M. François Fortassin. Il y a trois mois, on découvrait l’économie virtuelle ! Aujourd'hui, on découvre les subventions virtuelles ! Demain, ce sera sans doute le tour des sénateurs et des ministres virtuels ! (Exclamations amusées.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il m’est difficile de commencer mon intervention, qui portera seulement sur la place de la forêt dans le Grenelle I, sans saluer, comme un certain nombre des intervenants qui se sont succédé à la tribune, le courage de nos compatriotes forestiers du sud-ouest.
Pour avoir subi voilà dix ans, dans le grand nord-est, les dommages causés par les cyclones Lothar et Martin et avoir mis quelques années à nous en sortir, nous savons ce qu’il en est. M. le rapporteur pourrait en témoigner.
M. Bruno Sido, rapporteur. Absolument !
M. Yann Gaillard. Le cyclone Klaus, « dernier ennemi public », s’est abattu sur la région du sud-ouest, dont la végétation est essentiellement constituée de pins maritimes. Il a surtout endommagé des forêts privées, car les forêts publiques y sont peu nombreuses, que ce soit dans les Landes, dans les Pyrénées-Atlantiques et sur les rives de la Garonne. Que nos amis propriétaires forestiers et sylviculteurs le sachent, les communes forestières sont à leurs côtés dans cette terrible circonstance.
L’article 29 du projet de loi, qui est consacré à la forêt, est très bon, mais il est un peu long et complexe. Non pas qu’un texte législatif doive obligatoirement être court et frappant pour être valable. L’important est qu’il aille au-delà des seules pétitions de principe et qu’il mette en place les moyens nécessaires à la politique annoncée. En l’occurrence, c’est largement le cas.
J’aborderai rapidement quatre points.
Premier point, la forêt, la gestion forestière et le bois ont pris une place très importante dans les débats et les conclusions du Grenelle de l’environnement. J’ai encore à l’oreille et à l’esprit la belle phrase du précédent directeur de cabinet du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, M. Frémont, qui déclarait ceci : « La forêt est la lumière du Grenelle ». La formule était belle et heureuse.
En effet, comme les conclusions du Grenelle l’ont assez clairement montré, la forêt et le bois apportent, et peuvent apporter plus encore, une contribution essentielle à la lutte contre le réchauffement climatique, à la préservation de la biodiversité, à la protection de l’eau, des sols et des paysages et à la satisfaction des demandes de nature de nos concitoyens.
Et c’est dans le cadre du Grenelle que les forestiers, qu’il s’agisse de la forêt publique ou de la forêt privée, ont signé un protocole fondateur intitulé Produire plus de bois tout en préservant mieux la biodiversité avec la fédération nationale France Nature Environnement. Ce texte rend crédible l’objectif, exprimé par le Président de la République lors de son déplacement dans les Vosges le 18 décembre dernier, d’augmenter fortement la mobilisation des bois en forêt et de les valoriser. Mais comment lancer ce vaste mouvement ? C’est l’un des objets du présent projet de loi.
Deuxième point, je souscris pleinement à la deuxième phrase de l’article 29 du projet de loi, qui dispose ceci : « La production accrue de bois […] doit s’inscrire dans des projets de développement locaux. »
En effet, c’est bien au niveau local, à travers des projets de territoire axés sur la forêt et le bois et impliquant tous les acteurs concernés sous la houlette des élus, que peut se bâtir un développement forestier porteur de dynamisation de la gestion forestière, sous une forme mieux adaptée aux changements climatiques, de mobilisation et de valorisation des bois, de préservation de la biodiversité et de création d’activités économiques et d’emplois, de services environnementaux et de qualité de la vie, autrement dit, un développement local de qualité durable.
Pour mobiliser les bois et faire en sorte que la forêt nous apporte ce que nous attendons d’elle, il faut d’abord faire appel aux hommes. C’est d’ailleurs l’objet de la démarche des projets de développement locaux forêt-bois, qui figure à l’article 29.
Troisième point, je le constate, la création d’un fonds de mobilisation du bois, qui figurait dans une première version du projet de loi, ne figure plus, hélas !, dans le projet de loi qui nous est soumis. Pourtant, comment peut-on envisager de mener une politique ambitieuse sans y consacrer les moyens adaptés ?
Monsieur le ministre d’État, il faut à tout le moins mettre en place le fonds de mobilisation de 100 millions d’euros par an que votre collègue Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, avait annoncé en conclusion des assises de la forêt organisées dans le prolongement du Grenelle de l’environnement. Il s’agit d’un outil totalement indispensable si nous voulons impulser une dynamique. Je suis déjà intervenu en ce sens à l’occasion des débats budgétaires préparatoires aux deux dernières lois de finances. Pour allumer et faire briller la « lumière du Grenelle », nous devons instituer ce fonds.
Quatrième point, je souhaite évoquer l’Office national des forêts, l’ONF, qui effectue un travail remarquable de gestion des forêts de l’État et des collectivités locales. Cet établissement met en œuvre un régime forestier de grande qualité : à partir de l’ensemble des forêts domaniales et communales, il commercialise 40 % des bois mis en vente chaque année et assure un service public très précieux en milieu rural.
Or – tous ceux d’entre nous qui vivent dans les régions forestières le savent bien – cet office est aujourd'hui dans une situation très délicate. Je voudrais simplement souligner un élément. Au moment où, dans le cadre du Grenelle, nous voulons que la forêt joue pleinement ses rôles, il ne serait pas sage, quel que soit le prétexte invoqué, fût-ce la réforme des finances locales, de compromettre l’existence de ce bel outil au service de nos forêts. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté a été voté à la quasi-unanimité de l’Assemblée nationale. Je forme le vœu que le débat au Sénat permette d’adresser le même message : la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation de la biodiversité, le choix d’un développement durable de nos cités et de nos territoires méritent de rassembler tous les Français, quelle que soit leur sensibilité politique.
J’ajoute que la crise économique à laquelle nous sommes confrontés ne doit pas freiner notre effort. Bien au contraire, au lieu d’en faire un obstacle, nous devons profiter de l’occasion pour faire en sorte que s’accomplissent les mutations nécessaires en termes de comportements des ménages et des décideurs-prescripteurs, d’appareils productifs de l’industrie ou de l’agriculture et de gouvernance des villes et des services publics qui les organisent.
Monsieur le ministre d’État, votre texte doit entraîner le basculement de nos décisions individuelles et collectives, afin de construire les fondations d’une nouvelle architecture juridique, que d’autres lois viendront progressivement compléter.
Pour ma part, dans le temps qui m’est imparti, je centrerai mon intervention sur l’habitat et sur la planification urbaine.
En matière d’habitat, je vous précise d’emblée que j’approuve totalement les objectifs fixés, notamment la réduction dès 2013 à cinquante kilowattheures par mètre carré et par an, en moyenne, de la consommation d’énergie primaire des bâtiments neufs.
Je crois très sincèrement qu’affaiblir une telle exigence en adoptant des amendements tendant à multiplier les modulations et les exceptions serait un mauvais signal.
J’entends les critiques et les craintes suscitées par un objectif aussi ambitieux. Mais, au début des années quatre-vingt, quand il s’est agi de réduire de 50 % la consommation d’énergie des bâtiments neufs, les mêmes mots, les mêmes craintes et les mêmes analyses techniques ont surgi. Or une telle exigence paraît banale aujourd'hui.
Les techniques de ventilation, d’isolation et de vitrage sont au rendez-vous, et elles évoluent très vite. Elles permettent de réduire considérablement les déperditions, donc la consommation énergétique, et d’améliorer le confort de l’habitat. Surtout, les panneaux photovoltaïques arrivent à maturité. Ils seront d’autant plus rentables que, comme nous le savons tous, une augmentation forte des prix de l’électricité est inéluctable.
Il faut s’en convaincre, le solaire est une industrie en train de naître. L’Allemagne est en avance à cet égard. Aux États-Unis, le président Barack Obama en fait une priorité de son plan de relance, avec des crédits d’impôts sans plafond. La France doit rattraper son retard. C’est possible, surtout si la décision de privilégier les énergies renouvelables est prise.
L’objectif que vous avez fixé pour 2012 constitue non pas une contrainte insupportable, mais bien une chance pour le bâtiment !
Mais le véritable défi, le plus difficile à relever, est celui du parc existant. Sur ce point, je suis inquiet. Le parc privé représente plus de 50 % de ce marché, mais les mesures financières et fiscales qui ont été décidées risquent, à mon avis, de se révéler insuffisantes pour déterminer, dans le contexte actuel, la décision des ménages et des bailleurs privés.
Le plan de relance devrait, me semble-t-il, s’attaquer résolument à ce sujet, car nous sommes là sur un marché qui est ouvert aux petites entreprises présentes sur tout le territoire. Il s’agit d’un investissement particulièrement utile, puisqu’il peut donner du pouvoir d’achat par la baisse des charges, soutenir rapidement l’économie locale, rentabiliser les efforts de recherche-développement et ne pas alourdir le solde du commerce extérieur.
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Jean-Paul Alduy. Pour les bailleurs sociaux, le problème est de même nature, c’est-à-dire essentiellement financier.
M. Thierry Repentin. Nous sommes d'accord !
M. Jean-Paul Alduy. Faute de prime à l’amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, ou PALULOS, hors des zones urbaines sensibles, les ZUS – dans les ZUS, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, subventionne en effet les réhabilitations –, il y a une véritable difficulté. C’est d’autant plus vrai que les ménages les plus modestes sont précisément ceux qui acquittent la facture énergétique la plus lourde.
M. Thierry Repentin. C’est vrai !
M. Jean-Paul Alduy. Vous voulez proposer des prêts à taux bonifiés ou des subventions dans le cadre de conventions entre l’État et les bailleurs sociaux, ce qui est en effet souhaitable ; mais, monsieur le ministre d’Etat, faisons simple, puissant, décentralisé : optons pour des mesures rapides à mettre en œuvre, car il y a urgence !
Vous l’avez compris, ma conclusion est simple. Les objectifs assignés sont crédibles et incontournables tant le secteur du bâtiment est important dans la consommation globale d’énergie du pays. Mais il faut un soutien financier des pouvoirs publics plus important pour entrainer la filière de la construction, pour promouvoir l’industrie du solaire et pour déclencher le changement culturel nécessaire en faveur des énergies renouvelables.
Je ne peux pas conclure mon intervention sans évoquer la question de la planification urbaine. Le chapitre concernant l’urbanisme n’est en fait qu’une succession de souhaits et d’encouragements...
Une fois de plus, on est obligé de rester vague parce qu’il n’y a pas encore, en France, sauf exception, de véritable gouvernance des villes, avec un bloc de compétences cohérent sur un territoire pertinent et légitimée par le suffrage universel.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Paul Alduy. Dès lors, les schémas de cohérence territoriale, les SCOT, quand ils existent, ne servent pas à grand-chose. Il faudra bien un jour avoir le courage de définir une compétence obligatoire des intercommunalités qui aille de la planification du développement durable jusqu’au droit des sols !
M. Thierry Repentin. Je vous rejoins !
M. Jean-Paul Alduy. Mais c’est sans doute dans le projet de loi Grenelle II que je trouverai la réponse à mes questions.
Enfin, j’approuve sans réserve l’ambition de cette loi, qui définit un ensemble cohérent d’objectifs et d’orientations, même si je reste impatient de voir les textes législatifs suivants pour préciser la nouvelle architecture juridique du développement durable.
Cette loi est un texte fondateur qui devrait, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, nous rassembler tous. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et au banc de la commission.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Monsieur le ministre d’État, je tiens tout d’abord à vous remercier. Vous nous permettez en effet d’entrer dans un monde nouveau.
Le Grenelle est une méthode nouvelle, mais c’est aussi un texte fondateur, comme l’a dit notre collègue Jean-Paul Alduy. En effet, nous sommes à un moment fondateur d’une conception du développement durable voulue par l’homme, soucieux de son environnement et de l’avenir.
L’excellent rapport de notre collègue Bruno Sido, les travaux de la commission et les interventions précédentes me permettent de me concentrer sur trois points.
D’abord, la conception des transports. Oui, il faut donner la priorité au transport ferroviaire ! Il faut même accélérer le processus en qui concerne le TGV ! Jean-Paul Alduy et Jean-Paul Fournier ne me démentiront pas. Par exemple, le contournement de Nîmes et de Montpellier doit être réalisé au plus vite afin d’atteindre ensuite le tunnel du Perthus où l’on va percer pour la première fois les Pyrénées et faire entrer le TGV en Espagne, avec l’écartement européen des rails.
Il ne faut pas oublier les liaisons secondaires. Permettez à l’élu de la Lozère que je suis de dire que, parallèlement à ces travaux, il faut sauver les liaisons comme, par exemple, Clermont-Ferrand–Nîmes–Langogne ou Clermont-Ferrand–Béziers, au moins pour le transport des marchandises jusqu’à Saint-Chély-d’Apcher.
Dans une perspective d’équilibre, il ne faudrait pas non plus rejeter totalement les transports routiers. Là où les trains ne passent pas, des efforts sont nécessaires en matière de réseau routier. Prenons l’exemple du projet de la route nationale 88 qui bénéficie d’une charte de développement durable signée depuis 2007. Ce projet a pour objectif de réaliser une liaison de développement local entre Lyon et Toulouse, en passant par … la Lozère ! (Sourires.)
M. Bruno Sido, rapporteur. Ah ! tant mieux !
M. Jacques Blanc. Cette route serait une artère de vie et, par conséquent, un facteur d’équilibre. C’est tout le projet du développement durable !
J’en arrive ensuite à l’agriculture. Je dis « oui » à l’agriculture biologique, mais à condition qu’on lui permette de vivre ! Ce n’est pas le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Emorine, qui me contredira : il faut pouvoir tirer des ressources de cet effort demandé à nos agriculteurs.
Personne n’a parlé, et je m’en étonne, de l’agriculture raisonnée. Certains y voient une concurrence à l’agriculture biologique ; pas moi ! Il y a là, à mon avis, quelque chose à faire.
En revanche, je me réjouis des propositions concernant l’apiculture. Les abeilles sont des facteurs et des témoins de vie essentiels. Je souhaite que l’interprofession puisse participer à la structure de recherche sur la pollinisation. Dans ce secteur très précis, on voit la nécessité de cette agriculture pour la pollinisation, et donc pour la qualité de notre environnement.
J’en viens enfin à la biodiversité. Tout d’abord, bravo pour la trame verte ! Mais je me permets de vous interroger : quel rôle les parcs nationaux naturels jouent-ils dans cette trame verte ?
Après la loi que nous avons votée, la réforme des parcs naturels permet de faire de ces derniers des phares, des exemples du développement durable. Pardonnez-moi encore, mais le département de la Lozère a la chance d’abriter la plus grande partie du parc national des Cévennes...
M. Bruno Sido, rapporteur. Une merveille !
M. Jacques Blanc. ...qui sera peut-être, grâce à votre soutien, monsieur le ministre d’État, classé avec les Causses au patrimoine mondial de l’UNESCO ! (Sourires.)
C’est un atout ! Dans la trame verte, ces parcs naturels nationaux peuvent être des facteurs de dynamique au moins pour la biodiversité assez spécialisée.
Je terminerai en saluant le grand mérite de cette démarche. En effet, vous nous avez permis de sortir des conflits opposant les prétendus défenseurs de l’environnement à ceux que l’on soupçonnait d’ignorance et d’incompréhension. Vous avez réconcilié les agriculteurs avec l’environnement. Vous avez permis l’émergence d’un projet positif dans un monde divisé. C’est peut-être d’ailleurs la marque la plus importante de ce premier texte fondateur qui sera suivi, demain, de nouveaux textes.
Nous serons sortis d’une situation conflictuelle pour rassembler nos volontés et nos énergies. Les scientifiques devront être rigoureux et comprendre les élus, qui seront tenus à la même rigueur.
Vous nous avez permis aussi de sortir d’un certain scepticisme pour adhérer à une démarche de développement durable, qui est sans doute une réponse forte à l’angoisse de l’homme. Ce dernier a besoin – c’est le neuropsychiatre qui parle – de se réconcilier avec lui-même. Vivant dans l’angoisse, il a besoin à la fois de cet environnement naturel protégé et de l’assurance qu’il ne détruit pas l’avenir de ses enfants ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Jean Bizet. Merci docteur !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État, dont je salue la présence pour ce premier débat au Sénat, me réjouissant que les remaniements ministériels n’aient pas abouti à la diminution du nombre des femmes dans ce gouvernement. (Applaudissements.)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargé de l’écologie. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les sénateurs, je suis très heureuse que ce premier discours en qualité de secrétaire d’État ait lieu ici devant vous, à l’occasion de l’examen de ce texte de loi qui me tient particulièrement à cœur.
Mais j’ai bien entendu le message de M. Fortassin. Nous sommes à quelques jours d’un événement dramatique pour la forêt et pour ses habitants, qui ne verront plus jamais ce qu’ils ont connu auparavant.
Le rapport de M. Sido nous a apporté énormément pour la construction de ce texte. Ainsi, la commission a procédé à soixante-quinze auditions et a déposé plus de cent amendements, dont l’examen contribuera à la richesse du débat.
L’ensemble des orateurs ont adhéré à la démarche et aux objectifs du projet de loi.
Monsieur Muller, l’ensemble des discussions ont été très riches et nous avons associé des scientifiques aux débats du Grenelle de l’environnement. Ainsi, Jean Jouzel, prix Nobel de la paix 2007, membre du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC, a présidé le groupe de travail n° 1 « Lutter contre les changements climatiques et maîtriser l’énergie ».
En ce qui concerne le projet de loi sur l’empreinte écologique, nous avons chargé le Conseil économique, social et environnemental d’un rapport sur la question. Le principe d’empreinte écologique est extrêmement intéressant et mérite des précisions.
Il est très difficile d’être exhaustif ; j’essaierai néanmoins de répondre aux différents points et remarques soulevés par vos interventions, mesdames, messieurs les sénateurs.
S’agissant tout d’abord de la fiscalité et du financement, sujet que le rapporteur, M. Bruno Sido, a maintes fois soulevé – c’est bien la richesse d’ailleurs de votre travail, monsieur le rapporteur –, nous sommes tout à fait d’accord sur les conditions formulées par la commission des affaires économiques.
Il s’agissait d’ailleurs d’un des axes fondamentaux du discours du Président de la République en octobre 2007. Le Grenelle de l’environnement se fait à taux de prélèvement obligatoire constant ; il ne doit pas se traduire par une hausse de la fiscalité pesant sur le pouvoir d’achat des salariés ou sur la compétitivité des entreprises.
C’est ainsi que les 2,7 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires qui ont été décidés à l’issue du Grenelle de l’environnement seront intégralement reversés sous forme d’allégements ou d’exonérations. Nous nous inscrivons, comme le demande le sénateur Jean-Michel Baylet, dans une logique d’incitation et d’orientation et non dans une logique de rendement fiscal.
Concernant le financement des transports – cette question est en effet revenue à plusieurs occasions dans le débat, ce qui est normal –, sachez, monsieur Pointereau, que le Gouvernement est très sensible aux questions que pose, pour le transport routier de marchandises, la mise en œuvre de l’éco-redevance.
C’est la raison pour laquelle nous avons adopté un certain nombre de dispositions pour reporter une partie de cette éco-redevance sur les chargeurs et les donneurs d’ordre. Il est normal que cette charge soit partagée.
Nous avons également prévu des mesures d’accompagnement qui font actuellement l’objet d’une étude confiée à M. Liebermann. Ce sujet mérite en effet des études très poussées en raison des effets de report entre les secteurs. Nous travaillerons, quoi qu’il en soit, en concertation avec l’ensemble des professionnels du transport routier. D’ailleurs, cet après-midi encore, le secrétaire d’État chargé des transports, Dominique Bussereau, était en leur compagnie.
Comme le souhaite Mme Fabienne Keller, nous avancerons aussi vite que possible sur ce dossier.
Monsieur Jacques Blanc, vous avez raison de rappeler que ce n’est pas un moratoire sur les routes qui a été décidé, mais une nouvelle conception et une nouvelle méthode de concertation, avec le principe d’inversion de la charge de la preuve. Il s’agit d’observer les résultats du projet avec et sans route, puis d’étudier et de décider ainsi en connaissance de cause.
J’ajoute, comme l’a dit M. le rapporteur, que le Grenelle de l’environnement est bien un accélérateur de l’investissement local. D’ailleurs, le Grenelle de l’environnement ne vivra qu’à condition d’être territorialisé et de venir du territoire.
Pour chaque chantier et chaque priorité, nous avons prévu des dispositifs financiers afin d’aider les collectivités à engager ces projets d’infrastructures. Il s’agit, comme l’a rappelé M. Nègre, d’un financement sans précédent dans le domaine du transport.
Messieurs Teston et Ries, l’État s’est engagé à financer les projets de transports collectifs en site propre, les TCSP, à hauteur de 15 à 25 %, ce qui constitue une grande rupture par rapport à la précédente situation. Nous nous sommes d’ailleurs beaucoup battus sur ce dossier. Au total, ce sont près de 2,5 milliards d’euros de subventions de l’État qui seront mobilisés, dans un premier temps, en faveur des TCSP dans les collectivités locales. Un premier appel à projet a été lancé au début du mois de mars. Le second est prévu avant la fin de l’année 2010, monsieur Nègre.
Pour les lignes à grande vitesse, nous avons appliqué un principe de répartition des contributions publiques sur la base d’une stricte parité entre l’État et les collectivités locales.
Comme M. Biwer l’a rappelé, nous allons consacrer près de 400 millions d’euros supplémentaires par an à la régénération ferroviaire. C’est du jamais vu depuis vingt ans !
S’agissant de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFIFT, 876 millions d’euros ont été inscrits en autorisations d’engagement dans la programmation financière de l’agence sur la période 2009-2011. S’y ajoute une enveloppe de 8 milliards d’euros de prêts de la Caisse des dépôts et consignations pour financer les infrastructures ferroviaires, fluviales ou de transport urbain. Sans être experte en matière de transports, il me semble que ces efforts tendent à répondre à vos attentes en termes de financement, mesdames, messieurs les sénateurs.
Monsieur Teston, des fonds ont été débloqués pour résorber les « points noirs bruit », malgré toute la difficulté que présentent ces projets. L’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME, maison que je connais bien, y consacre 130 millions d’euros.
Comme l’a souligné très justement M. Bizet, expert en ce domaine – et je le remercie une nouvelle fois pour son soutien tout au long du processus –, le Grenelle est avant tout une formidable source de croissance et de compétitivité, et je ne crois pas, contrairement à M. Raoul ou à Mme Didier, qu’il y ait une contradiction entre l’environnement et la croissance.
M. Daniel Raoul. Je n’ai pas dit cela !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Il s’agit d’une nouvelle conception de la croissance, qui se fonde sur la rareté des ressources et leur caractère périssable, afin que nos enfants puissent bénéficier demain de la croissance que nous enregistrons aujourd'hui.
Madame Hoarau, vous avez souligné que la Réunion est déjà pionnière en matière de photovoltaïque. L’outre-mer a toutes les cartes en main, messieurs Lise et Virapoullé, pour devenir à terme la vitrine du Grenelle de l’environnement, notamment dans le secteur des énergies renouvelables, qu’elle se doit de développer grâce à ses ressources énormes de géothermie, à la biomasse, tout en préservant sa biodiversité, précieuse pour la France. C’est bien ce que nous avons voulu exprimer dans ce texte.
Monsieur Repentin, nous ne négligeons pas l’aide au logement HLM par rapport au logement individuel. Vous avez raison de le souligner, les performances énergétiques des logements HLM sont supérieures à celles de la moyenne des logements particuliers, et leur coût unitaire de rénovation se révèle moins élevé que celui d’un logement classique.
Le prêt proposé par la Caisse des dépôts et consignations constitue un grand progrès, mais, à l’évidence, la baisse du taux du livret A nous conduira à en réexaminer ensemble le montant, comme l’a suggéré M. Alduy.
Vous avez été plusieurs à soulever la question de l’étalement urbain. L’artificialisation des sols est un enjeu fondamental du Grenelle de l’environnement, sachant que 60 000 hectares de zones naturelles disparaissent chaque année. La refonte des documents de planification est une nécessité dont nous devrons reparler à l’occasion de la discussion du projet de loi d’engagement national pour l’environnement.
Madame Keller, le logement est en effet le principal chantier, celui qui permet de réaliser les économies d’énergie les plus rapides, d’où son intérêt à la fois environnemental, économique et social. C’est aussi le chantier le plus rentable, et – M. Alduy l’a rappelé – la norme que nous avons définie en accord avec les professionnels constitue, pour ces derniers, un objectif et un outil de mobilisation.
M. Nègre a mis l’accent sur la formation professionnelle dans le secteur du bâtiment, enjeu majeur pour relever le défi de ce secteur. Nous avons confié une mission à M. Pelletier, appelé « M. Bâtiment », pour organiser, là encore, la mobilisation des professionnels, en étroite concertation avec la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB, et la Fédération français du bâtiment, la FFB.