M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 185, présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mmes Pasquet, Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Avec cet article, comme vient de l’indiquer Mme Schillinger, vous entendez faciliter le cumul emploi-retraite, c’est-à-dire ouvrir aux salariés la possibilité de travailler après avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite. Encore faudrait-il qu’il y ait de l’emploi !
En réalité, avec cet article, vous préparez progressivement l’allongement de la durée de cotisation, en imposant l’idée qu’il est souhaitable, pour les comptes sociaux comme pour le pouvoir d’achat des personnes concernées, de travailler plus longtemps. Et, pour se faire, vous ne reculez devant rien, n’hésitant pas à préciser que la décision relève de la liberté de chacun. J’ai d’ailleurs, sur cette notion de liberté, plusieurs remarques à formuler.
Vous voudriez faire croire aux salariés que, dans leur majorité, ils ne seraient concernés par cette mesure que s’ils l’acceptaient. Ce serait un acte volontaire, que vous présentez comme entièrement désocialisé, c'est-à-dire indépendant de tout contexte social. Or, à n’en pas douter, la majorité des retraités de notre pays susceptibles de reprendre une activité professionnelle le feraient principalement parce que l’érosion de leur pension, la baisse de leur pouvoir d’achat, la flambée considérable des prix les y obligeraient. Où est ici la liberté ?
Je vois dans un tel choix non pas la liberté mais tout au contraire la contrainte, celle dans laquelle sont placées les personnes dont la pension de retraite ne suffit plus et qui sont obligées de trouver des moyens nouveaux pour continuer à vivre dans la dignité.
Oui, l’appauvrissement des retraités de notre pays découle précisément de cette liberté que vous portez comme un étendard.
Depuis des années, vous refusez d’organiser, comme nous vous demandons de le faire, un véritable Grenelle des salaires, au motif que celui-ci relèverait de la négociation entre les organisations syndicales et professionnelles et que le Gouvernement ne pourrait s’immiscer dans cette relation.
Cette liberté offerte aux uns, en l’occurrence les patrons, conduira les retraités de notre pays à reprendre une activité. La liberté des uns devient le fardeau des autres !
Enfin, pour continuer sur cette notion, je suis étonnée de voir combien le Gouvernement, sur ce sujet comme sur d’autres, oublie le sens même de la loi et des mesures impératives, qui servent à protéger les plus faibles, quitte à agir contre leur intérêt immédiat. Tel est le sens d'ailleurs de toutes les politiques de prévention et d’intervention en matière de santé publique.
Qui ne connaît pas un conducteur qui voudrait être libre de conduire sans ceinture de sécurité ? Pourtant, le législateur ne songerait jamais à revenir sur la règle impérative du port obligatoire de la ceinture de sécurité. Nous avons accepté collectivement de réduire ce qui apparaissait de prime abord comme la liberté de chacun pour garantir tout à la fois les intérêts individuels et collectifs.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Annie David. Au sein du groupe CRC, nous n’avons d’autre prétention que de faire de même ici.
Notre République s’est construite sur l’idée qu’il ne peut y avoir de devoirs sans droits. D'ailleurs, vous le savez fort bien, chers collègues de la majorité, vous qui appliquez cet adage aux demandeurs d’emplois, aux retraités et aux bénéficiaires de minima sociaux !
Je m’étonne donc de constater que cette mesure, qui sera profitable aux entreprises, ne s’accompagne d’aucune mesure obligatoire à leur encontre. Pourquoi ne pas imaginer l’interdiction du recours au temps partiel ou au licenciement économique pour les entreprises qui mettraient à la porte des salariés de plus de soixante ans ?
Toutefois, au-delà de la question de la liberté, dont on voit qu’elle ne constitue qu’un prétexte, c’est bien sur la notion de travail que nous divergeons.
Nous considérons, au sein du groupe CRC, qu’il y a une vie après le travail. Et celle-ci, qu’elle soit sociale, syndicale, associative ou politique, n’est pas moins noble que le temps travaillé !
Nous considérons que la retraite, justement rémunérée et permettant de vivre dans la dignité, constitue une compensation que la nation doit au salarié pour les efforts que celui-ci a fournis.
Or, avec cet article, vous retirez ce droit au salarié, en faisant comme s’il n’avait rien apporté au pays ! Vous effacez tout simplement l’apport singulier qui fut le sien.
Mais si nous divergeons sur la place du travail dans la vie de nos concitoyens, nous sommes également en désaccord sur le rôle sociétal qui est le sien.
Vous reprochez aux communistes et à la gauche en général de vouloir partager le travail. Mais que proposez- vous, au fait ? Uniquement la concurrence entre les salariés de tous âges !
Votre refus de partager le travail aurait un sens si vous acceptiez de répartir les richesses. Mais vous vous opposez à l’une comme à l’autre solution, préférant partager la misère, ou les miettes du travail.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Annie David. Au sein du groupe CRC, nous sommes convaincus que le travail occupe une place primordiale dans la vie de nos concitoyens et dans la construction des rapports collectifs. Nous considérons qu’il joue un rôle émancipateur et qu’il constitue un outil de reconnaissance sociale. C’est pourquoi nous refusons d’en priver les plus jeunes, au risque sinon de les plonger plus longtemps encore dans la pauvreté, la précarité et le sous-emploi.
Nous refusons la logique du Gouvernement, qui tend à opposer les pauvretés entre elles.
C’est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 511, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après le II de cet article, insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
II bis. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 341-15 est supprimée.
2° Dans le premier alinéa des articles L. 382-27 et L. 634-2, la référence : « L. 352-1, » est supprimée.
II ter. - Dans l'article 20 de l'ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, la référence : « L. 352-1, » est supprimée.
La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il s'agit simplement d’un amendement de coordination.
M. le président. L'amendement n° 383, présenté par M. Detcheverry, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le VII de cet article :
VII. - L'article 14 de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, le mot : « définitive » est supprimé ;
2° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au précédent alinéa, et sous réserve que l'assuré ait liquidé ses pensions de vieillesse personnelles auprès de la totalité des régimes légaux ou rendus légalement obligatoires, de base et complémentaires, français et étrangers, ainsi que des régimes des organisations internationales dont il a relevé, une pension de vieillesse peut être entièrement cumulée avec une activité professionnelle :
« a) À partir de l'âge prévu au 1° de l'article 11 ;
« b) À partir de l'âge prévu au premier alinéa de l'article 6, lorsque l'assuré justifie d'une durée d'assurance et de périodes reconnues équivalentes mentionnée au deuxième alinéa du même article au moins égale à la limite mentionnée au même alinéa. ».
La parole est à M. Denis Detcheverry.
M. Denis Detcheverry. Cet amendement tend à prolonger les travaux de l’Assemblée nationale, qui a complété l’article 59 du projet de loi par un paragraphe VII prévoyant que les dispositions de cet article s’appliquent au régime d’assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon.
L’objectif de l’Assemblée nationale est de faire en sorte que les assurés de ce régime puissent bénéficier de la libéralisation du cumul emploi-retraite.
Dans un souci de lisibilité, il est préférable que le texte régissant le régime d’assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon soit complété par une disposition expresse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. L’amendement n° 185 tend à supprimer l’article 59 du projet de loi, qui autorise le cumul emploi-retraite pour tout retraité à partir de soixante ans, bien entendu, à condition que celui-ci ait cotisé suffisamment pour bénéficier d’une retraite à taux plein ou, à défaut, à partir de soixante-cinq ans.
Actuellement, vous le savez, mes chers collègues, le cumul emploi-retraite souffre de certaines restrictions qui, comme la commission a déjà eu l’occasion de le souligner, vont à l’encontre de la politique menée en faveur des seniors.
Aujourd'hui, notre objectif prioritaire est de permettre à ces travailleurs âgés d’arbitrer librement – j’insiste sur cet adverbe – entre un départ à la retraite choisi et la poursuite d’une activité professionnelle. Dans cette perspective, les obstacles au cumul emploi-retraite doivent être levés. L’adoption de cet amendement allant à l’encontre de cet objectif, la commission émet un avis défavorable.
J’en viens à l’amendement n° 383.
Comme nous l’avons souligné ce matin, l’Assemblée nationale a étendu à Saint-Pierre-et-Miquelon le champ d’application de la mesure libéralisant le cumul emploi-retraite.
Afin de rendre lisible cette disposition, qui institue en réalité un régime d’assurance vieillesse à Saint-Pierre-et-Miquelon, nous devons la compléter. Tel est l’objet de cet amendement, sur lequel la commission émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En ce qui concerne l’amendement de suppression n° 185, l’avis du Gouvernement est évidemment défavorable.
Je voudrais rappeler à Mmes Annie David et à Patricia Schillinger que la politique du Gouvernement vise deux objectifs.
Tout d'abord, nous voulons favoriser le maintien au travail des seniors âgés de cinquante-cinq ans à soixante ans, qui constitue un sujet d’importance. En supprimant, pour la première fois, la dispense de recherche d’emploi, nous avons témoigné de notre volonté forte d’avancer sur ce dossier.
Ensuite, nous entendons donner à ceux qui partent à la retraite la possibilité d’adapter leur activité à leur situation personnelle.
De ce point de vue, je rappellerai seulement sur quelle absurdité administrative repose aujourd'hui notre système : un salarié a envie de continuer à travailler ; son patron en est d'accord, car la personne représente un atout important pour son entreprise, mais on le lui interdit ! On demande au salarié d’aller voir ailleurs pendant six mois et, peut-être, alors, pourra-t-on en reparler... Pis, on place sa rémunération sous contrainte, puisqu’il n’est pas autorisé à cumuler sa retraite et son salaire, qui doit être inférieur à son ancien traitement ou à 160 % du SMIC. Comprenne qui pourra !
La réalité, c’est que l’on veut décourager les salariés de travailler et les empêcher de choisir le cumul emploi-retraite !
Mme Annie David. Et les jeunes qui sont au chômage ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. En revanche, madame David, vous avez raison de rappeler que des garanties sont nécessaires ; le choix, autorisé par Xavier Bertrand, de cumuler emploi et retraite ne doit pas se payer du versement de retraites de misère, car ce serait alors une très mauvaise opération.
M. Guy Fischer. C’est ce qui va se passer !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. C’est pour cette raison que le présent article restreint expressément ce cumul aux salariés ayant acquis la totalité de leurs droits à la retraite.
M. Jean-Louis Carrère. Voilà la grande question !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Ainsi, chacun pourra exercer son choix de façon libre et éclairée, sans subir aucune contrainte extérieure.
Pour reprendre l’image de la circulation automobile que vous avez utilisée, madame David, le salarié se trouve bien dans une voiture, protégé par une ceinture de sécurité et par les airbags, mais personne ne le force à aller dans telle direction plutôt qu’une autre, car il a tout de même la possibilité de choisir sa destination ! (Sourires.)
En ce qui concerne l’amendement rédactionnel n° 511, cette disposition est tout à fait utile. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
S'agissant de l’amendement n° 383, M. Denis Detcheverry connaît parfaitement les problèmes propres à Saint-Pierre-et-Miquelon. La proposition qu’il a formulée permettra utilement de transposer ce dispositif à cette collectivité, et je l’en remercie. Le Gouvernement émet donc également un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 185.
Mme Annie David. Mon explication de vote sera en même temps une interrogation.
Monsieur le secrétaire d'État, je ne vois pas dans votre réponse les garanties dont vous parlez.
Si je vous ai bien entendu, pour cumuler emploi et pension un salarié devra avoir acquis la totalité de ses droits à la retraite. Or les personnes qui sont les plus susceptibles de reprendre une activité sont justement celles qui ne disposent pas d’une pension complète !
Je pense en particulier aux femmes qui, très souvent, perçoivent des pensions très faibles et bénéficient d’un complément de retraite. Celles qui n’ont pas accompli une carrière pleine, n’ont pas cotisé suffisamment et n’ont donc pas droit à une pension à taux plein ne pourront pas, monsieur le secrétaire d'État, cumuler emploi et retraite, puisque le dispositif ne s’applique - voilà votre fameuse garantie – qu’aux personnes ayant acquis des droits complets !
Votre logique m’échappe !
Vous allez, en fait, jouer contre celles et ceux qui auraient le plus besoin de retrouver un emploi une fois parvenus à l’âge de la retraite !
M. le président. Je mets aux voix l'article 59, modifié.
(L'article 59 est adopté.)
Article 60 (priorité)
I. - L'article L. 351-10 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La majoration de pension prévue à l'article L. 351-1-2 s'ajoute également à ce montant minimum dans des conditions prévues par décret. »
II. - Le III de l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « trimestres de service » sont remplacés par les mots : « trimestres d'assurance » ;
2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Sont pris en compte pour ce calcul les trimestres entiers cotisés. » ;
3° Au dernier alinéa, le pourcentage : « 0,75 % » est remplacé par le pourcentage : « 1,25 % ».
III. – Le I et le 1° du II sont applicables aux pensions prenant effet à compter du 1er avril 2009. Les 2° et 3° du II sont applicables aux trimestres d'assurance cotisés et effectués à compter du 1er janvier 2009.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, sur l'article.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le secrétaire d'État, le dispositif organisant la surcote, que vous nous demandez ici de compléter, apporte une pierre supplémentaire à l’édifice que vous construisez à travers ce projet de loi et qui culminera dans quelques instants avec l’article 61 ! Tous ces efforts visent à faire travailler les seniors le plus longtemps possible, afin de ne pas vider les caisses de retraite.
Quel que soit le régime de retraite pris en considération, toutes les études montrent que le coefficient de majoration n’a pas atteint pleinement ses objectifs et qu’il se révèle insuffisamment incitatif pour retarder les départs en retraite des assurés.
Grâce à cette mesure, qui vise à faire travailler les seniors le plus longtemps possible, ce dispositif est aujourd'hui plus attractif. Toutefois, comme je le soulignais dès 2003, il tend à créer des inégalités, dans la mesure où il permet à certains de compléter leur retraite mais ferme cette possibilité aux salariés fatigués, malades ou qui n’ont pas la force de continuer à travailler. Il s'agit donc d’une prime supplémentaire pour ceux qui vont bien et d’une pénalité de plus pour ceux qui vont mal !
Ces dispositions, comme toutes celles qui ont précédé ou qui suivront, retardent le départ à la retraite de façon très inégalitaire. Elles ne tiennent pas compte de la pénibilité du travail et ne règlent pas les problèmes qui se posent aujourd'hui.
M. le président. Je mets aux voix l'article 60.
(L'article 60 est adopté.)
Mise au point au sujet d’un vote
M. Yvon Collin. Monsieur le président, dans la séance d’hier, lors des scrutins publics sur les amendements nos 517, à l’article 61 bis, et 518, à l’article 61 ter, M. François Vendasi a été porté comme ayant voté pour, alors qu’il souhaitait voter contre.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue.
Article additionnel après l'article 60 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 479, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« L'assurance vieillesse garantit une pension de retraite à l'assuré qui en demande la liquidation à partir de soixante ans. À compter de 2009, cet âge est majoré d'un trimestre en 2009, 2010, 2011, 2013, 2014, 2015, 2017, 2018, 2019 et 2020 et d'un semestre en 2012 et 2016 pour atteindre soixante trois ans et demi en 2020. »
Cet amendement n'est pas soutenu. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
Article 61 (priorité)
I. - L'article L. 1237-5 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « sous réserve des septième à neuvième alinéas : » ;
2° Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° Pour les bénéficiaires d'une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 et mise en œuvre dans le cadre d'un accord professionnel mentionné à l'article L. 5123-6 ; »
3° Le 4° est complété par les mots : « et ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 » ;
4° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Avant la date à laquelle le salarié atteint l'âge fixé au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale et dans un délai fixé par décret, l'employeur interroge par écrit le salarié sur son intention de quitter volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse.
« En cas de réponse négative du salarié dans un délai fixé par décret ou à défaut d'avoir respecté l'obligation mentionnée à l'alinéa précédent, l'employeur ne peut faire usage de la possibilité mentionnée au premier alinéa pendant l'année qui suit la date à laquelle le salarié atteint l'âge fixé au 1° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale.
« La même procédure est applicable les quatre années suivantes. »
II. - Supprimé................................................................... ;
III. - À la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 1221-18 du code du travail, les mots : « âgés de soixante ans et plus licenciés » sont remplacés par les mots : « âgés de cinquante-cinq ans et plus licenciés ou ayant bénéficié de la rupture conventionnelle mentionnée à l'article L. 1237-11 ».
IV. - Au dernier alinéa du même article L. 1221-18, les mots : « au cours de l'année civile précédente » sont remplacés par les mots : « ou a été mis en retraite à l'initiative de l'employeur au cours de l'année civile précédente ainsi qu'aux employeurs dont au moins un salarié âgé de cinquante-cinq ans ou plus a été licencié ou a bénéficié de la rupture conventionnelle mentionnée à l'article L. 1237-11 au cours de l'année civile précédente ».
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer. Après nous être opposés à l’article 61 bis du projet de loi, relatif aux pilotes de ligne et aux personnels navigants techniques, ainsi qu’à l’article 61 ter, qui concerne les personnels navigants commerciaux, c'est-à-dire les hôtesses de l’air et les stewards, nous allons, je ne vous le cacherai pas, chers collègues, combattre vivement l’article 61 ! (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)
Chacun sait ici quel fut le parcours de cet article 61.
Chacun sait aussi que cet article, s’il était adopté, serait lourd de conséquences pour les salariés de notre pays. Il s’agirait une nouvelle fois d’une attaque violente portée contre un code du travail que vous êtes nombreux, chers collègues de la majorité, à désirer vider de sa substance et dont vous avez déjà détricoté une bonne partie.
M. Roland Courteau. C’est bien vrai !
M. Guy Fischer. D’ailleurs, c’est bien simple : depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, le code du travail perd chaque jour davantage sa fonction première, celle de protéger les salariés contre les mauvais coups du patronat.
Cet article, donc, constitue une attaque sans précédent contre le droit à la retraite.
Il y a eu, chacun s’en souviendra, des attaques frontales : l’assujettissement des retraites à la CSG et à la CRDS– merci, monsieur Barre ! –, les lois de M. Balladur, en 1993, qui supprimaient, pour les retraites du régime général, l’indexation des pensions sur les salaires au profit d’une indexation sur les prix, sans oublier, bien entendu, les contre-réformes de M. Fillon, en 2003, qui rallongent la durée de cotisation jusqu’à quarante et une annuités d’ici à 2012.
M. Jean-Louis Carrère. On l’appelle « l’effaceur » !
M. Guy Fischer. Nous assistons aujourd’hui à une série d’attaques d’un nouveau genre, plus subtiles, il est vrai, mais tout aussi néfastes et dangereuses pour nos concitoyens.
Toutes ces réformes – ces contre-réformes – conduisent nos concitoyens en fait à se déshabituer progressivement du régime de retraite par répartition.
Le Gouvernement n’a eu de cesse de développer les mécanismes de retraites individualisés, comme le PERP, le plan d’épargne retraite populaire, ou des mécanismes collectifs de substitution, comme le PERCO, le plan d’épargne retraite collectif.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La PRÉFON !
M. Guy Fischer. Ces deux types de mécanismes, qu’ils soient individuels ou collectifs, constituaient une brèche dans la solidarité nationale.
Avec eux, la règle n’est plus la solidarité nationale et intergénérationnelle : c’est le règne du chacun pour soi. Cela constitue une étape de plus vers la retraite par capitalisation, qui, pour nous, est inacceptable.
Aujourd’hui, avec cet article, le Gouvernement entend pousser plus loin encore sa politique de recul de l’âge de départ à la retraite.
M. Alain Gournac. Oui ! C’est vrai ! C’est la réalité !
M. Guy Fischer. Cela ne m’étonne pas de vous, monsieur Gournac ! Vous allez faire travailler les gens jusqu’à soixante-dix ans et plus, comme au Japon !
M. Alain Gournac. Ceux qui le souhaitent !
M. Alain Vasselle. Ceux qui veulent !
M. Guy Fischer. Pour se faire, monsieur le ministre, parce que vous considérez que quarante et une annuités ne suffisent pas, vous proposez que les salariés qui le souhaitent puissent poursuivre leur activité professionnelle au-delà de soixante-cinq ans, jusqu’à soixante-dix ans…
M. Alain Vasselle. Oui, ceux qui le souhaitent !
M. Guy Fischer. …et, pour justifier l’injustifiable, vous invoquez la liberté de choix ou encore le vieillissement de la population et l’allongement de l’espérance de vie.
M. Alain Vasselle. Vous êtes contre la liberté !
M. Guy Fischer. C’est à croire que, pour certains, il n’y a de vie méritant d’être vécue que s’il y a travail. L’engagement associatif, syndical, politique, le plaisir de vivre avec ses proches des moments de repos et de plaisir, vous n’en avez cure ! Or, n’en doutons pas, c’est entre soixante ans et soixante-dix ans que l’on profite au mieux de sa retraite.
Mme Jacqueline Chevé. La retraite, ils n’en veulent pas !
M. Guy Fischer. Cette vie-là n’est pas intéressante pour eux, car elle n’est pas productive, productive d’argent, s’entend ! Elle est productive de richesse, synonyme d’épanouissement, mais ce bonheur n’est pas quantifiable en espèces, il ne satisfait aucun critère de rentabilité immédiate, cette rentabilité si chère aux libéraux.
Vous justifiez cette mesure, monsieur le ministre, en brandissant l’étendard de la liberté individuelle, mais il n’y a, sur les travées du groupe CRC, et de la gauche en général, aucune sénatrice, aucun sénateur qui veuille priver notre peuple d’une once de liberté.
Alors, de grâce ! cessez d’user de cet argument tendancieux, car la vraie liberté, nos concitoyens la connaissent de moins en moins. Il ne s’agit plus de faire ce que l’on veut ; il s'agit bien plutôt désormais d’être débarrassé de certaines chaînes : la précarité, la pauvreté, la peur des fins de mois, la faim, le dénuement. Quant au désir d’aider ses enfants, de prendre des vacances, ce sont autant de libertés brimées, pour le retour desquelles le Gouvernement ne fait rien.
La liberté qu’il invoque pour justifier le passage à la retraite à soixante-dix ans n’en est pas une.
Ce n’est pas être libre que devoir travailler au-delà de ses envies, de ses capacités parfois, seulement pour trouver les moyens financiers qui vous manquent.
À cette prétendue liberté, je vous oppose un autre droit, monsieur le ministre, tout aussi important : le droit à la dignité.
M. Jean-Louis Carrère. Très bien !
M. Guy Fischer. Vivre dignement : tel est l’un des enjeux du xxie siècle.
M. Alain Gournac. Le travail, c’est la dignité !
M. Alain Vasselle. Arrêtez ce procès d’intention !
M. Guy Fischer. Récemment encore, avec le projet de loi tendant à généraliser le RSA, nous avons bien vu comment vous conceviez la dignité !
Toutefois, la liberté que vous brandissez ne suffira pas à répondre aux besoins de nos concitoyens, car, contrairement à ce que vous prétendez, ce qu’ils attendent plus que tout, c’est la reconnaissance de leur humanité, de leur droit à vivre dignement.
C’est pourquoi nous considérons, nous, membres du groupe CRC, qu’il ne peut y avoir aucun minimum social dont le montant soit inférieur au seuil européen de pauvreté.
Pour la droite, il en va de la liberté comme de la santé : elle n’a pas de prix, mais elle a un coût.