M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Nous venons d’avoir un débat approfondi sur les hydrocarbures. Pour les raisons de méthode déjà explicitées, et dans la perspective du travail que nous allons mener dans les semaines et les mois qui viennent, la commission est défavorable à cet amendement.
Je voudrais dire au président de la commission des finances, pour en revenir au contrôle des prix, à la DGCCRF et au contrôle en général, qu’il ne faudrait pas en profiter pour former des brigades supplémentaires. Bien souvent, en effet, les contrôleurs passent du temps sur des broutilles au niveau national, effectuent des contrôles qui ne sont pas toujours nécessaires au niveau des collectivités locales et des sociétés, en exigeant des brouettées de documents. Quand, à certains endroits, le contrôle est vraiment nécessaire et qu’il est difficile, en général, on n’y va pas et, quand c’est facile, on y va ! J’aimerais bien que l’on réoriente un peu les contrôleurs sur de vrais sujets.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Les ressources des collectivités d’outre-mer sont vraiment l’un des sujets des États généraux. Il doit s’inscrire dans le débat plus général de la gouvernance des collectivités, de la forme de responsabilité qui doit leur être accordée. Ce sera l’occasion d’aborder ces questions.
M. le président. L'amendement n° 120, présenté par MM. S. Larcher, Lise, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 44 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer est abrogé.
II. La perte de recettes résultant pour l'État de la suppression du prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement sur le produit de l'octroi de mer, est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Mon amendement vise à supprimer la part que l’État récupère sur l'octroi de mer pour gestion et frais de fonctionnement de cette taxe.
L’octroi de mer est un dispositif qui assure une fonction complexe en termes de ressources locales, de soutien à la production et d’autonomie fiscale.
C’est une taxe sur les produits, une taxe spécifique, propre aux départements d’outre-mer et dont les conseils généraux fixent les taux. Son produit alimente, à titre principal, les budgets des communes des départements d’outre-mer, ainsi que celui du département de la Guyane. Les budgets des régions sont également, depuis 1994, bénéficiaires du droit additionnel à l’octroi de mer.
On sait que l’octroi de mer et le droit additionnel constituent des ressources financières essentielles pour les petites collectivités, ainsi que pour les entreprises locales que les régions peuvent soutenir grâce à ces exonérations totales ou partielles qui compensent les handicaps structurels des DOM : éloignement, insularité, petitesse du marché, chômage, environnement concurrentiel des voisins, et j’en omets.
Conformément à l’article 44 de la loi du 12 juillet 2004 relative à l’octroi de mer, l’État a la possibilité de percevoir des frais d’assiette et de recouvrement pour ses opérations sur l’octroi de mer d’un pourcentage inchangé de 2,5 % du montant procuré par l’octroi de mer.
Or, en réduisant la part des frais d’assiette et de recouvrement, on augmentera la part de l’octroi de mer effectivement utilisée pour ces publics.
Monsieur le secrétaire d'État, vous allez certainement dire, comme hier, que c’est une petite affaire. Je vous répondrai par un proverbe créole : « Sé grenn di ri ou ka plen sac di ri », autrement dit : « Ce sont les petites économies qui font les grandes fortunes ». (Sourires.)
La fortune, nos communes en ont grand besoin pour payer les salaires. Vous le savez, les communes ont commencé, conformément à la loi, une opération de régularisation des personnels non titulaires, ce qui coûte très cher, d’autant qu’il y a un bonus de 40 %. Donc, il est très important que nous soyons suivis sur cette question.
Il serait aussi intéressant de connaître exactement ce que coûtent à l’État les frais de gestion de l’octroi de mer - frais d’assiette et de recouvrement -, afin de comparer ce coût aux prélèvements effectués par l’État sur le produit de cette taxe.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Nous comprenons bien la philosophie de cet amendement, déjà développée dans les amendements précédents qui visaient à créer une taxe pour financer la région. Là, il s’agit de supprimer une taxe pour permettre à la région de réduire ses charges.
M. Serge Larcher. Il s’agit de frais de gestion !
M. Éric Doligé, rapporteur. En effet, mais la finalité est la même : il s’agit de permettre aux collectivités d’avoir, d’un côté, moins de charges et, de l’autre, plus de recettes.
La commission n’est pas favorable à cet amendement. Un large débat va avoir lieu sur l’octroi de mer, et la proposition que vous formulez, cher collègue, pourra être examinée à cette occasion.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. D’abord, je rappellerai que cette taxe sur l’octroi de mer a été ramenée de 4 % à 2 %. Ensuite, l’octroi de mer fait partie des sujets majeurs qui seront examinés lors des États généraux puisque, selon Bruxelles, il faudra, en 2014, se poser la question de son devenir.
Permettez-moi à mon tour de citer un proverbe : « On n’achète pas chat en sac ». (Sourires.) Nous allons donc essayer de traiter globalement cette question de l’octroi de mer, qui donnera lieu à un débat important dans les semaines qui viennent.
Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour cette seule raison.
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Monsieur Larcher, permettez-moi de vous poser une question : qui va percevoir et gérer l’octroi, si l’État ne le fait plus ? Le taux de la taxe sur l’octroi de mer était fixé à 4 %, il a été ramené à 2 %. Les fonctionnaires assermentés des douanes ont la possibilité de mener des investigations que le privé ne pourra pas faire. Ce ne sont pas les fonctionnaires de la région qui iront dans les ports contrôler l’arrivée des marchandises ou qui pénétreront dans les dépôts ou dans les magasins.
Or, en ce domaine, l’intérêt des collectivités, justement, c’est de ne pas perdre de ressources et de ne pas avoir de scandales liés à des problèmes de perception.
Je crois donc qu’il vaut mieux laisser à l’État le soin de percevoir cette taxe. Ainsi, nous sommes assurés de la bonne rentrée de nos recettes puisque, jusqu’à preuve du contraire, les douanes s’acquittent très sérieusement de leur tâche ; c’est d’ailleurs une vertu que nous devons leur reconnaître.
M. le président. La parole est à M. Serge Larcher, pour explication de vote.
M. Serge Larcher. Monsieur le secrétaire d'État, nous aimerions savoir ce que coûtent à l’État les frais de gestion de l’octroi de mer. Je ne vous demande pas de me répondre aujourd'hui, mais peut-être pourrez-vous me faire parvenir un document sur ce sujet.
M. le président. L'amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Lise, Gillot, S. Larcher, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter de la promulgation de la présente loi, un prélèvement sur les sommes engagées dans les départements d'outre-mer dans les courses et les jeux mentionnés aux articles 919, 919 A, 919 B et 919 C du code général des impôts est créé au profit des conseils généraux des départements d'outre-mer.
Le taux est fixé à 10 %.
Ce prélèvement est assis, recouvré et contrôlé dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties et sanctions que les droits de timbre visés à ces articles.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Cet amendement vise à accroître les ressources des collectivités d’outre-mer, notamment des conseils généraux.
Les propos que j’entends depuis un moment me montrent que certains de mes collègues ont du mal à comprendre les différences objectives qui existent entre les départements d’outre-mer et ceux de la métropole. Ainsi, je suis surpris en écoutant M. Doligé, un collègue par ailleurs bien sympathique, mais qui a tendance à considérer toutes nos demandes comme abusives en ne manquant pas de réclamer à chaque fois la parité pour les départements de l’Hexagone !
Cela témoigne, comme je l’ai dit dans la discussion générale, d’un certain aveuglement, d’une certaine surdité, qui expliquent d’ailleurs la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Tant que l’on ne changera pas d’attitude, on aura les mêmes problèmes et l’on ne pourra pas bâtir de bonnes stratégies de développement pour les départements de l’outre-mer.
Je demande à mes collègues de faire les mêmes efforts que le secrétaire d'État chargé de l’outre-mer. Je n’ai pas pour habitude d’être complaisant dans mes relations avec les membres du Gouvernement en général et avec M. le secrétaire d'État en particulier, bien que nos rapports soient tout à fait cordiaux, mais je dois reconnaître qu’il est allé au contact des réalités et qu’il a le courage de dresser un certain nombre de constats. Je suis donc choqué que certains veuillent le museler. Mais, n’étant pas sûr de lui rendre service en disant cela, je ne m’étends pas sur le sujet ! (Sourires.)
Je voudrais tout de même souligner que les conseils généraux d’outre-mer doivent faire face à des dépenses considérables, d’abord en investissements. Ces investissements, d’une manière générale, sont beaucoup plus importants que ceux, déjà très élevés, que réalisent les conseils généraux de l’Hexagone ; ils dépassent 80% à 85 %.
Certains de mes collègues se demandent si des moyens supplémentaires ne risquent pas de se traduire par un saupoudrage ; je les invite à se rendre sur place. Puisqu’il a été décidé de constituer une mission, ils pourront, à cette occasion, voir ce que nous faisons.
Lorsque je fais construire une usine d’eau potable à ultrafiltration, avec des technologies européennes, et que l’on vient la visiter de toute la Caraïbe, je ne crois pas que ce soit une réalisation secondaire.
Lorsque je fais réaliser un grand chantier pour un port de désenclavement dans le nord, cela peut avoir des conséquences importantes en matière de développement.
Lorsque le conseil général met au point un système d’étude et de suivi des catastrophes naturelles, qu’il veut en faire un pôle de compétitivité, cela prouve qu’il est actif et que l’aide qu’il demande pour continuer dans cette voie est légitime. Je le dis pour M. Fourcade qui tient à nous voir nous investir de plus en plus dans les technologies nouvelles. Nous le faisons, cher collègue, et je vous invite à venir sur place voir les initiatives que nous prenons et qui sont trop souvent ignorées ici.
Outre l’investissement, il y a aussi le fonctionnement, et tous les problèmes sociaux que nous avons à prendre en charge compte tenu de la situation locale. Je rappelle que les taux de chômage sont, outre-mer, deux à trois fois plus importants qu’en métropole, que le nombre de RMIstes y est cinq fois plus élevé en moyenne, que le taux des ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté est deux fois supérieur à celui de la métropole.
Par ailleurs, un certain nombre de recettes de l’État sont calculées sans tenir compte des situations réelles.
Ainsi, pour prendre l’exemple de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, en Martinique, 27 % des personnes de plus de soixante ans sont bénéficiaires des minima sociaux, contre 7 % en métropole. Alors, quand on calcule la dotation APA sur les mêmes bases, vous voyez la situation ! Quant au RMI, n’en parlons pas…
Il est donc normal que nous essayions de trouver des ressources supplémentaires.
J’avais fait inscrire une recette dans la loi d’orientation pour l’outre-mer, la taxe additionnelle sur les tabacs. Je n’avais guère été soutenu à l’époque, notamment par certains collègues de la Réunion qui, pourtant, tirent aujourd'hui de cette taxe plus de 130 millions d'euros. Nous en retirons beaucoup moins aux Antilles, pour des raisons que je ne développerai pas en cet instant.
J’ai plusieurs fois proposé d’instaurer une taxe sur les jeux, d’autres l’ont également fait. Je reviens sur cette proposition à travers cet amendement, qui vise à instaurer un prélèvement de 10 % sur le produit des jeux de hasard.
Je signale qu’en 2006, par exemple, la Française des Jeux a réalisé un chiffre d’affaires supérieur au budget du conseil régional de Martinique et même à celui du conseil général ; donc, ce sont des sommes considérables.
Dans une délibération de janvier 1995, le conseil général de la Martinique, sur le fondement d’un décret d’avril 1960 qui nous le permettait à l’époque - depuis, un texte de loi a confirmé cette possibilité -, avait déposé une proposition de loi sur ce sujet.
J’insiste vivement pour qu’une réponse nous soit apportée sur la possibilité de ce prélèvement. Les ressources nouvelles qui en découleraient nous aideraient à assumer l’ensemble de nos missions. Elles nous permettraient également, comme nous le faisons en ce moment, de continuer à aider l’État à répondre au problème de l’augmentation des salaires, notamment dans le privé, décidée lors des négociations récentes en Guadeloupe et en Martinique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Monsieur Lise, contrairement à ce que vous pensez, nous connaissons les chiffres ! Nous savons que le taux de chômage et le nombre de personnes bénéficiant de l’APA, sont, dans vos départements, trois à quatre fois supérieurs à ceux de la métropole. Comme nous avons déjà du mal à équilibrer les budgets de nos conseils généraux, nous pouvons sans peine mesurer les difficultés que vous rencontrez et nous nous demandons même parfois comment vous faites pour assumer de telles surcharges. Nous ne voudrions pour rien au monde nous retrouver dans votre situation, car nous serions alors dans l’incapacité de boucler nos budgets !
Mais, si nous connaissons vos difficultés, nous savons aussi que l’État a un budget et qu’un certain nombre de propositions ne permettront pas de résoudre le problème de fond.
Si la LODEOM peut apporter aujourd'hui un certain nombre d’aménagements et d’améliorations, nous espérons que les États généraux de l’outre-mer seront l’occasion d’aborder la question, véritablement problématique, des recettes des collectivités des DOM.
En ce qui concerne l’amendement tendant à créer un prélèvement de 10 % sur les montants engagés dans les DOM pour les courses et les jeux de hasard, la commission des finances a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Cher Claude Lise, vous avez mis le doigt sur un sujet majeur pour l’outre-mer : les recettes des collectivités locales. J’en ai parlé tout à l’heure au sujet de la Guyane, je sais quelles sont les difficultés structurelles rencontrées par de nombreuses collectivités, notamment le conseil général de la Martinique.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer, dont je salue la mise en place, puisse s’emparer notamment de ce sujet.
On va peut-être me rétorquer que l’avis que j’émets au nom du Gouvernement est trop personnel, mais, après tout, autant parler avec sincérité : si cette mission pouvait élaborer un projet de nature à apporter une réponse durable, elle ferait véritablement œuvre de progrès. Cela permettrait de prendre en compte des spécificités que l’on ne comprend bien que lorsque l’on discute avec les parlementaires de l’outre-mer. Monsieur Lise, nous devons nous emparer de ce problème, et je suis prêt à mettre à votre disposition l’expertise de la Rue Oudinot.
En ce qui concerne la taxe sur les jeux, une opportunité s’offre à nous avec le projet de loi sur les jeux de hasard qui va être présenté très prochainement, à la fin du mois de mai.
Nous devons poursuivre l’expertise, car deux questions n’ont pas été réglées. Premièrement, cette taxe s’applique-t-elle sur la totalité des sommes engagées au niveau national ou uniquement sur les sommes engagées outre-mer ? Il me semble que cette dernière solution correspondrait mieux à ce que vous souhaitez. Dans ce cas, il faut s’assurer qu’il est possible de distinguer dans les recettes de la Française des Jeux ou du PMU les paris ou les jeux réalisés outre-mer.
Deuxièmement, quid de la concurrence des jeux en ligne ? Il faut veiller à ce qu’une taxe plus importante sur les jeux outre-mer n’entraîne pas une perte des recettes et ne favorise pas les jeux en ligne.
Le Gouvernement est prêt à examiner la proposition contenue dans votre amendement lors de la discussion du prochain texte sur les jeux, qui fournit un cadre technique plus approprié que le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer. Si un groupe de travail se constituait autour de vous, nous pourrions vous fournir une expertise et mobiliser nos moyens, afin qu’une réponse forte puisse être apportée sur ce sujet.
Si vous maintenez votre amendement, le Gouvernement s’alignera sur l’avis de la commission. Mais, sur le fond, nous devons aller dans le sens que j’ai indiqué : il reviendra à la mission parlementaire qui – je l’espère – sera rapidement mise en place, de faire des propositions sur la question majeure des recettes des collectivités locales. Venant du terrain et des élus, elles auront, à mon avis, plus de chances de prospérer que si elles sont préparées par la seule Rue Oudinot.
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Je comprends très bien les préoccupations de M. Lise, mais il intervient en tant que président du conseil général de la Martinique. Je voudrais simplement lui rappeler que les maires sont également confrontés à la nécessité de mener des actions sociales extrêmement importantes.
Pendant les quarante-cinq jours de grève, nous avons dû assurer deux cents paniers-repas aux personnes isolées de Basse-Terre qui ne pouvaient pas se déplacer et qui n’avaient plus de quoi se nourrir. Si une action sociale, que nous ne mésestimons pas, est menée par les départements, il ne faut pas perdre de vue que les communes en font de même de façon récurrente, sans aucune recette pour financer les centres communaux d’action sociale, les CCAS.
M. le président. La parole est à M. Gaston Flosse, pour explication de vote.
M. Gaston Flosse. Je voterai cet amendement. La Française des Jeux est installée en Polynésie française et y paye des taxes. Je ne vois pas pourquoi ce qui est accepté pour les pays d’outre-mer ne le serait pas pour les départements d’outre-mer, d’autant moins que cette société enregistre des bénéfices considérables et qu’elle transfère en métropole environ 50 millions d’euros par an.
M. le président. La parole est à M. François Trucy, pour explication de vote.
M. François Trucy. Ceux de nos collègues qui se sont exprimés sur l’éventualité de taxer à l’avenir les jeux en France, en métropole ou dans les territoires d’outre-mer, doivent tout de même prendre conscience du fait que, lors de la discussion, dans quelques mois, du projet de loi sur les jeux de hasard, il sera extrêmement difficile de ménager tout à la fois les intérêts de l’État et ceux des collectivités locales.
Monsieur Lise, je comprendrai très bien votre déception si votre amendement n’est pas voté, mais il ne faut pas penser qu’il sera aisé de « saupoudrer » le produit des jeux et de donner à tout le monde, en particulier si l’on veut garantir les recettes de l’État.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 121 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 122, présenté par MM. Lise, S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Un prélèvement sur recettes exceptionnel est institué au profit des départements et collectivités d'outre-mer tendant à compenser financièrement le surplus des charges transférées à ces collectivités, dans le cadre de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales et de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité.
Le montant alloué à chaque département ou collectivité d'outre-mer est égal à la différence entre le montant des charges transférées réellement constaté dans les comptes administratifs de ces départements et collectivités d'outre-mer et le montant de la compensation qu'ils ont perçu en vertu des règles de compensations financières prévues dans les lois citées au premier alinéa.
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. J’espère que l’amendement que le Sénat vient d’adopter va prospérer à l'Assemblée nationale. Si tel n’était pas le cas, j’ai bien retenu que cette question serait un sujet fort des États généraux de l’outre-mer qui – souhaitons-le ! – n’auront pas le même avenir que ceux qui se sont tenus il y a quelques années.
Madame Michaux-Chevry, même si je n’en ai pas parlé expressément, je n’oubliais pas les communes lorsque j’ai évoqué les ressources des collectivités.
J’en viens au présent amendement, par lequel je demande tout simplement le respect de la Constitution. Je souhaite en effet la compensation intégrale des charges transférées notamment par les lois du 18 décembre 2003 et du 13 août 2004. Je ne vais pas répéter les propos que j’ai tenus sur les difficultés rencontrées par nos collectivités : il serait tout à fait normal de les aider en assurant une compensation intégrale.
Je prendrai un exemple : le RMI représente, à l’heure actuelle, 160 millions d’euros pour le budget du conseil général de la Martinique. Or l’État nous doit environ 30 millions d’euros, ce qui est considérable. Depuis que nous avons la responsabilité du versement du RMI, cette dette chronique tourne toujours plus ou moins autour de ce montant.
J’insiste, un effort doit vraiment être accompli pour compenser intégralement le transfert de charges qui accompagnent des compétences que nous n’avons quelquefois pas réclamées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. Monsieur Lise, je comprends votre demande. L’APA pourrait même être rajoutée à la liste des compétences pour lesquelles les collectivités se demandent toujours si elles sont compensées à l’euro près.
Il n’en reste pas moins que l’État a satisfait à ses obligations constitutionnelles de compensation et a même mis en place des outils supplémentaires de compensation tels que le Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement, qui ne lui semble pas opportun.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Le Gouvernement est du même avis que la commission.
J’ai bien compris la force de cet amendement, d’autant plus que Claude Lise m’a expliqué, à de nombreuses reprises, les difficultés qu’il rencontrait. Je le redis, la mission commune d’information sénatoriale doit faire des propositions précises pour recaler les recettes des collectivités locales. Nous ne devons pas nous contenter de « bricoler » des solutions.
M. le président. L'amendement n° 201, présenté par MM. Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Antoinette, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport au Parlement, définissant les modalités d'élaboration et de financement d'un plan pour l'outre-mer en faveur de la formation et de l'emploi des jeunes.
La parole est à M. Jacques Gillot.
M. Jacques Gillot. Le taux de chômage des jeunes outre-mer dépasse largement celui de la métropole. Le Président de la République l’a lui-même reconnu à l’issue de l’entretien du 19 février 2009 avec les élus d’outre-mer : « Comment justifier que le chômage y soit si important ? », s’interrogeait-il à cette occasion.
Il est donc primordial d’orienter les efforts de réflexion et de soutien de l’État en faveur de la jeunesse ultramarine par l’élaboration d’un rapport qui permettra d’aborder, indépendamment des États généraux de l’outre-mer et du Conseil interministériel de l’outre-mer, la problématique de la formation et de l’emploi des jeunes outre-mer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur. La question de la formation et de l’emploi des jeunes sera l’un des sujets majeurs qui seront traités dans le cadre des États généraux de l’outre-mer. Dans ces conditions, la proposition paraît inutile. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Yves Jégo, secrétaire d'État. Je m’aligne sur l’avis de la commission : ce n’est pas un rapport de plus qui nous permettra de définir une politique. Plus de la moitié des jeunes sont au chômage : c’est un enjeu majeur.
En matière d’égalité des chances et d’insertion professionnelle des jeunes, nous avons une action commune à mener. Ce sera d’ailleurs l’un des huit sujets abordés lors des États généraux.
D’ores et déjà, il est prévu de dégager 15 millions d’euros dans le cadre de la LODEOM afin d’obliger les entreprises à réaffecter une partie des baisses d’impôt sur les sociétés à la formation professionnelle.
Le Président de la République s’est également engagé à doubler le nombre de jeunes accueillis au titre du service militaire adapté pour les années budgétaires 2009, 2010 et 2011, c'est-à-dire de le porter de 3 000 à 6 000. Chacun conviendra qu’il s’agit d’une mesure importante, qui montre que l’insertion professionnelle des jeunes est une priorité.
Cependant, la formation doit répondre à des besoins professionnels et correspondre aux projets des territoires. Il ne s’agit pas de faire de la formation pour la formation. Dans cette optique, nous allons réformer l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer afin de la rendre plus efficace.
J’accueillerai volontiers les propositions de Jacques Gillot s’il souhaite travailler sur cette thématique. En effet, avec les finances des collectivités locales, c’est l’un des sujets majeurs de l’avenir de l’outre-mer.