M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. M. Leclerc m’a interrogée sur la réforme de la biologie. Nous en discuterons évidemment de manière beaucoup plus approfondie lors de l’examen du projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires » puisque les mesures concernant la biologie y seront inscrites. Je vais néanmoins en dire quelques mots.
La biologie, qui a enregistré des évolutions considérables, nécessite une réforme en profondeur. La dernière loi la concernant date de 1975. Dans son rapport, M. Ballereau a indiqué un certain nombre de pistes auxquelles les professionnels souscrivent, sauf en ce qui concerne l’ouverture du capital, qui inquiète les biologistes, comme vous l’avez signalé.
M. François Autain. En effet, ils sont devenus anti-capitalistes ! De vrais révolutionnaires ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’argumentation de la France devant la Cour de justice des Communautés européennes pour réserver le capital aux seuls biologistes a été affaiblie par la décision du gouvernement socialiste de M. Jospin d’ouvrir le capital des laboratoires de biologie.
M. François Autain. Ah, ces socialistes ! (Nouveaux sourires.)
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il faut quand même bien rendre à César ce qui est à César et à M. Jospin ce qui est à M. Jospin : c’est lui qui a décidé l’ouverture du capital des laboratoires aux non-biologistes.
Tout cela a considérablement affaibli notre argumentation devant la Cour de justice et nous n’avons pas pu, à cause de cette décision malencontreuse, justifier d’un lien de sécurité entre la détention du capital et la qualité des soins : cela n’a pas été jugé recevable. Une grande menace pesait donc du fait de cette décision, et la condamnation par la Cour de justice était quasi certaine.
M. François Autain. Et vous ne pouvez pas revenir sur cette décision…
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous trouverez toutefois dans le projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires » un certain nombre de dispositions prudentielles qui permettront de sauvegarder le caractère médical de la biologie.
M. François Autain. Cela se fera par ordonnance et l’on ne pourra pas en débattre !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Eh oui, cela vous gêne, monsieur Autain, mais je suis obligée de dire la vérité sur ce sujet !
M. François Autain. Vous fuyez le débat !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Des questions m’ont également été posées sur l’évolution de notre modèle d’assurance maladie, notamment par M. Barbier.
Nous souhaitons préserver le modèle solidaire, hérité du pacte de 1945.
Non, je ne veux pas supprimer le remboursement du petit risque par la sécurité sociale de base. Nous sommes tous concernés par le petit risque. Remettre en cause son remboursement par la sécurité sociale reviendrait à revenir sur l’universalité de la couverture de l’assurance maladie. De plus, sur un plan strictement médical, c’est absolument contraire à une véritable politique de prévention, de détection d’un certain nombre de pathologies.
S’agissant des ALD, qui concernent 14 % de nos concitoyens et représentent 64 % de nos dépenses d’assurance maladie – et 80 % de leur croissance –, je tiens à réaffirmer qu’il n’est pas question de revenir sur la prise en charge à 100 %.
En revanche, il faut s’interroger, comme l’a fait la Haute Autorité de santé, sur l’évolution des critères de sortie de ce régime. En toute hypothèse, les patients doivent être assurés que la sortie – éventuelle - du régime des ALD n’implique en rien un moindre suivi.
Je crois surtout qu’il est très important d’améliorer leur accompagnement thérapeutique et que nous ne ferons pas d’économies sans améliorer la prise en charge des patients en ALD, notamment - et je rejoins Mme Dini ainsi que d’autres intervenants sur ce point - en développant, pour ces malades, les modes de rémunération au forfait.
Je suis donc d’accord avec vous, madame Dini, lorsque vous vous prononcez en faveur de modes de rémunération distincts du paiement à l’acte. Les dispositions que vous avez d’ailleurs adoptées dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2008 allaient dans ce sens, tant sur le contrat individuel que sur les expérimentations de nouveaux modes de rémunération. Six régions pilotes ont ainsi été sélectionnées pour ces expérimentations.
Dans ce même cadre, je rejoins totalement M. Barbier. Je comprends sa volonté d’interroger la Haute Autorité de santé sur les cures thermales. Mais je voudrais souligner qu’une diminution du taux de remboursement des cures thermales, qui représentent plus de 10 millions de journées de soins chaque année, dont 95 % sont prises en charge par l’assurance maladie, pourrait avoir des conséquences sur le pouvoir d’achat de certains de nos concitoyens.
M. François Autain. Et sur les malades !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Une telle mesure stigmatiserait en outre le thermalisme, alors que ce secteur s’est engagé dans une démarche d’évaluation scientifique. J’ai d’ailleurs encouragé les représentants des établissements thermaux à poursuivre leurs travaux lorsque je les ai reçus en mars dernier.
De manière générale, je souhaite maintenir le haut niveau de prise en charge solidaire de nos dépenses de santé. Il est élevé et ne diminue pas (M. François Autain manifeste son scepticisme), contrairement à ce que j’ai entendu dire à cette tribune. Il convient de ne pas oublier que, avec près de 77 % de prise en charge par l’assurance maladie, la France se situe au premier rang des pays de l’OCDE. Ce chiffre est d’autant plus frappant que les dépenses de santé dans le PIB s’élèvent à 11 %, ce qui place notre pays au troisième rang, après les États-Unis et la Suisse.
D’après la dernière étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, le reste à charge des ménages est orienté à la baisse sur une longue période. Il évolue peu depuis 2005, tout en restant inférieur à son niveau de 2000. Ce reste à charge était donc de 8,5 % en 2007 contre 9 % en 2000. Je suis heureuse de pouvoir vous donner ces vrais chiffres.
On ne peut donc pas dire, monsieur Fischer, que l’on va vers une privatisation de la sécurité sociale, bien au contraire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Plusieurs d’entre vous pensent que nous n’avançons pas assez vite sur des chantiers majeurs, tels que l’hôpital, comme l’a dit Alain Vasselle, ou les dépassements d’honoraires, comme l’ont souligné MM. Barbier et Leclerc.
Sur la lutte contre les dépassements d’honoraires, qui est indispensable pour assurer l’égalité d’accès aux soins, nous n’avons pas été inactifs, bien au contraire.
Vous avez voté, l’an dernier, une disposition permettant aux caisses de prendre des sanctions pécuniaires à l’encontre des professionnels de santé qui facturent des honoraires ne respectant pas le tact et la mesure. Le décret d’application de ce texte est actuellement en cours d’examen au Conseil d’État et devrait être publié avant la fin de l’année.
Par ailleurs, nous avons beaucoup progressé dans la transparence en renforçant l’obligation d’affichage, désormais assortie d’une sanction administrative, et en obligeant les médecins à communiquer à leurs patients une information préalable en cas de dépassement portant les honoraires à plus de 70 euros.
Je n’évoquerai pas longuement les établissements de santé, puisque nous y reviendrons demain matin au cours de la discussion.
Monsieur Cazeau, je ne peux vraiment pas vous laisser dire que l’hôpital public est le grand perdant de ce PLFSS. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. Il a raison !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. De même, monsieur Fischer, je ne peux pas vous laisser parler de « casse du service hospitalier ». Le taux d’évolution de l’ONDAM prévu pour l’hôpital est égal à celui qui est prévu pour les soins de ville !
Le plan Hôpital 2012 offre un soutien très important aux investissements structurants en termes d’offres de soins : 10 milliards d’euros d’investissements,…
M. Guy Fischer. Pour le privé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … dont 5 milliards financés par l’assurance maladie, et je viens de prendre les premières mesures de soutien.
Certains établissements connaissent en effet des difficultés. Il y a une grande diversité de situations ; ainsi, pour des établissements parfaitement similaires, on en voit qui sont à l’équilibre et d’autres qui sont en déficit. (M. Fischer s’exclame.) Cela montre bien que le déficit des établissements hospitaliers n’est pas une fatalité et qu’il faut donner aux établissements qui sont en difficulté un certain nombre de moyens et d’appuis.
M. François Autain. La seule solution, c’est de virer les directeurs !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ainsi, au niveau local, j’ai mobilisé les ARH pour accompagner les établissements dans leurs efforts de redressement. Les crédits d’aide à la contractualisation ont été augmentés en 2008 ; ils le seront davantage en 2009.
La création de l’Agence nationale d’appui à la performance sera le levier de la modernisation des établissements, en complément, évidemment, des ARH et des établissements eux-mêmes.
Je comprends les attentes de chacun sur l’hôpital. Nous y reviendrons globalement demain lors d’une discussion qui sera, je n’en doute pas, riche et fructueuse : j’ai gardé un excellent souvenir du débat qui a lieu au Sénat l’an dernier sur la démographie médicale.
Je voulais donc de nouveau vous remercier de la qualité de nos échanges et vous dire que les dépenses d’assurance maladie que je vous propose correspondent bien à des objectifs ambitieux et réalistes. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. . Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord, concernant la branche vieillesse, rappeler le sens du « rendez-vous 2008 » sur les retraites et revenir aussi sur les pistes d’évolutions structurelles de nos régimes de retraite que M. le rapporteur Dominique Leclerc ainsi que M. Jean Boyer ont évoquées.
La réforme de 2003 a fixé un cap avec une augmentation de la durée d’assurance en fonction de l’évolution de l’espérance de vie et des redéploiements financiers au sein de la protection sociale, dont a très bien parlé Éric Woerth tout à l’heure.
L’objet du rendez-vous 2008 n’était donc pas de refaire une réforme différente. Pour autant, est-il interdit de parler de sujets structurels et même structurants ? Non, car il n’y a pas de sujet tabou. Le Gouvernement a d’ailleurs indiqué aux partenaires sociaux, dans le document remis le 28 avril dernier, qu’il fallait poursuivre la réflexion dans le cadre du Conseil d’orientation des retraites.
Monsieur le rapporteur, vous avez aussi évoqué le sujet de la convergence entre les régimes de retraite. Nous avons fortement progressé dans cette voie avec la réforme des régimes spéciaux, vous l’avez rappelé et je vous en remercie.
M. le rapporteur Jean-Jacques Jégou a évoqué le rôle du FRR dans le financement à long terme de notre système de retraite. Je partage votre point de vue, monsieur le sénateur. Je veux aussi rappeler qu’il convient d’apprécier avec sérénité la performance de ce fonds, car il ne me semble pas pertinent de l’évaluer sur une seule année.
Des redéploiements sont nécessaires au sein de la protection sociale. MM. Alain Vasselle et Jean-Jacques Jégou ont tous deux évoqué ce sujet.
Nous appliquons en 2008 la loi de 2003, dont l’exposé des motifs prévoyait explicitement une augmentation des cotisations retraite compensée par une baisse des cotisations de chômage. Éric Woerth en ayant parlé à différentes reprises, je n’y reviens pas.
M. Lardeux a évoqué le transfert à la branche famille du financement des majorations de pensions de retraite.
C’est une façon de garantir également ces majorations. Comme vous l’avez dit, monsieur Lardeux, nous poursuivons le mouvement entamé en 2001 par la gauche et poursuivi depuis en 2002 et 2003. Il s’agit, selon moi, d’une mesure de clarification et de cohérence : il est normal que des mesures relevant de la politique familiale soient financées par la branche famille ; Nadine Morano y reviendra.
Je me réjouis de constater que la mobilisation en faveur de l’emploi des seniors suscite l’adhésion de l’ensemble des groupes de votre assemblée.
Monsieur le rapporteur Dominique Leclerc, vous avez souligné que l’emploi des seniors était un enjeu essentiel, y compris pour l’équilibre de la branche vieillesse.
Les résultats que nous affichons aujourd’hui à cet égard – notre pays est quasiment lanterne rouge en Europe et il n’y a pas lieu de se réjouir de ce classement – créent les conditions d’un gâchis humain, social et économique. Je suis d’accord avec vous : au lieu d’avoir de grands débats virtuels sur l’âge de la retraite – il est fixé à soixante ans, et il va le rester -, faisons en sorte que l’âge réel de départ à la retraite corresponde à l’âge légal de départ à la retraite dans notre pays. En effet, l’âge moyen de départ à la retraite n’est pas de soixante ans, mais de 58,7 ans exactement.
Vous avez dit craindre que les négociations d’entreprise et de branche en faveur de l’emploi des seniors ne produisent pas d’effets concrets. Je remarque que certains expriment la crainte inverse : j’en déduis donc que le Gouvernement ne doit pas se situer loin du bon équilibre en la matière. Notre logique est simple : nous faisons confiance aux partenaires sociaux au niveau des branches et des entreprises, qui sont le mieux à même de définir les mesures les plus efficaces. Il y a des exemples qui montrent que cela fonctionne. Nous voulons aussi encourager les bonnes pratiques. Mais ceux qui refuseraient de s’engager dans cette voie se verront appliquer la pénalité de 1 % dont j’ai parlé tout à l’heure à la tribune.
Vous avez aussi évoqué la prise en compte de la pénibilité. Si le sujet était simple, cela se saurait et, dans différents pays européens, on aurait enfin trouvé la solution.
Les partenaires sociaux n’ont pas pu aboutir à un accord malgré trois années de discussion. Face à cet échec, comme je l’avais dit, le Gouvernement a décidé de reprendre ce dossier en main. J’ai commencé à voir les partenaires sociaux ; je les rencontre chaque semaine sur le sujet.
Permettez-moi d’être confiant : aboutir sur ce dossier de la pénibilité va nous permettre également de bien comprendre qu’en matière de retraite il n’y a pas un seuil uniforme pour tous. Il y a par contre un âge légal pour tous : soixante ans. Mais quand on a commencé à travailler à quatorze, quinze ou seize ans, il ne faut même parler de soixante ans ; il faut tout simplement pouvoir partir à la retraite plus tôt, comme cela est prévu pour les carrières longues.
Sur ce sujet de la pénibilité, j’ajoute que ce n’est pas à soixante ans qu’on a le sentiment parfois d’être « cassé », c’est bien avant ; il faut donc que puissent être trouvées des voies de sortie avant cet âge. C’est l’enjeu des discussions sur la pénibilité. En revanche, quand une personne a envie de continuer à travailler, je ne vois pas pourquoi on l’obligerait à quitter l’entreprise à soixante-cinq ans, comme c’est le cas aujourd’hui.
C’est la raison pour laquelle il nous faut parler de tout. Certains s’obstinent à caricaturer le débat : je leur en laisse la responsabilité mais de tels propos m’incitent à rappeler l’action du Gouvernement et la volonté qui est la nôtre.
Enfin, vous avez fait des propositions en faveur de l’harmonisation du régime social et fiscal des indemnités de rupture : nous souhaitons que ce débat soit ouvert et nous l’avions dit avec Christine Lagarde et Laurent Wauquiez en présentant les orientations pour l’emploi des seniors le 26 juin dernier.
Mme Patricia Schillinger et M. Guy Fischer ont parlé des mises à la retraite d’office, sur lesquelles j’ai eu l’occasion de m’exprimer à la tribune. Certains propos que je qualifierai une fois encore de caricaturaux me conduisent à rétablir la vérité : nous créons un droit nouveau pour les salariés. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Raymonde Le Texier. Aucune date n’est prévue !
M. Xavier Bertrand, ministre. Il ne doit plus être possible de mettre à la retraite d’office un salarié qui souhaite continuer à travailler, parce qu’il a un emprunt à rembourser, les études de ses enfants à financer, ou simplement parce qu’il souhaite améliorer sa pension grâce à la surcote. Je vois M. le président About acquiescer et je sais que c’est un sujet qui lui tient à cœur.
M. Guy Fischer. Lui, il travaillerait volontiers jusqu’à quatre-vingts ans !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous avez aussi craint que le cumul emploi-retraite ne constitue une menace sur le taux de remplacement de notre régime de retraite. J’ai du mal à comprendre comment, au contraire, empêcher les gens de travailler serait plus efficace pour améliorer la situation des régimes de retraite.
Nous libéralisons le cumul emploi-retraite pour les assurés qui ont une carrière complète : autrement dit, il ne sera pas un complément de revenu pour les retraités qui percevraient les pensions les plus faibles.
Monsieur Cazeau, vous avez évoqué les préretraites et les comportements des entreprises qui continuent de ne pas jouer le jeu de l’emploi des seniors. Mais pourquoi, alors, n’avez-vous pas voté l’an dernier le PLFSS, dans lequel il était prévu d’augmenter la contribution des entreprises sur les préretraites ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux enfin répondre à ceux d’entre vous qui ont évoqué les mesures que nous prenons pour renforcer la solidarité, notamment vis-à-vis des plus fragiles.
Monsieur Leclerc, vous êtes revenu sur les efforts que nous faisons au travers de ce PLFSS. C’est vrai, nous tenons nos engagements vis-à-vis des titulaires du minimum vieillesse, des veufs et des veuves les plus modestes et des titulaires des retraites agricoles les plus faibles.
Madame Schillinger, monsieur Fischer, vous nous reprochez de ne pas en faire assez, notamment sur le minimum vieillesse. Permettez-moi tout de même de vous rappeler que la candidate socialiste à la présidentielle, Mme Royal pour la nommer, avait proposé une revalorisation de 5 % de ce minimum. Nous, nous avons promis 25% et nous tenons nos engagements depuis le début ! (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. François Autain. Sur cinq ans ! Sortez votre calculette !
M. Xavier Bertrand, ministre. Entre 5 % et 25 %, il n’y a pas photo ! N’allez pas reprocher à Mme Royal d’avoir manqué d’ambition à l’époque ! En tout cas, nous, nous faisons beaucoup mieux ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Scandaleux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Enfin, je souhaiterais évoquer la branche AT-MP et, ce faisant, vous répondre, monsieur Dériot. Je note que la commission des affaires sociales approuve le projet de suppression de la contribution employeur au FCAATA. Cette mesure répond, vous l’avez rappelé, aux graves défauts de cette contribution, qui se retournait contre ceux qu’elle voulait protéger, en nuisant à la pérennité des entreprises et, donc, à l’emploi.
Toujours sur la grave question de l’amiante, monsieur le sénateur, vous avez souhaité savoir si le rapport Le Garrec aurait une suite : la réponse est bien évidemment positive. L’objectif est que le FCAATA puisse mieux cibler ses interventions sur ceux qui ont effectivement souffert de la terrible maladie provoquée par cette substance.
Vous avez évoqué la différence de traitement qui existe entre les salariés relevant de régimes différents au cours de leur vie professionnelle. Le rapport Le Garrec préconisait de réfléchir à un dispositif dans lequel les régimes appliqueraient les mêmes règles afin de permettre aux salariés de bénéficier d’une allocation prenant en compte l’intégralité des périodes travaillées, quel que soit le régime auquel ils ont appartenu. Compte tenu de la complexité du sujet et aussi, disons-le, de sa sensibilité, je souhaite qu’une discussion s’engage avec les partenaires sociaux pour travailler à un rapprochement des conditions d’octroi et de prise en charge en la matière.
Vous avez regretté que la poursuite du paiement des indemnités journalières, prévue à l’article 66, ne couvre pas la période de quinze jours qui peut s’écouler avant la déclaration d’inaptitude. Le code du travail prévoit en effet deux visites espacées de quinze jours auprès du médecin du travail pour déclarer l’inaptitude d’un salarié, sauf lorsque le maintien dans son poste de travail présente un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité : en ce cas, le médecin du travail peut prononcer l’inaptitude dès la première visite.
Les partenaires sociaux, dans leur accord de mars 2007, dont nous transposons ici la proposition, s’étaient prononcés pour une allocation temporaire à l’issue de la seconde visite, qui ouvre un délai d’un mois au cours duquel l’entreprise a le choix entre le reclassement ou le licenciement du salarié. C’est ce que nous avons fait par le biais de l’article 66. Il était difficile de prévoir le maintien des indemnités journalières à l’issue de la première visite, car le salarié n’est pas encore déclaré inapte.
Ces situations sont complexes et elles ne sont pas satisfaisantes, à mes yeux. C’est pourquoi le Gouvernement souhaite que soit revu ce dispositif dans le cadre des négociations interprofessionnelles sur la médecine du travail qui doivent prochainement débuter, afin que cette période d’incertitude de quinze jours soit supprimée : soit en exigeant des visites de pré-reprise avant la fin de l’arrêt du travail, ce qui me semble être la meilleure solution afin d’anticiper le retour dans l’emploi des salariés ; soit en renonçant à ce principe de deux visites successives auprès du médecin du travail. La discussion est ouverte ; la balle est maintenant dans le camp des partenaires sociaux. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
M. François Autain. Tiens, la revoilà !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Monsieur le sénateur, elle était partie remplacer Xavier Bertrand pour prononcer un discours dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne. (Sourires.)
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaiterais répondre aux interventions qui concernaient les mesures du PLFSS relatives à la famille.
Monsieur le rapporteur Lardeux, je me réjouis que vous souteniez certaines mesures, notamment la majoration de 10 % du complément de libre choix de mode de garde, l’assouplissement des normes, l’autorisation donnée aux assistantes maternelles de passer de trois à quatre enfants et le regroupement de celles-ci.
Nous sommes toutefois en désaccord sur la question du transfert du FSV. Vous restez ferme sur votre position ; nous en débattrons au moment où l’article viendra en discussion. Permettez-moi cependant de vous indiquer d’ores et déjà qu’il est de notre devoir de faire preuve de responsabilité et d’être conséquents vis-à-vis des décisions qui ont été prises par les gouvernements précédents.
Vous l’avez souligné, monsieur Lardeux, ce transfert a été approuvé tour à tour par la gauche puis par la droite. Arrêtons donc la politique politicienne… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Raymonde Le Texier et M. François Autain. C’est vous qui dites cela ?
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. …et cessons de remettre au lendemain les décisions, rapport après rapport : ce n’est pas comme cela que nous sauverons notre système de solidarité nationale !
Cette décision se justifie parfaitement, car le FSV permet le financement d’avantages liés à des charges de famille. Il est donc parfaitement logique que des avantages familiaux soient rattachés à la branche famille.
Ce transfert est largement entamé puisqu’il est aujourd'hui réalisé à 60 %. Ce taux de mise en œuvre devrait progressivement atteindre 70 % en 2009, 85 % en 2010, avant d’être total en 2011. Il ne s’agit donc pas d’introduire une mesure révolutionnaire, mais de poursuivre un mouvement qui a déjà été bien amorcé et qui s’inscrit dans la logique des mesures prises depuis maintenant plus de dix ans. Après toutes ces années, il est temps de faire preuve de courage et d’aller au bout du processus.
Madame Campion, vous estimez que les dispositions de notre texte sont des « mesurettes » qui traduiraient un manque d’ambition. Je voudrais simplement vous rappeler que le Président de la République s’est engagé à créer entre 200 000 et 400 000 places de garde supplémentaires pour répondre à l’attente des familles.
M. Guy Fischer. C’est 200 000 !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Il n’a jamais été question de ne créer que des places de crèche. Il s’agit plutôt de développer des modes de garde qui soient à la fois adaptés aux territoires et à l’attente des parents, des professionnels et des élus locaux.
M. François Autain. C’est n’importe quoi !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Nous souhaitons mettre en œuvre très rapidement ces dispositifs, car le temps administratif n’est pas celui de l’enfant, qui grandit vite : nous avons donc le devoir de répondre vite à l’attente des parents.
Une étude du CREDOC a, je vous le rappelle, montré que les Français demandent à 70 % des équipements et à 30 % de nouvelles prestations. Notre priorité est donc de diversifier les modes de garde.
Madame la sénatrice, je voudrais maintenant aborder la question du regroupement des assistantes maternelles, qui sont l’une des « mesurettes » que vous avez évoquées. Je suis allée en Mayenne visiter l’un des douze sites qui font actuellement l’objet d’une expérimentation. À Evron, le maire, qui est socialiste, m’a vanté ce dispositif (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC), qu’il estime adapté aux besoins des familles de sa commune : il y a en effet des ouvrières qui commencent à travailler à quatre heures trente du matin à l’abattoir implanté dans cette commune. J’ai pu le constater, les parents, les élus locaux et les assistantes maternelles étaient satisfaits.
Nous allons généraliser ce dispositif sur l’ensemble du territoire, ce qui nous permettra de créer, dans les meilleurs délais, 50 000 places de garde supplémentaires.
En ce qui concerne la possibilité offerte aux assistantes maternelles d’accueillir un enfant supplémentaire, nous devons faire preuve de pragmatisme ! Prenez l’exemple des pays du Nord, dans lesquels le système marche très bien : les assistantes maternelles peuvent accueillir jusqu’à cinq enfants. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mmes Annie Raymonde Le Texier, Jarraud-Vergnolle et Jacqueline Chevé. Elles n’ont pas du tout la même formation !
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. Je n’ai pas décidé seule de ce dispositif : il résulte de négociations que j’ai engagées avec les professionnels et du dialogue que j’ai mené avec l’Association des maires de France et l’Assemblée des départements de France. Il s’agissait d’une attente des assistantes maternelles et des parents, qui ne peuvent que se réjouir d’avoir le choix de pouvoir mettre leur enfant soit dans une structure d’assistantes maternelles, soit chez les assistantes maternelles elles-mêmes, soit dans une structure de garde collective.
Quant au complément de libre choix de mode de garde, c’est la première fois qu’on l’augmente. C’est une mesure importante pour les femmes qui ont des horaires atypiques, qui travaillent tôt le matin ou qui rentrent tard le soir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous essayons de mener une politique familiale qui soit avant tout pragmatique, c'est-à-dire qui corresponde aux réalités du terrain.
Certaines mesures ne figurent pas dans le PLFSS, mais relèvent d’accords. J’ai ainsi décidé d’optimiser l’utilisation de structures existantes.
À Paris, le taux d’occupation des places des crèches hospitalières de l’AP-HP est de 70 %. J’ai évoqué cette situation avec ma collègue Roselyne Bachelot, qui m’a beaucoup aidé dans cette démarche d’optimisation. La semaine dernière, j’ai signé avec les hôpitaux de Lyon une convention de même nature, permettant d’ouvrir les places de crèche aux familles dont aucun membre ne travaille à l’hôpital mais qui habitent dans les quartiers limitrophes de l’hôpital. L’hôpital du Vinatier, dans le Rhône, m’en remercie car, jusqu’à présent, son taux d’occupation n’était que de 40 %.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez donc constater que Roselyne Bachelot et moi souhaitons véritablement optimiser la gestion des finances publiques. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)