on y trouve le meilleur comme le pire.
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. La question est de savoir, et la commission spéciale n’est pas parvenue à trancher, s’il ne serait pas souhaitable d’encadrer cette activité.
Mme Nicole Bricq. Si !
M. Philippe Marini, président de la commission spéciale. On peut tenter une comparaison avec l’activité de conseil en investissements financiers, où les opérateurs sont également très divers. Le législateur a encadré cette activité par un agrément donné collectivement aux professionnels membres d’une association qui s’engage, au travers d’une charte, sur le respect de principes déontologiques.
Peut-être serait-il utile de s’inspirer de cet exemple pour encadrer l’activité des courtiers procédant à des opérations de rachat de crédits. Dans certains cas, ces derniers peuvent vraiment rendre service à des personnes endettées, à condition de travailler en toute transparence. Le texte représente un progrès à cet égard, notamment en matière de publicité, mais sans doute faudrait-il aller plus loin encore. La navette peut nous en donner l’occasion. Je formule cette suggestion, sur laquelle Mme la ministre voudra peut-être se prononcer tout à l’heure.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 29 est présenté par Mmes Bricq et Chevé, MM. Sueur, Angels, Anziani, Collombat et Fauconnier, Mme Ghali, MM. Guérini, Hervé, Patriat, Raoul, Teulade, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 58 est présenté par Mmes Terrade et Pasquet, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 313-15 du code de la consommation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute publicité ou information relative à une opération de crédit consistant en des regroupements de crédits antérieurs doit mentionner le surcoût total de l'opération dont le montant est obtenu par la différence entre le coût total de la nouvelle opération et celui de chacune des opérations à laquelle elle se substitue. »
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° 29.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président de la commission spéciale, vous avez lancé le débat. Effectivement, nous souhaitons tous améliorer l’information fournie aux emprunteurs, afin qu’ils puissent décider en toute connaissance de cause de faire procéder ou non au regroupement de leurs crédits. Il a été observé que le développement de cette activité est parallèle à celui du crédit revolving. (M. le président de la commission spéciale acquiesce.) Je ne sais pas si ce couple est légitime, mais il existe bel et bien !
L’allégement des mensualités permis par le regroupement et le rééchelonnement sur une durée plus longue des différents crédits induit souvent l’emprunteur en erreur, faute d’une information suffisante. Mme Terrade a fait allusion à des publicités très alléchantes ; j’en ai vu une, récemment, qui titrait : « Mieux gérer son budget ». Cette promesse est bien sûr fallacieuse, car ce n’est pas de cela qu’il s’agit.
Or cette activité ne fait actuellement l’objet, me semble-t-il, d’aucune réglementation. Il y a donc là un vide juridique, ce qui entraîne une forte insécurité. Il conviendrait, au travers de ce texte, de remédier à cette situation. M. le président de la commission spéciale a eu raison d’attirer l’attention de Mme la ministre sur ce point et de souligner que le pire côtoyait le meilleur au sein de la profession. Pour l’heure, l’emprunteur n’est pas en mesure de faire un choix éclairé et de comparer les offres qui peuvent lui être faites. Du reste, M. Marini avait retenu notre suggestion dans sa proposition de loi.
Si l’article 18 du projet de loi évoque le sujet, il renvoie au décret le soin de préciser les modalités des opérations de regroupement de crédits. Il nous semble cependant que le Parlement est tout à fait dans son rôle lorsqu’il entend introduire une disposition visant à protéger l’emprunteur et à lui permettre de bénéficier d’une meilleure information, quitte à ce que la rédaction soit affinée et complétée au cours de la navette. Nous devrions tous être d’accord sur ce point, pourtant on nous objecte régulièrement qu’il ne faut pas surcharger le processus législatif…