M. Alain Vasselle, rapporteur. Ni ceux de la branche maladie !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. … cette année comme l’année dernière en raison de l’ampleur des incertitudes les entourant, ainsi que nous l’a déclaré le Premier président de la Cour, M. Philippe Séguin. Il est désormais de notre devoir de faire en sorte que cela change et que, l’année prochaine, la Caisse nationale d’allocations familiales, la CNAF, puisse présenter des comptes améliorés pour la branche famille.
Pour ce qui est du refus de certifier les comptes de la branche recouvrement et de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, il va également falloir que les points de « désaccord » entre la Cour, d’une part, les services de l’ACOSS et de la tutelle – vos services, monsieur le ministre –, d’autre part, ne puissent pas se reproduire. Nous sommes prêts à travailler avec vous en ce sens.
En conclusion, je veux insister sur le caractère stratégique de l’année 2009. Des décisions majeures, peut-être douloureuses, devront être prises pour inverser les tendances actuelles et permettre un retour à l’équilibre à moyen terme de nos comptes sociaux. Nous ne pouvons plus repousser encore les échéances.
Monsieur le ministre, je souhaite que les décisions du Gouvernement traitent réellement et en profondeur l’ensemble des questions que M. Alain Vasselle et moi-même évoquons ce matin devant vous. Vous pouvez compter sur notre soutien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’espère que ce débat d’orientation budgétaire est le dernier de l’ancien temps, en d’autres termes du temps d’avant la révision constitutionnelle ! En effet, si cette dernière est adoptée lundi, notre débat se conclura, l’an prochain, par une résolution. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.) Cela transformera beaucoup, me semble-t-il, la conception des débats, contribuera à les finaliser et permettra à notre Haute Assemblée de prendre ses responsabilités.
M. Aymeri de Montesquiou. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par ailleurs, j’espère aussi que, l’an prochain, nous aurons des écrans afin de projeter des tableaux, des animations, comme nous en avons fait l’expérience, voilà quelques années, pour la présentation d’une loi de finances. En effet, à quoi bon paraphraser à la tribune des tableaux de chiffres ? Ne serait-il pas préférable de mieux associer l’auditoire à une vision plus concrète et plus moderne des enjeux de nos finances publiques ?
J’espère enfin, et surtout, mes chers collègues, que, l’an prochain, le temps des menaces se sera éloigné.
Cette année, nous examinons les perspectives des finances publiques dans un contexte international et national plus que contrasté.
Nous vivons un choc de l’énergie, choc qui nous appelle, comme les précédents, à envisager des mesures structurelles, des changements de comportements. Il conviendra d’en tirer les conséquences dans les priorités que nous nous fixerons en matière de finances publiques. Vous y avez d’ailleurs fait allusion avec le Grenelle de l’environnement, monsieur le ministre.
Nous vivons sans doute un choc financier, ou plutôt un choc des systèmes financiers. Il n’y a plus de crise des subprimes, il y a une crise de la confiance sur les marchés, une crise du risque et de son appréciation. Et de cette crise, personne ne sortira indemne dans le monde. L’onde de choc se propage des États-Unis aux autres zones du monde, en particulier à l’Europe.
Entre la sphère financière et la sphère réelle, les liens sont multiples. L’accès au crédit sera plus difficile pour les particuliers, pour les entreprises, mais aussi pour l’État ! J’y reviendrai en évoquant la dette publique, l’une des préoccupations les plus lourdes de la période actuelle.
Notre environnement est caractérisé par des risques de discontinuité : l’inflation renaissante, l’énergie toujours plus chère, la parité monétaire pénalisante, la croissance qui marque le pas, autant d’éléments d’une équation d’une très grande difficulté.
Monsieur le ministre, cette difficulté constitue, pour la commission des finances du Sénat, une motivation supplémentaire pour soutenir vos efforts, lesquels s’inscrivent dans l’enjeu de toute une législature. Mais c’est 2009 qui sera l’année de vérité, l’année qui marque un tournant : c’est en 2009, en effet, que l’on saura si l’on est véritablement sur la trajectoire. C’est en 2009, et en exécution, que l’on saura si l’information diffusée à l’extérieur est identique à celle qui est destinée à l’intérieur.
Nous transmettons régulièrement à l’Union européenne des perspectives triennales qui se fondent sur des appréciations de la croissance. Par ailleurs, sur le plan interne, nous élaborons des perspectives triennales, mission par mission. Encore faudrait-il s’assurer que les données économiques de base sont les mêmes. Or, nous vivons avec certaines habitudes : il y a des perspectives d’un côté et des perspectives de l’autre. Il convient de les unifier, de rendre cohérentes nos appréciations du contexte économique.
Monsieur le ministre, en matière de méthodes, beaucoup de choses restent à faire. Certes, vous avez déjà bien progressé, notamment en intégrant les opérateurs dans certaines normes des finances publiques. Vous vous souvenez sans doute que l’une des critiques que le Sénat et sa commission des finances avaient formulées ces dernières années s’adressait aux facilités que se donne l’État en « s’agencisant » de plus en plus, si vous me permettez ce néologisme. En d’autres termes, l’État s’efforce de mettre, en face de chaque priorité, une recette affectée et une caisse d’affectation, cette dernière devant supporter des salaires et des dépenses de fonctionnement.
Cette approche conduit à un État de plus en plus fracturé, un État qui éprouve donc des difficultés croissantes pour maîtriser ses grands enjeux de finances publiques. Vous avez donc décidé de vous y attaquer, de la modérer et de la limiter. La tâche est difficile, mais vous pouvez être assuré de notre soutien.
En ce qui concerne les méthodes d’appréciation de la masse globale des dépenses du secteur public, il convient de raisonner au niveau des trois sous-secteurs de l’administration publique que sont l’État, la sécurité sociale et les collectivités locales.
S’agissant des collectivités locales, nous serons particulièrement attentifs, dans cet hémicycle, à la façon dont on nous proposera d’apprécier l’enveloppe normée pour 2009. Nous sommes très attachés, notamment, au maintien des droits d’accès au fonds de compensation pour la TVA.
M. Roland du Luart. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans ce domaine, il faudra faire preuve de pédagogie pour expliquer que le contrat est respecté et que personne n’est pris en traitre.
Mme Nicole Bricq. Ce sera dur !
M. Philippe Marini, rapporteur général. De la même manière, monsieur le ministre, s’agissant du principe constitutionnel d’autonomie financière et fiscale des collectivités locales, auquel le Sénat, toutes tendances politiques confondues, est extrêmement attaché, nous ne pouvons qu’être préoccupés de ce que nous lisons ici ou là sur la taxe professionnelle. N’oublions pas qu’il s’agit, notamment par le jeu de l’intercommunalité que vous connaissez d’ailleurs vous-même très bien, de la principale recette dédiée au développement économique local.
Nous souhaitons être pleinement associés à la réflexion qui sera menée sur ce sujet, et qui doit être guidée par le principe d’autonomie fiscale. Surtout, il faudra éviter d’agir dans la précipitation afin de ne pas déstabiliser des collectivités qui devront déjà vivre avec la contrainte de dotations risquant, comme les autres dépenses de l’État, de devoir évoluer à un rythme que je qualifierai de « très raisonnable ».
Si vous le permettez, mes chers collègues, je souhaiterais également ajouter quelques considérations sur la révision générale des politiques publiques, à laquelle vous avez bien voulu nous associer dans votre propos, monsieur le ministre.
S’agissant des missions qui ont d’ores et déjà été conduites dans ce cadre, les décisions prises représentent des économies nettes de l’ordre de 6 milliards d’euros par an – une fois les restitutions aux fonctionnaires effectuées –, soit de 4 à 5 % des crédits concernés par cette révision générale.
Nous souhaitons vivement que cette révision se poursuive avec persévérance et dans le même souci d’exhaustivité qu’aujourd’hui, c’est-à-dire rubrique par rubrique.
Ensuite, nous sommes parfaitement convaincus, comme vous l’êtes également, monsieur le ministre, de l’importance du chemin qui reste à parcourir pour aboutir à l’équilibre de nos finances publiques en 2012. Nous savons que ce chemin est encore très incertain et qu’il nous faudra, d’une part, combler les 50 milliards de déficit actuel du secteur public et, d’autre part, compenser la plus grande partie possible des mesures nouvelles qui ont été prises ces dernières années et qui ont abouti à de la dépense fiscale supplémentaire.
M. Aymeri de Montesquiou. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette dépense fiscale constitue l’un de nos principaux défis. Vous avez fait allusion, monsieur le ministre, à la position que nous avons défendue lors de la première lecture du projet de loi constitutionnelle actuellement en cours d’examen. Le Sénat avait en effet retenu la formulation issue d’un amendement que Jean Arthuis, Nicolas About, Alain Vasselle et moi-même avions présenté et défendu. Il s’agissait de faire prévaloir la hiérarchie des normes suivante : Constitution, lois organiques, lois financières et, enfin, lois ordinaires. Malheureusement, la commission des lois de l’Assemblée nationale n’a pas partagé cette vision des choses.
Permettez-nous néanmoins, monsieur le ministre, de persister et de signer : en matière de décisions engageant les finances publiques, il faut, d’une part, avoir un cadre de référence et, d’autre part, faire preuve de sens des responsabilités. Mais comment pourrait-on en faire preuve sur des textes partiels, voire parcellaires ?
M. Aymeri de Montesquiou. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, ces textes sont défendus par des ministres qui sont par nature dépensiers. Le seul ministre qui ne soit pas dépensier, c’est vous, monsieur Woerth ! C’est pourquoi seuls les textes que nous examinons sous votre autorité, et qui s’inscrivent dans le cadre de la vision globale que vous défendez, peuvent tendre vers l’objectif d’équilibre de nos finances publiques.
Donc, nous persistons et signons : les éléments qui ont une influence sur le solde des finances publiques doivent impérativement figurer dans les lois financières, c’est-à-dire les lois de financement de la sécurité sociale et les lois de finances de la République.
Nous serons également très attentifs, monsieur le ministre, à ce qui sera réalisé dans les deux domaines que sont, d’une part, la revue générale des prélèvements obligatoires et, d’autre part, la maîtrise et la gestion de la dette publique. C’est d’ailleurs en évoquant ces deux dernières questions que je terminerai cette brève présentation.
S’agissant de la revue générale des prélèvements obligatoires, nous aurions souhaité qu’elle fasse l’objet de la même préoccupation de méthode que la révision générale des politiques publiques et qu’elle en soit le strict pendant. En l’état, elle nous semble encore perfectible.
Il manque en particulier une vraie stratégie des prélèvements obligatoires, que Jean Arthuis ne cesse pourtant d’appeler de ses vœux. Certes, on peut contester certains éléments de son analyse. En revanche, on ne saurait contester le fait que les prélèvements obligatoires expriment une certaine conception de la société, mais aussi une vision de la politique économique que l’on souhaite conduire. Quand on examine les réformes une par une, par touches et retouches successives, de manière parcellaire, on se perd inévitablement dans les détails et on finit par perdre de vue la politique qu’il faut conduire, et même la politique tout court !
M. Aymeri de Montesquiou. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Finalement, on refuse d’appliquer la politique à l’économie ce qui, à n’en pas douter, constitue une réelle défaillance.
Au sein de la dépense fiscale et sociale, nous serons également particulièrement attentifs à une rubrique absolument considérable, que ne manquera pas d’aborder tout à l’heure notre excellent rapporteur spécial Serge Dassault : les exonérations de charges ! (Ah ! sur les travées de l’UMP.) Elles représentent environ la moitié du déficit qu’il va bien falloir réduire, monsieur le ministre.
Ainsi permettez-nous de vous dire sans ambages que, si nous réduisions le plafond des exonérations, actuellement fixé à 1,6 SMIC, de 0,1 point chaque année – pour passer de 1,6 à 1,5 en 2009, de 1,5 à 1,4 en 2010 et de 1,4 à 1,3 en 2011 –, nous ferions déjà, sur le chemin de la convergence, une distance tout à fait appréciable !
M. Serge Dassault. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une telle réduction progressive nous permettrait de modifier les comportements économiques et de passer d’une logique d’exception à une vision plus pérenne des prélèvements obligatoires, particulièrement des prélèvements sociaux. (Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. Serge Dassault et Michel Esneu applaudissent.)
Enfin, en guise de conclusion, je développerai quelques considérations sur la question de la dette.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, la charge de la dette est longtemps restée stable, à environ 45 milliards d’euros par an, ce chiffre étant à peu près constant de 2000 à 2006. Toutefois, en 2007, les charges d’intérêt des administrations publiques ont augmenté de plus de 12 %, du fait de l’évolution du marché, et nous avons terminé l’année avec un montant proche de 52 milliards d’euros. La conjugaison des tensions qui existent actuellement sur les marchés de taux d’intérêt, de l’inflation et des perspectives incertaines de nos finances publiques ne peuvent que conduire à un alourdissement de la charge de la dette, toutes choses égales par ailleurs.
Au demeurant, j’aurais bien aimé, si les moyens techniques avaient existé, mes chers collègues, faire projeter dans l’hémicycle cette courbe (M. le rapporteur général montre un graphique), qui représente tout simplement les conditions d’emprunt des États européens. Elle montre que, en termes de conditions moyennes de financement de la dette, le meilleur élève européen est l’Allemagne, et le moins bon la Grèce. Elle révèle aussi que la France a longtemps bénéficié des mêmes conditions que l’Allemagne mais que, depuis un an environ, les courbes se détachent.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Certes, nous ne sommes pas encore trop mauvais, mais nous devons payer de l’ordre de vingt points de base de plus que l’Allemagne, ce qui nécessite bien entendu une trajectoire de redressement.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’en arrive au terme de mon intervention. Le débat d’orientation budgétaire est un rendez-vous absolument nécessaire. Cette année, nous l’avons préparé dans des conditions très difficiles. En effet, jusqu’à ces derniers jours, nous n’avions, à l’exception des perspectives générales, que très peu d’informations sur l’année 2009. Je reconnais ainsi que, lorsque j’ai eu l’honneur de présenter mon rapport à la commission des finances voilà une semaine, j’ai dû inventer un certain nombre de choses… (Sourires.)
M. Gérard Longuet. Nous ne nous en sommes pas rendu compte !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, monsieur le ministre, vous étiez alors dans l’incapacité de me transmettre plus d’informations, parce que certains arbitrages étaient encore en suspens.
Monsieur le ministre, la commission des finances soutient, et soutiendra à l’avenir, tous vos efforts dès lors qu’ils iront dans le sens de l’assainissement de nos finances publiques, de la rigueur – dans le bon sens du terme – et de la bonne gestion de l’État et de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales, chargé des équilibres financiers généraux de la sécurité sociale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les interventions du président de la commission des finances, du président de la commission des affaires sociales et du rapporteur général, qui nagent tous trois comme des poissons dans l’eau dans ces sujets financiers, je crains que mon propos ne vous paraisse quelque peu laborieux.
M. Gérard Longuet. Mais non !
M. Aymeri de Montesquiou. Allons !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je souhaite vous apporter l’éclairage de la commission des affaires sociales sur un sujet particulièrement sensible, celui de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
D’aucuns considèrent que, en dépit d’un déficit quatre ou cinq fois supérieur à celui du budget de la sécurité sociale, tout va plutôt bien du côté du budget de l’État. Dès lors, ils désignent la sécurité sociale comme le mauvais élève de la classe.
Pourtant, que nous appartenions à la commission des finances ou à la commission des affaires sociales, nous devons les uns et les autres nous exercer à travailler ensemble pour contribuer à un meilleur équilibre des comptes.
Le président de la commission des affaires sociales, M. Nicolas About, s’est posé la question, voilà un instant, du meilleur chemin à suivre pour permettre le retour à l’équilibre de la sécurité sociale.
Je tiens à vous rappeler, mes chers collègues, que, pour le régime général, le Gouvernement s’est fixé comme objectif pour le moins ambitieux d’un retour à l’équilibre en 2011, ainsi qu’Éric Woerth vient d’ailleurs de le rappeler. Si nous voulons atteindre cet objectif, il nous faut répondre à plusieurs questions, et plus spécialement à trois qui, à mes yeux, restent en suspens et exigent un engagement fort de la part du Gouvernement.
La première de ces questions, qu’ont évoquée tant M. le ministre que MM. Arthuis, Marini et About, est celle de la dette cumulée du régime général, qui, aujourd’hui, se chiffre à quelque 25 milliards d’euros et risque d’atteindre 30 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2008. Vous conviendrez, mes chers collègues, que ces montants ne sont plus soutenables compte tenu de la situation actuelle des marchés financiers, que Philippe Marini vient de rappeler. La Caisse des dépôts et consignations a d’ailleurs fait savoir à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, qu’elle ne pourrait bientôt plus garantir le financement. Le traitement de cet aspect relève donc de l’extrême urgence.
Lors de la conférence des finances publiques du 28 mai dernier, le Gouvernement s’est engagé à régler la question en 2008. Ce point est d’ailleurs confirmé dans le document que vous nous avez transmis en préparation de ce débat, monsieur le ministre.
La solution retenue serait le transfert de la dette à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES.
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est logique !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mais ce principe nécessite des précisions, et je souhaiterais que M. le ministre puisse répondre à quatre interrogations.
Premièrement, à quelle hauteur le Gouvernement envisage-t-il ce transfert ? Deuxièmement, celui-ci concernera-t-il l’ensemble des branches ou certaines d’entre elles seulement ? Troisièmement, les dettes du fonds de solidarité vieillesse, le FSV, et du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA, feront-elles également l’objet du transfert ? Si tel est le cas, il s’agira non plus de 30 milliards, mais de près de 40 milliards d’euros ! Quatrièmement, enfin, est-ce la totalité des déficits qui sera prise en compte, c’est-à-dire ceux qui seront constatés à la fin de l’exercice 2008, ou est-il envisagé d’arrêter les comptes au 31 décembre 2007, ce qui conduirait, bien entendu, à retenir un montant bien inférieur ?
Nous avons voté dans la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, la LOLFSS, une disposition, introduite du fait de l’adoption par les députés d’un amendement du président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, qui prévoit que tout nouveau transfert de dette à la CADES doit être accompagné d’une recette nouvelle.
M. Philippe Marini, rapporteur général, et Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Adrien Gouteyron, qui a été président du conseil de surveillance de la CADES, sait combien chacun de ces transferts place celle-ci dans une situation difficile ; pourtant, chaque fois nous avons reculé, comme cela a été dénoncé. Or, Nicolas About l’a rappelé, un engagement très clair a été pris par ce gouvernement : nous nous refusons à transférer sur les générations futures le poids de la dette que nous avons nous-mêmes fait naître ces dernières années.
La date limite actuelle de la CADES pour remplir sa mission est 2021. Si, comme vous l’avez déclaré à plusieurs reprises depuis votre prise de fonctions, monsieur le ministre, vous ne voulez pas augmenter la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, il faudra trouver une autre recette qui soit aussi dynamique, aussi régulière et aussi fiable. Vous évoquez le redéploiement d’une partie des excédents du FSV. Je ne suis pas certain, pour ma part, que cette recette offre réellement toutes les garanties nécessaires, car les soldes constatés sur ce fonds sont relativement aléatoires et très sensibles à l’évolution de la conjoncture économique.
Si une partie des recettes du FSV est transférée, il faudra que cela se passe dans la transparence et dans le plus grand respect de la LOLFSS, c’est-à-dire que le montant soit suffisant et s’accompagne d’une marge de garantie permettant d’éviter la reconstitution d’un déficit dans les comptes du FSV lui-même. Ce dernier, en effet, est soumis à un effet de ciseaux important : quand la conjoncture est favorable, il renoue effectivement avec les excédents, mais, dès que se produit un ralentissement de la croissance ou une diminution de l’activité, ses déficits peuvent atteindre des montants importants ; son déficit cumulé est actuellement de l’ordre de 5 milliards d’euros. Il n’est donc pas possible de s’appuyer sur les seules recettes. Pour tout transfert d’une recette à la CADES, il faut également prendre en considération ses conséquences sur la dynamique des dépenses du FSV. Si, dans quelque temps, la croissance n’est plus au rendez-vous, nous risquons de constater un creusement des déficits en termes aussi bien de flux que de cumul.
La deuxième question qu’il me paraît également nécessaire de clarifier est celle des relations financières entre l’État et la sécurité sociale. L’année 2007, nous devons en convenir, a permis d’importantes avancées dans ce domaine ; la mise en place d’un ministère des comptes publics, notamment, y a largement contribué.
Néanmoins, monsieur le ministre, vous avez vous-même rappelé que, si vous avez apuré une dette antérieure d’un montant légèrement supérieur à 5 milliards d’euros, une nouvelle dette s’est malheureusement reconstituée. Il conviendra donc que la prochaine loi de finances mette un terme définitif à cette difficulté et que soient correctement budgétisés le coût de certaines exonérations ciblées ainsi que la dépense de l’aide médicale d’État, l’AME. Celle-ci, dans la loi de finances pour 2008, est sous-estimée de 260 millions d’euros environ.
La troisième question porte sur la situation désespérée du FFIPSA : le déficit annuel du fonds dépasse désormais 2 milliards d’euros, et son déficit cumulé atteint aujourd’hui 6 milliards d’euros. Or, aucun début de solution n’est encore esquissé pour remédier à cette situation. Ces dernières années, quelques pistes avaient bien été envisagées, notamment celle de la compensation démographique, mais toutes ont été abandonnées. Qu’en est-il aujourd’hui, monsieur le ministre ?
Vous avez affirmé votre intention de résoudre cette question dans le courant de l’exercice 2009, sans préciser quels moyens ni quelles pistes vous entendiez privilégier pour y parvenir. Je vous rappelle que la responsabilité du traitement de ce dossier vous incombe, comme le souligne régulièrement la Cour des comptes.
Les textes indiquent que l’État doit assurer l’équilibre des comptes par le biais d’une dotation budgétaire et précisent : « le cas échéant ». J’avais proposé par voie d’amendement, voilà un certain temps, de supprimer ces trois mots – « le cas échéant » –, car le Gouvernement en tire argument pour ne pas honorer l’engagement qu’il avait pris devant la représentation nationale.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et ne pas passer par la case déficit !
M. Alain Vasselle, rapporteur. J’en viens maintenant, au-delà de ces trois questions qui s’inscrivent dans le court terme, aux conditions de caractère plus structurel.
Il est nécessaire, si l’on veut que l’assurance maladie atteigne l’équilibre en 2011, d’envisager des mesures de fond. Le directeur de la CNAM a présenté un plan qui repose sur la mobilisation de nouvelles recettes, de l’ordre de 1 milliard d’euros, et sur la réalisation d’environ 2 milliards d’euros d’économies ayant pour objet d’utiliser les réserves « d’efficience » que vous avez évoquées, monsieur le ministre. Mme Bachelot-Narquin, ministre de la santé, a demandé pour sa part que soit consenti un effort supplémentaire de 1 milliard d’euros, ce qui permettrait d’atteindre les 4 milliards d’euros que vous avez mentionnés dans votre intervention liminaire.
Il faut, nous semble-t-il, aller encore plus loin et envisager de véritables réformes structurelles. J’en citerai essentiellement deux.
La première concerne les soins de ville. Dans ce domaine, une réflexion sur la prise en charge des personnes souffrant d’une affection de longue durée, les ALD, est indispensable. Ce poste absorbe, mes chers collègues, les deux tiers des dépenses de soins de ville et représente 86 % de l’accroissement annuel des dépenses. Compte tenu de cette charge, nous ne voyons pas comment éviter des mesures plus contraignantes, et le fait que M. Van Roekeghem soit immédiatement revenu sur les propositions qu’il avait formulées en cette matière ne doit pas nous conduire à renoncer à une réflexion qui reste nécessaire pour savoir comment contenir l’évolution de ces dépenses désormais insupportable pour l’équilibre de nos comptes.
La seconde réforme sur laquelle il nous faudra nous pencher d’une manière un peu plus active que nous ne l’avons fait les années passées est l’association de l’hôpital aux politiques de réduction des déficits.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Ah oui !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je vous renvoie au récent rapport de la MECSS, la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, sur les insuffisances du pilotage de la politique hospitalière pour le détail des mesures que nous préconisons.
Un autre chantier devra être ouvert, celui de la répartition de la charge de la dépense entre le régime de base et les régimes complémentaires.
Philippe Marini et Jean Arthuis ont déploré tout à l’heure ces normes qui viennent sans cesse alourdir le poids des dépenses que doivent supporter les budgets tant des collectivités locales que de l’État.