M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Excellent, en effet !
M. Alain Gournac. ... vous avez mis en place un comité de suivi de la loi, afin que chacun puisse s’exprimer et signaler ses éventuelles difficultés, de manière que, à partir de la confrontation des idées et des pratiques des uns et des autres, puissent être esquissées des solutions.
Ces aménagements sont ainsi susceptibles de répondre aux préoccupations mises en avant par nos collègues du groupe du RDSE, dont la présente proposition de loi manifeste à l’évidence le souci qu’ils ont de l’intérêt général.
Les dernières grèves ont, me semble-t-il, apporté un début de réponse à ces inquiétudes : près de 90 %, avez-vous dit, monsieur le ministre – mais, pour ma part, je dirais plutôt 85 % –, des communes qui devaient mettre en œuvre ce service y sont effectivement parvenues à cette occasion, dont de nombreuses communes de moins de 2 000 habitants, comme l’a indiqué notre rapporteur, ce qui montre que cette loi est parfaitement applicable sur l’ensemble du territoire.
Mes chers collègues, si nous votions cette proposition de loi, nous risquerions de compromettre le principe d’égalité qui est à la base de cette loi et m’a personnellement conduit à la voter : égalité entre les enseignants des petites communes et ceux des autres – avec cette proposition de loi, en effet, les uns et les autres ne seraient plus soumis aux mêmes obligations –, égalité entre les familles, égalité entre les communes. C’est pourquoi le groupe UMP souhaite le rejet de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l’article unique.
Article unique
L'article L. 133-3 du code de l'éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'obligation de service d'accueil n'est pas opposable aux communes de moins de 2 000 habitants.
« En outre, elle n'est opposable dans les autres communes que sous réserve du respect, par le directeur de chaque établissement ou celui qui le remplace, de ses obligations de service en ce qui concerne l'accueil des élèves. »
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, sur l'article.
Mme Anne-Marie Escoffier. Je voudrais, en cet instant, préciser la position de l’une des collègues de notre groupe.
Mme Françoise Laborde n’avait pas voulu, au départ, cosigner cette proposition de loi. La raison était simple : elle était, par conviction, opposée au principe du service minimum d’accueil, et cela essentiellement pour deux motifs.
D’une part, ce dispositif remet en cause le droit de grève des enseignants et, surtout, la sécurité des élèves. En effet, aucune garantie de compétences n’a été exigée pour les personnels d’encadrement qui pallient l’absence des grévistes.
D’autre part, le SMA alourdit inutilement le poids des responsabilités que doivent assumer les collectivités locales.
Toutefois, notre collègue rejoint désormais le point de vue des cosignataires de cette proposition de loi.
Jusque-là, selon les circulaires d’application des textes réglementaires, les directeurs d’école étaient seuls responsables de l’organisation du service pendant le temps scolaire ainsi que de l’information des parents et des autorités communales. Ils s’acquittaient très bien de cette tâche.
Inutile de mettre en place un dispositif aussi compliqué et contesté pour résoudre les problèmes ponctuels qui peuvent se poser.
Inutile d’accroître encore le fardeau des collectivités locales, en particulier les plus petites d’entre elles, qui, sur le terrain, rencontrent le plus de difficultés à garantir ce service minimum d’accueil.
La proposition de loi présentée par le groupe du RDSE assouplit le dispositif pour les communes de moins de 2 000 habitants. Ces dispositions sont d’ailleurs attendues par les associations des maires, comme l’a tout à l’heure rappelé l’un de nos collègues.
C’est donc en pensant au sort des 495 communes de moins de 2 000 habitants que compte le département de la Haute-Garonne que notre collègue Françoise Laborde, dans un souci de pragmatisme, s’est rapprochée de notre position. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, sur l'article.
M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, je n’étais pas encore parlementaire lorsque le texte instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire a été présenté au Sénat. Si je l’avais été, je crois vraiment que je ne l’aurais pas voté.
En effet, comme l’a dit Mme Anne-Marie Escoffier, ce texte a été élaboré sans concertation et de manière précipitée. Alors que j’étais en campagne pour les élections sénatoriales à cette période, j’ai d’ailleurs pu mesurer sur le terrain l’inquiétude des maires.
Pourtant, contrairement à Mme Escoffier, en tout cas lorsqu’elle se fait l’interprète de Mme Laborde, je suis, moi, extrêmement attaché au fait que les enfants puissent être accueillis les jours de grève. En effet, le droit de grève est, certes, un droit constitutionnel, mais le droit de travailler aussi. Par conséquent, il me paraît tout à fait important de permettre aux parents qui ont des enfants dont les enseignants sont en grève d’aller travailler.
Le premier reproche que je fais à cette loi est de transférer à d’autres une obligation de service minimum qui devrait normalement incomber à l’État : une fois de plus, celui-ci se décharge sur les communes.
Comme me l’ont dit nombre de maires au cours de ma campagne, heureusement qu’on ne nous demande pas d’aller faire les piqûres en cas de grève à l’hôpital ou de conduire les locomotives en cas de grève à la SNCF !
M. Jean-Claude Frécon et Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Eh oui !
M. Hervé Maurey. Cela illustre bien le côté choquant et quelque peu surréaliste de cette loi, qui constitue la première raison de mon hostilité résolue à son égard.
Mais il est une deuxième raison, dont je veux m’expliquer.
Il me paraît très bien que les communes assurent l’accueil des élèves, quand elles le peuvent. Pour ma part, maire d’une commune de près de 12 000 habitants, j’effectue cet accueil depuis des années, comme mon prédécesseur le faisait avant moi, et cela ne me cause pas de grandes difficultés.
Mais comment le maire d’une toute petite commune qui ne dispose pas de personnel peut-il s’organiser ? Au reste, le Président de la République, dans les propos auxquels il a déjà été fait allusion aujourd'hui, a lui-même repris cette interrogation à son compte.
En revanche, je trouve scandaleux que les enfants scolarisés à Paris n’aient pas été accueillis lors de la grève qui s’est déroulée jeudi dernier.
Traiter de la même manière petites et grandes communes, ce n’est pas normal ! Invoquer l’égalité constitutionnelle dans ce domaine ne tient pas, car, on le sait bien, celle-ci ne vaut que pour des situations comparables. Sur ce point, la jurisprudence du Conseil constitutionnel est d’ailleurs tout à fait claire.
A priori, je suis donc tenté de voter la présente proposition de loi. Deux aspects, cependant, me gênent.
Premièrement, le seuil de 2 000 habitants me paraît tout de même très élevé. Un élu d’une commune d’au moins 1 000 habitants est, selon moi, en mesure d’assumer cette obligation d’accueil.
Deuxièmement, aucune solution de substitution n’est proposée. Pour ma part, j’aurais préféré que l’État soit mis devant ses responsabilités et qu’il assure lui-même le service minimum d’accueil en cas de grève.
À ce stade du débat, je suis donc quelque peu partagé sur cette proposition de loi. Cependant, quand j’entends M. le ministre nous dire, en substance, « tout va très bien, madame la marquise », j’avoue avoir un peu de mal à le suivre ! J’aimerais recevoir des réponses plus précises et savoir ce qui va être fait concrètement.
Aujourd’hui, des maires de mon département, de passage à Paris, m’ont raconté spontanément les difficultés qu’ils avaient rencontrées la semaine dernière sur le terrain. Pour ma part, je doute que l’on prenne vraiment en compte leurs préoccupations.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par MM. Domeizel, Lagauche, Bérit-Débat, Collombat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 4 est présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger comme suit cet article :
La loi n° 2008-790 du 20 août 2008 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire est abrogée.
La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l’amendement n° 1.
M. Yannick Bodin. Lors des débats précédant l’adoption de la loi du 20 août 2008, nous avions longuement développé les arguments juridiques qui nous semblaient s’opposer à la mise en place du dispositif en question, en confrontant deux droits à valeur constitutionnelle, à savoir le droit de grève et le principe de continuité du service public. Or le Gouvernement a choisi de « casser » le premier pour, prétendument, assurer le second.
Le service d’accueil les jours de grève ne permet pas d’assurer la continuité du service public puisqu’il s’agit en fait de remplacer le service public d’éducation par un service d’accueil.
Outre ces raisons juridiques, nous avions également dénoncé, en juillet dernier, tous les motifs d’ordre organisationnel et financier qui nous semblaient faire du dispositif proposé une usine à gaz : responsabilités multiples mal définies, laps de temps dérisoire pour permettre aux communes de s’organiser, interrogations sur les personnes à même d’accueillir les enfants, absence d’exigences sur les qualifications minimales requises pour ces encadrants et compensation financière de l’État imprécise.
Tous ces points concernent d’ailleurs l’ensemble des communes. Et ceux qui pensent qu’il est plus facile d’organiser un service d’accueil dans une grande ville plutôt que dans une petite commune se trompent complètement ! Bien que je ne veuille pas allonger le débat sur cette question, j’insiste cependant sur le fait qu’il est extrêmement compliqué d’organiser un service d’accueil dans une ville de 50 000 ou de 100 000 habitants, en s’appuyant sur des personnels compétents et reconnus comme tels.
L’an dernier, les raisons de notre refus de cautionner cette cote mal taillée étaient nombreuses. Depuis, les faits nous ont donné raison, l’application de la loi se révélant ubuesque.
Les contentieux fleurissent ici et là, souvent nourris par des représentants de l’État un peu trop zélés. Ainsi certaines communes ont-elles été assignées en référé devant les tribunaux administratifs, lesquels ont prononcé à leur encontre des injonctions assorties d’astreintes financières allant jusqu’à 10 000 euros par heure de grève.
Parfois, en revanche, les préfets, souvent sur les mêmes motifs, ont heureusement été déboutés, les tribunaux établissant le constat que, si la loi est inappliquée, c’est tout simplement parce qu’elle est inapplicable !
Je remarque d’ailleurs, monsieur le ministre, que les préfets sont devenus beaucoup plus prudents, après le mouvement de grève du 19 mars dernier. « Évidemment, allez-vous me répondre, puisque tout a bien marché ! » Évidemment, la meilleure manière de considérer que tout va bien, c’est de fermer les yeux ! Pourtant, les problèmes demeurent.
Nous avions entrevu un espoir d’aménagement du dispositif du service minimum d’accueil, à défaut de son abrogation, lorsque le Président de la République, lors de son discours devant le congrès de l’Association des maires de France, le 3 décembre 2008, avait annoncé qu’il était prêt à revoir les modalités d’application de la loi, notamment pour les petites communes rurales.
Magie du verbe, rudesse des faits : force est de constater que, pour l’heure, le Gouvernement n’a envoyé aucun message supplémentaire qui permettrait aux maires confrontés au casse-tête du SMA d’espérer une issue…
Même la proposition, bien modeste, qui vous est faite aujourd’hui ne vous sied point !
Nous préférons donc demander l’abrogation pure et simple de ce dispositif inapplicable et source de contentieux. Peut-être y reviendrons-nous un jour, car je pense, monsieur le ministre, que la loi du 20 août 2008 a d’ores et déjà du plomb dans l’aile !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 4.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, mon groupe continue de défendre le principe de l’abrogation de la loi instituant le SMA.
J’insiste une nouvelle fois sur les difficultés rencontrées par les maires pour l’appliquer. Ce qui est vrai pour les maires des très petites communes, notamment rurales, l’est aussi pour ceux des communes urbaines, moyennes aussi bien que grandes. Tous sont confrontés à la même interrogation : comment assurer ce service, avec un personnel suffisant, qualifié et compétent pour encadrer, en toute sécurité, des enfants âgés de deux à dix ans ?
En effet, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, la question des conditions d’application du service d’accueil est tout de même essentielle.
C’est la raison pour laquelle j’attends avec une grande impatience le rapport d’évaluation que le Gouvernement doit déposer avant le 1er septembre prochain sur le bureau de notre assemblée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Richert, rapporteur. La commission est bien évidemment défavorable à ces deux amendements identiques.
M. Bodin a bien compris que la proposition de loi déposée par le groupe du RDSE ne règle pas le problème qu’il pose. Il estime en effet que le SMA entraîne des difficultés dans toutes les communes, qu’elles soient petites ou grandes, et que, de toute façon, ce n’est pas aux communes de régler des problèmes dont la solution, à ses yeux, incombe à l’État.
Nous en avons discuté longuement. Comme je l’ai dit tout à l’heure, si l’on supprime le SMA dans les communes de moins de 2 000, de moins de 3 000 ou de moins de 5 000 habitants, la même question pourra se poser pour les très grandes agglomérations.
C’est la raison pour laquelle j’avais indiqué que le principe de la suppression de ce service d’accueil des élèves les jours de grève n’était pas envisageable. Nous souhaitons que ces élèves puissent être accueillis, pour rendre service aux familles.
Je le répète, cette demande, à laquelle nous avons apporté une réponse très claire, nous avait été expressément adressée. J’ai rencontré, à titre personnel, les associations familiales qui avaient souhaité que ce service soit mis en place.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression du service d’accueil dans l’ensemble des communes.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Darcos, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous imaginez bien que je pourrais difficilement émettre un avis favorable sur des amendements qui visent à abroger la loi du 20 août 2008 !
Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour dire aux divers intervenants que nous ne méconnaissons pas les difficultés qui se posent aux communes les plus petites. Voilà d’ailleurs pourquoi nous avons mis en place une commission chargée de nous faire des propositions. Nous serons ainsi en mesure de vous remettre, au mois de septembre prochain, un rapport qui analysera la façon dont la situation pourra éventuellement être améliorée par nos propres services, en accord avec les élus.
Par ailleurs, nous avons passé un certain nombre d’accords avec l’Association des maires ruraux de France, ce qui explique que nous ayons renoncé à de nombreux contentieux, nous fondant, comme l’a rappelé Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur le principe selon lequel les maires ont surtout à connaître des personnes ayant l’intention d’utiliser le service, ce qui permet un meilleur calibrage et une application plus souple.
Monsieur Bodin, il serait absurde d’abroger une loi au moment où elle commence précisément à donner satisfaction puisqu’elle a permis, voilà quelques jours, d’assurer l’accueil de quelque 450 000 élèves, ce qui n’est pas rien ! Nous avons rendu service à un grand nombre de familles, et ce dans un contexte de grève générale qui rendait l’application de la loi encore plus difficile.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa de cet article.
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Le second alinéa du texte proposé par l’article unique conditionne l’obligation d’organiser le service d’accueil dans les communes de plus de 2 000 habitants au « respect, par le directeur de chaque établissement ou de celui qui le remplace, de ses obligations de service en ce qui concerne l’accueil des élèves ».
La lecture de l’exposé des motifs de la proposition de loi, supposé nous éclairer sur ces « obligations de service », précise : « Depuis la loi Jules Ferry, le directeur de l’école doit être présent et accueillir les élèves même s’il est gréviste. Aussi, la présente proposition de loi impose la présence du directeur d’établissement ou de son représentant dans l’école. »
Cette fameuse obligation de présence d’un directeur gréviste dans son école ne repose, à ma connaissance, sur aucune base légale. J’ai bien relu non pas « la », mais les lois Jules Ferry, et je me suis aperçu qu’aucune n’abordait ce problème : ni les deux lois du 16 juin 1881, l’une relative aux titres de capacité de l’enseignement primaire, l’autre établissant la gratuité absolue de l’enseignement primaire public, ni celle du 28 mars 1882, qui rend l’école obligatoire, ni celle du 30 octobre 1886, qui porte sur l’organisation de l’enseignement primaire.
Le seul texte réglementant ce rôle du directeur d’école était la circulaire n° 81-141 du 26 mars 1981, qui a été abrogée par la circulaire n° 81-222 du 5 juin 1981, d’après le Bulletin officiel de l’éducation nationale n° 23 du 11 juin 1981. Le décret relatif aux fonctions, à la nomination et à l’avancement des maîtres-directeurs du 2 février 1987, qui remettait en cause, dans les faits, le droit de grève des directeurs d’écoles, a également été abrogé par le décret du 24 février 1989.
Je rappelle que le directeur d’une école maternelle ou élémentaire n’est pas chef d’établissement. Lorsqu’il est en grève, il n’est aucunement tenu de rester à l’école pour s’assurer que tout va bien : il est en grève !
L’organisation du SMA, qu’il s’agisse du dispositif légal ou de la circulaire d’application du 26 août 2008, ne modifie en rien ces règles. Le directeur est seulement tenu d’informer le maire et les parents d’élèves de la situation de grève et de l’éventuelle fermeture de l’école.
Il est donc tout à fait inopportun de laisser croire, par le biais d’un alinéa dans une loi visant précisément à limiter l’obligation de service d’accueil les jours de grève, que les directeurs d’école grévistes devraient suppléer ou seconder l’autorité municipale, en garantissant eux-mêmes l’accueil des enfants. Cette disposition serait, certes, d’une grande aide pour de nombreux élus, je le comprends bien, mais nous nous y opposons, au nom du respect du droit de grève des directeurs d’école.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Richert, rapporteur. La commission étant défavorable à l’ensemble de la proposition de loi, elle est donc bien évidemment défavorable à cet amendement, ce qui n’ôte rien à la pertinence des remarques que M. Yannick Bodin vient de formuler sur l’alinéa ici visé.
Selon moi, il s’agit surtout d’un amendement d’appel destiné à M. le ministre, pour lui permettre de préciser un certain nombre d’éléments.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Darcos, ministre. Bien entendu, le Gouvernement est défavorable à un amendement portant sur un texte auquel il est globalement défavorable.
Sans vouloir être désobligeant à l’égard des auteurs de cette proposition de loi, je dois dire que cet article unique est mal rédigé dans la mesure où il évoque des « directeurs d’établissement », alors que les directeurs d’école n’ont pas cette qualité, ainsi que M. Bodin l’a fait observer.
Monsieur Bodin, vous avez fait référence au décret du 24 février 1989, qui définit les missions des directeurs d’école et qui fait autorité en la matière. Les directeurs d’école sont statutairement des professeurs des écoles, à la différence des principaux de collège ou des proviseurs de lycée qui sont, pour leur part, des chefs d’établissement. Les directeurs d’école disposent donc pleinement du droit de grève.
Vouloir les en priver par la réquisition ou par tout autre moyen, en les obligeant à assurer un accueil des élèves serait non seulement injuste et inopportun, mais surtout parfaitement inconstitutionnel. Je ne souscris donc pas à cette idée.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas dire de façon schématique que les partisans du service minimum sont soucieux des intérêts des familles tandis que ses adversaires sont indifférents à ces mêmes intérêts.
Je l’ai dit, dans ma commune, lorsque cela s’est révélé nécessaire, j’ai toujours accueilli les enfants. Il ne faut donc pas simplifier à l’excès : c’est vraiment désagréable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Richert, rapporteur. Je ne prétends pas que ceux qui sont défavorables au droit d’accueil ne se soucient pas des problèmes des familles ou ne souhaitent pas que les enfants soient pris en charge.
C’est comme si l’on disait que les sénateurs qui ont voté en faveur du texte sur le droit d’accueil ne sont pas sensibles à la situation des communes ou des élus !
Je ne veux donner de leçon à personne, mais il faut que chacun fasse l’effort d’écouter les autres. Tout élu, dès lors qu’il siège à la Haute Assemblée, possède une expérience de terrain et une bonne connaissance des dossiers, qu’il s’agisse d’éducation nationale ou de fonctions électives.
M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Tout à fait !
Mme Jacqueline Gourault. Merci pour ces précisions !
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote.
M. Jacques Gautier. Je voterai contre ces amendements et cet article unique pour une raison simple : lorsqu’on a la volonté de répondre à l’attente des familles, on trouve des solutions. Le texte que nous avons adopté l’an dernier est pragmatique ; il fixe des grandes règles et permet, à travers des réponses adaptées et variables selon la taille de la commune, de satisfaire ce besoin d’accueil dans les écoles.
Je suis maire depuis plus de vingt ans et, comme d’autres, j’ai toujours mis en place ce service sans rencontrer de difficultés, avant même que la loi soit votée.
Lors des deux dernières grèves, dans mon département, une très grande majorité de communes a mis en place ce service d’accueil. La plus grande ville, qui compte 105 000 habitants, comme la plus petite, qui en compte 1 500, ont accueilli les enfants. Les quelques villes qui ne l’ont pas fait sont toutes dirigées par des communistes ou des socialistes : c’était donc pour des raisons strictement politiques. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Yannick Bodin. C’est faux !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mesurez vos propos, monsieur Gautier !
M. le président. .Monsieur Biwer, ainsi que vous me le demandez, je vais vous donner la parole pour explication de vote, mais je me permets de vous inviter à la brièveté : songez à ceux, sénateurs et personnels des services, qui travaillent sans interruption depuis quinze heures trente, alors même que la séance de ce matin ne s’est achevée qu’à quatorze heures passées…
M. Claude Biwer. Monsieur le président, vous me permettrez à votre tour de souligner que, en tant qu’élus et citoyens, nous sommes aussi quelquefois amenés à travailler, sans regimber, plus longtemps que nous ne l’avions prévu. N’oublions pas que nous sommes là au service des uns et des autres.
Monsieur le ministre, en tant que maire – et c’est un mandat que j’exerce depuis fort longtemps ! –, j’ai toujours appliqué la règle selon laquelle chacun assume ses responsabilités : l’éducation à l’État, le logement à la commune, etc.
J’ai souvent constaté qu’il était souvent bien plus facile de régler ce que j’appellerai les problèmes d’intendance dans les communes rurales, où les rapports humains sont plus proches que dans les grandes villes.
J’ai toujours pensé que, pour les communes rurales de moins de 1 000 ou de 2 000 habitants, les difficultés venaient non pas de l’obligation d’accueillir les élèves, mais de la manière dont on a entendu nous imposer l’organisation de cet accueil. Dès lors que nous sommes libres de nous organiser, nous entrons dans un système que je qualifierai de quasi périscolaire. De nombreuses activités périscolaires étant organisées au profit des familles et des enfants, je ne vois pas pourquoi il ne devrait pas continuer à en être ainsi.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué à plusieurs reprises la situation des maires ruraux. Je puis vous dire, à mon modeste niveau de président de l’association des maires de mon département, que nous avons la volonté de fournir un service à ceux qui ont en ont besoin.
Je voterai contre ces amendements parce que je considère que nous pouvons agir efficacement, à notre manière, sur le terrain. (Applaudissements sur certaines travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 et 4.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC-SPG, l'autre, du groupe du RDSE.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 135 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l’adoption | 141 |
Contre | 181 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 2.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe du RDSE, l'autre, du groupe CRC-SPG.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)