M. le président. Le sous-amendement n° 1359, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa (2°) de l’amendement n° 1287, après les mots :
applicables à ses personnels
insérer les mots :
, en particulier celles des conflits d’intérêt,
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Ce sous-amendement vise à corriger la rédaction du 2° proposée dans l’amendement du Gouvernement, car celle-ci est un peu ambiguë.
Il y est en effet question d’adapter les règles déontologiques. Or, pour nous, la déontologie est une exigence rigoureuse qui ne peut guère s’accommoder d’adaptations. Aussi est-il utile d’indiquer clairement que ce 2° n’emporte aucun renoncement. Il faut donc préciser que ce que la déontologie vise le plus souvent à prévenir, « le conflit d’intérêt », ne figurera absolument pas parmi les pratiques tolérées.
M. le président. Le sous-amendement n° 1358, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Après le quatrième alinéa (2°) de l’amendement n° 1287, insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° D’améliorer les capacités de recherche en matière de toxicologie ;
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Ce sous-amendement tend à ce que le rapprochement des deux agences soit l’occasion d’étoffer les capacités de la France en matière de toxicologie.
Les toxicologues se font de plus en plus rares et nous sommes dépourvus face à nos voisins européens, au point d’allonger les délais de certaines expertises, de ne pas répondre en temps et en heure aux sollicitations liées à l’application de REACH, au point d’être souvent aux limites de l’indépendance des conclusions, la rareté créant la tolérance quant aux conflits d’intérêt.
De plus, la formation d’un toxicologue est longue et s’appuie sur des années de mise en situation, un peu à la manière de l’apprentissage.
M. le président. Je suis saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 1300 est présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Le sous-amendement n° 1304 est présenté par MM. Godefroy, Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier, Blandin et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mmes Ghali et Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mme Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Après le quatrième alinéa (3°) de l’amendement n° 1287, insérer huit alinéas ainsi rédigés :
...° De préciser la composition du conseil d’administration qui comprendra, outre son président, six collèges comprenant,
- pour le premier, des représentants de l’État,
- pour le deuxième, des représentants des collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que du Parlement,
- pour le troisième des représentants des organisations syndicales représentatives d’employeurs,
- pour le quatrième des représentants des organisations syndicales représentatives de salariés
- pour le cinquième des représentants des associations agréées compétentes en matière de protection de l’environnement, de la santé, de la défense des consommateurs et d’associations d’aide aux victimes du travail ou de maladies professionnelles,
- pour le sixième de personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines relevant des missions de l’établissement ainsi que des représentants du personnel de l’établissement.
...° De préciser les conditions de saisine par le Gouvernement, par les organismes représentés au conseil d’administration ainsi que par les associations agréées au niveau national dans les domaines de la protection de l’environnement, de la santé, de la défense des consommateurs ainsi que par les associations d’aide aux victimes du travail ou de maladies professionnelles représentées au sein du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.
La parole est à M. François Autain, pour présenter le sous-amendement no 1300.
M. François Autain. Je regrette qu’un problème aussi important que celui des agences et de leur architecture soit traité au détour d’un simple amendement portant article additionnel.
M. François Autain. Il aurait à lui seul nécessité un projet de loi.
Vous avez fait allusion aux nombreux rapports qui lui ont été consacrés : je citerai notamment le rapport Girard ainsi que l’excellent rapport de notre collègue Mme Bricq, et je suis désolé de constater que vous n’en tenez absolument pas compte.
M. François Autain. Non, car il aurait fallu réaliser la fusion de l’AFSSA et l’AFSSET, dont la nécessité reste d’ailleurs à démontrer, en prenant également en considération les autres agences. L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ne mérite-t-elle pas, et d’autres agences avec elle, que l’on s’interroge, par exemple, sur les redondances, les enchevêtrements, et que l’on réétudie son périmètre ?
Une fois encore, madame la ministre, vous envisagez le problème par le petit bout de la lorgnette, si je puis m’exprimer ainsi.
Si l’on ajoute à cela le recours aux ordonnances, cela frise la provocation !
Vous réaffirmez avec constance que vous êtes contre les ordonnances mais que vous n’avez pas le choix, et vous semblez penser que cela suffit pour vous autoriser à recommencer encore et toujours. Mais non ! Nous ne sommes toujours pas d’accord avec le recours aux ordonnances, et encore moins dans ce cas précis et dans ces conditions.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. N’oubliez pas que je suis pharmacienne : j’aime les ordonnances ! (Sourires.)
M. François Autain. Nous aurions souhaité que la question des agences soient examinée dans son ensemble au lieu que l’on se contente d’une petite fusion à la sauvette, et qui pose en outre de très nombreux problèmes.
Nous craignons notamment que cette fusion ne se traduise dans les faits par une marginalisation des compétences de l’AFSSET en matière de santé. S’il est vrai que l’AFSSET partage avec l’AFSSA un certain nombre de compétences et de domaines d’expertise, notamment pour ce qui est des risques chimiques, elle a des compétences particulières et exclusives dans le domaine du travail. Nous redoutons, en particulier, la dissolution de cette compétence spécifique, qui est pourtant récente – c’est lorsqu’on la lui a conférée que l’Agence française de sécurité sanitaire environnementale est devenue l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. Et nous la redoutons d’autant plus, madame la ministre, que vous avez refusé l’ensemble de nos amendements tendant à intégrer la santé au travail dans les compétences des agences régionales de santé.
En défendant le sous-amendement no 1300, nous voulons nous faire l’écho des inquiétudes exprimées par de nombreuses associations quant à la participation au conseil d’administration du futur établissement des différentes catégories d’usagers qui siègent aujourd’hui au conseil d’administration de chacune des deux agences. Il ne serait pas acceptable que cette fusion se traduise dans les faits par un recul de la démocratie.
Par ailleurs, nous souhaiterions que soient précisées les conditions de saisine par le Gouvernement, par les organismes représentés au conseil d’administration ainsi que par les associations agréées au niveau national dans les domaines de la protection de l’environnement, de la santé, de la défense des consommateurs ainsi que par les associations d’aide aux victimes du travail ou de maladies professionnelles représentées au sein du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.
En tout état de cause, si notre sous-amendement et celui de nos amis du groupe socialiste, qui est identique, n’étaient pas adoptés, nous serions contraints de voter contre l’amendement du Gouvernement. Dans le cas contraire, les craintes que je viens d’exposer au sujet de la dissolution de la compétence dans le domaine de la santé au travail nous conduiront à nous abstenir.
M. Guy Fischer. Parfait !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter le sous-amendement n° 1304.
M. Jean-Pierre Godefroy. L’amendement n° 1287, par lequel le Gouvernement propose de procéder par ordonnance à la fusion de l’AFSSET et de l’AFSSA, nous inspire de sérieuses réserves.
D’abord, parce qu’il s’agit de procéder par voie d’ordonnance. Vous connaissez nos réticences à cet égard, madame la ministre. Cette procédure laisse le Parlement à l’écart, même si on lui promet chaque fois qu’il sera associé à la décision. Au final, il n’en est jamais rien !
Ensuite, parce que cette disposition, issue de la RGPP, aura manifestement des incidences sur l’emploi. Elle est d’ailleurs présentée comme quasiment adoptée dans le deuxième rapport d’étape qui a été remis au Président de la République au début du mois de mai. Outre que cette affirmation nous semble très prématurée, nous sommes, une fois de plus, mis devant le fait accompli.
Enfin, parce que nous avons des doutes quant à l’opportunité de la fusion de l’AFSSA et de l’AFSSET. Vous nous dites, madame la ministre, que ces deux agences ont des missions identiques d’évaluation des risques sanitaires….
M. Jean-Pierre Godefroy. … et que leurs champs de compétence se recoupent au moins partiellement. C’est sans doute vrai, mais les exemples que vous donnez nous semblent quand même limités. Il ne faudrait pas que cette fusion entraîne une perte de compétences ou la primauté d’une mission sur une autre.
Le risque majeur, nous semble t-il, serait de « noyer », voire d’« absorber » l’expertise environnement-travail dans celle du domaine alimentaire, en un mot de rendre illisibles ces champs de compétence. Pourtant, ceux-ci viennent d’être confirmés par le Grenelle de l’environnement ainsi que par le deuxième plan national Santé Environnement, adopté récemment, et ils répondent à une demande importante de la société.
Sans oublier que vous présentez cet amendement dans le cadre d’un projet de loi étranger à la problématique des risques environnementaux et professionnels !
Nous craignons surtout que cette fusion ne nuise à l’efficacité de l’AFSSET et, par voie de conséquence, à l’évaluation des risques ainsi qu’à l’expertise dans le domaine pourtant crucial des risques environnementaux et des risques professionnels. En effet, comme cela a été proclamé à plusieurs reprises par la communauté scientifique et les partenaires sociaux dans le courant de 2008, la fusion de ces deux agences ne ferait qu’affaiblir le dispositif santé-travail en raison de la grande disparité des deux structures et des particularités de ce champ de la santé publique.
Pourquoi faire ce choix alors que d’autres pistes permettant une meilleure mutualisation des moyens et une rationalisation de l’utilisation des deniers publics avaient été évoquées ? Je pense au rapprochement de l’AFSSET et du département santé-travail de l’Institut de veille sanitaire ou encore à l’intégration du bureau d’évaluation des risques des produits et agents chimiques au sein de l’AFSSET, laquelle est d’ailleurs en cours de réalisation.
Cet amendement, présenté sans aucune concertation préalable, a surpris les représentants associatifs, notamment ceux qui sont membres du conseil d’administration de l’AFSSET et qui sont clairement opposés à cette fusion. Ils s’en étonnent d’autant plus qu’une vaste concertation devait se dérouler dans le cadre d’un comité de pilotage chargé de réfléchir sur l’avenir des agences et mis en place par le Premier ministre. Mais votre amendement, madame la ministre, vient court-circuiter tout cela et les associations déplorent que la précipitation du Gouvernement ne rende caduque cette concertation.
Vous le savez, l’une des originalités de l’AFSSET est son conseil d’administration, où les partenaires sociaux – employeurs et salariés –, les associations de défense des salariés et les associations de défense de l’environnement sont représentés. Cette particularité permet une gestion plus participative des risques, ce qui, même en cas d’incertitude scientifique, permet d’avoir des débats constructifs. Quelle sera la composition du conseil d’administration de votre futur établissement public ? Quelle place les représentants des acteurs des domaines santé-travail et santé-environnement y occuperont-ils ?
On peut également s’interroger sur la construction scientifique de ce nouvel établissement avec la mise en place de nombreux groupes, tels que des comités d’experts, des comités de spécialistes, et la gestion des laboratoires, qui sont actuellement dépendants de l’AFSSA.
Quant à la gestion des APR, les appels à projets de recherche, qui est actuellement du ressort de l’AFSSET – ce sont les seuls appels à projets à être orientés dans les domaines santé-travail et santé-environnement, avec un financement spécifique, hors Agence nationale de la recherche –, elle risque de disparaître avec la nouvelle construction. Cela entraînera la fin de l’essai de structuration des études et recherches scientifiques en gestion et évaluation du risque, lancé il y a quelques années, voire la fuite de plusieurs chercheurs intéressés.
Dans ces conditions, madame la ministre, il nous semblerait préférable que vous retiriez votre amendement. Cependant, si tel ne devait pas être le cas, certaines garanties doivent y figurer, notamment en ce qui concerne la composition du conseil d’administration du futur établissement public et les conditions de saisine de l’AFSSET par le nouvel établissement.
À défaut de l’adoption de notre sous-amendement et de celui, identique, qu’a présenté François Autain, comme lui, nous voterons contre l’amendement du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L’amendement n° 1287 vise à habiliter le Gouvernement à créer par ordonnance un nouvel établissement public reprenant l’ensemble des missions de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail.
La commission salue la démarche consistant à simplifier le système de gouvernance des agences de sécurité sanitaire. Je tiens d’ailleurs à rappeler qu’elle s’est prononcée à plusieurs reprises en faveur du rapprochement de l’AFSSA et de l’AFSSET, notamment au cours de la discussion du projet de loi de finances pour 2009. Je m’étais moi-même exprimé en ce sens à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Santé ».
Ces agences ayant de nombreux points de convergence, leur regroupement pourra contribuer à améliorer l’efficacité des politiques de prévention en matière de santé. La commission ne formule donc aucune objection de fond sur cette mesure, qu’elle appelait de ses vœux.
En revanche, elle déplore la méthode qui consiste à fusionner ces agences par voie d’ordonnance. On ne peut pas s’attendre qu’un parlementaire soit d’accord avec une telle procédure !
Comme vous l’avez dit, madame la ministre, cette réforme est complexe puisqu’il s’agit de moderniser la gouvernance des agences de sécurité. Aussi la commission estime-t-elle que la représentation nationale ne peut être complètement dessaisie de cette question. Nous préférerions donc que le Gouvernement s’engage à procéder au regroupement de l’AFSSA et de l’AFSSET dans le cadre du prochain projet de loi de finances, dans un véritable esprit de coproduction législative. La volonté unilatérale du Gouvernement empiète, pardonnez-moi de le dire ainsi, sur les prérogatives du Parlement.
À regret, je m’en remets donc à la sagesse du Sénat, en soulignant à la fois mon désaccord avec le recours aux ordonnances et ma satisfaction quant au rapprochement de l’AFSSA et de l’AFSSET.
M. François Autain. Que doit-on comprendre ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les six sous-amendements affectant son propre amendement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je tiens d’abord à redire que la Haute Assemblée, tout particulièrement sa commission des affaires sociales, sera non seulement tenue informée de toutes les modalités opérationnelles de ce regroupement et mais également associée au travail qu’implique cette opération.
M. Guy Fischer. C’est de la flûte !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Un conseiller d’État, M. Thierry Tuot, que certains d’entre vous ont peut-être déjà rencontré dans le cadre de ses fonctions de rapporteur général du Grenelle de l’environnement, me remettra un rapport sur ce sujet dans les prochaines semaines. Dès que je l’aurai en ma possession, je l’enverrai au président About afin que votre commission, mesdames, messieurs les sénateurs, puisse me faire part de son avis.
M. François Autain. On aurait pu attendre la remise de ce rapport avant de déposer cet amendement !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il s’agit de deux processus distincts, monsieur Autain.
Je vous informerai ensuite par écrit des modalités opérationnelles retenues au vu de votre avis et des préconisations de M. Tuot. Nous en discuterons à nouveau au moment de l’examen du projet de loi de ratification.
Comme vous le voyez, nous avons un certain nombre de rendez-vous qui permettront au Parlement de s’exprimer.
J’en viens aux sous-amendements.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 1356, j’ai d’abord été tentée de répondre que les choses allaient de soi. À mes yeux, la volonté de sécuriser les personnels était déjà sous-entendue par le texte de l’amendement. Cependant, je reconnais qu’il vaut mieux que cela figure explicitement dans la loi et j’émets donc un avis favorable sur ce sous-amendement.
Le sous-amendement n° 1357 vise à compléter la mission santé-environnement de l’AFSSET par l’application du principe de précaution. Cette précision est inutile : un principe constitutionnel s’applique évidemment à tous, et je ne vois d’ailleurs pas comment quelqu’un pourrait s’en exonérer. J’émets donc un avis défavorable, même si je suis d’accord sur le fond.
J’émets également un avis défavorable sur le sous-amendement n° 1359. Sachez que, si je veux adapter les règles déontologiques, c’est non pas pour les amoindrir, mais pour les durcir et les élargir, j’en prends ici l’engagement.
Le verbe « adapter » peut certes prêter à confusion, mais, dans les domaines couverts par l’AFSSA et l’AFSSET, les risques d’atteinte à l’indépendance de l’expertise sont différents : les règles déontologiques ne s’appliquent pas seulement au personnel, elles concernent aussi les membres des conseils et commissions des établissements publics et les personnes collaborant occasionnellement à leurs travaux. Je veux justement profiter de ce regroupement pour être encore beaucoup plus précise sur les règles déontologiques qui s’appliqueront à la future agence.
Même si je partage le souci que vous exprimez dans le sous-amendement n° 1358, madame Blandin, je ne peux être que défavorable à des dispositions qui ne sont pas de nature législative.
Il en va de même pour les sous-amendements nos 1300 et 1304. Préciser la composition d’un conseil d’administration n’est pas du ressort de la loi.
M. François Autain. Hélas !
M. Guy Fischer. Mais vous nous tiendrez au courant…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cela étant, vous pourrez formuler vos observations sur la disposition réglementaire qui sera prise, mesdames, messieurs les sénateurs, au moment de la « navette » qui aura lieu entre nos services respectifs. C’est bien volontiers que j’en tiendrai compte dans ce travail préparatoire.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1357.
Mme Marie-Christine Blandin. Mme la ministre nous a répondu qu’il n’était pas nécessaire d’inscrire le principe de précaution dans ce texte puisqu’il s’applique de toute façon. Je veux donc justifier le dépôt de notre sous-amendement.
L’AFSSA travaille uniquement sur le principe de prévention. Pour elle, il faut des dégâts, des souris mortes, bref des preuves, avant qu’elle ne donne l’alerte.
L’AFSSET travaille sur le principe de précaution. C’est la raison de notre ajout.
Nous prenons acte de ce que vous nous avez dit, madame la ministre, et nous retirons notre sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 1357 est retiré.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1359.
Mme Marie-Christine Blandin. Nous ne retirerons pas ce sous-amendement, dont le dispositif est fondamental dans le cadre de l’expertise.
Vous nous dites, madame la ministre, que la précision que nous apportons va de soi et que vous comptez même durcir les règles déontologiques. Néanmoins, il est, dans l’histoire sanitaire de notre pays, des épisodes qui font mal…
Rappelez-vous le CPA, le Comité permanent amiante, qui prolongea l’usage de ce matériau cancérigène et mortel pendant des décennies, promouvant le concept assassin d’« usage contrôlé ». Nous savons maintenant qu’y siégeaient les experts des fabricants.
Rappelez-vous l’inspection conjointe IGAS-IGE sur l’AFSSET, qui a trouvé deux ou trois représentants des opérateurs de téléphonie mobile sur les cinq experts du comité scientifique chargé d’étudier les effets sur la santé de cette technologie. L’étude a, bien entendu, été déclarée irrecevable.
Rappelez-vous la question que je vous avais adressée sur les conflits d’intérêt qui pouvaient frapper ceux qui ont travaillé sur l’évaluation sanitaire du bisphénol A. Certains étaient liés aux entreprises d’emballage qui utilisent ce produit.
Rappelez-vous l’expertise collective des éthers de glycol, dans le pilotage de laquelle on retrouve celui qui, jadis, au sein d’un autre organisme, autorisa des années durant l’excipient dangereux du Pilosuryl au risque d’atteintes rénales graves des patients.
J’arrête là cette énumération en raison de l’heure avancée, mais j’insiste fortement sur la nécessité de mentionner les « conflits d’intérêt » à l’alinéa relatif aux règles déontologiques.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1359.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1358.
Mme Marie-Christine Blandin. Mme la ministre nous a indiqué qu’une telle mesure n’était pas de nature législative. Je suis disposée à entendre cet argument et je retire le sous-amendement n° 1358.
Toutefois, je souhaite rappeler que, de l’avis même de l’Union des industries chimiques et des professionnels de l’expertise, il nous manque environ 400 toxicologues.
Par conséquent, madame la ministre, je vous exhorte à utiliser tout votre pouvoir pour sauver la formation des toxicologues à un moment où les chaires d’enseignement disparaissent une à une.
M. le président. Le sous-amendement n° 1358 est retiré.
Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 1300 et 1304.
(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 1287.
Mme Marie-Christine Blandin. Si vous le permettez, monsieur le président, je m’exprimerai assez longuement.
En effet, après nous avoir dit qu’il était impossible de décider l’interdiction du perchloroéthylène à une heure du matin, on restructure tout l’édifice de l’expertise française sans tenir compte du Parlement à une heure trente !
À mon sens, la confiance entre la société et les scientifiques passe par des agences d’évaluation véritablement indépendantes, dotées de moyens adéquats et d’un cadre déontologique adapté.
Tous les champs, qu’il s’agisse de la santé, de l’alimentation, de l’environnement ou du travail, doivent être couverts, et il faut tenir compte des pistes évoquées par les lanceurs d’alertes. C’est le minimum consensuel.
Madame la ministre, vous défendez à une heure trente du matin un amendement brutal qui percute toutes les réflexions en cours et qui ne fait aucun cas des observations des conseils d’administration. Au demeurant, l’Assemblée nationale ne l’a même pas vu,…
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Les députés le verront bientôt !
Mme Marie-Christine Blandin. … ce qui est tout de même extraordinaire d’un point de vue constitutionnel !
De surcroît, cet amendement renvoie à une ordonnance.
Et la précipitation se sent même dans votre argumentaire. Pour justifier le rapprochement envisagé, vous en appelez aux voies de contamination comme l’inhalation et l’ingestion. Bizarrement, vous ne faites aucunement allusion aux contaminations par pénétration par la peau. Peut-être veut-on épargner ainsi les cosmétiques et les parfums…
Vous prétendez vous appuyer sur des rapports. Mais lesquels ? En tout cas, certains rapports auraient au moins mérité une lecture plus attentive.
Je vous rappelle que l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques se compose de dix-huit députés et de dix-huit sénateurs. En 2005, M. Claude Saunier, alors sénateur, suggérait effectivement d’examiner la pertinence d’un tel regroupement, mais il précisait n’avoir pas pu évaluer l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement en raison de sa trop récente mise en place. Et selon l’ancien sénateur Claude Huriet, qui a porté l’agence sur les fonts baptismaux, il aurait fallu en faire un noyau croissant pour qu’elle prenne toutes ses forces. La mission Santé au travail a, depuis, été confiée à cette agence.
En 2008, notre collègue Dominique Voynet a posé une question sur l’AFSSET. On lui a répondu que tout allait bien et que le contrat d’objectifs et de moyens pour la période 2008-2011 était adopté.
Le sénateur Claude Saunier préconisait la création d’une « haute autorité de l’expertise scientifique ». Lettre morte ! Il prônait également une « valorisation de la fonction d’expert », avec statut et rémunération. Ce n’est pas du tout évoqué dans le texte.
Au mois de juin 2007, Mme Nicole Bricq a remis le rapport intitulé Les agences en matière de sécurité sanitaire : de la réactivité à la stratégie, fait au nom de la commission des finances. Elle insistait sur la nécessité de stabiliser le système et de préciser les formes de coopération, avec des modalités d’information compatibles et une articulation des programmes, et concluait que le bouleversement envisagé était inopportun.
En 2008, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques votait à l’unanimité un nouveau rapport sur le risque chimique, réalisé à la suite de deux ans d’auditions. Ce rapport préconisait de convertir l’AFSSET en une véritable agence de moyens, quitte à lui confier certaines des missions de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, l’INERIS.
Aussi, madame la ministre, vous ne pouvez pas prétendre vous fonder sur des rapports si vous n’avez pas lu ceux qui ont été rédigés et adoptés à l’unanimité par des sénateurs, dont deux anciens ministres !
Pour notre part, nous attendions beaucoup mieux d’un projet de loi relatif à la santé, par exemple l’adossement de l’Institut de veille sanitaire à un dispositif de veille environnementale. Cela aurait pu figurer dans un texte relatif aussi bien à la santé publique qu’à l’expertise.
Monsieur le rapporteur, nous sommes disposés à vous suivre. Mais prendre de telles décisions à une heure trente, c’est véritablement se moquer du monde !
Par conséquent, les sénateurs Verts souhaitent exprimer non seulement leur opposition au dispositif proposé, mais également, et surtout, leur indignation à l’égard des méthodes employées !