Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, des comptes rendus seront réalisés, mais qui ne seront certainement pas intégraux, car nos travaux en seraient alors considérablement alourdis.
En fait, il faudra un compte rendu fidèle de tout ce qui se passe en commission, qui comprendra la présentation des amendements et les prises de position des uns et des autres. C’est déjà le cas aujourd'hui dans le bulletin des commissions, mais celui-ci est séparé du rapport de la commission.
Pour que nous puissions disposer d’une vue synthétique et prendre connaissance des prises de position du Gouvernement lorsque celui-ci nous fera l’honneur de participer à nos travaux (sourires.), tous ces éléments devront figurer dans un compte rendu.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article additionnel après l'article 11
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 115 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La discussion en séance publique ne peut avoir lieu qu'à l'issue d'un délai de deux semaines suivant la remise du rapport établi par la commission principalement saisie.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement vise à inscrire dans le projet de loi organique le principe d’un délai suffisant pour l’examen du texte issu des travaux de la commission.
Il s'agit, en effet, de l’une des principales innovations de la révision constitutionnelle : en séance publique, on examinera le projet de loi modifié par la commission.
Aujourd'hui, sauf exception, il s’écoule une semaine entre l’examen en commission et le débat en séance plénière. La nouvelle procédure exige un laps de temps plus long. En effet, le projet de loi sera souvent remanié par les commissions, et un nouveau travail sera donc demandé aux sénateurs et aux groupes.
Bien sûr, monsieur le rapporteur, vous me répondrez que le règlement de chacune des assemblées pourra fixer de telles modalités.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pas du tout ! (Sourires au banc des commissions.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Toutefois, les difficultés qui apparaissent déjà dans l’application des nouvelles dispositions constitutionnelles – nous le savons, puisque nous les expérimentons ! – et la confusion qui semble régner à cet égard nous inquiètent quant à l’organisation future de nos débats.
Rien n’indique pour l’instant que le Gouvernement, malgré la révision constitutionnelle, ralentira le rythme des projets de loi. Je me suis d'ailleurs étonnée dans un rappel au règlement que la presse nous annonce déjà une session extraordinaire !
Certes, monsieur le secrétaire d'État, ce n’est pas la presse qui détermine l’ordre du jour,…
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. C’est sûr ! Ce n’est déjà pas moi qui le fixe complètement, alors la presse…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … mais nous nous méfions, car les journaux nous annoncent tant de choses !
Aussi, comment nous organiserons-nous quand il faudra, en outre, prendre en compte l’ordre du jour partagé ? Chercherez-vous à comprimer le débat et à faire entrer dans notre calendrier, en quelque sorte au chausse-pied, tous les projets de loi qui viendraient, pour le meilleur ou pour le pire, assaillir le Parlement ?
Naturellement, une solution pourrait être de réduire la séance publique à une simple formalité, mais, vous le savez, nous ne sommes pas favorables à une telle évolution. Vous avez d'ailleurs vous-même indiqué, monsieur le secrétaire d'État, que la séance publique resterait le moment fort de l’élaboration de la loi.
Dès lors, le meilleur moyen de ne pas comprimer la séance publique et le débat qu’elle permet, c’est de prévoir un délai suffisamment long entre les deux étapes de la vie parlementaire. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 175, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La discussion en séance publique ne peut avoir lieu qu'à l'issue d'un délai de deux semaines suivant la remise du rapport établi par la commission saisie au fond.
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Cet amendement est défendu, car il est presque identique au précédent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements, qui sont incompatibles avec la mise en œuvre de la procédure accélérée prévue par l’article 42 de la Constitution.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 175.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 11 bis
Les règlements des assemblées peuvent prévoir que les amendements du Gouvernement doivent faire l'objet d'une étude d'impact communiquée à l'assemblée avant leur discussion en séance.
Mme la présidente. L'amendement n° 176, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mme Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Cet amendement vise à supprimer la possibilité donnée aux règlements des assemblées de prévoir que les amendements du Gouvernement feront l'objet d'une étude d'impact.
En effet, le Gouvernement peut toujours, me semble-t-il, déposer des amendements à tout moment. C’est sa liberté, et elle n’est pas remise en cause.
Je signale que cet article 11 bis ne résulte d’aucune obligation constitutionnelle et qu’il n’a donc pas sa place dans un projet de loi organique relatif à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.
Lors des débats ayant précédé l’adoption de la révision constitutionnelle – je vous renvoie à la lecture des comptes rendus y afférents, mes chers collègues –, il a même été précisé que les règles fixées dans la loi organique – nous sommes en train de les définir – devraient concerner seulement le Gouvernement et l’élaboration des projets de loi avant leur dépôt au Parlement. Telle est l’intention qu’a exprimée clairement le constituant lors des débats qui ont accompagné le vote de la loi constitutionnelle !
C’est donc avant le dépôt du projet de loi au Parlement que ces règles doivent s’appliquer, et non pendant le débat parlementaire, au cours duquel le Gouvernement doit pouvoir déposer librement des amendements.
S’il use de cette faculté de manière idéale afin d’éviter de transformer certains projets de loi en régiments de cavalerie, nous en serons tous très heureux. (Sourires.) Toutefois, je ne comprends pas cette obsession de nos collègues de l’Assemblée nationale, qui veulent des études d’impact partout !
Il faut que l’on m’explique : si un ministre dépose un amendement en séance, allons-nous lui demander de présenter l’étude d’impact qui doit accompagner cette proposition et suspendre la séance pendant vingt-quatre heures pour l’étudier ?
Je crois qu’il faut simplifier le projet de loi en supprimant cette disposition et ramener nos collègues députés à la raison.
Ce soir encore, une dépêche d’agence est tombée : le président du groupe UMP de l’Assemblée nationale se réjouit de constituer un groupe qui, tous les mois, rendra compte des études d’impact !
Vite, demandons aux scientifiques d’inventer quelque vaccin contre cette dramatique « impactophilie » dont semblent souffrir certains députés ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Nous demandons donc la suppression de cet article qui, s’il était maintenu, tendrait à entraver le débat parlementaire et à réduire le rôle du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oserai-je encore prononcer les termes « étude d’impact », qui font toujours réagir M. Frimat ? (Sourires.) De toute manière, la commission des lois est défavorable à cet amendement de suppression.
Le dispositif permettra, selon l’appréciation de chaque assemblée, de soumettre à une évaluation les amendements du Gouvernement les plus importants, comme ceux qui visent à insérer des articles additionnels.
Il ne s'agit que d’une possibilité qui est ouverte aux assemblées. Dès lors que de telles évaluations existent, il peut être utile de les appliquer aux amendements du Gouvernement.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 22, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les règlements des assemblées peuvent déterminer les modalités selon lesquelles les amendements du Gouvernement font l'objet d'une étude d'impact communiquée à l'assemblée avant leur discussion en séance.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement tend à harmoniser la rédaction des articles 11 bis et 11 ter, relatifs au régime d'évaluation applicable aux amendements déposés par le Gouvernement, d'une part, et par les parlementaires et la commission, d'autre part.
En fait, en l’état, le texte stipule que ce sont les règlements des assemblées qui indiquent si les amendements du Gouvernement font ou non l’objet d’une étude d’impact. Ce n’est pas normal.
En revanche, les règlements peuvent tout à fait « déterminer les modalités selon lesquelles les amendements du Gouvernement font l’objet d’une étude d’impact », ce qui est prévu notamment dans l’article 11 ter.
Les règlements peuvent uniquement définir les modalités. Ils ne décident pas si les amendements du Gouvernement peuvent ou non faire l’objet d’une étude d’impact, ce qui reviendrait pour les assemblées à outrepasser complètement les limites de leurs pouvoirs.
Mme la présidente. L'amendement n° 116, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
peuvent prévoir
par le mot :
prévoient
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. À dire vrai, j’ai quelques scrupules à défendre cet amendement, mais je le ferai tout de même, en m’en expliquant.
La discussion que nous avons eue a montré que l’étude d’impact, détaillée à outrance dans l’article 7, au risque d’ajouter à la confusion, pose finalement de nombreux problèmes.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle notre groupe n’a pas voté cette disposition, bien que nous soyons favorables à une évaluation des projets de loi.
Toutefois, à partir du moment où les projets de loi font l’objet d’une évaluation, les amendements doivent eux aussi être évalués.
Dans le cas contraire, on pourrait parfaitement imaginer que le Gouvernement présente un projet de loi assorti d’un ensemble de données très importantes visant à montrer la grande utilité de son action, et que, par le biais d’un amendement, il propose ensuite exactement le contraire, sans aucune évaluation des conséquences des mesures en question.
Il y aurait là une contradiction difficile à soutenir. Voilà pourquoi je pense que le Gouvernement, quand il dépose un amendement sur un projet de loi, doit au moins se donner les moyens d’expliquer pourquoi, tout d’un coup, il propose de corriger son propre texte.
Mme la présidente. L'amendement n° 66, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après le mot :
impact
rédiger comme suit la fin de cet article :
dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article 7.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 116 ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’amendement n° 22 de la commission réécrit cet article de façon à prévoir que les règlements des assemblées peuvent déterminer les modalités selon lesquelles les amendements du Gouvernement font l’objet d’une étude d’impact.
Il semble préférable de laisser dans ce domaine une grande latitude aux assemblées. D’ailleurs, il n’est pas nécessaire que tous les amendements fassent l’objet d’une telle étude.
Imaginons, par exemple, qu’une commission modifie sur un point particulier le texte du Gouvernement et que ce dernier souhaite revenir à la rédaction initiale. Pour ce faire, le Gouvernement va déposer un amendement. Or, la disposition en question aura déjà fait l’objet d’une étude d’impact, réalisée pour l’ensemble du projet de loi. Pourquoi donc imposerions-nous une nouvelle étude ?
Voilà pourquoi il nous faut prévoir une certaine souplesse pour la détermination des conditions des études d’impact.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 116.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 22 et 116 ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 22 de la commission, mais défavorable à l’amendement n° 116.
Mme la présidente. En conséquence, l'article 11 bis est ainsi rédigé et l'amendement n° 116 n'a plus d'objet.
Article 11 ter
Les règlements des assemblées peuvent déterminer les conditions dans lesquelles des amendements des membres du Parlement, à la demande de leur auteur ou de leur premier signataire, ou des amendements de la commission saisie au fond peuvent faire l'objet d'une évaluation préalable communiquée à l'assemblée avant leur discussion en séance.
Mme la présidente. L'amendement n° 177, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que le précédent amendement que nous avons défendu. Il nous semble en effet tout aussi peu judicieux de soumettre les amendements des parlementaires aux études d’impact que ceux du Gouvernement. Cela tourne à l’obsession !
Par conséquent, nous proposons la suppression du présent article.
Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans cet article, supprimer les mots :
ou de leur premier signataire
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s’agit de supprimer une mention inutile. J’ai déjà proposé cette démarche à propos d’autres dispositions.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 178, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
évaluation préalable
par les mots :
étude d'impact
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Défavorable !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11 ter, modifié.
(L'article 11 ter est adopté.)
Article additionnel avant l'article 12
Mme la présidente. L'amendement n° 117, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'irrecevabilité des amendements en fonction des articles 40 et 41 de la Constitution ne peut intervenir qu'après présentation de l'amendement en séance publique par son auteur.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Les articles 40 et 41 de la Constitution ne comportent aucune indication quant au moment où doit être soulevée l’irrecevabilité des propositions ou des amendements.
Ces articles sont des éléments clés de la restriction du droit d’amendement, qui prévaut déjà dans notre droit parlementaire : l’irrecevabilité financière, prévue par l’article 40, bride toute initiative budgétaire des députés et sénateurs, tandis que l’article 41 limite le champ des amendements au domaine purement législatif.
Une application de plus en plus stricte de ces dispositions s’impose aux assemblées. À cet égard, l’évolution de l’application de l’article 40 au Sénat est symptomatique.
Pendant des décennies, l’interprétation de cet article fut favorable, dans cet hémicycle, à l’expression parlementaire, à la différence de ce qui se passait à l’Assemblée nationale. Cette différence était notamment justifiée par la possibilité dont dispose l’Assemblée nationale de renverser le Gouvernement, ce qui n’est pas le cas du Sénat.
Avec la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, dont l’objectif non avoué était de réduire l’impact du débat parlementaire sur les finances publiques, il fut décidé d’appliquer au Sénat la pratique de l’Assemblée nationale.
C’est ainsi la commission des finances, et non le service de la séance, qui décide de la vie ou de la mort d’un amendement avant sa présentation en séance publique, de sorte que le parlementaire concerné ne peut même pas tenter de convaincre l’assemblée de la compatibilité de sa proposition avec l’article 40 de la Constitution.
Mais il y a pire, et c’est là, à notre sens, que réside le problème démocratique essentiel : cette interprétation restrictive de l’article 40 prive les hémicycles du Palais-Bourbon et du Palais du Luxembourg de tout débat contradictoire, c'est-à-dire de toute discussion sur les alternatives à telle ou telle politique économique, financière, culturelle ou sociale.
Or il nous semble qu’aujourd’hui, compte tenu de la situation économique dans laquelle se trouve notre pays, des pistes autres devraient être explorées !
Pour ces raisons, nous vous proposons de garantir, par le vote de notre amendement, la présentation de tous les amendements en séance publique, même si, selon la majorité, ils sont susceptibles d’être déclarés irrecevables.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il n’y a pas lieu d’ouvrir ce soir une nouvelle discussion sur les modalités d’appréciation du recours à l’article 40.
Certains prétendent que l’article 40 empêche le débat contradictoire : il suffit de regarder ce qui se passe à l’Assemblée nationale pour se convaincre du contraire ! Or, on y applique l’article 40 précisément de la manière dont nous voulons nous aussi l’appliquer depuis de très nombreuses années.
En ce qui concerne l’article 41, celui-ci n’interdit pas par principe qu’un amendement puisse être présenté en séance publique.
La commission demande donc le retrait de l’amendement n° 117, faute de quoi son avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 117.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12
Les règlements des assemblées peuvent, s'ils instituent une procédure d'examen simplifiée d'un texte et si la mise en œuvre de cette procédure ne fait pas l'objet d'une opposition du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou du président d'un groupe, prévoir que le texte adopté par la commission saisie au fond est seul mis en discussion en séance.
Mme la présidente. L'amendement n° 118, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La procédure simplifiée constitue pour nous une grave atteinte au droit d’expression des parlementaires.
À cet égard – je le dis tout net – la modération apportée par l’Assemblée nationale, qui a décidé de soumettre cette procédure à l’assentiment de tous les présidents de groupe, ne change en rien notre opposition à cette démarche.
D’ailleurs, le rapport de M. Balladur, en son temps, avait déjà suscité notre inquiétude, car on y insistait fortement sur la nécessité d’étendre le recours à cette procédure en considérant que seules les lois de finances et les lois constitutionnelles étaient a priori écartées de son champ d’application.
En effet, si l’on considère le présent article 12 et l’article 13, que vous avez hélas ! voté hier, on voit bien que ces deux articles se conjuguent pour corseter le plus possible le droit d’expression des parlementaires.
Il est vrai que, devant la riposte qui s’est organisée contre ce projet de loi organique, le Gouvernement a tout de même dû accepter une certaine pondération. Les présidents des différents groupes parlementaires se sont donc vu accorder un droit de veto.
Il n’empêche : une brèche a été ouverte. Je crois donc que les groupes, mais aussi les commissions parlementaires, doivent faire preuve de la plus grande vigilance, car c’est la mise en œuvre du débat parlementaire lui-même qui est menacée.
Pour ces raisons, il conviendrait de supprimer l’article 12.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le Sénat considère, et depuis très longtemps, que les procédures d’examen simplifié sont utiles. Un certain nombre de rapports ont d’ailleurs recommandé d’y avoir recours, ce qui a été fait pour la ratification des traités internationaux, à condition, notamment, qu’il n’y ait pas d’opposition de la part d’un groupe.
Par ailleurs, comme je l’ai déjà dit, on pourrait très bien concevoir d’utiliser cette procédure pour les textes procédant à des codifications ou visant à ratifier certaines ordonnances.
Il nous paraît donc utile, et même indispensable si l’on veut que cela soit mis en œuvre, de prévoir cette possibilité dans la loi organique.
La commission est par conséquent défavorable à l’amendement n° 118.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 179, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
d'un texte
par les mots :
d'un projet de loi ou d'une proposition de loi
et les mots :
le texte adopté
par les mots :
le projet de loi ou la proposition de loi adoptés
et les mots :
est seul
par les mots :
sont seuls
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Si vous le permettez, je présenterai simultanément l’amendement n° 180, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis en effet saisie d’un amendement n° 180, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
ou du président d'un groupe
par les mots :
et qu'elle a reçu l'approbation de tous les présidents de groupe
Veuillez poursuivre, monsieur Frimat.
M. Bernard Frimat. L’amendement n° 179 est rédactionnel. Il vise à substituer aux termes « d’un texte » les mots « d’un projet de loi ou d’une proposition de loi ». La rédaction nous semblerait ainsi plus précise.
En ce qui concerne l’amendement n° 180, la formulation retenue par l’Assemblée nationale évoque l’opposition « du président d’un groupe », ce qui signifie que le silence vaut approbation. Nous sommes donc dans un mécanisme d’approbation tacite.
Généraliser la procédure simplifiée est, on le sait, le rêve de beaucoup, et plusieurs tentatives en ce sens ont déjà été faites.
Rendez-vous compte du temps que l’on passe en séance publique ! Ah ! si tout cela pouvait être simplifié ! À la limite – c’est le rêve secret de certains – on pourrait même supprimer la séance publique.
Oui, quel beau Parlement nous aurions !
La séance publique est si importante, et la procédure simplifiée porte une atteinte telle au droit d’amendement, que nous considérons que le seul cas où cette procédure est acceptable – cas dans lequel, d’ailleurs, nous l’utilisons déjà – est celui de l’approbation de certaines conventions internationales, ce qui ne pose jamais de problème entre nous.
De plus, la procédure ne peut être utilisée qu’à condition que tous les présidents de groupe l’aient expressément approuvée. Il y a une différence claire par rapport à l’approbation tacite résultant du simple fait que l’on ne s’est pas opposé.
En effet, certains parlementaires, y compris dans les rangs de la majorité, disposent de moyens réduits. Les groupes eux-mêmes, en dehors de toute question de moyens, peuvent se révéler, dans certains cas, inattentifs, et laisser passer un texte, par le biais de cette approbation tacite, en procédure simplifiée.
Si votre souci est uniquement de recueillir un accord général, je pense qu’il serait plus sympathique de prévoir l’accord de tous les groupes. En effet, dans l’éventualité où tous les groupes ont explicitement donné leur accord, nous pouvons tout à fait admettre que l’on recoure à la procédure simplifiée. En revanche, si cette procédure est fondée uniquement sur l’absence d’opposition, c'est-à-dire l’approbation tacite, elle est d’une bien moindre qualité.