M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot, pour explication de vote.
M. Jacques Gillot. Je vais répondre à l’appel du Gouvernement et renvoyer cette réflexion aux États généraux. Je retire donc mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 201 est retiré.
L'amendement n° 256, présenté par MM. Antoinette, Patient, S. Larcher, Gillot, Lise et Tuheiava, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Les sur-rémunérations versées par les départements, les collectivités d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie, aux agents de la fonction publique territoriale sont exonérées de cotisations sociales et patronales.
II. Le Gouvernement dépose devant le Parlement, avant le 1er octobre 2012, un rapport d'évaluation de l'efficacité de la mesure visée au I et de l'opportunité de sa prolongation.
III. Les conséquences financières pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
M. Jean- Étienne Antoinette. Avant d’en venir à mon amendement, je voudrais dire que les inquiétudes que nous avions exprimées lors de la discussion générale au sujet de l’enchevêtrement de ce projet de loi et des États généraux se confirment.
En effet, depuis que nous avons abordé l’article 16 et les finances des collectivités locales, on nous renvoie systématiquement aux États généraux, alors qu’il avait été annoncé que l’on essaierait de trouver une solution juste pour rééquilibrer une politique fondée exclusivement sur l’exonération et la défiscalisation en faveur des entreprises.
Nous avions également pointé l’insuffisance de l’effort en matière de formation, et M. le secrétaire d’État nous avait rétorqué qu’il s’élevait à 5 %. Or que représentent 5 % par rapport au déficit de formation d’une jeunesse qui sort malheureusement trop tôt du système scolaire et qui est frappée par l’illettrisme ? Ce projet de loi n’est donc malheureusement pas à la hauteur de l’enjeu, d’où les amendements que nous proposons pour combler cette lacune.
En l’occurrence, j’espère qu’on ne me renverra pas une nouvelle fois aux États généraux, car mon amendement apporte un élément supplémentaire par rapport à la politique d’exonération et de défiscalisation. Il offre en effet la possibilité aux collectivités locales d’outre-mer d’accompagner les deux dispositifs.
Nous savons tous que le fonds exceptionnel d’investissement sera financé à 75 % par l’État et à 25 % par les collectivités locales. Ce sont d’ailleurs les mêmes critères qui ont été retenus dans le cadre du plan de relance. Or il faudra bien trouver les financements.
La commission ne pourra pas me répondre qu’il faudrait également prévoir une exonération pour les communes, les départements et les régions de la France hexagonale, car ces collectivités n’ont pas à financer la sur-rémunération de 40 % des fonctionnaires. Certes, cette sur-rémunération est prévue par la loi, mais elle n’entre pas en compte dans le calcul de la péréquation sur le plan national. Elle est considérée comme une prime, exclusivement à la charge des collectivités locales d’outre-mer.
Dans l’esprit de défiscalisation qui imprègne ce texte – je rappelle les chiffres du Gouvernement : 1,5 milliard d’euros d’exonération –, ne pourrait-on pas faire un effort particulier pour exonérer les collectivités locales de cette surcharge de 40 %, à condition qu’elles réinvestissent les sommes ainsi économisées dans le cadre du plan de relance ou pour apporter leur contribution de 25 % au fonds d’investissement exceptionnel ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est créatif !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. La commission a écouté avec beaucoup d’attention M. Antoinette et comprend son souhait d’exonérer de charges sociales la sur-rémunération.
Néanmoins, la commission considère qu’il n’est pas opportun d’encourager ce dispositif. Elle a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Il est injuste de dire que tout est renvoyé aux États généraux. Nous avons agi sans attendre pour porter de 3 000 à 6 000 le nombre de jeunes pour le service militaire adapté et nous mobilisons dans la LODEOM 15 millions d’euros pour la formation professionnelle, notamment des plus jeunes.
Monsieur le sénateur, je veux bien accorder une exonération de taxe, mais encore faut-il qu’une telle taxe existe. Or la sur-rémunération des fonctionnaires est une prime ! Les collectivités locales ne paient donc que la CSG et la CRDS, qui sont dues par tous sur tous les revenus.
Par ailleurs, votre amendement méconnaît la spécificité de la Nouvelle-Calédonie, qui fixe librement les rémunérations et les taxes qui pèsent sur les salaires.
Votre combat trouve donc une issue positive avant même d’être mené : d’une part, votre amendement est satisfait par avance et, d’autre part, il vise des collectivités sur lesquelles l’État n’a pas de pouvoir de décision. Il serait donc plus raisonnable de le retirer. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Antoinette, l’amendement n° 256 est-il maintenu ?
M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le secrétaire d’État, comme nous l’avons indiqué à vos services, les charges sociales et patronales, calculées en fonction de la sur-rémunération, représentent à peu près 5 millions d’euros pour l’ensemble des collectivités de la Guyane. Ces chiffres ont été confirmés par les services déconcentrés de l’État.
Comme je l’ai dit récemment au président de la commission des finances, la sur-rémunération de 40 % est appliquée aussi bien aux fonctionnaires de l’État qu’à ceux des collectivités territoriales. Or ce ne sont pas les collectivités territoriales qui ont inventé cette prime, comme on peut le vérifier dans les décrets d’application.
Je suis donc tout à fait prêt à discuter de l’opportunité de ces 40 %.
M. le président. L'amendement n° 293 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 750-1-1 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La gestion des crédits du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce est déconcentrée afin d'assurer une meilleure adaptation aux réalités locales, en particulier dans les collectivités d'outre-mer. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. J’ai déjà présenté cet amendement lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie. La réponse qui m’avait alors été apportée par Mme Lamure, rapporteur, ne m’avait pas vraiment convaincue.
Selon Mme le rapporteur, « la gestion des dossiers du FISAC est d’ores et déjà déconcentrée, puisqu’elle se fait au niveau des directeurs régionaux du commerce et de l’artisanat. Quant à la gestion des crédits, elle demeure centralisée » afin de « garantir la neutralité de l’affectation des crédits et la capacité du FISAC à répondre aux évolutions du nombre de dossiers par région ».
Soit, mais comment expliquez-vous le mauvais fonctionnement du FISAC, monsieur le secrétaire d’État, et, surtout, le nombre insignifiant de dossiers retenus ? À la Réunion, par exemple, nous avons même connu des années blanches, aucun dossier n’étant retenu.
Pour motiver son refus, Mme le rapporteur avait proposé de nommer des représentants des DOM à la commission d’orientation dont la création était prévue par la LME. J’aimerais savoir si cette commission est opérationnelle et si elle compte des ultramarins parmi ses membres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Ma chère collègue, j’ai bien peur que ma réponse soit assez proche de celle du rapporteur du projet de loi de modernisation de l’économie…
On ne peut que souscrire à vos intentions, mais, en principe, la gestion des crédits du FISAC est d’ores et déjà déconcentrée. La commission aimerait cependant connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, vous avez parfaitement raison de dénoncer le mauvais fonctionnement du FISAC outre-mer. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement proposera par amendement d’affecter 8 millions d’euros à une sorte de FISAC pour l’outre-mer. Je pense que cette mesure devrait pleinement répondre à l’objectif que vous visez.
Ce fonds de 8 millions d’euros sera géré de façon plus intelligente et non avec une vision trop métropolitaine, car je sais que c’est là votre inquiétude. Notre volonté est d’apporter des moyens – 8 millions d’euros –, mais aussi de la souplesse afin que la gestion de ces moyens soit au maximum déconcentrée.
En attendant, la rédaction de votre amendement ne nous semble pas la plus adaptée. Je vous invite donc à vous rapprocher de mes services afin de mettre au point un texte, d’ici à la fin de la discussion de ce projet de loi, qui puisse vous apporter toutes les garanties.
Je vous demande, pour l’heure, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. Madame Payet, l’amendement n° 293 rectifié est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 293 rectifié est retiré.
L'amendement n° 295 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la loi n° du relative au développement économique de l'outre-mer, le Gouvernement déposera un rapport sur le bureau des assemblées visant à faciliter l'écoulement des productions agricoles locales ultramarines dans les départements d'outre-mer, et ce notamment par la modification du code des marchés publics.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Les agriculteurs ultramarins se sont depuis plusieurs années engagés dans des démarches de qualité, et leurs produits peuvent désormais rivaliser avec les productions métropolitaines. Toutefois, nos agriculteurs souffrent d’une insuffisance de débouchés. C’est pourquoi il convient d’encourager l’efficacité commerciale des organisations de producteurs et d’accroître leurs possibilités d’accéder aux marchés publics.
Ainsi, il faut ouvrir aux agriculteurs la possibilité de répondre aux appels d’offres des marchés publics, tels que la restauration scolaire ou les hôpitaux. Ces marchés devraient comprendre des lots particuliers, comme la production locale de fruits et de légumes, indépendamment de lots provenant nécessairement de l’importation, car formés de produits non cultivés dans les départements d’outre-mer.
Je ne citerai qu’un exemple : dans la plupart des cantines scolaires de la Réunion, les fruits cultivés sur l’île ne sont pas servis aux élèves. C’est pourquoi il est proposé que le Gouvernement dépose un rapport sur le bureau des assemblées visant à faciliter l’écoulement des productions agricoles ultramarines dans les départements d’outre-mer, et ce notamment par la modification du code des marchés publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Comme vous le savez, ma chère collègue, le Gouvernement a proposé d’augmenter la prestation de restauration scolaire en contrepartie d’un approvisionnement renforcé des cantines en produits locaux.
Vous avez souligné que tel n’était pas le cas actuellement et vous demandez un rapport sur ce sujet. C’est un point sur lequel la commission aimerait connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement, dont l’avis est décidément très sollicité ce matin (Sourires), est en phase avec vous dans ce combat, madame Payet.
L’une des propositions issues de la crise sociale était précisément d’augmenter de 20 % l’aide aux cantines scolaires. J’ai souhaité que cette aide soit conditionnée et ait pour contrepartie l’obligation pour les cantines scolaires qui en bénéficieront de se fournir auprès de producteurs locaux.
Je suis en effet, comme vous, stupéfait de constater que l’on fait manger aux enfants des écoles de Martinique des kiwis de Nouvelle-Zélande ! C’est compréhensible à Montereau, où le climat n’est pas aussi propice, mais cela l’est beaucoup moins là où les fruits poussent en abondance.
Le Gouvernement a la volonté – réaffirmée par le Président de la République – de nous faire progresser vers l’autosuffisance alimentaire, et l’agriculture doit en être l’un des moteurs. C’est la raison pour laquelle il laisse à la Haute Assemblée le soin, dans sa sagesse, de décider des suites qu’il convient de donner à l’amendement n° 295 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Monsieur le secrétaire d’État, à l’issue de leur rencontre avec vous, les agriculteurs de Basse-Terre ont été frappés par votre proposition de soutenir la consommation locale. En effet, il est inacceptable que les enfants des Antilles ne mangent plus de mangues, de bananes, d’ananas, alors que la production locale est excellente et de qualité.
Un problème fondamental se pose : le commerçant qui vend ses poires en conserve peut peut-être attendre trois à quatre mois le paiement, mais l’agriculteur de nos régions ne peut pas se permettre de patienter pendant un tel délai avant d’être payé.
Monsieur le secrétaire d'État, il faudrait que vos services cherchent, avec le fonds d’investissement que vous avez mis en place, la solution permettant aux communes qui gèrent les cantines scolaires de rémunérer très rapidement les agriculteurs. La même remarque vaut pour les marins pêcheurs : le poisson local est de très bonne qualité, et les enfants mangent de la sole… Ce n’est pas pensable ! Mais encore faut-il payer très rapidement les agriculteurs et les pêcheurs, qui ont besoin de ce revenu pour vivre.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 297 rectifié, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Compléter la première phrase du troisième alinéa de l'article 50 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique par les mots :
et tient compte du positionnement géographique des collectivités d'outre-mer et de leurs ressources d'expertise mobilisables dans leur zone.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. L’efficacité et l’utilité d’UBIFRANCE ne sont plus à prouver. La loi de modernisation de l’économie a renforcé le rôle de cette structure, en lui transférant certaines compétences des missions économiques.
Toutefois, il est indispensable de rationaliser les liens entre UBIFRANCE et les DOM. À l’heure actuelle, il n’existe pas de liaison entre cet établissement public industriel et commercial et les DOM, si bien que l’on aboutit parfois à des situations cocasses. Ainsi, pour une intervention à Madagascar organisée à partir de la métropole, il a été fait appel à des experts réunionnais qui ont dû transiter par Paris !
C’est pourquoi nous proposons que l’agence UBIFRANCE tienne compte du positionnement géographique des collectivités d’outre-mer et de leurs ressources d’expertise mobilisables dans la zone.
Pour cela, il est indispensable que cet établissement dispose de relais sur place, au niveau des services déconcentrés de l’État déjà présents dans les collectivités d’outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Madame Payet, en évoquant tout à l’heure le FISAC et maintenant UBIFRANCE, vous donnez le sentiment que ces organismes ne fonctionnent pas comme ils le devraient.
La commission estime cependant qu’il n’est pas nécessaire de modifier la loi pour régler le problème posé, à savoir une gestion non rationnelle des ressources de l’Agence. Par conséquent, elle vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Pour la première fois depuis le début de l’examen des amendements, le Gouvernement n’est pas en phase avec la commission des finances et émet un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d’État, si le Gouvernement n’est pas capable de régler cette question autrement que par la voie législative, c’est à désespérer !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 300 rectifié bis, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 3511-3 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour l'application du présent alinéa, la vente dans les comptoirs de vente situés dans l'enceinte des aéroports des produits du tabac en franchise de droits et taxes aux personnes voyageant entre la France métropolitaine et un département d'outre- mer est considérée comme effectuée à un prix de nature promotionnelle contraire aux objectifs de santé publique. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Cet amendement vise à interdire la vente de tabacs en duty free aux voyageurs en partance et à destination des DOM.
J’ai déjà présenté un tel amendement - le Sénat avait alors eu la sagesse de l’adopter -, mais il n’a pas survécu à la commission mixte paritaire. Le poids des lobbies est trop fort !
Quand il s’agit d’aider les productions locales – le foie gras, la charcuterie, les fruits et légumes –, il est tout à fait normal que des groupes de travail soient constitués pour trouver des solutions législatives, mais, quand il s’agit de protéger des industriels dont les produits sont responsables de 60 000 décès par an en France, le Parlement ne joue pas son rôle ; sa mission est déviée. Les populations que nous représentons auraient le droit de nous réclamer des comptes.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai dû contrer des arguments un peu fantaisistes.
Certains jouent sur les mots. On m’a soutenu que le duty free n’est pas une vente promotionnelle. Or Maurice Cohen, grand économiste politique, a défini cette vente promotionnelle comme un avantage provisoire offert aux consommateurs, limité soit dans le temps, soit dans un espace géographique. Cette définition correspond, selon moi, au duty free.
On m’a également affirmé que le duty free attire les touristes. J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que ceux qui se rendent à la Réunion n’y vont pas majoritairement pour acheter du tabac à bas prix, voire à très bas prix, pour nous enfumer et enterrer leurs mégots dans le sable de Saint-Gilles. (Sourires.) Si tel était le cas, je préférerais qu’ils restent chez eux !
On m’a également dit que la loi européenne prime dans les régions ultrapériphériques. Certes, mais tel n’est pas le cas en matière de santé publique, surtout lorsqu’une loi interdit des pratiques dangereuses.
Par ailleurs, l’amendement n° 300 rectifié bis n’est pas un cavalier. Il est bien question de développement économique. Selon des études réalisées, supprimer le duty free appliqué au tabac uniquement sur la ligne reliant la Réunion à Paris rapporterait au conseil général de l’île près de 20 000 euros de recettes fiscales par jour. Cette somme pourrait être consacrée à des aides aux petites entreprises, surtout en cette période de crise.
Un collègue et ami sénateur me racontait hier que son grand-père, bien qu’ayant fumé toute sa vie, est mort à quatre-vingt-quinze ans. Soit, mais, à cette époque, le tabac ne contenait peut-être pas autant d’additifs qu’actuellement – plus de quatre cents ! –, qui visent uniquement à renforcer l’addiction et qui sont presque tous cancérigènes. D’ailleurs, un haut responsable d’une grande marque de tabac, que je ne citerai pas, a tenu ces propos : « Nous ne fumons pas cette cochonnerie ; nous la laissons aux pauvres, aux noirs et aux imbéciles. »
Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi une telle différence entre l’outre-mer et la métropole ? Cela n’a aucun sens. Jusqu’à quand allons-nous tolérer cette absurdité ? Le chlordécone n’a-t-il pas suffisamment servi de leçon ? La santé des ultramarins serait-elle moins importante que celle des métropolitains aux yeux du Gouvernement ? Si ce n’est pas mon sentiment personnel, monsieur le secrétaire d’État, je sais que cela risque d’être interprété ainsi.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. La commission avait émis un avis positif sur un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi de finances. Malheureusement, ce texte n’a pas été retenu par la commission mixte paritaire.
Le sujet que vous venez d’évoquer, madame Payet, relève tout à fait de la loi de finances. Par conséquent, la commission serait tentée de vous demander de bien vouloir retirer l’amendement n° 300 rectifié bis et de le redéposer ultérieurement.
J’avoue cependant avoir quelque difficulté à me prononcer, étant donné le sort que le Gouvernement a réservé à un amendement précédent. M. le secrétaire d’État a en effet considéré qu’il fallait adopter un texte spécifique pour la Réunion afin de régler un problème concernant UBIFRANCE qu’il n’arrive pas à régler au niveau national... Par conséquent, je laisse le soin à M. le secrétaire d’État de nous orienter sur ce sujet.
J’ai écouté Mme Michaux-Chevry avec beaucoup d’intérêt et j’ai noté que les produits achetés par les cantines sont payés au bout de trois ou quatre mois.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Eh oui !
M. Éric Doligé, rapporteur. Mais il y a tout de même des règles en la matière, et elles doivent être respectées ! Je ne comprends pas que des collectivités puissent se laisser aller à de tels délais de paiement !
Par ailleurs, j’ai déjà fait remarquer que les ignames qui sont consommées outre-mer, par exemple, sont produites dans ma région. Fort bien pour les agriculteurs concernés, mais c’est complètement aberrant !
Madame Payet, tout le monde apprécierait de percevoir 20 000 euros de recettes fiscales par jour. Mais si le duty free est supprimé, il n’y aura probablement plus d’achats et donc plus d’assiette ! J’attends l’avis très éclairé du Gouvernement sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Madame Payet, je salue la constance dont vous faites preuve dans votre combat.
Le régime des franchises douanières et fiscales des marchandises contenues dans les bagages personnels des voyageurs en provenance de pays tiers et de territoires fiscalement tiers a été modifié, à compter du 1er décembre 2008, par la réglementation communautaire.
Pour ce qui concerne les tabacs, la directive communautaire fixe des limites supérieure – 200 unités pour les cigarettes, soit une cartouche – et inférieure – 40 unités pour les cigarettes, soit deux paquets – et laisse aux États membres le choix du seuil qu’ils souhaitent retenir. Madame Payet, les franchises que vous proposez correspondent aux plus basses prévues par ladite directive.
La transposition en droit national des textes communautaires doit faire l’objet d’un arrêté soumis à la double signature des ministres de l’économie et du budget. En l’espèce, un tel arrêté, qui définira une philosophie nationale globale, est en cours de signature. Le montant des franchises qui sera ensuite retenu s’appliquera de plein droit dans les échanges avec les départements d’outre-mer. De ce fait, il n’est pas possible de prévoir des limites quantitatives spécifiques pour les échanges entre la métropole et les seuls départements d’outre-mer.
Madame Payet, je suis sûr que vous ne manquerez pas de contacter très rapidement les deux ministres concernés pour leur faire part de vos arguments.
Le Gouvernement étant opposé à toute spécificité ultramarine en ce domaine, il émet un avis défavorable sur l’amendement n° 300 rectifié bis.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le secrétaire d’État, il me semble que les explications que vous venez de me fournir concernent la première version de mon amendement, lequel a été rectifié.
Selon les renseignements qui m’ont été communiqués, l’arrêté relatif à la directive européenne est actuellement à la signature mais, apparemment, la France n’a pas la volonté de changer quoi que ce soit.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Madame le sénateur, je vous confirme que le texte est en ce moment à la signature. Par conséquent, vous disposez encore d’un certain laps de temps pour convaincre les deux ministres concernés de la justesse de votre combat !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 300 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 342, présenté par MM. Lise, S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les petites entreprises de moins de dix salariés installées et exerçant leur activité au 1er janvier 2009 dans les départements d'outre-mer peuvent demander, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, aux caisses de sécurité sociale compétentes de leur département, un étalement pour le règlement de leurs créances, antérieures au 1er juillet 2009, relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale, ainsi qu'aux pénalités et majorations de retard correspondantes. Cette demande entraîne de plein droit une suspension de douze mois des poursuites afférentes auxdites créances, ainsi que la suspension du calcul des pénalités et majorations de retard durant cette période.
Durant ce délai de six mois, un plan permettant l'étalement des créances peut être signé entre l'entreprise et la caisse compétente. Sa durée est au maximum de trois ans.
Les dispositions du présent article s'appliquent aux entrepreneurs et travailleurs indépendants, y compris dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche, pour les contributions et les cotisations obligatoires de sécurité sociale.
Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'État.
II. - Les pertes de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Lise.