Sommaire

Présidence de M. Roland du Luart

1. Procès-verbal

2. Modernisation de l'économie. – Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence.

Articles additionnels après l’article 12

Amendement n° 331 rectifié de M. Thierry Repentin. – MM. Thierry Repentin, Laurent Béteille, rapporteur de la commission spéciale ; Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. – Rejet.

Amendement n° 335 de M. Thierry Repentin. – MM Thierry Repentin, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État, Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Amendement n° 74 rectifié de M. Dominique Mortemousque. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 73 rectifié de M. Dominique Mortemousque. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 224 de la commission. – MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 314 rectifié de M. Rémy Pointereau. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 12 bis 

Amendement n° 756 de M. François Trucy. – MM. François Trucy, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption.

Amendement n° 248 de la commission. – MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 12 bis

Amendement n° 84 rectifié de M. Gérard Cornu. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 12 ter 

Amendement n° 541 de Mme Odette Terrade. – Mme Odette Terrade, MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 85 rectifié bis de M. Gérard Cornu. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 13

Amendements nos 464 de Mme Marie-France Beaufils et 225 à 227 de la commission. – MM. Bernard Vera, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Retrait de l’amendement no 227 ; rejet de l’amendement no 464 ; adoption des amendements nos 225 et 226 rectifié.

Adoption de l'article modifié.

Article 13 bis 

Amendements nos 465 de Mme Marie-France Beaufils, 228 et 229 de la commission. – Mme Odette Terrade, MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État, Richard Yung. – Rejet de l’amendement no 465 ; adoption des amendements nos 228 et 229.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 13 bis

Amendement n° 366 rectifié de M. Richard Yung. – MM. Richard Yung, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 983 rectifié bis de M. Gérard Cornu, repris par la commission. – MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendements nos 622 rectifié à 626 et 630 rectifié et de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Retrait des amendements nos 626, 622 rectifié, 624, 630 rectifié et 625 ; adoption de l'amendement no 623 insérant un article additionnel.

3. Candidature à une commission mixte paritaire

4. Modernisation de l'économie. – Suite de la discussion d’un projet de loi déclaré d’urgence.

Article 14

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.

Amendements nos 466 de Mme Marie-France Beaufils, 230 à 234 de la commission, 80 rectifié de M. Jean-Claude Carle, 367 de M. Richard Yung, 666 et 674 de Mme Anne-Marie Payet  230. – MM. Bernard Vera, Laurent Béteille, rapporteur de la commission spéciale ; André Dulait, Richard Yung, Mme Anne-Marie Payet, MM. le secrétaire d'État, Philippe Dominati. – Retrait des amendements nos 674, 666 et 80 rectifié ; rejet des amendements nos 466 et 367 ; adoption des amendements nos 230 à 234.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 14

Amendements nos 755 rectifié bis de M. François Trucy et sous-amendements nos 1063 de M. Bernard Barraux et 1068 de Mme Catherine Procaccia ; amendement no 962 rectifié (identique à l’amendement no 755 rectifié) de M. Philippe Dominati. – MM. Dominique Mortemousque, Bernard Barraux, Philippe Dominati, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État, Dominique Leclerc, Mme Catherine Procaccia, M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale ; Mme Nicole Bricq. – Retrait du sous-amendement no 1063 ; rejet du sous-amendement no 1068 ; adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 763 rectifié bis de M. Philippe Darniche. – MM. Dominique Leclerc, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

M. Daniel Raoul.

Article 14 bis 

Amendement n° 753 de M. François Trucy. – MM. Dominique Mortemousque, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État, Dominique Leclerc. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 14 bis

Amendements identiques nos 235 rectifié de la commission et 762 de Mme Anne-Marie Payet. – M. Laurent Béteille, rapporteur ; Mme Anne-Marie Payet, M. le secrétaire d'État, Mme Odette Terrade, M. Richard Yung. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Article 14 ter 

Amendement n° 236 de la commission. – MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Articles additionnels après l'article 14 ter

Amendement n° 727 rectifié de M. Daniel Soulage. – MM. Daniel Soulage, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État, le président de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 729 de Mme Anne-Marie Payet. – Mme Anne-Marie Payet, MM. Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Retrait.

Article 15

Amendements identiques nos 342 de M.  Marc Massion et 467 de Mme Marie-France Beaufils ; amendement n° 7 de la commission. – MM. Marc Massion, Bernard Vera, Laurent Béteille, rapporteur ; le secrétaire d'État. – Rejet des amendements nos 342 et 467 ; adoption de l’amendement no 7.

Adoption de l'article modifié.

5. Nomination d’un membre à une commission mixte paritaire

Suspension et reprise de la séance

6. Modernisation de l'économie. – Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence.

Article 31 (priorité)

Mmes Nathalie Goulet, Bariza Khiari, M. Philippe Marini, rapporteur de la commission spéciale.

Amendements nos 473 de Mme Marie-France Beaufils et 12 rectifié à 14 de la commission. – MM. Bernard Vera, Philippe Marini, rapporteur ; Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement ; Mme Nathalie Goulet. – Rejet de l’amendement no 473 ; adoption des amendements nos 14, 12 rectifié bis et 13 rectifié.

Mmes Nicole Bricq, Odette Terrade, Bariza Khiari.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 31 (priorité)

Amendement n° 717 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mme Anne-Marie Payet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. – Retrait.

Article 31 bis  (priorité)

Mmes Nicole Bricq, la ministre,

Amendement n° 15 de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes la ministre, Nicole Bricq, Odette Terrade. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 31 ter (priorité)

Amendements nos 474 de Mme Marie-France Beaufils, 587 rectifié à 590 rectifié de M. Gérard Longuet et 16 de la commission. – Mme Odette Terrade, MM. Gérard Longuet, Philippe Marini, rapporteur ; Mmes la ministre, Nicole Bricq, M. Alain Vasselle. – Retrait des amendements nos 587 rectifié et 588 ; rejet de l’amendement no 474 ; adoption des amendements nos 589 rectifié, 590 rectifié bis et 16.

Adoption de l'article modifié.

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

Article 36 (priorité)

Amendements nos 481 de Mme Marie-France Beaufils, 740, 739 rectifié, 743 de M. Christian Gaudin, 17 rectifié, 1046 de la commission et 369 de Mme Nicole Bricq. – M. Michel Billout, Mme Anne-Marie Payet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Nicole Bricq, la ministre. – Retrait des amendements nos 369 et 743 ; rejet de l’amendement no 481 ; adoption des amendements nos 740, 17 rectifié, 1046 et 739 rectifié.

Mme Nathalie Goulet.

Adoption de l'article modifié.

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

Article additionnel après l'article 36 (priorité)

Amendement n° 616 de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Rejet.

Articles 36 bis et 37 A (priorités). – Adoption

Article 37 B (priorité)

Amendement n° 615 rectifié ter de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre, Mme Odette Terrade. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel avant l'article 37 (priorité)

Amendement n° 614 de M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Retrait.

Article 37 (priorité)

Amendements nos 370 de Mme Nicole Bricq et 1006 de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Bariza Khiari, Joëlle Garriaud-Maylam, la ministre. – Retrait des deux amendements.

Amendements nos 304 et 305 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Nathalie Goulet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Retrait de l’amendement no 305 ; adoption de l’amendement no 304.

Amendement n° 19 de la commission et sous-amendement no 1071 du Gouvernement. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.

Amendement n° 20 de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Adoption.

Amendements nos 21 de la commission et 734 de Mme Muguette Dini. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Anne-Marie Payet, la ministre. – Retrait de l’amendement no 734 ; adoption de l’amendement no 21.

Amendement n° 18 rectifié bis de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes la ministre, Nathalie Goulet. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l’article 37 (priorité)

Amendement no 613 rectifié ter par M. Philippe Adnot. – MM. Philippe Adnot, Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 37 bis (priorité)

M. Jacques Valade.

Amendements identiques nos 535 de Mme Odette Terrade et 1023 de M. Serge Lagauche ; amendement n° 726 rectifié de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mme Odette Terrade, M. Richard Yung, Mme Anne-Marie Payet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre, M. Jacques Valade. – Retrait de l’amendement no 726 rectifié ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 535 et 1023.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l’article 37 bis (priorité)

Amendement n° 742 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mme Anne-Marie Payet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre. – Retrait.

Amendement n° 980 rectifié de M. Louis de Broissia. – MM. Gérard Longuet, Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre, M. Jacques Valade. – Retrait.

Article 37 ter  (priorité)

Mme Nathalie Goulet, M. Richard Yung.

Amendements identiques nos 310 de Mme Nathalie Goulet, 476 de M. Jack Ralite, 1008 de Mme Joëlle Garriaud-Maylam et 1024 de Mme Monique Cerisier-ben Guiga ; amendement n° 303 de Mme Nathalie Goulet. – Mmes Odette Terrade, Joëlle Garriaud-Maylam, Monique Cerisier-ben Guiga, Nathalie Goulet, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme la ministre, M. Jean Desessard. – Retrait des amendements nos 310 et 1008 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 476 et 1024 ; adoption de l’amendement no 303.

Adoption de l'article modifié.

Intitulé du chapitre V (priorité)

Amendement n° 22 de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes la ministre, Nicole Bricq. – Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Article 38 (priorité)

Amendements nos 477 de Mme Marie-France Beaufils, 23 rectifié de la commission et 441 de M. Daniel Raoul. – Mme Odette Terrade, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Nicole Bricq, la ministre. – Rejet de l’amendement no 477 ; adoption de l'amendement no 23 rectifié rédigeant l'article, l’amendement no 441 devenant sans objet.

Article 38 bis (priorité)

Amendements identiques nos 24 de la commission et 478 de Mme Marie-France Beaufils. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Odette Terrade, la ministre. – Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 39 (priorité)

Mmes Odette Terrade, Nicole Bricq, MM. Thierry Repentin, Michel Billout.

Amendements identiques nos 371 de Mme Nicole Bricq, 979 de M. Jean Desessard et 890 rectifié de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Thierry Repentin, Jean Desessard, Mmes Odette Terrade, Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale ; Christine Lagarde, ministre ; Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

Mme Odette Terrade, MM. Thierry Repentin, Jean Desessard, Mmes Nathalie Goulet, Mme Christine Boutin, ministre. – Rejet des amendements nos 371, 979 et 890 rectifié.

Amendement no 557 de M. Thierry Repentin. – MM. Thierry Repentin, Philippe Marini, rapporteur ; Christine Lagarde, ministre. – Rejet.

Amendement n° 551 rectifié de M. Thierry Repentin ; amendements identiques nos 558 de M. Thierry Repentin et 886 rectifié de Mme Marie-France Beaufils ; amendement n° 556 de M. Thierry Repentin. – Mme Bariza Khiari, MM. Thierry Repentin, Michel Billout, Mme Nicole Bricq, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre ; Odette Terrade, M. Jean Desessard. – Rejet des quatre amendements.

Amendement n° 372 rectifié de Mme Nicole Bricq ; amendements identiques nos 571 de M. Thierry Repentin et 896 de Mme Marie-France Beaufils ; amendement n° 582 rectifié de M. Gérard Longuet. – Mme Bariza Khiari, MM. Thierry Repentin, Thierry Foucaud, Gérard Longuet, Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Christine Lagarde, ministre ; Nicole Bricq, M. Jean Desessard. – Rejet de l’amendement no 372 rectifié et, par scrutin public, des amendements nos 571 et 896 ; retrait de l’amendement no 582 rectifié.

Amendement n° 553 de M. Thierry Repentin. – Rejet.

Amendements nos 559, 581 de M. Thierry Repentin et 897 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Thierry Repentin, Jean-François Voguet, Philippe Marini, rapporteur ; Mmes Christine Lagarde, ministre ; Nathalie Goulet. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 27 de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre ; M. Jean Desessard, Mme Odette Terrade. – Adoption.

Amendement n° 374 de Mme Nicole Bricq. – MM. Thierry Repentin, Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet.

Amendement n° 28 de la commission. – M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre ; MM. Michel Billout, Thierry Repentin. – Adoption.

Amendements identiques nos 560 de M. Thierry Repentin et 878 de Mme Marie-France Beaufils. – MM. Thierry Repentin, Thierry Foucaud, Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 879 de Mme Marie-France Beaufils. – M. Jean-François Voguet, Mme Christine Lagarde, ministre ; M. Jean Desessard. – Rejet.

Amendement n° 375 de Mme Nicole Bricq. – Mme Bariza Khiari, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet.

Amendements identiques nos 561 de M. Thierry Repentin et 880 rectifié de Mme Marie-France Beaufils. – Mmes Nicole Bricq, Odette Terrade, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 584 rectifié de M. Gérard Longuet. – Retrait.

MM. Philippe Marini, rapporteur ; Jean Desessard.

Amendement n° 377 de Mme Nicole Bricq. – Mme Nicole Bricq, M. Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre ; MM. Michel Billout, Jean Desessard. – Rejet.

Amendements identiques nos 562 de M. Thierry Repentin et 881 rectifié de Mme Marie-France Beaufils. – Mme Bariza Khiari, MM. Thierry Foucaud, Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet des deux amendements.

Amendements nos 572 rectifié de M. Thierry Repentin et 882 rectifié de Mme Marie-France Beaufils. – Mme Bariza Khiari, MM. Jean-François Voguet, Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 379 rectifié de Mme Nicole Bricq et 676 de Mme Anne-Marie Payet ; amendements identiques nos  378 rectifié de Mme Nicole Bricq et 677 rectifié de Mme Anne-Marie Payet ; amendements nos 554, 555 et 563 de M. Thierry Repentin ; amendements identiques nos 564 de M. Thierry Repentin et 883 de Mme Marie-France Beaufils. – M. Thierry Repentin, Mmes Anne-Marie Payet, Nicole Bricq, MM. Michel Billout, Philippe Marini, rapporteur ; Mme Christine Lagarde, ministre ; M. Jean Desessard, Mme Odette Terrade. – Retrait des amendements nos 676 et 677 rectifié ; rejet, par scrutin public, de l’amendement no 379 rectifié ; rejet des amendements nos 378 rectifié, 554, 555, 563, 564 et 883 ; adoption de l’amendement no 1057.

Renvoi de la suite de la discussion.

7. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article 12 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Articles additionnels après l'article 12

Modernisation de l'économie

Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, de modernisation de l’économie (nos 398 et 413).

Je vous rappelle que, cet après-midi à quinze heures, nous examinerons par priorité l’article 31 jusqu’aux articles additionnels après l’article 31 ter, et l’article 36 jusqu’aux articles additionnels après l’article 42 octies.

Dans la suite de la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 331 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après l’article 12.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 12 bis

Articles additionnels après l’article 12

M. le président. L'amendement n° 331 rectifié, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Godefroy, Mme Demontès, M. Raoul, Mme Khiari, MM. Muller, Massion, Lagauche, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3261-7 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les salariés titulaires d'un abonnement de transport public peuvent obtenir le remboursement sur le bulletin de paie de la somme équivalente à la part contributive de l'employeur dans le chèque-transport augmentée, le cas échéant, de la part du comité d'entreprise. »

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, c’est avec un plaisir non dissimulé que je tenterai de répondre à l’appel du Premier ministre.

En novembre 2006, le gouvernement de l’époque, dans lequel M. Gérard Larcher était un membre actif, a souhaité mettre en place un chèque-transport sur le modèle du chèque-restaurant, pour répondre aux soucis des salariés subissant de plein fouet la hausse des prix du carburant.

Cette mesure, annoncée en grande pompe, si je puis dire, par le Premier ministre d’alors, M. Dominique de Villepin, est depuis tombée aux oubliettes ; c’est bien dommage. Personne n’a plus jamais entendu parler du chèque-transport, ni d'ailleurs pu toucher un chèque-transport, et pour cause ! Les imperfections du dispositif étaient de nature à en bloquer la mise en œuvre, comme le groupe socialiste du Sénat l’avait souligné lors de son adoption. Nous avions demandé la dématérialisation du chèque-transport à plusieurs reprises par voie d’amendement, notamment lors de l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi TEPA.

La situation ne s’est évidemment pas améliorée depuis ; les employeurs ont continué à bouder le dispositif trop complexe ; le chèque-transport n’a pas trouvé de lieux où il puisse être dépensé : ni les distributeurs de carburant ni les entreprises de transports publics n’ont été convaincus ; le poids des dépenses liées aux déplacements s’est considérablement alourdi pour les ménages ; enfin, la problématique du changement climatique a trouvé un écho sans précédent, et la société française commence à se mobiliser face à l’urgence d’une révolution de nos modes de déplacement.

Alors que nos arguments étaient restés lettre morte pendant près de dix-huit mois, quelle ne fut pas notre joie d’entendre le Premier ministre, François Fillon, fustiger à son tour, le 12 juin dernier, à l’occasion d’une émission sur une grande chaîne de la télévision publique, que nous étions face à un dispositif « trop compliqué », qui n’a « jamais fonctionné ». À vous de juger !

Aujourd’hui, beaucoup de salariés disposent d’un abonnement annuel payé par prélèvements automatiques, les autres ont massivement recours aux distributeurs de tickets et de coupons. La mise en œuvre d’un chèque papier aurait évidemment constitué un retour en arrière dans les pratiques de dématérialisation, d’ailleurs encouragées par les réseaux.

Or, monsieur Larcher, vous qui avez été ministre chargé du travail, monsieur le secrétaire d’État, vous qui représentez le Gouvernement aujourd’hui, la solution existe depuis la genèse même du chèque-transport ! Il suffit que celui-ci puisse être remboursé directement sur la fiche de paie, comme c’est le cas en région parisienne, - ils ont de la chance, les Franciliens ! -et comme l’État se l’est autorisé pour l’ensemble de ses agents sur le territoire national dès le mois de décembre 2006. Il n’y a donc pas un grand effort d’imagination à fournir.

Là encore, divine surprise, Matignon a dû lire avec attention les débats parlementaires de la précédente mandature et se range maintenant à notre proposition de dématérialisation. Beaux joueurs, nous l’en félicitons ! Puisse-t-il garder cette bonne habitude !

Le Premier ministre parle bien d’une aide financière directe « sur la fiche de paie du salarié » ; c’est précisément la possibilité que nous vous proposons d’ouvrir par l’adoption de cet amendement n° 331 rectifié.

Nous avons aujourd’hui l’opportunité de corriger l’aberration économique et politique du chèque-transport tel qu’il avait été imaginé en améliorant très concrètement le pouvoir d’achat de nos concitoyens, en réduisant considérablement les frais de gestion du dispositif et en faisant plaisir, ce n’est pas la moindre des choses, au Premier ministre actuel.

Monsieur le secrétaire d’État, soutenez notre amendement et vous serez en mesure d’annoncer une bonne nouvelle à François Fillon, qui est en visite officielle au Canada. Ainsi nous répondons sans tarder à l’appel qu’il a lancé le 12 juin dernier en mettant en place le chèque-transport ! (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, la commission spéciale n’est pas convaincue que cet amendement soit le meilleur moyen possible de relancer le chèque-transport. (M. Repentin s’exclame.) Elle demande l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, le Premier ministre est très respectueux du dialogue social, et il a demandé aux partenaires sociaux de lui transmettre en septembre prochain les préconisations relatives à la mise en place d’une aide aux salariés garantissant une meilleure prise en charge des frais de déplacements domicile-travail.

Il me semble donc important, j’espère que vous en serez vous convaincus, de ne pas préempter le rôle des partenaires sociaux sur ce sujet.

M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Bien sûr !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. C’est pour cette raison, qui tient au rôle que nous entendons voir tenu par les partenaires sociaux dans notre pays, que nous vous demandons de rejeter cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 331 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme Nicole Bricq. De justesse !

M. le président. L'amendement n° 335, présenté par MM. Repentin et Godefroy, Mme Demontès, M. Raoul, Mmes Bricq et Khiari, MM. Muller, Massion, Lagauche, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 5422-20 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le régime d'assurance chômage des travailleurs saisonniers est déterminé par des accords de branche conclus entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. »

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Le dispositif proposé par cet amendement a pour objet de renvoyer à des accords de branche, conclus entre les organisations représentatives d’employeurs et de salariés, le régime d’assurance chômage d’une catégorie de travailleurs spécifiques que sont les travailleurs saisonniers, et donc de favoriser le dialogue social auquel vient de faire référence M. le secrétaire d’État.

Selon nous, chaque branche doit pouvoir déterminer elle-même, compte tenu de la spécificité de la profession ou du secteur d’activité, le régime d’assurance chômage de ses saisonniers.

La problématique de l’assurance chômage des travailleurs saisonniers s’inscrit parfaitement dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’économie, qui vise deux objectifs : la croissance de l’économie du pays et le plein emploi.

La saisonnalité détermine l’organisation du travail, non seulement en territoires de montagne, mais également en zones côtière et agricole, et l’emploi saisonnier est essentiel pour maintenir la vitalité économique des zones concernées, parce qu’il permet de maintenir sur place du personnel qualifié.

À cet égard, monsieur le secrétaire d’État, la convention UNEDIC 2006-2008, qui arrive à échéance le 31 décembre 2008, n’est pas adaptée à la spécificité du travail saisonnier ; les termes de la convention témoignent à l’évidence d’une méconnaissance de la diversité des profils de travailleurs saisonniers.

Précisément, le saisonnier est un professionnel dont l’activité est dépendante de la saisonnalité ; il est, dans le cas général, très bien adapté à ce choix de vie et exerce une activité saisonnière de façon pérenne. Il est donc hasardeux de soutenir que c’est un travailleur précaire, qui subit la saisonnalité en attendant une insertion durable, d’après les termes de l’article 1er de la convention précitée.

Par ailleurs, la convention UNEDIC, par les conditions qu’elle impose au travailleur saisonnier du point de vue de l’assurance-chômage, constitue une atteinte au modèle de développement économique propre aux territoires de montagne.

Ce dispositif ignore les conditions de travail en zone de montagne, mais également en zones côtière ou agricole où la production de fruits et légumes est importante et où le rythme de la vie économique est tributaire de la saisonnalité et de la pluriactivité. L’emploi du saisonnier découle des contraintes économiques locales déterminées par les besoins des entreprises et des divers établissements dans les zones touristiques en général, plus particulièrement en haute altitude.

Limiter à trois le nombre de périodes au cours desquelles les saisonniers peuvent bénéficier d’une indemnisation chômage constitue la condamnation à court terme du travail saisonnier, si bien que de nombreux territoires se trouveront alors dans une situation économique difficile. Il est probable que les saisonniers iront chercher un emploi pérenne en zone urbaine ou périurbaine, au demeurant sans garantie de réussite, certains emplois pouvant ne pas être pourvus pendant l’intersaison.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cette disposition, dont l’objet est de faire régler par des accords de branche le régime d’assurance chômage des saisonniers a, nous semble-t-il, un rapport assez ténu avec l’objet du projet de loi. Dans ces conditions, nous souhaiterions recueillir l’avis du Gouvernement sur sa portée et sur son opportunité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je suis sensible au problème posé par M. Repentin, qui a d’ailleurs été abordé à l’Assemblée nationale voilà quelques semaines lors de l’examen du présent texte.

En tant que secrétaire d’État chargé du tourisme auprès de Mme Christine Lagarde, je suis particulièrement attentif à l’importance du rôle des travailleurs saisonniers, qui sont légitimement attachés à la défense de leurs droits.

L’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 prévoit déjà que les branches professionnelles apprécient, si cela est possible, l’ancienneté des salariés dans la branche pour qu’ils bénéficient de tout ou partie de certains droits. Or, à l’évidence, ce sont les droits des saisonniers qui sont visés dans cet accord.

Cet examen doit donc être réalisé dans le souci de favoriser la mobilité et l’embauche des travailleurs. C’est aux branches professionnelles de négocier.

J’ai signalé cet aspect très important à mon collègue Xavier Bertrand, et je souhaitais vous indiquer que nous consacrerons nos efforts, dans les semaines qui viennent, à faire en sorte que les droits des salariés saisonniers ne soient plus altérés de façon trop importante.

Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, tout en reconnaissant l’importance du problème abordé ici.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Je me réjouis que M. le rapporteur n’ait pas émis un avis défavorable et qu’il s’en soit remis à l’avis du Gouvernement. D’après lui, M. Xavier Bertrand va s’attacher à trouver très prochainement une solution qui convienne aux territoires.

Cette question est essentielle, monsieur le secrétaire d’État, car le dynamisme et l’attractivité de notre tourisme sont dus à la souplesse dans l’organisation du travail dont font preuve ceux qui sont chargés d’accueillir nos compatriotes en vacances ou des étrangers qui ont choisi notre pays comme lieu de villégiature. La pluriactivité et la saisonnalité sont deux éléments indissociables qui nous permettent de nous organiser au mieux sur nos territoires.

Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous faites référence à des travaux qui devraient avoir lieu dans les jours qui viennent, je souhaiterais que les associations d’élus des territoires où la saisonnalité est plus particulièrement prégnante soient associées à cette réflexion ; je pense notamment à l’Association nationale des élus de montagne, l’ANEM, qui est en première ligne sur ce dossier pour l’organisation économique sur ces territoires.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. J’appuierai les propos de mon collègue en disant que je suis étonné que M. le secrétaire d’État émette un avis défavorable sur cet amendement alors qu’il approuve son objet.

Pour les territoires ruraux et les zones de montagne, il est fondamental que les travailleurs saisonniers aient un régime adapté.

Il serait souhaitable que le Sénat adopte cet amendement, qui a peut-être recueilli un avis négatif du Gouvernement, mais une telle approbation que ce dernier ne saurait être désavoué !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 335.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 74 rectifié, présenté par MM. Mortemousque, Barraux, Houel, Mouly et Seillier, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé : L'article L. 6211-5 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 6211-5. - Le contenu des relations conventionnelles qui lient l'employeur, l'apprenti et la ou les entreprises d'un État membre de l’Union européenne susceptibles d'accueillir temporairement l'apprenti est fixé par décret en Conseil d'État. »

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Cet amendement ainsi que le suivant concernent l’apprentissage.

La recodification du code du travail intervenue en mai 2008 devait se faire à droit constant. Il n’en a pas été ainsi pour l’article L. 6211-5 de ce code.

Dans sa rédaction issue de la recodification, cet article rend possible l’exécution de la totalité de la période en entreprise du contrat d’apprentissage, alors que l’ancien article L. 115-1 prévoyait uniquement la possibilité pour une entreprise étrangère d’« accueillir temporairement l’apprenti ».

La possibilité de mobilité européenne ouverte aux apprentis doit être temporaire afin que l’employeur français, chargé du bon déroulement du contrat, ne serve pas uniquement d’intermédiaire entre l’apprenti et un employeur étranger.

La rédaction proposée vise donc à rétablir la disposition qui prévalait avant la recodification. Elle prévoit, en outre, la signature par l’apprenti ou son représentant légal de la convention permettant la mobilité européenne. Cette signature est nécessaire, car ladite convention est assimilée à un avenant modifiant le lieu d’exécution du contrat de travail.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement est bienvenu, car il corrige une erreur matérielle survenue lors de la recodification du code du travail.

La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.

L'amendement n° 73 rectifié, présenté par MM. Mortemousque, Barraux, Houel, Seillier et Mouly, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 6224-1 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 6224-1. - Le contrat d'apprentissage, revêtu de la signature de l'employeur et de l'apprenti ou de son représentant légal, est adressé pour enregistrement à une chambre consulaire dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. L’article L. 6224-1 du code du travail permet l’enregistrement des contrats d’apprentissage, qui assure le contrôle du respect des dispositions législatives et réglementaires s’attachant à ce contrat de travail dérogatoire du droit commun. Il doit concerner l’ensemble des employeurs d’apprentis.

La loi confie cet enregistrement aux réseaux consulaires – chambres de commerce et d’industrie, chambres de métiers et de l’artisanat et chambres d’agriculture –, en associant un interlocuteur à chaque type d’employeur.

Cependant, la rédaction actuelle du code du travail crée un vide juridique pour des associations et des professions libérales, qui ne sont affiliées à aucun réseau consulaire.

La loi n°2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social avait pourtant permis l’enregistrement par les chambres de commerce et d’industrie des contrats d’apprentissage conclus par les associations et les membres de professions libérales.

Mais la recodification du code du travail intervenue en 2008 a, par erreur, repris la rédaction issue de la loi du 2 août 2005, recréant ainsi un vide juridique concernant l’enregistrement des contrats d’apprentissage conclus par les associations et les membres des professions libérales.

La rédaction proposée, comparable à celle de la loi du 30 décembre 2006, comble ce vide. Cette disposition permettra au Premier ministre de prendre le décret en Conseil d’État organisant l’enregistrement des contrats d’apprentissage par les réseaux consulaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement, comme le précédent, vise à rectifier une erreur dans la recodification récente du code du travail et à combler une lacune.

La commission y est favorable, sous réserve que M. le secrétaire d’État nous indique si la méthode envisagée par l’amendement est convenable et nous précise quel serait le contenu prévisible du décret en Conseil d’État.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Le souci de M. le rapporteur est satisfait, car le décret tiendra parfaitement compte de cette recodification utile du code du travail.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 73 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.

L'amendement n° 224, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les besoins de l'analyse statistique et économique, les entreprises peuvent être distinguées selon les quatre catégories suivantes :

- les microentreprises ;

- les petites et moyennes entreprises ;

- les entreprises de taille moyenne ;

- les grandes entreprises.

Un décret précise les critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise.

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission spéciale a souhaité apporter dans ce texte une innovation importante : la reconnaissance des entreprises de taille moyenne. J’ai eu l’occasion de m’en expliquer au cours de la discussion générale. Certaines entreprises qui comptent plus de 250 salariés ne sont pas pour autant des majors internationales ou ce que l’on appelle couramment de grandes entreprises. Il est bon de reconnaître leur spécificité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui entame un processus ardemment souhaité, la reconnaissance de l’entreprise de taille moyenne. Mme la ministre de l’économie a demandé au Conseil national de l’information statistique une contribution pour fixer et éclairer le choix des critères et des seuils à retenir.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 224.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.

L'amendement n° 314 rectifié, présenté par MM. Pointereau, César et Mortemousque, est ainsi libellé :

Après l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'ordonnance n° 2005-1091 du 1er septembre 2005 portant simplification des conditions d'exercice de la profession de courtier en vins dit « courtier de campagne » est ratifiée, sous réserve du remplacement de la deuxième phrase de l'article 3 de la loi n° 49-1652 du 31 décembre 1949 modifié, telle qu'elle résulte de l'article 3 de la même ordonnance, par les dispositions suivantes :

« La délivrance de la carte peut être subordonnée au paiement par le demandeur d'un droit dont le montant, fixé par décret, ne peut excéder le coût moyen d'instruction d'un dossier et est établi et recouvré par la chambre régionale de commerce et d'industrie à son profit. ».

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. L’ordonnance n°2005-1091 du 1er septembre 2005 portant simplification des conditions d’exercice de la profession de courtier en vins dit « courtier de campagne » est ratifiée en modifiant concomitamment le mode de règlement des frais exposés par la chambre régionale de commerce et d’industrie, ou CRCI, à l’occasion de la délivrance de la carte professionnelle de courtier.

La modification vise à permettre un règlement direct des frais par les courtiers à la CRCI.

Ce mode de règlement direct constitue une simplification par rapport au mode de règlement actuellement prévu par l’article 3 de la loi du 31 décembre 1949.

Le mode de règlement actuel prévoit un recouvrement par les services fiscaux. Toutefois, un tel dispositif de recouvrement apparaît coûteux corrélativement au produit escompté.

Dans ces conditions, seule une modification de la loi de 1949 peut permettre un recouvrement direct par la CRCI.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Dans la mesure où il s’agit d’une simplification, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 314 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.

Articles additionnels après l'article 12
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article additionnel après l'article 12 bis

Article 12 bis 

I. - Après l'article L. 123-28 du code de commerce, il est inséré une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Des activités commerciales et artisanales ambulantes

« Art. L. 123-29. - Toute personne physique ou morale doit, pour exercer ou faire exercer par son conjoint collaborateur ou ses préposés une activité commerciale ou artisanale ambulante hors du territoire de la commune où est situé son habitation ou son principal établissement, en faire la déclaration préalable auprès de l'autorité compétente pour délivrer la carte mentionnée au quatrième alinéa.

« Il en va de même pour toute personne n'ayant ni domicile ni résidence fixes de plus de six mois, au sens de l'article 2 de la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe, entendant exercer ou faire exercer par son conjoint collaborateur ou ses préposés une activité commerciale ou artisanale ambulante.

« La déclaration mentionnée au premier alinéa est renouvelable périodiquement.

« Cette déclaration donne lieu à délivrance d'une carte permettant l'exercice d'une activité ambulante.

« Art. L. 123-30. - Outre les officiers et agents de police judiciaire, ont compétence pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par le décret mentionné à l'article L. 123-31 :

« 1° Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés au 2° de l'article 21 du code de procédure pénale ;

« 2° Les fonctionnaires chargés du contrôle des marchés situés sur le territoire de la commune sur laquelle le commerçant ambulant exerce son activité commerciale ou artisanale, habilités à cette fin.

« Art. L. 123-31. - Les modalités d'application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d'État, notamment les conditions d'habilitation des agents mentionnés au 2° de l'article L. 123-30 et les modalités d'exercice de leur compétence. »

II. - La loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe est ainsi modifiée :

1° L'article 1er est abrogé ;

2° Le premier alinéa de l'article 2 est ainsi rédigé :

« Les personnes n'ayant ni domicile ni résidence fixes de plus de six mois dans un État membre de l'Union européenne doivent être munies d'un livret spécial de circulation délivré par les autorités administratives. » ;

3° L'article 11 est ainsi rédigé :

« Art. 11. - Des décrets en Conseil d'État déterminent les modalités d'application des titres Ier et II et, notamment, les conditions dans lesquelles les titres de circulation sont délivrés et renouvelés et les mentions devant y figurer, les modalités des contrôles particuliers permettant d'établir que les détenteurs des titres de circulation mentionnés aux articles 2, 3, 4 et 5, et les mineurs soumis à leur autorité ont effectivement satisfait aux mesures de protection sanitaire prévues par les lois et règlements en vigueur et les conditions dans lesquelles le maire, conformément à l'article 7, doit donner son avis motivé et dans lesquelles les personnes titulaires d'un titre de circulation apportent les justifications motivant la dérogation prévue par l'article 9. »

III. - Dans le premier alinéa de l'article 613 nonies et dans l'article 613 decies du code général des impôts, les mots : « les articles 1er et » sont remplacés par les mots : « l'article ».

M. le président. L'amendement n° 756, présenté par MM. Trucy, Mortemousque, Barraux, Houel, J. Gautier, Cambon et Dériot et Mme Mélot, est ainsi libellé :

Dans les premier et deuxième alinéas du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 123-29 du code de commerce, supprimer le mot :

collaborateur

La parole est à M. François Trucy.

M. François Trucy. La loi du 2 août 2005 en faveur des PME a instauré une diversité de statuts pour les conjoints, qui peuvent opter pour un statut de conjoint collaborateur, associé ou salarié. Le conjoint-collaborateur n'étant plus l'unique statut, il convient d'en tirer les conséquences pour les activités ambulantes et de supprimer le qualificatif de « collaborateur ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement vise à apporter une correction rédactionnelle bienvenue. La commission a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 756.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 248, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 123-30 du code de commerce, après le mot :

marchés

insérer les mots :

et des halles

et, après le mot :

commerçant

insérer les mots :

ou l'artisan

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision et d'harmonisation avec le code général des collectivités territoriales visant à distinguer les marchés des halles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 248.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 12 bis, modifié.

(L'article 12 bis est adopté.)

Article 12 bis
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 12 ter

Article additionnel après l'article 12 bis

M. le président. L'amendement n° 84 rectifié, présenté par MM. Cornu, Mortemousque et J. Gautier, Mme Mélot et MM. Houel et Barraux, est ainsi libellé :

Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

I. - L'article L. 310-2 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi rédigé :

« I. - Sont considérées comme ventes au déballage les ventes de marchandises effectuées dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public de ces marchandises, ainsi qu'à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet.

« Les ventes au déballage ne peuvent excéder deux mois par année civile dans un même local ou sur un même emplacement. Elles font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune dont dépend le lieu de la vente.

« Les particuliers non inscrits au registre du commerce et des sociétés sont autorisés à participer aux ventes au déballage en vue de vendre exclusivement des objets personnels et usagés quatre fois par an au plus. » ;

2° Au 3° du II, les mots : « lorsque la surface de vente n'est pas supérieure à 300 mètres carrés » sont supprimés.

II. - Le 2° de l'article L. 310-5 du même code est ainsi rédigé :

« 2° Le fait de procéder à une vente au déballage sans la déclaration prévue par l'article L. 310-2 ou en méconnaissance de cette déclaration ; ».

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Les ventes au déballage spécialisées dans la vente ou l’échange d’objets mobiliers, communément dénommées « vide-greniers », constituent à la fois un facteur d’animation pour les communes et une source de financement pour les associations.

Le développement de ces vide-greniers, conjugué à l’absence d’encadrement légal de la participation des particuliers à ces manifestations, a révélé un certain nombre de dérives liées notamment à la présence de « faux particuliers » participant à de nombreuses manifestations et qui en font une activité lucrative non déclarée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Ce dispositif permettrait un encadrement plus réaliste des « vide-greniers », tout en évitant les fraudes. La commission a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cette modification du code de commerce vise, d’une part, à simplifier la procédure administrative des ventes au déballage en substituant à l’actuel régime d’autorisation préalable, qui a donné lieu à de nombreuses polémiques, un régime de déclaration avec comme seule autorité administrative compétente le maire et, d’autre part, à préciser les conditions de participation des particuliers à ces ventes.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 bis.

Article additionnel après l'article 12 bis
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Articles additionnels avant l'article 13

Article 12 ter 

Dans le premier alinéa de l'article L. 1274-1 du code du travail, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « neuf ». 

M. le président. L'amendement n° 541, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. L’article 12 ter du projet de loi vise à étendre le chèque emploi service prévu pour les très petites entreprises, les TPE, de cinq salariés à toutes les entreprises de moins de dix salariés.

Cette disposition participe de la volonté du Gouvernement et de la majorité parlementaire de mettre en place une économie où l’on ne trouverait pratiquement que des salariés individuels et où il n’y aurait plus de formalisme dans la relation entre employeur et salarié garantissant les droits des salariés et la reconnaissance collective de leurs droits.

Vous avez tort de croire que l’efficacité économique passe nécessairement par la régression sociale.

En 2005, vous avez proposé de transformer le titre emploi-entreprise, le TEE, en un titre de paiement qualifié de chèque emploi pour les très petites entreprises, le CETPE. Le titre emploi-entreprise avait lui-même été institué par l’article 5 de l’ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003 relative aux mesures de simplification des formalités concernant les entreprises, les travailleurs indépendants, les associations et les particuliers employeurs, prise en application de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Comme aujourd’hui, le Gouvernement justifiait cette simplification du droit du travail par « la nécessité de dynamiser la formule simplifiée de recrutement et d’emploi afin de favoriser la diminution du travail au noir et le recrutement par les TPE de leurs premiers salariés ».

Cinq ans après, on peut dire que l’objectif est loin d’être respecté. En revanche, les atteintes au droit du travail sous couvert de sa simplification sont méthodiques et constantes !

En 2005, lors de l’examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, voté encore une fois lors d’une session extraordinaire, il nous avait été proposé de modifier l’intitulé du titre emploi-entreprise en chèque emploi pour les très petites entreprises afin de lui donner, en employant le terme « chèque », la valeur d’un moyen de paiement et de faire sauter la limite légale de dix salariés que ne pouvait pas dépasser le décret fixant le seuil maximal de l’effectif des entreprises autorisées à recourir au TEE pour l’emploi de leurs salariés permanents. La commission des affaires économiques avait d’ailleurs fort justement noté la manœuvre du Gouvernement, qui voulait faire sauter ce seuil tout en affirmant le contraire.

Selon nous, l’élargissement de ce type de dispositif présente des dangers non négligeables en éloignant les salariés du code du travail et de l’application des conventions collectives.

Sans contrat de travail ni fiche de paie, les salariés ne bénéficient plus des garanties sur la durée de leur temps de travail, sur la date à laquelle ils sont payés, etc. À cela s’ajoute le fait que les salariés embauchés dans ce cadre sont déjà souvent particulièrement isolés, voire précarisés.

Pour toutes ces raisons, nous demandons à la Haute Assemblée de supprimer cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement supprime l’extension du chèque emploi pour les très petites entreprises aux entreprises comptant jusqu’à neuf salariés.

Ce dispositif très utile …

M. Alain Gournac. Absolument !

Mme Odette Terrade. Il précarise, il déréglemente !

M. Laurent Béteille, rapporteur. … permet aux TPE de s’acquitter facilement des principales obligations administratives liées au recrutement et à l’emploi d’un salarié. Son extension aux entreprises comptant jusqu’à neuf salariés est cohérente avec la définition communautaire de la micro-entreprise.

Il faut ne jamais avoir eu de personnel … (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC)

Mme Odette Terrade. Eh oui, nous n’en avons pas !

M. Laurent Béteille, rapporteur. … pour soutenir que ce dispositif n’a pas une grande utilité. La commission a donc émis un avis très défavorable.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis radicalement défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 541.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 85 rectifié bis, présenté par MM. Cornu, Mortemousque et J. Gautier, Mme Mélot et MM. Houel et Barraux, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

I. Le code du travail est ainsi modifié :

1° Le chapitre III du titre VII du livre II de la première partie est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Titre Emploi-Service Entreprise

« Art. L. 1273-1. - Toute entreprise, autre que celles mentionnées à l'article L. 7122-22 ou dont les salariés relèvent du régime des salariés agricoles, répondant aux conditions fixées à l'article L. 1273-2, peut adhérer à un service d'aide à l'accomplissement de ses obligations en matière sociale, proposé par l'organisme habilité par décret, et dénommé “Titre Emploi-Service Entreprise”.

« Art. L. 1273-2. - Le “Titre Emploi-Service Entreprise” ne peut être utilisé qu'en France métropolitaine et par les entreprises :

« 1° Dont l'effectif n'excède pas neuf salariés, quelle que soit la durée annuelle d'emploi de ces salariés ;

« 2° Ou qui, quel que soit leur effectif, emploient des salariés dont l'activité dans la même entreprise n'excède pas la limite de cent jours, consécutifs ou non, ou de 700 heures de travail par année civile. Lorsque l'effectif de l'entreprise dépasse neuf salariés, le service “Titre Emploi-Service Entreprise” ne peut être utilisé qu'à l'égard de ces seuls salariés.

« Art. L. 1273-3. - Le recours au service “Titre Emploi-Service Entreprise” permet notamment à l'entreprise :

« 1° D'obtenir le calcul des rémunérations dues aux salariés en application des dispositions du présent code et des stipulations des conventions collectives ainsi que de l'ensemble des cotisations et contributions créées par la loi et des cotisations et contributions conventionnelles rendues obligatoires par celle-ci ; 

« 2° De souscrire, dans les conditions mentionnées à l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, les déclarations obligatoires relatives aux cotisations et contributions sociales qui doivent être adressées aux organismes gérant les régimes mentionnés au code de la sécurité sociale, à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 et, le cas échéant, aux caisses de congés payés mentionnées à l'article L. 3141-30.

« Art. L. 1273-4. – À partir des informations dont il dispose, l'organisme habilité pour recouvrer les cotisations et les contributions dues au titre de l'emploi du salarié, délivre à l'employeur, pour remise au salarié, un bulletin de paie qui est réputé remplir les conditions prévues à l'article L. 3243-2. Par dérogation, un décret peut préciser les cas dans lesquels le bulletin de paie est délivré au salarié.

« Art. L. 1273-5. - L'employeur qui utilise le “Titre Emploi-Service Entreprise” est réputé satisfaire, par la remise au salarié et l'envoi à l'organisme habilité des éléments du titre emploi qui leur sont respectivement destinés, aux formalités suivantes :

« 1° Les règles d'établissement du contrat de travail, dans les conditions prévues par l'article L. 1221-1 ;

« 2° La déclaration préalable à l'embauche prévue par l'article L. 1221-10 ;

« 3° La délivrance d'un certificat de travail prévue à l'article L. 1234-19 ;

« 4° L'établissement d'un contrat de travail écrit, l'inscription des mentions obligatoires et la transmission du contrat au salarié, prévus aux articles L. 1242-12 et L. 1242-13 pour les contrats de travail à durée déterminée ;

« 5° L'établissement d'un contrat de travail écrit et l'inscription des mentions obligatoires, prévus à l'article L. 3123-14, pour les contrats de travail à temps partiel.

« Art. L. 1273-6. - L'employeur ayant recours au “Titre Emploi-Service Entreprise” peut donner mandat à un tiers en vue d'accomplir les formalités correspondantes.

« Art. L. 1273-7. - Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées par décret. »

2° Le chapitre IV, intitulé « Chèque-emploi pour les très petites entreprises » du titre VII du livre II est abrogé.

II. Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À l'article L. 133-5, les références : « L. 223-16 » et : « L. 351-21 » sont respectivement remplacées par les références : « L. 3141-30 » et : « L. 5427-1 » ;

2° Les articles L. 133-5-1, L. 133-5-3 et L. 133-5-5 sont abrogés ;

3° L'article L. 133-5-4 devient l'article L. 133-5-1 ;

4° L'article L. 133-5-2 est ainsi rédigé :

« Art L. 133-5-2. - Lorsque l'employeur utilise le “Titre Emploi-Service Entreprise”, les cotisations et contributions dues au titre de l'emploi du salarié sont recouvrées et contrôlées par un organisme habilité par décret selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale assises sur les salaires. Les modalités de transmission des déclarations aux régimes pour le compte desquels sont recouvrées ces cotisations et contributions et les modalités de répartition des versements correspondants font l'objet d'accords entre les organismes nationaux gérant ces régimes. À défaut d'accord, ces modalités sont fixées par décret. »

5° À l'article L. 241-17, les références : « L. 133-5-3 » et : « L. 133-5-5 » sont remplacées par la référence : « L. 133-5-2 ».

III. À l'article 139 de la loi de finances pour 2007 (n° 2006-1666 du 21 décembre 2006), la référence : « 2° de l'article L. 133-5-3 » est remplacée par la référence : « L. 133-5-2 ».

IV. Le présent article entre en vigueur le 1er avril 2009.

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Je vais prendre le contre-pied des propos de Mme Terrade.

Les entreprises bénéficient actuellement de deux offres de service pour remplir leurs obligations liées à l’embauche et à l’emploi : le titre emploi-entreprise, ou TEE, pour l’emploi de salariés occasionnels et le chèque emploi pour les très petites entreprises, ou CETPE, pour l’emploi de salariés permanents dans les entreprises de cinq salariés au plus. L’article 12 ter du présent projet de loi, issu d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale avec avis favorable du Gouvernement, a porté ce seuil à neuf salariés.

Chacun de ces deux dispositifs permet de réaliser en un seul service la déclaration unique d’embauche, le contrat de travail, le calcul des cotisations sociales et l’établissement des bulletins de salaire.

Le Gouvernement est favorable au développement de modes simplifiés de déclaration pour les petites entreprises et souhaite aller plus loin. Il est donc proposé de créer un titre emploi-service entreprise, le TESE, lequel se substituerait au CETPE et au TEE, à périmètre constant, et permettrait de gagner en lisibilité et en qualité de service. L’emploi de salariés occasionnels par des entreprises de cinq salariés au plus est actuellement éligible aux deux dispositifs, ce qui est source de confusion pour ces dernières.

Afin d’améliorer la qualité globale du service rendu aux employeurs, le système d’adhésion serait simplifié, notamment en favorisant l’adhésion en ligne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. L’idée de simplifier et de fondre en un seul dispositif le TEE et le CETPE est intéressante.

La commission a donc émis un avis favorable, sous réserve que le Gouvernement confirme que cette solution est techniquement réalisable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est très favorable au développement de modes simplifiés de déclaration pour les petites entreprises. Il considère que la fusion des deux dispositifs existants est une mesure de simplification et de rationalisation qui va dans le bon sens. Cela contribuera à mieux faire connaître ce nouveau service.

M. Alain Gournac. Bravo, monsieur Mortemousque !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 12 ter est ainsi rédigé.

Article 12 ter
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Article 13

Articles additionnels avant l'article 13

M. le président. L'amendement n° 1013, présenté par M. Chauveau, est ainsi libellé :

Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Dans la première phrase du I de l'article L. 232-21 du code de commerce, après les mots : « au greffe du tribunal » sont insérés les mots : « et le cas échéant, auprès de la Banque de France ».

II. Le même article est complété par un V ainsi rédigé :

« V. - Lorsque le dépôt a été effectué auprès de la Banque de France, celle-ci émet un certificat de cotation délivré à l'entreprise concernée pour être transmis au greffe du tribunal de commerce compétent. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 1014, présenté par M. Chauveau, est ainsi libellé :

Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Dans la première phrase du I de l'article L. 232-22 du code de commerce, après les mots : « au greffe du tribunal » sont insérés les mots : « et le cas échéant, auprès de la Banque de France ».

II. Le même article est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Lorsque le dépôt a été effectué auprès de la Banque de France, celle-ci émet un certificat de cotation délivré à l'entreprise pour être transmis au greffe du tribunal de commerce compétent. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 1015, présenté par M. Chauveau, est ainsi libellé :

Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Dans la première phrase du I de l'article L. 232-23 du code de commerce, après les mots : « au greffe du tribunal » sont insérés les mots : « et le cas échéant, auprès de la Banque de France ».

II. Le même article est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Lorsque le dépôt a été effectué auprès de la Banque de France, celle-ci émet un certificat de cotation délivré à l'entreprise pour être transmis au greffe du tribunal de commerce compétent. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Articles additionnels avant l'article 13
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Article 13 bis

Article 13

I. - La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 223-1 du code de commerce est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Un décret fixe un modèle de statuts types de société à responsabilité limitée dont l'associé unique, personne physique, assume personnellement la gérance et les conditions dans lesquelles ces statuts sont portés à la connaissance de l'intéressé. Ces statuts types s'appliquent à moins que l'intéressé ne produise des statuts différents lors de sa demande d'immatriculation de la société. »

II. - 1. Après le deuxième alinéa de l'article L. 223-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La société à responsabilité limitée dont l'associé unique, personne physique, assume personnellement la gérance est soumise à des formalités de publicité allégées déterminées par décret en Conseil d'État. Ce décret prévoit les conditions de dispense d'insertion au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. »

2. Après le premier alinéa de l'article L. 210-5 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le délai prévu au premier alinéa court à compter de la date de l'inscription des actes et indications au registre du commerce et des sociétés pour les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions simplifiées dont l'associé unique, personne physique, assume personnellement la gérance ou la présidence de la société. »

3. Le présent II entre en vigueur à la date de publication du décret prévu à l'avant-dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 223-1 du code de commerce, et au plus tard le 31 mars 2009.

III. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 223-27 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Hors les cas où l'assemblée délibère sur les opérations mentionnées aux articles L. 232-1 et L. 233-16 et lorsque les statuts le prévoient, sont réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité les associés qui participent à l'assemblée par visioconférence ou par des moyens de télécommunication permettant leur identification et dont la nature et les conditions d'application sont déterminées par décret en Conseil d'État. »

IV. - Le I de l'article L. 232-22 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'associé unique, personne physique, assume personnellement la gérance de la société, il est fait exception à l'obligation de déposer le rapport de gestion, qui doit toutefois être tenu à la disposition de toute personne qui en fait la demande. »

V. - Le deuxième alinéa de l'article L. 223-31 du même code est complété par les mots : « sans qu'il ait à porter au registre prévu à l'alinéa suivant le récépissé délivré par le greffe du tribunal de commerce ».

VI. - Le 3° du I de l'article L. 141-1 du même code est ainsi rédigé :

« 3° Le chiffre d'affaires qu'il a réalisé durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente, ce nombre étant réduit à la durée de la possession du fonds si elle a été inférieure à trois ans ; ».

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 464, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. L’article 13 vise à simplifier la vie des entreprises en allégeant les contraintes de gestion dont serait victime le mouvement de création d’entreprises dans notre pays.

Les obstacles au développement de nos entreprises seraient donc d’ordre fiscal – trop d’impôts, trop de droits et de taxes à payer –, d’ordre social – trop de charges – et d’ordre administratif – trop de papiers à remplir, de justificatifs à fournir. Comme si l’état de l’activité économique, du pouvoir d’achat ou des débouchés liés à la situation économique et sociale générale n’avaient rien à voir avec les difficultés rencontrées par les entrepreneurs !

La simplification porte ici sur le fonctionnement des sociétés à responsabilité limitée, les SARL : sont allégées certaines contraintes dont souffriraient ces entreprises, dont la forme juridique a pourtant connu un certain nombre d’évolutions largement suffisantes pour leur permettre d’exister et de se développer.

Notons d’ailleurs que le recours au statut de SARL ou d’EURL, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, est de plus en plus nettement préféré à celui d’entreprise individuelle et que les obligations de dépôt de comptes, par exemple, associées à ce statut, pèsent peu de poids au regard de la protection du patrimoine des associés, puisque seuls les apports peuvent être sollicités en responsabilité pour les procédures de redressement ou de liquidation.

Avec les mesures qui nous sont proposées, notamment sur les conditions de tenue de l’assemblée générale ordinaire des associés de la SARL, ce qui nous semble habiter le projet de loi est non pas une simplification, mais bien plutôt la validation par avance d’un certain nombre de procédures, qui, dans d’autres cas, auraient pu conduire à l’émergence d’un contentieux juridique.

Ce n’est donc pas la simplification qui est visée, alors même que l’on pourrait fort bien favoriser la prise en compte de la production de documents dématérialisés, notamment pour ce qui est du dépôt des comptes, mais c’est bien plutôt une souplesse de gestion pouvant aller de pair avec quelques légèretés dans sa mise en œuvre.

Dans le cas d’une EURL, si certains allégements de procédures peuvent se comprendre, il n’en demeure pas moins que la proposition faite par la commission spéciale sur la détention du capital ne peut recueillir notre assentiment.

Enfin, pour la SARL que je qualifierais d’ordinaire, les facilités offertes par le texte de l’article ne nous semblent pas acceptables, notamment en raison de la nécessité de la protection des intérêts des associés minoritaires ou de ceux qui sont moins impliqués qu’à l’origine de la création de l’entreprise dans sa vie quotidienne.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous ne pouvons évidemment que proposer la suppression de cet article 13.

M. le président. L'amendement n° 227, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

II bis. - L'article L. 223-5 du même code est abrogé.

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission spéciale s’est interrogée sur l’intérêt d’interdire à une EURL d’en détenir une autre.

Dans la mesure où, désormais, une société par actions simplifiée unipersonnelle peut elle-même détenir une société par actions simplifiée unipersonnelle ou une EURL, la pertinence de cette interdiction est très discutable.

M. le président. L'amendement n° 225, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le second alinéa du III de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les statuts peuvent prévoir un droit d'opposition à l'utilisation de ces moyens au profit d'un nombre déterminé d'associés et pour une délibération déterminée.

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Les députés ont supprimé la possibilité pour les statuts d'une société à responsabilité limitée de prévoir un droit d'opposition au profit d'un nombre déterminé d'associés à la tenue d'une assemblée par des moyens de visioconférence ou de télécommunication.

Toutefois, la commission pense que cette disposition peut être utile. L’opposition résultera vraisemblablement d’une mauvaise entente entre les associés. Dans ces conditions, il vaut mieux éviter la visioconférence.

M. le président. L'amendement n° 226 rectifié, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le V de cet article :

V. - Le deuxième alinéa de l'article L. 223-31 du même code est ainsi modifié :

1° Dans la seconde phrase, les mots : « du rapport de gestion, » sont supprimés ;

2° Il est complété par les mots : « sans qu'il ait à porter au registre prévu à l'alinéa suivant le récépissé délivré par le greffe du tribunal de commerce ».

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

La suppression de l’obligation de déposer au greffe du tribunal de commerce le rapport de gestion d’une EURL dont l’associé personne physique assume personnellement la gérance est une simplification bienvenue. Néanmoins, elle apparaît contradictoire avec la possibilité offerte à ce type d’entreprise de ne pas approuver formellement les comptes, mais de déposer au greffe l’inventaire et le rapport de gestion.

Dans la mesure où on supprime ce dernier, on prévoit que les comptes annuels de ce type d’EURL sont réputés approuvés par le dépôt au greffe des seuls comptes annuels et de l’inventaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 464 ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission n’est évidemment pas favorable à l’amendement de suppression déposé par nos collègues du groupe CRC, car elle approuve les mesures de simplification prévues par l’article 13.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement de suppression de l’article dans la mesure où nous souhaitons justement simplifier la vie des entreprises.

Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 225 et 226 rectifié de la commission spéciale, qui semblent très utiles dans cet exercice de simplification.

En revanche, je suis beaucoup plus réservé sur l’amendement n° 227, pour ne pas dire que j’y suis défavorable.

La solution proposée par cet amendement est déjà effective. Il suffit de transformer l’EURL en SARL à plusieurs associés, ce qui se pratique sans difficulté, l’associé unique pouvant céder des parts et modifier les statuts de l’entreprise pour intégrer les nouveaux associés.

Dès lors, je ne suis pas persuadé qu’il soit nécessaire de permettre la création d’EURL, d’autant que cela pourrait soulever des difficultés au regard du droit du travail si elles étaient utilisées à des fins de détournement des règles de salariat.

Je demande donc à M. le rapporteur de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 227 est-il maintenu ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Je le retire, monsieur le président, tout en demandant au Gouvernement d’être attentif à cette disposition.

M. le secrétaire d'État vient de répondre à l’instant qu’il suffisait de faire entrer un associé supplémentaire dans l’EURL et de la transformer en SARL. C’est dire combien la justification de cette interdiction, qui peut être si facilement contournée, me paraît tout de même assez ténue !

Par conséquent, cela mériterait que l’on examine plus à fond cette question.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je suis sensible à l’argumentation de M. le rapporteur et je m’engage à regarder de près cette disposition.

M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 227 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 464.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 225.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 226 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Articles additionnels après l'article 13 bis (début)

Article 13 bis 

I. - L'article L. 225-25 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les statuts peuvent imposer que chaque administrateur soit propriétaire d'un nombre d'actions de la société, qu'ils déterminent. » ;

2° Dans le deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « six ».

II. - L'article L. 225-72 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

«  Les statuts peuvent imposer que chaque membre du conseil de surveillance soit propriétaire d'un nombre d'actions de la société, qu'ils déterminent. » ;

2° Dans le deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « six ».

III. - Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 225-124 du même code, après le mot : « successible », sont insérés les mots : « , ainsi que le transfert par suite de fusion ou de scission d'une société actionnaire, sauf disposition contraire des statuts de la société attribuant les droits de vote double, ».

IV. - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 228-15 du même code est complétée par les mots : «, sauf dans le cas de l'émission ultérieure d'autres actions de préférence de la même catégorie ».

V. - Les I à IV entrent en vigueur le 1er janvier 2009. 

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 465, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet article 13 bis, issu d’un amendement du rapporteur pour avis de la commission des lois de l’Assemblée nationale, participe de la même démarche dite de « simplification juridique » suivie dans ce projet de loi.

Compte tenu de son apparence aride – il s’agit de droit des sociétés, et force est de constater que c’est là une question hautement complexe pour le commun des mortels –, il nous semble utile de rappeler les termes de la présentation de cet amendement par le rapporteur pour avis de la commission des lois de l’Assemblée nationale.

« Le présent amendement vise à réaliser un certain nombre de simplifications. Il s’inscrit au cœur de la logique qui a présidé à la rédaction du projet de loi – projet de loi de modernisation, projet de loi de simplification du droit. [ … ]

« L’amendement vise donc à réaliser un certain nombre de simplifications au niveau du régime juridique des sociétés anonymes : assouplissement de la règle selon laquelle les administrateurs et les membres du conseil de surveillance doivent détenir un certain nombre d’actions dans les sociétés non cotées, le soin de fixer ce nombre étant renvoyé aux statuts ; maintien du droit de vote double en cas de fusion, scission, et apport de la société actionnaire ; enfin, clarification du régime des actions de préférence. »

La lecture des dispositions de l’amendement est donc limpide : en lieu et place d’appliquer le droit à tous de manière équilibrée, cet amendement, dans le droit-fil du texte, vise en réalité à adapter le droit à l’opportunité des situations.

Le fait que l’auteur de l’amendement reconnaisse d’ailleurs que son texte va plus loin que celui du projet de loi signifie pour le moins que le Gouvernement n’avait sans doute pas osé déposer un tel article dans le projet de loi initial et qu’il a fait porter la disposition par un parlementaire compréhensif.

À vrai dire, la mesure qui nous semble d’assez loin la plus critiquable est la fixation statutaire de la part de capital que doivent détenir les administrateurs de l’entreprise.

Si l’on suit cette logique, on pourra demain avoir des conseils d’administration ou de surveillance d’entreprise qui ne comprendront que quelques cadres soigneusement choisis et qui porteront la parole de leurs commanditaires, détenteurs du capital, lors des décisions de gestion de l’entreprise.

Au demeurant, une telle démarche peut offrir à ceux qui seraient frappés par le cumul des mandats une possibilité de contourner cette difficulté légale.

Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la commission spéciale, dans le droit-fil du contenu de cet article, nous propose d’aménager encore le régime des plans d’options d’achat d’actions destinés, notamment, à récompenser les cadres dirigeants ou « méritants » d’une entreprise.

Pour toutes ces raisons, nous pensons que cet article 13 bis, plutôt que d’être un article de simplification, est un article d’adaptation du droit aux petits arrangements entre amis, qui accompagnent parfois la gestion et la vie de nos entreprises, ce qui est bien dommage !

C’est pourquoi nous vous proposons de supprimer cet article.

M. le président. L'amendement n° 228, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi les III et IV de cet article :

III. - Le premier alinéa de l'article L. 225-124 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toute action convertie au porteur ou transférée en propriété perd le droit de vote double attribué en application de l'article L. 225-123.

« Néanmoins, le transfert par suite de succession, de liquidation de communauté de biens entre époux, ou de donation entre vifs au profit d'un conjoint ou d'un parent au degré successible, ne fait pas perdre le droit acquis et n'interrompt pas le délai mentionné au premier alinéa de l'article L. 225-123. Il en est de même, sauf stipulation contraire des statuts de la société ayant attribué le droit de vote double, en cas de transfert par suite d'une fusion ou d'une scission d'une société actionnaire. »

IV.- Après le premier alinéa de l'article  L. 228-15 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque l'émission porte sur des actions de préférence relevant d'une catégorie déjà créée, l'évaluation des avantages particuliers qui en résultent est faite dans le rapport spécial mentionné à l'article L. 228-12. »

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission spéciale est favorable à la suppression de certaines contraintes pesant sur les sociétés anonymes lorsqu'elles ne portent pas atteinte à la protection des actionnaires ou des tiers.

Elle est notamment favorable à la suppression de l'obligation légale de détention d'actions de la société, ainsi qu'à la modification des règles de report du droit de vote double en cas de transfert de propriété.

Nous vous proposons par cet amendement une amélioration rédactionnelle.

En revanche, la commission est réservée sur la suppression de l'intervention d'un commissaire aux apports en cas d'émission d'actions de préférence, quand bien même cette catégorie d’actions existerait déjà au sein de la société.

L'émission de nouvelles actions de préférence peut avoir une incidence très importante sur les titulaires actuels des actions de préférence déjà créées : compte tenu de la nouvelle émission, la valeur réelle des droits que ces titulaires tireraient des actions de préférence existantes peut être très fortement affectée.

Aussi convient-il d'assurer, avant que l'assemblée générale extraordinaire décide la nouvelle émission, que les actionnaires disposeront effectivement d'une information réelle sur les incidences de l'augmentation de capital.

Consciente de la lourdeur de la mise en œuvre de la procédure d'évaluation des apports et des avantages particuliers, la commission spéciale vous propose également de prévoir que l'évaluation des avantages soit faite dans le rapport spécial du commissaire aux comptes présenté à la réunion de l'assemblée générale extraordinaire compétente pour décider l'émission.

M. le président. L'amendement n° 229, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer le V de cet article, par trois paragraphes ainsi rédigés :

V. - Le dernier alinéa de l'article L. 225-178 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Lors de sa première réunion suivant la clôture de chaque exercice, le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, constate, s'il y a lieu, le nombre et le montant des actions émises pendant la durée de l'exercice à la suite des levées d'options et apporte les modifications nécessaires aux clauses des statuts relatives au montant du capital social et au nombre des actions qui le représentent.

« Le conseil d'administration peut déléguer au directeur général ou, en accord avec ce dernier, à un ou plusieurs directeurs généraux délégués, les pouvoirs pour procéder, dans le mois qui suit la clôture de l'exercice, aux opérations mentionnées à l'alinéa précédent. Le directoire peut, aux mêmes fins, donner délégation à son président ou, avec son accord, à un ou plusieurs de ses membres. Le conseil d'administration ou le directoire, ou les personnes qui ont reçu délégation, peuvent également, à toute époque, procéder à ces opérations pour l'exercice en cours. »

VI. - Le III de l'article L. 236-10 du même code, tel qu'il résulte de l'article 8 de la loi n°      du      portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire est ainsi rédigé :

« III. - Lorsque l'opération de fusion comporte des apports en nature ou des avantages particuliers, le commissaire à la fusion ou, s'il n'en a pas été désigné en application du II, un commissaire aux apports désigné dans les conditions prévues à l'article L. 225-8, établit le rapport prévu à l'article L. 225-147. »

VII. - Les I à VI entrent en vigueur le 1er janvier 2009.

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission spéciale souhaite compléter les mesures adoptées par l'Assemblée nationale.

D'une part, dans le cadre de la procédure d'attribution d'options au bénéfice des membres du personnel salarié de la société anonyme ou de certains d'entre eux, nous vous proposons de conférer au conseil d'administration la possibilité d'accorder une délégation à son président, au directeur général ou aux directeurs généraux délégués pour procéder à la constatation éventuelle du nombre et du montant des actions émises pendant la durée de l'exercice à la suite des levées d'options, ainsi que pour apporter les modifications nécessaires aux clauses des statuts relatives au montant du capital social et au nombre des actions qui le représentent. Il en serait de même du directoire en faveur de ses membres

D'autre part, nous vous proposons d'apporter une précision dans le cadre du régime des fusions de sociétés anonymes afin que, lorsqu'un commissaire à la fusion a été désigné en application de l'article L. 236-10 du code de commerce, il ait également pour mission de faire rapport à l'assemblée générale extraordinaire sur les apports en nature ou les avantages particuliers.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. L’amendement n° 465, qui vise à supprimer l’article, est contraire à l’exercice de simplification que nous recherchons au travers de ce texte, en l’occurrence pour les sociétés anonymes. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

En revanche, il est favorable aux amendements nos 228 et 229 de la commission spéciale, qui visent à apporter encore plus de simplification pour les sociétés anonymes.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Autant nous sommes favorables aux mesures dont nous avons discuté précédemment pour la simplification des SARL, autant cet article 13 bis nous pose problème. En réalité, il s’agit non pas tant ici de simplifier que de faciliter un certain nombre d’agissements !

Par exemple, le fait que les administrateurs ne soient plus obligés de détenir un nombre d’actions minimum est une conception assez curieuse du capitalisme. Ce n’est pas à moi de vous faire la leçon en la matière, mais il me semble qu’il y a un lien dans la théorie économique entre la possession du capital et le fait de siéger au conseil d’administration et de prendre les décisions qui s’imposent pour la gestion de l’entreprise.

Nous assistons donc à une dérive encore plus marquée de dépersonnalisation et, de fait, d’ « irresponsabilisation » progressive.

Par ailleurs, l’amendement n° 229, présenté par M. le rapporteur, me semble également constituer une dérive dangereuse dans la mesure où il vise, au fond, à faciliter encore plus la levée d’option sur les stock-options.

Or, à l’heure actuelle, le débat de société porte sur la moralisation de ce mode de rémunération. Nous allons donc dans la mauvaise direction.

Tout cela ne me semble pas être du domaine de la simplification de la vie des sociétés anonymes, mais apparaît au contraire relever de la facilitation des agissements pour les administrateurs.

Nous sommes donc hostiles à ces propositions et à cet article.

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. M. Yung parle d’ « agissements ». Je voudrais apporter une rectification : il s’agit d’actes de gestion utiles à la vie de la société.

Je comprends très bien que Richard Yung puisse s’interroger. Pour autant, les statuts peuvent maintenir l’obligation pour les mandataires sociaux de détenir des actions.

Cependant cette disposition a été très largement détournée de son objectif depuis longtemps en permettant de véritables prêts d’actions qui n’ont pas grande signification. Par conséquent, la mesure proposée est un progrès.

Pour le reste, l’amendement de la commission tient compte de l’évolution de la législation, notamment de la séparation des fonctions de président ou de directeur général. Il constitue une amélioration de la procédure, mais n’est en aucun cas une évolution nuisible au fonctionnement des sociétés anonymes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 465.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 229.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 13 bis, modifié.

(L'article 13 bis est adopté.)

Article 13 bis
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Articles additionnels après l'article 13 bis (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 13 bis

M. le président. L'amendement n° 366 rectifié, présenté par M. Yung, Mme Bricq, M. Massion, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur et les membres du Groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 5 de l’article 445 du code des douanes est ainsi rédigé :

« 5. Les conclusions de la commission sont notifiées aux parties. La commission peut rendre ces conclusions publiques, sous forme d’extraits, sous réserve de l’accord des deux parties et sans divulguer leurs identités ni aucune information à caractère commercial ou industriel. »

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Cet amendement vise à rendre publiques les conclusions de la Commission de conciliation et d’expertise douanière, la CCED, de manière à prévenir les litiges douaniers et à simplifier l’accès des entreprises au commerce extérieur. Cette commission établit, en quelque sorte, une jurisprudence.

D’une façon générale, il est bon que les entreprises connaissent la position de l’administration douanière. La clarté et la transparence sont nécessaires : c’est la logique du rescrit, qui est en train d’être généralisé en matière fiscale et sociale.

En l’occurrence, nous demandons que l’administration s’engage préalablement à l’égard des dirigeants de PME, qui rencontrent souvent des difficultés à s’orienter dans le domaine complexe de la législation douanière. La notion de rescrit, qui est en vigueur dans de nombreux pays, permet de sécuriser la relation entre l’entreprise et l’administration des douanes nationales, ce qui est intéressant pour les entreprises.

Cette proposition avait été discutée lors de l’examen du présent texte à l’Assemblée nationale, et repoussée au motif, principalement, que la publication des conclusions de la Commission de conciliation et d’expertise douanière comportait le risque de nuire à la confidentialité des données, souhaitable en la matière. La publication du nom et des coordonnées de l’entreprise pourrait en effet lui porter préjudice.

L’amendement que nous présentons répond donc au souci de sécuriser les relations avec l’administration, tout en prévoyant que le nom de l’entreprise ne soit pas divulgué.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement dans sa nouvelle rédaction. Elle avait en effet estimé que, dans sa rédaction antérieure, qui correspondait à la proposition qui avait été débattue à l’Assemblée nationale, il n’était pas recevable pour une question de respect du secret des affaires.

Pour autant, la commission considère qu’il est utile que les entreprises puissent connaître la doctrine de la CCED et ses éventuels changements. C’est pourquoi, compte tenu de la rectification intervenue, qui permet de ne pas divulguer les identités des parties concernées, cet amendement peut tout à fait être accepté.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Monsieur Yung, vous avez fait référence à une discussion qui a eu lieu à l’Assemblée nationale, lorsqu’un député de la majorité, Lionel Tardy, a proposé que soient publiés les avis rendus par la Commission de conciliation et d’expertise douanière.

Cet amendement, bien que très intéressant, n’avait pas pu être adopté parce qu’il prévoyait de rendre la publication systématique.

Vous proposez, en revanche, que la CCED puisse rendre ses conclusions publiques sous forme d’extraits, sous réserve de l’accord des deux parties et sans divulguer ni leur identité ni aucune information à caractère commercial et industriel.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur votre amendement, qui complète très heureusement la discussion intervenue à l’Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 366 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme Isabelle Debré. Tout arrive !

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13 bis.

L'amendement n° 983 rectifié, présenté par M. Cornu, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-11 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception aux dispositions des articles L. 225-132 et L. 228-91 du code de commerce, les actions de préférence sans droit de vote auxquelles est attaché un droit limité de participation aux dividendes, aux réserves ou au partage du patrimoine en cas de liquidation sont privées de droit préférentiel de souscription pour toute augmentation de capital en numéraire, sous réserve de stipulations contraires des statuts. »

Cet amendement n’est pas soutenu.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Je le reprends, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 983 rectifié bis, présenté par M.  Laurent Béteille, au nom de la commission spéciale, et ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-11 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par exception aux dispositions des articles L. 225-132 et L. 228-91 du code de commerce, les actions de préférence sans droit de vote auxquelles est attaché un droit limité de participation aux dividendes, aux réserves ou au partage du patrimoine en cas de liquidation sont privées de droit préférentiel de souscription pour toute augmentation de capital en numéraire, sous réserve de stipulations contraires des statuts. »

Vous avez la parole pour le présenter, monsieur le rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer le droit préférentiel de souscription attaché par principe actuellement aux actions de préférence sans droit de vote donnant droit à des avantages simplement pécuniaires. Néanmoins, un tel droit pourrait continuer à être attribué si le contrat d’émission des actions de préférence le prévoit.

Cette suppression permettrait d’éviter, lors d’augmentations de capital, d’avoir à réunir la masse des détenteurs de ces actions, ce qui est extrêmement lourd. De surcroît, ces détenteurs sont souvent assez peu intéressés par le principe même d’une nouvelle souscription.

Par conséquent, je propose d’adopter cet amendement, dont M. Cornu était initialement l’auteur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 983 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 13 bis.

L'amendement n° 626, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, J. L. Dupont, Laffitte et Türk, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-14 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Art. L. 228-14. - Les actions de préférence peuvent être librement converties en actions ordinaires ou en actions de préférence d'une autre catégorie, même si cette conversion aboutit à une réduction de capital. »

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Mes chers collègues, la semaine prochaine se tiendra au Sénat la dixième édition d’une manifestation dont l’objet est de permettre à des porteurs de projets de venir les présenter devant un ensemble d’investisseurs.

Cette manifestation est devenue aujourd’hui la plus importante du genre dans le domaine du capital-risque. Cela veut dire que, désormais, quand des problèmes liés au développement de ces entreprises de croissance se posent, les spécialistes se tournent tout naturellement vers le Sénat.

Les amendements que je vais vous présenter sont donc le fruit de l’observation de la pratique en ce qui concerne les entreprises de croissance. Même s’ils sont très techniques, ces amendements, qui ont été préparés avec le concours des meilleurs avocats, sont destinés à simplifier les choses, en préservant les intérêts des créateurs de sociétés.

Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 626, 622 rectifié, 623, 624, 630 rectifié et 625, qui ont tous trait aux actions de préférence.

M. le président. L'amendement n° 622 rectifié, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. J. L. Dupont, Laffitte, P. Dominati, Türk et Pointereau, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-15 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Art. L. 228-15. - Lorsque la société émettrice fait appel public à l'épargne, la création d'une nouvelle catégorie d'actions de préférence donne lieu à l'application des articles L. 225-8, L. 225-14, L. 225-147 et L. 225-148 relatifs aux avantages particuliers lorsque les actions sont émises au profit d'un ou plusieurs personnes nommément désignés et détenant des titres de capital de la société. Dans tous les cas, les titulaires d'actions devant être converties en actions de préférence de la catégorie à créer ne peuvent, à peine de nullité de la délibération, prendre part au vote sur la création de cette catégorie et les actions qu'ils détiennent ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité, à moins que l'ensemble des actions ne fassent l'objet d'une conversion en actions de préférence. »

L'amendement n° 623, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, J. L. Dupont, Laffitte et Türk, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 228-98 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Après les mots : « son capital, », sont insérés les mots : « ni créer d'actions de préférence entraînant une telle modification ou un tel amortissement, » ;

2° Les mots : « par le contrat d'émission ou » sont supprimés ;

3° Il est complété par les mots : «, ou par le contrat d'émission ».

L'amendement n° 624, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, Türk, J. L. Dupont et Laffitte, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-99 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : «, lorsque les titres de capital sont admis à la négociation sur un marché réglementé » ;

2° Dans la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa, après le mot : « organisé » est inséré le mot : « librement ».

L'amendement n° 630 rectifié, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, J. L. Dupont, Laffitte, Türk et Pointereau, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le début du premier alinéa de l'article L. 228-103 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Lorsque la société émettrice fait appel public à l'épargne les titulaires de valeurs mobilières donnant accès à terme au capital après détachement, s'il y a lieu, des droits du titre d'origine en application de la présente section sont, à l'exception des titulaires de bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise, groupés de plein droit... »

L'amendement n° 625, présenté par MM. Adnot et Darniche, Mme Desmarescaux et MM. P. Dominati, J. L. Dupont, Laffitte et Türk, est ainsi libellé :

Après l'article 13 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 228-104 du code de commerce est ainsi rédigé :

« Art. L. 228-104. - Peuvent être annulées les délibérations ou stipulations prises en violation des articles L. 228-98 à L. 228-101 et L. 228-103. »

Veuillez poursuivre, monsieur Adnot.

M. Philippe Adnot. L'amendement n° 626 vise à permettre de convertir les actions de préférence en actions ordinaires ou d'une autre catégorie pour adapter le texte à la pratique des entreprises de croissance.

L’amendement n° 622 rectifié a pour objet de clarifier et d’adapter le régime des actions de préférence à la situation des entreprises de croissance au regard de la procédure des avantages particuliers attachés à ces actions.

À cet effet, il est précisé que ces dispositions ne concernent que les sociétés faisant appel public à l’épargne. Le champ de ces dispositions est par ailleurs limité à la création de nouvelles catégories d’actions de préférence, étant précisé que les actionnaires sont uniquement ceux qui existent au jour de la création de ces nouvelles catégories. Enfin, est supprimée l’incompatibilité professionnelle applicable aux commissaires aux comptes, qui est peu adaptée à la pratique des entreprises de croissance. Cela rejoint l’objet d’un précédent amendement de la commission.

L’amendement n° 623 tend à attribuer aux sociétés émettrices le droit de modifier les règles de répartition des bénéfices et des bonis de liquidation, dès lors que cela est prévu par le contrat d’émission.

L’amendement n° 624 a pour objet d’introduire de la flexibilité dans les méthodes de protection des droits existants, au profit des anciens actionnaires. C’est extrêmement important si l’on veut éviter que les créateurs des entreprises ne se trouvent dépossédés.

L’amendement n° 630 rectifié a pour objet de limiter le champ de la disposition visée aux sociétés faisant appel public à l’épargne, afin de ne pas alourdir les procédures applicables aux jeunes entreprises de croissance. Il tend par ailleurs à simplifier en pratique l’organisation des porteurs de valeurs mobilières en masse.

Enfin, l’amendement n° 625 vise à remplacer le régime de nullité absolue, qui comporte des procédures extrêmement lourdes, par une nullité relative, pour adapter le texte à la pratique des entreprises de croissance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. J’ai bien noté que les amendements présentés par M. Adnot avaient été élaborés par les meilleurs avocats qui soient. Toutefois, mon cher collègue, vous savez bien que lorsqu’un avocat dit une chose, il s’en trouve toujours un autre pour affirmer exactement le contraire. C’est une caractéristique de la profession ! (Sourires.)

Un certain nombre d’améliorations sont proposées au travers de ces différents amendements. Cependant, il faut veiller à ce que ces simplifications ne constituent pas une remise en cause des droits d’un certain nombre de parties prenantes, que ce soit les créanciers ou les actionnaires.

Ainsi, l'amendement n° 626 tend à supprimer la faculté d’opposition existant dans le cas d’une conversion d’actions de préférence aboutissant à une réduction de capital non motivée par des pertes. Ce droit d’opposition peut, c’est vrai, apparaître contraignant. Néanmoins, il permet de protéger les créanciers de la société contre des manœuvres éventuelles qui pourraient léser leurs droits. Par conséquent, il nous paraît souhaitable de conserver ce droit d’opposition.

Je souhaite donc le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 622 rectifié a pour objet de limiter le recours à la procédure des avantages particuliers attachés aux actions de préférence aux seules sociétés ne faisant pas appel public à l’épargne et au cas où une seule nouvelle catégorie d’actions est créée.

Les actionnaires et les tiers doivent être informés des effets de l’émission d’actions qui confèrent à leurs titulaires des droits préférentiels. Cette nécessité s’impose quand bien même la société ne ferait pas appel public à l’épargne.

Le recours à la procédure des avantages particuliers peut s’avérer lourd en cas de simple émission d’actions relevant d’une catégorie déjà créée. La commission vous a donc précédemment proposé, au travers de l'amendement n° 228 à l’article 13 bis, de maintenir une obligation d’évaluation moins lourde.

L’amendement n° 622 rectifié est donc, de fait, incompatible avec l'amendement n° 228, qui vient d’être adopté.

L’amendement n° 623 tend à attribuer aux sociétés émettrices de valeurs mobilières donnant accès au capital d’une société le droit de modifier les règles de répartition des bénéfices et des bonis de liquidation dès lors que cela est prévu par le contrat d’émission. Il s’agit d’une mesure de simplification qui ne remet pas en cause la protection des titulaires de ces actions puisqu’ils auront librement consenti à cette possibilité inscrite dans le contrat d’émission.

Par conséquent, la commission est favorable à cet amendement.

Dans le cadre du régime des valeurs mobilières donnant accès au capital, l’amendement n° 624 vise également à assouplir les mesures de protection des intérêts des titulaires des droits en cause lorsque la société émettrice ne fait pas appel public à l’épargne.

Pour autant, il nous semble qu’un certain niveau de protection est nécessaire pour assurer les droits des titulaires de ces valeurs. Le fait que la société fasse ou non appel public à l’épargne ne paraît pas être un élément déterminant.

La commission souhaite donc le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 630 rectifié tend à imposer la constitution d’une masse des titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital dans les seules sociétés faisant appel public à l’épargne. En outre, même dans le cas d’appel public à l’épargne, il prévoit que les titulaires des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise seraient exclus de cette masse.

La constitution d’une masse, que la société fasse ou non appel public à l’épargne, représente un dispositif protecteur pour les titulaires de ces valeurs mobilières. Il ne faut pas que la simplification de certaines procédures conduise à supprimer des protections qui sont légitimes.

C'est la raison pour laquelle la commission demande également le retrait de cet amendement.

Enfin, l’amendement n° 625 tend à remplacer le régime de nullité absolue actuellement applicable par une nullité relative qui s’applique en cas de violation des règles d’émission des valeurs mobilières donnant accès au capital de la société.

La nullité des actes pris en violation des règles d’émission vise à remplacer d’anciennes incriminations pénales. La gravité du manquement aux règles d’émission, qui garantissent les droits des porteurs et des tiers, justifie, nous semble-t-il, le maintien d’une nullité impérative.

En outre, remettre en cause ce principe pour les seules émissions d’actions de préférence ou de titres donnant accès au capital créerait une distorsion avec le régime des augmentations de capital de droit commun.

La commission demande, là encore, le retrait de l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Monsieur Adnot, vous avez soulevé, comme à l’habitude, une question très importante, portant en l’occurrence sur le régime des actions de préférence et l’intérêt de les développer dans notre pays.

Le Gouvernement partage votre souci de promouvoir ces instruments. C’est la raison pour laquelle, à l’article 42 de ce projet de loi, il sollicite du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnances. Cette habilitation porte, notamment, sur la réforme du régime des actions de préférence.

Monsieur le sénateur, vous serez bien évidemment associé à la large concertation qui sera menée sous mon égide en vue de la rédaction de l’ordonnance portant sur ce sujet technique très complexe. Cela constituera l’étape préalable à une réforme destinée à rendre ce régime plus attrayant, conformément à notre souhait commun.

Je suivrai l’avis de la commission spéciale sur l’ensemble des amendements que vous avez déposés : j’émettrai donc un avis défavorable sur les amendements nos 626, 622 rectifié, 624, 630 rectifié et 625, à moins que vous ne les retiriez, l’amendement n° 623 recevant en revanche un avis favorable.

M. le président. Monsieur Adnot, acceptez-vous de retirer vos amendements, à l’exception de l’amendement n° 623 ?

M. Philippe Adnot. Tous mes amendements reflétaient une analyse de la situation présente, qui peut être illustrée à l’aide de cas concrets. Nous n’allons pas engager un grand débat dès maintenant : je prends acte de l’avis favorable de la commission et du Gouvernement sur l’amendement n° 623 et de l’engagement pris par M. le secrétaire d’État de nous associer au travail d’amélioration du régime juridique des actions de préférence.

Je retire donc mes amendements, à l’exception de celui qui a reçu un avis favorable.

M. le président. Les amendements nos 626, 622 rectifié, 624, 630 rectifié et 625 sont retirés.

Je mets aux voix l’amendement n° 623.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 13 bis.

Articles additionnels après l'article 13 bis (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Discussion générale

3

Candidature à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission des affaires économiques m’a fait connaître qu’elle a proposé la candidature de M. Marcel Deneux, en remplacement de M. Daniel Soulage, comme membre titulaire de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’environnement.

La liste modifiée a été affichée et sera ratifiée à l’expiration d’un délai d’une heure, s’il n’y a pas eu d’opposition, conformément à l’article 12 du règlement.

4

Articles additionnels après l'article 13 bis (interruption de la discussion)
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Article 14

Modernisation de l'économie

Suite de la discussion d’un projet de loi déclaré d’urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, de modernisation de l’économie.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 14.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Articles additionnels après l'article 14

Article 14

I. - Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Dans le troisième alinéa de l’article L. 227-1, les références : « L. 225-17 à L. 225-126 et L. 225-243 » sont remplacées par les références : « L. 224-2, L. 225-17 à L. 225-126, L. 225-243 et du I de l’article L. 233-8 » ;

2° Le même article L. 227-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La société par actions simplifiée peut émettre des actions résultant d’apports en industrie tels que définis à l’article 1843-2 du code civil. Les statuts déterminent les modalités de souscription et de répartition de ces actions. Celles-ci sont inaliénables et ne peuvent excéder une durée de dix ans.

« La société par actions simplifiée dont l’associé unique, personne physique, assume personnellement la présidence est soumise à des formalités de publicité allégées déterminées par décret en Conseil d’État. Ce décret prévoit, notamment, les conditions de dispense d’insertion au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. » ;

3° L’article L. 227-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant du capital social est fixé par les statuts. » ;

4° Dans la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 227-9, après les mots : « commissaire aux comptes », sont insérés les mots : « s’il en existe un » ;

4° bis  L’avant-dernier alinéa de l’article L. 227-9 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque l’associé unique assume personnellement la présidence de la société, le dépôt, dans le même délai, au registre du commerce et des sociétés du rapport de gestion, de l’inventaire et des comptes annuels dûment signés vaut approbation des comptes sans que l’associé unique ait à porter au registre prévu à la phrase précédente le récépissé délivré par le greffe du tribunal de commerce. » ;

5° Après l’article L. 227-9, sont insérés deux articles L. 227-9-1 et L. 227-9-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 227-9-1. - Les associés peuvent nommer un ou plusieurs commissaires aux comptes dans les conditions prévues à l’article L. 227-9.

« Sont tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés par actions simplifiées qui dépassent, à la clôture d’un exercice social, des chiffres fixés par décret en Conseil d’État pour deux des critères suivants : le total de leur bilan, le montant hors taxes de leur chiffre d’affaires ou le nombre moyen de leurs salariés au cours d’un exercice.

« Sont également tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés par actions simplifiées qui détiennent, directement ou indirectement, 5 % ou plus du capital ou des droits de vote d’une autre société ou qui sont contrôlées au sens du II de l’article L. 233-16, sous réserve que le contrôle exclusif soit exercé par une société qui ne dépasse pas, à la clôture d’un exercice social, des chiffres fixés par décret en Conseil d’État pour deux des critères suivants : le total de son bilan, le montant hors taxes de son chiffre d’affaires ou le nombre moyen de ses salariés au cours d’un exercice.

« Même si les conditions prévues aux deux alinéas précédents ne sont pas atteintes, la nomination d’un commissaire aux comptes peut être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital.

« Art. L. 227-9-2. - Sans préjudice de l’article L. 227-9-1, une norme d’exercice professionnel homologuée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, adapte les diligences à mettre en œuvre par les commissaires aux comptes dans l’exercice de leurs missions pour les sociétés par actions simplifiées qui, à la clôture d’un exercice social, ne dépassent pas, au cours de cet exercice, un niveau de bilan, d’une part, ni un montant hors taxes de leur chiffre d’affaires ou un nombre moyen de salariés, d’autre part, fixés par décret en Conseil d’État. » ;

6° Dans le premier alinéa de l’article L. 227-10, après les mots : « commissaire aux comptes », sont insérés les mots : « ou, s’il n’en a pas été désigné, le président de la société » ;

7°  Le I de l’article L. 232-23 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’associé unique d’une société par actions simplifiée assume personnellement la présidence de la société, il est fait exception à l’obligation de déposer le rapport de gestion, qui doit toutefois être tenu à la disposition de toute personne qui en fait la demande. »

II. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2009.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Monsieur le président, je souhaite présenter la philosophie qui a inspiré le Gouvernement dans la rédaction de cet article 14. Nous pourrons ainsi gagner du temps dans l’examen des différents amendements.

Le projet de loi simplifie le fonctionnement des sociétés par actions simplifiées, les SAS, notamment en réformant le régime de leur commissariat aux comptes. Cette réforme est justifiée à plus d’un titre.

Elle permet d’abord de dispenser les petites entreprises d’une obligation lourde qui n’a pas, dans leur cas, de réelle justification. Cette dispense existe déjà pour d’autres structures sociétaires, comme la société à responsabilité limitée, la société en nom collectif et la société en commandite simple, pour lesquelles la désignation d’un commissaire aux comptes n’est obligatoire qu’à partir de certains seuils. La souplesse et l’attractivité de la SAS seront ainsi renforcées par cette réforme, qui permettra d’alléger les obligations pesant sur les petites sociétés par actions simplifiées.

Pour autant, le Gouvernement est tout à fait accessible aux arguments et aux préoccupations développés par les représentants des commissaires aux comptes. Il n’est aucunement dans son intention de nier le rôle essentiel joué par cette profession pour assurer la transparence de notre économie et la sécurité juridique, financière et comptable qui s’y attache.

Il nous faut donc trouver un équilibre, comme souvent au cours de l’examen de ce projet de loi, entre la nécessité reconnue de supprimer des obligations lourdes pour les petites entreprises – je rappelle que le mandat d’un commissaire aux comptes représente un coût de 3 000 euros en moyenne, ce qui n’est pas négligeable pour une petite entreprise – et le maintien d’un niveau de transparence suffisant dans notre économie, dont la certification des comptes est un élément essentiel.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable au compromis proposé par la commission spéciale. Les seuils seront fixés par décret et, comme le suggère la commission spéciale dans son rapport, l’exemption jouera pour les sociétés ne dépassant pas deux des trois seuils suivants : un chiffre d’affaires annuel de 2 millions d’euros, un bilan de 1 million d’euros et un effectif moyen de vingt salariés. Cela représente la moitié des entreprises initialement considérées par le Gouvernement au travers du projet de loi : c’est dire l’intérêt de cette recherche d’équilibre. Je m’engage à reprendre dans le décret les seuils que je viens d’annoncer.

Par ailleurs, le Gouvernement est prêt à accepter, comme le propose la commission spéciale, que la dispense de certification ne s’applique pas aux sociétés contrôlées ou qui contrôlent une autre société.

De surcroît, la nomination d’un commissaire aux comptes pourra toujours être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant le dixième du capital.

Enfin, une norme d’exercice professionnel adaptera les diligences que les commissaires aux comptes devront mettre en œuvre dans l’exercice de leur mission. La proposition du rapporteur Laurent Béteille consistant à appliquer une norme similaire pour les autres structures sociétaires va dans le bon sens.

Cette réforme assure donc un équilibre entre, d’une part, la simplification des obligations applicables à ces sociétés, et, d’autre part, la sécurité et la transparence financières.

Pour finir, je tiens à souligner à nouveau le rôle indispensable des commissaires aux comptes dans l’économie, ainsi que leur professionnalisme.

Le champ d’intervention de cette profession a du reste été étendu au cours des dernières années à certaines associations et aux établissements publics, car le commissariat aux comptes est indispensable lorsqu’une structure atteint un certain degré de développement. Les commissaires aux comptes contribuent alors à accompagner l’activité des sociétés et à détecter les abus éventuels. Soumis à des règles strictes, ils mettent au service de l’économie un haut niveau de compétence et de connaissances, tant théoriques que pratiques.

Je remercie, à cette occasion, la Compagnie nationale des commissaires aux comptes pour les échanges constructifs que nous avons eus au cours des dernières semaines.

M. le président. Je suis saisi de douze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 466, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Cet article 14 porte sur le cas spécifique des sociétés par actions simplifiées. Il s’agit, là encore, d’alléger certaines des contraintes de gestion de ces entreprises.

Actuellement, la société par actions simplifiée bénéficie d’une liberté contractuelle importante pour son fonctionnement et l’ouverture de son capital.

Dans une SAS, en effet, les actions représentatives du capital social ont vocation à s’échanger librement avec toute personne extérieure. Une telle structure nécessite donc, comme la société anonyme, la nomination d’un commissaire aux comptes, afin d’assurer une sécurité juridique minimale des transactions.

En effet, si cette liberté d’échange des actions est un élément attrayant pour les investisseurs, il est nécessaire qu’une information fiable puisse être donnée sur le capital représenté par les actions.

La vérification des comptes sociaux par une personne indépendante de la personne morale contrôlée – en l’occurrence le commissaire aux comptes – constitue le moyen reconnu par la loi d’obtenir une information fiable sur laquelle fonder une transaction. Les commissaires aux comptes contribuent donc à la transparence des activités et à la sécurité financière de l’économie.

Or l’article 14 prévoit que la désignation d’un ou plusieurs commissaires aux comptes ne sera plus qu’une faculté offerte aux SAS, sauf en cas de franchissement de certains seuils financiers. Pourtant, l’obligation de recours à un commissaire aux comptes est la contrepartie d’un statut simplifié.

Les organismes représentatifs de la profession du commissariat aux comptes et de l’expertise comptable vous ont mis en garde, soulignant, à juste titre, que cette mesure est dangereuse à bien des égards : elle va, en effet, à l’encontre de la confiance dont l’économie a besoin pour se développer et des principes de sécurité financière et juridique, deux éléments fondateurs de toute économie performante.

En outre, si cette mesure était adoptée, cela ne manquerait pas d’entraîner de nouveaux risques et de nouveaux coûts pour les pouvoirs publics.

En premier lieu, à cause de la non-révélation de faits délictueux ou de fraudes éventuelles dans ces SAS, ce qui laisse craindre une augmentation du nombre de litiges liés au non-respect du droit des sociétés.

En second lieu, parce que certaines grandes entreprises peuvent être tentées de requalifier certaines de leurs filiales en SAS pour échapper aux audits.

Enfin, la suppression de la procédure d’alerte pour ces sociétés ne manquera pas d’occasionner des difficultés économiques et financières aux entreprises qui n’auront pas pu être mises en garde. Une recrudescence des faillites et des licenciements est donc à craindre. Les coûts seront également sociaux : pour les salariés travaillant dans ces entreprises peu sécurisées, bien sûr, mais aussi pour les clients, les fournisseurs et les actionnaires.

L’adoption de cette mesure serait aussi fort préjudiciable à la profession de commissaire aux comptes. Elle remettrait en cause 67 000 mandats d’audit légal sur un total de 200 000, et affecterait principalement les petits cabinets territoriaux. Elle signifierait la suppression de plus de 2 000 emplois.

Vous avez essayé de minimiser la portée de cette mesure, en affirmant que les petites SAS ne représentaient qu’un très faible pourcentage des honoraires d’audit légal. Mais la Compagnie nationale des commissaires aux comptes a établi des prévisions différentes : selon elle, la perte de revenus induite par ce dispositif pourrait atteindre 20 %.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer l’article 14.

M. le président. L’amendement n° 231, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le 2° du I de cet article :

2° Le même article L. 227-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La société par actions simplifiée peut émettre des actions inaliénables résultant d’apports en industrie tels que définis à l’article 1843-2 du code civil. Les statuts déterminent les modalités de souscription et de répartition de ces actions. Ils fixent également le délai au terme duquel, après leur émission, ces actions font l’objet d’une évaluation dans les conditions prévues à l’article L. 225-8.

« La société par actions simplifiée dont l’associé unique, personne physique, assume personnellement la présidence est soumise à des formalités de publicité allégées déterminées par décret en Conseil d’État. Ce décret prévoit les conditions de dispense d’insertion au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. » ;

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. L’article 14 vise à autoriser, pour la première fois, les apports en industrie dans les sociétés par actions simplifiées. Cette innovation permettra à celles de ces sociétés qui interviennent dans des activités de forte technicité de valoriser l’apport de savoir-faire par certains actionnaires.

L’amendement n° 231 tend à assouplir le recours aux apports en industrie, en prévoyant que les actions émises en contrepartie d’un tel apport ne sont pas soumises à une limitation de durée, qui a nécessairement un côté arbitraire, mais qu’elles doivent faire en revanche l’objet d’une nouvelle évaluation au terme d’un délai fixé par les statuts.

En effet, l’apport en industrie est susceptible de voir sa valeur décliner ou, à l’inverse, augmenter avec le temps. Il est donc souhaitable, pour l’équilibre des relations entre les actionnaires, que cette valeur puisse être réexaminée régulièrement.

M. le président. L’amendement n° 80 rectifié, présenté par MM. Carle, Alduy, J. Blanc, Bécot et Dulait, est ainsi libellé :

Supprimer les 4°, 5° et 6°du I de cet article.

La parole est à M. André Dulait.

M. André Dulait. La suppression de l’obligation de recours à un commissaire aux comptes pour les sociétés par actions simplifiées se situant en deçà des seuils fixés par décret et à l’exception des SAS détenant plus de 5 % d’une autre société va à l’encontre de la demande croissante de transparence financière des Français.

Au moment où le Gouvernement souhaite étendre la participation et l’intéressement au plus grand nombre possible d’entreprises,…

M. André Dulait. … les salariés doivent pouvoir être assurés de la sincérité des comptes.

Cette disposition pourrait également aller à l’encontre de celles qui incitent les particuliers à investir dans les PME une partie de leur contribution au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune. En effet, si ces investisseurs ne peuvent bénéficier de garanties quant à la bonne gestion de ces PME, certifiée par le commissaire aux comptes, ils pourraient fortement hésiter à réaliser ce type d’investissement.

Enfin, à l’heure où le nombre des faillites d’entreprise augmente – il s’est accru de 7 % au premier trimestre de 2008 –, la mission de prévention et le rôle d’alerte des commissaires aux comptes sont plus nécessaires que jamais. Or, grâce à cette disposition, 80 % des SAS échapperaient à l’obligation de contrôle.

Dans ces conditions, il ne peut être envisagé de supprimer le contrôle du commissaire aux comptes sur les SAS selon un critère de taille. Le présent amendement vise donc à maintenir l’obligation de recours à un commissaire aux comptes pour l’ensemble des SAS.

M. le président. L’amendement n° 367, présenté par M. Yung, Mme Bricq, M. Massion, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Gillot, S. Larcher et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer les 4°, 4° bis, 5° et 6° du I de cet article.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je fais miens, dans une large mesure, les propos tenus par notre collègue André Dulait.

La disposition présentée par le Gouvernement s’inscrit en contradiction avec l’impératif de clarté et de transparence qui s’impose s’agissant des comptes des entreprises.

D’une certaine manière, il s’agit plutôt, en fait, d’une suppression de charges que d’une mesure de simplification.

Les dispositions de l’article 14 affecteront moins les commissaires aux comptes que les partenaires des entreprises, qu’il s’agisse des fournisseurs, des clients, des actionnaires ou des banquiers.

On constate, de surcroît, une sorte d’instabilité législative, puisqu’il n’y a pas si longtemps qu’a été instituée l’obligation, pour l’ensemble des sociétés, d’avoir recours à un commissaire aux comptes. Nous manquons donc singulièrement de recul pour pouvoir considérer que le travail de ce dernier est inutile.

Nous l’avons dit, la vérification et la certification des comptes ne sont jamais une charge pour les entrepreneurs qui recherchent la transparence en matière de gestion : une société en mesure de présenter des comptes certifiés offre des gages de transparence et de fiabilité à ses actionnaires, à ses associés minoritaires, à ses investisseurs et à ses banquiers.

Alors que l’on cherche à faciliter et à favoriser l’actionnariat salarié, que l’on entend inciter les redevables de l’ISF à investir dans les PME et que l’on insiste sur la nécessité de procéder à des évaluations et à des audits indépendants, ces derniers ne devraient-ils pas relever de la responsabilité du commissaire aux comptes plutôt que de celle de l’expert-comptable ?

Certes, le Gouvernement s’est efforcé de chercher une voie moyenne, notamment par l’établissement de seuils, mais ceux-ci sont tout de même très élevés : un bilan s’élevant à 1 million d’euros ou un effectif de cinquante salariés, cela désigne une PME de très haut de gamme. Dans ces conditions, quelque 80 % des SAS, a-t-on indiqué tout à l’heure, me semble-t-il, ne seraient plus soumises à l’obligation de recourir à un commissaire aux comptes.

Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés au dispositif présenté.

M. le président. L'amendement n° 232, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du second alinéa du 4° bis du I de cet article :

« Lorsque l'associé unique, personne physique, assume personnellement la présidence de la société, le dépôt, dans le même délai, au registre du commerce et des sociétés de l'inventaire...

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement est analogue à celui, relatif aux EURL, que j’ai présenté tout à l’heure.

D’une part, il tend à prévoir que les comptes annuels de la société seront réputés approuvés par le dépôt au greffe des seuls comptes annuels et de l'inventaire lorsqu’il s’agit d’une société par actions simplifiée unipersonnelle. Concrètement, l’associé unique ne se verrait pas contraint de tenir une assemblée générale des actionnaires avec lui-même…

D'autre part, il vise à limiter le bénéfice de cette mesure au seul cas où l'associé unique est une personne physique.

Il s’agit donc d’un amendement de simplification du dispositif.

M. le président. L'amendement n° 234, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le 5° du I de cet article pour l'article L. 227-9-1 du code de commerce :

« Art. L. 227-9-1. - Les associés peuvent nommer un ou plusieurs commissaires aux comptes dans les conditions prévues à l'article L. 227-9.

« Sont tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés par actions simplifiées qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, deux des seuils suivants, fixés par décret en Conseil d'État : le total de leur bilan, le montant de leur chiffre d'affaires hors taxe, ou le nombre moyen de leurs salariés au cours de l'exercice.

« Sont également tenues de désigner au moins un commissaire aux comptes les sociétés par actions simplifiées qui contrôlent, au sens des II et III de l'article L. 233-16, une ou plusieurs sociétés, ou qui sont contrôlées, au sens des II et III du même article, par une ou plusieurs sociétés.

« Même si les conditions prévues aux deux alinéas précédents ne sont pas atteintes, la nomination d'un commissaire aux comptes peut être demandée en justice par un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital. »

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement porte sur l'obligation de désigner un commissaire aux comptes dans le cadre de la SAS.

Les statuts de la SAS recouvrent des situations économiques très hétérogènes, depuis les très petites entreprises fonctionnant pratiquement comme de petites SARL, lesquelles ne sont pas soumises à l’obligation de recourir à un commissaire aux comptes, jusqu’à des entreprises beaucoup plus importantes, des filiales, des sociétés mères, c'est-à-dire des sociétés qui en contrôlent d’autres ou qui sont elles-mêmes contrôlées.

À l’époque où elle n’était encore qu’un groupe de travail, la commission spéciale avait rencontré les représentants des professions concernées, en particulier ceux des commissaires aux comptes, pour recueillir leurs réactions à l’égard de cette mesure de simplification.

Lors de ces entretiens, les représentants de la profession n’avaient pas contesté le fait que, dans certains cas, la présence du commissaire aux comptes ne s’impose pas et constitue même, à l’évidence, une charge très lourde pour les toutes petites structures.

Par conséquent, la commission spéciale s’est efforcée de trouver une solution équilibrée. Elle vous propose aujourd’hui de maintenir l’obligation de désigner un commissaire aux comptes lorsque la SAS fait partie d’un groupe, c'est-à-dire lorsqu’elle est contrôlée par une autre société ou qu’elle en contrôle une autre. En effet, dans ce cadre, il ne s’agit pas vraiment de petites entreprises.

En revanche, la question de la suppression du commissaire aux comptes se pose pour les sociétés qui n’appartiennent pas à cette catégorie.

Pour les responsables de la profession, il était indispensable de prévoir un commissaire aux comptes pour les sociétés ayant plus de dix salariés. Le Gouvernement, quant à lui, proposait au départ de s’aligner sur le dispositif actuellement appliqué aux SARL sans que personne n’y trouve véritablement à redire, en fixant des seuils à cinquante salariés et à 3 millions d’euros de chiffre d’affaires, au-delà desquels un commissaire aux comptes devrait être désigné.

Les positions des uns et des autres étant donc très éloignées, la recherche d’une solution équilibrée était nécessaire pour avancer. Je remercie le Gouvernement d’avoir pris en compte la préoccupation de la commission spéciale et de la profession, en proposant de prendre un décret – cette question relevant, sans aucun doute, du pouvoir réglementaire – rendant obligatoire le recours à un commissaire aux comptes à partir de vingt salariés ou de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Ce dernier montant est relativement modeste : si l’on considère que le chiffre d’affaires moyen par salarié est de 150 000 euros dans notre pays, un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros correspond plutôt à quatorze ou à quinze équivalents temps plein qu’à vingt.

Cela nous rapproche fortement des préconisations des représentants des commissaires aux comptes. Dans ces conditions, les dispositions que présente la commission spéciale au travers de l'amendement n° 234, combinées aux engagements pris, au nom du Gouvernement, par M. le secrétaire d’État, nous paraissent constituer une solution tout à fait équilibrée, permettant d’assurer la sécurité nécessaire à tous ceux qui traitent avec les SAS ou qui participent à leur capital, tout en allégeant, pour les petites sociétés, des obligations qui n’étaient pas véritablement justifiées.

Encore une fois, la situation des SAS peut être comparée à celle des SARL. En effet, s’agissant des petites sociétés, la différence de nature juridique soulignée à juste titre par M. Vera ne se traduit pas dans les modes de fonctionnement. Par conséquent, dans la mesure où le seuil au-delà duquel une SARL doit faire appel à un commissaire aux comptes a été fixé à cinquante salariés, il me paraît tout à fait acceptable et équilibré de prévoir que cette obligation s’imposera aux SAS à partir de vingt salariés – en réalité quatorze ou quinze, comme je l’ai montré.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 86 est présenté par M. Cornu.

L'amendement n° 666 est présenté par Mmes Payet et Férat, MM. Biwer, Amoudry et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après les mots :

exercice social

rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du texte proposé par le 5° du I de cet article pour l'article L. 227-9-1 du code de commerce :

un total de bilan égal à 310 000 euros, un chiffre d'affaires hors taxes égal à 620 000 euros et un effectif salariés au moins égal à 10 au cours d'un exercice.

L’amendement n° 86 n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l'amendement n° 666.

Mme Anne-Marie Payet. Cet amendement vise à instituer un compromis efficace et utile entre, d’une part, la volonté du Gouvernement de simplifier la création d’entreprises sous forme de sociétés par actions simplifiées et de favoriser les premiers développements de ces dernières, et, d’autre part, la nécessaire recherche de sécurité et de transparence financières associée à cette forme juridique, dès lors que la société atteint un niveau économique la différenciant des entreprises les plus petites.

L’inscription dans la loi de seuils dont le franchissement rend obligatoire le contrôle des comptes de ces entités confortera la sécurité juridique, économique, sociale et fiscale, tant pour la société elle-même, ses dirigeants et ses salariés que pour son environnement.

Le seuil proposé dans cet amendement vise à répondre à une quadruple préoccupation.

En premier lieu, force est de constater qu’un certain nombre de SAS ont été créées sur l’initiative d’entrepreneurs artisans ou simplement commerçants afin de bénéficier d’un régime social affilié au régime général des salariés. La SAS est en effet la seule forme juridique qui rend compatible la détention majoritaire ou totale des droits sociaux d’une entreprise par son dirigeant avec un choix social de salarié. Toutes les autres formes juridiques, notamment la SARL et l’EURL, n’autorisent l’affiliation au régime salarié qu’à la condition que le dirigeant soit minoritaire.

En deuxième lieu, le seuil de dix salariés constitue la limite supérieure pour l’inscription au répertoire des métiers. Ce seuil a été fixé par l’article 19 de la loi du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat. Le seuil préconisé dans le présent amendement répond donc au souhait des artisans de pouvoir bénéficier du régime de la SAS et du régime social afférent en restant sous la limite imposée, en termes d’effectif salarié, pour l’inscription au répertoire des métiers.

En troisième lieu, le seuil de dix salariés correspond à une proposition de définition de la micro-entreprise inscrite dans une communication de la Commission européenne du 10 juillet 2007 et liée à l’introduction de cette catégorie d’entités dans la quatrième directive.

Enfin, en quatrième lieu, on notera que le franchissement du seuil de dix salariés entraîne la mise en œuvre de plusieurs obligations sociales.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 87 est présenté par M. Cornu.

L'amendement n° 674 est présenté par Mmes Payet et Férat, MM. Biwer, Amoudry et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après les mots :

contrôlées au sens du II

rédiger ainsi la fin du troisième alinéa du texte proposé par le 5° du I de cet article pour l'article L. 227-9-1 du code de commerce :

et du III de l'article L. 233-16.

L’amendement n° 87 n'est pas soutenu.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l’amendement n° 674.

Mme Anne-Marie Payet. Afin d’améliorer la sécurité financière, notamment en matière fiscale et sociale, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à étendre aux sociétés filiales la certification des comptes, déjà prévue pour les sociétés holdings.

Pour ce faire, à la rédaction proposée pour l'article L. 227-9-1 du code de commerce, qui prévoit l'obligation de nommer un commissaire aux comptes pour les SAS qui détiennent 5 % ou plus du capital ou des droits de vote d'une autre société, l'Assemblée nationale a ajouté le membre de phrase suivant : « ou qui sont contrôlées au sens du II de l'article L. 233-16, sous réserve que le contrôle exclusif soit exercé par une société qui ne dépasse pas, à la clôture d'un exercice social, des chiffres fixés par décret en Conseil d'État pour deux des critères suivants : le total de son bilan, le montant hors taxes de son chiffre d'affaires ou le nombre moyen de ses salariés au cours d'un exercice ».

La difficulté résulte non pas de l'importance de la société mère, du fait qu’elle dépasse ou non les seuils, mais plutôt de la possibilité d'échapper artificiellement, par des montages, à l'obligation de nommer un commissaire aux comptes.

À ce sujet, il convient de noter que de plus en plus de petits groupes se structurent autour d'une société mère située en France ou à l'étranger, en créant de nombreuses filiales, par activité ou par zone géographique, qui peuvent être de faible dimension et qui échapperaient donc à la certification des comptes, à l'alerte et à la révélation des faits délictueux.

Lorsque de telles pratiques permettent d'éviter le contrôle d'un commissaire aux comptes, les objectifs de transparence et de sécurité financière ne sont plus respectés.

Par ailleurs, dans les groupes qui établissent des comptes consolidés, il est important, pour la certification de ces derniers, que les filiales certifient également leurs comptes et que le groupe puisse, le cas échéant, décider de confier à un cabinet de proximité la mission de certification de ses petites filiales.

Les seuils ne répondant donc pas à une véritable logique, il est proposé de supprimer leur introduction et de ne conserver que le critère déterminant du contrôle, exclusif ou conjoint par référence aux II et III de l'article L. 233-16 du code de commerce, car il ne faudrait pas non plus autoriser les montages au niveau de la société mère. Cette solution permettrait de répondre aux problématiques évoquées.

M. le président. L'amendement n° 230, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Supprimer le texte proposé par le 5° du I de cet article pour l'article L. 227-9-2 du code de commerce.

II. - Après le 5° du même I, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

5° bis Au début de la section 3 du chapitre III du titre II du livre VIII, il est inséré un article L. 823-13 A ainsi rédigé :

« Art. L. 823-13 A. - Les commissaires aux comptes exercent leurs diligences selon une norme d'exercice professionnel spécifique dans les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions simplifiées qui ne dépassent pas, à la clôture d'un exercice social, deux des seuils suivants, fixés par décret en Conseil d'État : le total de leur bilan, le montant hors taxes de leur chiffre d'affaires, ou le nombre moyen de leurs salariés. Cette norme est homologuée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. »

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Au travers de cet amendement, nous proposons l’extension du champ d'application de la norme d'exercice professionnel simplifiée aux sociétés à responsabilité limitée, aux sociétés en nom collectif, aux sociétés en commandite simple et aux sociétés par actions simplifiées. L'application de cette norme n'interviendra que pour les sociétés ne dépassant pas, à la clôture d'un exercice social, deux seuils qui pourront être fixés par décret en Conseil d'État.

Une telle norme simplifiée, qui pourrait permettre de diminuer de 30 % le coût de l'intervention d'un commissaire aux comptes, constituerait certainement, pour les sociétés n’étant pas tenues de désigner un tel professionnel, une incitation à recourir à ses services.

M. le président. L'amendement n° 233, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le second alinéa du 7° du I de cet article, après les mots :

l'associé unique

insérer les mots :

, personne physique,

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur, pour le présenter et pour donner l’avis de la commission sur les amendements qu’elle n’a pas elle-même présentés.

M. Laurent Béteille, rapporteur. L’amendement n° 233 est un amendement de cohérence.

L’amendement n° 466 tend à supprimer l’article. Nous sommes naturellement hostiles à la suppression de l’ensemble des mesures de simplification relatives à la société par actions simplifiée. La commission émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 80 rectifié vise à la suppression pure et simple d’un dispositif de simplification sur lequel je me suis exprimé. Je demande son retrait, ainsi que celui de l’amendement n° 367.

L’amendement n° 666 a pour objet de fixer des seuils d’application dans la loi. Or j’ai expliqué tout à l’heure qu’il me semblait que cela relevait non pas de la loi, mais d’un décret, sur lequel le Gouvernement a pris des engagements.

En ce qui concerne les seuils proposés, ils ne correspondent pas, à mon sens, aux réalités. En effet, si le bilan total est de 310 000 euros pour un effectif de dix salariés, cela signifie que ces derniers ne sont pas payés ou travaillent à temps très partiel ! Je demande donc le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 674 est largement satisfait, et au-delà, par l’amendement n° 234 de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Mon propos liminaire exprimait, dans une large mesure, l’avis du Gouvernement sur l’ensemble des amendements.

Je suis bien évidemment défavorable à l’amendement n° 466 de suppression de l’article.

En revanche, je suis favorable à l’amendement n° 231 de la commission.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 80 rectifié, qui est une remise en cause du dispositif de l’article, ainsi qu’à l’amendement n° 367, pour le même motif.

J’émets un avis favorable sur les amendements nos 232 et 234 de la commission spéciale.

Par ailleurs, je suis défavorable à ce que l’on fixe les seuils dans la loi, comme le propose Mme Payet au travers de son amendement n° 666. Ils relèvent du règlement et seront donc fixés par décret. J’ai indiqué tout à l’heure quelle serait leur valeur.

L’amendement n° 674 est satisfait par l’amendement n° 234 sur lequel j’émets un avis favorable, de même que sur les amendements nos 230 et 233.

M. le président. Madame Payet, acceptez-vous de retirer les amendements nos 666 et 674 ?

Mme Anne-Marie Payet. Je retire l’amendement n° 674, et je suis prête à rectifier l’amendement n° 666 pour fixer à vingt, comme le propose le Gouvernement, l’effectif salarié au-delà duquel le recours à un commissaire aux comptes sera obligatoire. Je serai même disposée à le retirer si M. le secrétaire d’État s’engage à abaisser les seuils qu’il a annoncés tout à l’heure quand il prendra ses décrets. Ils me semblent tout de même assez élevés, or nous voudrions éviter que trop d’entreprises échappent à la certification des comptes.

M. le président. L’amendement n° 674 est retiré.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Les seuils que j’ai annoncés résultent d’une concertation avec les représentants des commissaires aux comptes. Ils tiennent, me semble-t-il, l’équilibre entre la nécessaire simplification que j’évoquais tout à l’heure et la tout aussi nécessaire transparence des comptes.

Par conséquent, les seuils annoncés, c’est-à-dire vingt salariés, 1 million d’euros de bilan et 2 millions d’euros de chiffre d’affaires seront maintenus.

M. le président. Madame Payet, retirez-vous néanmoins l’amendement ?

Mme Anne-Marie Payet. Oui, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 666 est retiré.

Monsieur Dulait, maintenez-vous l’amendement n° 80 rectifié?

M. André Dulait. Non, je le retire, compte tenu des explications qui m’ont été données.

M. le président. L’amendement n° 80 rectifié est retiré.

Monsieur Yung, maintenez-vous l’amendement n° 367 ?

M. Richard Yung. Oui, je le maintiens.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 466.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 231.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 367.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 232.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote sur l'amendement n° 234.

M. Philippe Dominati. J’ai bien compris l’exposé très clair de M. Béteille sur l’amendement n° 234 et les motivations qui sous-tendent celui-ci. Cependant, j’aurais souhaité que puisse être supprimé l’alinéa prévoyant que les SAS qui contrôlent une ou plusieurs sociétés ou qui sont elles-mêmes contrôlées seront tenues de désigner un commissaire aux comptes.

En effet, deux cas de figure sont alors possibles.

Soit la SAS est une filiale d’un groupe : même si elle ne franchit pas les seuils prévus, elle bénéficie déjà de toute l’infrastructure du groupe et des services de son commissaire aux comptes. Imposer que la filiale ait recours à son propre commissaire aux comptes ne ferait que compliquer la tâche et l’administration interne de ce groupe.

Soit la SAS est associée à des personnes morales ou physiques qui sont minoritaires : celles-ci peuvent faire appel à un commissaire aux comptes dès lors qu’elles représentent au moins un dixième du capital de la SAS, cette disposition étant inscrite au dernier alinéa de l’amendement.

Notre objectif étant de simplifier la législation et de moderniser l’économie, le quatrième alinéa de l’amendement est superflu et devrait être supprimé. J’aurais donc souhaité, si cela est encore possible, une rectification en ce sens.

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. La préoccupation de M. Dominati n’est pas injustifiée. Nous pourrons peut-être réfléchir, dans un second temps, à des améliorations rédactionnelles afin d’éviter des redondances.

Cela étant, mon cher collègue, les termes de cet amendement ont tout de même été pesés de manière à apaiser les choses et à régler un certain nombre de différends. Nous y sommes parvenus, il serait donc préférable à mon sens de s’en tenir à la lettre de cet amendement.

La réflexion n’est peut-être pas totalement achevée, nous pourrons effectivement la reprendre sur des points techniques comme celui que vous évoquez, mais, dans l’immédiat, je souhaiterais que l’amendement ne soit pas modifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 234.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 233.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Article 14
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 14 bis

Articles additionnels après l'article 14

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 755 rectifié est présenté par MM. Trucy, Mortemousque, Houel, J. Gautier et Cambon et Mme Mélot.

L’amendement n° 962 est présenté par M. P. Dominati.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - La loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales, est ainsi modifiée :

1° Dans le premier alinéa de l'article 6, les mots : « un quart au plus du capital » sont remplacés par les mots : « une part du capital, demeurant inférieure à la moitié dudit capital » ;

2° Le premier alinéa de l'article 12 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour chaque profession, il pourra être dérogé au présent alinéa par décret en Conseil d'État ». 

La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour présenter l’amendement n° 755 rectifié.

M. Dominique Mortemousque. Il est proposé d’assouplir le régime juridique de détention du capital des sociétés d’exercice libéral en ouvrant, par décret pris en Conseil d’État, le cas échéant pour chaque profession en tenant compte de ses nécessités propres, la faculté pour toute personne physique ou morale de détenir 49 % au plus du capital des sociétés d’exercice libéral.

Cette ouverture facilitera, pour les professions qui le souhaiteraient, le recours aux capitaux extérieurs, ce qui permettra le développement des activités, notamment à l’export. Ce développement présenterait des avantages économiques et renforcerait l’influence des entreprises françaises.

M. le président. Le sous-amendement n° 1063, présenté par M. Barraux, est ainsi libellé :

I. - Après le troisième alinéa (1°) de l'amendement n° 755 rectifié, insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° - Le dernier alinéa du même article est complété par les mots : « ni aux professions de santé ».

II. - Dans le dernier alinéa du même amendement, après les mots :

Pour chaque profession,

insérer les mots :

à l'exception des professions de santé,

La parole est à M. Bernard Barraux.

M. Bernard Barraux. Mon ami Gérard Dériot, pharmacien de son état, ne pouvant être présent, il m’a demandé d’indiquer en son nom que, pour préserver leur indépendance, les professionnels exerçant dans le domaine de la santé doivent conserver la maîtrise de leur outil de travail.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 962.

M. Philippe Dominati. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. La possibilité, pour les professionnels libéraux, de pouvoir exercer dans le cadre de sociétés commerciales a été ouverte en 1990 et fortement encadrée. Cela était logique s’agissant d’un dispositif nouveau, et cela correspondait en outre au souci des professions concernées de garder leur indépendance.

Les deux amendements tendent à accroître la part du capital d’une société d’exercice libéral pouvant être détenue par une seule personne physique ou morale, cette part devant rester inférieure à la moitié du capital social. Il est en outre prévu de permettre au pouvoir réglementaire de déroger pour chaque profession au principe selon lequel les dirigeants de l’entreprise doivent être des associés exerçant leur activité dans la société.

Une telle mesure peut effectivement favoriser la croissance des sociétés d’exercice libéral tout en permettant un meilleur respect des règles communautaires. Toutefois, il convient de veiller à ce que cette ouverture ne se fasse pas au détriment du caractère professionnel de la société d’exercice libéral.

Donc, dans ce contexte, il faut se montrer assez prudent, d’autant que le pouvoir réglementaire serait compétent pour désigner les professions dans lesquelles les dirigeants des sociétés d’exercice libéral n’auraient pas à être des professionnels.

Dans ces conditions, nous pourrions donner un avis favorable à cette ouverture limitée du capital dans la mesure où les amendements seraient rectifiés, par la suppression de leur 2°, afin d’exclure que des non-professionnels puissent être dirigeants sociaux.

M. le président. Monsieur Mortemousque, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le rapporteur ?

M. Dominique Mortemousque. Oui, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Dominati, acceptez-vous la même rectification ?

M. Philippe Dominati. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 755 rectifié bis est présenté par MM. Trucy, Mortemousque, Houel, J. Gautier et Cambon et Mme Mélot.

L'amendement n° 962 rectifié est présenté par M. P. Dominati.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article 6 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales,  les mots : « un quart au plus du capital » sont remplacés par les mots : « une part du capital, demeurant inférieure à la moitié dudit capital ».

Monsieur Barraux, à la suite de la rectification de l’amendement n° 755 rectifié, le II de votre sous-amendement n’a plus d’objet. Dans ces conditions, le I est-il maintenu ?

M. Bernard Barraux. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc du sous-amendement n° 1063 rectifié, présenté par M. Barraux et ainsi libellé :

Après le troisième alinéa (1°) de l'amendement n° 755 rectifié bis, insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° - Le dernier alinéa du même article est complété par les mots : « ni aux professions de santé ».

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Les amendements identiques nos 755 rectifié bis et 962 rectifié sont très intéressants, car ils traduisent une volonté de prendre en compte l’évolution économique.

Tous deux visent non pas à relever le plafond de la part du capital des sociétés d’exercice libéral pouvant être détenue par des tiers non professionnels libéraux, mais à ouvrir au pouvoir réglementaire la faculté de le faire au cas par cas, après concertation approfondie, bien entendu, avec les représentants des professions concernées.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis de sagesse très positive sur ces amendements.

Par ailleurs, le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 1063 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 1063 rectifié ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. La commission ne s’est pas prononcée sur ce sous-amendement. Cela étant, à titre personnel, je souhaite qu’il soit retiré.

M. le président. Monsieur Barraux, le sous-amendement n° 1063 rectifié est-il maintenu ?

M. Bernard Barraux. Non, je le retire, monsieur le président, j’y suis bien obligé !

Mme Isabelle Debré. On n’est jamais obligé !

Mme Catherine Procaccia. Moi, je comptais le voter !

M. le président. Le sous-amendement n° 1063 rectifié est retiré.

La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 755 rectifié bis et 962 rectifié.

M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite que nous soyons tous bien conscients de la portée et, surtout, des ambiguïtés de ces deux amendements identiques.

Aujourd'hui, le capital des sociétés d’exercice libéral est détenu à 100 % par des professionnels libéraux, afin de préserver l’indépendance et la qualité de l’exercice professionnel de ces derniers. La seule exception réside dans le secteur de la biologie, où ce taux n’est que de 75 %.

Or, il faut le savoir, la Commission européenne et certains grands investisseurs financiers font actuellement pression pour obtenir l’ouverture du capital des sociétés d’exercice libéral à des non-professionnels. Un tel projet comporte des dangers très graves pour la santé publique.

D’abord, cela aboutira à la création de groupes dominants, au poids démesuré face aux autorités de santé et aux acteurs de la protection sociale.

Ensuite, une partie des ressources de l’assurance maladie, c'est-à-dire de nos cotisations sociales et de l’argent de l’État, sera détournée.

À cet égard, mes chers collègues, je vous renvoie au rapport de la commission de concertation sur les missions de l’hôpital, présidée par notre collègue Gérard Larcher. Dans le cadre du plan Hôpital 2000, les cliniques ont bénéficié de subventions pour se regrouper et offrir des plateaux techniques dans l’intérêt des patients, avec des professionnels formés et compétents. Or certains établissements ont déjà été rachetés par un groupe financier français et, plus récemment, par un fonds de pension italien. (Mme Nicole Bricq approuve.) Désormais, nos cotisations sociales et les fonds publics servent à financer des retraités italiens !

En outre, les nouveaux détenteurs de parts de capital voudront inévitablement faire ingérence dans l’organisation et la dispensation des soins, et ce, bien évidemment, dans une logique de rentabilité financière. À terme, nous risquons d’être confrontés à une dégradation de l’accès aux soins dans des zones peu attractives, en raison de l’élimination des structures les moins rentables. (Mme Bariza Khiari applaudit.)

Mme Nicole Bricq. C’est sûr !

M. Dominique Leclerc. Enfin, l’exercice libéral des professions de santé, qui m’est cher, car cela a toujours été ma culture, risque de disparaître.

Qu’est-ce qu’un professionnel libéral ? C’est un indépendant à qui l’on a demandé de se former, d’être compétent, de prendre des risques et, surtout, d’assumer des responsabilités. Mes chers collègues, il s’agit là de valeurs essentielles dans la société française d’aujourd'hui ! Nous ne pouvons pas, me semble-t-il, prendre le risque de les voir disparaître progressivement au profit d’intérêts purement financiers !

Je souhaite à présent aborder un autre point.

Pourquoi la France doit-elle céder d’urgence à la pression de la Commission européenne ? Aujourd'hui, nous sommes devant une offensive totalement concertée contre toutes les professions de santé.

Le premier secteur que l’on veut déréguler totalement, avant la fin de l’année, c’est celui de la biologie. Ainsi, la biologie de proximité, spécialité médicale, va disparaître au profit d’une biologie industrielle et, naturellement, financière. Les autres professions de santé sont également dans le collimateur.

Si je pointe l’attitude de la Commission de Bruxelles, c’est parce qu’elle s’en prend actuellement à l’Autriche, qui a déjà plafonné à 49 % la part de capital des sociétés d’exercice libéral pouvant être détenue par des investisseurs extérieurs, comme vous nous proposez maintenant de le faire, chers collègues Dominique Mortemousque et Philippe Dominati. Cette offensive est menée au nom du principe de la libre circulation des capitaux. Vous voyez bien toute l’ambiguïté de la situation !

En réalité, dans le domaine essentiel de la santé, deux conceptions, à mon sens totalement incompatibles, s’affrontent.

La première, c’est l’application aveugle du principe de liberté d’établissement prévu à l’article 43 du traité instituant la Communauté européenne.

La seconde, celle qui a ma préférence, c’est une approche raisonnable et pragmatique, qui autoriserait des aménagements pertinents et proportionnés et qui laisserait une place à l’application du principe de subsidiarité. En effet, même si on l’oublie souvent, l’article 152 du même traité garantit ce principe pour les questions relatives à la santé.

Aujourd’hui, c’est à la Cour de justice des Communautés européennes qu’il appartient de trancher entre ces deux visions.

Tels sont les points sur lesquels je souhaitais attirer l’attention. À mon avis, ils méritent réflexion, car la situation est grave.

Je défends peut-être des conceptions quelque peu traditionnelles, mais je suis surpris par certains des arguments avancés.

Ainsi, monsieur Mortemousque, vous affirmez qu’il est grand temps d’ouvrir le capital des sociétés d’exercice libéral pour que les professionnels concernés puissent évoluer, notamment exporter. Mon cher collègue, permettez-moi de vous dire qu’ils ne nous ont pas attendus pour évoluer ! En outre, je ne vois pas très bien ce que des professionnels libéraux de santé pourraient exporter…

Ne nous trompons pas d’objectif, mes chers collègues. Au moment où notre pays prend la présidence de l’Union européenne et où l’on commence à évoquer les futures élections européennes, comment voulez-vous que nos concitoyens aient une perception plus positive de l’Europe si nous ne leur proposons, une nouvelle fois, qu’un seul modèle européen, celui de l’argent et de la financiarisation de professions auxquelles nous sommes tous attachés ?

Vous le savez comme moi, puisque vous les côtoyez souvent, la préoccupation première des professionnels libéraux n’est pas l’argent ou les indices boursiers. Leurs valeurs, ce sont l’aptitude et la compétence, et non la défense des intérêts à courte vue d’un groupe financier coté en bourse !

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Dominique Leclerc. Leur rémunération est liée à leur compétence, et non à l’attribution de stock-options, dont on a pu voir les conséquences dans les affaires de la Société générale ou d’EADS.

Les professionnels libéraux de santé ne s’inscrivent pas du tout dans cette perspective. C’est pourquoi je vous demande de bien réfléchir avant de voter ces deux amendements identiques, mes chers collègues.

Pour ma part, je dirai « non » à la conception des eurocrates, à l’Europe de l’argent. Je pense que vous en conviendrez, cela ne correspond ni à la culture du monde de la santé ni à l’ambition de notre pays de construire une Europe politique, et pas seulement financière.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, je souhaite reprendre le sous-amendement n° 1063 rectifié, que M. Bernard Barraux a retiré.

En effet, je ne suis pas une professionnelle de la santé ni une spécialiste du sujet, mais les propos de notre collègue Dominique Leclerc m’interpellent.

De mon point de vue, si nous adoptions ce sous-amendement, le sujet pourrait être débattu lors de la réunion de la commission mixte paritaire, en toute sérénité.

M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 1068, présenté par Mme Procaccia, et ainsi libellé :

Compléter l'amendement n° 755 rectifié bis par un alinéa ainsi rédigé :

...° - Le dernier alinéa du même article est complété par les mots : « ni aux professions de santé ».

La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Je comprends l’émoi de mon collègue Dominique Leclerc, dont je partage, sur certains points, les valeurs.

Effectivement, exercer une profession libérale répond à une motivation particulière et à un désir de liberté et d’indépendance.

Cela étant, dans un contexte européen, voire international, si l’on ne dispose pas des capitaux nécessaires, on ne parvient pas à développer son activité. Mon cher collègue, je comprends vos craintes, pour autant il ne faut pas entraver l’exercice de certaines professions qui veulent se développer.

À cet égard, le Gouvernement a précisé que le relèvement éventuel du plafond de la part de capital détenue par des non-professionnels serait décidé en accord avec les professions concernées. Dans la mesure où il y aura concertation et où la prise d’un décret en Conseil d'État sera nécessaire, le sous-amendement déposé par notre collègue Catherine Procaccia ne me semble pas utile.

Les amendements identiques ont pour objet de donner aux entrepreneurs des professions libérales et indépendantes, qui sont variées, plus de liberté pour trouver des moyens de se développer face à des concurrents étrangers. C’est aussi simple que cela.

C’est pourquoi je pense pour ma part, monsieur Leclerc, tout en partageant vos préoccupations, qu’il faut adopter l’amendement n° 962 rectifié, sans le sous-amender.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Le sujet dont nous débattons est d’une importance majeure. Nous en avons d’ailleurs discuté en commission spéciale.

Le sous-amendement présenté d’abord par Bernard Barraux et repris par Catherine Procaccia pose une véritable question, qui mériterait d’ailleurs, me semble-t-il, d’être abordée dans le cadre de l’examen prochain du projet de loi relatif à la santé, aux patients et aux territoires.

Concrètement, il s’agit de savoir si la détention du capital dans le domaine de la santé, notamment de la biologie et de la pharmacie d’officine, sera toujours liée à la possession d’un diplôme et à l’exercice professionnel.

M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Aujourd'hui – je parle sous le contrôle de M. Leclerc –, il existe quelque 23 000 pharmacies. Demain, des restructurations pourraient intervenir, qui ne changeraient rien à la consommation de médicaments mais affaibliraient le maillage des officines sur le territoire. Or, ne l’oublions pas, la densité de ce dernier est un élément de la permanence des soins, au travers de la distribution de médicaments.

Le Gouvernement a confié à M. Michel Ballereau une mission sur les laboratoires. En outre, par la voix notamment de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, il a manifesté sa volonté de défendre la pharmacie d’officine.

Cela étant, à titre personnel, je partage les inquiétudes de notre collègue Dominique Leclerc. Nous pourrions effectivement assister à une rupture du lien entre l’exercice de la profession libérale et la détention du capital, ce qui remettrait fondamentalement en question ce mode d’activité.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Comme M. le président de la commission spéciale l’a souligné, les amendements nos 755 rectifié bis et 962 rectifié concernent un sujet très important.

Nous devons trouver là encore un équilibre entre le souci de certains professionnels libéraux d’avoir les moyens de développer leur activité et leur volonté de conserver une part majoritaire du capital de leur société d’exercice libéral.

À titre d’exemple, j’évoquerai un problème que j’ai été amené à régler moi-même, lorsque j’étais député.

Voilà trois ans, j’ai été interpellé par la profession, libérale s’il en est, des architectes – il n’y a pas que les métiers de la santé, même s’ils sont très importants ! –, qui voyait l’activité des cabinets s’accroître sans qu’il soit possible de faire entrer des sociétés extérieures dans le capital, ce qui constituait un frein au développement.

Les architectes français se trouvaient donc confrontés à la concurrence de sociétés d’architectes étrangères beaucoup plus puissantes, qui bénéficiaient de davantage de souplesse pour développer leur capital.

À leur demande, j’ai réglé ce problème par voie d’amendement – le Parlement a bien voulu me suivre ! –, en élargissant les conditions de l’entrée d’autres sociétés dans le capital des cabinets d’architectes. Aujourd'hui, la profession se déclare très satisfaite de cette souplesse supplémentaire. Cet exemple montre que les sociétés d’exercice libéral sont très diverses et obéissent à des règles différentes.

Je comprendrais tout à fait l’émotion de M. Dominique Leclerc si les amendements identiques nos 755 rectifié bis et 962 rectifié visaient à introduire une obligation, mais, je le répète, leur objet est seulement d’offrir une faculté nouvelle aux professions libérales. Un décret en Conseil d'État restera nécessaire, qui permettra d’examiner les spécificités de chaque profession, en lien avec ses représentants.

Il ne faut donc pas réagir avec trop d’émotion à ces amendements identiques, qui tendent seulement à créer une possibilité supplémentaire et à prendre en compte la réalité économique, comme j’ai été amené à le faire pour la profession des architectes il y a quelques années, en tant que rapporteur de la commission des finances de l’Assemblée nationale.

Je le répète, le Gouvernement émet donc un avis de sagesse positive.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 1068 ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Je m’interroge sur la portée de ce sous-amendement, qui tend à exclure du champ de l’amendement n° 755 rectifié bis les professions de santé.

Le problème est que cette exclusion peut revêtir deux significations différentes selon l’endroit où se trouve placée la virgule : soit on considère que toute limite est supprimée pour les sociétés d’exercice libéral dans le domaine de la santé dont, par conséquent, il serait possible de détenir 100 % du capital, ce qui n’est pas, me semble-t-il, exactement l’objectif visé par les auteurs du sous-amendement ; soit on estime que les personnes extérieures ne pourront détenir aucune part du capital social de ces SEL, ce qui signifierait que toutes ces sociétés seront obligées de se dissoudre !

Je demande donc le retrait du sous-amendement n° 1068, faute de quoi j’émettrai un avis résolument défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Mes chers collègues, voilà vingt-cinq minutes que nous discutons de cette question. Nous sommes en train d’accomplir un travail de commission, et non de débattre en séance publique ! Cela prouve certainement que ce texte a été préparé hâtivement…

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Mais ce n’est pas un amendement du Gouvernement qui est en cause !

Mme Nicole Bricq. Écoutez, monsieur le secrétaire d'État, chacun donne son avis et propose d’ajouter une disposition : cela correspond bien à un travail de commission ! En effet, l’urgence ayant été déclarée pour ce texte, nos conditions de travail ont été très difficiles en commission et nous n’avons donc pas eu le temps de régler ce genre de problèmes. Nous perdons du temps en examinant des questions qui sont hors sujet !

M. le président. Madame Procaccia, le sous-amendement n° 1068 est-il maintenu ?

Mme Catherine Procaccia. Je comprends les problèmes que pose la place de la virgule, mais le travail des rapporteurs sera justement d’affiner le texte en commission mixte paritaire.

Je maintiens donc ce sous-amendement, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1068.

M. Dominique Leclerc. Monsieur le secrétaire d'État, l’injonction de la Commission européenne ne concerne aujourd’hui que les professions de santé.

Je le répète, c’est soit l’article 43, soit l’article 152 du traité instituant la Communauté européenne qui s’applique. Une première lecture de ces textes fait apparaître que Bruxelles exige la qualité des professionnels de santé et la libre circulation sur le territoire européen des patients, qui pourront donc bénéficier de prestations identiques. Puis, on nous affirme que la santé a été exclue du champ de la directive Bolkestein, qui portait sur les services !

Il s'agit tout de même d’un débat de fond : les professions de santé appartiennent-elles, oui ou non, au secteur des services ?

J’ai évoqué le cas de la biologie : vise-t-on une spécialité médicale ou une industrie ? Ce n’est pas tout à fait la même chose pour les patients !

Du fait de mon parcours professionnel, je me sens particulièrement concerné par ce problème. Or je ne comprends pas – et nos concitoyens ne le comprendront pas davantage – que les eurocrates ou les technocrates des ministères décident sans véritable concertation ! Il existe un front uni pour affirmer qu’il en sera ainsi parce que Bruxelles le veut. Mais alors, à quoi sert le Parlement français ? Je n’en sais rien !

M. Thierry Repentin. Dans ce cas, démissionnez !

M. Dominique Leclerc. Pour moi, la façon dont sont menées actuellement les discussions sur ce sujet est désespérante !

Selon certains, ces évolutions sont inéluctables car elles sont voulues par Bruxelles. Dans ce cas, il faut que le Parlement en soit conscient, ainsi que, demain, les patients.

Mes chers collègues, mon intervention précédente était peut-être un peu longue et passionnée, mais je crois que l’enjeu le justifiait !

Mme Nicole Bricq. De toute façon, c’est la sécurité sociale qui paye !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1068.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 755 rectifié bis et 962 rectifié.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte les amendements.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

L'amendement n° 763 rectifié, présenté par MM. Darniche, Adnot, Biwer, Cornu, Courtois et Dériot, Mme Desmarescaux et MM. Leclerc et Türk, est ainsi libellé :

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 5 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, les mots : « de la société mentionnée » sont remplacés par les mots : « des sociétés mentionnées » ;

2° Dans le sixième alinéa (4°), les mots : si les membres de cette société » sont remplacés par les mots : «, ou une société de participation financière de professions libérales régie par le titre IV de la présente loi, si les membres de ces sociétés ».

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Dominique Leclerc.

M. Dominique Leclerc. Dès 1990 – M. Béteille y a fait allusion –, la loi avait prévu que la majorité du capital et des droits de vote des sociétés d’exercice libéral, les SEL, appartiendrait aux professionnels en exercice, soit personnellement, soit sous le couvert de leur propre société financière.

Toutefois, ces sociétés financières visées par l’article 220 quater A du code général des impôts sont tombées en désuétude. Il importe donc de moderniser la loi de 1990 en leur substituant des sociétés de participations financières de professions libérales, les SPFPL, qui auront donc vocation à être majoritaires dans ces SEL lorsqu’elles seront détenues par les associés en exercice, sous le contrôle des ordres professionnels.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Les dispositions de cet amendement permettront d’apporter une souplesse nouvelle et ne peuvent que favoriser la croissance des sociétés d’exercice libéral. La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

Par ailleurs, il lève le gage sur cet amendement.

M. le président. Il s'agit donc de l’amendement n° 763 rectifié bis.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Mes chers collègues, depuis que nous avons achevé le débat sur les délais de paiement des entreprises, nous examinons une série d’amendements qui ont pour objet les conditions d’exercice de professions particulières et qui ne visent en rien, selon moi, à augmenter le PIB de la France.

Je croyais que l’objet de ce texte était de moderniser l’économie ! Or je constate que, depuis hier soir, nous discutons de dispositions qui concernent des professions particulières et qui ne permettront pas aux PME et aux TPE de mobiliser les investissements dont elles ont besoin.

J’irai même plus loin : je considère qu’un certain nombre d’amendements devraient figurer aux comptes de campagne de leurs auteurs ! Honnêtement, si on les examine avec attention, et si l’on songe à la proximité des élections sénatoriales, on comprend mieux les motivations de certaines propositions… Voilà qui ne relève pas le niveau du débat dans notre assemblée !

Nous venons d’assister à une discussion sur les professions de santé. Comme l’a souligné M. le président de la commission spéciale, il s'agit là d’un problème majeur, mais dont l’étude n’a pas sa place dans l’examen du présent projet de loi, car ce débat n’est pas encore mûr.

Pour ma part, je considère, n’en déplaise à mon collègue pharmacien, que les professionnels de santé sont des agents délégués de la sécurité sociale, tout du moins ceux d’entre eux qui sont conventionnés ! (M. Dominique Leclerc rit.)

M. Henri de Raincourt. C’est flatteur !

M. Daniel Raoul. Ma position est claire : on parle de professions libérales, mais des personnes qui sont rémunérées directement par un organisme public sont les agents délégués de celui-ci.

Quoi qu'il en soit, je ne vous cacherai pas, mes chers collègues, que je suis un peu choqué par de tels débats, qui ne servent pas l’objectif visé au travers de ce projet de loi de modernisation de l’économie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Nicole Bricq. Très bien !

Articles additionnels après l'article 14
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Articles additionnels après l'article 14 bis

Article 14 bis 

I. - Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Dans l'intitulé du titre III du livre Ier, les mots : « et des agents commerciaux » sont remplacés par les mots : «, des agents commerciaux et des vendeurs à domicile indépendants » ;

2° Après l'article L. 134-17, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V

« Des vendeurs à domicile indépendants

« Art. L. 135-1. - Le vendeur à domicile indépendant est celui qui effectue la vente de produits ou de services dans les conditions prévues par la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation, à l'exclusion du démarchage par téléphone ou par tout moyen technique assimilable, dans le cadre d'une convention écrite de mandataire, de commissionnaire, de revendeur ou de courtier, le liant à l'entreprise qui lui confie la vente de ses produits ou services.

« Art. L. 135-2. - Le contrat peut prévoir que le vendeur assure des prestations de service visant au développement et à l'animation du réseau de vendeurs à domicile indépendants, si celles-ci sont de nature à favoriser la vente de produits ou de services de l'entreprise, réalisée dans les conditions mentionnées à l'article L. 135-1. Le contrat précise la nature de ces prestations, en définit les conditions d'exercice et les modalités de rémunération.

« Pour l'exercice de ces prestations, le vendeur ne peut en aucun cas exercer une activité d'employeur, ni être en relation contractuelle avec les vendeurs à domicile indépendants qu'il anime.

« Aucune rémunération, à quelque titre que ce soit, ne peut être versée par un vendeur à domicile indépendant à un autre vendeur à domicile indépendant, et aucun achat ne peut être effectué par un vendeur à domicile indépendant auprès d'un autre vendeur à domicile indépendant.

« Art. L. 135-3. - Les vendeurs à domicile indépendants dont les revenus d'activité ont atteint un montant fixé par arrêté au cours d'une période définie par le même arrêté sont tenus de s'inscrire au registre du commerce et des sociétés ou au registre spécial des agents commerciaux à compter du 1er janvier qui suit cette période. »

II. - Dans le 20° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, la référence : « au I de l'article 3 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social » est remplacée par la référence : « à l'article L. 135-1 du code de commerce ».

III. - Le début du 3° de l'article 1457 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 3° L'activité des personnes visées à l'article L. 135-1 du code de commerce dont la rémunération totale...(le reste sans changement). »

IV. - L'article 3 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social est abrogé.

M. le président. L'amendement n° 753, présenté par MM. Trucy, Mortemousque, Barraux, Houel, J. Gautier, Cambon et Dériot et Mme Mélot, est ainsi libellé :

Dans le second alinéa du III de cet article, après le mot :

rémunération

insérer le mot :

brute

La parole est à M. Dominique Mortemousque.

M. Dominique Mortemousque. Cet amendement vise à remédier à une erreur de rédaction de l’article 14 bis : dans le second alinéa du III de cet article, il a été omis le mot « brute » après « rémunération », alors qu’il convient de conserver les termes mêmes du 3° de l'article 1457 du code général des impôts.

J’en profite pour revenir sur l’intervention de notre collègue Daniel Raoul, qui mérite tout de même une réponse.

Pour ma part, j’ai écouté les avis des uns et des autres avant de décider si je devais ou non retirer l’amendement n° 755 rectifié bis.

J’ai notamment entendu Dominique Leclerc s’exprimer avec passion, ce que je comprends tout à fait de la part d’un professionnel du domaine considéré. J’ai aussi écouté l’avis de M. le président de la commission spéciale et de M. le secrétaire d'État, qui ont évoqué le caractère facultatif du dispositif. Je ne crois donc pas qu’en ayant réduit le texte de l’amendement que j’avais présenté à son premier paragraphe nous ayons nécessairement commis une erreur !

Cette loi de modernisation de l’économie, pour ma part, j’y crois, tout simplement parce qu’elle apportera un certain nombre d’éléments nouveaux, monsieur Raoul.

Ainsi, l’auto-entreprise, dispositif important de ce projet de loi qui a suscité bien des réactions négatives sur certaines travées, vise pourtant simplement à offrir aux salariés qui souhaitent gagner davantage une rampe de lancement, afin qu’ils puissent, le cas échéant, se découvrir une vocation d’entrepreneur.

Par ailleurs, s’agissant de la possibilité offerte aux retraités qui le souhaitent de conserver une activité, qui a fait l’objet de maintes critiques, je ferai remarquer que, dans la vie, on est jugé davantage sur ce que l’on est que sur ce que l’on dit. Or combien parmi nous ont postulé récemment à un siège de maire ou de conseiller général ou postulent aujourd’hui à un fauteuil de parlementaire alors qu’ils sont âgés de plus de 55 ans ? Ils estiment que, entre 55 ans et 75 ans, on peut encore être actif. Pour autant, les politiques devraient-ils être les seuls à pouvoir ainsi poursuivre leur activité, quand les autres, passé 55 ans, devraient se borner à fréquenter les clubs du troisième âge, à boire des bières ou à assister aux enterrements de leurs amis ?

Ce projet de loi de modernisation de l’économie vise à instaurer un système permettant à chacun de créer son activité. Ainsi, tous les Français qui voudront garder une place dans la société entre 55 ans et 75 ans, et pas seulement ceux qui appartiennent à la sphère politique, le pourront

Le Président de la République, Nicolas Sarkozy, a le mérite d’avoir voulu redonner de l’intérêt au travail. Ce texte va donc dans le bon sens, et certains de nos amendements contribueront encore à l’améliorer. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote.

M. Dominique Leclerc. Je voudrais dire avec beaucoup de gentillesse, sans porter aucun jugement de valeur sur les agents de la sécurité sociale, qui font sans doute leur travail avec zèle, qu’il me semble néanmoins difficile de leur assimiler les professionnels de la santé, comme vient de le faire M. Raoul.

Vous le savez, mes chers collègues, je m’efforce de rester dans mon domaine de compétence. En l’occurrence, c’est un sujet que je connais bien. Alors, de grâce, évitons les amalgames hâtifs et ne prenons pas les professionnels de santé pour des canards sauvages ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 753.

(L'amendement est adopté.)

Je mets aux voix l'article 14 bis, modifié.

(L'article 14 bis est adopté.)

Article 14 bis
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Article 14 ter

Articles additionnels après l'article 14 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 235 rectifié est présenté par M. Béteille, au nom de la commission.

L’amendement n° 762 est présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste-UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

 

Après l'article 14 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 122-6 du code de la consommation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans le cas de réseaux de vente constitués par le recrutement en chaîne d'adhérents ou d'affiliés, il est interdit d'obtenir d'un adhérent ou affilié du réseau le versement d'une somme correspondant à un droit d'entrée ou à l'acquisition de matériels ou de services à vocation pédagogique, de formation, de démonstration ou de vente ou tout matériel ou service analogue, lorsque ce versement conduit à un paiement ou à l'attribution d'un avantage bénéficiant à un ou plusieurs adhérents ou affiliés du réseau.

« En outre, il est interdit, dans ces mêmes réseaux, d'obtenir d'un adhérent ou affilié l'acquisition d'un stock de marchandises destinées à la revente, sans garantie de reprise du stock aux conditions d'achat, déduction faite éventuellement d'une somme n'excédant pas 10 % du prix correspondant. Cette garantie de reprise peut toutefois être limitée à une période d'un an après l'achat. »

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 235 rectifié.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement vise à réintroduire à l'article L. 122-6 du code de la consommation les dispositions prévues par la loi n° 95-96 du 1er février 1995 qui protègent les adhérents de réseaux de vente multi-niveaux contre certains procédés particulièrement préjudiciables à leurs intérêts.

En effet, de manière malencontreuse, celles-ci n'ont pas été reprises dans la nouvelle rédaction adoptée pour le 2° de cet article, issue de l'article 39 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, transposant en droit interne la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l’amendement n° 762.

Mme Anne-Marie Payet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Ces deux amendements, sans doute parce que le Sénat est réputé avoir le sens de la mesure et qu’il faut bien contrebalancer les effets des dispositions de l’article 14 bis, portent sur l’une des formes les plus délicates, et les plus critiquables, du commerce d’aujourd’hui.

En effet, ils visent à moraliser quelque peu les règles de fonctionnement propres à ce que l’on appelle la « vente pyramidale », forme de commerce dont on peut pourtant craindre que, grâce à l’article 3 du présent projet de loi, elle ne connaisse un certain développement.

Le souffle nouveau de liberté contenu dans la philosophie générale du projet de loi risque en effet de se perdre dans les méandres de la vente à domicile de récipients en plastique, d’articles de lingerie fine, de parfumerie bon marché ou encore de produits d’entretien ménager aux qualités révolutionnaires…

Le fait est que la « vente pyramidale » constitue, depuis un certain nombre d’années, l’un des vecteurs les plus significatifs de l’activité commerciale accessoire, et se place, sous nombre d’aspects, à la lisière du travail occulte.

Au demeurant, les articles 1er et 3 du présent projet de loi risquent fort de faire entrer ces activités dans le champ de la légalité, quitte à « bonifier » leur taux de croissance apparent.

Pour autant, force est de constater que l’ensemble du dispositif de la vente directe, qui allège singulièrement les contraintes logistiques pour les marques qui y recourent, a donné lieu à de multiples abus.

Je ne puis manquer de me référer ici au rapport de la commission spéciale, qui précise qu’ « un code éthique de la vente directe élaboré par la Fédération de la vente directe régule ces pratiques. Pour autant, la loi doit jouer pleinement son rôle protecteur. »

Nous partageons pour partie les préoccupations ainsi exprimées, d’autant que, comme chacun l’aura deviné, les « vendeurs directs » sont souvent des personnes dont le niveau de qualification est relativement faible et dont l’activité commerciale leur permet de dégager un revenu accessoire venant compléter un salaire particulièrement bas.

Je me permettrai de faire deux observations.

Premièrement, l’adoption de la loi du 3 janvier 2008 dite « loi Chatel », qui transposait en droit interne la directive sur les pratiques commerciales déloyales, a hélas omis de donner au droit français une vertu que n’avait pas non plus le texte européen, à savoir protéger plus nettement le vendeur contre les menées du responsable du réseau.

Deuxièmement, l’application du principe selon lequel est conféré à la loi un rôle protecteur que ne saurait remplir une charte de déontologie pourrait être étendue, selon nous, à d’autres situations, notamment toutes celles où d’aucuns préfèrent que le droit soit fixé par la convention d’usage en lieu et place de la règle neutre et objective s’appliquant à tous.

Dans tous les cas, la vente directe doit être très sérieusement encadrée. Outre le fait que la plupart des contrats régissant cette forme commerciale devraient, pour l’essentiel, être requalifiés en contrats de travail en bonne et due forme, régis par le code du travail et non par le code de commerce, il faudra bien, un jour prochain, se demander s’il ne convient pas d’interdire purement et simplement ces pratiques, qui nuisent à la qualité de la concurrence et ne rendent service ni au consommateur ni, a priori, aux vendeurs.

En attendant ce nécessaire débat, notre groupe votera ces amendements, tout en étant parfaitement conscient de leur timidité.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Nous avons un a priori favorable sur ces amendements. Je me demande néanmoins si le transfert du statut des vendeurs à domicile dans le code de commerce, plutôt que dans celui de la sécurité sociale, va effectivement dans le sens d’une meilleure protection des intéressés. Pourrait-on m’éclairer sur ce point ?

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Je ne suis pas en mesure de vous répondre sur-le-champ, monsieur le sénateur, mais je vais me rapprocher de vous pour vous apporter les apaisements que vous souhaitez.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 235 rectifié et 762.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 bis.

Articles additionnels après l'article 14 bis
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Articles additionnels après l'article 14 ter

Article 14 ter 

Au plus tard au 31 décembre 2008, le Gouvernement présente au Parlement une étude de faisabilité sur la création d'un guichet administratif unique pour les petites et moyennes entreprises de moins de cent salariés.

M. le président. L'amendement n° 236, présenté par M. Béteille, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer une étude de faisabilité sur la création d'un guichet administratif unique pour les PME de moins de cent salariés.

Il ne s’agit pas de remettre en cause l’intérêt d’une simplification des démarches et des formalités administratives pour ces entreprises, notamment au travers de l’institution d’un guichet unique. Néanmoins, la commission spéciale estime qu’il convient de ne pas multiplier les rapports.

En outre, il nous paraît prématuré, en l’état actuel de la réflexion, de créer un nouveau seuil de cent salariés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 236.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 14 ter est supprimé.

Article 14 ter
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Article 15 (début)

Articles additionnels après l'article 14 ter

M. le président. L'amendement n° 727, présenté par M. Soulage et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 14 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Après le II de l'article 244 quater M du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Pour le calcul du crédit d'impôt des groupements agricoles d'exploitation en commun, le plafond horaire mentionné au paragraphe précédent est multiplié par le nombre d'associés chefs d'exploitation. »

II. La perte de recettes pour le budget de l'État résultant du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Daniel Soulage.

M. Daniel Soulage. J’ai déjà évoqué, lors de la discussion d’un précédent article relatif à l’insaisissabilité des biens professionnels, la question de la transparence des groupements agricoles d'exploitation en commun, les GAEC.

Ce principe de transparence ayant été posé, il appartient au législateur d’en définir, le cas échéant, les modalités d’application.

Ainsi, la transparence des GAEC est déjà largement une réalité dans le domaine fiscal, s’agissant des déductions pour investissement et pour aléas, du crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique, des plafonds d'exonération des plus-values professionnelles, etc.

Alors que les dispositions récentes tendent toujours plus à favoriser une agriculture durable et en cohérence avec son environnement, les agriculteurs ont besoin d'un soutien efficace pour les accompagner.

À ce titre, le crédit d'impôt « formation » institué par l'article 3 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises profite également aux chefs d'exploitation et leur permet d'être efficacement accompagnés dans leur démarche.

Cependant, ce crédit d'impôt est plafonné à quarante heures de formation par année civile et par entreprise. Il en résulte que les associés de GAEC, quel que soit leur nombre, doivent se partager ce crédit d'impôt alors qu'ils regroupent plusieurs entreprises.

En application du principe de transparence, il est donc demandé que le plafond de quarante heures soit multiplié par le nombre d'associés chefs d'exploitation que compte le groupement. Les associés de GAEC bénéficieront ainsi du même accès à la formation que les exploitants individuels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cet amendement tend à permettre aux associés de GAEC d’accéder à la formation dans les mêmes conditions que les exploitants individuels, en leur ouvrant le bénéfice d’un crédit d’impôt en application du principe de transparence. Il élargit donc le droit à la formation tout en satisfaisant davantage au principe d’égalité. La commission est par conséquent favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement a étudié avec attention cet amendement.

Monsieur le sénateur, vous proposez de multiplier, pour les GAEC, le plafond du crédit d’impôt pour formation des dirigeants par le nombre d’associés chefs d’exploitation. Cette disposition permettrait aux associés de GAEC d’avoir le même accès à la formation que les exploitants individuels.

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

M. le président. Levez-vous le gage, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Oui, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 727 rectifié.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Je me réjouis de la position adoptée par M. le secrétaire d’État sur un sujet qui n’est pas sans importance dans un texte visant à moderniser l’économie.

En effet, le GAEC constitue une forme moderne, qui permet d’assurer la reprise d’exploitations, notamment par des jeunes qui ne sont pas toujours issus du monde agricole. Son rôle est particulièrement important dans le secteur de l’élevage.

Je rappelle que nous avions déjà eu sur ce sujet un débat, sur l’initiative de notre collègue Daniel Soulage, dans lequel nous n’avions pas été entièrement justes envers les exploitants en GAEC. En effet, le caractère insaisissable des biens professionnels est garanti pour les exploitants individuels, alors qu’il ne l’est pas dans cette forme modernisée d’exploitation qu’est le GAEC.

Dès lors, il me semble important que, s’agissant de la formation, nous puissions revenir à un principe d’égalité et ainsi contribuer à la modernisation économique du secteur de l’agriculture.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 727 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14 ter.

La parole est à M. Daniel Soulage.

M. Daniel Soulage. Je remercie la commission spéciale d’avoir étudié cette question. J’espère que l’on poursuivra la réflexion et que l’on pourra s’attaquer très prochainement au problème de l’insaisissabilité des biens professionnels.

M. Dominique Mortemousque. Tout ce qui relève du bon sens est traité comme il se doit dans cette assemblée !

M. le président. L'amendement n° 729, présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 14 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé, dans chaque région, un office régional d'information, de formation et de formalité des professions libérales auquel sont affiliées l'ensemble des entreprises libérales.

Sont considérées comme libérales, les entreprises privées individuelles ou sous forme sociale, exerçant une activité réglementée ou, autre qu'artisanale, agricole ou commerciale. Les officines de pharmacie et les laboratoires d'analyses médicales entrent dans le champ du présent article.

Ces offices sont des organismes de droit privé et financés par les professions libérales selon des modalités qu'elles déterminent.

Ils ont pour mission l'accueil, l'aide et l'accompagnement des professionnels exerçant leur activité à titre libéral et des créateurs ou repreneurs d'entreprise libérale.

À ces fins, ils peuvent nouer des partenariats avec des personnes morales de droit public ou privé.

Ces organismes régionaux peuvent créer une antenne départementale à laquelle sont déléguées certaines missions. Un décret précisera quelles sont leurs missions.

Leurs membres sont élus par les ressortissants des entreprises libérales affiliées.

Leur mandat est d'une durée de six ans renouvelable une fois.

Un décret précisera la composition du corps électoral ainsi que les modalités d'élection des membres des offices régionaux d'information, de formation et de formalité des professions libérales.

Un second décret précisera les modalités d'élection des Présidents des offices régionaux d'information, de formation et de formalité.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. L’un des objectifs visés au travers de ce projet de loi est de stimuler la création et de favoriser la pérennité des entreprises, en apportant un soutien particulier et renforcé au créateur et au repreneur d’entreprise.

Toutefois, à l’heure actuelle, l’approche, l’intégration et l’accompagnement des professionnels libéraux créateurs ou repreneurs d’entreprise sont inadaptés ou insuffisants pour répondre aux besoins.

Une telle situation ne peut que constituer un frein au développement économique global du secteur des professions libérales, malgré le dynamisme dont celui-ci fait preuve avec plus de 50 000 entreprises créées ou reprises chaque année.

Il existe donc dans ce secteur un vivier d’entreprises et d’emplois auquel une impulsion doit être donnée, en termes d’appui à la création d’entreprise et d’accompagnement.

La création de structures régionales qui seraient dédiées aux professions libérales permettrait d’assurer à ce corps social une meilleure visibilité et une plus grande reconnaissance.

Afin de répondre à cet objectif, cet amendement vise à créer des offices régionaux d’information, de formation et de formalité des professions libérales. Présents dans chaque région, ces offices constitueraient un lieu d’échange et d’accueil pour les professionnels libéraux, faciliteraient l’accès aux centres de formalité des entreprises et apporteraient un éclairage et une expertise concernant l’offre de formation.

À terme, cette meilleure visibilité des professionnels libéraux permettrait une plus grande lisibilité de leur activité économique et entraînerait un développement du tissu économique local.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Béteille, rapporteur. Ce sujet a déjà donné lieu à un important débat lors de la discussion du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, en 2005. La création d’une chambre des professions libérales avait alors été évoquée.

M. Laurent Béteille, rapporteur. Cependant, malgré leur statut commun, les professions libérales sont très diverses. Elles sont régies par des ordres professionnels, qui peuvent avoir des structures nationales. La commission craint que la création d’offices régionaux ne provoque un enchevêtrement en multipliant les échelons, tout en alourdissant sans doute un peu plus encore les charges des entreprises libérales.

Dans ces conditions, la commission spéciale n’est pas favorable à une telle création et demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 729 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 729 est retiré.

CHAPITRE IV

Favoriser la reprise, la transmission, le « rebond »

Articles additionnels après l'article 14 ter
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Article 15 (interruption de la discussion)

Article 15

I. - L'article 726 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 1° du I est ainsi modifié :

a) Dans le premier alinéa, le pourcentage : « 1,10 % » est remplacé par le pourcentage : « 3 % » ;

b) Dans les deuxième et troisième alinéas, les mots : « cotées en bourse » sont remplacés par les mots : « négociées sur un marché réglementé d'instruments financiers au sens de l'article L. 421-1 du code monétaire et financier ou sur un système multilatéral de négociation au sens de l'article L. 424-1 du même code » ;

c) Le quatrième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le droit liquidé sur les actes et les cessions mentionnés aux deuxième et troisième alinéas est plafonné à 5 000 € par mutation.

« - pour les cessions, autres que celles soumises au taux mentionné au 2°, de parts sociales dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions. Dans ce cas, il est appliqué sur la valeur de chaque part sociale un abattement égal au rapport entre la somme de 23 000 € et le nombre total de parts sociales de la société. » ;

2° Le 2° du I est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est supprimé ;

b) Dans le quatrième alinéa, les mots : « non cotée en bourse » sont remplacés par les mots : « dont les droits sociaux ne sont pas négociés sur un marché réglementé d'instruments financiers au sens de l'article L. 421-1 du code monétaire et financier ou sur un système multilatéral de négociation au sens de l'article L. 424-1 du même code et » ;

3° Les I bis et III sont abrogés.

II. - Dans le 7° bis du 2 de l'article 635 du même code, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « troisième ».

III. - Dans l'article 639 du même code, les mots : « non cotées en bourse » sont remplacés par les mots : « dont les droits sociaux ne sont pas négociés sur un marché réglementé d'instruments financiers au sens de l'article L. 421-1 du code monétaire et financier ou sur un système multilatéral de négociation au sens de l'article L. 424-1 du même code », et le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « troisième ».

IV. - Le tableau de l'article 719 du même code est ainsi rédigé :

« 

Fraction de la valeur taxable

Tarif applicable(en pourcentage)

 

 

N'excédant pas 23 000 €

Supérieure à 23 000 € et n'excédant pas 107 000 €

Supérieure à 107 000 € et n'excédant pas 200 000 €

Supérieure à 200 000 €

0

2

0,60

2,60

 »

V. - Les articles 721 et 722 du même code sont abrogés.

VI. - Dans le premier alinéa de l'article 722 bis du même code, le pourcentage : « 4 % » est remplacé par le pourcentage : « 2 % ».

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 342 est présenté par M. Massion, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 467 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Marc Massion, pour présenter l'amendement n° 342.

M. Marc Massion. L’article 15 prévoit d’harmoniser les droits d’enregistrement applicables aux cessions de droits sociaux, sous forme d’actions ou de parts sociales, et aux cessions de fonds de commerce dont la valeur est inférieure à 200 000 euros, en fixant un taux unique de 3 %.

Si nous soulignons l’effort de simplification et d’égalité que représente cette disposition, puisque toutes ces opérations de cession subiront dorénavant le même traitement fiscal, nous ne pouvons manquer de regretter son incidence sur les finances publiques, à l’heure où celles-ci sont au plus mal.

En effet, le Gouvernement a fait le choix de fixer ce taux unique à 3 %, ce qui porte le coût de la mesure à plus de 100 millions d’euros en année pleine, selon ses estimations.

Ce nouveau cadeau fiscal, qui s’ajoute aux trop nombreux autres déjà accordés depuis maintenant six ans que la droite est au pouvoir, ne fera qu’accentuer une situation très nettement défavorable.

Je le rappelle : au premier trimestre de 2008, la dette publique du pays a dépassé la barre des 1 250 milliards d’euros, notamment à la suite d’une forte hausse de la dette de l’État, qui représente 65,3 % du PIB, en hausse de 1,4 point par rapport au trimestre précédent. Quant au déficit public, il a atteint en 2007 le taux critique de 2,7 %.

Alors que débute la présidence française de l’Union européenne, n’oublions pas que la Commission européenne a adressé à la France, le 28 mai dernier, une recommandation politique pour l’inciter à mettre de l’ordre dans ses comptes publics. Notre pays ne pourra parler légitimement à ses partenaires européens que s’il est lui-même exemplaire dans sa gestion budgétaire.

Pour toutes ces raisons, il ne nous semble pas opportun de diminuer les taux applicables aux droits d’enregistrement en accordant un nouveau cadeau fiscal. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 15.

Je note que M. Philippe Marini, rapporteur de la commission spéciale mais aussi rapporteur général du budget, paraît également sensible à ces arguments budgétaires, puisqu’il demande, à l'amendement n° 7, que le taux des droits d’enregistrement soit porté à 3,5 %.

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 467.

M. Bernard Vera. Au travers de cet article, il s’agit de procéder à la réduction des droits de mutation à titre onéreux portant sur les cessions d’actifs comme sur les cessions de fonds de commerce, au motif qu’ils constitueraient une entrave à la réalisation de telles opérations.

Cette démarche va évidemment de pair avec la mise en accusation régulière de la fiscalité de l’enregistrement, présentée comme une bizarrerie nationale qui n’aurait aucun équivalent en Europe.

Or l’harmonisation des taux d’imposition des différentes opérations est effectuée dans la perspective de la transmission de nos entreprises, dont on sait qu’elle participe de l’avenir immédiat de notre vie économique.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. C’est exact !

M. Bernard Vera. Ce qui est au cœur du débat, c’est bien la question de la succession d’un grand nombre de chefs d’entreprise touchés par la limite d’âge, qui se posent la question de la transmission de leur patrimoine professionnel.

L’équilibre proposé dans le projet de loi représente un « petit » cadeau fiscal de 100 millions d’euros accordé aux entreprises, la hausse des droits frappant les cessions d’actions de sociétés anonymes compensant l’allégement des droits portant sur les autres opérations.

Cette démarche pourrait participer d’une aide apportée aux petites et moyennes entreprises. Pourtant, un certain nombre d’observations doivent être formulées.

Tout d’abord, à trop vouloir faciliter la transmission des entreprises en allégeant les droits d’enregistrement, on risque fort, à rebours de l’intention affichée, de faciliter les raids menés par les grands groupes et les fonds d’investissement sur nos PME, dont l’acquisition se révélera de fait moins coûteuse.

Par ailleurs, la majoration des droits de cession des actions de sociétés anonymes reste particulièrement marginale, dans la mesure où elle est plafonnée à un montant extrêmement réduit au regard de celui qu’elle pourrait atteindre.

Il aurait sans doute été plus cohérent de procéder à un ajustement plus général du processus, en relevant très sensiblement le plafond concernant les opérations menées sur les cessions d’actions de sociétés anonymes pour gager encore mieux le mouvement de réduction éventuelle des droits sur les SARL.

En tout état de cause, en réduisant la fiscalité des mutations d’entreprise, on ne règle pas vraiment la question de la transmission d’entreprise. En revanche, on offre de nouvelles économies d’échelle aux groupes et aux fonds spécialistes du rachat d’entreprises patrimoniales.

Mme Nicole Bricq. C’est vrai !

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - À la fin du a du 1° du I, remplacer le pourcentage :

3 %

par le pourcentage :

3,5 %

II. - Dans la seconde colonne du tableau constituant le second alinéa du IV, remplacer le chiffre :

2

par le chiffre :

2,5

et le chiffre :

0,60

par le chiffre :

1,10

III. - À la fin du VI, remplacer le pourcentage :

2 %

par le pourcentage :

2,5 %

La parole est à M. Laurent Béteille, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 342 et 467.

M. Laurent Béteille, rapporteur. L'article 15 prévoit d'harmoniser à hauteur de 3 % la majeure partie des taux de droits de mutation à titre onéreux applicables aux cessions d'actions et de parts sociales. Le taux serait ainsi porté de 1,10 % à 3 % pour les sociétés anonymes et ramené de 5 % à 3 % pour les SARL.

L'amendement que Philippe Marini a déposé au nom de la commission spéciale vise à porter le taux harmonisé de 3 % à 3,5 %, de manière à limiter, pour les finances publiques, le coût de cette mesure que nous approuvons.

Les amendements identiques nos 342 et 467 sont contraires à la position de la commission spéciale, qui est favorable à la mesure proposée par le Gouvernement, même si l'amendement n° 7 va quelque peu dans le sens de ce que souhaitent leurs auteurs. La commission spéciale y est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement souhaite harmoniser les droits de mutation et simplifier leur régime : c’est toute la raison d’être de l'article 15. C’est pourquoi il émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 342 et 467.

Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 7. En effet, dans les années à venir, 700 000 entreprises sont appelées à être transmises en France. C’est là un élément très important pour l’avenir du tissu économique du pays.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a proposé, à l'article 15, l’unification des droits de mutation à titre onéreux. Ainsi, le taux des droits d’enregistrement pour les cessions de SARL et de fonds de commerce sera ramené à 3 %. C’est un point très important.

Si le Sénat décidait de relever les droits de mutation, alors que l’intention du Gouvernement, confirmée par l'Assemblée nationale, était d’envoyer un signal fort pour faciliter la cession, c'est-à-dire la transmission, des petites entreprises, ce ne serait pas très bon pour l’avenir du tissu économique de notre pays. Je rappelle, en outre, que cette mesure est neutre pour les finances publiques (M. Marc Massion s’exclame.), puisqu’elle s’accompagne d’un relèvement du taux des droits de mutation pour les sociétés anonymes. L’équilibre me semble donc presque atteint.

M. le président. La parole est à M. Marc Massion, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 342 et 467.

M. Marc Massion. L’État est en faillite et les caisses sont vides : ce sont les plus hautes autorités de l’État qui l’ont publiquement reconnu. Tous les discours le répètent à l’envi : il faut diminuer le déficit et la dette.

Or, avec cette mesure, le Gouvernement propose d’aggraver encore le déficit de 100 millions d'euros ! Nous souhaitons donc apporter un peu de cohérence. La suppression de l'article 15 ne sera pas votée, nous le savons bien, mais, dans la mesure où l’amendement de M. Marini vise en quelque sorte à « limiter la casse », nous le voterons.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je tiens à rectifier les propos de M. Massion : le coût de cette mesure est estimé à 90 millions d'euros, et non à 100 millions d'euros. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Odette Terrade. Nous ne sommes plus à 10 millions d'euros près !

Mme Nicole Bricq. On connaît les évaluations de Bercy !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je rappelle que, dans le même temps, le Gouvernement augmente les droits de mutation pour les entreprises organisées sous forme de sociétés anonymes.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 342 et 467.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme Nicole Bricq. Ah, les dépensiers !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)

Mme Nicole Bricq. Philippe Marini sera content !

M. Marc Massion. Ça dépense, ça dépense !

M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Article 15 (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Discussion générale

5

Nomination d’un membre à une commission mixte paritaire

M. le président. Il va être procédé à la nomination de M. Marcel Deneux, en remplacement de M. Daniel Soulage, comme membre titulaire de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’environnement.

Cette candidature a été affichée.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette candidature est ratifiée.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures.)

M. le président. La séance est reprise.

6

Article 15 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 31 (priorité)

Modernisation de l'économie

Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d’urgence, de modernisation de l’économie (nos 398 et 413).

Mes chers collègues, je vous rappelle que, dans la suite de la discussion des articles, nous avons décidé d’examiner en priorité les amendements portant sur l’article 31 jusqu’aux articles additionnels après l’article 31 ter et les amendements portant sur l’article 36 jusqu’à l’article additionnel après l’article 42 octies.

TITRE III (priorité)

MOBILISER L'ATTRACTIVITÉ AU SERVICE DE LA CROISSANCE

CHAPITRE II (priorité)

Améliorer l'attractivité économique pour la localisation de l'activité en France

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article additionnel après l'article 31 (priorité)

Article 31 (priorité)

I. - L'article 81 B du code général des impôts est applicable aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue avant le 1er janvier 2008.

II. - Après l'article 81 B du code général des impôts, il est inséré un article 81 C ainsi rédigé :

« Art. 81 C. - I. - 1. Les salariés et les personnes mentionnées aux 1°, 2° et 3° du b de l'article 80 ter appelés de l'étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France pendant une période limitée ne sont pas soumis à l'impôt à raison des éléments de leur rémunération directement liés à cette situation ou, sur option, et pour les salariés et personnes autres que ceux appelés par une entreprise établie dans un autre État, à hauteur de 30 % de leur rémunération.

« Le premier alinéa est applicable sous réserve que les salariés et personnes concernés n'aient pas été fiscalement domiciliés en France au cours des cinq années civiles précédant celle de leur prise de fonctions et, jusqu'au 31 décembre de la cinquième année civile suivant celle de cette prise de fonctions, au titre des années à raison desquelles ils sont fiscalement domiciliés en France au sens des a et b du 1 de l'article 4 B.

« Si la part de la rémunération soumise à l'impôt sur le revenu en application du présent 1 est inférieure à la rémunération versée au titre de fonctions analogues dans l'entreprise ou, à défaut, dans des entreprises similaires établies en France, la différence est réintégrée dans les bases imposables de l'intéressé.

« 2. La fraction de la rémunération correspondant à l'activité exercée à l'étranger pendant la durée définie au 1 est exonérée si les séjours réalisés à l'étranger sont effectués dans l'intérêt direct et exclusif de l'employeur.

« 3. Sur option des salariés et personnes mentionnés au 1, soit la fraction de la rémunération exonérée conformément aux 1 et 2 est limitée à 50 % de la rémunération totale, soit la fraction de la rémunération exonérée conformément au 2 est limitée à 20 % de la rémunération imposable résultant du 1.

« 4. Les salariés et personnes mentionnés au présent I ne peuvent pas se prévaloir des dispositions de l'article 81 A.

« II. - Les salariés et personnes mentionnés au I sont, pendant la durée où ils bénéficient des dispositions du même I, exonérés d'impôt à hauteur de 50 % du montant des revenus suivants :

« a) Revenus de capitaux mobiliers dont le paiement est assuré par une personne établie hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;

« b) Produits mentionnés aux 2° et 3° du 2 de l'article 92 dont le paiement est effectué par une personne établie hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;

« c) Gains réalisés à l'occasion de la cession de valeurs mobilières et de droits sociaux, lorsque le dépositaire des titres ou, à défaut, la société dont les titres sont cédés, est établi hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Corrélativement, les moins-values réalisées lors de la cession de ces titres sont constatées à hauteur de 50 % de leur montant. »

III. - Dans le 2°-0 ter de l'article 83 du même code, après la référence : « I de l'article 81 B », sont insérés les mots et la référence : « ou au 1 du I de l'article 81 C ».

IV. - Dans le troisième alinéa du 1 de l'article 170 et le c du 1° du IV de l'article 1417 du même code, les références : « 81 A et 81 B » sont remplacées par les références : « 81 A à 81 C ».

V. - Après le 4 de l'article 1600-0 H du même code, il est inséré un 4 bis ainsi rédigé :

« 4 bis. Les revenus, produits et gains exonérés d'impôt sur le revenu en application du II de l'article 81 C ; ».

VI. - Après le 8 du I de l'article 1600-0 J du même code, il est inséré un 8 bis ainsi rédigé :

« 8 bis. Les revenus, produits et gains non pris en compte pour le calcul du prélèvement forfaitaire libératoire prévu aux articles 117 quater et 125 A, en application du II de l'article 81 C, lors de leur perception ; ».

VII. - L'article 1649-0 A du même code est ainsi modifié :

1° Le c du 4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsqu'un contribuable précédemment domicilié à l'étranger transfère son domicile en France, les revenus réalisés hors de France et exonérés d'impôt sur le revenu ne sont pris en compte pour la détermination du droit à restitution que du jour de ce transfert. » ;

2° Le 5 est complété par un d ainsi rédigé :

« d) Des impositions équivalentes à celles mentionnées aux ae et f du 2 lorsque celles-ci ont été payées à l'étranger. »

VIII. - La seconde phrase du II bis de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « ainsi que pour les revenus exonérés en application du II de l'article 81 C du même code ».

IX. - Après le 8° du II de l'article L. 136-7 du même code, il est inséré un 8° bis ainsi rédigé :

« 8° bis Les revenus, produits et gains non pris en compte pour le calcul du prélèvement forfaitaire libératoire prévu aux articles 117 quater et 125 A du code général des impôts, en application du II de l'article 81 C du même code, lors de leur perception ; ».

X. - Les II à VI et les VIII et IX sont applicables aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue à compter du 1er janvier 2008. Le VII s'applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce chapitre, qui a trait à l’amélioration de l’attractivité de notre territoire, est essentiel et va sûrement nous permettre de travailler plus efficacement.

À cet égard, j’avais mentionné, lors de la discussion générale, la difficulté d’obtention des visas. Or l’attractivité de notre territoire commence à la porte de nos ambassades et de nos consulats.

Je veux donc profiter du début de la discussion relative à l’attractivité pour rappeler que les dispositions qui sont actuellement en vigueur sont absolument contraires à l’efficacité et au bon sens. En effet, les diplomates, les agents commerciaux, les membres des chambres de commerce de nos partenaires sont obligés d’aller déposer leurs empreintes digitales puis d’attendre une dizaine de jours pour obtenir un visa. C’est contraire à la réactivité nécessaire aux affaires, contraire à la libre circulation, aussi.

Je n’ignore pas les problèmes actuels et je sais que, de surcroît, les dispositions en cause sont d’ordre européen. Cependant, l’attractivité de notre territoire va aussi dépendre de l’accueil que nous réserverons à nos amis étrangers qui veulent venir en France.

Il en est de même de l’accueil des étudiants étrangers, car on ne pourra pas rendre ce territoire attractif si cet accueil n’est pas amélioré. En effet, quand ces étudiants s’en retournent dans leur pays, c’est le plus souvent après avoir tissé avec la France des liens indéfectibles. Or, si nous manquons les étudiants d’aujourd’hui, nous manquons les décideurs de demain. Et que d’occasions déjà gâchées !

Mes chers collègues, monsieur le secrétaire d’État, quelles que soient les mesures fiscales ou autres que nous pourrons prendre, rien ne changera si nous n’améliorons pas l’accueil des étudiants et des personnalités étrangères.

De ce point de vue, la politique des visas me semble essentielle.

À l’heure actuelle, je vous le rappelle, ne sont dispensés de visa que les présidents des États et les Premiers ministres. Autrement dit, si, par exemple, Sheikha Loubna al-Qassemi, ministre de l’économie des Émirats Arabes Unis, …

M. Philippe Marini, rapporteur de la commission spéciale. Très bon exemple !

Mme Nathalie Goulet. … veut séjourner à Paris avec une délégation, en dehors de tout voyage officiel, elle est obligée de se rendre à l’ambassade de France afin d’y déposer ses empreintes digitales, puis d’attendre dix jours avant d’obtenir un visa. C’est absolument inadmissible !

Il ne s’agit pas ici de ces « cartes de séjour gold »dont Bariza Khiari va parler ; il s’agit de permettre à des agents économiques, qui sont autant de facteurs d’attractivité pour notre territoire, de venir en France pour y faire des affaires, pour apporter la plus-value que nous attendons d’eux et pour favoriser les échanges entre nos deux pays.

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.

Mme Bariza Khiari. L’article 31 concerne les impatriés fiscaux. Ce terme désigne les salariés, français ou étrangers, venus travailler en France à la demande d’une entreprise installée à l’étranger et qui n’ont pas été domiciliés en France les cinq années précédant leur prise de fonctions.

Autrement dit, il vise tous les cadres de la banque et de la finance et, plus précisément, tous les anciens élèves du DEA de Mme El Karoui formés aux mathématiques financières et partis travailler à la City, tous ceux qui ont pour mission de créer des produits financiers de plus en plus sophistiqués, à l’instar de ceux qui ont contribué à la crise financière actuelle.

On nous dit que cet article vise à améliorer l’attractivité de la France et de la place financière parisienne. Soit !

En revanche, nous contestons vivement le diagnostic de certains esprits chagrins sur l’attractivité française. Selon le dernier rapport du cabinet Ernst&Young – cabinet peu suspect de gauchisme, qui, depuis cinq ans, publie un rapport annuel sur l’attractivité européenne –, la France est depuis plusieurs années déjà la deuxième destination des investissements directs à l’étranger en Europe. Elle se situe un peu derrière la Grande-Bretagne, certes, mais loin devant l’Allemagne. D’un point de vue international, elle serait, si je me rapporte aux propos tenus par Mme le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi à l'Assemblée nationale, la troisième destination mondiale en investissements directs.

Ces chiffres traduisent des faits tangibles et mesurables.

Or le Gouvernement met en avant, non pas les faits, mais la perception de l’ensemble des investisseurs. Si ces derniers agissaient conformément à cette perception, alors, la France se trouverait en bas de l’échelle, et non pas au deuxième rang européen !

Faut-il en conclure que ces dirigeants sont schizophrènes ou encore que les entreprises étrangères venues s’installer en France ont eu un comportement irrationnel pour choisir un pays aussi fiscalement  « désincitatif »? Faut-il en conclure, au contraire, que ces entreprises ont fait le choix rationnel d’un pays attractif à d’autres égards ?

Je m’en remets aux faits : si ces entreprises continuent à investir en France en argent, en personnel, en projets, c’est sans doute qu’elles y trouvent un intérêt majeur.

Monsieur le secrétaire d'État, citons, par exemple, le système de soins, que vous êtes en train d’affaiblir, la qualité de notre système éducatif, que vous fragilisez, la richesse, du point de vue de la diversité, de la recherche française, que vous démantelez, enfin, la paix sociale, que votre politique ultralibérale met à mal.

Les entreprises étrangères et les salariés hautement qualifiés viennent chercher en France l’excellence qu’ils ne trouvent plus dans d’autres pays, notamment anglo-saxons : excellence des services publics, du système de santé, du maillage territorial, des infrastructures. Il me semble donc logique qu’ils y contribuent, au même titre que les entreprises et les contribuables français. Il serait trop facile de profiter à moindre frais, comme vous le proposez, des efforts fournis par la Nation.

Alors même que vous vous employez, méthodiquement, laborieusement, à expulser des personnes salariées, mais sans papiers, cotisant, mais sans droits, vous faites des ponts d’or à certains, au seul motif de la compétitivité.

Le groupe socialiste est naturellement favorable aux politiques de compétitivité, mais pas quand elles prennent place dans un contexte de chasse aux plus pauvres et aux plus faibles.

Mme Nicole Bricq. Exactement !

Mme Bariza Khiari. Avec l’article 31, monsieur le secrétaire d'État, vous dévoilez tout le cynisme de votre conception de l’immigration choisie.

En élargissant le champ des bénéficiaires, en introduisant un nouveau dispositif d’exonération de la moitié des revenus perçus hors de France, vous renforcez un dispositif dont le coût n’est pas évalué et qui, d’après les études dont nous disposons, n’est pas nécessaire.

Après avoir distribué 15 milliards d’euros aux plus riches, vous créez une nouvelle niche fiscale au bénéfice exclusif des acteurs de la spéculation financière et au détriment de nos finances publiques, et ce alors que vous voulez réduire les niches fiscales. C’est incohérent !

Je partage l’indignation de Mme Goulet pour ce qui concerne les visas. Il faudrait effectivement prendre des mesures en la matière. Mais, lors de l’examen de l’article 32, j’évoquerai cette fameuse carte de séjour gold, ou, pourquoi pas ? platinum. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’état, mes chers collègues, je souhaite expliciter, en quelques mots, l’analyse et la position de la commission spéciale sur l’article 31, ce qui me permettra d’être moins disert lors de la présentation de chaque amendement.

Le régime proposé constitue un élément important du dispositif d’attractivité qui doit être mis en place. Le Gouvernement, qui est à l’initiative de cette proposition, s’est probablement, pour une large part, inspiré des travaux réalisés par le Sénat, l’an dernier, dans le cadre de la mission commune d’information sur la notion de centre de décision économique et les conséquences qui s’attachent en ce domaine à l’attractivité du territoire national ; la Haute Assemblée avait alors formulé des propositions s’inspirant elles-mêmes du modèle britannique.

Nos deux collègues qui viennent d’intervenir ont évoqué plusieurs aspects de la problématique.

Comme Nathalie Goulet, je crois que les questions administratives doivent être traitées avec tact lorsque l’image de la France et sa capacité d’attirer des investissements et des transactions économiques sont en jeu. Il faut là faire preuve de beaucoup d’empirisme. J’avais cru comprendre que telle était bien l’approche du ministre Brice Hortefeux et que les adaptations nécessaires seraient entreprises. Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais que vous puissiez nous rassurer à ce sujet.

Cela étant, lorsque l’on se rend dans les postes diplomatiques, on voit la réalité des problèmes et l’on a alors l’impression qu’il y a une certaine distance entre les assurances données ici et la réalité sur le terrain.

S’agissant des régimes sociaux, la commission spéciale estime que des personnes qui ont déjà une couverture sociale n’ont pas à cotiser à nouveau ; en contrepartie, bien entendu, elles ne doivent pas avoir accès aux prestations offertes par notre pays. Je me permets de souligner ce point pour que pas un seul malentendu ne subsiste avec Mme Khiari et les membres du groupe socialiste.

Si des étrangers sont dispensés de contribuer aux régimes sociaux, c’est parce qu’ils disposent déjà d’une garantie par ailleurs et qu’ils ne bénéficieront pas, sur le territoire français, des prestations financées avec les contributions des autres.

Il faut être très clair sur le principe que nous souhaitons voir appliquer.

Monsieur le secrétaire d’État, le dispositif que vous préconisez pose, selon moi, un problème, car, comme la pratique des visas tout à l’heure, il me paraît être un peu en décalage par rapport aux affirmations.

Attirer des cadres est une bonne chose, mais ce dispositif est trop formaté pour les cadres et les salariés.

Si nous voulons rendre efficace le dispositif complexe et très artificiel que vous proposez –  pour un profit bien maigre en termes d’apport d’activités si nous l’adoptions tel quel –, et attirer dans notre pays la richesse créée par les non-résidents fiscaux, il nous faut prévoir deux mesures importantes.

Il faut, d’une part, étendre le dispositif aux non-salariés, et ce dans le cadre d’agréments permettant de vérifier que ces personnes sont susceptibles d’apporter un « plus » à l’économie nationale, et, d’autre part, point important, traiter l’impôt sur le patrimoine pari passu avec l’impôt sur le revenu en termes de territorialité de l’assiette.

Le dispositif que vous proposez, monsieur le secrétaire d’État, va dans le bon sens, mais je regrette que les bonnes intentions du Gouvernement soient quelque peu récupérées par une vision restrictive de l’administration fiscale.

Pour notre part, au sein de la commission spéciale, nous nous sommes efforcés de revenir à l’esprit des mesures initialement annoncées par Mme Lagarde, mesures auxquelles votre dispositif ne me semble pas complètement fidèle.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 473, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. L’article 31 du projet de loi porte sur le traitement de la situation fiscale des cadres dirigeants d’entreprises étrangères d’origine extracommunautaire.

La question des impatriés a fait l’objet, dans une loi de finances rectificative récente, de dispositions spécifiques conduisant à l’adoption de l’article 81 B du code général des impôts.

Nous avions souligné, lors de la discussion du collectif budgétaire de la fin 2005, à quel point cette mesure nous paraissait discutable, et nous avions signifié, par le dépôt d’un amendement de suppression, notre opposition à l’application d’un système sérieusement dérogatoire au droit commun. Nous sommes donc nourris par l’expérience.

Il s’agit de savoir quelles applications ce régime dérogatoire a pu trouver dans la pratique.

S’agissant des déclarations de revenus de 2006, première année d’application du dispositif, les dossiers comportant ces dispositions sont peu nombreux. On compte, en effet, 7 151 dossiers d’impatriés, auxquels s’ajoutent 233 autres dossiers déposés par les conjoints.

Le montant de salaires ainsi exonéré est loin d’être négligeable, si l’on rapporte ce montant au nombre de dossiers concernés, puisque l’on obtient pratiquement le chiffre de 160 millions d’euros de salaires exonérés pour les dossiers principaux, soit plus de 22 300 euros par contribuable. Pour le cas des dossiers présentés au titre des revenus des conjoints, on se situe sur une moyenne d’exonération de plus de 26 200 euros.

Comme chacun le sait, ces sommes ne constituent pas, en l’état de l’article 81 B, la totalité des revenus salariaux concernés, mais seulement une partie. Nous sommes donc assez loin de la situation spécifique des revenus salariés dans notre pays, où les moyennes de revenus imposables déclarés dans la catégorie des traitements et salaires est nettement inférieure, et ce d’autant plus que les revenus exonérés ont la caractéristique de ne pas représenter la totalité de la rémunération annuelle des personnes concernées.

Il est donc patent que l’article 31 constitue un avantage fiscal important, strictement dérogatoire au droit commun, que nous avions dénoncé lors de son adoption dans le collectif budgétaire de 2003 et lors de son perfectionnement dans celui de 2005.

Nous ne pouvons donc que proposer la suppression pure et simple de cet article, qui prolonge et raffermit ce dispositif fiscal.

M. le président. L’amendement n° 14, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Après le premier alinéa du 1 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 81 C du code général des impôts, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Sur agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, ne sont également pas soumises à l'impôt, à hauteur de 30 % de leur rémunération, les personnes non salariées remplissant les conditions suivantes :

« a) Apporter une contribution économique exceptionnelle à la France au sens de l'article L. 314-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

« b) Ou exercer à titre principal une activité figurant sur une liste fixée par décret en raison du caractère spécifique des compétences requises ou de difficultés de recrutement ;

« c) Ou souscrire, à compter du 1er janvier 2008 et dans les conditions définies à l'article 885 I ter, au capital de sociétés répondant aux conditions définies audit article, pour un montant excédant la limite inférieure de la première tranche du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, et prendre l'engagement de conserver les titres souscrits pendant la durée de l'agrément et, en cas de cession, de réinvestir le produit de la cession dans des titres de même nature. 

II. - En conséquence, rédiger comme suit le début du deuxième alinéa du 1 du I du même texte :

Les alinéas précédents sont applicables...

III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'inclusion des non-salariés dans le nouveau régime fiscal des impatriés est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n°473.

M. Philippe Marini, rapporteur. Monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 12 rectifié et 13.

L’amendement 14 vise à étendre, sous certaines conditions, le dispositif gouvernemental aux non-salariés.

Comme je l’ai déjà indiqué, il s’agit d’un régime d’agrément délivré dans les conditions de droit commun. Ce nouveau régime doit bénéficier aux non-salariés disposant de compétences spécifiques ou d’un patrimoine élevé, qui remplissent l’une ou l’autre des trois conditions suivantes.

La première condition, qui s’articule avec le nouveau dispositif introduit à l’article 33 du présent projet de loi, est l’apport d’une contribution économique exceptionnelle à la France. Cette condition est directement liée à la nécessité, soulignée précédemment, d’attirer sur notre territoire des personnes utiles pour notre pays, notamment grâce à la mise en place d’une politique avisée de délivrance des visas et des cartes de séjour.

La deuxième condition est l’exercice d’une activité correspondant à des compétences particulièrement recherchées. En effet, avec le dispositif que vous proposez, monsieur le secrétaire d’État, si le professeur Montagnier, par exemple, voulait revenir en France, il n’aurait aucun intérêt à le faire dans la mesure où il n’est pas salarié !

La troisième condition est la souscription au capital d’une PME française ou européenne d’un montant excédant la première tranche du barème de l’impôt de solidarité sur la fortune, soit 770 000 euros.

Telles sont les contreparties définies par la commission spéciale. Le système est complètement ficelé : il s’agit d’un agrément nominatif, donné par décision ministérielle, sur instruction des services compétents, en échange d’une contribution économique, de compétences particulièrement recherchées, ou de la souscription au capital d’une PME.

Cette proposition est donc particulièrement équilibrée.

Nous souhaitons, ensuite, que le régime de territorialisation de l’impôt s’applique également à l’impôt sur le patrimoine.

Vous ne ferez croire à personne, monsieur le secrétaire d’État, que vous allez attirer en France, comme vous vous le proposez par ce projet de loi, une personne qui risquerait d’être assujettie à l’impôt de solidarité sur la fortune français au titre de l’ensemble des éléments de patrimoine qu’elle possède dans le monde. Personne ne serait intéressé ! La commission spéciale souhaite donc que cette lacune manifeste soit comblée.

L’amendement n° 13 est de pure coordination.

Naturellement, la commission est défavorable à l’amendement de suppression n° 473.

M. le président. L’amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

 

I. - Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le 1° de l'article 885 A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toutefois, les personnes physiques mentionnées à l'alinéa précédent qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles ont leur domicile fiscal en France, ne sont imposables qu'à raison de leurs biens situés en France.

« Cette disposition s'applique au titre de chaque année au cours de laquelle le redevable conserve son domicile fiscal en France, et ce jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle au cours de laquelle le domicile fiscal a été établi en France. »

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'imposition des seuls biens situés en France est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement a été défendu.

L’amendement n° 13, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

A. - Rédiger comme suit le X de cet article :

X. - Le II, les III à VI, le VIII et le IX sont applicables aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue à compter du 1er janvier 2008. Le II bis est applicable aux personnes qui établissent leur domicile fiscal en France à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi. Le VII s'applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006.

B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'entrée en vigueur de l'imposition des seuls biens situés en France est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement a également été défendu.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Les sénateurs communistes proposent de supprimer l’article 31. Je n’ai d’ailleurs pas compris s’ils reprochaient à ce dispositif d’être trop efficace ou pas assez ! (Sourires.)

Comme l’a très bien expliqué M. le rapporteur, nous proposons ces dispositions parce qu’un certain nombre d’enquêtes et de rapports nourris, notamment d’origine parlementaire, ont démontré que l’un des éléments déclencheurs de notre attractivité économique permettant, dans le contexte de compétition mondiale que nous connaissons, d’attirer sur notre territoire des centres de décision, était la capacité de faire venir dans notre pays des cadres de haut niveau travaillant au sein de ces grands groupes.

Je peux d’ailleurs témoigner, en tant qu’ancien responsable des ressources humaines d’un grand groupe industriel, de la nécessité de gérer les ressources humaines au niveau mondial et de la difficulté d’attirer des cadres de haut niveau en France, la législation en vigueur dans notre pays n’étant pas avantageuse notamment par rapport à celle de nos voisins européens.

L’installation en France de ces cadres peut être génératrice d’emplois et d’activités.

Nous avons pris un certain nombre de garanties et le dispositif que nous proposons est très encadré, dans la mesure où il est optionnel : soit le supplément de rémunération lié à l’activité exercée en France par les intéressés et la part de leur rémunération se rapportant à leur activité à l’étranger sont exonérés dans la limite de 50 % de la rémunération totale, soit, comme dans le régime actuel, la part de la rémunération liée à l’activité des intéressés à l’étranger est exonérée à hauteur de 20 % de leur rémunération imposable.

Par ailleurs, dans tous les cas, leur revenu passif – les dividendes, les intérêts, les redevances – et les plus-values de cession de valeurs mobilières de source étrangère sont exonérés à hauteur de 50 %.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 473.

Le problème traité dans l’amendement n° 14 est très complexe. Le régime des salariés impatriés concerne avant tout les éléments de leur rémunération directement liés à leur situation. Le texte qui vous est proposé limite l’exonération en fonction du niveau de rémunération normale pratiquée en France pour des fonctions équivalentes.

Vous conviendrez qu’il n’existe pas, pour un travailleur indépendant, de revenus directement liés à sa situation d’impatrié.

En Europe, onze pays ont déjà introduit dans leur législation ce type de dispositifs attractifs visant les salariés impatriés, dispositifs qui sont assez variés.

Un seul pays, l’Italie, a mis en place un système spécifique pour les étrangers qui perçoivent des bénéfices non commerciaux. Comme vous le savez, monsieur le rapporteur, ce dispositif ne concerne pas seulement l’impôt d’État sur le revenu, mais intègre également une exonération de l’impôt perçu par les régions, impôt qui ressemble un peu à notre taxe professionnelle.

Enfin, monsieur le rapporteur, votre proposition entraînerait une rupture d’égalité entre les contribuables. Le fait de réserver un avantage fiscal aux travailleurs indépendants qui s’installent comme résidents en France serait, en effet, discriminatoire, d’une part, par rapport aux travailleurs indépendants non résidents, qui disposent déjà d’une installation fixe d’affaires en France, sans pour autant y résider, et, d’autre part, par rapport aux travailleurs indépendants résidents français, particulièrement ceux qui démarrent leur activité. Or il n’existe aucune différence de situation objective entre ces différents contribuables permettant de justifier une telle discrimination.

Nous sommes prêts, monsieur le rapporteur, à réfléchir à ce problème et à en discuter, mais nous émettons des réserves sur le dispositif proposé dans l’amendement n° 14, et je vous demande de bien vouloir le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement n° 12 rectifié, en revanche, comporte des avancées importantes et significatives, que le Gouvernement voit d’un bon œil.

J’émets donc un avis favorable sur cet amendement, ainsi que sur l’amendement de coordination n° 13.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ma question semblera peut-être stupide, ...

M. Philippe Marini, rapporteur. Mais non, voyons !

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Sûrement pas !

Mme Nathalie Goulet. ... mais je souhaite obtenir une précision.

La France a signé un certain nombre de conventions internationales tendant à éviter les doubles impositions. Dans quelle mesure les dispositions que nous nous apprêtons à voter entrent-elles dans le cadre des conventions déjà conclues ?

En termes de réciprocité, à quoi faut-il nous attendre ? Ou alors sommes-nous en face de dispositions uniquement franco-françaises ?

M. le président. Pouvez-vous apaiser les inquiétudes de Mme Goulet, monsieur le rapporteur ?

M. Philippe Marini, rapporteur. En partie, monsieur le président ! (Sourires.)

Les dispositions que nous examinons, qu’elles émanent du Gouvernement ou de la commission spéciale, sont, par exemple, conformes à la convention fiscale franco-britannique, qui a été récemment renégociée.

Le point que vous soulevez a bien entendu été examiné par nos collaborateurs, en liaison avec ceux de Mme la ministre – nous sommes heureux de la saluer à cet instant  –, non pas seulement au regard des relations franco-britanniques, mais de manière plus générale.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 473.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 14 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur. M. le secrétaire d'État a soufflé le chaud et le froid. (Sourires.) Il a reconnu que le problème existait et qu’il fallait travailler pour y trouver une solution.

Selon moi, la meilleure façon d’y travailler, c’est d’adopter cet amendement de sorte que le dispositif soit dans la navette.

Mme Odette Terrade. Pas de navette, une commission paritaire !

M. Philippe Marini, rapporteur. Pour ce qui est de l’égalité devant l’impôt, notre amendement ne devrait pas poser de problème, dès lors qu’il s’agit d’un régime d’agrément et que sont prévus dans le texte un équilibre, une appréciation portée sur le domaine d’activité et sur les compétences, et, si ces conditions n’étaient pas remplies, la nécessité pour l’impatrié non salarié d’investir dans le capital d’une petite et moyenne entreprise, à un niveau qui n’est pas symbolique, puisque le seuil indiqué est de 770 000 euros.

Je vous apporte un dernier argument, monsieur le secrétaire d'État, qui pourra de surcroît nourrir nos échanges à venir.

Dans ce texte, vous avez raisonné par rapport à la situation des cadres des groupes bancaires. C’était sans doute la première question posée, qui avait notamment fait l’objet de discussions au sein du Haut comité de place que Mme la ministre réunit opportunément à échéances régulières.

La notion de prime d’impatriation – un supplément de revenu issu de l’arrivée en France – est relativement simple à cerner dans le cas d’une personne déplacée, au sein d’un groupe multinational, de la ville A, située hors de nos frontières, à la ville B, en France, mais, hormis ce cas de figure, s’il s’agit d’un recrutement, comment fait-on apparaître cette prime d’impatriation ? Comment la calcule-t-on ? Je ne le sais pas. Et quid du détenteur de capitaux susceptible de choisir sa résidence fiscale en France pour y investir et y mener des activités non salariées ? Ce cas est complètement en dehors de votre grille d’analyse et du mode de raisonnement habituel de vos services.

J’ai entendu parler, tout à l’heure, de « rémunération normale » : comment, mes chers collègues, l’administration peut-elle imaginer définir pour chaque fonction une « rémunération normale » ?

Je me permets de vous faire part de ma légère incompréhension (Sourires.), d’autant que les rédacteurs du présent projet de loi veulent, à juste titre, donner une impulsion aux activités économiques et stimuler l’esprit d’entreprise.

Raisonner en termes de rémunération normale et vouloir activer l’esprit d’entreprise est tout de même, madame la ministre, un peu antinomique. En tout cas, ces deux notions sont assez décalées l’une par rapport à l’autre. (Mme la ministre sourit.)

Je comprends bien qu’il va falloir progresser dans la mise au point de ce dispositif. Nous ferions un pas en ce sens si, au moins, nous inscrivions la discussion de ce problème à l’ordre du jour de la commission mixte paritaire. Nous participerions ainsi à une prise de conscience utile.

C'est pourquoi je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.

M. Bernard Vera. Il s’agit, par cet article, d’alléger certaines contraintes de mise en œuvre du dispositif d’exonération, et singulièrement celles qui pèsent sur les déplacements professionnels associés à l’exercice de la mobilité géographique.

On peut se demander, à l’égard du peu de succès des dispositions en vigueur ce qui est exactement visé. Veut-on, en participant à la course au moins-disant fiscal que la concurrence européenne nous mène récupérer, au travers d’un nombre plus important de dossiers fiscaux, ce que l’on perdrait en assiette, ou cherche-t-on, de manière privilégiée, à accueillir dans notre pays de nouveaux cadres dirigeants étrangers, en général extracommunautaires ?

En tout cas, ce qui est sûr, c’est que la notion de « travailleur étranger en France » va finir par recouvrir des réalités fort différentes. Pour 10 000 ou 20 000 dossiers de cadres dirigeants d’entreprises étrangères, combien y a-t-il de milliers de salariés venus des pays du Sud qui continuent de subir les règles de la fiscalité française, comme tous les autres salariés de ce pays ?

Si le Gouvernement souhaite que les compétences et les talents s’expriment, peut-être pourrait-il alors donner droit aux milliers de salariés sans papiers qui font « tourner » nos usines, nos chantiers, nos restaurants et nos commerces, et qui participent, avec leurs bras, avec leur dévouement, aussi, à la richesse économique de notre pays ?

Vivre dans une économie ouverte ne signifie pas céder à la manie des cadeaux fiscaux réservés à une toute petite élite de ménages et de personnes, fussent-ils des cadres compétents.

Nous ne voterons donc aucun des amendements de la commission portant sur cet article 31, attendu qu’ils accusent encore plus les défauts d’un régime des impatriés déjà très dérogatoire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Avant de mettre aux voix les amendements nos 12 rectifié et 13, je me dois d’interroger le Gouvernement : monsieur le secrétaire d’État, acceptez-vous de lever le gage ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Oui, monsieur le président.

M. Philippe Marini, rapporteur. Cela ne coûte rien, puisque ce sont des gens qui ne sont pas encore là !

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Cela ne coûte pas !

M. le président. Il s’agit donc de l'amendement n° 12 rectifié bis et de l’amendement n° 13 rectifié.

Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'article 31.

Mme Nicole Bricq. Je précise, afin que nous nous comprenions bien, que le groupe socialiste n’a pas d’opposition de principe quant à la nécessité d’attirer sur le territoire français les cadres de haut niveau afin qu’ils y déploient leurs talents.

Toute mesure s’apprécie selon le contexte dans lequel elle intervient. C’est précisément le contexte actuel qui nous conduit à voter contre l’article 31.

Tout d’abord, nos finances publiques ne sont pas très florissantes, c’est le moins que l’on puisse dire. Or le coût des exonérations déjà très favorables accordées aux impatriés est estimé à 40 millions d'euros.

Quant à l’effet des nouvelles mesures proposées dans l’article 31, nous ne le connaissons pas, mais il sera forcément supérieur au coût actuel.

Nous n’avons eu, en commission, aucune possibilité d’apprécier la part du coût et la part de l’avantage espéré, aucune indication quant aux effets incitatifs attendus.

J’ai noté aussi que l’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif aurait lieu au 1er janvier 2008, soit de manière rétroactive. Elle pèse donc d’ores et déjà sur les finances de l’année 2008.

Par ailleurs, cette mesure, censée être propice à un renforcement de l’attractivité, vise en fait exclusivement à faire droit aux revendications de la place financière de Paris, au moment où sa concurrente, Londres, licencie, compte tenu de la crise financière, crise qui atteint toutes les places mondiales, surtout américaines et européennes, la nôtre y compris. Le Premier ministre britannique, M. Gordon Brown, écorne sérieusement le régime du remittance basis que le Gouvernement veut précisément imiter avec cet article 31.

Il est clairement indiqué dans le rapport écrit qu’il s’agit de profiter « d’un appel d’air ». Du reste, Mme la ministre, devant le Haut comité de place, l’a confirmé non moins clairement : « notre objectif est de rendre nos activités aussi bienvenues à Paris que dans d’autres places, notamment Londres. » Mes chers collègues, il s’agit d’attirer des financiers, pas des ingénieurs, pas des chercheurs ou encore des jeunes étudiants prometteurs.

Peut-être le Gouvernement envisage-t-il la création– on y arrivera forcément, au rythme où vont les choses depuis que la droite est au pouvoir – d’un paradis fiscal du type de celui des îles anglo-normandes, où sont domiciliées 130 000 personnes ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Si seulement !

Mme Nicole Bricq. Notre littoral est agrémenté de quelques îles ; pourquoi l’île d’Yeu, notamment, ne jouerait-elle pas ce rôle ? (Sourires.)

Monsieur le rapporteur, souvenez-vous : lorsque nous avions conduit ensemble la mission commune d’information sur la notion de centre de décision économique, nous vous avions déjà fait remarquer que la fiscalité sur les personnes physiques et les personnes morales n’était citée dans tous les baromètres qu’en sixième position dans la hiérarchie des avantages attractifs, bien avant les conditions d’accès à la culture, à l’éducation et autres.

Enfin, l’avantage accordé devrait être plafonné, mais ni en commission ni dans le rapport nous n’avons été éclairés sur ce plafond, qui reste très flou.

Quand on fait le compte de toutes les mesures introduites depuis 2002 par les gouvernements successifs, on s’aperçoit que cela fait beaucoup, beaucoup trop dans la conjoncture actuelle.

Paris est dans une position très confortable, de ce point de vue, dans la hiérarchie mondiale ; elle n’est pas une citadelle assiégée, comme on voudrait nous le faire croire. J’ai cru comprendre que, concernant la Capitale, Mme la ministre nourrissait quelque ambition politique. Elle a raison, mais elle ne doit pas oublier que la population de Paris n’est pas composée que de traders et de professionnels du CAC 40 !

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Lors de l’adoption de la disposition relative au régime fiscal des impatriés, nous nous étions élevés contre une mesure pour le moins surprenante, surtout dans un contexte de déficit permanent du budget de l’État.

Je me permets de rappeler nos propos : « Une telle orientation n’est pas réellement susceptible de recueillir notre assentiment. En effet, selon les conclusions du plus récent rapport rendu sur le sujet, 3 000 cadres seront concernés par le dispositif que nous sommes invités à adopter. Certains estiment que les coûts salariaux atteignent dans notre pays un niveau trop élevé, niveau lié, soit dit en passant, à l’importance des prélèvements sociaux plus que de ceux qui découlent de la fiscalité des revenus.

« En fait, la réalité, comme souvent, est contradictoire. Si les prélèvements sociaux sont aussi élevés en France, c’est que nombre de dépenses y sont socialisées, alors que, dans d’autres pays, elles sont couvertes non par les impôts que perçoit l’État, mais par les contributions volontaires des salariés. »

Nous poursuivions en faisant remarquer que « les grandes entreprises françaises à vocation internationale sont souvent les premières à faire des choix négatifs pour l’emploi et la croissance de notre pays.

« Ainsi, on ne peut oublier que nous souffrons d’un déficit de 400 milliards d’euros entre les capitaux placés hors de nos frontières par les grands groupes français à vocation internationale et les sommes placées par les entreprises étrangères dans notre pays. Ce qui joue contre la croissance française, c’est donc non pas l’insuffisance des investissements étrangers en France, mais bien plutôt les stratégies de rentabilité financière à court terme, et parfois d’acquisitions coûteuses de concurrents par nos propres entreprises. »

À la vérité, nous n’étions alors guère éloignés de la réalité. En effet, le régime des impatriés concernait moins de 7 500 contribuables, mais s’avérait déjà relativement coûteux.

Les critiques que nous faisions à l’époque restent pleinement fondées aujourd’hui.

J’en veux pour preuve une interview qu’a accordée M. Marini au Figaro, après qu’Alain Ducasse a renoncé à la nationalité française,…

M. Philippe Marini, rapporteur. Je n’y suis pour rien, vous savez !

Mme Odette Terrade. … et que j’ai découverte sur un site Internet. Je ne résiste pas au plaisir d’en citer quelques phrases.

M. Philippe Marini, rapporteur. Vous avez de bonnes lectures ! C’est bien !

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Si les communistes lisent le Figaro, il y a de l’espoir !

Mme Odette Terrade. Le Figaro pose ensuite une question sur l’ISF, qui a rapporté 4,4 milliards d’euros l’an dernier : « Est-il raisonnable de supprimer cet impôt, alors que les déficits publics pourraient atteindre et dépasser les 3 % de PIB en fin d’année ? »

La réponse de M. le rapporteur est sans ambages : « Je plaide pour la suppression de cet impôt depuis des années. Il est possible de trouver ces 4 milliards en augmentant le rendement de l’impôt sur le revenu de la façon la plus efficace et la plus indolore possible. »

M. Philippe Marini, rapporteur. Absolument ! Je persiste.

Mme Odette Terrade. « Je suis convaincu que, cette année, l’ISF est encore plus mal vécu que les années passées, puisque nous sommes en fin de cycle immobilier et que la Bourse a beaucoup perdu. Les redevables ont été contraints de déclarer le niveau de patrimoine qu’ils avaient fin 2007 et qui peut avoir sensiblement baissé depuis. »

Il continue ainsi : « Le projet de loi de modernisation de l’économie, qui est en discussion au Parlement, prévoit d’améliorer le régime des impatriés. Mais ces améliorations ne concernent que les salariés. […] La commission des finances du Sénat a adopté deux amendements que je lui ai proposés. Ces amendements visent à étendre le régime de l’impatriation aux non-salariés et à l’impôt sur le patrimoine. Le Gouvernement semble réceptif à mes initiatives. »

Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que, dans ce contexte, la suppression de l’article 31 se justifie pleinement aux yeux de notre groupe.

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.

Mme Bariza Khiari. Pour compléter ce qu’a déjà exposé brillamment Nicole Bricq, je voudrais m’inscrire en faux contre les propos de M. le rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Quel dommage ! (Sourires.)

Mme Bariza Khiari. En effet, vous dites que les personnes concernées ne bénéficieront pas des efforts de la Nation. Or, autant que je sache, la gratuité est la règle dans nos écoles et nos universités. Qui plus est, nous subventionnons pour partie l’école privée.

Pour avoir dû moi-même financer les cycles d’études de mes enfants aux États-Unis, je connais un peu le sujet !

Par ailleurs, la position que vous exposez fait suite à des propos tenus au plus haut niveau de l’État qui laissent entendre que les caisses sont vides !

Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe socialiste votera contre cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'article 31, modifié.

(L'article 31 est adopté.)

Article 31 (priorité)
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Article 31 bis (priorité)

Article additionnel après l'article 31 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 717, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. 1° Les trois premiers alinéas du 1 de l'article 293 A du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« La taxe afférente à l'importation est reportée sur la déclaration mentionnée à l'article 287 par l'assujetti désigné comme destinataire réel du bien sur la déclaration d'importation. »

2° Le 2 du même article est supprimé.

II. La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Le présent amendement vise à supprimer le paiement à la douane française de la TVA sur les produits importés. Actuellement, le remboursement est ensuite effectué par la DGI, la Direction générale des impôts. Il s’agirait d’adopter la méthode de l’auto-liquidation auprès de la DGI, ce qui éviterait les avances de trésorerie.

Cela reviendrait donc à modifier les règles de recouvrement de la TVA pour les opérations d’importation en transférant ce recouvrement à la Direction générale des impôts. Les entreprises assujetties à cette taxe seraient tenues de la déclarer sur leurs importations le mois suivant à la DGI, comme c’est le cas pour la TVA intracommunautaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Le même amendement était venu en discussion l’année dernière lors de l’examen de la loi de finances ; je crois que la commission des finances s’était montrée réceptive à la démarche proposée.

Ce pourrait être en effet une bonne mesure, de nature à améliorer notre compétitivité, puisqu’il y aurait un interlocuteur unique au sein des services compétents en matière de TVA.

Il me semble que cette initiative, madame la ministre, mérite d’autant plus d’être soutenue qu’elle paraît aller dans le sens des intentions générales de la présente loi.

Par conséquent, la commission spéciale est assez favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Je partage souvent les analyses de M. le rapporteur, qui se signalent par leur grande intelligence et qui, en outre, sont frappées au coin du bon sens.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Et elles sont toujours pertinentes !

Mme Christine Lagarde, ministre. Mais, en ce qui concerne le mode de recouvrement de la TVA, madame le sénateur, si votre amendement tend bien à renforcer l’attractivité du territoire français en favorisant celles de nos entreprises qui sont actives dans le secteur de l’import-export, je voudrais rappeler qu’un certain nombre de mesures ont déjà été mises en œuvre en la matière, en particulier depuis juin 2005.

Depuis cette date, toute entreprise peut en effet, sur simple demande et sans condition, choisir de s’acquitter de la TVA dans le cadre d’une échéance mensuelle de paiement fixée au 25 du mois. Il lui est donc possible de déduire la TVA payée sur les produits d’importation entre le 15 et le 20 du mois, et de s’acquitter du reste de la TVA due le 25.

On ne peut donc pas dire que, pour l’écart dans la trésorerie de l’entreprise entre les sommes payées et les remboursements, le calendrier français ne soit pas attractif.

Par ailleurs, il me semble que le mécanisme actuel, qui repose, à l’image de ce qui se pratique dans des pays comme l’Espagne et l’Italie, sur l’intervention de deux services distincts de l’administration, est de nature à mieux prévenir et éliminer les risques de fraude.

Or, nous sommes actuellement confrontés à une nette recrudescence de la fraude à la TVA, notamment à travers la « fraude carrousel », qui coûte très cher à l’État. Par conséquent, tout système évitant le risque de fraude est préférable à une organisation qui aurait certes l’avantage de proposer un interlocuteur unique, mais qui ne permettrait pas des croisements susceptibles de détecter la fraude.

Au bénéfice de ces deux observations, je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Je voudrais suggérer à nos collègues du groupe de l’Union centriste de rester fidèles à l’orientation qu’ils proposent, mais de rechercher, peut-être d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2009, une formulation qui réponde au moins à l’objection ayant trait à la lutte contre la fraude. Des deux arguments avancés par Mme la ministre, celui-ci me paraît en effet le plus important.

Je ne remets toutefois pas en cause, bien entendu, l’assentiment de la commission au mécanisme proposé. Si une rédaction plus satisfaisante était proposée lors de la prochaine discussion budgétaire, on pourrait envisager de voter la mesure.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 717 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président, à la suite des explications fournies par Mme la ministre et de la suggestion de M. le rapporteur.

M. le président. L'amendement n° 717 est retiré.

Article additionnel après l'article 31 (priorité)
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Article 31 ter (priorité)

Article 31 bis  (priorité)

I. - L'article 1465 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « du volume des investissements et du nombre des emplois créés » sont remplacés par les mots : « soit du volume des investissements et du nombre des emplois créés, soit du seul volume des investissements » ;

2° La deuxième phrase du quatrième alinéa est supprimée ;

3° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par délibération, les collectivités territoriales peuvent fixer un prix de revient maximum des immobilisations exonérées, par emploi créé ou par investissement. »

II. - Le I s'applique aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2009.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.

Mme Nicole Bricq. Il s’agit, par cet article qui concerne la taxe professionnelle, de privilégier les investissements effectués par rapport à la création d’emplois dans les territoires.

Au départ, il était prévu que les collectivités ayant décidé une exonération reçoivent une compensation financière ; ce n’est plus le cas aujourd’hui. Cela nous paraît d’autant plus gênant que cela s’inscrit dans un mouvement général de désengagement de l’État.

En effet, l’exonération, laissée à la libre appréciation des collectivités locales, pèsera ainsi entièrement sur celles-ci, et accroîtra d’autant les tensions sur leurs finances.

Si cet article est voté, les collectivités seront inexorablement soumises à la pression des entreprises, puisqu’elles se trouveront en situation non plus de « pouvoir » accorder l’exonération, mais bien de devoir le faire, en raison de la mise en concurrence avec les autres territoires.

Le risque est donc fort de voir s’instaurer, au travers de cette mesure, des inégalités territoriales, alors même que le principe de péréquation est déjà loin d’être une réalité !

Après les mesures relatives à la taxe professionnelle déjà votées – je rappelle que la majorité parlementaire a plafonné la TP à 3,5 % en 2006 –, nous savons que Gouvernement entend modifier de nouveau prochainement – une énième fois ! – le système de la taxe professionnelle.

Le Président de la République lui-même a déclaré le 2 juin dernier que la réforme de la taxe professionnelle restait encore à « imaginer ».

Les rumeurs sont nombreuses. Nous avons bien noté que, le dimanche 29 juin, vous avez déclaré, madame la ministre, être en train d’examiner des hypothèses de baisse du plafonnement de la TP de 3,5 % à 3 %, voire d’exonération totale ou partielle pour les nouveaux investissements. (Mme la ministre fait des signes de dénégation.)

C’est donc très légitimement que nous nous demandons quelle sera l’étape ultime. S’agira-t-il de la suppression pure et simple de la taxe professionnelle, comme le réclame à cor et à cri le MEDEF ?

Je vous rappellerai que le plafonnement de la TP a déjà coûté aux collectivités plus de 600 millions d’euros. Ce n’est tout de même pas une paille ! C’est dans ce contexte où l’on entend faire vivre toujours plus les collectivités territoriales dans la contrainte qu’interviendra très bientôt le débat d’orientation budgétaire.

Le groupe socialiste est favorable aux mesures visant à accroître la compétitivité, mais pas si elles sont prises au détriment des collectivités. Ces dernières, je tiens à le rappeler, sont tout de même de gros investisseurs ! Tous les chiffres attestent qu’elles soutiennent très fortement l’investissement, et par là même la croissance.

Nous voterons donc contre cet article. Par ailleurs, madame la ministre, je souhaiterais que vous nous fournissiez quelques informations sur le travail que vous menez actuellement sur la réforme de la TP. Elles seraient les bienvenues devant les sénateurs, c’est-à-dire les représentants des collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Ce n’est ni le lieu ni le moment d’improviser un avant-projet visant à de profondes modifications en matière fiscale.

J’observerai tout de même que vous nous plongez en plein rêve, madame Bricq !

Tout à l’heure, vous parliez en effet, au sujet du territoire national, de « paradis fiscal », alors que je ne pense vraiment pas que ce soit le cas…

Quant aux mesures que nous proposons concernant les impatriés ou les cadres à compétence multi-juridictionnelle, elles n’ont rien à voir non plus avec ce qui se pratique dans les paradis fiscaux.

Maintenant, je crains que vous n’ayez rêvé, le dimanche 29 juin ! Je suis formelle : je n’ai jamais parlé d’un quelconque plafonnement à 3 % de la taxe professionnelle. Je serais vraiment curieuse que vous m’apportiez la preuve du contraire !

En ce qui concerne le présent article, il modifie l’article 1465 du code des impôts, qui existe depuis fort longtemps et qui ne présente aucun des risques que vous évoquez, puisque la disposition en question ne s’applique que sur délibération des collectivités territoriales ; elle ne revêt donc aucun caractère général et obligatoire et il n’est pas question de revenir sur ce principe.

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 2° du I de cet article :

2° Les deuxième et troisième phrases du quatrième alinéa sont supprimées ;

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est de rectification et de cohérence ; il n’appelle pas de remarque particulière.

Je voudrais en revanche rappeler à Mme Bricq que le présent article est en parfaite conformité avec la doctrine, constante sur la question, de la commission des finances.

Mme Nicole Bricq. En effet !

M. Philippe Marini, rapporteur. Comme vous l’avez dit, il faut une délibération des conseils compétents en la matière et il n’y a pas de compensation par l’État. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet article, que je n’entends pas modifier sur le fond.

La taxe professionnelle en soi, lato sensu, est un tout autre débat. Et, sur ce point, madame la ministre, je ne vous cacherai pas qu’une très grande inquiétude règne vraiment dans la Haute Assemblée à ce sujet, et sur toutes les travées.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. C’est vrai !

M. Philippe Marini, rapporteur. D’ici peu, nous aborderons le débat d’orientation budgétaire, puis la préparation de la loi de finances pour 2009.

Or, pour les finances locales comme pour d’autres secteurs d’activité publics, les choses vont être difficiles. Nous risquons en effet d’être confrontés – je crois que l’hypothèse est vraisemblable – à des normes d’évolution de la dépense assez contraignantes.

Par conséquent, on ne peut pas imaginer en plus une insécurité fiscale pour nos collectivités.

Mme Nicole Bricq. Eh oui ! Cela change sans arrêt !

M. Philippe Marini, rapporteur. Je le dis tout à fait calmement : ce n’est pas possible, car la situation deviendrait alors ingérable.

Cela a déjà été évoqué à maintes reprises au cours de ce débat, le développement économique dans son ensemble, notamment l’accueil des entreprises, repose sur les intercommunalités, dont le financement dépend largement de la taxe professionnelle unique.

Par conséquent, madame la ministre, gardons-nous d’ouvrir une telle boîte de Pandore pour 2009. Si je me suis permis de souligner une telle inquiétude, c’est pour qu’elle n’apparaisse pas comme étant l’apanage d’un seul « secteur » de l’hémicycle ! (Mme Nicole Bricq sourit. – Mme Bariza Khiari applaudit.)

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Belle clarification !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Favorable !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Permettez-moi tout d’abord de rectifier mon précédent propos. Madame la ministre, vous avez raison, ayant votre déclaration sous les yeux, je m’aperçois que j’ai mal lu vos propos. Voici exactement ce que vous avez indiqué : « La diminution de la taxe professionnelle par une exonération totale ou partielle des futurs investissements est une des pistes de réflexion. Il n’y a pas encore eu d’arbitrage. »

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Cela n’a tout de même rien à voir !

Mme Nicole Bricq. Je vous donne donc acte de cette déclaration, madame la ministre.

En outre, monsieur le rapporteur, il ne m’a pas échappé que cet article n’offrait qu’une possibilité aux communes et qu’elle était conforme à la doctrine de la commission des finances, du moins à celle de sa majorité, qui refuse toute compensation par l’État.

J’ai simplement fait remarquer que la concurrence inévitable entre les territoires ne manquera pas d’être utilisée comme un moyen de pression par les entreprises. Une telle possibilité risque bien, à terme, de devenir de facto une obligation. C’est la raison pour laquelle je crains que, avec cette disposition, on n’ouvre la porte à bien des dangers pour les finances des collectivités.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la lecture du rapport de la commission spéciale sur le présent projet de loi donne une idée assez précise des mesures prévues dans le cadre de cet article. Rappelons-le, ce dernier a été introduit à l’Assemblée nationale, à la suite de l’adoption d’un amendement présenté par Nicolas Forissier, rapporteur pour avis de la commission des finances.

Voici donc ce qu’indique la commission spéciale du Sénat : « [L’] Assemblée nationale a adopté le présent article additionnel, qui modifie l’article 1465 précité pour améliorer l’attractivité du dispositif d’exonération de TP en faveur des établissements situés en zone d’aide à finalité régionale. L’objet est de permettre aux collectivités territoriales d’attirer des grands groupes qui ne créent pas nécessairement des emplois immédiatement, mais réalisent des investissements lourds et participent au développement économique à long terme de la collectivité concernée. »

Elle précise ensuite : « Votre commission spéciale approuve les objectifs et modalités de ce dispositif, mais considère qu’il aurait vocation à figurer dans une loi de finances, qu’il est susceptible d’accroître les tensions sur les finances des collectivités territoriales et qu’il ne fait qu’ajouter une nouvelle modification à un régime de taxe professionnelle marqué depuis longtemps par le triple symptôme de la stratification, de la complexité et de l’insécurité juridique et fiscale. »

Pour notre part, nous ne voterons ni cet article 31 bis ni l’amendement de la commission spéciale.

Monsieur Marini, les dispositions de cet article trouveraient plutôt leur place en loi de finances et nécessiteraient pour le moins une expertise avant que d’être inscrites dans un droit fiscal qui est déjà, comme on vient de le constater, passablement mis en question.

La mise en œuvre de ce dispositif pour le moins discutable serait source de tensions entre collectivités locales, au motif qu’elles pourraient se battre entre elles pour obtenir que tel ou tel grand investisseur étranger vienne s’implanter sur leur territoire.

En outre, précisément parce qu’aucune compensation n’est prévue, il constitue tout de même une aide locale, particulièrement dérisoire au demeurant, au renforcement de la situation de groupes qui, entre nous soit dit, n’ont pas forcément besoin de cela pour venir s’installer chez nous.

Franchement, croyez-vous que la taxe professionnelle soit un obstacle à l’implantation d’Unilever, d’Exxon Mobil ou de Colgate-Palmolive sur notre territoire ? À l’évidence, non !

En revanche, ce qui est sûr, c’est que ces groupes, quand le besoin s’en fait sentir, au regard de leurs critères de rentabilité, savent très bien mettre en œuvre des plans sociaux.

C’est pourquoi nous ne voterons pas cet incroyable article 31 bis, ni l’amendement de la commission spéciale.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je rappelle au Sénat qu’en une heure nous n’avons examiné que six amendements !

M. Philippe Marini, rapporteur. Le braquet est insuffisant !

M. Alain Gournac. Il faut ralentir, monsieur le président ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. Gérard Longuet. Oui, cela va trop vite !

Mme Nicole Bricq. Dispensez-nous de vos remarques ! Nous n’avons pas protesté lorsque le Sénat a passé une heure à examiner les dispositions relatives aux pharmaciens !

M. le président. Je mets aux voix l'article 31 bis, modifié.

(L'article 31 bis est adopté.)

Article 31 bis (priorité)
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Articles additionnels après 31 ter (priorité)

Article 31 ter (priorité)

L’article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve des règlements communautaires, les dispositions du premier alinéa ne s’appliquent pas en matière d’assurance vieillesse aux salariés étrangers qui demandent, conjointement avec leur employeur établi en France ou, à défaut, avec leur entreprise d’accueil en France, à être exemptés d’affiliation pour ce risque, à condition :

« 1° De justifier par ailleurs d’une assurance vieillesse ;

« 2° De ne pas avoir été affiliés, au cours des dix années précédant la demande, à un régime français obligatoire d’assurance vieillesse, sauf pour des activités accessoires, de caractère saisonnier ou liées à leur présence en France pour y suivre des études, ou à un régime de sécurité sociale d’un État auxquels s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale ;

« 3° D’avoir été présents au moins six mois dans l’établissement ou l’entreprise établis hors de France où ils exerçaient leur activité professionnelle immédiatement avant la demande.

« L’exemption n’est accordée qu’une seule fois pour le même salarié pour une durée de trois ans. Celui-ci ne peut, pour la période couverte par cette exemption, avoir droit ou ouvrir droit à aucune prestation d’un régime français d’assurance vieillesse.

« À titre exceptionnel, le ministre chargé de la sécurité sociale peut accorder une prolongation de l’exemption pour une nouvelle période de trois ans ou octroyer le bénéfice de cette exemption lorsque n’est pas remplie la condition d’antériorité dans l’établissement ou l’entreprise fixée au 3°.

« Le non-respect des conditions d’exemption énoncées ci-dessus, dûment constaté par les agents visés à l’article L. 243-7, entraîne l’annulation de l’exemption et le versement, par l’employeur ou le responsable de l’entreprise d’accueil, à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales et aux autres organismes collecteurs concernés, d’une somme égale à une fois et demi le montant des contributions et cotisations qui auraient été dues si le salarié n’avait pas bénéficié de ladite exemption.

« Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions dérogatoires. »

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 474, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet article 31 ter est, si je puis dire, un sous-produit de l’article 31 relatif au statut fiscal des impatriés.

Il s’agit, en l’occurrence, de dispenser les cadres étrangers impatriés de contribuer au financement de la protection sociale, au motif qu’ils sont assurés sociaux par ailleurs et qu’ils disposent ainsi d’une protection sociale dans leur pays d’origine.

Le régime prévu par cet article est particulièrement intéressant à étudier, et la lecture des dispositions proposées suffit d’ailleurs à pointer les dangers qu’il recèle.

Dans l’absolu, un salarié venant d’un autre pays de l’Union européenne pourrait être employé en France par son employeur, aux mêmes conditions, en termes de prélèvements sociaux, que celles qui sont fixées dans son pays d’origine.

Sous certains aspects, c’est donc le système prévu par la fameuse directive Bolkestein qui trouverait à s’appliquer, avec tout ce que cela implique comme course au dumping social.

Ne serait-ce que pour parer à ce genre de risque, il importe de procéder à la suppression de cet article 31 ter, en cohérence, entre autres, avec celle de l’article 31 que nous avons proposée.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Longuet.

L’amendement n° 587 rectifié est ainsi libellé :

I. - Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots :

en matière d’assurance vieillesse

II. - Dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :

d’une assurance vieillesse

par les mots :

d’une couverture des risques sociaux pris en charge par l’employeur ou l’entreprise.

III. - Dans le quatrième alinéa et la deuxième phrase du sixième alinéa de cet article, remplacer les mots : 

d’assurance vieillesse

par les mots :

de sécurité sociale

IV. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

A. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’extension de la dispense d’affiliation au régime d’assurance vieillesse est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

B. - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 588 est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa de cet article, après le mot :

étrangers 

insérer les mots :

détachés au sens du 2° de l’article L. 1262-1 du code du travail

L’amendement n° 589 est ainsi libellé :

I. - Dans le quatrième alinéa de cet article, remplacer les mots : 

dix années

par les mots :

cinq années

II. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

... - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 590 rectifié est ainsi libellé :

I. - Dans le cinquième alinéa de cet article, remplacer les mots :

six mois

par les mots :

trois mois

II. - Rédiger comme suit le septième alinéa de cet article :

« Par dérogation à l’alinéa précédent, une prolongation de l’exemption peut être accordée par l’autorité administrative compétente pour une nouvelle période de trois ans.

III. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

A. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’assouplissement des conditions de l’exemption d’affiliation au régime d’assurance vieillesse est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

B. - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Gérard Longuet, pour présenter ces quatre amendements.

M. Gérard Longuet. Ces quatre amendements tirent leur justification de l’expérience des grands groupes français de taille internationale, qui s’efforcent de gérer pour leurs cadres, français ou non, une carrière à l’international, tout en s’efforçant de leur faire exercer, à un moment ou à un autre, des responsabilités sur notre territoire national.

C’est en quelque sorte une manière de préserver une certaine culture française dans des groupes à dimension mondiale dont le personnel provient de différents pays.

Bien entendu, je mets de côté le cas particulier des ressortissants de pays dans lesquels s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale.

Les dispositions de ces amendements concernent uniquement les salariés, français ou non, de groupes internationaux – en l’occurrence, je me fais le porte-parole des groupes français – qui ne ressortissent pas à de tels régimes.

Ainsi l’amendement n° 587 rectifié a-t-il pour objet d’élargir l’exonération prévue à l'ensemble des cotisations de sécurité sociale, et non plus seulement à l’assurance vieillesse, dès lors que la couverture des prestations d’assurance maladie est assurée par l’employeur dans un régime reconnu.

En effet, si le salarié rencontre une difficulté en France, il est couvert par son régime d’origine. C’est ce dernier, et non le régime français de sécurité sociale, qui le prendra en charge.

L’amendement n° 588 vise à limiter l’application des dispositions de l’article 31 ter aux étrangers détachés, au sens du 2° de l’article L. 1262-1 du code du travail, c'est-à-dire dans le cadre d’une mobilité à l’intérieur d’un même groupe. On peut certes discuter de la pertinence d’une telle proposition, mais mon objectif est d’éviter tout risque de dumping social, car certains salariés pourraient très bien être recrutés sur des considérations de pure opportunité, dans le but de « casser les prix » sur notre marché du travail national.

Par l’amendement n° 589, il s’agit de revenir sur la condition, justifiée par ailleurs, de non-immatriculation antérieure au régime français de sécurité sociale pendant une période dix années. Le réalisme me conduit à vous proposer de limiter cette exigence à cinq ans, dans la mesure où la mobilité des salariés, notamment des jeunes cadres, est beaucoup plus rapide. Si la disposition actuelle était maintenue, un jeune salarié qui reviendrait en France moins de dix ans après son départ ne pourrait bénéficier du régime des impatriés.

Dans le même esprit, l’amendement n° 590 rectifié est une mesure de coordination. Il est pour l’instant prévu que le salarié impatrié ait au moins six mois d’ancienneté dans le groupe pour le compte duquel il est impatrié en France. Je vous suggère de ramener cette antériorité à trois mois. C’est d’ailleurs celle qui est exigée par la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile – nous l’avons votée avec enthousiasme ! –, laquelle a effectivement prévu que l’attribution de la carte « salarié en mission » est subordonnée à une antériorité de trois mois.

Tel est le sens de ces quatre amendements, qui ont pour objet de faciliter la circulation des impatriés des grands groupes internationaux et, plus particulièrement, ceux de racines françaises, qui m’intéressent au premier chef.

M. le président. L’amendement n° 16, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. Compléter cet article par sept alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve des règlements communautaires, les dispositions du premier alinéa ne s’appliquent pas aux étrangers travailleurs non salariés au sens du livre VI du présent code qui demandent à être exemptés d’affiliation pour l’ensemble des risques, à condition :

« 1° De justifier par ailleurs d’une couverture des mêmes risques ;

« 2° De ne pas avoir été affiliés, au cours des dix années précédant la demande, à un régime français obligatoire de sécurité sociale, sauf pour des activités accessoires, de caractère saisonnier ou liées à leur présence en France pour y suivre des études, ou à un régime de sécurité sociale d’un État auquel s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale.

« L’exemption n’est accordée qu’une seule fois à une même personne pour une durée de trois ans. L’intéressé ne peut, pour la période couverte par cette exemption, avoir droit ou ouvrir droit à aucune prestation d’un régime français de sécurité sociale.

« À titre exceptionnel, le ministre chargé de la sécurité sociale peut accorder une prolongation de l’exemption pour une nouvelle période de trois ans.

« Le non-respect des conditions d’exemption énoncées ci-dessus entraîne l’annulation de l’exemption et le versement par l’intéressé aux organismes collecteurs concernés d’une somme égale à une fois et demi le montant des contributions et cotisations qui auraient été dues si le salarié n’avait pas bénéficié de ladite exemption.

« Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions dérogatoires. »

II. Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’exonération d’affiliation consentie aux étrangers travailleurs non salariés mentionnés au I est compensée à due concurrence par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d’une taxe additionnelle à ces mêmes droits.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission spéciale sur les amendements nos 474, 587 rectifié, 588, 589 et 590 rectifié.

M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 16 a un triple objet.

Il s’agit, d’abord, d’accorder aux travailleurs étrangers non salariés qui le demandent une exemption d’affiliation au système français de sécurité sociale pour l’ensemble des risques.

Il s’agit, ensuite, d’interdire aux intéressés d’avoir droit ou d’ouvrir droit à une quelconque prestation d’un régime français de sécurité sociale.

Il s’agit, enfin, de subordonner le bénéfice de l’exemption à l’existence d’une couverture des risques par ailleurs, pour se prémunir contre les conséquences possibles, en particulier pour les ayants droit, de l’imprévoyance ou de la légèreté éventuelle de certains impatriés.

En définitive, il s’agit d’un amendement de cohérence avec un vote émis tout à l’heure par le Sénat.

Par ailleurs, la commission spéciale est bien entendu défavorable à l’amendement n° 474 de suppression de l’article.

En revanche, sur l’amendement n° 587 rectifié, elle a de la sympathie pour l’analyse présentée…

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. C’est joliment dit !

M. Philippe Marini, rapporteur. … et souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.

Nous avons estimé que la mesure proposée au travers de l’amendement n° 588 était tout de même quelque peu réductrice, en ce sens qu’elle était vraiment ciblée sur la gestion des carrières des cadres des très grandes entreprises.

M. Gérard Longuet. C’est vrai !

M. Philippe Marini, rapporteur. Cela étant, le Gouvernement nous dira ce qu’il faut en penser.

En ce qui concerne l’amendement n° 589, nous nous en remettons bien volontiers à la sagesse du Sénat.

Enfin, s’agissant de l’amendement n° 590 rectifié, nous souhaiterions également entendre l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur l’amendement n° 474 de suppression de l’article.

Monsieur Longuet, par l’amendement n° 587 rectifié, vous souhaitez en réalité étendre l’exemption actuellement prévue, qui est limitée au risque vieillesse, à l'ensemble des autres risques, notamment ceux de court terme.

Le Gouvernement est défavorable à une telle exemption, et ce pour deux raisons.

D’abord, l’importance du manque à gagner s’accroît au fur et à mesure que s’étend le champ d’application de l’exemption. En l’espèce, en ce qui concerne le risque maladie, l’impact n’est vraiment pas négligeable.

Ensuite, et surtout, l’exonération au titre du risque vieillesse se justifie par le fait qu’il s’agit d’un risque de long terme. On peut donc supposer que, dans le cadre de déplacements d’un salarié d’un groupe dans plusieurs pays, ce risque se réalisera ailleurs que sur le territoire français. Il est par conséquent légitime de privilégier la cotisation au régime de retraite du pays d’origine et d’exonérer le salarié de celle qui serait exigible dans le pays d’accueil temporaire.

En revanche, il nous paraît plus logique que les risques de plus court terme puissent être aussi assurés dans le pays où réside et travaille le salarié au moment où ils peuvent se réaliser.

Pour cette raison, monsieur le sénateur, nous vous demandons de bien vouloir retirer l’amendement n° 587 rectifié ; à défaut, nous émettrions un avis défavorable.

Dans la mesure où les amendements nos 587 rectifié et 588 sont liés, nous émettons le même avis sur ce dernier. Là où vous proposez une restriction, nous préférons au contraire maintenir un champ d’application large. Nous souhaitons en effet que l’exemption puisse s’appliquer, d'une part, à tous les salariés susceptibles d’en bénéficier, et non pas aux seuls salariés détachés, et, d'autre part, pour la raison invoquée par M. le rapporteur, à tous les groupes, y compris les petits groupes, qui n’ont pas nécessairement mis en place une gestion prévisionnelle des carrières des cadres, notamment en termes de mobilité.

Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 589, qui vise à limiter à cinq années la durée d’absence d’affiliation au régime français afin de pouvoir bénéficier d’une dispense d’affiliation. La solution proposée nous paraît tout à fait appropriée dans une perspective d’harmonisation avec la plupart des dispositifs en matière de sécurité sociale internationale qui, bien souvent, se réfèrent à ces périodes de cinq années.

Je lève le gage, monsieur le président.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 589 rectifié.

Veuillez poursuivre, madame la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Sur l’amendement n° 590 rectifié, de même, le Gouvernement est favorable et lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 590 rectifié bis.

Veuillez poursuivre, madame la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Je rappelle que l’objet de l’amendement est de limiter à trois mois, au lieu de six dans la rédaction actuelle, la durée de présence dans l’entreprise étrangère exigée préalablement au détachement. Nous approuvons d’autant plus cette initiative qu’elle procède à une harmonisation avec un texte voté il y a quelques semaines.

J’en viens à l’amendement n° 16. Le Gouvernement sollicite son retrait. À défaut, l’avis serait défavorable pour des raisons qui nous ramènent au débat que nous avons eu sur l’exemption fiscale accordée aux non-salariés : cette disposition risque de favoriser les étrangers qui viendraient en France au détriment de non-salariés français ; je pense, en particulier, à des travailleurs indépendants qui se trouveraient très clairement défavorisés par rapport à des collègues.

Je crains aussi d’éventuels effets d’aubaine en matière tant fiscale que sociale. Nous aurions intérêt, à ce propos, à nous appuyer sur des études d’impact pour apprécier le manque à gagner potentiel pour nos finances publiques, car je crois véritablement qu’il y a un risque.

M. le président. Monsieur Longuet, maintenez-vous les amendements nos 587 rectifié et 588 ?

M. Gérard Longuet. J’ai entendu le Gouvernement. Je vous remercie, madame la ministre, de votre soutien aux amendements nos 589 rectifié et 590 rectifié bis, qui sont naturellement maintenus.

Nous sommes dans un régime encore expérimental. Je retire volontiers les amendements nos 587 rectifié et 588, partant du principe que l’expérience nous dira où se trouve le juste équilibre, notamment ce qui concerne le détachement.

M. le président. Les amendements nos 587 rectifié et 588 sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 474.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 589 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 590 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur Marini, l'amendement n° 16 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Pour reprendre les arguments avancés tout à l’heure à propos de l’application aux non-salariés de ce régime des impatriés et par souci de cohérence avec le vote que nous avons émis, il convient, me semble-t-il, de voter également cet amendement.

Cela étant, les interventions de Mme la ministre et de plusieurs collègues m’inspirent une question : ce régime des impatriés coûte-t-il quelque chose ? Le sujet mérite que nous nous y arrêtions un instant.

M. Gérard Longuet. C’est tout le problème des niches !

Mme Nicole Bricq. Bonne question !

M. Philippe Marini, rapporteur. C’est une question de raisonnement. Cela coûte-t-il quelque chose et, si oui, par rapport à quoi cela coûte-t-il quelque chose ?

Finalement, c’est toute la problématique de l’article 40, telle qu’elle est fréquemment invoquée dans notre assemblée. Si l’on considère que ce régime s’adresse à des personnes qui n’ont pas été résidents fiscaux français pendant les cinq dernières années, c’est de la matière fiscale nouvelle. Nous sommes donc en présence d’une matière fiscale qui n’a pas encore été assujettie à l’impôt en France. Dès lors, quelle que soit la fiscalité applicable sur ladite matière, il y a gain et non pas perte.

J’attire votre attention sur le fait que je raisonne en termes économiques. Or la réalité économique est, mes chers collègues, la seule chose qui devrait nous guider, parce que c’est la vraie richesse, celle qu’on trouve à l’arrivée. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Et je pense, chère Nicole Bricq, que vous ne pouvez pas être en désaccord avec mon raisonnement, car vous connaissez la réalité des entreprises.

Mme Nicole Bricq. Que c’est astucieux de votre part ! Quel talent !

M. Philippe Marini, rapporteur. Même si vous ne faites payer qu’un euro, le jour où elle arrive, à une personne qui ne payait rien parce qu’elle n’était pas là, vous gagnez un euro ! C’est un cas d’école que j’évoque : plus les impatriés ont des moyens à investir sur notre territoire, plus ils vont rapporter, alors qu’ils ne rapportaient rien !

On peut aussi choisir une approche juridique et administrative consistant à dire que, si l’on était dans le droit commun, cette personne paierait tant. Mais, comme cela fait une somme, cette personne ne viendrait pas. Donc, le droit commun ne lui serait pas appliqué. Néanmoins, si, contre toute attente et toute vraisemblance, cette personne venait, eh bien, elle paierait l’impôt aux conditions de droit commun !

En d’autres termes, si un richissime étranger ayant des biens dans le monde entier vient en France et choisit de payer l’ISF pour les biens qu’il possède dans le monde entier sur leur valeur vénale, on applique le droit commun. Si on l’en dispense, on perd juridiquement de l’argent. Mais si on l’exonère complètement de l’ISF et s’il crée des richesses en faisant travailler des gens autour de lui, ces richesses vont engendrer des bases fiscales. Donc, juridiquement, on sera perdant par rapport à quelque chose d’absolument virtuel et qui n’a aucune chance de se produire et, économiquement, on sera gagnant par rapport à une réalité !

Je vous livre, chers collègues, ces quelques éléments d’appréciation pour vous suggérer de bien vouloir voter l’amendement de la commission spéciale. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Bricq. Bravo, monsieur le rapporteur !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. On critique souvent nos grandes écoles, mais là, j’ai vraiment reconnu tout l’art des élèves sortis de l’ENA ! Encore bravo ! (Sourires.)

M. Gérard Longuet. Je reconnais plutôt l’enseignement des jésuites ! (Nouveaux sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur. J’étais chez les marianistes !

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. L’amendement de notre collègue rapporteur Philippe Marini prévoit une compensation ; j’appelle simplement l’attention du rapporteur général Philippe Marini, et celle du Gouvernement, sur le fait qu’il est de plus en plus difficile de compenser les exonérations sociales.

M. Alain Vasselle. Sous le bénéfice de cette observation, je ne vois pas d’inconvénient à la création d’une niche sociale supplémentaire.

M. Alain Vasselle. Donc, madame la ministre, si cet amendement est adopté malgré vos réserves, il faudra veiller à la compensation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 31 ter, modifié.

(L'article 31 ter est adopté.)

Article 31 ter (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 36 (priorité)

Articles additionnels après 31 ter (priorité)

M. le président. L'amendement n° 321 rectifié, présenté par MM. Laffitte et Charasse, est ainsi libellé :

Après l'article 31 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article 150-0 D ter du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - 1. L'imposition de la plus-value retirée de la cession à titre onéreux des titres mentionnés aux articles L. 225-177, L. 225-179 et L. 225-180 du code de commerce est réduite d'un abattement à due concurrence, dans la limite de 15 %, des versements effectués par le redevable au titre de la participation au financement d'une structure publique ou privée d'incubation d'entreprises, de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières.

 « 2. La société bénéficiaire des versements mentionnée au 1 doit satisfaire aux conditions mentionnées au deuxième alinéa du 1 du I de l'article 885-0 V bis. Elle doit en outre satisfaire l'une des conditions suivantes :

« a) Avoir réalisé, au cours des trois exercices précédents, des dépenses cumulées de recherche visées aux a à f du II de l'article 244 quater B d'un montant au moins égal au tiers du chiffre d'affaires le plus élevé réalisé au cours de ces trois exercices ;

« b) Justifier de la création de produits, procédés ou techniques dont le caractère innovant et les perspectives de développement économique sont reconnus, ainsi que le besoin de financement correspondant. Cette appréciation est effectuée pour une période de trois ans par un organisme ou une agence pour l'aide à l'innovation désigné conjointement par le ministre en charge des finances et le ministre en charge de la recherche.

« 3.  Les versements ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au 1 sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.

« 4. Le premier alinéa du 1 du I de l'article 885-0 V bis est applicable aux versements effectués par les redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune au titre du 1.

« 5. La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au 1 ne peut donner lieu à l'une des réductions d'impôt sur le revenu prévues à l'article 199 terdecies-0-A.

« 6. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect de celles du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. »

II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 322, présenté par M. Laffitte, est ainsi libellé :

Après l'article 31 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Afin de favoriser l'attractivité du territoire, des « zones d'innovation privilégiée » permettant d'expérimenter des simplifications ou des améliorations dans le domaine administratif, financier et fiscal sont créées par décret en Conseil d'État. Ce décret précise le type de mesures, la durée de l'expérimentation et les modalités d'évaluation des effets constatés.

II. Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement n’est pas soutenu

(M. Adrien Gouteyron remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

CHAPITRE III (priorité)

Développer l'économie de l'immatériel

Articles additionnels après 31 ter (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article additionnel après l'article 36 (priorité)

Article 36 (priorité)

I. - L'article L. 80 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa du 3°, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Pour l'examen des demandes mentionnées au premier alinéa, l'administration des impôts sollicite l'avis des services relevant du ministre chargé de la recherche ou d'organismes chargés de soutenir l'innovation dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État lorsque l'appréciation du caractère scientifique et technique du projet de dépenses de recherche présenté par l'entreprise le nécessite.

« L'avis est notifié au contribuable et à l'administration des impôts. Lorsqu'il est favorable, celle-ci ne peut rejeter la demande du contribuable que pour un motif tiré de ce qu'une autre des conditions mentionnées à l'article 244 quater B du code général des impôts n'est pas remplie.

« Les personnes consultées en application du deuxième alinéa du 3° sont tenues au secret professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 103 du présent code. » ;

2° Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis Lorsque les services relevant du ministre chargé de la recherche ou un organisme chargé de soutenir l'innovation figurant sur la liste mentionnée au 3° n'ont pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui leur a demandé, dans les mêmes conditions que celles prévues au 2°, si son projet de dépenses de recherche présente un caractère scientifique et technique le rendant éligible au bénéfice des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts.

« La prise de position des services relevant du ministre chargé de la recherche ou de l'organisme chargé de soutenir l'innovation est notifiée au contribuable et à l'administration des impôts. Lorsque cette prise de position est favorable ou en l'absence de réponse dans un délai de trois mois, l'administration des impôts ne peut rejeter la demande du contribuable que pour un motif tiré de ce qu'une autre des conditions mentionnées à l'article 244 quater B du code général des impôts n'est pas remplie.

« Les personnes consultées en application des dispositions du premier alinéa sont tenues au secret professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 103.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent 3° bis ; ».

II. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2009.

Toutefois, son 2° entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2010.

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 481, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Cet article 36, comme bien d’autres dans ce texte, contribue à donner à ce projet de loi de modernisation de l’économie l’allure d’un projet de loi de finances rectificative de milieu d’année.

C’est ainsi que l’on peut appréhender les termes de ces articles à vocation fiscale qui donnent une claire indication sur l’ordre des priorités du Gouvernement : tout faire pour réduire la taxation des entreprises, c’est-à-dire, en fait, la récupération sociale de la valeur ajoutée créée par le travail, quitte, dans un certain nombre de cas, à fermer les yeux sur des formes de fraude ou d’évasion fiscales pour le moins avérées.

Nous sommes dans cette situation vis-à-vis de l’article 36. Il s’agit, en effet, d’instaurer, en matière de crédit d’impôt recherche, une forme de rescrit, comme c’est déjà le cas pour un certain nombre d’éléments des relations entre l’administration fiscale et les entreprises.

Une telle démarche prolonge évidemment la réforme du crédit d’impôt recherche votée lors de la discussion de la loi de finances pour 2008, réforme qui va conduire à un très sensible accroissement du coût de la dépense fiscale.

Nous avions eu l’occasion de dire ce que nous en pensions au moment où le texte était venu en débat. Avec l’article 36, nous allons au bout de la logique. Non seulement on ne fera pas l’inventaire de la réalité de la situation, mais, ensuite, on présumera justifiée toute demande d’éligibilité de n’importe quelle entreprise au bénéfice du dispositif par tacite acceptation de l’administration dans des délais naturellement réduits.

Cette démarche, plus que discutable, complétée d’ailleurs par celle de la commission qui préconise le recours à l’instruction des dossiers par OSEO, tend à favoriser l’externalisation du contrôle des dossiers des entreprises hors l’administration fiscale.

Une telle initiative, sans qu’il soit dans notre esprit de mettre en question la qualité des personnes œuvrant au sein d’OSEO, conduit immanquablement à mettre en cause l’existence d’un véritable contrôle fiscal, neutre et objectif, sur la mobilisation de la dépense fiscale comme outil des politiques publiques.

Qu’on le veuille ou non, ce que l’on souhaite ainsi faire, c’est rendre légal et possible, par le rescrit, ce qui, il y a peu, aurait conduit au redressement et au rappel des droits. En clair, à la place de la modernisation de l’économie, nous aurons la validation de la fraude, le crédit d’impôt recherche n’étant pas le dispositif fiscal le moins sujet à contentieux.

M. le président. L'amendement n° 740, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

1°A. - Dans le premier alinéa du 3°, après le mot : « répondu » sont insérés les mots : « de manière motivée » ;

Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je souhaiterais présenter en même temps l’amendement n° 739.

M. le président. Je suis en effet saisi d’un amendement n° 739, également présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :

Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, après les mots :

en l'absence de réponse

insérer les mots :

motivée

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter ces deux amendements.

Mme Anne-Marie Payet. L’amendement n° 740 vise à instaurer à l’égard de l’administration fiscale une obligation de motivation des réponses aux demandes des contribuables portant sur l’éligibilité de leur projet de dépenses de recherche au dispositif du crédit d’impôt recherche, à l’instar des dispositions prévues au 4° de l’article L.80 B pour la qualification de jeune entreprise innovante.

L’amendement n° 739 a le même objet.

M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa du 1° du I de cet article :

« Pour l'examen des demandes mentionnées au premier alinéa, l'administration des impôts sollicite l'avis d'un organisme chargé de soutenir l'innovation désigné par décret en Conseil d'État lorsque l'appréciation du caractère scientifique et technique du projet de dépenses de recherche présenté par l'entreprise le nécessite.

II. - En conséquence, modifier comme suit le 2° du même I :

A. - Dans le deuxième alinéa, remplacer les mots :

les services relevant du ministre chargé de la recherche ou un organisme chargé de soutenir l'innovation figurant sur la liste mentionnée au 3° n'ont pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui leur

par les mots :

l'organisme chargé de soutenir l'innovation mentionné au 3° n'a pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui lui

B. - Dans le troisième alinéa, supprimer les mots :

des services relevant du ministre chargé de la recherche ou

L'amendement n° 1046, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter ces deux amendements.

M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 17 rectifié vise à réserver à un seul organisme, c’est-à-dire au groupe OSEO, la délégation de l’administration fiscale ou la saisine alternative par le contribuable afin d’assurer l’unicité de la doctrine en la matière et la sécurité juridique du rescrit.

L’amendement n° 1046 est un amendement de précision.

M. le président. L'amendement n° 369, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin et Angels, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le premier alinéa du I de l'article 244 quater B du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les grandes entreprises, au sens communautaire du terme, au-delà de 50 millions d'euros de dépenses exposées, le crédit d'impôt sera accordé si le projet associe des petites et moyennes entreprises au sens communautaire du terme ou des organismes de recherche. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je veux bien considérer cet amendement comme un amendement d’appel dans la mesure où nous l’avions déjà déposé en loi de finances rectificative, quand vous avez modifié en profondeur le crédit impôt recherche.

Nous avions exprimé, à l’époque, notre crainte de voir le dispositif profiter d’abord aux grandes entreprises ; cette inquiétude n’est pas dissipée. Je rappelle que, dans le rapport écrit, le crédit d’impôt est évalué à un montant variant entre 3,5 milliards et 4,5 milliards d’euros en année pleine. C’est énorme ! Je l’ai dit hier soir, c’est l’équivalent de l’ISF. Raison de plus pour maintenir cet impôt, d’ailleurs…

Le texte qui nous est soumis prétend renforcer l’attractivité et la compétitivité. Or nous n’avons toujours pas de réaction par rapport à la situation que nous avons signalée il y a six mois, celle des grandes entreprises, qui seraient les premières bénéficiaires –  à hauteur de 80 %, me dit-on – de ce crédit d’impôt recherche, et qui délocalisent actuellement leurs centres de recherche.

J’attire votre attention sur ce point essentiel : que font les virtuels- et heureux !-destinataires du CIR ? Ils délocalisent leurs centres de recherche ! Et cela ne les empêcherait pas de bénéficier tout de même du crédit d’impôt, alors que les PME, qui, elles, ne délocalisent pas, n’y auraient pas droit ?

De surcroît, encore selon certaines rumeurs, madame la ministre, vos services examineraient une nouvelle modification du crédit d’impôt recherche afin de réintégrer les avances remboursables.

Je dirai ultérieurement ce que je pense du rescrit concernant le crédit d’impôt recherche. Pour ce qui concerne cet amendement, je suis tout à fait prête à le retirer si vous nous donnez des informations chiffrées. Si vous n’êtes pas en mesure de le faire aujourd'hui, je souhaiterais que vous vous engagiez à nous les transmettre lors de l’examen de la prochaine loi de finances.

S’il apparaît que mes réserves sont fondées, je le dis à nos collègues, il vous faudra comprendre que ce texte n’est pas fait pour renforcer la compétitivité des PME et qu’il est destiné aux grandes entreprises qui délocalisent leurs centres de recherches !

M. le président. L'amendement n° 743, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Supprimer le second alinéa du II de cet article.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Depuis la loi de finances pour 2008, l'absence de réponse de l'administration fiscale dans le délai de trois mois suivant une demande d'une entreprise vaut accord tacite sur le principe de l'admission des dépenses dans le calcul du crédit d’impôt recherche et fait donc obstacle à la remise en cause de l'avantage fiscal qui serait fondée sur une appréciation différente lors d'un contrôle ultérieur.

Le 2° du paragraphe I de l’article 36 permet aux redevables de s'adresser directement aux services du ministère de la recherche ou à un organisme chargé de l'innovation pour demander si leur projet de dépenses de recherche est éligible au crédit d'impôt recherche.

Cette mesure n'a de sens et d'efficacité que si un délai est imposé pour la réponse. Le report de l'entrée en vigueur de cette disposition à 2010 rend la mesure inutile jusqu'à cette date.

En effet, le contribuable qui adresse une demande doit être en mesure de déterminer rapidement si son projet présente un caractère scientifique et technique qui le rend éligible au crédit d'impôt recherche. Le délai de réponse de trois mois doit donc impérativement être exigé dès le 1er janvier 2009, comme le reste des dispositions de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 481 visant à supprimer l’article 36, nos collègues du groupe CRC ne seront pas surpris que j’exprime un avis négatif. (Sourires.)

L’amendement n° 739 vise à contraindre l’administration de la recherche et les organismes habilités à traiter les demandes de rescrit, en pratique OSEO, à motiver toute réponse négative. La commission est sensible à cette demande. Elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement et s’en remet à la sagesse du Sénat.

La commission a adopté la même position sur l’amendement n° 740.

J’en viens à l’amendement n° 369. La commission y est défavorable dans la mesure où il tend à revenir de manière significative sur la réforme du crédit d’impôt recherche décidée dans la loi de finances pour 2008.

Cette réforme a été qualifiée de robuste ; ses objectifs sont clairs. Elle peut laisser sur le côté telle ou telle catégorie d’entreprises, mais ses effets économiques me paraissent indéniables. C’est un dispositif beaucoup plus puissant que le précédent, et nous l’avions soutenu. Il serait sans doute malencontreux de le modifier, du moins si rapidement.

La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 743. Je crains toutefois qu’il ne soit nécessaire de le retirer, car le compte rendu des débats à l’Assemblée nationale montre que le report de délai résulte de la situation technique et matérielle d’OSEO, qui ne pourra pas répondre sous trois mois dès l’année 2009. Peut-être nous le confirmerez-vous, madame la ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 481 de suppression.

Il est favorable à l’amendement n° 740 présenté par Mme Payet.

Le Gouvernement est également favorable à l’amendement n° 17 rectifié de la commission, qui a pour objet de supprimer la saisine du ministère de la recherche au bénéfice du guichet unique.

L’amendement rédactionnel n° 1046 a reçu un avis favorable.

Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 739 présenté par Mme Payet. Celui-ci instaure une obligation de motivation, ce qui nous paraît tout à fait approprié.

En ce qui concerne l’amendement d’appel n° 369, madame Bricq, je voudrais vous apporter quelques précisions.

Pour l’instant, environ 1,4 milliard d’euros ont été engagés au titre du crédit d’impôt recherche, ce qui correspondra probablement au coût du crédit d’impôt recherche sur l’exercice. En année pleine, notre estimation, sans doute quelque peu conservatrice, s’établit à 2,7 milliards d’euros.

Je serais très heureuse que cette estimation soit largement dépassée. Cela signifierait que les entreprises françaises ont enfin à cœur d’atteindre l’objectif que se sont fixé les pays de l’Union européenne à Lisbonne, à savoir de consacrer au moins 3 % de leur produit intérieur brut à la recherche. La France n’en est pas encore là, puisqu’elle n’y consacre aujourd'hui qu’un peu plus de 2 % de son PIB.

Les entreprises privées doivent pouvoir contribuer, dans des conditions auxquelles nous nous associons, à cet effort de recherche et développement, qui est seul de nature à nous permettre de triompher d’un certain nombre de vicissitudes auxquelles sont confrontées nos entreprises dans la concurrence internationale.

En ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, nous avons précisément établi des taux majorés, les deux premières années, respectivement de 50 % et de 40 %, particulièrement pour les PME de croissance, dont nous pensons qu’elles doivent absolument, elles aussi, être incitées à participer à cet effort.

Je suis pour ma part très hostile à la modification du mécanisme en place. Toutes les entreprises, grandes, petites, moyennes, ont clamé haut et fort qu’elles souhaitaient le mécanisme le plus simple et le plus sécurisé possible. Elles veulent savoir si les dépenses qu’elles engagent en recherche et développement sont ou non éligibles, grâce justement à l’obtention de rescrits ou d’ « opinions » de l’administration.

En ajoutant des plafonds, des restrictions, des contraintes, des conditions, nous allons retomber dans les errements dont nous sommes coutumiers consistant, lorsqu’un mécanisme est simple et qu’il fonctionne, à en réduire progressivement la portée, au bénéfice de je ne sais quel principe dont on n’a pas encore la certitude.

Alors j’entends ici ou là, j’ai lu sous la plume de tel ou tel, que les grands seraient privilégiés au détriment des petits… Laissons le mécanisme s’appliquer dans la vie économique, puis faisons des audits. Nous avons procédé ainsi pour les pôles de compétitivité. Quatorze d’entre eux ont été mis en garde et risquent de perdre leur label s’ils ne réalisent pas un effort considérable en termes tout à la fois de gouvernance et d’organisation pour rassembler les PME autour des projets dans l’année qui vient.

De la même manière, il faut laisser le crédit d’impôt recherche, dont chacun s’accorde à penser que c’est un bon mécanisme - les étrangers vantent ses mérites pour implanter en France des centres de recherche et développement – jouer son rôle sans l’alourdir ou le modifier à ce stade.

L’amendement n° 743 présenté par Mme Payet vise à ramener la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2009 et non plus au 1er janvier 2010, comme l’avait prévu l’Assemblée nationale, avec l’accord du Gouvernement.

Nous mettons en place un nouveau mécanisme qui va permettre à OSEO d’instruire l’ensemble du dossier. Pour ce faire, les personnels doivent être formés, organisés dans une structure dont la gouvernance permette leur indépendance totale. Nous avons donc besoin d’un délai, qui ne sera certainement pas suffisant si la date d’application est fixée au 1er janvier 2009.

Au bénéfice de ces explications, je vous demanderai d’avoir l’obligeance de retirer cet amendement, madame Payet. Si nous essayons de brûler les étapes, je crains que le mécanisme ne fonctionne pas bien et que les entreprises soient déçues.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 743 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Comte tenu des déclarations de Mme la ministre, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 743 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 481.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 740.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote sur l'amendement n° 17 rectifié.

Mme Anne-Marie Payet. Je voterai l’amendement présenté par la commission spéciale, mais je souhaiterais attirer l’attention sur un point particulier.

M. Marini souhaite que l’administration des impôts sollicite l’avis d’un seul organisme chargé de soutenir l’innovation et désigné par décret en Conseil d’État. Il a cité OSEO, mais il faut savoir que cet organisme n’est pas présent dans certains départements d’outre-mer, comme à la Réunion, où c’est l’Agence française de développement qui exerce les missions confiées à OSEO. J’aimerais que l’on en tienne compte et que Mme la ministre nous rassure à ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Mme Payet nous fait remarquer que le groupe OSEO, à qui est confié l’essentiel de la compétence dans le domaine du rescrit destiné à valider l’inscription d’une dépense au sens du crédit d’impôt recherche, n’a pas de réelle capacité d’intervention dans les départements d’outre-mer, plus précisément à la Réunion.

Dans l’amendement n° 17 rectifié, qui a reçu l’avis favorable du Gouvernement, il est bien indiqué « l’organisme chargé de soutenir l’innovation mentionné au 3° ». Je me demande donc si l’organisme compétent pour la Réunion et l’outre-mer est ou non visé dans cette formulation. Peut-être Mme la ministre va-t-elle nous en donner confirmation. Comme il s’agit d’une lecture par référence, les choses ne sont jamais très simples.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. En l’état de la rédaction de l’amendement n° 17 rectifié, le mécanisme peut fonctionner dans la mesure où, je vous en donne l’assurance, le Gouvernement sera très attentif, dans la rédaction du décret, à ce que sur tous les territoires, y compris ceux où OSEO ne serait pas actif, un organisme désigné puisse instruire les demandes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’amendement n° 1046, monsieur le rapporteur, j’appelle votre attention sur le fait que, en l’état actuel de leur rédaction, les amendements nos 1046 et 739 sont incompatibles.

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Le Gouvernement et la commission ayant exprimé un avis favorable sur l’amendement de Christian Gaudin et des membres du groupe de l’Union centriste-UDF, il faudrait à mon sens, pour que l’amendement n° 1046 de la commission ne fasse pas tomber l’amendement n° 739, que ce dernier soit rectifié comme suit : « Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée : “Cette réponse doit être motivée.” »

En procédant ainsi, nous rendons les deux amendements techniquement compatibles.

M. le président. Madame Payet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?

Mme Anne-Marie Payet. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 739 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :

Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

Cette réponse doit être motivée.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1046.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 739 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Madame Bricq, l’amendement n° 369 est-il maintenu ?

Mme Nicole Bricq. J’ai indiqué tout à l’heure qu’il s’agissait d’un amendement d’appel destiné à obtenir des réponses de la part du Gouvernement.

Mme la ministre a précisé que 1,4 milliard d’euros avaient été engagés au titre du crédit d’impôt recherche au 1er juillet. Elle a également donné l’estimation en année pleine, même si je remarque que M. le rapporteur n’est pas d’accord avec les chiffres annoncés par ses services. En outre, elle s’est engagée, si j’ai bien compris, à commander des audits qui permettront enfin d’établir le ratio d’utilisation par type d’entreprise ; nous saurons ainsi si cette réforme profite plus aux grandes entreprises qu’aux petites, ce qui est l’idée communément admise. La réforme étant récente, je comprends que l’on ne puisse pas encore exactement le déterminer.

Madame la ministre, vous comprendrez notre souci de disposer de chiffres exacts pour mieux appréhender la réalité de ce dispositif. Vous ne serez donc pas surprise de voir réapparaître un amendement semblable au moment de l’examen de la loi de finances ou de la loi de finances rectificative visant à connaître le bilan de ce nouveau dispositif.

En attendant, je retire le présent amendement.

M. le président. L’amendement n° 369 est retiré.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'article.

Mme Nathalie Goulet. Puisque l’on parle de chiffres, je voudrais appeler l’attention de la Haute Assemblée sur l’importance de la recherche.

Tout le monde ici connaît l’attachement de Pierre Laffitte à ce secteur. Grâce au précédent dispositif, notamment au système des business angels, une holding a été créée le 28 mai à Sophia-Antipolis – il s’agit là d’une réalité et non de prospectives – qui a pu investir 5 millions d’euros dans quinze sociétés innovantes avant le 15 juin de cette année. Il existe donc des dispositifs qui fonctionnent.

C’est pourquoi M. Laffitte s’interroge, en ce qui concerne les procédures facilitant la recherche et l’innovation, sur l’opportunité de créer dans un avenir proche des zones d’innovation privilégiées sur le modèle des pôles d’attractivité.

Les dispositifs d’innovation-recherche actuels donnent d’excellents résultats. Il faudra donc les suivre et favoriser leur développement.

M. le président. Je mets aux voix l'article 36, modifié.

(L'article 36 est adopté.)

(M. Roland du Luart remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

Article 36 (priorité)
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Article 36 bis (priorité)

Article additionnel après l'article 36 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 616, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et MM. Türk, Darniche, J.L. Dupont, Détraigne, Laffitte et P. Dominati, est ainsi libellé :

Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le III de l'article 244 quater B du code général des impôts est ainsi rédigé :

« III. - Lorsqu'une avance remboursable en cas de succès consentie par un établissement public ou l'une de ses filiales est reçue par une petite ou moyenne entreprise autonome au sens de la recommandation 2003/361/CE de la Commission européenne, celle-ci n'est pas déduite de la base du crédit d'impôt recherche déterminée au titre de l'exercice au cours duquel elle est reçue. Ces avances remboursables publiques seront déduites des bases du crédit d'impôt recherche établi au titre de l'exercice au cours duquel elles sont définitivement acquises, ou au titre de l'exercice suivant celui du constat d'échec du projet de recherche financé. Il en est de même des sommes reçues par les organismes ou experts désignés au d et au d bis du II, pour le calcul de leur propre crédit d'impôt. Ce report de déduction de l'avance remboursable est subordonné à la souscription par l'entreprise d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître, pour chaque avance remboursable, les renseignements nécessaires à l'ajustement ultérieur du crédit d'impôt recherche. »

II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Mme la ministre a opportunément rappelé l’évolution du crédit d’impôt recherche. Les chiffres dont j’ai connaissance sont même beaucoup plus importants que ceux qu’elle a cités. Nous ne pouvons donc que nous réjouir d’un tel succès.

Pour autant, on constate que ce système bénéficie d’abord aux entreprises les plus importantes et pose un problème de trésorerie aux sociétés plus petites, puisque les avances remboursables perçues par ces dernières sont déduites de l’assiette des dépenses éligibles. Je propose donc de réintégrer ces avances dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche afin d’éviter d’affaiblir ces PME et de leur permettre au contraire de se développer. Le coût serait extrêmement faible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement vise à réintégrer les dépenses ayant bénéficié d’avances remboursables dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche.

Les avances remboursables ont été exclues de l’assiette du crédit d’impôt recherche lors de la réforme de l’an dernier, à la suite d’un rapport de la Cour des comptes. Tant qu’elles ne sont pas remboursées, ces avances sont assimilables à des subventions.

Compte tenu de la doctrine que nous appliquons en la matière depuis longtemps, il me semble difficile de les incorporer à l’assiette du crédit d’impôt recherche. Il s’agirait en effet sinon d’une « aide sur une aide ».

Cela étant, ce n’est qu’une analyse rapide. Je pense que celle du Gouvernement aura plus de valeur que les modestes travaux de la commission.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Quelle humilité, mon cher collègue ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur, je ne pense pas que l’analyse du Gouvernement ait d’autre valeur que celle de la répétition. (Nouveaux sourires.)

En effet, je confirme votre analyse, ces avances remboursables tant qu’elles n’ont pas été remboursées ont la nature de subventions publiques. Dans ces conditions, il nous paraît légitime qu’elles ne soient pas réintégrées dans l’assiette permettant de calculer le crédit d’impôt recherche. Cela évite de cumuler une aide d’État et un mécanisme fortement incitatif, qui est également une forme de soutien, quoi que destiné spécifiquement à l’innovation et qui est à ce titre parfaitement légitime.

Le Gouvernement vous invite donc, monsieur Adnot, à retirer votre amendement. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Adnot, l’amendement n° 616 est-il maintenu ?

M. Philippe Adnot. Il y a la théorie et il y a la pratique, madame la ministre.

Avant qu’il soit modifié, le crédit d’impôt était calculé tel que je le propose. Mais la réforme aura permis de dépenser beaucoup d’argent en faveur des grandes entreprises et au détriment des plus petites, qui ont vu leur trésorerie se réduire.

Je veux répondre à l’objection de la Cour des comptes : il est possible à l’administration fiscale d’apprécier, le moment venu, le remboursement ou le non-remboursement des avances en mettant en place un mécanisme de suivi des avances remboursables reçues par les entreprises éligibles au crédit d’impôt recherche. De tels mécanismes existent déjà en matière d’intégration fiscale.

Je demande à la commission et au Gouvernement de tenir compte du fait que la réforme qui a été instituée augmente considérablement la dépense et a pour effet de réduire la trésorerie des entreprises créatrices de la richesse de demain.

Cette mesure très importante n’aurait pas un coût très élevé. Je le répète, d’une part, c’est le régime qui prévalait avant la réforme et, d’autre part, il est parfaitement possible de répondre aux objections de la Cour des comptes.

Je maintiens donc mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 616.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 36 (priorité)
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Article 37 A (priorité)

Article 36 bis (priorité)

I. - L'accréditation est l'attestation de la compétence des organismes qui effectuent des activités d'évaluation de la conformité. Afin de garantir l'impartialité de l'accréditation, il est créé une instance nationale d'accréditation, seule habilitée à délivrer les certificats d'accréditation en France. Un décret en Conseil d'État désigne cette instance et fixe ses missions.

II. - Le chapitre V du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est ainsi modifié :

1° L'intitulé de la section 5 est ainsi rédigé : « Certification des services et des produits autres qu'agricoles, forestiers, alimentaires ou de la mer » ;

2° L'article L. 115-27 est ainsi rédigé :

« Art. L. 115-27. - Constitue une certification de produit ou de service soumise aux dispositions de la présente section l'activité par laquelle un organisme, distinct du fabricant, de l'importateur, du vendeur, du prestataire ou du client, atteste qu'un produit, un service ou une combinaison de produits et de services est conforme à des caractéristiques décrites dans un référentiel de certification.

« Le référentiel de certification est un document technique définissant les caractéristiques que doit présenter un produit, un service ou une combinaison de produits et de services, et les modalités de contrôle de la conformité à ces caractéristiques. L'élaboration du référentiel de certification incombe à l'organisme certificateur qui recueille le point de vue des parties intéressées. » ;

3° L'article L. 115-28 est ainsi rédigé :

« Art. L. 115-28. - Peuvent seuls procéder à la certification de produits ou de services les organismes qui bénéficient d'une accréditation délivrée par l'instance nationale d'accréditation, ou l'instance nationale d'accréditation d'un autre État membre de l'Union européenne, membre de la coopération européenne pour l'accréditation et ayant signé les accords de reconnaissance mutuelle multilatéraux couvrant la certification considérée.

« Un organisme non encore accrédité pour la certification considérée peut, dans des conditions définies par décret, effectuer des certifications, sous réserve d'avoir déposé une demande d'accréditation.

« Toute référence à la certification dans la publicité, l'étiquetage ou la présentation de tout produit ou service, ainsi que sur les documents commerciaux qui s'y rapportent doit être accompagnée d'informations claires permettant au consommateur ou à l'utilisateur d'avoir facilement accès aux caractéristiques certifiées. La consultation des référentiels de certification s'effectue soit gratuitement auprès de l'organisme certificateur, soit par la délivrance d'exemplaires aux frais du demandeur.

« Le signe distinctif, qui, le cas échéant, accompagne ou matérialise la certification, est déposé comme marque collective de certification, conformément à la législation sur les marques de fabrique, de commerce et de service. » ;

4° Le 1° de l'article L. 115-29 est ainsi rédigé :

« 1° À la certification des produits agricoles, forestiers, alimentaires ou de la mer ; »

5° Le dernier alinéa de l'article L. 115-31 est ainsi rédigé :

« Ces agents disposent des pouvoirs prévus au livre II du présent code. » ;

6° L'article L. 115-32 est ainsi rédigé :

« Art. L. 115-32. - Les modalités d'application des articles L. 115-27 et L. 115-28 sont fixées par décret en Conseil d'État. »

III. - Le II entre en vigueur le 1er janvier 2009. – (Adopté.)

CHAPITRE IV (priorité)

Attirer les financements privés  pour des opérations d'intérêt général

Article 36 bis (priorité)
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Article 37 B (priorité)

Article 37 A (priorité)

Dans le premier alinéa de l'article L. 719-12 du code de l'éducation, après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « et les établissements publics de coopération scientifique ». – (Adopté.)

Article 37 A (priorité)
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Article additionnel avant l'article 37 (priorité)

Article 37 B (priorité)

L'article L. 719-13 du code de l'éducation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel et les établissements publics de coopération scientifique peuvent créer, en vue de la réalisation d'une ou plusieurs œuvres ou activités d'intérêt général conformes aux missions du service public de l'enseignement supérieur visées à l'article L. 123-3, une ou plusieurs personnes morales à but non lucratif dénommée «fondation partenariale». Ils peuvent créer cette fondation seuls ou avec toutes personnes morales et physiques, françaises ou étrangères. » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :

« L'autorisation administrative prévue à l'article 19-1 de cette même loi est délivrée par le recteur de l'académie dans laquelle chacune de ces fondations partenariales a fixé son siège. Le recteur assure également la publication de cette autorisation. Ces fondations partenariales bénéficient de plein droit de toutes les prérogatives reconnues aux fondations universitaires créées en application de l'article L. 719-12 du présent code. » ;

3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de dissolution de la fondation partenariale, les ressources non employées et la dotation, si celle-ci a été constituée et n'a pas fait l'objet de l'affectation prévue à l'article 19-6 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 précitée, sont attribuées par le liquidateur à l'une ou à plusieurs de la ou des fondations universitaires ou partenariales créées par l'établissement. Dans le cas où l'établissement ne dispose d'aucune fondation autre que celle en voie de dissolution, les ressources non employées et la dotation lui sont directement attribuées. » ;

4° À la fin du troisième alinéa, les mots : « et le mécénat », sont remplacés par les mots : «, le mécénat et les produits de l'appel à la générosité publique ».

M. le président. L'amendement n° 615 rectifié bis, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et MM. A. Dupont et Laffitte, est ainsi libellé :

I. - Dans la première phrase du second alinéa du 1° de cet article, après le mot : 

professionnel

insérer les mots :

, les établissements publics à caractère scientifique et technologique

II. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Des organismes tels que le CNRS, l’INRIA ou l’INRA, qui ne sont juridiquement ni des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ni des établissements publics de coopération scientifique, se voient privés de la faculté de créer des fondations partenariales. Le présent amendement a pour objet de leur permettre de bénéficier de cette faculté. Je vous remercie d’avance de votre soutien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Il s’agit d’un excellent amendement, qui vise à permettre aux établissements publics à caractère scientifique et technologique, tels que le CNRS, l’INSERM ou l’INRA, pour ne citer que ceux-là, de créer des fondations partenariales, entités issues de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités votée il y a un an.

L’article 37 B du projet de loi ouvre déjà la possibilité aux pôles de recherche et d’enseignement supérieur de créer de telles fondations. L’amendement de Philippe Adnot complète opportunément le dispositif. La commission a donc émis un avis très favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement partage avec d’autant plus de plaisir l’avis de la commission qu’il s’agit d’un très bon amendement, qui vise à élargir le champ d’application des fondations partenariales en y faisant entrer des organismes tels que l’INSERM, le CNRS ou l’INRA.

J’ajoute au passage que ces fondations rencontrent un vrai succès. On peut donc se féliciter de la mesure qui a été votée l’année dernière. J’en parlais d’ailleurs récemment avec le responsable de l’excellente TSE, Toulouse School of Economics, qui me disait avoir levé plus de 33 millions d’euros de fonds pour soutenir la recherche en sciences économiques.

Par conséquent, je lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 615 rectifié ter.

Vous voilà comblé, monsieur Adnot ! (Sourires.)

La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Personne ne sera étonné de m’entendre dire que notre groupe ne partage pas l’enthousiasme du Gouvernement et de la commission.

L’air de ne pas y toucher, l’amendement n° 615 désormais rectifié ter consacre un dispositif spécifique de financement de la recherche publique qui offre l’opportunité à l’État de se dégager de cette fonction essentielle.

Les organismes visés par l’amendement sont connus. Même s’ils souffrent de sérieuses réductions budgétaires, ils continuent essentiellement à être financés par des crédits d’État au travers des subventions que nous votons en loi de finances. Leur ouvrir la possibilité de créer des fondations accueillant d’autres fonds que des fonds publics n’est pas une garantie de durabilité de leur mission de recherche.

Nous pensons juste, dans un premier temps, qu’il ne s’agit que d’offrir à l’État, dès la loi de finances pour 2009, l’occasion de se désengager, au motif de l’existence de ce dispositif.

Pour le coup, je rappelle notre opposition de principe à la privatisation du financement de la recherche, qui conduira à la privatisation de la recherche tout court avec, en corollaire, l’abandon progressif et programmé de l’ensemble des travaux n’ayant pas d’application concrète et immédiate.

C’est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 615 rectifié ter.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 37 B, modifié.

(L'article 37 B est adopté.)

Article 37 B (priorité)
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Article 37 (priorité)

Article additionnel avant l'article 37 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 614, présenté par M. Adnot et Mme Desmarescaux, est ainsi libellé :

Avant l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Au-delà du plafond mentionné au I de l'article 885-0 V bis A et dans la limite de 10 000 euros, le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % du montant des dons en numéraire et dons en pleine propriété de titres de sociétés admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger effectués au profit des organismes de recherche ci-après limitativement énumérés :

« 1° Les associations reconnues d'utilité publique et les fondations ayant pour objet la recherche ;

« 2° Les établissements publics d'enseignement scientifique ;

« 3° L'Agence nationale pour la recherche ;

« 4° Les établissements publics à caractère scientifique et technologique ;

« 5° Les groupements d'intérêt scientifique recherche. »

II. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Nous avons mis en évidence tout l’intérêt qu’un contribuable à l’ISF aurait de placer une partie de sa cotisation dans le renforcement des fonds propres des entreprises. Une autre possibilité lui est offerte, celle de financer les fondations. Or, si la situation reste en l’état, aucun contribuable à l’ISF n’ira placer cet argent dans les fondations : dans un cas, il y a une possibilité de retour sur investissement dans les cinq ans et, dans l’autre, il n’y a aucun retour !

L’objet de mon amendement est de créer une tranche uniquement affectée aux fondations, qu’elles soient universitaires, partenariales ou autres, afin d’approvisionner ces fondations et d’accélérer la recherche, l’innovation et donc de développer l’économie de notre pays.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Philippe Adnot montre texte après texte que son intérêt pour ces sujets ne se dément pas. Il a raison, car l’utilisation des fonds dont il s’agit peut bénéficier à l’essor de la recherche, au développement de structures d’intérêt général telles que des fondations ou encore aux petites et moyennes entreprises.

La question qui toutefois me semble se poser est de savoir, madame la ministre, si un dispositif aussi récent que celui issu de la loi d’août 2007 doit être dès maintenant complété, retaillé, transformé.

Ne faudrait-il pas que nous disposions rapidement d’un point d’étape de son application ?

Le 15 juin est une date encore toute récente. Il serait bon que vous puissiez transmettre à nos commissions des éléments d’information sur le succès réellement rencontré par le dispositif, à mon avis excellent, de la loi de 2007, afin que nous en mesurions exactement les proportions avant d’envisager d’apporter des adjonctions ou des modifications à ce régime.

La commission s’en remet donc à l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Adnot, votre proposition vise à diriger une partie supplémentaire de l’ISF dans la limite de 10 000 euros vers un secteur particulier d’activité, déjà prévu par les textes, qui est celui de la recherche.

Or le dispositif prévoit l’affectation à hauteur de 75 % de l’investissement à des fins de contribution de l’ISF pour trois secteurs d’activité : la recherche, l’enseignement supérieur et les organismes d’insertion.

Créer cette tranche supplémentaire au seul bénéfice de la recherche encouragerait le fléchage de ces sommes vers celle-ci au détriment des deux autres secteurs.

De ce point de vue, nous souhaitons maintenir la parité entre les trois secteurs d’activité et ne pas les dissocier.

Par ailleurs, le dispositif est déjà fortement incitatif.

Je suis d’accord avec M. le rapporteur : évaluons d’abord le succès de la mesure. Le 15 juin est tout juste derrière nous ; le 15 septembre est la date limite à laquelle les contribuables pourront justifier du document attestant leur contribution à l’augmentation du capital ou à la souscription de tel ou tel fonds pour documenter la mesure d’exonération dont ils se prévalent.

Il faut, comme M.  Marini le propose, tirer les enseignements du mécanisme pour en mesurer le succès avant de le modifier d’une quelconque manière et de prendre le risque de le complexifier.

Pour toutes ces raisons, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

M. le président. Philippe Adnot, l'amendement n° 614 est-il maintenu ?

M. Philippe Adnot. Madame la ministre, votre explication laisse à penser que l’adoption de cet amendement, diminuerait la part qui reviendrait aux autres secteurs.

C’est inexact puisque je propose de créer une tranche supplémentaire. Elle ne vient donc rien retirer aux autres secteurs et offre bien au contraire la possibilité de flécher les sommes dont il s’agit en direction de la recherche.

Évidemment, il est plus intéressant de placer son argent dans des secteurs qui permettront un retour financier au bout de cinq ans.

Imaginez, mes chers collègues, que vous ayez le choix de placer de l’argent soit dans les fonds propres d’une entreprise, avec la possibilité de le retrouver, assorti d’une éventuelle évolution positive, le tout net de droits, soit dans une fondation, avec le risque de ne rien en retirer du tout. Nous savons tous d’avance où ira le placement !

Quoi qu’il en soit, j’accepte de retirer mon amendement, madame la ministre, mais je vous prendrai au mot : si nous constatons au 15 septembre qu’il n’y a eu aucun placement de l’ISF dans les fondations, je déposerai un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi de finances, si du moins je suis réélu sénateur ! (Sourires.)

Mme Odette Terrade. C’est du lobbying !

M. Philippe Marini, rapporteur. Tous nos vœux vous accompagnent !

M. Philippe Adnot. Dans ce cas, vous devez me promettre, madame la ministre, que ma proposition recevra un avis favorable de la part du Gouvernement. Je vous en remercie d’avance et, pour l’heure, je retire l’amendement.

M. le président. L'amendement n° 614 est retiré.

Article additionnel avant l'article 37 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article additionnel après l’article 37 (priorité)

Article 37 (priorité)

I. - Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif qui reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable et utilise les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une œuvre ou d'une mission d'intérêt général ou les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif dans l'accomplissement de ses œuvres et de ses missions d'intérêt général.

Le fonds de dotation est créé par une ou plusieurs personnes physiques ou morales pour une durée déterminée ou indéterminée.

II. - Le fonds de dotation est déclaré à la préfecture du département dans le ressort duquel il a son siège social. Cette déclaration est assortie du dépôt de ses statuts.

Le fonds de dotation jouit de la personnalité morale à compter de la date de publication au Journal officiel de la déclaration faite à la préfecture.

Les modifications des statuts du fonds sont déclarées et rendues publiques selon les mêmes modalités ; elles ne sont opposables aux tiers qu'à compter de leur publication.

Toute personne a droit de prendre connaissance, sans déplacement, des statuts du fonds de dotation et peut s'en faire délivrer, à ses frais, une copie ou un extrait.

III. - Le fonds de dotation est constitué par les dotations en capital qui lui sont apportées auxquelles s'ajoutent les dons et legs qui lui sont consentis. L'article 910 du code civil n'est pas applicable à ces libéralités.

Le ou les fondateurs peuvent apporter une dotation initiale au fonds.

Aucun fond public, de quelque nature qu'il soit, ne peut être versé à un fonds de dotation. Il peut être dérogé à cette interdiction, à titre exceptionnel, pour une œuvre ou un programme d'actions déterminé, au regard de son importance ou de sa particularité. Les dérogations sont accordées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et du budget.

Les ressources du fonds sont constituées des revenus de ses dotations, des produits des activités autorisées par les statuts et des produits des rétributions pour service rendu.

Le fonds peut faire appel à la générosité publique après autorisation administrative. Les dons issus de la générosité publique peuvent être joints à la dotation en capital du fonds de dotation.

Le fonds de dotation dispose librement de ses ressources dans la limite de son objet social.

Il ne peut disposer des dotations en capital dont il bénéficie ni les consommer et ne peut utiliser que les revenus issus de celles-ci.

Les modalités de gestion financière du fonds de dotation sont fixées par décret en Conseil d'État.

IV. - Un legs peut être fait au profit d'un fonds de dotation qui n'existe pas au jour de l'ouverture de la succession sous la condition qu'il acquière la personnalité morale dans l'année suivant l'ouverture de celle-ci. Dans ce cas, la personnalité morale du fonds de dotation rétroagit au jour de l'ouverture de la succession.

À défaut de désignation par le testateur des personnes chargées de constituer le fonds de dotation, il est procédé à cette constitution par une fondation reconnue d'utilité publique, un fonds de dotation, ou une association reconnue d'utilité publique. Pour l'accomplissement des formalités de constitution du fonds, les personnes chargées de cette mission ou le fonds de dotation désigné à cet effet ont la saisine sur les meubles et immeubles légués. Ils disposent à leur égard d'un pouvoir d'administration à moins que le testateur ne leur ait conféré des pouvoirs plus étendus.

V. - Le fonds de dotation est administré par un conseil d'administration qui comprend au minimum trois membres nommés, la première fois, par le ou les fondateurs.

Les statuts déterminent la composition ainsi que les conditions de nomination et de renouvellement du conseil d'administration.

VI. - Le fonds de dotation établit chaque année des comptes qui comprennent au moins un bilan et un compte de résultat. Ces comptes sont publiés au plus tard dans un délai de six mois suivant l'expiration de l'exercice. Le fonds nomme au moins un commissaire aux comptes et un suppléant, choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 822-1 du code de commerce, dès lors que le montant total de ses ressources dépasse 10 000 € en fin d'exercice.

Les peines prévues par l'article L. 242-8 du code de commerce sont applicables au président et aux membres du conseil d'administration du fonds de dotation qui ne produisent pas, chaque année, des comptes dans les conditions prévues à l'alinéa précédent. Les dispositions des articles L. 820-4 de ce code leur sont également applicables.

Le commissaire aux comptes doit appeler l'attention du président et des membres du conseil d'administration du fonds de dotation sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'activité qu'il a relevé au cours de sa mission. Il peut demander au conseil d'administration d'en délibérer ; il assiste alors à cette délibération, y présente ses observations et répond aux questions qui lui sont posées. Si le commissaire aux comptes constate que les dispositions relatives à la tenue des comptes ne sont pas observées ou que la continuité de l'activité est compromise par des irrégularités, il établit un rapport spécial qu'il adresse à l'autorité administrative.

VII. - L'autorité administrative s'assure de la régularité du fonctionnement du fonds de dotation. À cette fin, elle peut se faire communiquer tous documents et procéder à toutes investigations utiles.

Le fonds de dotation adresse chaque année à l'autorité administrative un rapport d'activité auquel sont joints le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels.

Si l'autorité administrative constate des dysfonctionnements graves affectant la réalisation de l'objet du fonds de dotation, elle peut, après mise en demeure non suivie d'effet, décider, par un acte motivé qui fait l'objet d'une publication au Journal officiel, de suspendre l'activité du fonds pendant une durée de six mois au plus ou, lorsque la mission d'intérêt général n'est plus assurée, de saisir l'autorité judiciaire aux fins de sa dissolution.

Les modalités d'application du présent VII sont fixées par décret en Conseil d'État.

VIII. - La dissolution du fonds de dotation peut être statutaire ou volontaire. Elle peut également être judiciaire, notamment dans le cas prévu au troisième alinéa du VII. Elle fait l'objet de la publication prévue au même alinéa.

Il est procédé à la liquidation dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, à l'initiative du liquidateur désigné par l'autorité judiciaire.

À l'issue de la liquidation du fonds, l'ensemble de son actif net est transféré à un autre fonds de dotation ou à une fondation reconnue d'utilité publique.

Un décret en Conseil d'État prévoit les conditions d'application du présent VIII et, notamment, les limites dans lesquelles un fonds de dotation à durée déterminée peut utiliser sa dotation à l'expiration du délai prévu pour la réalisation de son objet.

IX. - Après le 6° de l'article L. 562-2-1 du code monétaire et financier, il est inséré un 7° ainsi rédigé :

« 7° La constitution ou la gestion de fonds de dotation. »

X. - Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 1 de l'article 200 est ainsi modifié :

a) Après le f, il est inséré un g ainsi rédigé :

« g) De fonds de dotation :

« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au b ;

« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux à f ou à la Fondation du patrimoine. Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;

b) Dans le dernier alinéa, le mot : « septième » est remplacé par le mot : « huitième » ;

2° Le premier alinéa du 1 bis de l'article 206 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « fondations d'entreprise », sont insérés les mots : «, les fonds de dotation » ;

b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« Sont réputées lucratives les activités de gestion et de capitalisation, par les fonds de dotation, de dons, droits et legs dont les fruits sont versés à des organismes publics ayant une activité exclusivement lucrative ou à des organismes autres que ceux mentionnés au présent alinéa. » ;

3° Dans le premier alinéa du 5 de l'article 206, après les mots : « autre disposition », sont insérés les mots : «, à l'exception des fondations reconnues d'utilité publique et des fonds de dotation, » ;

4° Le III de l'article 219 bis est abrogé ;

5° Après le f du 1 de l'article 238 bis, il est inséré un g ainsi rédigé :

« g) De fonds de dotation :

« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au a ;

« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux a à e bis du présent 1, au 4 ou à la Fondation du patrimoine. Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;

6° L'article 1740 A est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'amende prévue au premier alinéa s'applique également en cas de délivrance irrégulière de l'attestation mentionnée à la seconde phrase du 2° du g du 1 de l'article 200 et à la seconde phrase du 2° du g du 1 de l'article 238 bis. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 865, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le I de cet article :

I. - Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif qui reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable et utilise les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une œuvre ou d'une mission d'intérêt général menée par des organismes publics ou privés d'enseignement, hospitaliers, culturels, de santé ou de recherche, des fondations reconnues d'utilité publique et des associations reconnues d'utilité publique, et ou les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif mentionnée au présent alinéa dans l'accomplissement de ses missions d'intérêt général.

Le fonds de dotation est créé par une ou plusieurs personnes physiques ou morales pour une durée déterminée ou indéterminée.

Cet amendement n’est pas soutenu.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Je ne peux pas reprendre formellement cet amendement puisque la commission spéciale n’y a pas été favorable.

Néanmoins, je souhaite relayer notre collègue Adrien Gouteyron et me faire l’écho devant vous, madame le ministre, des questions qu’il escomptait poser lui-même au Gouvernement. Les fondations françaises se sont effectivement inquiétées de la coexistence de la fondation classique « à la française » et du fonds de dotation.

Cette inquiétude s’est exprimée au travers de documents qui ont été adressés à plusieurs d’entre nous. Adrien Gouteyron, à juste titre, y a été sensible. Il en résulte donc les amendements nos 865 à 868.

Même si ces amendements ne sont pas soutenus, je souhaite, au nom de la commission spéciale, madame le ministre, qu’il vous soit possible de répondre à leur auteur.

À mon sens, le fonds de dotation est un dispositif nouveau qui devrait permettre de susciter de nouvelles initiatives, lesquelles n’auraient probablement pas pu naître sous le régime juridique antérieur, compte tenu de ses rigidités.

Il me semble, mais c’est un avis personnel, que la coexistence des fonds de dotation et des fondations, au sens classique du terme, doit pouvoir être envisagée sans risque particulier pour ces dernières.

En tout état de cause, il serait utile, madame la ministre, que vous puissiez apporter quelques éléments d’information en réponse à la démarche de notre collègue Adrien Gouteyron.

M. le président. L'amendement n° 370, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin et Angels, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du I de cet article par un membre de phrase ainsi rédigé :

, notamment pour soutenir des organismes d'intérêt général ayant un caractère social, humanitaire, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment pour financer l'achat d'objets ou d'œuvres d'art destinés à rejoindre les collections d'un musée de France accessibles au public, ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. L’amendement que nous proposons vise à orienter les fonds de dotation vers le soutien à des organismes d’intérêt général ayant un caractère social, humanitaire ou culturel.

J’ai pris bonne note, en commission, monsieur le rapporteur, de votre remarque : tous les organismes à caractère cultuel seront exclus du dispositif.

D’une façon générale, les financements privés bénéficient en priorité aux établissements les plus attractifs et, le plus souvent, déjà les plus richement dotés : cette situation ne peut qu’entraîner des déséquilibres entre les établissements, mais aussi entre les territoires.

Par ailleurs, ces financements peuvent inciter à un désengagement de l’État ou à une substitution partielle des subventions publiques, le tout au détriment des missions d’intérêt général.

Afin de limiter ces risques, l’amendement tend à orienter les fonds de dotation au soutien d’organismes ayant plus particulièrement un caractère social, humanitaire ou culturel.

En effet, d’une façon générale, l’introduction d’un mécanisme de financement privé déroge à notre modèle de financement et de prise en charge des missions d’intérêt général qui repose habituellement sur les ressources fiscales, l’État et les collectivités territoriales décidant seuls de ce qui relève du service public.

La logique de la capitalisation et l’association inévitable des donateurs à l’utilisation des fonds dégagés devraient sans doute conduire à de nouveaux modes de détermination du bien public, avec toutes les dérives que l’on peut craindre.

Nous vous proposons donc, au travers de cet amendement, d’essayer d’orienter autant que possible les fonds de dotation vers des organismes à caractère social, humanitaire ou culturel.

M. le président. L'amendement n° 1006, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du I de cet article par les mots :

en France ou à l'étranger

La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Il s’agit simplement, par cet amendement, d’obtenir une précision du Gouvernement, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements en discussion commune ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Madame la ministre, l’amendement n° 370 a conduit à évoquer une question en effet très significative, et j’appelle, à la suite de Mme Khiari, votre attention sur ce point.

Les fonds de dotation ne doivent pas être un réceptacle pour une action militante, idéologique, théologique, cultuelle. C’est un souci qui est exprimé. Je crois qu’il est bon de veiller à ce que de telles dérives ne puissent pas avoir lieu sur notre territoire.

En ce qui concerne l’amendement lui-même, sa rédaction ne me paraît pas vraiment de nature à atteindre les objectifs visés, notamment parce qu’il utilise beaucoup le terme « notamment ». (Sourires.) Par conséquent, je n’ai pas le sentiment qu’elle soit pleinement efficace.

Toutefois, le fait d’avoir, grâce à cet amendement, posé la question d’éventuelles dérives enrichira notre débat.

Je suppose que, lorsque Mme la ministre vous aura répondu, vous serez en mesure, madame Khiari, de retirer votre amendement.

Quant à Joëlle Garriaud-Maylam, elle appelle l’attention sur un point tout à fait important.

Selon notre lecture, le texte ne limitant pas explicitement le champ d’intervention des fonds de dotation à la France, il serait possible, madame Garriaud-Maylam, que vous ayez d’ores et déjà satisfaction. Encore faut-il que cela soit confirmé.

En toute hypothèse, il conviendrait de veiller à ce que les avantages fiscaux consentis ne profitent qu’à des missions réellement effectuées sur le territoire français.

Cet amendement, là aussi, me semble de nature à permettre des clarifications utiles. Lorsque le Gouvernement se sera exprimé, peut-être pourrez-vous également retirer votre amendement, madame Garriaud-Maylam ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur, vous avez attiré l’attention du Gouvernement sur l’amendement n° 865. Il s’agira pour moi non pas de donner un avis, mais de répondre à son auteur.

M. Gouteyron soulève la question de l’utilisation des dotations telles qu’elles sont définies ici, à savoir très clairement par rapport à l’intérêt général.

Or l’intérêt général est une notion jurisprudentielle elle-même très clairement définie par les tribunaux, et qui exclut l’objet purement cultuel.

Néanmoins, il faut en être bien conscient, un organisme à caractère cultuel, mais visant un objectif qui, lui, remplirait les conditions de l’intérêt général et répondrait à ses critères, ne serait pas exclu du dispositif des fonds de dotation.

Un tel organisme pourrait donc être éligible au dispositif s’il entrait dans le cadre du champ d’application du fonds de dotation tel que nous le définissons ici.

M. Adrien Gouteyron était également soucieux des risques de détournements éventuels.

Les détournements sont inhérents, et nous le savons tous, à toute structure juridique.

En l’espèce, dans la mesure où les fonds de dotation sont encadrés et font l’objet d’une surveillance spécifique, non seulement par les commissaires aux comptes, mais aussi par l’autorité administrative et, lorsqu’ils font appel à la générosité publique, par la Cour des comptes, nous pouvons penser que les risques de détournement sont bien circonscrits par ces différents modes de contrôle.

J’espère, monsieur le rapporteur, que ces réponses pourront satisfaire M. Adrien Gouteyron, que vous avez relayé.

Sur l’amendement n° 370, qui vise à orienter les fonds de dotation vers le soutien à des organismes d’intérêt général ayant un caractère social, humanitaire ou culturel, je souligne que ces trois aspects sont inclus dans l’objet même des fonds de dotation. Toutefois, il ne me paraît pas souhaitable de restreindre les fonds de dotation à ces seuls éléments, puisqu’il faut également inclure l’enseignement, la recherche ou encore la santé.

L’attractivité des fonds de dotation subsiste pour tous les domaines d’activité et aucun de ceux qui sont mentionnés dans votre amendement n’est exclu, madame Khiari.

Pour cette raison, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’émettrais un avis défavorable.

Madame Garriaud-Maylam, votre amendement n° 1006 vise à préciser que l’action des fonds de dotation n’est pas strictement limitée au territoire national. Comme toute association, fondation, établissement public ou entreprise commerciale, un fonds de dotation qui est constitué en France, qui est donc une entité juridique française, peut parfaitement prolonger son action au-delà de notre territoire. Il peut exercer son action à l’étranger ou, au contraire, décider de limiter son activité au territoire français. Mais cela relèvera de la définition de l’objet social tel que le fonds de dotation le constituera et ce sera propre à chacun des organismes concernés.

Donc, sous le bénéfice de ces explications qui, je l’espère, vous auront éclairée sur l’activité hors des frontières des fonds de dotation - possible si les fondateurs le décident, restreinte si les fondateurs en décident autrement -, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Madame Khiari, l'amendement n° 370 est-il maintenu ?

Mme Bariza Khiari. Dans la mesure où, s’agissant de ces fonds de dotation, Mme la ministre vient de nous préciser que les domaines visés par l’amendement étaient déjà couverts, je le retire, monsieur le président.

Je reconnais effectivement, monsieur Marini, que la rédaction aurait mérité d’être plus rigoureuse.

M. le président. L'amendement n° 370 est retiré.

Madame Garriaud-Maylam, l'amendement n° 1006 est-il maintenu ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je remercie Mme le ministre de ses précisions, qui sont extrêmement intéressantes.

Nous avions en effet de véritables interrogations quant à l’application possible de ces dispositions en dehors de nos frontières. Comme vous le savez, nous avons de très importants besoins. Je ne citerai qu’un exemple, celui des lycées français à l’étranger, qui ont besoin d’être aidés dans un certain nombre de pays.

Donc, à partir du moment où vous m’affirmez que ces fonds peuvent être utilisés à l’étranger, je retire bien volontiers mon amendement en vous renouvelant mes remerciements. (M. Christian Cointat applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 1006 est retiré.

L'amendement n° 866, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le premier alinéa du III de cet article :

Le fonds est constitué par les dotations en capital qui lui sont apportées auxquelles s'ajoutent les donations et legs qui lui sont consentis et qui sont assimilées aux dotations en capital. Les dispositions de l'article 910 du code civil sont applicables à ces libéralités.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Je suis saisi de deux amendements présentés par Mme N. Goulet.

L'amendement n° 304 est ainsi libellé :

Compléter la première phrase du cinquième alinéa du III de cet article par les mots :

dont les modalités sont fixées par décret

L'amendement n° 305 est ainsi libellé :

Après la première phrase du cinquième alinéa du III de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

Tout refus devra être motivé.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter ces deux amendements.

Mme Nathalie Goulet. Dans l’état du projet de loi, les modalités selon lesquelles l’autorisation administrative ouvre le droit au fonds de dotation de faire appel à la générosité publique me semblent un peu vagues. Il me paraît donc utile de compléter l’article 37 du projet de loi en précisant que les modalités d’application seront fixées par décret.

L’amendement n° 305 me semble tout aussi important. En précisant que « tout refus devra être motivé », il est dans la droite ligne des dispositions adoptées par notre Haute Assemblée depuis le début de l’examen de ce texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 304 et 305 ?

M. Philippe Marini, rapporteur. L’objet de l’amendement n° 304 est de prévoir qu’un décret définira les modalités selon lesquelles une autorisation administrative ouvre le droit au fonds de dotation de faire appel à la générosité publique. En effet, selon notre collègue Nathalie Goulet, les dispositions du projet de loi seraient trop vagues. Peut-être un décret serait-il utile. Je suggère à l’auteur de cet amendement de s’en remettre, comme la commission, à l’avis du Gouvernement.

L’amendement n° 305 prévoit que l’autorité administrative doit motiver tout refus d’accorder une autorisation à un fonds de dotation de faire appel à la générosité publique.

Cette obligation de motivation semble aller dans le sens d’une bonne gouvernance et favoriser la transparence. La commission y est donc plutôt favorable, mais elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement, à chaque fois qu’on lui propose d’intervenir par décret, incline à émettre un avis favorable. C’est donc le cas pour cet amendement n° 304, madame Goulet, qui est effectivement opportun.

En revanche, dans l’amendement n° 305, vous souhaitez que le refus soit nécessairement motivé. Cette proposition me paraît superfétatoire puisque, de toute façon, la décision entre dans le champ de la loi du 11 juillet 1979 qui impose déjà une telle obligation.

Donc, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 304 et souhaite le retrait de l’amendement n° 305.

M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° 305 est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Non, je vais le retirer, monsieur le président.

Toutefois, je souhaite revenir un instant sur l’amendement n° 370, qui a été retiré par Mme Khiari et qui concernait le domaine cultuel.

Inévitablement, dans un certain nombre de départements ruraux, des fonds de dotation se voueront à l’entretien du patrimoine cultuel ; on pense aux églises de campagne, qui soulèvent de très importants problèmes de financement. L’intérêt général dans ces cas-là sera cultuel parce que la mission de ce fonds sera liée non pas à l’activité religieuse en tant que telle mais aux bâtiments dédiés au culte, qu’il s’agira par exemple d’entretenir. Il est donc important que le décret soit précis sur ce point.

Cela dit, je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 305 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 304.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 867, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa du III de cet article, remplacer le mot :

peuvent

par le mot :

doivent

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 19, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'avant-dernier alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Toutefois, par dérogation aux dispositions du premier alinéa du I et de l'alinéa précédent, les statuts peuvent fixer les conditions dans lesquelles la dotation en capital peut être consommée.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 19 tend à permettre aux fonds de dotation de fonctionner selon le système dit de la fondation à capitaux consomptibles.

Je m’explique.

Une donation est faite d’un montant de capitaux consacrés à la réalisation d’un investissement et ce montant de capitaux est consommé le temps nécessaire pour la réalisation de l’investissement. C’est une modalité qui existe naturellement dans le statut des fondations.

Il paraîtrait logique que les fonds de dotation, formule plus souple et plus contractuelle, puissent non seulement gérer sur la durée des capitaux dont les intérêts seraient affectés à des finalités d’intérêt général, mais aussi utiliser des capitaux délégués pour l’acquisition d’un équipement ou la réalisation d’un investissement, et le temps nécessaire pour ce faire.

M. le président. Le sous-amendement n° 1071, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I.- Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

« II.- Dans le premier alinéa du 5 du texte proposé par le 3° du X de cet article pour l'article 206 du code général des impôts, remplacer les mots : " , à l'exception des fondations reconnues d'utilité publique et des fonds de dotation," par les mots : " , à l'exception, d'une part, des fondations reconnues d'utilité publique et, d'autre part, des fonds de dotation dont les statuts ne prévoient pas la possibilité de consommer leur dotation en capital,". »

II.- En conséquence, faire précéder le début de cet amendement par un I.

La parole est à Mme la ministre, pour défendre le sous-amendement n° 1071 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 19.

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’adoption de cet amendement visant à rendre la dotation en capital consomptible, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 1071, relatif aux mesures fiscales qui doivent accompagner le mécanisme de la dotation consomptible.

Le sous-amendement du Gouvernement prévoit que seuls les fonds de dotation qui n’auraient pas opté pour la dérogation les autorisant à consommer leur dotation en capital puissent bénéficier de l’exonération d’impôt sur les sociétés au titre des revenus tirés des placements.

On peut choisir soit une voie, soit l’autre ; soit on consomme et on ne bénéficie pas de l’exonération, soit on ne consomme pas et, dans ce cas, on bénéficie de l’exonération.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 1071 ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Tout à fait favorable !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1071.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 19.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 868, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le premier alinéa du V de cet article :

Le fonds de dotation est administré par un conseil d'administration qui comprend au minimum trois membres nommés, la première fois, par le ou les fondateurs, dont la majorité doit être choisie parmi des personnalités qualifiées, indépendantes des fondateurs, des contributeurs principaux du fonds et des organismes bénéficiaires des revenus de la capitalisation des actifs reçus par le fonds.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 20, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du VI de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le fonds de dotation alimenté par des dons issus de la générosité du public établit chaque année des comptes qui comprennent un bilan, un compte de résultat et une annexe. L'annexe comporte le compte d'emploi annuel des ressources collectées auprès du public.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Mme le ministre a fait allusion tout à l’heure aux contrôles exercés sur les comptes du fonds de dotation, notamment au rôle du ou des commissaires aux comptes. C’est l’objet des deux amendements nos20 et 21 que propose la commission.

L’amendement n° 20 concerne les obligations comptables, que nous souhaitons préciser.

L’amendement n° 21 tend à renforcer l’exercice du pouvoir d’alerte des commissaires aux comptes en calquant ce régime sur celui qui est en vigueur dans les sociétés commerciales.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Avis favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 21, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le dernier alinéa du VI de cet article :

Lorsque le commissaire aux comptes relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'activité, il demande des explications au président du conseil d'administration, dans des conditions fixées par décret. Le président du conseil d'administration est tenu de lui répondre sous quinze jours. Le commissaire aux comptes en informe l'autorité administrative. En cas d'inobservation de ces dispositions ou s'il constate qu'en dépit des décisions prises la continuité de l'activité demeure compromise, le commissaire aux comptes établit un rapport spécial et invite, par un écrit dont la copie est envoyée à l'autorité administrative, le dirigeant à faire délibérer sur les faits relevés un conseil d'administration convoqué dans des conditions et délais fixés par décret. Si, à l'issue de la réunion du conseil d'administration, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d'assurer la continuité de l'activité, il informe de ses démarches l'autorité administrative et lui en communique les résultats.

Cet amendement a été défendu.

L'amendement n° 734, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

I. - Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du VI de cet article, remplacer les mots :

peut demander

par le mot :

demande

II. - Rédiger comme suit la dernière phrase du même alinéa :

S'il constate qu'en dépit des dispositions prises la continuité de l'exploitation demeure compromise, le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qu'il présente au conseil d'administration et dont il envoie une copie à l'autorité administrative.

III. - Compléter le même alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Il établit également un rapport spécial à destination du conseil d'administration, s'il constate que les dispositions relatives à la tenue des comptes ne sont pas respectées.

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Le rôle du commissaire aux comptes dans le cas où la continuité d'exploitation serait compromise n'apparaît pas très clairement dans cet article et n'entre pas dans les dispositions habituelles et de droit commun de la procédure d'alerte, alors que ce que l'on demande au commissaire aux comptes s'en rapproche.

Par ailleurs, la notion d'irrégularités apparaît également peu précise.

Il est donc proposé, par cet amendement, d'une part, de créer une obligation pour le professionnel de demander au conseil d'administration de délibérer et, d'autre part, de préciser cette procédure d'alerte pour la rapprocher de celle qui est prévue par le droit commun.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Nos collègues du groupe UC-UDF ont satisfaction grâce à l'amendement n° 21, qui va même légèrement plus loin que ce qu’ils préconisent dans l'amendement n° 734.

Je les invite donc à bien vouloir se rallier à l'amendement de la commission et à retirer l'amendement n° 734.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 734 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 734 est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 21 ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I.- Rédiger comme suit le 1° du X de cet article :

1° Le 1 de l'article 200 est ainsi modifié :

a) Après le f, il est inséré un g ainsi rédigé :

« g) De fonds de dotation :

« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au b ;

«  2°  Ou  dont  la  gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés  des  dons  et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des  organismes  mentionnés  aux a à f ou à la Fondation du patrimoine dans les  conditions  mentionnées  aux  deux premiers alinéas du 2 bis, ou à une fondation ou association reconnue d'utilité publique agréée par le ministre chargé du budget dans les conditions mentionnées au dernier alinéa du 2 bis . Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;

b)  Dans le dernier alinéa, le mot : « septième » est remplacé par le mot : « huitième » ;

II.- Rédiger comme suit le 5° du X de cet article :

5° Après le f du 1 de l'article 238 bis, il est inséré un g ainsi rédigé :

« g) De fonds de dotation :

« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au a ;

«  2°  Ou  dont  la  gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés  des  dons  et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des  organismes  mentionnés  aux a à e bis ou à la Fondation du patrimoine dans les  conditions  mentionnées  aux deux premiers alinéas  du f, ou à une fondation ou association reconnue d'utilité publique agréée par le ministre chargé du budget dans les conditions mentionnées au quatrième alinéa du f . Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;

III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'inclusion des fonds de dotation parmi les supports permettant aux donateurs de bénéficier d'avantages fiscaux lorsque ces fonds de dotation subventionnent la Fondation du patrimoine ou réalisent des travaux d'entretien ou d'accessibilité sur des monuments historiques classés ou inscrits est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Il s’agit d’inclure les fonds de dotation parmi les supports permettant à des donateurs de bénéficier d’avantages fiscaux lorsqu’il s’agit de subventionner la Fondation du patrimoine ou de réaliser des travaux d’entretien ou d’accessibilité sur des monuments historiques classés ou inscrits.

Vous le savez, madame la ministre, ces personnes tout à fait dignes d’éloge et d’estime qui investissent pour sauvegarder, mettre en valeur, ouvrir au public des monuments historiques privés, classés ou inscrits, sont à l’heure actuelle inquiètes. Cette disposition serait de bon aloi pour leur montrer que leurs efforts sont appréciés à leur juste prix

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement et se joint aux commentaires élogieux de M. Marini pour louer l’enthousiasme, l’énergie et le goût du sacrifice dont font preuve un certain nombre des propriétaires de ces monuments historiques qui sont ainsi entretenus et rendus accessibles au public.

Le Gouvernement lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l'amendement n° 18 rectifié bis.

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je voudrais en fait suggérer à M. Marini une rectification à son amendement. Il me paraît en effet souhaitable d’ajouter la mention « ou présentant un caractère architectural ». Cela réglerait le problème de nos malheureuses églises rurales. Il n’y a pas que les monuments historiques ; beaucoup d’églises sont visitées qui ne sont pas inscrites et qui présentent un intérêt architectural.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Ma chère collègue, peut-être faudrait-il penser à aborder cette question lors de la discussion de la loi de finances pour 2009 ou de la loi de finances rectificative pour 2008 ?

J’avais le sentiment que le critère du classement ou de l’inscription à l’inventaire des monuments historiques était susceptible d’emporter l’accord du Gouvernement. Il n’est pas toujours facile de convaincre… Peut-être pourrons-nous avancer ultérieurement dans la direction que vous souhaitez, mais le critère que je propose est clair et net alors que la notion d’intérêt architectural reste plus difficile à apprécier. S’agissant de nos chères églises rurales,…

Mme Nicole Bricq. Il n’y a pas que les églises ! Il y aussi les temples et les synagogues !

M. Philippe Marini, rapporteur. … plusieurs d’entre nous y sont particulièrement attachés ; n’est-ce pas, chers collègues socialistes ? Vous vous souvenez certainement de cette affiche si célèbre, représentative de l’équilibre de nos territoires et de la permanence de la France,…

M. Thierry Repentin. La force tranquille !

M. Philippe Marini, rapporteur. … à l’époque où il n’y avait pas d’éoliennes ! Nous avons tous cette image présente à l’esprit, mais nous ne pouvons peut-être pas aller beaucoup plus loin avec l’amendement actuellement en discussion.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. J’ai commis un péché de jeunesse, monsieur le rapporteur, mais je présenterai un amendement en ce sens lors de la discussion de la prochaine loi de finances.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 18 rectifié bis.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 37, modifié.

(L’article 37 est adopté.)

Article 37 (priorité)
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Article 37 bis (priorité)

Article additionnel après l’article 37 (priorité)

M. le président. L’amendement n° 613 rectifié ter, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et M. A. Dupont, est ainsi libellé :

Après l’article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le I de l’article 885-0 V bis A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« 8° Des fonds de dotation répondant aux conditions fixées au g du 1 de l’article 200 ;

« 9° Des fondations universitaires et des fondations partenariales mentionnées respectivement aux articles L. 719-12 et L. 719-13 du code de l’éducation lorsqu’elles répondent aux conditions fixées au b du 1 de l’article 200. »

II. - L’article 795 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 14° Les dons et legs consentis aux fonds de dotation répondant aux conditions fixées au g du 1 de l’article 200. » 

III. - La perte de recettes pour l’État résultant des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Le présent amendement vise un double objectif.

D’une part, la réduction d’impôt de solidarité sur la fortune en faveur des dons à certains organismes d’intérêt général serait étendue aux dons consentis au profit tant des fonds de dotation créés par l’article 37 du présent projet de loi que des fondations universitaires et partenariales mentionnées aux articles L. 719-12 et L. 719-13 du code de l’éducation. Cette extension permettrait d’élargir les sources potentielles de financement de ces fonds et fondations et d’assurer ainsi le développement de ces structures qui interviennent, notamment, dans le domaine de la recherche.

D’autre part, cet amendement tend à instituer une exonération des droits de mutation à titre gratuit en faveur des dons et legs consentis aux fonds de dotation. Cette mesure a pour objet d’éviter que les dons consentis à ces fonds ne soient imposés au taux de 60 %. Ainsi, l’amendement vise à compléter l’incitation aux donateurs sous forme de réductions d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés prévues aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts. À défaut, ces dons seraient diminués du montant des droits de mutation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est tout à fait favorable à cet amendement en raison, notamment, des rectifications apportées par son auteur, qui a tenu compte d’une suggestion formulée lors d’un débat en son sein.

Nous remercions Philippe Adnot de ces rectifications et sommes ainsi renforcés dans notre appréciation tout à fait favorable de son initiative.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable, et lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 613 rectifié quater.

Je le mets aux voix.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 37.

Article additionnel après l’article 37 (priorité)
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Articles additionnels après l’article 37 bis (priorité)

Article 37 bis (priorité)

Dans le premier alinéa du I de l’article 39 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le taux : « 2,5 % » est remplacé par le taux : « 8 % ».

M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, sur l’article.

M. Jacques Valade. Je souhaite intervenir sur l’article 37 bis, qui concerne le secteur audiovisuel dont la commission des affaires culturelles a la charge. Cet article, introduit par l’Assemblée nationale, tend à relever le seuil d’audience au-delà duquel s’applique le dispositif anti-concentration prévu par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, et il me paraît particulièrement judicieux.

La loi prévoit actuellement que les chaînes de la télévision numérique terrestre, ou TNT, dont l’audience dépasse 2,5 % de l’audience totale des services de télévision ne peuvent être détenues par un même actionnaire à plus de 49 % de leur capital.

Ce seuil de 2,5 % d’audience correspondait à l’état du marché avant le lancement de la TNT. Or le succès de ce mode de diffusion a bouleversé ces données et il convient d’adapter ces dernières à la situation actuelle.

Le dispositif anti-concentration va en effet s’appliquer très vite à la plupart des chaînes de la TNT, obligeant leurs actionnaires à sortir partiellement de leur capital. Rappelons que ces chaînes sont détenues par des groupes audiovisuels qui ont eu le mérite de faire le pari du développement de la TNT.

Chacune de ces chaînes connaît un niveau d’audience nationale compris entre 1 % et 2 %, pour une couverture de 60 % à 65 % seulement de la population. Chaque année, ce niveau d’audience double, voire triple. De plus, près de 70 % des foyers français continuent de regarder la télévision uniquement en mode analogique et n’ont pas accès à la TNT.

Sur la seule base des foyers équipés d’un adaptateur TNT, les niveaux d’audience de ces chaînes sont déjà pour la plupart de l’ordre de 3 %. Avec l’extension de la couverture de la TNT à l’ensemble du territoire et l’arrêt de la diffusion analogique zone par zone jusqu’à son extinction, leur niveau d’audience va encore augmenter.

Or ces chaînes sont encore économiquement fragiles. Elles se sont engagées, à la demande des pouvoirs publics, à étendre de manière substantielle leur couverture du territoire, ce qui induit des investissements financiers extrêmement lourds. Par ailleurs, elles doivent et devront contribuer à la création d’œuvres originales.

Le maintien du seuil de 2,5 % serait une anomalie, pour ne pas dire une absurdité économique. Il est paradoxal, en effet, de demander à ces groupes audiovisuels de se préparer et d’investir pour le passage au « tout numérique », tout en les mettant dans l’obligation de revendre le capital de leur chaîne parce qu’elles ont été performantes. Il n’est pas plus cohérent de les mettre dans une obligation de vente, créant mécaniquement une sous-valorisation de leur participation au sein de ces chaînes.

Si nous souhaitons réussir le pari du numérique, il est indispensable de garantir aux chaînes des conditions normales d’exploitation et de développement.

J’approuve donc le dispositif pragmatique de l’article 37 bis et le seuil d’audience de 8 % que prévoit ce dernier, seuil qui me paraît préférable, compte tenu de la croissance de l’audience que j’ai évoquée précédemment, à celui de 5 % que proposera Mme Morin-Dessailly dans l’amendement n° 726 rectifié.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 535 est présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L’amendement n° 1023 est présenté par M. Lagauche, Mmes Tasca, Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Massion, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade, pour défendre l’amendement n° 535.

Mme Odette Terrade. Cet article 37 bis est issu d’un amendement de « commande », déposé par M. Frédéric Lefebvre, député des Hauts-de-Seine, département qui accueille nombre de sièges de chaînes de télévision, dont TF1 à Boulogne-Billancourt, M6  à Neuilly-sur-Seine, Direct 8, propriété du groupe Bolloré, à Puteaux.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Et France 3 à Vanves !

Mme Odette Terrade. La chaîne TF1 s’est d’ailleurs attaché les services de M. Laurent Solly, qui fut un temps collègue de travail de M. Lefebvre, au cabinet de Nicolas Sarkozy, place Beauvau. M. Lefebvre est donc très au fait des questions liées à l’audiovisuel !

Cet amendement, devenu l’article 37 bis du projet de loi, modifie le premier alinéa du I de l’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite loi Léotard, en assouplissant les règles anti-concentration dans le secteur de la télévision.

L’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 dispose ceci : « Une même personne physique ou morale agissant seule ou de concert ne peut détenir, directement ou indirectement, plus de 49 % du capital ou des droits de vote d’une société titulaire d’une autorisation relative à un service national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre dont l’audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu’en mode numérique, dépasse 2,5 % de l’audience totale des services de télévision. »

Lors de l’adoption du régime juridique de la TNT, défini par la loi du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, cette disposition a été étendue aux chaînes de la TNT.

L’article 37 bis modifie, pour les chaînes de la TNT, non pas le taux concernant la part de capital – la manœuvre aurait été trop grossière –, mais le taux d’audience totale, relevé de 2,5 % à 8 %. Avec un tel taux, la règle anti-concentration a désormais peu de chance de se déclencher un jour s’agissant de la TNT ! Je précise que votre majorité, alors dans l’opposition, s’était opposée à cette TNT lors du vote de la loi du 1er août 2000. Il faut dire que TF1 et M6, mais surtout TF1, avaient œuvré très activement contre son développement, ne croyant pas, à l’époque, dans ce modèle de télévision !

En huit ans, les choses ont bien changé. Précisons que les opposants d’hier, TF1 comme M6, ont investi dans la TNT. La première détient 50 % de TMC, la seconde 100 % de W9. La TNT a peu à peu trouvé son public, et d’autres groupes, comme Bolloré, qui détient 100 % de Direct 8, ou Lagardère, propriétaire à 100 % de Virgin 17 et à 66 % de Gulli, leur ont emboîté le pas. Alors, pourquoi ce changement radical ?

À vous entendre aujourd’hui, ce changement de taux d’audience serait « vital pour soutenir le développement de la TNT ». Pourtant, les chaînes de la TNT ont très bien réussi à se développer avec l’ancien seuil.

Mme la ministre, qui a soutenu cet amendement, nous parle de « modèle économique fragile ». Ne l’était-il pas au moment de son lancement en 2000 ? Cette fragilité exigerait que ces chaînes – je cite toujours Mme la ministre – « soient soutenues par des groupes à l’assise financière solide ». Or ces mêmes groupes avaient tout fait pour que la TNT ne sorte jamais des cartons !

Aujourd’hui, les audiences sont en constante progression : 2,1 % de part d’audience au mois de mai pour TMC, filiale de TF1, et 1,9 % pour W9, propriété de M6. Ces majors ne veulent pas partager le gâteau et s’inquiètent donc de l’obligation d’ouverture du capital que la loi allait leur imposer. Heureusement, le projet de loi de modernisation de l’économie, voiture-balai de cette session extraordinaire, passe par là… Il est trop facile de changer les règles du jeu en fonction des intérêts et des convenances de certains !

Le seuil des 2,5 % d’audience totale avait un objectif : protéger le pluralisme et lutter contre la concentration à la télévision. Cet objectif est plus que jamais d’actualité aujourd’hui, alors que la question de la trop grande concentration des médias se pose avec autant d’acuité et à l’heure où l’audiovisuel public est menacé d’asphyxie par la suppression de la publicité. Cette suppression est orchestrée par le Président de la République au profit des chaînes privées, auxquelles ce gouvernement a également décidé d’accorder une deuxième coupure publicitaire. Trop de cadeaux !

Notre amendement vise donc à la suppression de cet article, et nous demandons qu’il fasse l’objet d’un vote par scrutin public.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 1023.

M. Richard Yung. La modification de la législation permettra à certains opérateurs de chaînes diffusées en mode numérique terrestre, tels que Bolloré, Bouygues ou le groupe M6, de rester au-dessous du seuil d’audience et de continuer de détenir 100 % des parts de leur société. Certaines chaînes de la TNT comme Direct 8, détenue par Bolloré, W9, propriété de M6, et TMC sont proches d’atteindre ce seuil fatidique de 2,5 % ou l’ont même déjà dépassé : TMC, avec plus de 4 %, W9, proche de 4 %, et Direct 8, proche de 2,5 %...

Le droit de l’audiovisuel français, soucieux de ne pas permettre que la détention du capital d’une chaîne soit concentrée dans les mains d’une même personne, était jusqu’à présent construit sur la règle de détention maximale de 49 % des parts d’un service de télévision diffusé en mode hertzien analogique, car aucune des chaînes hertziennes privées historiques ne pouvait se situer au-dessous du seuil de 2,5 %. Cette disposition anti-concentration, garante du pluralisme dans le secteur audiovisuel, avait, certes, été élaborée dans le cadre restreint de la ressource hertzienne, en mode analogique. L’arrivée du numérique, si elle multiplie la ressource, ne saurait néanmoins justifier que des nouveaux entrants puissent se soustraire au droit commun de l’audiovisuel et détenir jusqu’à 100 % du capital de leur société.

Ce cadeau offert avec l’article 37 bis concerne potentiellement tous les opérateurs privés faisant moins de 8 % d’audience cumulée : ils pourront tous se porter acquéreur des droits qu’ils ne détiennent pas encore sur leurs services de télévision diffusés en mode hertzien. Il s’agit d’un nouveau gage donné au secteur privé de l’audiovisuel.

Parallèlement, le Gouvernement et le Président de la République réservent un autre sort aux chaînes publiques. La publicité est supprimée, les parts de marché étant naturellement redistribuées aux opérateurs privés, et le montant de la redevance n’est pas augmenté, alors que, n’ayant pas changé depuis cinq ans, il est le plus faible d’Europe, la plupart des autres pays, comme l’Allemagne ou la Grande Bretagne, pratiquant un tarif supérieur à 200 euros.

Derrière cette absence de financement pérenne et suffisant, se profile donc un regroupement des moyens des chaînes mettant en jeu, à terme, leur existence même.

Et, cerise sur le gâteau, on envisage de nommer le président de France Télévisions en conseil des ministres, ce qui mettra en cause l’indépendance des chaînes publiques.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article.

M. le président. L'amendement n° 726 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

À la fin de cet article, remplacer le pourcentage :

8 %

par le pourcentage :

5 %

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Le relèvement du seuil d’audience proposé par l'Assemblée nationale, qui est fondé sur le succès remporté par les nouvelles chaînes de la TNT, nous semble excessif.

Si l’on peut comprendre l’intention qui animait les députés, il ne faudrait pas que cette mesure se traduise par un recul de la diversité des opérateurs et des programmes audiovisuels. Nous sommes en effet encore très loin du taux d’audience de 8 % ; c’est pourquoi un taux de 5 % nous semble déjà tout à fait acceptable.

Il ne faut en effet pas oublier que cette disposition favorise les grandes chaînes privées que sont TF1, propriétaire de TMC, et M6, propriétaire de W9, qui ne croyaient pas à la TNT, et les groupes audiovisuels plus récents, comme Bolloré et Lagardère.

Or, la règle des 2,5 % avait pour objectif de protéger le pluralisme et de permettre à de petites chaînes de la TNT de se développer face aux opérateurs historiques dominants. En outre, il faut se rappeler que ces opérateurs ont déjà obtenu avec la loi sur la télévision du futur une « chaîne bonus ».

Nous proposons donc un taux d’audience de 5 %, qui constitue déjà un doublement du seuil actuel, afin de permettre aux chaînes de la TNT de poursuivre leur développement tout en préservant le principe qui a présidé à l’origine de la télévision numérique terrestre, c'est-à-dire favoriser le pluralisme et la diversité du paysage audiovisuel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je ne vais m’aventurer en la matière qu’avec une certaine prudence. Mais j’ai quand même plus de facilité à le faire depuis que j’ai écouté M. Jacques Valade !

Pour tenir compte et tirer toutes les conséquences de son analyse de l’article 37 bis, qui est celle à laquelle se réfère la commission spéciale, il convient de confirmer cet article dans la rédaction telle qu’elle est issue de l'Assemblée nationale, et donc de ne pas voter les amendements.

Toutefois, madame le ministre, je voudrais aller au-delà de l’article qui nous est soumis et me livrer à une réflexion plus générale.

Certains pays disposent de législations qui permettent de plafonner globalement l’audience que peut atteindre un même opérateur économique via les différentes filiales qu’il contrôle. Telle n’est pas l’optique choisie par la France depuis que nous avons commencé à légiférer sur le secteur de l’audiovisuel.

Je vais prendre un exemple pour me faire mieux comprendre : un groupe qui aurait 15 % ou 20 % d’audience globale pourrait progressivement atteindre, après l’acquisition d’autres opérateurs, un taux d’audience de 25 %, de 30 %, de 35 % si un plafond global n’était pas fixé.

Certes, cette question est, à l’heure actuelle, tout à fait théorique, compte tenu de la répartition des forces sur ce marché. Sans être un fin connaisseur du sujet, je me demande simplement si tout cela ne serait pas plus compréhensible pour l’opinion publique s’il existait une clause de limitation globale.

Une telle clause offrirait la garantie que les influences seront équilibrées et que le public aura un réel choix entre les différents opérateurs privés présents sur le marché de l’audiovisuel. Mais ce n’est qu’une réflexion parmi d’autres.

La commission émet un avis défavorable sur les trois amendements.

M. le président. Madame Payet, l’amendement n° 726 rectifié est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 726 rectifié est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 535 et 1023 ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

Je tiens à dire à M. Valade que j’ai vivement apprécié son intervention liminaire sur l’article tel qu’il est issu de la longue discussion qui a eu lieu à l'Assemblée nationale et qui a permis, selon moi, d’arriver à un texte tout à fait convenable.

Comme je l’ai indiqué lors du débat à l'Assemblée nationale, la situation évolue constamment au fur et à mesure des avancées de la technologie, qui permet à la fois une pénétration plus rapide de l’audience et la découverte par les opérateurs de modèles économiques différents.

Les opérateurs sont confrontés à trois phénomènes : un accroissement limité des recettes publicitaires, la concurrence des autres médias qui se développent de manière très rapide, et la nécessité de consentir à des investissements très importants pour couvrir l’intégralité du territoire. Nous sommes donc clairement en présence d’un modèle économique à développement accéléré, mais à caractère fragile, ce qui justifie la nécessité de relever les seuils. Ces derniers étaient jusqu’à présent nécessaires pour éviter des phénomènes de concentration contre lesquels il était certainement légitime de lutter lorsque le paysage audiovisuel ne connaissait pas de grands bouleversements.

Mais les avancées technologiques ont tout modifié en permettant des déplacements rapides d’audiences. Dans ces conditions, il me paraît légitime de relever le seuil.

Monsieur le rapporteur, vous avez raison d’évoquer les régimes étrangers : le Royaume-Uni comme les États-Unis ont récemment modifié leurs mécanismes de mesure des phénomènes de concentration pour les appréhender de manière plus globale. Il n’est pas exclu d’envisager que la France mène à son tour une réflexion similaire pour mieux répondre à la concurrence internationale, c'est-à-dire à tous ces groupes solides que l’on a vu émerger dans d’autres pays, y compris au sein de l’Union européenne.

M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, pour explication de vote.

M. Jacques Valade. J’ai apprécié la suggestion formulée par M. le rapporteur. Nous sommes en effet un peu en retard si l’on se réfère aux réglementations appliquées dans d’autres pays, notamment européens. Comme l’a indiqué Mme la ministre, cette anomalie provient du fait que les avancées technologiques sont relativement récentes.

Codifier a priori ce que devrait être la réglementation applicable à telle ou telle entreprise paraissait impossible. En effet, personne d’entre nous ne pouvait prévoir l’explosion de la TNT ou les conséquences de l’arrivée de la télévision mobile personnelle. Il faudrait donc attendre que ce marché soit relativement stabilisé avant d’envisager une codification plus générale et plus formelle. Mais, sur le principe, j’y suis tout à fait favorable, et Mme la ministre a d’ailleurs estimé que cela était tout à fait envisageable.

Attendons donc quelques mois. Nous verrons alors les suites que nous pourrons apporter à cette question.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 535 et 1023.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 126 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l’adoption 126
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'article 37 bis.

(L'article 37 bis est adopté.)

Article 37 bis (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 37 ter  (priorité)

Articles additionnels après l’article 37 bis (priorité)

M. le président. L'amendement n° 742, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

Après l'article 27 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique, dont l'audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu'en mode numérique, dépasse 2,5 % de l'audience totale des services de télévision, ne peut plus bénéficier des dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode numérique. 

« Elle est alors régie par les dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode analogique. 

« Le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel se charge de modifier en conséquence les conventions et cahiers des charges desdites sociétés.»

La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Le succès très important de la TNT doit aujourd'hui être pris en considération. Cet amendement vient utilement compléter l'assouplissement, voté à l'Assemblée nationale, du taux d'audience des chaînes de la TNT susceptible de rendre applicable les dispositifs anti-concentration. Il propose d'exclure du bénéfice des dispositions dérogatoires en matière de soutien à la création les chaînes de la TNT dont l'audience dépasse 2,5 % et de les soumettre aux mêmes obligations que les chaînes hertziennes analogiques.

De cette manière, la réglementation audiovisuelle permettra de faire des chaînes de la TNT, dont le succès d'audience et publicitaire est manifeste, des partenaires de la création, et d'accompagner utilement l'assouplissement des règles anti-concentration.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement, monsieur le président.

M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable, un peu pour des raisons identiques à celles que j’ai évoquées précédemment : il s’agit d’un secteur d’activité jeune, dont le modèle économique est en cours d’élaboration et dont le chiffre d’affaires est encore relativement faible. Lui imposer des obligations au demeurant très fortes et légitimes en matière de production nous paraît de nature à déséquilibrer tant ce secteur que les opérateurs s’y trouvant.

Même si, en soi, cette proposition nous paraît bonne, il est en tout cas trop tôt pour l’imposer à la TNT, car nous prendrions le risque de déséquilibrer cette dernière au moment de son expansion.

M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 742 est-il maintenu ?

Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 742 est retiré.

L'amendement n° 980 rectifié, présenté par MM. de Broissia et Longuet et Mme Dumas, est ainsi libellé :

Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 48-1 A de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication est ainsi rédigé :

« Art. 48-1 A. - Les programmes diffusés par voie hertzienne terrestre des sociétés mentionnées au I, II et III de l'article 44 ne peuvent faire l'objet d'un droit exclusif de reprise, y compris dans un mode de diffusion non linéaire, dès lors que ce droit exclusif aurait pour effet de restreindre le public pouvant accéder à ces reprises.

La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Cet amendement vise à modifier l’article 48-1 A de la loi du 30 septembre 1986. Lors des débats sur cette dernière, je siégeais, en tant que secrétaire d’État chargé de la poste et des télécommunications, au banc du Gouvernement, avec François Léotard, et Adrien Gouteyron rapportait ce texte au nom de la commission des affaires culturelles.

Depuis, la technique a évolué. Est apparue une nouvelle forme de télévision, la télévision dite « de rattrapage », ou catch up TV, service nouveau qui permet de regarder en différé des émissions sur un support qui est en général l’ordinateur, mais qui sera de plus en plus le mobile, devenu le terminal indispensable sans lequel l’homme moderne – l’homme, la femme et l’enfant surtout, d’ailleurs – ne peut plus vivre …

Il y a là un problème pratique, madame le ministre, et c’est la raison pour laquelle Louis de Broissia et Catherine Dumas ont proposé cet amendement que j’ai cosigné : il s’agit de savoir si la commercialisation du service de télévision de rattrapage est captive ou ouverte.

En un mot, nous constatons que la chaîne publique France Télévisions, qui a d’ailleurs été créée, je crois, à l’occasion de cette loi de 1986, et Orange, qui a été dérégulé à partir de cette même loi de 1986 et qui est aujourd’hui une société de droit privé à capitaux privés majoritaires, même si l’État reste le principal actionnaire, ont conclu un accord exclusif de rachat de programmes de télévision dans le cadre d’un service de télévision de rattrapage.

Nous sommes quelque peu étonnés de cette orientation. Correspond-elle à la volonté du Gouvernement ? Elle ne correspond en tout cas pas à celle des signataires de cet amendement. Si les émissions de télévision appartiennent naturellement aux sociétés qui en ont eu la responsabilité, nous souhaitons cependant qu’elles puissent être librement achetées par tous ceux dont le métier est de diffuser de la télévision non linéaire, c’est-à-dire de la télévision ponctuelle à la demande.

Cette disposition permettrait d’éviter de créer des systèmes en silo produisant une intégration verticale, même si cette dernière est aujourd’hui le fait d’entreprises à capitaux publics principaux, exclusifs ou dominants.

Je ne pense pas que cela corresponde à l’idée d’un libre choix du consommateur et d’une libre ouverture du service de télévision, fût-elle nouvelle et fût-elle de rattrapage. Je me demande d’ailleurs parfois ce qu’il y a à rattraper…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Il faut remercier Gérard Longuet et ses collègues d’avoir abordé un important sujet.

L’amendement vise en fait l’accord d’exclusivité récemment conclu entre France Télévisions et France Télécom Orange en matière de télévision de rattrapage accessible sur tout support.

Le conseil de la concurrence s’est prononcé sur cet accord le 7 mai 2008, et il l’a validé. Son analyse tient, pour l’essentiel, dans les arguments suivants : le périmètre des programmes concernés est somme toute limité, puisqu’il s’agit de la tranche 18 heures-24 heures sans les films et les actualités ; ensuite, la durée est limitée dans le temps, l’exclusivité ne valant que pendant sept à trente jours après la diffusion des programmes à l’antenne ; en outre, l’exclusivité s’applique uniquement à la mise à disposition des programmes en location gratuite et non au téléchargement définitif.

Les programmes restent disponibles pour l’ensemble du public sur le site Internet de France Télévisions, l’exclusivité ne concernant donc que l’exploitation par un tiers. En d’autres termes, chacun, selon cet accord, peut visionner les documents en différé sur son ordinateur. C’est seulement l’usage en différé sur un téléviseur ou un mobile qui est réservé aux abonnés d’Orange.

Il demeure, au-delà de cet accord spécifique et de la décision récente du conseil de la concurrence, que ce sujet tel qu’il est soulevé par Gérard Longuet est extrêmement important. Il s’agit de savoir dans quelle mesure le choix d’un fournisseur d’accès à Internet peut conditionner l’accès au contenu. Il s’agit aussi de déterminer si un groupe public de télévision peut valablement recourir à des partenariats exclusifs en matière de vidéo à la demande. C’est précisément ce que permet le contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions.

Est-il vraiment opportun, à ce stade de notre texte, de traiter de ce sujet de manière partielle ? En effet, techniquement, l’adoption de l’amendement n° 980 rectifié reviendrait à priver France Télévisions d’une source de revenus à l’heure où existent certaines incertitudes sur la bonne visibilité financière de ce groupe public.

Il me semblerait donc raisonnable, après avoir entendu le Gouvernement, de débattre de ce sujet lorsque sera inscrit à l’ordre du jour du Sénat le projet de loi sur la télévision publique et son financement.

Mais, il serait vraiment utile, madame le ministre, que vous puissiez nous éclairer dès à présent sur les situations visées par cet amendement.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Très bonne intervention !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. J’ai tendance à me ranger à l’avis de M. le rapporteur en la matière.

Cette question, qui est une vraie question de fond, concerne le droit d’exploitation réservé ou non réservé, exclusif ou non exclusif, au bénéfice de tel ou tel canal, des productions de France Télévisions. Cela mérite évidemment un débat approfondi.

Vos commissions – je suppose en effet que plusieurs commissions seraient saisies en l’espèce – auront évidemment l’occasion d’explorer l’ensemble de ces questions, c’est-à-dire à la fois la question des canaux et des types de production.

L’accord actuel est limité à une période de deux ans pour un droit de catch up lui-même d’une durée limitée ; il ne porte que sur certains programmes et non pas sur toutes les créations de France Télévisions. Cet accord présente un caractère véritablement exploratoire, en tout cas aux yeux du Gouvernement. Il a par ailleurs été validé par le conseil de la concurrence.

Mais la question de fond demeure et doit être explorée. Comme je le disais devant vos commissions, cela pourra évidemment être le cas à l’occasion du débat sur la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et de l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement.

J’ajoute que la Commission européenne a elle-même engagé, au travers d’une large consultation publique, une réflexion sur le cadre futur du financement étatique des services publics de radiodiffusion, et que l’une des interrogations centrales portera sur le positionnement du service public dans le domaine des nouveaux médias.

Cette vraie question de fond pourra donc être analysée, à l’échelon communautaire, dans le cadre de cette consultation publique et, à l’échelon national, à l’occasion de l’examen de la transposition de la directive et du projet de loi sur la nouvelle télévision publique. J’invite donc M. Longuet à retirer cet amendement d’excellente qualité qui me paraît aborder un problème très vaste sous un angle trop étroit.

M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, pour explication de vote.

M. Jacques Valade. La proposition faite dans cet amendement me semble tout à fait pertinente. Il y a effectivement un problème de fond concernant notamment l’exclusivité de telles ou telles productions qui ont été financées d’une certaine façon, surtout au niveau de l’audiovisuel public.

Je partage tout à fait l’analyse de Mme la ministre, ainsi que celle de M. le rapporteur. En effet, nous avons été amenés, dans le cadre de la discussion de ce projet de loi, à examiner à plusieurs reprises des amendements qui revenaient sur des points stratégiques, mais de façon partielle, et dont l’adoption aurait abouti à modifier des dispositions fondamentales sans réelle réflexion sur la globalité du problème posé.

Par conséquent, il me paraît pertinent et prudent d’attendre un peu pour examiner ces questions de façon globale : la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et le projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement nous donneront bientôt l’occasion de le faire.

Mais je confirme qu’il s’agit d’un problème fondamental ; et je ne suis pas loin de partager les préoccupations des trois signataires de cet amendement.

M. le président. Monsieur Longuet, l'amendement n° 980 rectifié est-il maintenu ?

M. Gérard Longuet. Non, monsieur le président. Rassuré par ce rendez-vous, je le retire.

M. le président. L'amendement n° 980 rectifié est retiré.

Articles additionnels après l’article 37 bis (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Intitulé du Chapitre V

Article 37 ter  (priorité)

Le premier alinéa de l'article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi rédigé :

« L'État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, directement ou indirectement, la totalité du capital de la société Radio France Internationale. »

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.

Mme Nathalie Goulet. Cet article, qui relève du titre III relatif à l’attractivité de nos territoires et intitulé « mobiliser l’attractivité au service de la croissance », porte sur la société Radio France Internationale, ou RFI.

Radio France Internationale est la première radio française d’actualité internationale non seulement en français, mais aussi – c‘est important pour ceux de nos collègues qui, comme moi, voyagent beaucoup – en plusieurs langues. Il y a 45 millions d’auditeurs dans le monde, auxquels s’ajoutent 33 millions de visiteurs sur Internet, 649 heures de programmes en 20 langues.

Ce sujet, en dehors de l’attractivité, concerne le rayonnement de la France. Or, la politique appliquée à Radio France Internationale aboutit à la suppression d’emplois de journalistes travaillant notamment en farsi, en russe, en arabe et en chinois.

Le 1er mars dernier, lors de la deuxième journée des Français de l’étranger au sein de cette maison, nous avons longuement interrogé M. Benamou pour savoir comment le rayonnement de la France pouvait, à son avis, se faire sans transmission de la sainte parole dans une langue compréhensible.

Radio France Internationale a un cahier des charges de service public et constitue un outil de promotion de la langue française. C’est extrêmement important, notamment à l’heure où, sur l’initiative de notre collègue Jacques Legendre, un article du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République est désormais consacré à la francophonie, définie comme un espace de solidarité ayant le français en partage.

RFI est donc non seulement un outil utile à la promotion et au rayonnement de la France pour des gens qui ne parlent pas le français et qui pourront ainsi comprendre notre politique et notre culture, mais aussi un outil de promotion de la langue française. J’ajoute que RFI emploie des stagiaires étrangers et a conclu des services de partenariat avec des radios étrangères.

Aussi ai-je été plutôt surprise – et je n’étais pas la seule ! – de trouver dans ce projet de loi de modernisation de l’économie, un article visant RFI ! J’ai donc déposé un amendement de suppression de cet article.

J’ajoute que les propos tenus tant par M. Valade que par Mme la ministre concernant la TNT me confortent dans l’idée d’une nécessaire suppression de cet article en attendant, d’une part, la loi sur l’audiovisuel, puisque l’audiovisuel concerne non seulement la télévision mais aussi la radio publique, et, d’autre part, un certain nombre de dispositions européennes.

D’abord, l’article 37 ter ressemble fort à un cavalier législatif. Je vois mal le lien entre une telle mesure et la modernisation de l’économie. Mais je suis tout à fait prête à entendre vos explications sur ce point, madame la ministre.

Ensuite, un tel dispositif fait à mon avis peser des risques inconsidérés sur un outil extrêmement important pour l’attractivité de nos territoires, la promotion de notre culture et le rayonnement de la France.

Intervenant sur l’article, j’ai également défendu mon amendement n° 310, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l'article.

M. Richard Yung. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pourrais moi aussi souligner les problèmes de forme que pose l’article 37 ter, comme vient de le faire notre excellente collègue Nathalie Goulet. En effet, cet article constitue bien un parangon de cavalier législatif, et j’imagine quelle sera la réaction du Conseil constitutionnel lorsqu’il en sera saisi.

Toutefois, je préfère centrer mon propos sur des remarques de fond.

Cet article, qui a été inséré dans le projet de loi à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement d’origine gouvernementale, vise à mettre en place la holding qui s’appelle désormais « Société de l’audiovisuel extérieur de la France ». Créée le 15 avril dernier, celle-ci doit regrouper les participations de l’État dans les différentes sociétés de l’audiovisuel extérieur, France 24, RFI et TV5 Monde.

La modification proposée de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication suscite évidemment l’inquiétude des salariés de RFI. Leur réaction est d’ailleurs tout à fait légitime. En effet, la commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par M. Jean-François Copé, a proposé d’affecter à France Télévisions la part de redevance attribuée à RFI. L’avenir des personnels concernés est donc pour le moins incertain.

Heureusement, le Gouvernement n’a pas retenu cette très mauvaise idée, qui, si elle avait été mise en œuvre, aurait entraîné une perte de 60 millions d’euros pour RFI, surnommée la « radio du monde ».

Cependant, cette sage décision est loin d’apaiser les craintes des personnels de RFI, qui accueillent avec beaucoup de scepticisme les annonces intervenues depuis le début de la mise en chantier de l’audiovisuel extérieur, voilà près d’un an. Ils craignent en particulier que la mise en place de la société holding n’entraîne une fusion, totale ou partielle, des trois entreprises dont j’ai parlé tout à l’heure. Ainsi, la fusion des moyens, qui a déjà été évoquée, pourrait se traduire par la suppression d’environ 180 emplois. Mais cela pourrait aller plus loin, avec la fusion au moins partielle des rédactions de journaux télévisés et d’un certain nombre d’émissions. Par conséquent, il s’agit là d’un glissement dangereux vers une centralisation et un contrôle complet de l’ensemble de ces trois chaînes.

Selon nous – je ne développerai pas notre position à cet égard, car ce n’est pas l’objet central du débat –, cette réforme n’est pas engagée de la bonne manière. Il aurait fallu s’appuyer sur TV5 Monde, qui est présente dans tous les pays et qui rassemble plusieurs millions de téléspectateurs, au lieu d’attribuer une somme de 40 millions, de 50 millions ou de 60 millions d’euros à France 24, chaîne que personne ne regarde dans le monde.

Par conséquent, nous proposerons la suppression de l’article 37 ter. La réforme de l’audiovisuel extérieur étant une question très importante, nous sommes d'accord pour en débattre, mais en prenant le temps de la réflexion et en menant les consultations qui s’imposent.

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les quatre premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 310 est présenté par Mme N. Goulet.

L'amendement n° 476 est présenté par MM. Ralite et Renar, Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 1008 est présenté par Mme Garriaud-Maylam.

L'amendement n° 1024 est présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, M. Yung, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

L’amendement n° 310 a déjà été défendu.

La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 476.

Mme Odette Terrade. Je partage les préoccupations qui ont été exprimées par les orateurs précédents.

L’article 37 ter résulte de l’adoption d’un amendement d’origine gouvernementale à l’Assemblée nationale sur la détention du capital de Radio France Internationale par l’État, afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme de l’audiovisuel extérieur.

On peut s’étonner, après l’article 37 bis, de trouver un nouvel article concernant l’avenir de l’audiovisuel, en l’occurrence public, dans la partie du projet de loi censée permettre d’attirer les financements privés pour des opérations d’intérêt général. Faut-il y voir, comme c’est à craindre, les prémices d’une profonde transformation de la nature du capital de RFI ?

Cet article vise à modifier la rédaction de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui dispose que l’État « détient la totalité du capital des sociétés France Télévisions, Radio France et Radio France Internationale ».

La nouvelle rédaction proposée précise que l’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, surtout, qu’il détient « directement ou indirectement » le capital de la société Radio France Internationale. C’est ce dernier point qui pose problème, car il s’agit, rien de moins, d’une modification fondamentale des règles de détention du capital de RFI.

Selon le rapport de la commission spéciale, l’objet d’un tel changement serait de « sécuriser juridiquement le schéma envisagé par le Gouvernement pour la réforme de l’audiovisuel extérieur. »

La réforme, menée sur la base du rapport Levitte-Benamou, qui a été remis au Président de la République au mois de décembre dernier, crée une société holding dénommée « Société de l’audiovisuel extérieur de la France », et non pas « France Monde », comme cela était indiqué par erreur dans l’exposé des motifs de l’amendement gouvernemental déposé à l’Assemblée nationale.

Cette holding réunit les participations de l’État dans Radio France Internationale, TV5 Monde et France 24 : un assemblage baroque s’il en est !

D’ailleurs, il aurait été souhaitable de débattre de ce sujet à l’automne prochain, à l’occasion de l’examen du futur projet de loi sur l’audiovisuel public. En effet, la réforme de l’audiovisuel extérieur intervient en plein débat sur le financement de l’audiovisuel public, débat au sein duquel RFI a toute sa place.

L’une des pistes retenues par la commission présidée par Jean-François Copé pour assurer le financement de France Télévisions, à la suite de la disparition de la publicité sur les chaînes publiques, est la suppression des ressources de la redevance allouées à RFI.

Pourquoi voulez-vous précipiter un tel changement juridique avant que le débat sur le financement de l’audiovisuel public ait lieu ? Les ressources de RFI issues de la redevance sont de 58 millions d’euros, soit 40 % de son budget. Cette garantie de financement assure à RFI son ambition internationale et lui permet de remplir son cahier des charges de service public. Que se passera-t-il si elle est supprimée ? Encore une fois, tout semble écrit d’avance, et les personnels de RFI sont légitimement inquiets quant à l’avenir de leur radio et de ses missions.

Par conséquent, afin de lever de telles inquiétudes, nous demandons la suppression de cet article.

M. Richard Yung. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour présenter l'amendement n° 1008.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J’ai bien entendu les propos de mes collègues et je ne reprendrai pas des arguments qui figurent déjà dans les différents documents que nous avons reçus.

Bien entendu, je partage l’inquiétude exprimée par mon collègue sénateur représentant les Français établis hors de France Richard Yung, ainsi que par Mme Nathalie Goulet.

À mon sens, nous sommes tous – c’est encore plus vrai s’agissant des sénateurs représentant les Français de l’étranger – extrêmement attachés à RFI, qui est le premier réseau FM dans le monde devant la BBC. Nous sommes donc très vigilants quant à l’avenir de cette radio.

Aussi, dans un premier temps, j’ai moi aussi été très étonnée de la présence dans le projet de loi de cet article, qui m’est apparu comme un cavalier législatif. Ma première réaction a donc été d’en demander la suppression.

Néanmoins, j’écouterai naturellement avec beaucoup d’attention les explications de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le sujet, car nous avons besoin d’être rassurés sur l’avenir de RFI. Peut-être pourrions-nous toutefois surseoir à cette discussion ?

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 1024.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Si la chaîne RFI est très peu connue en France, c’est tout simplement parce qu’elle émet seulement en Île-de-France, où elle a 1 million d’auditeurs. Mais, dans le monde, elle en a 46 millions.

Mme Nicole Bricq. Excellent argument !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. À cet égard, permettez-moi de faire référence à l’une des auditrices de cette radio, qui, détenue pendant six ans dans la jungle colombienne, n’a été reliée au monde que par ce seul fil.

Mme Odette Terrade. Absolument !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je parle d’Ingrid Betancourt, qui – nous l’avons su un peu tardivement – écoutait RFI depuis son lieu de captivité. C’est d’ailleurs par ce biais que ses enfants et sa famille ont pu lui adresser des messages.

Il est vrai que nous avons entendu nombre de philippiques, comme « RFI ne sert à rien » ou « ses programmes en ondes courtes sont ringards » ! Mais, pour l’auditrice que je viens d’évoquer, RFI, ne vous en déplaise, a joué un rôle très important ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Philippe Marini, rapporteur. Mais personne ne met RFI en cause !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Par conséquent, je refuse que, par un simple cavalier législatif, on modifie le financement de la seule chaîne d’information internationale que nous ayons en France. Ceux d’entre nous qui s’intéressent aux questions internationales n’écoutent que RFI.

Il faut le savoir, RFI tient à garder son autonomie éditoriale. Mais qu’en restera-t-il si l’État détient directement le capital de cette chaîne, comme le souhaite la commission spéciale du Sénat ?

RFI a des rédactions particulièrement compétentes et spécialisées, ainsi qu’un réseau de 600 correspondants dans le monde. Sa culture d’entreprise est faite de la recherche d’une réactivité maximale face aux événements internationaux, d’une information très pointue, d’une profondeur des analyses, d’une qualité technique et artistique des émissions et d’une bonne réception. C’est une radio qui produit 56 heures d’émission par jour, diffusées sur 200 flux différents, et qui émet 24 heures sur 24, en 19 ou en 20 langues, par tous les moyens, dont Internet et Worldspace. Elle fait tout cela pour 130 millions d’euros de dépenses publiques, avec une équipe de 1 000 personnes. Et on veut à présent mettre la main dessus, au risque de lui faire perdre son autonomie, sa spécificité, sa ligne éditoriale et sa crédibilité internationale.

Certes, nous pouvons très bien admettre l’utilité de la mutualisation des moyens des chaînes de l’audiovisuel international dans les domaines administratif ou commercial, mais à condition de respecter les droits des personnels et de ne pas créer un audiovisuel international standardisé qui parlerait d’une seule voix, en l’occurrence celle de l’État. Nous ne sommes plus au temps de l’ORTF !

L’audiovisuel international que nous voulons doit être constitué de chaînes de télévision, comme France 24 ou TV5 Monde, de chaînes de radio, notamment RFI, et de sites Internet. Il doit diffuser des informations diversifiées, non aseptisées et qui restent crédibles. Et, bien sûr, le personnel doit être réellement associé aux décisions prises, dans le cadre d’un véritable dialogue social. C’est pourquoi nous souhaitons un débat au Parlement sur l’audiovisuel international. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 303, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Il assure au titre de cette dernière le rayonnement international de la France par les moyens appropriés.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise simplement à préciser que RFI doit disposer des moyens suffisants pour assurer son fonctionnement normal.

En effet, je connais les inquiétudes qui existent sur ce point. Certes, je n’ai pas reçu de document particulier de la part des syndicats ou de leurs représentants, mais je voyage beaucoup. J’ai ainsi constaté que des émissions autrefois diffusées en langue étrangère ne l’étaient plus aujourd'hui.

C’est la raison pour laquelle je souhaite être certaine que RFI disposera effectivement des moyens appropriés pour garantir la diffusion de telles émissions en langue étrangère, notamment en arabe et en farsi, langue à laquelle je suis particulièrement attachée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je me demande si certains ne se trompent pas quelque peu de débat. Mes chers collègues, je vous le dis sincèrement, personne ne menace RFI ! (Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il s’agit seulement de simplifier et de clarifier une structure de détention capitalistique. (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)

Cela signifie que RFI demeurera à 100 % contrôlée par l’État et conservera sa pleine personnalité et l’ensemble de ses missions. Mais, au lieu d’avoir une sorte de « râteau », avec un rattachement direct à l’État d’un certain nombre d’entités, vous aurez un groupe qui sera formé de plusieurs participations contrôlées par une seule holding. Pour autant, la société opérationnelle demeurera RFI, avec toute sa personnalité et ses rédactions, donc son autonomie.

En outre, je le rappelle, la holding « société de l’audiovisuel extérieur de la France » est seulement destinée à mutualiser des fonctions de support : sont évoquées l’administration, les ressources humaines, les finances et certaines tâches d’intérêt général en matière de distribution. Toutefois, aucune de ces finalités ne peut ni ne doit conduire à priver une antenne, et plus spécialement RFI, de la pleine maîtrise de sa programmation.

Il me semble donc que l’on se trompe de projet : cette réforme n’est qu’une simplification juridique ; il ne faut pas lui accorder plus d’importance qu’elle n’en a.

Il est vrai qu’un problème se pose par ailleurs, mais qui n’a pas été abordé à travers ces amendements : c’est celui du devenir de TV5 Monde, une chaîne de télévision francophone, et non purement française, qui est cofinancée par plusieurs institutions et États étrangers avec lesquels nous avons noué des partenariats.

Toutefois, il s'agit d’un autre sujet qui, naturellement, sera traité, si c’est nécessaire, en temps utile, dans les enceintes adéquates et par les moyens appropriés.

Pour rassurer nos collègues à propos du maintien de l’intégrité de RFI, nous pourrions peut-être donner satisfaction à l’amendement n° 303 présenté par Mme Nathalie Goulet, qui vise à réaffirmer que cette chaîne participe au « rayonnement international de la France par des moyens appropriés ». Ainsi, ses missions se verraient pleinement confirmées, ce dont, d'ailleurs, personne ne devrait douter.

Je suggère donc à Mmes Joëlle Garriaud-Maylam et Nathalie Goulet de bien vouloir retirer leurs amendements nos 310 et 1008.

S'agissant des amendements nos 476 et 1024, qui ont été présentés respectivement par les groupes CRC et socialiste, et en me référant surtout à la présentation qui en a été faite puisqu’ils sont identiques aux précédents, j’émets, au nom de la commission, un avis tout à fait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Je fais miens les propos de M. le rapporteur.

Que de passions pour une réorganisation à caractère juridique, …

Mme Christine Lagarde, ministre. … qui n’est en aucune façon destinée à remettre en cause les missions, les moyens, l’excellence et la diffusion dans de nombreuses langues de Radio France Internationale ! Tel n’est pas du tout l’objet de cet article.

Je ne résiste pas au plaisir de vous présenter l’organisation de RFI avant et après cette réforme. (Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi montre deux organigrammes.)

Avant la réorganisation, la structure de RFI était effroyablement compliquée, comme le comprendrait même un juriste de bas étage, ce qui n’est d'ailleurs nullement votre cas, mesdames, messieurs les sénateurs.

La nouvelle organisation est beaucoup plus simple, car elle permet de concentrer en une holding l’ensemble des participations de l’État dans trois grandes chaînes, à savoir France 24, Radio France Internationale et TV5 Monde, sachant que nous finançons cette dernière avec certains partenaires, notamment francophones.

Nous n’avons absolument aucune autre intention, et surtout pas celle de remettre en cause la mission de Radio France internationale !

D'ailleurs, je rejoins Mme Monique Cerisier-ben Guiga pour me réjouir que Radio France Internationale soit si largement diffusée que ses émissions aient pu parvenir à Ingrid Betancourt et jouer le rôle, nous le savons, d’un fil la rattachant à la vie et à l’espoir.

Il ne s’agit pas de porter aux nues tel canal ou telle chaîne, mais, si RFI émet en français en Colombie et diffuse également en farsi ou en arabe, contribuant ainsi à l’attractivité de notre territoire au-delà de ses frontières, c’est tant mieux.

À ceux qui affirment que cet article constituerait un cavalier, je rétorque qu’il n’en est rien. L’usage de la langue française, la diffusion de concepts nationaux et la promotion de notre culture, fût-ce en Iran et en farsi, relèvent parfaitement de l’attractivité du territoire, et je maintiens que cet article 37 ter trouve parfaitement sa place dans ce projet de loi.

C'est pourquoi je ne suis pas favorable à ces amendements identiques, même si j’invite Mmes Nathalie Goulet et Joëlle Garriaud-Maylam à retirer ceux qu’elles ont présentés, au bénéfice de mes explications qui, je l’espère, les auront convaincues.

J'ajoute que je suis prête à émettre un avis favorable sur l’amendement n° 303, qui est, si je ne m’abuse, un amendement de repli. En effet, je le répète, il n’est pas question de remettre en cause les missions et les moyens de RFI.

M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° 310 est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Comme un certain nombre de garanties m’ont été apportées et qu’un avis favorable a été émis sur mon amendement n° 303, je retire l’amendement n° 310, monsieur le président.

Toutefois, madame la ministre, RFI doit être soutenue non parce qu’elle diffuse dans toutes les langues, « fût-ce en farsi », mais parce qu’elle émet « aussi en farsi », ce qui est quelque peu différent !

M. le président. L'amendement n° 310 est retiré.

Madame Garriaud-Maylam, l'amendement n° 1008 est-il maintenu ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 1008 est retiré.

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 476 et 1024.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Nous maintenons notre amendement, parce que, selon nous, derrière cet article il n’y a non pas seulement la création d’une holding – cela aurait été très intéressant à étudier si les conditions d’un dialogue social normal avaient été respectées, ce qui n’a pas été le cas –, mais bien plutôt une fusion.

Si TV5 Monde a connu plusieurs crises ces derniers mois, c’est bien parce que nos partenaires francophones se méfient terriblement de l’uniformisation que l’on voudrait leur imposer en matière éditoriale, s'agissant de l’information et de la couverture de l’actualité politique.

Nous savons bien que le système du News Office que l’on veut mettre en place est destiné à produire une information commune pour tout l’audiovisuel international francophone, et nous ne souhaitons pas une telle évolution pour RFI.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. J’ai bien compris l’esprit de l’amendement n° 303, présenté par Mme Nathalie Goulet.

Mais tout de même, cet amendement, qui a reçu un avis favorable de M. le rapporteur – lui qui se veut si rigoureux d’ordinaire ! – et de Mme la ministre, vise à inscrire ceci dans la loi : « Il assure au titre de cette dernière le rayonnement international de la France par les moyens appropriés ». Voilà un texte de droit qui va tout changer !

Ainsi, désormais, il serait possible d’utiliser la loi pour donner des instructions ou fixer des objectifs ? Il ne faudra pas que M. le rapporteur ou le Gouvernement nous rétorque, lorsque nous voudrons inscrire dans un texte législatif notre souhait d’atteindre le plein emploi ou d’augmenter les salaires, que de telles mentions n’ont pas de portée normative ! Vous faites preuve de bien peu de rigueur, me semble-t-il !

Mme Christine Lagarde, ministre. C’est l’exception culturelle ! (Sourires.)

M. Jean Desessard. Oui, comme avec « l’amendement foie gras » !

M. Philippe Marini, rapporteur. C’est l’expression « par les moyens appropriés » qui a une portée normative.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 476 et 1024.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 127 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 326
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l’adoption 125
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 303.

M. Jean Desessard. Je m’abstiens !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 37 ter, modifié.

(L'article 37 ter est adopté.)

CHAPITRE V (priorité)

Garantir l'indépendance du service statistique public

Article 37 ter  (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 38 (priorité)

M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit l'intitulé du chapitre V du titre III :

Créer une Autorité de la statistique publique

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Mes chers collègues, avec cet amendement, nous en arrivons à la question de l’information économique. Comme vous le savez, la commission spéciale vous propose, à l’article 38 du projet de loi, de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.

Il nous semble particulièrement important que soit créée une autorité indépendante de la statistique publique, dont le champ de compétence s’étendra bien au-delà de celui de l'INSEE, l’Institut national de la statistique et des études économiques, puisque des moyens de statistiques publiques existent, par exemple, au sein de la Banque de France.

Du point de vue de la méthodologie et afin d’établir des programmes de travail, il est important que cette fonction – tout à fait essentielle dans une démocratie, plus particulièrement quand celle-ci se trouve partie prenante de l’Union européenne – soit exercée dans des conditions d’indépendance absolument irréprochables.

Or il a semblé à la commission spéciale que les modalités intermédiaires choisies par l’Assemblée nationale n’étaient pas de nature à garantir de manière suffisamment incontestable cette indépendance.

C'est pourquoi nous souhaitons que soit indiquée dès l’intitulé du chapitre V du titre III du projet de loi de modernisation de l’économie notre volonté de créer une autorité de la statistique publique.

Dans la version initiale proposée par le Gouvernement, il s’agissait d’une « Haute autorité ».

M. Jean Desessard. « Basse autorité » conviendrait mieux ...

M. Philippe Marini, rapporteur. Pour notre part, nous nous contenterons d’une « Autorité » car, vous le savez, nous sommes ennemis de toute forme d’inflation. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable.

J'ajoute que l’adjectif « haute » n’est vraiment utilisé à bon droit qu’à propos de la Haute Assemblée ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Je m’étais inscrite pour prendre la parole sur l’article 38, que nous examinerons juste après, mais je renonce à cette intervention.

En effet, il m’avait échappé qu’à travers cet amendement, discuté avant l’article 38, M. le rapporteur ne se contentait pas de proposer une modification de pure forme : bien qu’il supprime la qualification de « haute », il suggère de revenir au principe de l’autorité de la statistique publique qui figurait dans le texte initial du Gouvernement, lequel a été modifié par l’Assemblée nationale.

Mon intervention me permettra donc de présenter les raisons pour lesquelles je voterai contre l’amendement n° 22 ; bien entendu, elle vaudra aussi explication de vote sur l’article 38.

Il s’agit d’un article très important, tout particulièrement dans le contexte des polémiques qui se sont développées ces derniers mois sur la fiabilité de notre outil statistique public. Rappelons que ces polémiques, qui concernent la mesure du pouvoir d’achat, les indicateurs de chômage et la conjoncture économique, visent principalement l’INSEE.

Tout le monde est attaché à l’indépendance de la statistique nationale. Cette indépendance, que nul ne remet en cause et qui n’est plus à démontrer, est d’ailleurs confirmé tant par le rapport « d’évaluation par les pairs » de l’INSEE, effectué en janvier 2007, que par l’étude conduite par le FMI en 2003 sur les quatre critères principaux que sont les données, l’accès aux données, l’intégrité et la qualité.

Évidemment, pour éviter que chaque nouvelle publication d’un indice statistique important ne donne lieu à une vague de suspicion et de méfiance, nous pensons également qu’il convient d’inscrire dans la loi le principe d’indépendance de la statistique publique. Cette démarche, qui permettrait de se conformer au code de bonnes pratiques de la statistique européenne, adopté en 2005, ne devrait d’ailleurs pas se limiter à l’INSEE, certains ministères possédant également leurs propres services de statistiques, comme par exemple le ministère du travail avec sa direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, qui publie des études fort lues et commentées.

Après un important travail parlementaire, nos collègues députés ont substantiellement modifié l’article 38 et sont allés jusqu’à modifier le titre du chapitre V. Pour aboutir à ce résultat, ils ont suivi les recommandations de la mission d’information commune aux trois commissions des finances, des affaires économiques et des affaires sociales de l’Assemblée nationale, chargée d’examiner la gouvernance de l’INSEE. Leur rédaction est donc le fruit d’un véritable consensus, le rapport de la mission d’information qui l’a motivée ayant été adopté à l’unanimité des trois commissions. Je précise par ailleurs que cette mission d’information, très diversifiée dans sa composition, était présidée par Pierre-Alain Muet et qu’elle avait comme rapporteur Hervé Mariton.

Le texte proposé par l’Assemblée nationale définit le service statistique public et pose le principe de son indépendance, ce que ne faisait pas le texte du Gouvernement et ne ferait pas l’amendement de M. Marini, s’il était adopté. À l'instar des députés, nous ne sommes pas favorables à la création d’une autorité « indépendante » supplémentaire, ce que nous propose M. le rapporteur en changeant le titre du chapitre V. Il nous semble que le Conseil supérieur de la statistique, qui reprend les compétences du Conseil supérieur de l’information statistique, le CNIS, lequel n’a pas démérité, doit être maintenu. Il faut sans doute créer également un comité scientifique de neuf membres qui serait chargé de veiller au respect du principe de l’indépendance professionnelle dans la production et la diffusion de la statistique publique.

Si je développe ces explications maintenant, monsieur le président, c’est parce qu’en adoptant l’amendement n°22, qui semble de prime abord purement rédactionnel, on amputerait en réalité la discussion à venir sur l’article 38. Bien évidemment, pour ne pas allonger la discussion, je ne réitérerai pas ces arguments lors du débat sur l’article 38.

Ainsi, monsieur le rapporteur, vous proposez de revenir au texte initial, qui créait une Autorité de la statistique publique. Mais ce faisant, vous ne satisfaites personne. Il faut surtout éviter de traiter l’INSEE avec défiance. Les statisticiens qui y travaillent sont sans doute, de par leur statut de fonctionnaire, les plus aptes à affronter toutes sortes de pressions contraires et à respecter la déontologie de la profession en préservant la transparence et la qualité des outils méthodologiques employés. Nous nous opposons donc à la modification du titre que vous proposez, monsieur le rapporteur. Elle emporterait en effet une modification totale de l’article 38, pour revenir à une rédaction initiale qui ne se justifie nullement au regard de notre outil national de statistiques, et qui serait de plus interprétée comme une marque de défiance à son égard.

Mme Odette Terrade. Très juste !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L’intitulé du chapitre V du titre III est donc ainsi rédigé.

Intitulé du Chapitre V
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 38 bis (priorité)

Article 38 (priorité)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 477, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet article 38 du présent projet de loi vise, concrètement, à instituer une nouvelle autorité administrative indépendante appelée, selon les cas, Haute Autorité ou Autorité de la statistique publique. Ce dispositif a pourtant été remis en cause par les députés, qui ont préféré renforcer le rôle du Conseil national de l’information statistique.

À vrai dire, l’article 38 est présenté comme devant traduire dans notre droit français la logique qui préside aux pratiques statistiques des autres pays de l’Union européenne où, contrairement à la France, ce ne sont en général pas des organismes publics comme l’INSEE qui assurent l’essentiel de la production statistique.

Le grief que l’on semble d’ailleurs faire à l’INSEE serait de souffrir d’un manque d’indépendance au regard de la puissance publique, ce qui nuirait à la qualité de ses prestations.

Au contraire, nous pensons que c’est justement parce que l’INSEE et les services statistiques des ministères, administrations et institutions spécialisées sont publics qu’ils sont indépendants. L’action des services publics de statistique est en effet guidée par ces missions essentielles que sont la transmission et la diffusion au public d’informations objectives, documentées, qui sont une source utile de réflexion et d’action pour chacun. Au lieu de constituer un handicap, le caractère public de ces organismes apparaît au contraire comme un atout, qui est d’ailleurs validé par les études internationales comparant la qualité des appareils statistiques.

Ainsi, malgré l’absence de toute inscription formelle de l’indépendance des organismes de statistiques dans les textes juridiques, on a toujours considéré que l’indépendance était réalisée de façon satisfaisante en France. De plus, cela n’a pas empêché la statistique publique d’évoluer très profondément, et ce sans difficulté majeure, à l’exception de quelques tensions assez vives de temps en temps.

La comparaison avec d’autres pays doit d’ailleurs être regardée à la lumière de deux traits profondément originaux de la statistique française dans le paysage européen : premièrement, elle est la seule à disposer d’un système formalisé et effectif de concertation approfondie de ses programmes grâce au CNIS ; deuxièmement, elle est la seule où existe une forte tradition d’articulation entre production statistique et études économiques et sociales au sein même des principaux organismes statistiques.

Il est certes possible de débattre du contenu même de l’information statistique et, surtout, de son interprétation par l’usager. Mais, de la même manière que ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on fera tomber la fièvre, ce n’est pas en mettant l’INSEE, et la statistique publique en général, sous la coupe d’une énième autorité administrative indépendante, que l’on réglera les questions récurrentes que se pose naturellement l’opinion sur des sujets aussi sensibles que l’indice des prix à la consommation ou encore le chômage.

C’est donc au bénéfice de ces observations que le groupe CRC vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression de l’article 38, ne serait-ce que pour signifier clairement le rejet de toute mise en cause de la qualité de l’intervention du service public de la statistique.

M. le président. L'amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

La loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques est ainsi modifiée :

1° L'article 1er est remplacé par deux articles ainsi rédigés :

« Art. 1er. - I. - Il est créé une Autorité de la statistique publique qui veille au respect du principe d'indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d'objectivité, d'impartialité, de pertinence et de qualité des données produites.

« II. - L'Autorité est composée de neuf membres :

« - un président nommé par décret en conseil des ministres en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique et technique ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le Président de l'Assemblée nationale ;

« - une personnalité qualifiée désignée par le Président du Sénat ;

« - un membre du Conseil économique et social désigné par le Président de ce dernier ;

« - le président du comité du secret statistique du Conseil national de l'information statistique ;

« - un membre de la Cour des comptes nommé par le Premier président de la Cour des comptes ;

« - un membre de l'inspection générale des finances nommé par le chef du service de l'inspection générale des finances ;

« - un membre de l'inspection générale des affaires sociales nommé par le chef de l'inspection générale des affaires sociales ;

« - une personnalité qualifiée en matière statistique nommée par le ministre chargé de l'économie.

« III. - Un décret en Conseil d'État précise les attributions et les modalités de fonctionnement de l'Autorité de la statistique publique.

« Art. 1er bis. - I. - Le Conseil national de l'information statistique est chargé, auprès de l'Institut national de la statistique et des études économiques, d'organiser la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique. Il fait des propositions pour l'élaboration du programme de travaux statistiques et la coordination des enquêtes statistiques menées par les personnes chargées d'une mission de service public.

« II. - Un décret en Conseil d'État fixe les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement du Conseil national de l'information statistique, ainsi que la représentation, en son sein, du Parlement et du Conseil économique et social. Il précise les conditions dans lesquelles l'autorité administrative décide du caractère obligatoire ou non de chaque enquête qui s'inscrit dans le cadre du programme annuel qu'elle a fixé. »

2° A la fin de l'article 3, les mots : « en vertu de l'article 1er » sont remplacés par les mots : « en vertu de l'article 1er bis ».

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Permettez-moi d’être surpris par ces démonstrations que je qualifierais de « corporatives ».

Lorsque je lis le texte qui vient de l’Assemblée nationale, je vois qu’il crée un comité d’experts au sein d’un organe interne à l’INSEE. Or l’INSEE n’est rien d’autre qu’une direction d’administration centrale du ministère de l’économie, sous l’autorité directe de Mme le ministre.

Vous parlez d’indépendance, ma chère collègue, mais, très sincèrement, si l’on veut se doter, à l’instar des autres États européens, d’un outil véritablement indépendant quant aux méthodes, aux concepts et aux programmes de travail, mieux vaut suivre la solution qui était initialement proposée par le Gouvernement et que la commission spéciale vous suggère précisément de rétablir.

L’amendement n° 23 rectifié a ainsi pour objet de créer une Autorité de la statistique publique qui veillerait « au respect du principe d’indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d’objectivité, d’impartialité, de pertinence et de qualité des données produites ». Franchement, êtes-vous opposée à ces principes, madame Terrade ? Considérez-vous qu’une sorte d’autogestion professionnelle les garantisse mieux que cette autorité ? C’est bien la question qui est posée, et je préfère, mes chers collègues, la poser en toute clarté, et en public.

Quant à la composition de cette autorité, elle comprend un président nommé par décret en conseil des ministres en raison de ses qualifications, une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale, une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat, un membre du Conseil économique et social désigné par le président de ce dernier, le président du comité du secret statistique du Conseil national de l'information statistique, un membre de la Cour des comptes nommé par le Premier président de la Cour, un membre de l'Inspection générale des finances nommé par le chef du service de l'Inspection générale des finances, un membre de l'Inspection générale des affaires sociales nommé par le chef de l'Inspection générale des affaires sociales, enfin une personnalité qualifiée en matière statistique nommée par le ministre chargé de l'économie.

Sincèrement, je ne vois là nul représentant d’un quelconque intérêt mercantile ou économique de nature à porter atteinte à l’indépendance professionnelle de nos chers amis les statisticiens publics ! Relisez bien la composition de cette autorité, madame Terrade, ainsi que toutes les motivations de ce texte ; je pense que vous serez alors totalement rassurée.

Par ailleurs, le texte proposé par l’amendement n° 23 rectifié pour l’article 1er bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 prend le soin de préciser le rôle du Conseil national de l’information statistique qui demeure, auprès de l’INSEE, chargé d’organiser la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique.

Vous voyez donc que ce Conseil est maintenu dans ses fonctions. Simplement, à ses côtés, un organe extérieur aura pour rôle de garantir l’exercice indépendant de ces fonctions, tout à fait essentiel pour la transparence.

Enfin, madame le ministre, ne faudrait-il pas également que l’on progresse pour doter Eurostat, organisme essentiel sur le plan européen, d’un vrai statut indépendant ? En effet, si l’INSEE est une direction du ministère des finances, Eurostat est un service dépendant du vice-président de la Commission chargé des affaires financières et monétaires. Nous progresserions beaucoup dans la comparabilité de nos finances publiques, notamment dans le respect des engagements issus du traité de Maastricht, ainsi que dans la transparence, si nous avions une vraie autorité européenne en charge des méthodes de comptabilité publique.

Pour en revenir à la France et pour conclure, il me semble, madame le ministre, que votre intention initiale était excellente. C’est pourquoi la commission spéciale sollicite du Sénat le rétablissement de l’article 38 dans une version très proche de celle initialement proposée par le Gouvernement.

M. le président. L'amendement n° 441, présenté par M. Raoul, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Repentin, Sueur, Yung, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du V du texte proposé par cet article pour l'article 1er de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, après le mot :

Sénat

insérer les mots :

, le Président du Conseil économique et social

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Il s’agit de permettre au président du Conseil économique et social de saisir le Conseil supérieur de la statistique, ce qu’il n’est pas autorisé à faire actuellement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est tout à fait défavorable aux amendements nos 477 et 441.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 477 et 441, et un avis favorable sur l'amendement n° 23 rectifié.

Au sein de l’Union européenne, la France est l’un des seuls pays à ne pas avoir encore inscrit l’indépendance de ses services statistiques en droit positif.

L'adoption de l’amendement n° 23 rectifié comblera cette lacune. Le principe d’indépendance concernera tous les services de la statistique, qu’il s’agisse de l’INSEE, dont personne aujourd'hui ne remet en cause la qualité des services, de la DARES ou des services statistiques qui se trouvent dans certains ministères.

Grâce à cette Autorité de la statistique publique, composée de neuf membres dont la désignation a été précisée par le M. le rapporteur, la France se dotera d’un organisme véritablement autonome, qui ne présentera aucun lien de consanguinité avec l’INSEE ou le CNIS : il sera indépendant à la fois dans sa constitution, dans sa composition et dans son fonctionnement. Je reprends devant la Haute Assemblée l’engagement que j’ai pris devant l'Assemblée nationale : cette institution n’aura aucune ligne budgétaire particulière, ne disposera d’aucune prérogative la détournant de sa vocation première, qui est d’émettre des avis et de garantir l’indépendance des services statistiques.

Pour répondre à votre interrogation, monsieur le rapporteur, j’ajoute qu’Eurostat est en train de créer une instance pratiquement similaire à celle que vise à mettre en place l’amendement n° 23 rectifié, afin de garantir l’indépendance des services statistiques européens de manière beaucoup plus rigoureuse encore.

M. Philippe Marini, rapporteur. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 477.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 23 rectifié.

Mme Nicole Bricq. Je ne reviens pas sur le dispositif proposé par la commission spéciale. La discussion qui aura lieu à ce propos entre les sénateurs et les députés en commission mixte paritaire ne manquera pas d’être fort intéressante !

Monsieur le rapporteur, en matière d’intérêts corporatistes, depuis hier soir,…

Mme Odette Terrade. On n’a que ça !

Mme Nicole Bricq. …un grand nombre d’amendements ont été examinés et acceptés par le Gouvernement, donnant satisfaction à de nombreuses catégories professionnelles.

Dispensez-vous de vos leçons sur le corporatisme, s’il vous plaît !

M. Philippe Marini, rapporteur. Vous promettez de faire fi de tout corporatisme d’ici à la fin des débats ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 38 est ainsi rédigé, et l'amendement n° 441 n'a plus d'objet.

Article 38 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 39 (priorité) (début)

Article 38 bis (priorité)

Dans le troisième alinéa de l'article L. 1411-8 et le deuxième alinéa de l'article L. 2132-3 du code de la santé publique, le premier alinéa de l'article 7 et le premier alinéa de l'article 7 bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 précitée, les mots : « national de l'information » sont remplacés par les mots : « supérieur de la ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 24 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.

L'amendement n° 478 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 24.

M. Philippe Marini, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de suppression technique.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 478.

Mme Odette Terrade. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est favorable à ces amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 24 et 478.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l'article 38 bis est supprimé.

TITRE IV (priorité)

MOBILISER LES FINANCEMENTS POUR LA CROISSANCE

CHAPITRE IER (priorité)

Moderniser le livret A

Article 38 bis (priorité)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Article 39 (priorité) (interruption de la discussion)

Article 39 (priorité)

I. - La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est ainsi rédigée :

« Section 1

« Le livret A

« Art. L. 221-1. - Le livret A peut être proposé par tout établissement de crédit habilité à recevoir du public des fonds à vue et qui s'engage à cet effet par convention avec l'État.

« Art. L. 221-2. - L'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1 ouvre un livret A à toute personne mentionnée à l'article L. 221-3 qui en fait la demande.

« Art. L. 221-3. - Le livret A est ouvert aux personnes physiques, aux associations mentionnées au 5 de l'article 206 du code général des impôts et aux organismes d'habitations à loyer modéré.

« Les mineurs sont admis à se faire ouvrir des livrets A sans l'intervention de leur représentant légal. Ils peuvent retirer sans cette intervention les sommes figurant sur les livrets ainsi ouverts, mais seulement après l'âge de seize ans révolus et sauf opposition de la part de leur représentant légal.

« Une même personne ne peut être titulaire que d'un seul livret A.

« Art. L. 221-4. - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'ouverture et de fonctionnement du livret A.

« Les versements effectués sur un livret A ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d'un plafond fixé par le décret prévu à l'alinéa précédent.

« Le même décret précise les montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de dépôt pour les établissements qui proposent le livret A et pour l'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1.

« Le même décret fixe les modalités de clôture du livret A.

« Art. L. 221-5. - Une quote-part du total des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable régi par l'article L. 221-27 par les établissements distribuant l'un ou l'autre livret est centralisée par la Caisse des dépôts et consignations dans le fonds prévu à l'article L. 221-7.

« Le taux de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé de manière à ce que les ressources centralisées sur ces livrets dans le fonds prévu à l'article L. 221-7 soient au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,25.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, précise les conditions de mise en œuvre des deux alinéas précédents.

« Les ressources collectées par les établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable et non centralisées en application des alinéas précédents sont employées par ces établissements au financement des petites et moyennes entreprises, notamment pour leur création et leur développement, ainsi qu'au financement des travaux d'économie d'énergie dans les bâtiments anciens. Les dépôts dont l'utilisation ne satisfait pas à cette condition sont centralisés à la Caisse des dépôts et consignations.

« Les établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable rendent public annuellement un rapport présentant l'emploi des ressources collectées au titre de ces deux livrets et non centralisées.

« Ces établissements fournissent, une fois par trimestre, au ministre chargé de l'économie, une information écrite sur les concours financiers accordés à l'aide des ressources ainsi collectées.

« La forme et le contenu des informations mentionnées aux deux alinéas précédents sont fixés par arrêté du ministre chargé de l'économie.

« Art. L. 221-6. - Les établissements distribuant le livret A et ceux distribuant le livret de développement durable perçoivent une rémunération en contrepartie de la centralisation opérée. Ses modalités de calcul sont fixées par décret en Conseil d'État, après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.

« L'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1 perçoit une rémunération complémentaire au titre des obligations spécifiques qui lui incombent en matière de distribution et de fonctionnement du livret A. Les modalités de cette compensation sont fixées par décret en Conseil d'État.

« La rémunération et la rémunération complémentaire mentionnées aux deux alinéas précédents sont supportées par le fonds prévu à l'article L. 221-7.

« Art. L. 221-7. - I. - Les sommes mentionnées à l'article L. 221-5 sont centralisées par la Caisse des dépôts et consignations dans un fonds géré par elle et dénommé fonds d'épargne.

« II. - La Caisse des dépôts et consignations, après accord de sa commission de surveillance et après autorisation du ministre chargé de l'économie, peut émettre des titres de créances au bénéfice du fonds.

« III. - Les sommes centralisées en application de l'article L. 221-5 ainsi que, le cas échéant, le produit des titres de créances mentionnés au II du présent article, sont employés en priorité au financement du logement social. Une partie des sommes peut être utilisée pour l'acquisition et la gestion d'instruments financiers définis à l'article L. 211-1.

« IV. - Les emplois du fonds d'épargne sont fixés par le ministre chargé de l'économie. La commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations présente au Parlement le tableau des ressources et emplois du fonds d'épargne visé au présent article pour l'année expirée.

« Art. L. 221-8. - Les opérations relatives au livret A sont soumises au contrôle sur pièces et sur place de l'inspection générale des finances.

« Art. L. 221-9. - Il est créé un observatoire de l'épargne réglementée chargé de suivre la mise en œuvre de la généralisation de la distribution du livret A, notamment son impact sur l'épargne des ménages, sur le financement du logement social et sur le développement de l'accessibilité bancaire.

« Les établissements de crédit fournissent à l'observatoire les informations nécessaires à l'exercice de sa mission.

« Un décret en Conseil d'État précise l'organisation et le fonctionnement de l'observatoire, ainsi que la liste et la périodicité des informations que les établissements distribuant le livret A lui adressent.  L'observatoire de l'épargne réglementée remet un rapport annuel au Parlement et au Gouvernement sur la mise en œuvre de la généralisation de la distribution du livret A. »

II. - Après l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 518-25-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 518-25-1. - I. - Un établissement de crédit, dont La Poste détient la majorité du capital, reçoit les dépôts du livret A, dans les conditions prévues à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II.

« II. - L'État et cet établissement de crédit concluent une convention qui précise les conditions applicables à cet établissement pour la distribution et le fonctionnement du livret A.

« III. - La Poste et ce même établissement de crédit concluent une convention, dans les conditions prévues à l'article L. 518-25, qui précise les conditions dans lesquelles tout déposant muni d'un livret A ouvert auprès de cet établissement peut effectuer ses versements et opérer ses retraits dans les bureaux de poste dûment organisés à cet effet. »

III. - Le 7° de l'article 157 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 7° Les intérêts des sommes inscrites sur les livrets A ainsi que ceux des sommes inscrites sur les comptes spéciaux sur livret du Crédit mutuel ouverts avant le 1er janvier 2009 ; ».

IV. - Le 2° de l'article 1681 D du même code est ainsi rédigé :

« 2° Un livret A, sous réserve que l'établissement teneur du livret le prévoie dans ses conditions générales de commercialisation, ou un livret A ou un compte spécial sur livret du Crédit mutuel relevant du 2 du I de l'article 40 de la loi n°           du                      de modernisation de l'économie ».

V. - L'article L. 221-27 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après les mots : « ce livret », la fin de la dernière phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « sont employées conformément à l'article L. 221-5. » ;

2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Les versements effectués sur un livret de développement durable ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d'un plafond fixé par voie réglementaire. »

VI. - Le même code est ainsi modifié :

1° Le 2° de l'article L. 112-3 est ainsi rédigé :

« 2° Les livrets A définis à l'article L. 221-1 ; »

2° Le 4° du même article L. 112-3 est ainsi rédigé :

« 4° Les livrets de développement durable définis à l'article L. 221-27 ; »

3°   L'article L. 221-28 est abrogé.

VI bis. - Dans le 9° quater de l'article 157 du code général des impôts, les références : « aux articles L.221-27 et L. 221-28 » sont remplacées par la référence: « à l'article L. 221-27 ».

VII. - La section 8 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est complétée par un article L. 221-38 ainsi rédigé :

« Art. L. 221-38. - L'établissement qui est saisi d'une demande d'ouverture d'un produit d'épargne relevant du présent chapitre est tenu de vérifier préalablement à cette ouverture si la personne détient déjà ce produit. Il ne peut être procédé à l'ouverture d'un nouveau produit si la personne en détient déjà un. Un décret en Conseil d'État précise les modalités de cette vérification. »

VIII. - Le VII de la section 2 du chapitre III du titre II du livre des procédures fiscales est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Prévention de la multi-détention de produits d'épargne générale à régime fiscal spécifique

« Art. L. 166 A. - À l'occasion de l'ouverture d'un produit d'épargne relevant du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier, l'administration fiscale transmet, sur demande, à l'établissement mentionné à l'article L. 221-38 du même code, les informations indiquant si le demandeur est déjà détenteur de ce produit. »

IX. - L'article L. 312-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° La dernière phrase du deuxième alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :

« En cas de refus de la part de l'établissement choisi, la personne peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises. L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte informe le demandeur que celui-ci peut demander à la Banque de France de désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné. Il lui propose, s'il s'agit d'une personne physique, d'agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d'un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l'ouverture du compte. » ;

2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« L'association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29, adopte une charte d'accessibilité bancaire afin de renforcer l'effectivité du droit au compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission par les établissements de crédit à la Banque de France des informations requises pour l'ouverture d'un compte. Elle définit les documents d'information que les établissements de crédit doivent mettre à disposition de la clientèle et les actions de formation qu'ils doivent réaliser.

« La charte d'accessibilité bancaire, homologuée par arrêté du ministre chargé de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par la commission bancaire et relève de la procédure prévue à l'article L. 613-15. »

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l'article.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous entamons l’examen d’un titre important, qui porte sur un sujet suscitant les passions.

Le 10 mai 2007, au nom des règles de concurrence fixées par les traités, la Commission européenne a donné à la France un délai de neuf mois pour réformer en profondeur le mode de distribution du livret A et du livret bleu, qui est aujourd'hui attribué à la Banque Postale, aux Caisses d’épargne et au Crédit mutuel.

Cette décision, bien au-delà de ses effets sur les équilibres économiques des établissements concernés, est susceptible d’affecter de manière grave et définitive la cohésion sociale dont le Gouvernement est le garant devant les Français.

Depuis sa création en 1818, le livret A, qui compte 45 millions de titulaires, est le symbole de l’épargne populaire. Tous les gouvernements qui se sont succédé se sont attachés à préserver son mode de distribution, ainsi que le mode de centralisation de ses fonds, confiée à la Caisse des dépôts et consignations. Ils l’ont fait au nom de deux impératifs majeurs et incontournables : le financement du logement social cofinancé à 80 % par le livret A et la lutte contre l’exclusion bancaire.

Dans son rapport 2007 sur l’état du mal-logement en France, la Fondation Abbé-Pierre estime à 5 963 145 le nombre total de « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme ». L’Union sociale pour l’habitat, qui rassemble l’ensemble du mouvement HLM, estime, au 31 août 2007, que plus d’un million de demandes de logement HLM sont en attente en France métropolitaine.

Aujourd’hui, environ 10 millions de personnes résident dans le parc HLM et acquittent, en moyenne, des loyers deux fois moins élevés que dans le secteur privé. Il est prévu que le financement du plan Borloo de relance du logement social repose à 80 % sur les fonds collectés par le livret A.

D’une manière générale, les Français continuent de vivre une situation de crise en matière de logements : logements chers à la location comme à l’achat, ségrégation, difficultés d’accès au logement, personnes sans-abri…

Par ailleurs, à défaut de chiffrage officiel, on estime couramment, depuis le débat législatif sur la mise en place de la procédure de rétablissement personnel, en 2004, que l’exclusion bancaire touche environ 5 millions de personnes dans notre pays. Or le livret A représente par excellence le dernier outil de lutte contre l’exclusion bancaire. En l’absence de tout dispositif légal de service universel bancaire gratuit, les populations les plus démunies et souvent âgées – exclus, bénéficiaires de minima sociaux, travailleurs émigrés, etc. –utilisent leur livret A pratiquement quotidiennement pour effectuer leurs opérations financières.

Produit d’épargne populaire sans équivalent à l’échelon international, le livret A a fait la preuve de sa solidité depuis des décennies. En 190 ans d’existence, il n’a jamais spolié aucun épargnant. Il est le moins coûteux, en Europe, pour les finances publiques. Une déstabilisation du système aurait un impact négatif sur les finances publiques nationales et locales ainsi que sur l’offre de logement social.

En cas de banalisation du livret A, la plupart des établissements financiers chercheraient à capter les bons clients et à décourager les autres, aux dépens des réseaux déjà actifs qui conserveraient la seule clientèle sociale. Leur objectif serait de siphonner les fonds du livret A au profit de placements plus profitables. Cette hypothèse inacceptable est pourtant très vraisemblable ! De plus, le secteur bancaire ne manquerait pas de contester le système de centralisation auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

M. Jean Desessard. Absolument !

Mme Odette Terrade. À cet égard, le CODEVI constitue un précédent très éclairant : seuls 6 % des fonds collectés aujourd’hui sont aujourd'hui centralisés par la Caisse des dépôts et consignations !

Dès lors, le système de financement du logement social, tel que nous le connaissons aujourd’hui, aurait vécu : il serait entièrement entre les mains des banques. Des établissements financiers, à la santé déjà très florissante, seraient alors en capacité d’imposer leurs conditions aux organismes d’HLM chargés d’assurer dans de bonnes conditions le logement de la fraction la plus modeste et la plus vulnérable de la population.

La Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, présidée par M. Michel Bouvard, député UMP de Savoie, a rendu publique sa position le 27 septembre 2006 : « S’agissant de la distribution du livret A et de la question de sa banalisation, une telle décision est du ressort des pouvoirs publics. La Commission de surveillance estime pour sa part que les nouveaux réseaux collecteurs pourraient être amenés à proposer aux détenteurs du livret A d’autres produits financiers. Elle juge ce risque comme très sérieux. En définitive, les fonds centralisés à la Caisse des dépôts pourraient progressivement ne plus permettre d’assurer le financement du logement social. »

M. le président. Veuillez conclure, madame Terrade.

Mme Odette Terrade. Outre des parlementaires de la majorité et de l’opposition, la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations est notamment composée de magistrats issus du Conseil d’État et de la Cour des Comptes, du Gouverneur de la Banque de France et du directeur du Trésor au ministère de l’économie, des finances et de l’emploi.

La mission sur le livret A, confiée par le Premier ministre au groupe de travail présidé par Michel Camdessus, n’est de toute évidence pas de nature à écarter le risque d’implosion du système du financement du logement social. Cette mission ayant notamment pour objectif la modernisation de la distribution du livret A et des circuits de financement du logement social, elle peut donc envisager d’accompagner la banalisation.

M. le président. C’est terminé, madame !

La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.

Mme Nicole Bricq. Avant que nous engagions la discussion des amendements déposés sur cet article, je tiens à exposer les quatre principes qui sous-tendent les amendements déposés par le groupe socialiste, afin que ces derniers ne soient pas mal interprétés.

Premièrement, la libéralisation du livret A est conduite dans une précipitation dangereuse.

M. Philippe Marini, rapporteur. Cela fait des années que cela aurait dû être fait ! Que ne l’avez-vous fait plus tôt !

Mme Nicole Bricq. Il s’agit en effet d’une épargne réglementée dont l’importance quantitative, l’attachement que lui portent les Français, la destination – le logement social –, la sécurisation par la Caisse des dépôts et consignations en font un élément consubstantiel à ce que je n’hésite pas à appeler le « vivre ensemble » en France.

Deuxièmement, cette libéralisation procurera des avantages indus aux banques nouvelles entrantes, au travers d’une rémunération forfaitaire élevée et sans contrepartie.

Troisièmement, la décentralisation des fonds collectés outrepasse la demande de la Commission européenne, et l'article 39, tel qu’il nous est proposé, ne garantit pas la couverture des besoins en logements sociaux dans la durée.

Quatrièmement, cette libéralisation se fait dans un contexte de crise financière et de resserrement du crédit – la Banque centrale européenne a augmenté aujourd'hui même les taux directeurs d’un quart de point –, ainsi que de recul du pouvoir d'achat qui pénalisera les plus pauvres : certains pourraient se voir rejetés de l’accessibilité bancaire et ceux qui seraient « bancarisés » pourraient se voir « débancarisés ».

C’est à la lumière de ces quatre principes que doivent être appréhendés tous les amendements déposés par le groupe socialiste.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, sur l'article.

M. Thierry Repentin. Cet article 39 a de fortes conséquences. Ainsi, depuis 150 ans, 80 % des logements sociaux ont été construits grâce au livret A. De plus, ce texte concerne près des deux tiers des Français qui détiennent un livret de ce type. Et aujourd’hui, tel qu’il est rédigé, il aura pour effet tant de fragiliser le système de financement du logement social que de remettre en cause le droit au compte des plus fragiles de nos concitoyens.

Comme je l’avais exposé lors de la discussion générale, la fin de la centralisation totale, que vous prenez l’initiative de proposer, ne constitue ni plus, ni moins, qu’une largesse faite aux banques. Et, contrairement à ce que l’on peut entendre ces temps-ci, ce point est loin d’être une simple question de clivage politique. Nous sommes nombreux, de tendances politiques très différentes, à regretter cette mesure, qui ne peut être comprise que comme telle. Ce point de vue est partagé tant par des parlementaires, que par des responsables associatifs et des élus locaux, de toutes sensibilités politiques. Nous avons d’ailleurs été nombreux à signer l’appel de l’Union sociale pour l’habitat, qui a exprimé ses craintes relatives à la pérennité du financement du logement social, craintes confirmées par certains grands banquiers.

Comment comprendre autrement que comme une aide financière de l’État le fait de laisser aux banques privées la libre disposition d’une épargne défiscalisée, dans une proportion pouvant atteindre jusqu’à 60 milliards d’euros ? Neelie Kroes, commissaire européen chargé de la concurrence, a elle-même reconnu que c’était une véritable question pour la Commission européenne, qui, contrairement à ce qu’affirme Bercy, n’a pas été consultée sur cette proposition de la réforme. Il n’est pas inutile de rappeler que, dans la décision visant à la banalisation de la distribution, la Commission avait bel et bien validé le principe de centralisation à 100 % à la Caisse des dépôts et consignations.

Il nous paraît très risqué de laisser 30 % de la collecte à la disposition des banques, alors que, jusqu’à présent, ces mêmes 30 % servaient à la Caisse des dépôts et consignations pour équilibrer les comptes des 70 % prêtés aux organismes de logement social. Ces 30 % ne bénéficieront plus de la garantie de l’État, ce qui implique que cette part des sommes placées par les détenteurs du livret A sera mise en jeu, à la guise des banques, sur n’importe quelle opération, y compris les plus risquées.

Mettre fin à la centralisation et, ainsi, soumettre le financement du logement social aux aléas du marché, voilà qui nous promet des temps difficiles ! Si le niveau d’encours se trouvait menacé, de deux choses l’une : soit il faudrait recourir à l’endettement des collectivités territoriales ou de l’État, soit il faudrait faire appel de façon accrue aux marchés financiers, ce qui signifie une hausse des taux d’intérêt pour les organismes d’HLM, un raccourcissement de la durée des prêts, et donc une augmentation inévitable des loyers dans le parc HLM.

C’est pour éviter un tel scénario que nous avons déposé plusieurs amendements de repli tendant au moins à inscrire le taux minimum de 70 % de centralisation, que vous annoncez sans pour autant le faire figurer dans le projet de loi, et à relever le coefficient multiplicateur minimum à 1,33.

Ces amendements sont les garanties les plus minimes que nous nous devons d’apporter pour éviter une remise en cause trop importante du financement du logement social.

C’est aussi pour cette raison que nous vous proposerons d’augmenter le plafond du livret A. Cette hausse permettrait aussi d’accroître l’épargne sur livret et de garantir une hausse des encours à disposition des politiques publiques de l’habitat.

Nous souhaitons votre soutien à l’égard de cette série de propositions, ce qui marquerait votre attachement à l’intérêt général en le plaçant au-dessus des intérêts d’établissements bancaires qui vont voir leurs profits s’accroître grâce à l’épargne des détenteurs d’un livret A.

C’est d’ailleurs ce qui expliquerait votre décision de rémunérer les banques sur les fonds destinés au logement social, alors qu’elles auront largement de quoi se rétribuer avec les 30 % que vous voulez leur laisser.

Dans le texte qui nous est proposé, vous justifiez cette rémunération par les transferts de centralisation. Or, la centralisation ne va rien coûter aux banques. Seules les opérations aux guichets sont coûteuses ; cette rémunération devrait donc se faire au prorata des opérations effectuées sur livret. C’est en ce sens que va l’un de nos amendements.

De plus, vous faites ce choix au moment où d’autres investissements seront sûrement nécessaires et bien plus pertinents. Par exemple, nous savons tous que la banalisation risque d’avoir un impact clairement négatif sur le réseau de points de contact de La Poste situés, notamment, en zone rurale ou dans les quartiers les plus difficiles, parce que le produit net bancaire de cet établissement dépend fortement de son duopole de la collecte sur le livret A. Mais sur ce point, nous ne partageons sans doute pas les mêmes priorités.

D’autre part, en obligeant la seule Banque Postale à accepter toute demande d’ouverture de livret, l’article 39 la destine à être la « banque des pauvres », alors que les autres banques pourront sélectionner les clients « dignes » d’ouvrir un compte chez elles. C’est d’autant plus paradoxal que cela signifie que ces mêmes banques, alors qu’elles ont voulu la banalisation du livret A, ne seront pas tenues d’ouvrir un tel livret à tout client potentiel en faisant la demande. Cela se confirme, puisque vous avez déclaré que vous envisagiez, pour ceux qui se servent du livret A comme d’un compte courant, de mettre en place un dispositif « spécial » d’accessibilité bancaire. Mais cette mesure, si elle entrait en application, ne ferait qu’entériner la discrimination entre les détenteurs de livrets confortables et modestes.

Mesdames les ministres, il ne vous reste plus qu’à nous démontrer, en émettant un avis favorable sur certains des amendements que nous allons vous présenter, que, comme nous, vous êtes attachées à la vocation sociale et à la préservation de l’équilibre du livret A. Si vous agissez ainsi, madame le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, vous enverrez un signal fort à Mme le ministre du logement et de la ville, comme aux 1 400 000 demandeurs de logements sociaux, auxquels je pense plus particulièrement, et vous contribuerez à la construction des 900 000 logements qui manquent aujourd’hui pour héberger la totalité de nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, sur l'article.

M. Michel Billout. Voilà quelques semaines, avant l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi dont nous débattons, le communiqué suivant a été rendu public : « L’Assemblée nationale examine une réforme très importante du livret A. Les signataires souhaitent attirer son attention sur les risques que comporte le texte actuel et lui proposer des améliorations.

« Comme l’a demandé la Commission européenne, le projet de loi ouvre la distribution du livret A à l’ensemble des banques, mais il va très au-delà de cette demande et peut mettre en danger deux services d’intérêt général reconnus par Bruxelles : l’accessibilité bancaire et le financement du logement social.

« La réforme a pour effet l’abandon de la centralisation complète du livret A.

« Le taux de 70 % de centralisation de la collecte livret A-LDD, auquel s’était engagé le Gouvernement, ne figure pas dans la loi : en laissant une part non définie de la collecte à la disposition du secteur bancaire, la réforme crée un risque de confrontation entre les intérêts des banques et ceux du logement social si, au-delà d’une probable période de hausse, la collecte subit des fluctuations.

« En cantonnant l’accessibilité bancaire liée au livret A à La Banque Postale, la réforme spécialise les réseaux par type de clientèle, et met à la charge des fonds d’épargne, donc du logement social, le coût supplémentaire de ce service, qui s’ajoutera à celui de la rémunération des banques.

« En l’état, le texte ne répond donc pas, dans la durée, aux conditions posées par le Président de la République à l’ouverture de la distribution : sécurité de la collecte pour le logement social et diminution du coût des prêts.

« Les signataires demandent en conséquence :

« Le principe d’une centralisation complète de la collecte du livret A, ou à défaut l’inscription dans la loi d’un taux minimum de centralisation fixé à 70 % de la collecte des livrets A et LDD, le seuil-plancher prévu par le texte intervenant comme clause de sauvegarde.

« L’affectation garantie de la ressource au logement social : d’autres emplois d’intérêt général ne doivent être autorisés qu’en cas d’excédents constatés.

« Une gouvernance et un contrôle de la Caisse des dépôts prenant en compte son rôle dans le financement du logement social, et le caractère non discriminatoire des prêts selon les organismes et les territoires.

« La prise en charge par l’ensemble des banques distribuant le livret A de l’accessibilité bancaire. À défaut, la garantie dans la loi du non-report sur les prêts en cours ou à venir au logement social du coût du service assuré par la Banque Postale.

« Un encadrement clair et rigoureux de la rémunération des banques.

« La répercussion complète de toute baisse du coût de la ressource sur le coût des prêts en cours ou à venir au logement social, pour soutenir la production et favoriser des loyers accessibles aux ménages à ressources modestes.

« L’engagement du Gouvernement à ne pas diminuer les subventions aux opérations de logement social, ce qui aboutirait à supprimer le seul effet positif de la réforme sur l’équilibre des opérations et le niveau des loyers. »

Ce communiqué a été publié le jeudi 29 mai 2008.

Suit la qualité des signataires : « Marc Censi, président de l’Assemblée des communautés de France, Jacques Bigot, président de l’Association des communautés urbaines de France, Michel Destot, président de l’Association des maires de grandes villes de France, Martin Malvy, président de l’Association des petites villes de France, Bruno Bourg-Broc, président de la Fédération des maires des villes moyennes, André Laignel, secrétaire général de l’Association des maires de France, Michel Delebarre, président de l’Union sociale pour l’habitat. »

Une telle prise de position impose que nous ne légiférions pas à la légère. Il est manifeste que le texte que nous examinons aujourd’hui ne recueille aucunement le soutien large que le Gouvernement était en droit d’attendre d’une telle disposition.

Bien au contraire, de nombreux élus, de sensibilité proche du Gouvernement, trouvent que la réforme qui nous est proposée présente nombre de défauts.

Je tenais, au moment où nous engageons la discussion de cet article, à faire état de cette prise de position parce qu’elle nous amène tous à nous interroger et montre à quel point les associations d’élus sont légitimement préoccupées par ce qui se prépare.

M. le président. Je rappelle au Sénat que, pour la clarté des débats, il a été décidé, sur proposition de la commission spéciale, d’examiner en premier lieu les amendements tendant à la suppression de l’article 39.

Je suis donc saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 371 est présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 979 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 890 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 371.

M. Thierry Repentin. La décision de la Commission européenne de banaliser la distribution du livret A en France, pour mettre fin à la situation de monopole actuelle, a – dois-je le rappeler ? – fait l’objet d’un recours déposé le 23 juillet 2007 par l’État français. À ce jour, la décision de justice n’a toujours pas été rendue.

En fait, ce recours n’avait pour objet, du point de vue du Gouvernement, que de gagner du temps, ce dernier ayant renoncé, parallèlement, à défendre les spécificités de l’épargne réglementée des Français, tout en élaborant une réforme, dans l’urgence – d’ailleurs le projet de loi a été déclaré d’urgence –, d’un livret A dont l’histoire ancienne a marqué autant nos concitoyens que les vénérables institutions que sont La Poste, les Caisses d’épargne et le Crédit mutuel.

Le livret A, c’est l’épargne populaire. Mais le Gouvernement a saisi l’occasion qui lui était donnée pour mettre en œuvre, dans le domaine de l’épargne – il le fait d’ailleurs aussi dans d’autres domaines –, une politique de dérèglementation et de remise en cause d’un dispositif ancien, qui a pourtant fait ses preuves de service public et de solidarité.

Les mesures contenues dans l’article 39 du projet de loi de modernisation de l’économie vont bien plus loin que la simple généralisation de la distribution du livret A par les banques, car elles remettent en cause la centralisation complète des fonds collectés auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Or, rien ne justifie l’abandon de ce mécanisme de centralisation. En tout cas, l’Union européenne n’a pas demandé l’adoption d’une telle disposition.

Remettre en cause cet équilibre est dangereux pour l’avenir du financement du logement social, car rien ne garantit, à terme, un niveau de collecte suffisant. L’expérience de la transformation de l’ancien livret CODEVI en livret de développement durable le démontre.

En outre, aucune garantie réelle n’est apportée en ce qui concerne le renforcement ou, simplement, le maintien de l’accessibilité bancaire des plus démunis : seule la Banque Postale serait transformée en banque des plus fragiles, alors que les autres établissements bancaires n’auraient à assumer aucune véritable contrainte et pourraient choisir leur clientèle !

Enfin, le recours intenté par l’État français ne sera pas interrompu par l’adoption éventuelle du projet de loi. À moins que l’État ne retire ce recours, nous verrons alors comment la juridiction saisie jugera la législation française éventuellement modifiée !

La Commission européenne n’a rien demandé d’autre que de mettre fin au monopole de la distribution. Jamais elle n’a demandé de remettre en cause la centralisation des fonds collectés, ni la rémunération des opérateurs bancaires. Elle a même reproché au Gouvernement français de ne pas l’avoir associée à sa démarche et de passer par pertes et profits les services d’intérêt économique général, auxquels concourt le livret A, dans sa configuration actuelle.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons de renoncer à remettre en cause le livret A et à tout ce qu’il permet, tout ce qu’il représente, tout ce qu’il signifie.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 979.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à la suppression de l’article 39, qui introduit la généralisation du livret A. Ce produit bancaire était jusqu’alors réservé à trois banques : La Banque Postale, la Caisse d’épargne et le Crédit mutuel. On pourrait penser que la généralisation envisagée tend à développer ledit produit. Or tel n’est pas le cas.

Il convient de rappeler l’attachement des Français au livret  A. Le nombre de ces livrets déjà ouverts en France est très élevé ; on en compte près de 46 millions. Dans notre pays, ce produit joue un rôle important d’épargne populaire. Il est l’instrument du financement du logement social et un élément essentiel de la politique de la ville.

Nous devons garantir et faire perdurer le système de financement du logement social par le biais du livret A, ce qui n’est pas, hélas ! le sens de la réforme qui nous est proposée.

Pourquoi changer un système qui marche bien ? J’avais déjà formulé la même remarque au sujet de l’entreprise Aéroports de Paris. Alors que tout le monde reconnaissait que le dispositif fonctionnait, cette société a été privatisée.

De même, EDF était une entreprise qui marchait bien. On l’a privatisée et, désormais, c’est le bazar ! On ne comprend plus rien, on ne sait plus où trouver une agence pour effectuer un changement. Tout est devenu extrêmement compliqué, et cela va moins bien qu’avant !

Et l’on intitule ce texte «  projet de loi de modernisation de l’économie » ! Moderniser n’est pas forcément, à mon avis, améliorer.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Et la Commission européenne ?

M. Jean Desessard. Aujourd’hui, 100 % des dépôts collectés au titre du livret A sont centralisés, puis entièrement gérés par la Caisse des dépôts et consignations, qui les utilise pour financer le logement social. Cette centralisation des dépôts à la Caisse des dépôts et consignations est remise en question par le projet de loi.

Les ministres nous annoncent que le taux de centralisation du livret A et du livret de développement durable sera d’environ 70 %, mais rien ne nous le garantit. C’est l’affectation des fonds collectés au titre du livret A qui est remise en cause.

Tout d’abord, le seuil de centralisation des dépôts collectés pas la Caisse des dépôts et consignations n’est pas inscrit dans la loi, ce qui ne nous laisse pour toute garantie que la bonne foi des ministres. Malgré tout, nous sommes sceptiques. Nous ne nous permettons pas de mettre en doute votre bonne foi, mais vous savez bien, mes chers collègues, que les gouvernements passent…

À une époque où la demande de logement n’a jamais été aussi forte, nos concitoyens ne peuvent souffrir une telle incertitude. Nous voulons la garantie que le seuil des dépôts collectés sera adapté, sur le long terme, aux besoins du financement des logements sociaux.

Par ailleurs, l’affectation des fonds non centralisés, c’est-à-dire 30 % des dépôts, comme on nous l’annonce, est, elle aussi, incertaine. Ces fonds devront servir au financement des PME ou à des travaux d’économie d’énergie. Je n’y suis pas opposé, mais je doute que les banques affecteront toutes les ressources collectées à ces fins.

Mme la ministre de l’économie reconnaissait elle-même, lors de la première lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, que ce type de collectes décentralisées connaissait des applications imparfaites. Elle nous disait que la somme réellement consacrée au financement des PME, au titre du livret de développement durable, ne s’élevait qu’à 55 %, malgré l’obligation faite aux banques de leur consacrer 70 % des sommes collectées !

Nous ne pouvons pas faire confiance aux banques, acteurs privés de l’économie, pour assurer des missions d’intérêt général ; ce n’est d’ailleurs pas leur rôle !

Ce sont les établissements bancaires, et pas l’intérêt général, qui seront les grands gagnants de cette mesure. En effet, la généralisation du livret A fera bénéficier les banques d’un afflux de nouveau clients. Mais rien ne les empêchera de diriger les clients venus pour ouvrir un livret A vers d’autres placements financiers plus rémunérateurs et ne bénéficiant pas à la collectivité. Ce sont donc le financement du logement social et la collectivité qui seront les grands perdants de cette mesure.

Pour finir, je m’interrogerai, comme M. Repentin, sur l’action du Gouvernement. Celui-ci a déposé, dans un premier temps, un recours devant la Cour de justice des Communautés européennes afin de contester la décision de la Commission d’étendre à toutes les banques la distribution du livret A. Or nous avons appris par Mme Lagarde, s’exprimant sur ce sujet le 17 juin dernier, que le Gouvernement souhaitait désormais retirer ce recours. 

M. Jean Desessard. Quel signal politique contradictoire ! Alors que vous vous opposiez à la généralisation du livret A, vous nous proposez aujourd’hui une loi qui va au-delà des recommandations de Bruxelles !

Comme nous l’avons dit lors de la discussion générale, l’objectif de ce projet de loi n’est pas de moderniser l’économie, mais de casser ce qui fonctionnait bien.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 890 rectifié.

Mme Odette Terrade. Nous aurions pu croire, à l’énoncé du titre de ce chapitre, que le Gouvernement entendait renforcer un circuit de financement qui, quelles que soient les crises passées, a fait ses preuves au service des besoins de la population, notamment des plus démunis, dans sa mission d’accessibilité bancaire gratuite et égalitaire.

Nous aurions pu croire, à l’heure de la Présidence française de l’Union européenne, que M. Sarkozy allait avoir le courage de défendre la spécificité française, en inscrivant dans la loi les services d’intérêt économique général que constituent les systèmes, uniques au monde, de collecte de l’épargne populaire et de financement public du logement social, plutôt que de céder devant les lobbies financiers, très actifs à Bruxelles, mais aussi trop présents dans les coulisses de nos assemblées.

Moderniser le livret A, pourquoi pas ? Il ne représente plus que 4 % de l’épargne des Français, alors qu’il est souscrit par plus de 50 millions de nos concitoyens. Il contribue à un financement égalitaire du logement social, facilite l’accessibilité financière des exclus bancaires, garantit publiquement les fonds déposés et rémunère l’épargne constituée.

Le livret A mérite certainement un coup de pouce pour renforcer les missions qui lui sont historiquement attachées, pour accroître ses ressources et pour développer ses emplois au bénéfice de tous. Or c’est un coup de poignard que lui assène le Gouvernement !

Malgré les engagements publics pris par Mme la ministre, force est de constater qu’aucune concertation n’a été réellement engagée avec les associations de consommateurs, opposées à cette réforme, ni avec les associations caritatives, qui jugent la charte d’accessibilité bancaire aussi peu crédible qu’un vœu pieux, ni avec le mouvement HLM, qui demande une réflexion approfondie et sans précipitation, ni avec les organisations syndicales, qui s’alarment des licenciements massifs dans les réseaux des caisses d’épargne et de La Poste, qui vont se compter par milliers.

Cet article 39, qui banalise le livret A en permettant aux banques d’améliorer la présentation de leur bilan, qui organise l’apartheid, pour le moment financier, des populations jugées indésirables dans les agences bancaires, qui met en demeure le service public de financement du logement social de se privatiser pour survivre, est inacceptable.

Nous sommes, pour notre part, encore attachés au pacte républicain qui nous unit à l’ensemble de nos concitoyens. Si vous l’êtes aussi, mes chers collègues, vous ne pourrez que soutenir notre demande de rejet de cet article.

M. Jean Desessard. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. La commission spéciale ne peut que s’opposer à de tels amendements de suppression, compte tenu du caractère impératif de la banalisation de la distribution du livret A.

Je vous rappelle que la décision de la Commission européenne du 10 mai 2007 est exécutoire depuis le 11 février dernier et que notre pays est désormais passible d’une procédure en manquement.

Nous devons donc présenter officiellement la réforme du livret A avant la mi-août, au risque de faire l’objet d’une procédure en manquement.

Surtout, sur le fond, la réforme qui nous est proposée est totalement satisfaisante puisqu’elle permet à la fois de garantir le financement d’un logement social et d’offrir aux consommateurs un choix plus large d’établissements bancaires pour ouvrir un livret A.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression nos 371, 979 et 890 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le président, Mme Boutin et moi-même nous livrerons, sur ces amendements, à un numéro de duettistes. (Sourires.) Bien que nous soyons d’accord sur l’ensemble des arguments présentés, chacune d’entre nous a en effet sa propre expertise, dont nous souhaitons toutes deux vous faire profiter.

Le Gouvernement ne peut être que défavorable à ces trois amendements de suppression.

Je reviendrai sur certains des points évoqués, parfois de manière caricaturale, en limitant mon propos aux questions fiscales et financières, celles relatives au logement social relevant de la compétence de Mme Boutin.

Tout d’abord, vous avez été nombreux à faire des observations sur la procédure suivie par le Gouvernement et à nous reprocher une certaine précipitation. Je vous invite, à et égard, à rendre visite à Mme Neelie Kroes, commissaire européen chargé de la concurrence.

Mme Nicole Bricq. Nous l’avons reçue, madame !

Mme Christine Lagarde, ministre. Je sais que vous l’avez auditionnée, mais peut-être apprendrez-vous avec intérêt qu’elle attend justement, de notre part, un peu plus de précipitation. Mme la vice-présidente de la commission spéciale a rappelé que nous devions présenter cette réforme à la mi-août. Nous devons donc sans retard aborder la question de la généralisation du livret A.

S’agissant de la méthode retenue, je précise que nous avons fait appel à des experts. M. Camdessus nous a livré un rapport tout à fait éclairé et nourri par les longues consultations qu’il a menées. Nous avons ensuite consulté les organisations de tous ordres, les banques, les consommateurs et les épargnants, qui sont très attachés au produit livret A. Nous avons également mené un travail de coproduction avec les parlementaires intéressés par le sujet, ce qui nous a amenés à tenir compte des différentes remarques afin d’élaborer le texte que nous vous présentons. Nous vous inviterons enfin à un travail de « postproduction », afin de s’assurer que cette réforme sera correctement mise en œuvre et utile pour nos concitoyens.

J’en viens au produit livret A lui-même, auquel les Français sont très attachés, comme l’indiquaient récemment certains journaux du matin.

Ce produit ne change pas dans sa nature. Il demeure accessible à tous, liquide, il profite d’une fiscalité particulièrement intéressante, d’un taux de rémunération, attractif ; plafonné, il ne peut devenir une niche fiscale sans fond ni plafond. Je le dis très clairement, il n’est pas question de toucher à tout cela !

Je souhaite, à cet égard, revenir sur des allégations publiées dans un journal du soir, selon lesquelles j’aurais l’intention de fiscaliser, dans le secret de mon administration, les produits de l’épargne du livret A. Il n’en est pas question, de même qu’il est faux, madame Bricq, que nous cherchons à modifier la fiscalité attachée au crédit impôt recherche.

M. Jean Desessard. C’est M. Marini qui pense à cela !

Mme Christine Lagarde, ministre. En rendant le livret A accessible auprès de 40 000 agences, au lieu de 22 000 actuellement, et en donnant à chaque titulaire de livret d’épargne la possibilité de s’adresser à la banque de son choix pour ouvrir un livret A, nous facilitons à la fois le recours au livret et sa gestion.

Cette mesure positive correspond parfaitement aux desiderata de la Commission, avec laquelle nous avons entretenu, contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là, des contacts étroits et réguliers. Comme mes collaborateurs peuvent en attester, nous nous sommes rendus à de multiples reprises à Bruxelles pour évoquer la façon dont nous allions mettre en œuvre la décision du 10 mai 1007 à laquelle faisait référence Mme la vice-présidente de la commission spéciale.

Non seulement nous ne touchons pas au produit livret A du point de vue des épargnants, mais nous facilitons son accès.

Nous ne faisons en aucun cas de cadeau aux banques à l’occasion de cette réforme. Sur ce point, j’ai entendu de véritables contre-vérités !

Je vous rappelle que, aujourd’hui, la rémunération dont bénéficient les organismes collecteurs est de 1,11 % en moyenne, même si ce taux peut varier un peu selon les livrets et l’organisme concerné. À la suite de la négociation que nous avons menée, nous avons ramené ce taux de commission à 0,6 %. Il n’est donc pas question de faire un cadeau aux banques ! Nous avons, au contraire, divisé par deux le montant de la commission afin de faciliter et de rendre plus rentable le financement du logement social.

Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Eh oui !

M. Jean Desessard. Tout le monde disait que 1,11 %, c’était beaucoup !

Mme Christine Lagarde, ministre. Il n’est pas non plus question de faire un cadeau aux banques au nom d’une quelconque décentralisation des dépôts, cadeau résultant du passage d’un taux de centralisation des dépôts de 100 % à un taux de 70 %.

Il suffit, pour s’en convaincre, de se livrer à quelques calculs simples. Il faut d’abord appliquer une agrégation entre le taux obligatoire de centralisation auprès de la Caisse des dépôts et consignations, qui est de 100 %, d’une part, et le taux de 9 % de centralisation applicable au livret de développement durable, d’autre part, puis multiplier les deux taux et rapporter le tout à la somme. On aboutit à un taux de 70 %, qui correspond au seuil que nous envisageons de mettre en place par voie de décret.

Le recours au décret s’explique par la nécessité d’ajuster le taux en fonction de la collecte, afin de faciliter le financement du logement social. En effet, lorsque la collecte est très forte, le taux de 70 % est manifestement excessif ; en revanche, lorsque la collecte est plus faible, le même taux peut s’avérer insuffisant. Nous sommes donc loin d’un cadeau accordé aux banques !

J’aborderai un dernier point : ce mécanisme est un moyen pour le Gouvernement de renforcer l’accessibilité bancaire, qui n’est pas suffisante. Nous souhaitons permettre à tous les Français le souhaitant soit d’ouvrir un compte, soit d’engager une procédure de droit au compte.

Tels sont les points que je voulais préciser, mesdames, messieurs les sénateurs. Je laisse maintenant la parole à ma collègue Mme Christine Boutin, afin qu’elle vous fasse profiter de sa propre expertise.

M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la préparation de cette réforme a fait l’objet de nombreuses réunions de travail entre les services de Mme Christine Lagarde et les miens, afin de parvenir à un texte non seulement équilibré entre les différentes aspirations que nous avions tous, mais aussi novateur, en ce sens qu’il vise à inscrire dans la loi l’importance accordée au financement du logement social.

Ce projet de loi a, par ailleurs, été amélioré lors de son passage à l’Assemblée nationale.

En ma qualité de ministre du logement et de la ville, je tiens à rappeler les principes essentiels qui guident cette réforme : le Gouvernement entend assurer la pérennité du financement du logement social, diminuer le coût de ce dernier et étendre les dispositions relatives à l’accessibilité bancaire.

S’agissant tout d’abord de la pérennisation du financement du logement social, il est extrêmement important de bien comprendre ceci : le projet de loi prévoit un niveau plancher de centralisation des ressources collectées à la fois – j’insiste – sur le livret A et le livret de développement durable. À ma demande, ce plancher a été fixé – et ce dans la loi – à 1,25 fois le montant total des prêts au logement social, permettant ainsi de couvrir l’ensemble des besoins de financement, et a même été assorti d’un « matelas » supérieur de 0,25 % à ce qu’il aurait été normal de prévoir.

L’Assemblée nationale, soucieuse d’assurer une permanence de la ressource au logement social, est allée au-delà, en prenant en compte dans le calcul de ce plancher non seulement les prêts au logement social, mais aussi les prêts consentis au bénéfice de la politique de la ville, ce qui répond à vos préoccupations, mesdames, messieurs les sénateurs.

Les organismes d’HLM auront ainsi la certitude de disposer des ressources nécessaires permettant de couvrir largement leurs besoins.

Des dispositions réglementaires fixeront par ailleurs le pourcentage global de centralisation de la collecte réalisée sur le livret A et le livret de développement durable au minimum à 70 %.

Comme vous l’a dit excellemment Mme Christine Lagarde, le décret permet une plus grande souplesse et une réaction plus rapide que la loi. Vous serez tous d’accord avec cela.

Le projet de loi prévoit également que l’épargne collectée sur le livret A soit utilisée en priorité pour le financement du logement social, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Grâce à ce texte, une valeur législative sera donnée à la priorité absolue qui s’attache à consacrer les ressources de l’épargne réglementée à la résorption de la pénurie de logement. C’est là une avancée majeure, qui ne peut que rassurer la ministre du logement et de la ville que je suis.

Par ailleurs – c’est le deuxième point –, la diminution du coût du financement du logement social est un objectif que nous souhaitons bien entendu tous atteindre.

La généralisation à l’ensemble des banques de la distribution du livret A va s’accompagner d’une baisse du taux de rémunération des banques collectrices, comme l’a dit Mme Christine Lagarde. Cette mesure n’est pas un cadeau ; elle va permettre ce financement du logement social dans de meilleures conditions.

Cette baisse sera répercutée sur le coût du crédit octroyé aux bailleurs sociaux, leur permettant ainsi de réaliser des logements locatifs sociaux dans des conditions financières de toute façon améliorées, quel que soit le marché, ce qui n’est pas rien.

Ainsi, le taux des prêts PLUS baissera, à compter du 1er août, de vingt points de base : il passera ainsi de 4,30 % à 4,10 %. Le taux des prêts très sociaux, les PLA-I, baissera, lui, de cinquante points de base : il passera de 3,30 % à 2,80 %, ce qui n’est pas rien non plus. Cette baisse est indispensable.

En effet, pour lutter contre la pénurie de logements, due à l’insuffisance de l’effort de construction pendant de nombreuses années, le Gouvernement s’est fixé comme objectif la construction de 500 000 logements par an, dont 120 000 logements sociaux.

Plus de 430 000 logements ont été mis en chantier en 2007 –  c’est un record depuis vingt ans –, dont près de 108 000 logements sociaux financés.

Ces chiffres en appellent d’autres. J’ai eu l’occasion, hier, de présenter, dans un souci de transparence totale – telle n’était pas la règle jusqu’à présent –, un bilan exhaustif de la seconde période triennale de mise en œuvre de l’article 55 de la loi SRU.

L’objectif de production de logements sociaux fixé aux 730 communes concernées était, sur la période 2005-2007, de 63 000 logements. Les résultats ont dépassé de loin les objectifs, puisque ce sont 93 000 logements sociaux qui ont été créés ou lancés !

Cette baisse des taux, qui se cumulera prochainement avec d’autres mesures en préparation dans le projet de loi de mobilisation pour le logement, que j’aurai l’honneur de vous présenter à l’automne, participera au soutien de la construction de logements sociaux.

Troisième et dernier point, l’extension de l’accessibilité bancaire est un souci que nous avons tous. Le projet de loi va permettre de renforcer l’accessibilité bancaire en conservant à la Banque Postale le rôle qu’elle joue aujourd’hui en matière d’accessibilité bancaire. J’y étais très attachée.

Le projet de loi va également améliorer cette accessibilité en consolidant l’effectivité du droit au compte. À cet effet, il est prévu que les banques devront adopter une charte définissant des modalités précises de mise en œuvre de ce droit.

Le ministre du logement et de la ville émet également, bien évidemment, un avis défavorable sur les trois amendements tendant à supprimer l’article 39.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de modernisation de l’économie.

Nous avons commencé tout à l’heure l’examen des amendements à l’article 39. Nous en sommes parvenus aux explications de vote sur les trois amendements de suppression de l’article.

La parole est donc à Mme Odette Terrade, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 371, 979 et 890 rectifié.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous ne pouvons évidemment qu’inviter le Sénat à adopter ces amendements de suppression de l’article 39.

Nous pourrions, pour vous convaincre, utiliser l’argument du gain de temps. Mesdames les ministres, vous nous avez dit tout à l’heure que vous teniez à répondre de façon détaillée pour pouvoir intervenir plus brièvement dans la suite de la discussion. Il n’empêche que nous souhaitons tout de même prendre le temps nécessaire pour traiter au fond cette question éminemment importante du livret A, qui concerne, rappelons-le, 46 millions de nos concitoyens.

Il est tout de même incroyable de discuter d’un sujet aussi grave au détour d’un texte qui est soit mal ficelé – nous pourrons le montrer si l’occasion nous en est donnée –, soit clairement destiné à organiser un véritable « rapt » sur le livret A, afin de permettre à quelques établissements de crédit de se trouver de l’argent frais dont ils ont le plus grand besoin pour couvrir les engagements de bilan.

En effet, mes chers collègues, c’est bien de cela qu’il s’agit : les banques sont les grandes gagnantes de la généralisation du livret A.

Comme il y a fort à parier que le nombre des livrets en circulation ne va pas véritablement augmenter, c’est surtout autour d’un partage de la collecte que va se jouer l’affaire.

Comme les contraintes de centralisation imposées aux nouveaux distributeurs vont probablement être moins fortes que celles qui sont exigées de la Banque Postale et des caisses d’épargne, il est probable que le « siphonnage » de la ressource du livret A va pouvoir s’organiser sans risque. Sans risque… sauf, évidemment, pour le devenir de la Caisse nationale d’épargne et du réseau des caisses d’épargne et pour celui de la Banque Postale, laquelle sera confinée dans un rôle de faire-valoir social en matière bancaire, ce qui la conduira immanquablement aux plus grandes difficultés.

Quant à la situation du logement social, force est de constater qu’elle ne saurait trouver ici d’amélioration, justement parce que les exigences de centralisation seront globalement relâchées et qu’il y a fort à parier que l’État ne créera pas, dans ce cadre, les conditions d’une politique réellement ambitieuse de mise en chantier de nouveaux logements.

Il faut le dire, dans la mesure où vous avez d’abord décidé de faire la chasse aux locataires à revenus moyens dans le parc social pour le dédier à l’hébergement et au logement des plus démunis, une telle orientation répond parfaitement aux objectifs annoncés.

Et tant pis si, une fois encore, nous constatons la moindre consommation des crédits en faveur de la ville et du logement, et la non-réalisation de 10 000 à 15 000 logements sociaux pourtant programmés.

Dans ce contexte, mes chers collègues, nous ne pouvons évidemment que vous demander d’adopter ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Je souhaiterais apporter quelques éléments de réponse aux propos tenus par Mmes les ministres juste avant la suspension.

Tout d’abord, je profite de votre présence parmi nous, madame la ministre du logement et de la ville, pour me réjouir, après vous, de toutes les avancées qui ont pu être réalisées, accompagnées ou suscitées par l’application de l’article 55 de la loi SRU. Vous le savez, nous sommes très attachés à ce dispositif, lequel, dois-je le rappeler, a été conforté par le Sénat au moment même où il était menacé, c’est-à-dire lors de la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement.

Mme Nicole Bricq. Il reste encore beaucoup à faire !

M. Thierry Repentin. Je n’en doute pas, nous aurons la possibilité, à l’occasion de l’examen de prochains textes, d’instituer de nouveaux outils peut-être plus incitatifs, voire coercitifs, à l’intention des dernières communes qui se montrent toujours récalcitrantes à appliquer ce fameux article.

S’agissant du taux de centralisation des sommes collectées, vous nous dites qu’il sera fixé par un décret, lequel, chacun le sait, est tout de même plus facile à modifier qu’une loi. Ce taux devrait être d’environ 70 %, mais, en cas de besoin supérieur constaté, il pourrait augmenter et passer, par exemple, à 75 %.

Je veux bien vous croire, madame la ministre. Néanmoins, pour ma part, je plaiderai toujours pour que de telles dispositions soient inscrites dans la loi, dans la mesure où nous avons la possibilité, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, à l’occasion du rendez-vous annuel que constitue l’examen de la loi de finances, de proposer de faire bouger le curseur, et, du coup, d’engager un débat sur le montant d’encours qu’il serait nécessaire de centraliser, dans le cadre de la politique de la ville, pour répondre aux besoins en matière de logement. Cette solution est tout de même préférable à celle qui consiste à laisser la décision finale à quelques fonctionnaires de Bercy, fussent-ils les plus éminents !

Mais je me tourne maintenant vers Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi.

Madame Lagarde, dès que la discussion sur l’avenir du livret A a été engagée, Marc Massion et moi-même avons rendu visite à Bruxelles à Mme Kroes, la commissaire européenne chargée de la concurrence. Comme lors de sa récente audition au Sénat, nous nous sommes aperçus qu’elle n’avait pas les idées très claires sur la réforme telle que vous l’avez proposée et que celle-ci suscitait chez elle certaines incertitudes. Sans doute y a-t-il eu depuis des échanges entre vos services et les siens, mais force est de constater qu’elle n’était pas aussi catégorique que vous avez semblé le dire sur la pertinence absolue de votre dispositif.

Au demeurant, si ce système nous semble imparfait, c’est aussi parce que le débat à l’Assemblée nationale a été tronqué. En effet, l’adoption d’un amendement en début de discussion en a fait tomber plusieurs autres, ce qui a conduit le Gouvernement à demander une seconde délibération au petit matin, dans la nuit du jeudi 12 au vendredi 13 juin, pour rétablir le texte initial.

J’ai eu l’occasion peu après de rencontrer un certain nombre de députés UMP, qui ont reconnu que le système n’était pas parfait et qu’il y avait encore matière à discuter. Ils m’ont d’ailleurs confié leur espoir que la lecture au Sénat et la réunion de la commission mixte paritaire permettent de faire évoluer les choses. À l’évidence, si nous adoptons cet article conforme, tel ne sera pas le cas !

J’espère donc, à mon tour, que le Sénat adoptera quelques amendements, ne serait-ce que pour répondre aussi à l’attente de ces députés UMP, qui, parmi tous ceux qui suivent cette réforme et notamment ses implications pour la Caisse des dépôts et consignations, ont des idées à défendre.

Mme Christine Lagarde, ministre. C’est gentil pour eux !

Mme Christine Boutin, ministre. Nous sommes sensibles à votre sollicitude !

M. Thierry Repentin. Enfin, madame Lagarde, d’aucuns évoquent dans ce domaine un cadeau fait aux banques. Comprenez qu’il ne s’agit pas, pour nous, d’avoir une position dogmatique. Simplement, nous l’avons tous entendu, le système actuel entraînerait, aux yeux de certains, une rémunération excessive des trois organismes collecteurs du livret A. Vous l’avez dit, la rémunération moyenne s’élève à 1,1 % de l’encours collecté. À vous entendre, le nouveau système serait beaucoup plus vertueux : les banques qui se verront offrir la possibilité de collecter l’encours seront moins rémunérées que la Banque Postale, la Caisse nationale d’épargne et le Crédit Mutuel, dans la mesure où elles percevront 0,6 %, contre 1,1 % aujourd’hui.

Madame la ministre, si l’État accorde effectivement à ces banques 0,6 % sur 70 % des fonds qui seront centralisés, quid des 30 % restants que celles-ci vont conserver ?

Elles ne manqueront pas de les placer à un taux qui est proche de l’EURIBOR, lequel se situe, à un dixième de point près, autour de 5 %. Elles vont donc rémunérer le livret A à 3,5 % et récolter dans le même temps 5 %, soit un différentiel de 1,5 %. Autrement dit, elles seront rémunérées à ce taux sur 30 % des sommes collectées et à 0,6 % sur les 70 % restants. Une simple règle de trois permet de se rendre compte qu’au final les banques qui recevront, dans les mois à venir, l’autorisation de délivrer le livret A seront rémunérées à 1,1 %. En outre, pour ce faire, elles ne seront pas soumises aux mêmes contraintes que celles que subit actuellement la Banque Postale.

En définitive, elles seront mieux rémunérées que la Banque Postale, qui délivrera pourtant un produit bien plus populaire.

Telles sont les raisons pour lesquelles, mesdames les ministres, nous ne sommes pas persuadés que les efforts demandés aux nouveaux distributeurs seront les mêmes que ceux qui sont exigés des trois opérateurs historiques. En conséquence, nous demandons bien évidemment la suppression de l’article 39, afin de pouvoir le réécrire de concert et le rendre ainsi un peu plus vertueux.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Madame la ministre du logement et de la ville, je souhaiterais tout d’abord vous poser une question d’ordre technique.

Tout à l’heure, vous avez précisé que le niveau plancher de centralisation des sommes collectées et destinées au logement social serait assorti d’un « matelas » représentant une augmentation de 25 %. Pour autant, dans la mesure où le calcul est effectué par rapport aux sommes actuelles, on peut penser que le montant visé sera atteint dans les cinq ans et qu’ensuite il pourra éventuellement diminuer. À l’évidence, cette loi n’est pas faite pour les vingt ou trente ans à venir ! (Mme la ministre du logement et de la ville fait des signes de dénégation en direction de l’orateur.) Madame la ministre, j’en conviens, j’ai peut-être mal compris le dispositif proposé avec ce matelas : j’attends donc vos explications avec impatience !

Je ferai une remarque plus générale : c’est bien l’Europe, que je sache, qui a rendu obligatoire la généralisation du livret A, comme c’est elle qui a ouvert à la concurrence de nombreux marchés, notamment celui de l’électricité. Or vous tentez d’habiller cette réalité, en affirmant que le nouveau dispositif sera meilleur et qu’il permettra, par exemple, d’accroître le nombre d’agences susceptibles de distribuer le livret A. Pour notre part, nous considérons que le système actuel fonctionne bien : il s’agit d’un outil d’épargne populaire intéressant, qui profite à nombre de nos concitoyens et qui permet de financer le logement social.

Pourquoi donc vouloir détruire un système qui fonctionne ? Nous devrions d’ailleurs nous poser cette question chaque fois ! Il se trouve que tout cela est le fruit de considérations purement idéologiques, certains estimant qu’il faut introduire de la concurrence partout.

En l’occurrence, nous pouvons craindre la fiscalisation du livret A et des attaques contre la Caisse des dépôts et consignations. Tel n’est pas le cas, comme nous le verrons, dans le présent texte, mais c’est bien l’esprit de l’Europe qui transparaît systématiquement en filigrane.

Dans un courrier que j’ai reçu de l’un de mes collègues se trouvait cette phrase : les Français, comme les Irlandais, ne répondent pas aux vraies questions qu’on leur pose. (Mme Odette Terrade s’esclaffe.) Ah bon ? Mais ils expriment ce qu’ils ressentent ! L’Europe ne fait-elle pas peser de nombreuses contraintes, en particulier sur le plan social ? Bien sûr que si ! Elle impose la concurrence totale.

Certes, je peux me réjouir que l’Europe, grâce à l’action des pays nordiques, qui sont en avance sur nous, introduise un certain nombre de référents écologiques et environnementaux. Mais, sur le plan social, un certain nombre d’avancées importantes qui ont été obtenues en France sont remises en cause au niveau européen.

Ce que ressentent les gens, on le sait par leur réponse sans ambiguïté aux questions posées : y-a-t-il un pouvoir européen ? Oui ! Impose-t-il des choses ? Oui ! Apporte-t-il des garanties sociales supplémentaires ? Non, au contraire, il est à l’origine d’une régression sociale ! Donc, les gens répondent bien à la question qui leur est posée sur le point de savoir s’ils ont oui ou non envie de voir diminuer leur pouvoir d’achat.

M. Philippe Marini, rapporteur. C’est tellement plus simple quand on fait les questions et les réponses !

M. Jean Desessard. Et c’est tout aussi clair, monsieur le rapporteur, pour le livret A ou la Caisse des dépôts et consignations, qui représentent autant d’avancées obtenues au fil des luttes sociales. Eh bien, l’Europe les remet en cause avec votre consentement !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je comprends bien les observations de nos collègues quant à la politique du logement social. Je me contenterai de revenir sur un point qui préoccupe plus les élus des territoires ruraux.

A-t-on une idée de l’impact de cette diffusion du livret A dans l’ensemble des établissements bancaires sur les rares bureaux de poste qui subsistent dans les territoires ruraux et sont parfois relégués au fin fond d’une épicerie ou Dieu sait où ? En effet, leur maintien dépend de leur activité, laquelle est basée en partie sur le livret A. Sans prétendre être une spécialiste de la matière, je m’exprime en ma qualité d’élue d’un département rural. Et la loi SRU, qui fut longuement débattue dans cet hémicycle, nous gêne plus dans les extensions de réseaux et le mitage que par son article 55.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Desessard, je tiens à vous apporter une précision qui vous amènera peut-être à vous raviser et à retirer votre amendement de suppression de l’article.

Je vous le dis très clairement, les 125 % sont réajustés chaque année en fonction des volumes. Convenez que cet élément de confort mérite réflexion !

M. Jean Desessard. Et sur l’Europe, vous n’avez pas répondu ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 371, 979 et 890 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 557, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-1 du code monétaire et financier, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L.… - I. - Seule la Caisse d’épargne et les banques bénéficiant d’un droit d’usage du nom « livret A » sont habilitées à proposer les livrets correspondants sous cette appellation.

« II. - Les autres établissements bancaires visés à l’article L. 221-2 distribuent sous leur propre marque un produit d’épargne défiscalisé dont les caractéristiques sont identiques à celles du livret A défini à la présente section.

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Cet amendement s’inscrit dans l’objectif d’une loi de modernisation de l’économie et du respect de la concurrence non faussée ; je pense que vous y serez sensible.

L’appellation « livret A » est une marque déposée par la Caisse d’épargne en 1999, soit trente-trois ans après que le nom a été donné à ce produit d’épargne défiscalisé et bien connu du grand public. Depuis, La Poste – puis la Banque Postale – en ont obtenu le droit d’usage.

De fait, la Caisse d’épargne est donc la seule détentrice des droits sur cette appellation. C’est pourquoi les banques qui voudront proposer ce type de livrets devront développer leur propre appellation commerciale. C’est ce qu’a fait, en 1971, le Crédit Mutuel avec le livret bleu, qui, dans les textes, figure sous le nom de « compte spécial sur livret du Crédit Mutuel ».

Avec le texte que vous nous présentez, cette désignation législative disparaîtra au seul profit du livret A. Le rapport de notre collègue Marini précise : « Le paragraphe III […] porte ainsi nouvelle rédaction du 7° de l’article 157 du CGI pour tenir compte de la nouvelle désignation législative des différents livrets, livrets A et livrets bleu, désormais regroupés sous l’appellation livret A ». Comme dans le régime fiscal actuel, ces livrets continueront de bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu pour leurs intérêts ; on l’espère, en tout cas. De même, il est prévu que, jusqu’à l’entrée en vigueur de la réforme, au 1er janvier 2009, les intérêts des comptes spéciaux sur livret du Crédit Mutuel – les livrets bleu – soient exonérés d’impôt sur le revenu. Après cette date, le Crédit Mutuel distribuera des livrets A, même si, en pratique, il sera libre de conserver l’appellation commerciale livret bleu.

Si, dans les textes, ce livret d’épargne sera visé par l’appellation livret A, à charge pour chaque groupe bancaire de créer et de faire connaître son propre nom commercial d’usage.

Cet amendement visant à réserver le droit d’usage du terme livret A aux deux distributeurs actuels éviterait toute distorsion de concurrence et tout effet de « passager clandestin ». La Caisse d’épargne a pris à sa seule charge de créer, de développer et d’investir dans la publicité en faveur du livret A. Elle a incontestablement consacré des moyens substantiels à promouvoir le livret A et lui a conféré ce que l’on peut appeler un « effet marque », en tout cas, une image de marque certaine ; c’est d’ailleurs ce qui suscite la convoitise des autres banques.

Madame la ministre, chers collègues, quel que soit le secteur d’activité, l’image d’une marque a toujours une valeur économique. C’est la raison pour laquelle on ne peut impunément se prévaloir des bulles d’une eau de source ou d’un modèle d’un couturier sans l’autorisation des marques concernées. Ce n’est pas parce que l’on fait une boisson pétillante à partir de cépages champenois et d’une méthode de vinification dite « champenoise » que l’on a le droit d’appeler cette boisson Champagne ! On pourrait ainsi multiplier les exemples.

Il est raisonnable de conserver à ceux qui ont construit une marque le bénéfice exclusif de l’utiliser. Un choix contraire remettrait en cause quelques fondements de la propriété industrielle et introduirait, l’air de rien, une incertitude pouvant se révéler majeure pour de nombreuses entreprises ayant développé des politiques de marque. Quelle sera leur sécurité juridique si demain Peugeot peut être autorisée à commercialiser des Kangoos ou des Clios ? Nous sommes dans un cas de figure identique.

De même, pour le livret A, on pourra parler de véritable institutionnalisation des comportements de passager clandestin si des établissements bancaires peuvent bénéficier de l’effet marque issu de dizaines d’années de promotion sans débourser un centime d’euro !

S’ils veulent distribuer le livret d’épargne réglementé, à eux de contractualiser avec la Caisse nationale des caisses d’épargne – comme l’a fait la Banque Postale – pour utiliser l’appellation livret A moyennant rémunération ou bien de développer leur propre ingéniérie de promotion en faveur d’un produit d’épargne ayant son intitulé spécifique.

Madame la ministre, chers collègues, l’amendement n° 557 est finalement un amendement de respect des logiques et identités économiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je suis totalement en désaccord sur le plan juridique et sur le plan économique avec ce qui vient de nous être dit. Le livret A appartient à l’État. Il est défini par l’État. Il s’agit d’épargne réglementée. Tout cela n’existe qu’en fonction d’un régime fiscal que le Parlement définit. Dès lors, naturellement, seule la représentation nationale a le pouvoir de modifier, le cas échéant, ce régime.

Il est tout à fait clair que cela ne crée pas de droits pour un groupe qui distribue un tel produit car il peut distribuer tout ce qu’il voudra, il n’en demeure pas moins que la valeur de ce qu’il distribue résulte uniquement des décisions de l’État. Ce serait véritablement léser ce dernier que de considérer que les réseaux distributeurs historiques sont propriétaires de quoi que ce soit en la matière.

Quant à la large diffusion dans tous les réseaux des mêmes livrets et, par conséquent, du jeu de la concurrence, il est évident que le produit doit être le même et connaître la même appellation dans tous les guichets. Raisonner autrement reviendrait à aller complètement à rebours de la logique même de la réforme.

Pour toutes ces raisons, la commission spéciale ne peut qu’être défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le sénateur, c’est une proposition intéressante, mais à laquelle le Gouvernement est, bien entendu, totalement défavorable pour les raisons que vient d’évoquer M. le rapporteur.

Si cette marque appartient à quelqu’un, c’est à l’État. Si quelqu’un pouvait en revendiquer l’inscription dans un quelconque registre, ce ne serait certainement pas la Caisse d’épargne !

D’ailleurs, jamais la Caisse d’épargne, au cours de toutes les discussions que nous avons eues – et Dieu sait si nous en eûmes ! – n’a excipé de ce critère de marque pour revendiquer une quelconque redevance.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 557.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 557.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Toujours sur l’article 39, je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 551 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-1 du code monétaire et financier :

« Art. L. 221-1. - Les sommes versées sur un premier livret de la Caisse nationale d’épargne ou des caisses d’épargne et de prévoyance, dénommé livret A, ou sur un compte spécial sur livret du crédit mutuel, sont soumises à plafonnement dans des conditions fixées par voie réglementaire.

« Les sommes versées en excédent du plafond fixé à 20 800 euros peuvent être déposées sur un ou plusieurs livrets supplémentaires. Les livrets de caisse d’épargne sont nominatifs.

« Une même personne ne peut être titulaire que d’un seul livret A de caisse d’épargne ou d’un seul compte spécial sur livret du Crédit mutuel.

II. — Pour compenser la perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - La perte de recettes résultant pour l’État de l’argumentation à 20 800 euros du plafond du Livret A et du Livret bleu, est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Le plafond du livret A n’a pas été réévalué depuis octobre 1991 – il y a dix-sept ans ! –, date à laquelle il a été fixé à 15 245 euros. Or, si l’on tient compte de l’inflation intervenue depuis cette date, ce plafond devrait se situer aujourd’hui à 20 800 euros.

L’objet de l’amendement n° 551 est de prendre acte de ce décrochage significatif du plafond par rapport à l’indice des prix et de réparer ce retard de revalorisation. J’y vois plusieurs avantages.

Le premier avantage est de soutenir les détenteurs de ce produit d’épargne populaire en leur permettant de bénéficier de son taux avantageux sur une surface financière un peu élargie. Les livrets A et bleu sont parmi les outils d’épargne défiscalisés privilégiés des résidents sur le territoire français.

Le deuxième avantage est d’assurer une hausse de l’encours de la collecte sur livret, ce qui viendrait quelque peu compenser votre décision de mettre fin à la centralisation totale de la collecte. Nos estimations montrent que le relèvement du plafond à 20 000 euros générerait 6 milliards d’euros d’épargne supplémentaire à un surcoût relativement modeste pour l’État, estimé à 25 millions d’euros, portant le coût total de la défiscalisation à 320 millions d’euros. Il y a là des réserves de financement dont nous aurons assurément besoin pour réaliser des logements sociaux, mais aussi pour les réhabiliter dans le cadre des exigences nouvelles en matière de performance énergétique issues des travaux du Grenelle de l’Environnement.

En outre, augmenter le plafond d’épargne sur les livrets A et bleu renforcera leur attractivité et réduira donc le risque de siphonnage au profit d’autres produits financiers. En même temps, ce mécanisme renforcera la péréquation entre les livrets à faible épargne et les livrets au plafond, ceux-ci représentant actuellement 2,4 % des livrets pour 40 % des encours.

Enfin, j’y vois un troisième avantage : permettre, par la hausse du plafond, d’augmenter les excédents de gestion récupérés chaque année par l’État au titre de sa garantie.

Ainsi, cette mesure va dans l’intérêt de tous : les détenteurs de livrets, les banques, l’État et surtout le logement à loyer modéré, qui verra son financement conforté dans le cadre du Grenelle pour lequel il faudra trouver des fonds publics en vue de la mise aux normes thermiques de plusieurs millions de logements anciens, dont 800 000 logements sociaux.

Madame la ministre, je sais votre conviction personnelle quant à la nécessité de réaliser davantage de logements pour tous. Nous n’y parviendrons pas sans, d’une part, une sécurisation de la ressource et, d’autre part, son élargissement grâce au relèvement du plafond.

Mesdames les ministres, chers collègues, je compte sur la Haute Assemblée pour adopter cet amendement.

Je vous fais grâce des explications sur le calcul d’impact de l’inflation sur le plafond du livret A. Mais, si vous le souhaitez, je pourrai vous expliquer comment nous sommes arrivés à cette somme de 20 800 euros.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 558 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 886 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-1 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

tout établissement de crédit habilité à recevoir du public des fonds à vue et qui s’engage

par les mots :

les établissements mentionnés au second alinéa de l’article L. 511-9 et qui s’engagent

La parole est à M. Thierry Repentin, pour défendre l’amendement n° 558.

M. Thierry Repentin. Cet amendement est rédactionnel.

Il vise à désigner avec davantage de précision les établissements qui pourront distribuer le nouveau livret A en se référant à la législation en vigueur. Ainsi, il énumère les établissements de crédit habilités à recevoir du public des fonds à vue : les banques, les banques mutualistes ou coopératives et les caisses de crédit municipal.

Il ne s’agit donc que d’une tentative pour améliorer la rédaction proposée.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour présenter l’amendement n° 886 rectifié.

M. Michel Billout. Quitte, sous certains aspects, à faire en sorte qu’il existe une certaine généralisation du livret A, autant que les choses soient clairement énoncées.

Avec cet amendement n° 886 rectifié, nous apportons une précision rédactionnelle quant à la qualité des établissements distributeurs du produit financier concerné, notamment en leur capacité de recevoir du public. Nous le faisons par référence à l’article L.511-9 du code monétaire et financier, qui précise les choses en la matière.

M. le président. L’amendement n° 556, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-1 du code monétaire et financier, après les mots :

fonds à vue

insérer les mots :

, notamment en espèces, qui dispose de guichets prévus à cet effet

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à poser comme condition aux banques désirant proposer le livret A qu’elles disposent de guichets permettant le retrait et le dépôt de sommes en espèces. Il s’agit là d’une caractéristique essentielle du livret A, qui doit être respectée sur l’ensemble du territoire.

N’autoriser l’ouverture du livret A qu’aux établissements disposant de guichets assurant la couverture du territoire permet de garantir l’accessibilité de tous nos concitoyens à ce service.

Mme Nicole Bricq. Nombre de nos concitoyens, vous le savez, se servent du livret A comme d’un porte-monnaie électronique : soit c’est leur unique outil bancaire, soit ils veulent faire des dépôts régulièrement.

Cette mesure permettra en outre de garantir une certaine égalité devant les charges de fonctionnement auxquelles les établissements bancaires font face pour la gestion de ce produit d’épargne. Une rémunération de 0,6 % pour les banques qui ne dispenseraient pas ce genre de service semblerait indue, comme nous l’avons déjà indiqué.

Cet amendement vise également à exclure du dispositif les banques en ligne qui ne disposent d’aucun accès « physique » aux comptes.

Le projet de loi, tel qu’il est rédigé, prévoit une rémunération unique pour des services rendus qui s’avéreraient différents : dans certains cas, le détenteur pourrait effectuer des retraits et des dépôts en espèces partout ; dans d’autres cas, il n’aurait aucune de ces deux possibilités

On le sait, les frais de gestion sont différents entre les établissements entretenant un réseau d’agences et les autres. Il y a là une distorsion de concurrence d’autant plus inopportune que ce projet de loi a précisément pour vocation, avons-nous cru comprendre, de favoriser la concurrence.

C’est donc dans l’intérêt de tous que cette condition doit être posée, n’empêchant en réalité que très peu de groupes bancaires de délivrer un livret A. Cette exigence les poussera peut-être à ouvrir de véritables guichets si leur intention est réellement d’être accessibles à la plus large clientèle possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Mes chers collègues, relever le plafond ne nous semble pas acceptable, surtout lorsqu’on présente, à juste titre, l’épargne collectée par le livret A comme une épargne populaire. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) L’épargne comprise entre 15 300 euros et 20 800 euros peut-elle réellement être qualifiée d’épargne populaire ? Je me permets simplement de vous poser la question, en me rappelant des déclarations qui ne sont pas si anciennes sur la limite de la richesse à 4 000 euros par mois…, mais je n’en dis pas plus. La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 551 rectifié.

S’agissant des amendements identiques nos 558 et 886 rectifié, la commission spéciale n’a pas eu le sentiment que la rédaction proposée était plus lisible que celle du texte du Gouvernement. Elle a donc émis un avis défavorable.

J’en viens à l’amendement n° 556. Le fait d’exclure un mode de distribution nous semble contraire au droit européen de la concurrence. Je suis cependant amené à interroger Mme le ministre de l’économie sur les taux de commissionnement. S’il s’agit d’une simple banque virtuelle, les dépenses d’exploitation sont moins lourdes.

M. Philippe Marini, rapporteur. J’imagine que le décret pourra tenir compte de ces situations, de ces politiques commerciales différentes. Peut-être, pour des raisons de simplicité, préférez-vous un système de forfait, madame le ministre. Pourriez-vous nous indiquer quel est votre sentiment sur cette question ?

En tout état de cause, l’amendement ne peut recevoir qu’un avis défavorable, car nous ne souhaitons pas, ayant réalisé avec un retard de plusieurs années une harmonisation avec le droit européen, fragiliser cette réforme.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Pour la même raison que la commission, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 551 rectifié. Il y est d’autant plus défavorable que, s’il était adopté, il aurait également pour effet d’abroger la disposition du projet de loi prévoyant la généralisation du livret A à toutes les banques.

S’agissant des amendements identiques nos 558 et 886 rectifié, je remercie M. le rapporteur d’avoir considéré que la rédaction initialement proposée était meilleure. Je reprends à mon compte cette appréciation et j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

J’en viens enfin à l’amendement n° 556, qui viserait à réserver le droit de distribuer le livret A aux seuls établissements disposant de guichets permettant de recevoir des fonds en espèces.

Cette disposition, d’une part, est contraire au droit européen de la concurrence et, d’autre part, va totalement à l’encontre du double objectif que nous nous sommes fixé, puisque nous souhaitons à la fois développer l’épargne populaire et financer le logement social. Dans ces conditions, pourquoi se priverait-on d’un mode de collecte au seul motif qu’il ne serait pas fondé sur un réseau de guichets ?

Les banques qui ne disposent pas de guichets ont, elles aussi, des coûts ; elles sont obligées de bâtir une structure, fondée sur des développements informatiques, des logiciels en particulier, très coûteux, qui peuvent parfaitement justifier un financement. Je rappelle que celui-ci est destiné non pas à payer les amortissements ou les équipements particuliers de telle ou telle banque, mais tout simplement à rémunérer la collecte, qu’elle soit réalisée par un réseau de guichets ou par un réseau informatique.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 556.

Mme Nicole Bricq. Alors il fallait fixer le taux à 0,4 % !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 551 rectifié.

Mme Nathalie Goulet. Curieusement, je suis tout à fait réconfortée par ce que vient de dire Mme la ministre. Dans les territoires ruraux, les mesures de sécurité imposées ne permettent pas aux communes de conserver des établissements bancaires. Dans ces conditions, je pense qu’en milieu rural toutes les opérations resteront à La Poste. Finalement, ce n’est pas plus mal.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Je voudrais revenir sur la question du plafond de versements sur le livret A, la réponse de M. le rapporteur ne nous ayant pas convaincus.

Parmi les critères invoqués pour expliquer la sagesse de l’évolution du plafond de versements, on a souvent invoqué le coût fiscal global de la défiscalisation du livret A. Si l’on en croit l’évaluation des voies et moyens associée à la loi de finances pour 2008, le coût de la défiscalisation du livret A au titre de l’impôt sur le revenu s’élève à 280 millions d’euros, qui permettent, rappelons-le, la mobilisation de 115 milliards à 120 milliards d’euros d’encours, dont une part importante participe à la construction de plus ou moins 60 000 logements sociaux par an.

Encore n’est-ce là qu’une des utilisations du livret A. Sur le fond, chacun sait qu’au-delà de la centralisation intégrale des dépôts la Caisse des dépôts gère au mieux les fonds d’épargne qui lui sont confiés, dans d’autres domaines et sur d’autres champs de la vie économique et sociale du pays. La Caisse des dépôts et consignations est en particulier l’un des partenaires privilégiés des collectivités territoriales.

Rapporté au logement, le coût de la défiscalisation est donc inférieur à 4 000 euros, nonobstant le fait qu’une bonne part de la politique de réhabilitation du parc locatif social existant est également financée par la collecte du livret A.

Nous avons donc, quand il s’agit de construire ou de réhabiliter un logement, un coût induit par la défiscalisation qui doit se situer aux alentours de 2 000 euros, ce qui n’a strictement rien à voir avec le volume des aides économiques et fiscales accordées au logement locatif privé ou au logement privé de caractère spéculatif.

Soyons plus précis : comment oublier que l’activité du bâtiment génère des ressources fiscales autrement plus importantes que ne coûte la défiscalisation de la ressource et qu’elle est si productrice d’emplois que les comptes sont vite faits.

M. Jean Desessard. Absolument !

Mme Odette Terrade. L’État, sur le fond, n’a pas à supporter le coût du livret A ; il en recueille surtout les fruits, qu’il s’agisse des recettes fiscales liées à l’activité du secteur, du dividende de la Caisse des dépôts et consignations et de sa contribution volontaire au budget général, ou des recettes d’ordre qu’il puise régulièrement, en tant que de besoin, pour boucler le budget au sein des fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts.

Le maintien des avantages liés au livret A tel qu’il existe aujourd’hui devrait à lui seul motiver, de la part du Gouvernement, une tout autre attitude. Pour notre part, nous pensons qu’il faut préserver la spécificité du livret A en France et en Europe et qu’il importe de lui donner une force renouvelée.

Quand on annonce un plan banlieue sans précédent, il faut se donner les moyens de sa politique, et le livret A en fait partie. C’est pourquoi nous voterons sans hésiter l’amendement n° 551 rectifié.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Très sincèrement, madame la ministre, je ne comprends pas en quoi le relèvement du plafond de versements remettrait en cause la modernisation du livret A. J’ai même le sentiment que l’augmentation du plafond n’a absolument rien à voir avec la banalisation souhaitée par Bruxelles, ni avec le fait que vous choisissiez de ne centraliser qu’une partie des sommes collectées à la Caisse des dépôts et consignations. En fait, cet amendement aurait pu être complètement disjoint de la réforme du livret A.

Monsieur le rapporteur, vous vous demandez si nous pouvons considérer qu’un compte d’épargne est encore populaire avec un montant avoisinant 20 000 euros. À titre personnel, ma réponse est « oui ». Je ne considère pas qu’une personne détenant un livret d’épargne avec 20 000 euros soit riche. D’ailleurs, seuls 2,4 % des livrets A atteignent le plafond de 15 300 euros.

Vous vous interrogez sur la légitimité de cette revalorisation ; mais tout se revalorise chaque année ! Au 1er janvier de chaque année, Mme Boutin pourrait en témoigner, on revalorise les aides personnelles au logement, par exemple.

Mme Odette Terrade. Et les loyers !

M. Thierry Repentin. Et, monsieur le rapporteur général, il me semble que, chaque année, dans le budget vous réactualisez certains seuils ; je pense à la revalorisation du seuil à partir duquel on est redevable de l’impôt de solidarité sur la fortune.

M. Philippe Marini, rapporteur. C’est le déficit qui risque d’être revalorisé !

M. Thierry Repentin. Dans ces conditions, pourquoi refuserait-on de revaloriser l’épargne populaire ? Il y a deux poids, deux mesures, qui sont difficilement compréhensibles !

Franchement, tout le monde y gagnerait si une partie de nos concitoyens mettait un peu plus d’argent sur le livret A : les banques, qui pourraient collecter plus d’argent ; la Caisse des dépôts et consignations, qui disposerait de fonds centralisés plus importants ; l’État aussi puisque, madame la ministre de l’économie, la Caisse des dépôts gérant bien cet argent, on ponctionne allègrement chaque année dans les fonds d’épargne – 1,5 milliard d’euros sur l’année 2007 – pour abonder le budget.

Tout le monde serait gagnant dans cette opération. J’entends parfois parler de « niche fiscale » à propos du livret A ; franchement, de telles niches fiscales, il faudrait en inventer tous les jours !

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Thierry Repentin pose la question de la revalorisation du plafond du livret A, compte tenu de l’inflation, du coût de la vie, etc.

En fait, si M. le rapporteur s’y oppose, c’est qu’il a pris en compte la paupérisation de la société et le fait que les classes moyennes et populaires gagnent moins. Il souhaite tout simplement accompagner ce mouvement de paupérisation. Le coût de la vie augmente, mais comme, dans le même temps, le pouvoir d’achat baisse dans les milieux populaires, ce n’est pas la peine de revaloriser le plafond ! (Sourires.)

M. Michel Billout. Il faut travailler plus !

M. Jean Desessard. C’est logique, tout simplement !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 551 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 558 et 886 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote sur l’amendement n° 556.

M. Michel Billout. Aujourd’hui – c’est d’ailleurs l’un des principaux griefs portés contre la situation actuelle par les établissements de crédit « banalisés » – seules les Caisses d’épargne et La Poste sont autorisées à collecter le livret A dans le cadre de plages horaires d’ouverture différentes des établissements de crédit « ordinaires ». Les banquiers en question oublient sans doute que La Poste comme les Caisses d’épargne remplissent des missions de service public et d’intérêt général qui motivent précisément ces conditions particulières de fonctionnement.

Je ne crois pas que la loi bancaire de 1984, transposée depuis dans le code monétaire et financier, fasse obligation, l’espace d’un alinéa, aux établissements de crédit de faire face à des missions d’intérêt général. Au demeurant, vu la difficulté que les mêmes établissements de crédit rencontrent pour mettre en œuvre le droit au compte et l’accessibilité bancaire, on ne s’en étonnera guère.

Dans ce contexte, la critique régulièrement formulée sur le duopole de la distribution du livret et fondée sur des conditions de concurrence déséquilibrées est pour le moins discutable.

L’autre question posée par cet article est celle de l’existence d’un véritable réseau de collecte, matérialisé par la présence de guichets de réception du public, de guichets parfaitement identifiés et physiquement repérables.

Une telle définition exclut donc qu’une banque en ligne puisse proposer un produit équivalent au livret A, offrant les mêmes caractéristiques de rémunération, puisqu’elle ferait jouer à plein l’exclusion bancaire. Ne pas tenir de guichet de réception du public revient en effet à priver une grande partie des épargnants de la possibilité même de souscrire, au seul motif que, au-delà de l’exclusion bancaire, nous connaissons aussi la fracture numérique.

En outre, dans la mesure où le taux de rémunération de la collecte sera identique à terme pour chacun des réseaux, c’est donner un avantage comparatif déloyal au regard de la concurrence au seul profit des établissements bancaires « virtuels ». Quelle curieuse conception de la concurrence dite libre et non faussée ! On voit bien qu’une banque comme ING Direct, pour ne citer que celle-là, car elle a une responsabilité particulière dans cette partie du projet de loi, en tirera de substantiels bénéfices.

Nous voterons donc cet amendement de simple équilibre de la concurrence.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Je voudrais simplement dire à Mme la ministre, qui doit présenter la réforme d’ici à deux mois à Bruxelles, qu’elle aura du mal à convaincre la Commission que refuser d’imposer l’ouverture de guichets sur tout le territoire favorise la concurrence.

Nous reparlerons tout à l’heure de l’accessibilité bancaire, mais votre refus est en quelque sorte l’aveu implicite que vous entendez réserver aux nouveaux entrants les livrets qui connaissent le moins de mouvements et qui sont donc les plus intéressants. Les autres livrets seront cantonnés à La Poste, à qui l’on imposera la mission d’intérêt général d’accessibilité bancaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 556.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 372 rectifié, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung, Josselin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Rédiger comme suit le début du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier :

Tout établissement de crédit qui s’est engagé par convention avec l’État est tenu d’ouvrir un livret A…

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… - La perte de recettes résultant pour l’État de l’extension de l’obligation d’ouvrir un livret A aux personnes qui en font la demande est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. L’exclusion bancaire concerne aujourd’hui 5 millions de personnes.

Le livret A constitue le dernier outil pour remédier à cette exclusion, car les populations les plus démunies l’utilisent quasi quotidiennement pour effectuer les opérations financières de base. Une partie importante des allocataires de minima sociaux et des personnes en détresse sociale ont ainsi accès à un compte scriptural gratuit.

Les distributeurs historiques ne pratiquent aucune sélection de clientèle, les caractéristiques de fonctionnement de leur livret A étant, de plus, gratuites. Nous pensons que ces caractéristiques fondamentales doivent être assurées par toutes les banques, tandis que la rédaction que le projet de loi propose pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier aboutirait à faire, comme cela vient d’être dit par Nicole Bricq, de la Banque Postale la « banque des pauvres ».

Monsieur le rapporteur, ne me dites pas que la Banque Postale est subventionnée pour cela. Elle l’est surtout au titre de sa présence territoriale.

En conséquence, l’amendement que nous présentons vise à obliger tous les établissements ayant choisi de distribuer le livret A à ouvrir un tel livret aux personnes y ayant droit et qui leur en font la demande. II s’agit par là de confier à ces établissements une mission d’accessibilité bancaire via le livret A.

« Banalisation » du livret A signifie qu’il serait distribué partout. Et l’on voudrait nous faire accepter le fait que, pour les banquiers, seuls les clients qui ont des moyens seraient intéressants ! Au contraire, il nous semble tout à fait logique d’obliger les banques à ne pas refuser les personnes très modestes qui pourraient entrer dans leurs établissements.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 571 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 896 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le texte proposé par le I de cet article, pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

L’établissement de crédit mentionné à l’article L. 518-25-1 ouvre

par les mots :

Les établissements mentionnés à l’article précédent ouvrent

La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 571.

M. Thierry Repentin. Comme nous avons eu l’occasion de le rappeler dans la discussion générale, ne pas exiger des autres banques les mêmes conditions d’accessibilité bancaire que celles imposées à la Banque Postale est une vision bien particulière de la banalisation. Si la banalisation est exigée par Mme la commissaire européenne, c’est pour remédier à ce qu’elle considère comme une distorsion de concurrence entre les banques pouvant commercialiser le livret A et les autres produits.

Chacun connaît la position du groupe socialiste sur cette décision : nous en contestons le bien-fondé, car le livret A n’est pas un produit financier comme les autres. Il correspond à un double service d’intérêt économique général : le financement du logement à loyer modéré et l’accessibilité bancaire. À ce titre, il ne devrait pas être soumis aux règles de concurrence qui s’imposent aux produits et services purement marchands.

Nous n’avons d’ailleurs eu de cesse de recommander l’attente de la décision de justice quant au recours déposé par la France devant la Cour de justice des Communautés européennes. Nous avons également œuvré pour que des associations nationales d’élus locaux déposent – elles l’ont fait ! – leur propre recours auprès de la justice européenne.

Néanmoins, maintenant que nous y sommes, en annonçant une uniformisation de la distribution du livret A, vous réalisez en fait une banalisation à géométrie variable. C’est pour le moins paradoxal !

L’objet du présent amendement est d’étendre la mission d’accessibilité bancaire à tous les établissements distributeurs du livret A. Ainsi, toute personne qui en fait la demande pourra bénéficier de l’ouverture d’un tel compte d’épargne dans l’établissement financier de son choix.

Mes chers collègues, j’appelle votre attention sur le fait que cette disposition instituera l’obligation d’ouverture de compte pour le seul livret A, sans se substituer aux dispositions de la charte d’accessibilité bancaire pour les autres comptes ou produits bancaires.

Madame la ministre, nous réfutons, avant que vous ne nous répondiez la même chose qu’à l’Assemblée nationale, votre argument selon lequel déjà aujourd’hui seule la Banque Postale est tenue d’accepter toute demande d’ouverture d’un livret. C’est effectivement la situation actuelle, mais ce n’est pas l’esprit du livret A, outil premier de l’accessibilité bancaire. Ce n’est pas non plus l’objet de votre réforme : vous ne cessez en effet de la justifier par la volonté d’offrir la possibilité d’ouvrir un livret A à un maximum de nos concitoyens. Eh bien, allez au bout de votre logique et permettez qu’il soit accessible à tous ! Pour cela, il est indispensable d’imposer les mêmes conditions de distribution à toutes les banques.

En réalité, ce que traduit la rédaction actuelle de l’article 39, c’est la tentation de creuser davantage le fossé entre nos concitoyens les plus aisés, qui pourront choisir, et les plus modestes, qui seront immanquablement réorientés vers un organisme particulier. Ainsi, vous découragez les clients déjà discriminés à entrer dans une banque lambda : le risque d’essuyer un refus d’ouverture sera trop grand. La concurrence prétendument accrue ne sera que renforcement de la sélection et exclusion sociale.

Il y aura plus que jamais des banques pour les pauvres et des banques pour les autres. Mais il y aura aussi des banques pauvres et les autres établissements financiers ! En effet, les coûts qui seront supportés par les établissements ouvrant un livret sans condition ne seront évidemment pas les mêmes que ceux supportés par les banques sélectives. Dans le premier cas, les opérations auront tendance à être nombreuses, de faible montant et avec des encours modestes. Dans le second cas, notamment les banques en ligne, les opérations seront rares et l’encours souvent élevé. Pourtant, la rémunération entre les deux sera identique. Comprenne qui pourra !

Pour mémoire, je rappelle que la mission d’accessibilité bancaire, à laquelle vient de faire référence Bariza Khiari, est estimée à 500 millions d’euros par la Banque Postale et à 428 millions d’euros par la Commission européenne.

Dans la mesure où la rémunération est identique, le service rendu doit l’être aussi. C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l’amendement n° 896.

M. Thierry Foucaud. Il nous apparaît essentiel que la faculté de distribuer le livret A soit liée au droit effectif à l’ouverture d’un livret et au dépôt sur ce compte, quel que soit le réseau choisi par l’épargnant.

Cette situation a plusieurs significations.

Dans la rédaction actuelle du projet de loi, c’est la Banque Postale qui semble destinée à distribuer et surtout à gérer l’encours des livrets A des plus petits épargnants, tandis que les autres établissements de crédit pourraient, au fil du temps, capter les plus importants épargnants. Ainsi, ce qui est à craindre avec le texte proposé par le paragraphe I de l’article 39 pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier, c’est que la clientèle du livret A ou de tout autre livret correspondant soit progressivement segmentée et que la Banque Postale devienne en quelque sorte « la banque des pauvres ».

Une telle situation n’est pas satisfaisante à plus d’un titre, car elle tend à transformer le livret A en produit d’appel pour les établissements de crédit « banalisés » et en produit de « cantonnement » pour la Banque Postale. Celle-ci se voit en effet confier une sorte de mission d’intérêt général qui lui sera rémunérée, au moins sur la période transitoire, en attendant qu’elle adapte ses coûts de collecte à la situation créée par le nouveau partage de la clientèle des épargnants.

Mes chers collègues, j’en appelle là à votre bon sens. Comment la Banque Postale va-t-elle pouvoir faire appel à ses coûts de collecte ? Tout simplement en rationalisant ses coûts et en réalisant autant que faire se peut des gains de productivité. Or je vais vous dire ce que cela signifie, puisque tout marche ensemble dans cette affaire.

En cas de vote positif en faveur de la réforme du livret A, ne vous attendez pas à une soudaine croissance de l’épargne populaire ou à la possibilité de dégager des milliards et des milliards d’euros pour des politiques publiques renforcées. Si vous votez en l’état la réforme du livret A, notamment l’article L. 221-2 du code monétaire et financier, vous voterez dans la foulée la fermeture de plusieurs milliers de bureaux de poste en zone rurale…

Mme Odette Terrade. Absolument !

M. Thierry Foucaud.… ou en zone urbaine sensible,…

Mme Nicole Bricq et M. Thierry Repentin. Il a raison !

Mme Christine Boutin, ministre. Mais non !

M. Thierry Foucaud.… vous voterez l’augmentation régulière du timbre poste, vous voterez la suppression massive d’emplois de distribution du courrier. En un mot, vous voterez le dépérissement du service public postal.

Vous pouvez le voter, mes chers collègues, mais ces orientations trouveront toute leur application au cours de la période transitoire pendant laquelle les collectivités locales seront sollicitées pour faire face au recentrage des activités de La Poste. Mais vous pouvez aussi, en adoptant notre amendement, éviter tout cela, ou en tout cas le prévenir.

À l’instar de M. Repentin, nous pensons que, s’il y a banalisation, il faut qu’il y ait égalité de traitement entre les réseaux et égalité des épargnants devant chaque réseau.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement par scrutin public.

M. le président. L’amendement n° 582 rectifié, présenté par MM. Longuet et Gournac, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier, remplacer le mot :

ouvre

par les mots :

et tout établissement de crédit autorisé à recevoir des dépôts peuvent s’engager par convention spécifique avec l’État à ouvrir

La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Je vais faire la démonstration exactement inverse de celle de l’intervention précédente.

Nous avons souhaité rappeler, en présentant cet amendement, que l’accessibilité bancaire était demandée et acceptée par d’autres acteurs que la Banque Postale.

Pour des raisons personnelles, ayant exercé des activités coupables dans ce domaine (sourires), je défends La Poste, sa présence, ses 13 000 points de contact. Du point de vue de l’aménagement du territoire, de la présence en milieu rural, dans nos quartiers, je comprends très bien qu’on la soutienne.

Cependant, au travers de cet amendement, nous voulons rappeler que ceux qui distribuent aujourd’hui le livret A ne récusent pas la mission d’accessibilité bancaire : la Caisse d’épargne, le Crédit Mutuel, qui distribuent le livret A depuis longtemps, et peut-être d’autres banques demain, ne récusent pas cette mission.

Ils peuvent d’ailleurs la remplir par le principe du droit au compte, mais ils pourraient également le faire par le livret A.

Il s’agit donc d’un amendement d’humeur, pour signifier que ces réseaux ne rejettent pas les moins aisés, les moins favorisés, les plus pauvres de nos compatriotes.

Je sais parfaitement que cet amendement sera rejeté, non pas parce que le Crédit Mutuel ou la Caisse d’épargne refuseraient les moins riches ou les pauvres, mais simplement parce qu’il y a un intérêt d’aménagement du territoire à défendre La Poste, qui dispose, en effet, de 13 000 points de contact.

Quoi qu’il en soit, ne laissons pas entendre que la Caisse d’épargne et le Crédit Mutuel abandonnent la clientèle populaire !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je vais en quelques mots rappeler la fonction bien spécifique que remplit actuellement la Banque Postale et qu’il est prévu de pérenniser dans le cadre de cette réforme.

À l’heure actuelle, la Banque Postale assure l’accessibilité bancaire à près de1 million de personnes très démunies. Les charges de gestion liées à cette situation de fait sont très significatives puisqu’elles ont été estimées à plus de 400 millions d’euros par la Commission européenne dans le cadre de ses récentes enquêtes.

La Banque Postale, nous le savons bien, est récente dans ses fonctions concurrentielles. Il lui faut du temps pour s’adapter, pour se développer, tout en maintenant ses spécificités, son fonds de commerce et le plus grand nombre possible de points d’implantation sur le territoire.

Si l’on ne reconnaissait pas dans la réforme une fonction spécifique à la Banque Postale, celle-ci serait extrêmement fragilisée et ses clients les plus en difficulté en souffriraient les premiers.

Je me permets de rappeler les contraintes particulières issues de cette mission d’accessibilité bancaire : l’ouverture d’un livret A à toute personne qui en fait la demande ; des opérations de dépôt et de retrait à partir de 1,5 euro, ce qui exige une caisse en espèces dans chaque bureau de poste ; l’acceptation de la domiciliation de certaines opérations, tel le versement des allocations sociales ou des pensions, et les prélèvements de certaines dépenses.

M. Thierry Repentin. Tout cela gratuitement !

M. Philippe Marini, rapporteur. Mes chers collègues, vous souscrivez bien à tout cela ? Vous êtes de grands défenseurs du secteur financier public, si je ne m’abuse ?

Je trouve donc que ce débat est légèrement à « front renversé ». Je n’arrive pas à comprendre la logique de votre position.

En effet, comme le montre un tableau figurant dans mon rapport écrit, le versement qui sera fait annuellement par l’État pour rémunérer cette mission spécifique d’accessibilité bancaire s’élèvera à 280 millions d’euros la première année et à 210 millions d’euros en 2014. La Banque Postale est donc accompagnée dans sa transformation.

Nous savons bien que, dans son produit net bancaire, du fait de son ouverture encore très récente à des métiers concurrentiels, la part du livret A est tout à fait considérable alors qu’elle s’est au contraire beaucoup érodée pour les caisses d’épargnes, qui ont entrepris, tout le monde le sait, des développements dans toutes sortes de métiers, parfois d’ailleurs très brillamment.

Il me semble donc que tous ces amendements doivent absolument être repoussés, car, s’ils devenaient loi, ils se retourneraient véritablement de manière très cruelle contre les clients les plus précarisés. Le service qui est proposé ne pourrait manifestement plus être rempli.

En outre, j’ai de la peine à croire que vous ne soyez pas sensibles à la nécessité de mettre la Banque Postale dans les meilleures conditions possibles pour qu’elle soit vraiment une banque de plein exercice, susceptible de prendre position sur tous les métiers, et ce malgré son origine étatique et administrative.

Je le répète : franchement, je ne comprends pas la logique des positions que vous avez défendues.

Naturellement, en vertu de cette analyse, la commission spéciale est tout à fait défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.

Selon les cas, les amendements visent à proposer soit d’étendre à toutes les banques qui le souhaitent la mission d’accessibilité bancaire, soit d’étendre à toutes les banques, qu’elles le souhaitent ou non, la mission d’accessibilité bancaire par le biais du livret A.

Or cela correspond exactement à l’inverse de ce que nous souhaitons faire, à savoir mettre en place un régime de liberté qui n’impose un cahier des charges et qui ne soit contraignant qu’à l’égard de la seule Banque Postale. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous voulons mettre le « paquet », permettez-moi l’expression, sur l’accessibilité bancaire par le droit au compte.

Il nous paraît légitime que chacun puisse entrer dans une succursale de banque ou utiliser des voies et moyens électroniques, s’ils sont accessibles, pour avoir accès aux services bancaires. Il nous paraît légitime que les banques s’acquittent bien de leur obligation d’ouvrir un compte à celui qui en fait demande.

Si l’accessibilité bancaire par le droit au compte pour chacun est bien l’objectif que nous visons, pourquoi voudrions-nous mettre en place un mécanisme de livret A qui serait un substitut, un succédané et un dégradé de ce droit au compte par le biais de l’accessibilité ?

Je remercie Gérard Longuet d’avoir présenté l’amendement n° 582 rectifié, qui permet de clarifier très précisément le principe selon lequel toute banque autre que la Banque Postale peut, si elle le souhaite, aller vers l’épargne populaire et faire fonctionner son instrument de la même manière que la Banque Postale le fera, encadrée par le cahier des charges.

Certes, une autre banque ne bénéficiera pas, à ce titre, de la commission de gestion qui est réservée à la Banque Postale, puisque c’est à elle que nous imposons l’obligation de proposer le mécanisme du livret A selon les contraintes du cahier des charges évoqué par M. le rapporteur.

C’est donc une fausse bonne idée qui est ici proposée, raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.

J’ajouterai un point au sujet de la Banque Postale. Nous sommes évidemment tous attachés à elle, à sa présence, en particulier dans les milieux ruraux, où nous savons bien qu’elle joue le rôle d’aménagement du territoire que M. le rapporteur évoquait. C’est pour cette raison, d’ailleurs, que, depuis plusieurs mois maintenant, la Banque Postale a la possibilité d’offrir des produits supplémentaires pour devenir une banque à part entière, proposant des crédits à la consommation et, depuis une date plus récente encore, des produits d’assurance, comme un certain nombre d’autres établissements bancaires.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 372 rectifié.

Mme Nicole Bricq. Les explications de M. le rapporteur, comme celles de Mme la ministre, ne sont absolument pas convaincantes, notamment en ce qui concerne l’accessibilité bancaire et la Banque Postale.

Lorsque la Banque Postale a été créée, notre groupe, par la voix notamment de notre regretté collègue Pierre-Yvon Trémel, avait fait remarquer à plusieurs reprises que, si l’on voulait lui donner de véritables chances d’exister dans un paysage bancaire déjà bien fermé, d’être à niveau par rapport aux autres établissements bancaires, il fallait lui accorder très rapidement un agrément pour les crédits immobiliers et pour les crédits à la consommation.

Ce n’est qu’en 2008 ou à la fin de l’année 2007 que la Banque Postale a reçu l’agrément pour les crédits à la consommation. Si on avait vraiment voulu lui donner toutes ses chances, il aurait fallu le lui accorder plus rapidement à compter de sa création !

M. le rapporteur a évoqué la période transitoire qui conduira La Poste jusqu’en 2014 et qui s’accompagnera d’une dégressivité de la rémunération. Cependant, dans son rapport écrit, il est indiqué que cette dégressivité incitera cet établissement bancaire à réaliser des gains de productivité.

Que signifient des gains de productivité par rapport à la présence postale ? Je vous laisse le soin d’imaginer la réponse, mais notre collègue Thierry Foucaud a bien évoqué le problème…

Il y a aujourd’hui 13 000 points postaux. Combien en restera-t-il en 2014 ?

Mme Odette Terrade. Absolument !

Mme Nicole Bricq. C’est exactement ce que nous avions dénoncé lors du débat sur la création de la Banque Postale.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’amendement n° 372 rectifié.

M. Jean Desessard. Je trouve également que les arguments de M. le rapporteur ne tiennent pas.

Il nous explique, à juste titre, que la Caisse d’épargne s’est s’éloignée de l’épargne populaire et qu’elle remplit d’autres missions – brillamment, paraît-il.

Nos premiers amendements visent à ce que seuls la Banque Postale, la Caisse d’épargne et le Crédit Mutuel gèrent le livret A. Pourquoi ? Tout simplement parce que cela permettrait de maintenir des agences avec guichet sur l’ensemble du territoire. C’était notre raisonnement ; vous l’avez refusé et vous avez dit : il faut étendre le dispositif à tous.

Puis, vous reprenez notre argument et considérez que La Poste doit être obligée de tenir les livrets A, mais seulement ceux des plus pauvres, c’est-à-dire ceux qui ont beaucoup de mouvements et peu d’argent. C’est donc la Banque Postale qui aura le plus de travail et le moins de rémunération ! Et voilà, c’est bien ce que nous disons : ce sont les entrants qui auront le moins de travail, le moins de guichet et les plus gros comptes, c’est-à-dire le maximum de rémunération.

Je ne vois donc pas en quoi il y a « front renversé », monsieur le rapporteur !

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Comme mes collègues, je ne suis pas du tout convaincu par les arguments que j’ai entendus.

À ce moment du débat, je mesure le fossé qui peut exister entre nous…

M. Philippe Marini, rapporteur. Eh oui !

M. Thierry Repentin.… sur l’analyse de ce texte, mais je mesure surtout le fossé qui existe entre ce qui se passe dans cet hémicycle et ce qui se passe dans la vie quotidienne !

Il se trouve que, samedi dernier, pour une raison personnelle, je me suis rendu dans mon bureau de poste, situé dans une zone de redynamisation urbaine, une ZRU. Les deux personnes devant moi ont effectué un retrait, l’une de 7 euros et l’autre de 12 euros, en demandant préalablement combien il restait sur leur compte.

Voyez-vous, si je défends avec conviction la possibilité pour tous d’ouvrir partout un livret A, c’est parce que je souhaite que ces personnes, si d’aventure leur banque de proximité est une des banques qui a engagé un recours devant la Cour de justice européenne – on peut citer le Crédit agricole –, ne se sentent pas exclues. Je ne sais pas si cette position correspond à une démarche politique, mais il me semble que c’est une question de dignité humaine.

Monsieur Marini, quand vous nous dites qu’on ne peut pas porter à 20 000 euros le plafond du livret A, je m’interroge. En effet, le plafond du livret aujourd’hui délivré par les banques, notamment par le groupe ING, qui est l’une des banques à avoir déposé un recours contre la Commission européenne - je signale au passage que l’un de ses administrateurs était Mme Neelie Kroes -, est fixé à 3 millions d’euros. Et nous, nous discutions tout à l’heure pour savoir si l’on pouvait passer de 15 000 à 20 000 euros ! Or le groupe ING aura le même taux de rémunération que La Banque Postale pour les encours du livret A !

Franchement, au-delà des mesures techniques dont nous discutons, je me permets de vous rappeler à la réalité de ce qui se passe dans nos collectivités. Demain, en retournant dans mon quartier, je penserai à ces deux personnes qui me précédaient au guichet de La Poste et qui, en fin de mois, ne pouvaient pas retirer plus de 7 et 12 euros, qui sont donc condamnées à rester à La Poste, sans espoir de pouvoir changer d’établissement bancaire. C’est peut-être le dernier lieu où elles peuvent être accueillies. En effet, il y a une différence essentielle entre pousser la porte d’un bureau de poste et franchir le sas d’une banque.

Il est bien dommage que vous ne donniez pas la possibilité aux titulaires d’un livret A dont le solde est inférieur à 150 euros - c’est le cas de 50 % des livrets A - d’être accueillis dans une banque, car le droit au compte, madame la ministre, c’est une virtualité. Ce qui compte aussi, c’est l’accueil qui est donné aux guichets. Je vous assure que, pour des gens qui vivent avec des minima sociaux, qui ne se sentent pas toujours bienvenus, il n’est pas facile, spontanément, de demander l’ouverture d’un compte. Avec un livret A identique pour tous, chacun se sentira traité de la même façon partout, qu’il soit au plafond ou qu’il n’ait que quelques euros placés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur Repentin, premièrement, nous allons tous à La Poste.

Deuxièmement, on n’est pas « condamné » à aller à La Poste, comme vous venez de l’indiquer. Il n’y a rien de grave à rester à La Poste !

Troisièmement, celui qui effectue un petit retrait ou un versement modeste pourra continuer à aller à La Poste. Vous, moi, ou un autre !

Enfin, quatrièmement, celui qui a retiré 7 ou 12 euros ne pourrait pas, aujourd’hui, le faire ailleurs, pour des raisons évidentes de sécurité, de coût et de logistique. Aucune banque, aujourd’hui, en dehors de ce qu’elles appellent la « boîte à chaussures », dans laquelle elles conservent quelques pièces, ne disposent de monnaie pour alimenter ce type de retrait.

Donc, ne stigmatisons pas La Poste, je vous en prie, parce que, franchement, on y va tous et il n’y a rien de mal à y aller ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Thierry Repentin. Ce n’est pas La Poste que je stigmatise, c’est le système !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 372 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 571 et 896.

Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 128 :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 322
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l’adoption 125
Contre 197

Le Sénat n’a pas adopté.

Monsieur Longuet, l’amendement n° 582 rectifié est-il maintenu ?

M. Gérard Longuet. Je voudrais faire quelques remarques concrètes.

Premièrement, cet amendement avait pour mission de rappeler que les réseaux qui, en dehors de La Poste, distribuaient jusqu’à présent le livret A étaient candidats à l’accessibilité bancaire par le livret A. Leur demande n’a pas été retenue, mais ils étaient candidats. Il ne faudra donc pas, demain, leur reprocher d’écarter la clientèle populaire.

Deuxièmement, l’effort significatif de l’État au bénéfice de La Banque Postale doit, à mon avis, être plus rattaché à sa fonction d’aménagement du territoire qu’à sa fonction d’accessibilité bancaire par le livret A, pour une raison mathématique simple.

La subvention de l’État, qui sera au départ de 280 millions d’euros va assez rapidement descendre à 210 millions d’euros. Selon La Poste, il y a 1 million de dossiers d’extrême pauvreté. Cela représente 200 euros de subventions par an et par livret, ce qui n’est pas négligeable.

Rapportons cette subvention – arrondie à 200 millions d’euros, pour simplifier - aux 13 000 bureaux permanents de La Poste, qui, pour 3 000 d’entre eux - ce sont des souvenirs d’ancien ministre ! - s’équilibrent par le chiffre d’affaires strictement postal, les autres ayant besoin des activités financières. Donc, en simplifiant les choses, 200 millions d’euros rapportés aux 10 000 bureaux ce poste, cela équivaut à 20 000 euros de subvention par bureau de poste, c’est-à-dire un demi-emploi. C’est donc la plus belle subvention d’aménagement du territoire que nous votons au bénéfice d’un grand organisme.

Je voulais simplement rappeler cette donnée, dont nous reparlerons probablement tous les ans, à l’occasion de la discussion budgétaire.

M. Philippe Marini, rapporteur. Très bien !

M. Gérard Longuet. Cela dit, je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 582 rectifié est retiré.

L’amendement n° 553, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-2 du code monétaire et financier par un alinéa ainsi rédigé :

« Tout établissement habilité à proposer un livret A doit assurer la gratuité de toute transaction d’un montant minimum d’un euro et cinquante centimes, ainsi que de l’ensemble des opérations le concernant.

Cet amendement a déjà été défendu.

Je le mets aux voix.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 559, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-3 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

associations mentionnées

par les mots :

personnes morales mentionnées au 1 bis et

II. — Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… — Les pertes de recettes pour l’État résultant de l’extension du champ des personnes morales susceptibles de bénéficier d’un Livret A sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Cet amendement vise à permettre aux personnes morales mentionnées au 1 bis de l’article 206 du code général des impôts d’ouvrir un livret A.

Celui-ci comprend les associations non soumises à l’impôt des sociétés et à but non lucratif, les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les syndicats régis par les articles L. 411-1 et suivants du code du travail, les fondations reconnues d’utilité publique, ainsi que les fondations d’entreprise et les congrégations dont la gestion est désintéressée.

Bref, vous l’aurez compris, cette rédaction permet d’élargir l’accès du livret A aux personnes morales, limitées aux seules associations dans la rédaction actuelle du projet de loi.

Les structures susmentionnées sont d’intérêt général, elles produisent de la richesse collective et doivent donc pouvoir bénéficier de la rémunération du livret A tout en contribuant, elles-mêmes, au financement du logement social.

M. le président. L’amendement n° 897, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-3 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

associations mentionnées au 5

par les mots :

personnes morales mentionnées au 1 bis et au 5

La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Cet amendement, comme celui que vient de présenter M. Repentin, vise à placer dans le champ de la clientèle potentielle du livret A un certain nombre de personnes morales à but non lucratif, qu’il s’agisse d’associations, de fondations d’utilité publique ou encore d’organisations syndicales.

Dans cette optique, ce sont plus ou moins 3 millions de nouveaux clients potentiels qui pourraient ouvrir un livret défiscalisé. Or 3 millions de clients, ou peu s’en faut, épargnant au plafond, c’est tout de suite près de 5 milliards d’euros de collecte complémentaire.

C’est un dividende social immédiatement disponible pour l’action de ces organismes, avec la capitalisation des intérêts. C’est en tout cas une solution fondée sur le volontariat et le choix du client, permettant de répondre à des impératifs de sûreté et de liquidité sans équivalent sur la place.

Ce livret défiscalisé offrirait à ces clients l’opportunité de gérer au mieux leur trésorerie disponible tout en assurant un financement complémentaire aux politiques publiques qu’il est appelé à financer.

Dans son esprit, cette extension de clientèle potentielle est tout à fait éloignée de la logique qui avait, un temps, prévalu et qui consistait, à une époque où le livret A souffrait de décollecte, à conduire les organismes d’HLM à épargner obligatoirement sous la forme du livret A.

C’est donc pour ces motifs d’intérêt général que nous vous invitons à adopter cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 581, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-3 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

associations mentionnées

par les mots :

personnes morales mentionnées au II de l’article 208 ter B et

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 559. Je considère donc qu’il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. S’agissant des trois amendements qui viennent d’être défendus, la commission spéciale n’a pas été convaincue.

M. Thierry Repentin. Nous, c’est sur l’ensemble du texte que nous n’avons pas été convaincus !

M. Philippe Marini, rapporteur. Il convient de rappeler que les personnes morales qui sont éligibles au livret A bénéficient déjà d’un plafond dérogatoire de 76 500 euros, somme qui, déjà, n’est pas négligeable.

J’ai bien compris que les auteurs de ces amendements souhaiteraient faire bénéficier du livret A différentes petites associations.

Mais, très sincèrement, faut-il autoriser le cumul de toutes les aides ? Des associations, qui vivent de subventions publiques, feraient de la trésorerie sur ces subventions et placeraient cette trésorerie sur un livret A, lui-même subventionné par l’État ? Je me permets de poser la question de la justification de ce type de démarche : elle ne me paraît pas véritablement acceptable !

Ou alors, si nous prenons en considération les syndicats professionnels, faut-il que l’UIMM puisse placer sa trésorerie sur un livret A ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean Desessard. Si c’est transparent !

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet organisme relève bien de la loi du 21 mars 1884 relative aux syndicats professionnels ! On peut effectivement se poser toutes sortes de questions de cette nature.

M. Thierry Repentin. Je vais vous répondre !

M. Philippe Marini, rapporteur. Il y aurait donc quelques analyses complémentaires à mener pour que votre dispositif soit totalement acceptable, mes chers collègues. Aussi, vous ne m’en voudrez pas de renouveler l’avis défavorable de la commission spéciale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Il est également défavorable. Je précise que, outre le plafond dérogatoire mentionné par M. le rapporteur, les dépôts des organismes d’HLM sont totalement déplafonnés.

M. Philippe Marini, rapporteur. Nous sommes vraiment très laxistes !

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l’amendement n° 559.

M. Thierry Repentin. Nous ne pensons pas spontanément aux mêmes associations, selon que nous nous situons dans la majorité ou dans l’opposition !

M. Philippe Marini, rapporteur. Je voulais vous montrer le défaut de la cuirasse !

M. Thierry Repentin. Mes chers collègues, je voudrais vous rappeler que les associations que je visais explicitement sont des associations à but non lucratif et dont la gestion est désintéressée, ce qui ne me semble pas le cas de l’association qu’a citée M. le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 559.

Mme Nathalie Goulet. L’association des élus ruraux de mon département s’est plainte que le Crédit agricole lui prélevait des frais de gestion pour un compte absolument minuscule. En écoutant M. Repentin, et bien que je ne sois pas spécialiste de la question, je pensais que ce ne serait pas une mauvaise idée que de faire en sorte que de petites associations puissent bénéficier d’un livret A sans frais.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 559.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 897.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 581.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 27, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-3 du code monétaire et financier par les mots :

ou d’un seul compte spécial sur livret du Crédit Mutuel ouvert avant le 1er janvier 2009

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que le cumul d’un livret bleu ouvert avant le 1er janvier 2009, date d’entrée en vigueur de la réforme, et d’un livret A n’est pas autorisé. Il s’agit en effet du même produit, la multidétention doit donc être évitée.

Or la rédaction actuelle du texte proposé pour le dernier alinéa de l’article L. 221-3 du code monétaire et financier laisse ouverte une telle possibilité. La commission spéciale vous propose donc de remédier à cet oubli dans l’objectif d’interdire la détention de plusieurs livrets par la même personne.

J’en profite pour préciser qu’il me semble que notre rédaction préserve la spécificité des livrets bleu ouverts entre 1976 et 1979, pour lesquels le cumul avec un livret A est possible dans le droit existant. Pouvez-vous nous le confirmer, madame le ministre ?

En effet, nous souhaiterions éviter de placer en situation d’insécurité des personnes déjà d’un certain âge et qui conserveraient de bonne foi les deux livrets, lesquels sont très probablement de montants modestes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement de précision permettant d’éviter la détention simultanée d’un livret A et d’un livret bleu. Quant aux livrets bleu antérieurs au 1er septembre 1979 – le livret bleu a été créé par la loi de finances rectificative du 27 décembre 1975 –, qui bénéficiaient de la possibilité du cumul, ils continueront à en bénéficier.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’amendement n° 27.

M. Jean Desessard. Plus que d’une explication de vote, il s’agit d’une question à l’adresse de M. le rapporteur. Je comprends bien le sens de son amendement, mais l’appellation « livret A » s’imposera-t-elle à tous les établissements de crédit ? On nous précise bien la situation par rapport au passé, mais qu’en sera-t-il à l’avenir : sera-t-il possible d’utiliser des noms différents pour le même produit, avec les risques de confusion que cela peut engendrer ?

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Mon cher collègue, la liberté du commerce prévaudra. Une enseigne bancaire, si elle pense y trouver son intérêt, pourra ajouter sa propre dénomination commerciale, il lui appartiendra d’en apprécier l’opportunité. Mais il s’agit bien du même produit qui pourra être qualifié de livret A dans tous les établissements.

S’il se trouve qu’un réseau bancaire veut baptiser ce produit « livret du tigre bondissant » (sourires), pourquoi pas ? Libre à lui !

Mme Odette Terrade. C’est plutôt le livret de l’épargne bondissante !

M. Philippe Marini, rapporteur. S’agissant de la multidétention, nous y reviendrons un peu plus tard dans l’examen du projet de loi. La commission spéciale s’est efforcée de traiter ce point de façon équitable mais, en même temps, avec le souci de ménager les finances publiques.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Soucieux de permettre à quelques établissements de crédit de bénéficier des ressources offertes par l’épargne défiscalisée pour la spéculation sur les marchés, M. le rapporteur, avec cet amendement n° 27, veut faire en sorte que le cumul d’un livret bleu ouvert au Crédit Mutuel et d’un livret A soit impossible.

Sur le fond, M. le rapporteur ne supporte sans doute pas qu’une partie importante de l’épargne des ménages ne soit pas redirigée vers les marchés, notamment vers le marché des actions dont on connaît la performance et l’efficacité !

Si les habitants de notre pays ont quelque goût pour l’épargne défiscalisée, dois-je rappeler que c’est pour des raisons très simples ? Cette épargne est sûre, liquide, assez correctement rémunérée et, en plus, sa collecte présente quelque utilité sociale.

À vrai dire, avec une rémunération de 3,5 %, ce produit est même tout à fait compétitif, autrement plus que ce pauvre CAC 40 qui ne cesse de baisser, heure après heure, jour après jour, depuis le début de l’année. Après avoir frôlé les 6 000 points l’an dernier, l’indice vedette de la bourse de Paris se situe en effet aujourd’hui dans des eaux de plus en plus basses, aux alentours de 4 200 à 4 300 points, c’est-à-dire une baisse de 30 % en quelques mois…

On comprend donc l’engouement conjoncturel pour les produits défiscalisés ! Et nous ne compatissons pas aux difficultés des gestionnaires d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières ni des spéculateurs de toutes obédiences auxquels s’adresse cette réforme du livret A.

Nous ne voterons évidemment pas l’amendement n° 27.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 374, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier, après le mot :

État

insérer les mots :

, pris après avis des commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. L’objet de cet amendement est très simple : nous souhaitons que la discussion se passe dans la clarté et que les décisions ne soient pas prises simplement par décret.

Nous souhaitons que le Parlement puisse avoir son mot à dire sur la gestion du livret A : c’est pourquoi le décret en Conseil d’État précisant les modalités d’ouverture et de fonctionnement du livret A devrait être pris après avis des commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat. Nous manifestons ainsi l’attachement que nous éprouvons à l’égard de ce produit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement ne nous a pas semblé conforme au principe de la séparation des pouvoirs. La commission spéciale n’a donc pas pu émettre un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 374.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 28, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

et de fonctionnement

par les mots :

, de fonctionnement et de clôture

II. - En conséquence, supprimer le dernier alinéa du même texte.

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de simplification.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Je suis désolé, monsieur le président, mais je ne comprends pas spontanément quelle est la simplification apportée. Si M. le rapporteur pouvait nous donner un minimum d’explications, nous serions ravis de pouvoir voter cet amendement en toute connaissance de cause. Nous ne sommes pas a priori contre les amendements de la commission spéciale ou du Gouvernement, mais nous souhaitons comprendre puisque nous légiférons.

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. J’ai dit qu’il s’agissait d’un amendement de simplification, peut-être me suis-je mal expliqué. Il s’agit en fait d’un amendement rédactionnel, qui clarifie la rédaction et nous semble utile, sans être d’une portée extraordinaire.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote sur l’amendement n° 28.

M. Michel Billout. Cet amendement de précision ne nous a pas semblé si anodin que cela, mais peut-être nous trompons-nous !

Cet amendement vise à préciser le contenu du décret relatif à l’ouverture et au fonctionnement du livret A. Nous aimerions formuler quelques observations à ce sujet.

En premier lieu, il ne nous semble pas souhaitable de renvoyer à un décret, fût-il examiné par le Conseil d’État, le soin de déterminer l’économie générale du fonctionnement des livrets inspirés du livret A. Bien des questions sont en effet posées et ne trouvent pas véritablement de réponse dans le texte mal ficelé qui nous est proposé.

Ainsi se posent des problèmes de plafond des versements, de niveau de la rémunération, d’existence ou non de la garantie de l’État sur l’épargne déposée, autant de sujets qui méritent un autre traitement que le renvoi pur et simple au pouvoir réglementaire. S’il fallait prouver encore une fois que ce texte méritait autre chose qu’un débat inscrit dans le cadre de ce pauvre DDOEF, pompeusement appelé « projet de loi de modernisation de l’économie », nous en aurions ici la démonstration !

En second lieu, la question de la clôture des livrets A se pose effectivement. Mais elle n’est sans doute envisagée que pour justifier, plus encore, le démembrement de l’épargne collectée au titre du livret A au profit d’on ne sait quoi, d’ailleurs.

S’agit-il notamment de pratiquer, dans l’esprit du rapporteur, la chasse aux livrets A supplémentaires, ceux que certains épargnants laissent dormir dans un coin et dont ils ont, pour certains, oublié l’existence ?

S’agit-il aussi de procéder, formellement, à la réorientation de cette épargne vers d’autres types de placements ? Ce serait une sorte de cadeau par avance aux établissements de crédit qui auront la bonne idée de conseiller à quelques épargnants, abusés par la prétendue généralisation du livret A, d’aller placer leurs économies sur d’autres produits, soumis à des règles différentes de rémunération comme de fiscalité.

Nous ne pouvons donc que voter contre cet amendement qui dessaisit de surcroît le Parlement du droit de dire le droit.

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Je souhaiterais revenir au texte lui-même afin de démontrer à nos collègues qu’il ne faut voir aucune espèce de malice ou d’intention cachée dans cet amendement.

Prenons le texte prévu pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier par le projet de loi :

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’ouverture et de fonctionnement du livret A.

« Les versements effectués sur un livret A ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d’un plafond fixé par le décret prévu à l’alinéa précédent.

« Le même décret précise les montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de dépôt pour les établissements qui proposent le livret A et pour l’établissement de crédit mentionné à l’article L. 518-25-1.

« Le même décret fixe les modalités de clôture du livret A. »

On peut convenir que ce texte n’est pas d’une élégance extrême, ne serait-ce que d’un point de vue purement grammatical. Nous proposons donc de mettre en facteur commun le premier et le dernier alinéa et de rédiger comme suit le premier alinéa : « Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’ouverture, de fonctionnement et de clôture du livret A. » Cette rédaction nous permet ainsi de supprimer le dernier alinéa.

Il n’y a aucun changement de sens. Il s’agit simplement d’un amendement purement rédactionnel.

Mme Christine Lagarde, ministre. En tout cas, c’est plus élégant !

M. Philippe Marini, rapporteur. Ce n’est pas encore merveilleux, mais c’est…

Mme Christine Lagarde, ministre. Allégé !

M. Philippe Marini, rapporteur. Oui, on peut dire que la rédaction a été légèrement allégée.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, je demande la parole.

M. le président. Monsieur Repentin, vous vous êtes déjà exprimé sur cet amendement, mais j’accepte cependant de vous redonner la parole, en vous priant d’être bref.

M. Thierry Repentin. Avouez, monsieur le président, que la première explication de M. le rapporteur était tout de même assez…

M. le président. Limitée. (Sourires.)

M. Thierry Repentin. Je vous remercie, monsieur le président ! Je ne trouvais pas l’adjectif adéquat, mais celui que vous me proposez est tout à fait pertinent ! (Nouveaux sourires.)

Cet article n’est pas anodin, puisqu’il indique que le fonctionnement de ce nouveau livret A sera précisé par décret.

Mme Christine Lagarde, ministre. Mais c’est déjà le cas !

M. Philippe Marini, rapporteur. Rien ne change !

M. Thierry Repentin. Ce décret pourra fixer les montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de dépôt : autrement dit, les modalités actuelles de fonctionnement, notamment avec le montant minimum de 1,50 euro, pourront être modifiées par décret.

En ajoutant les termes « et de clôture », vous ouvrez une discussion…

M. Philippe Marini, rapporteur. Nous n’avons rien ajouté, c’est déjà dans le texte !

M. Thierry Repentin. Non, ils n’y figurent pas. Il est seulement indiqué : « Un décret en Conseil d’État précisera les modalités d’ouverture et de fonctionnement du livret A ». Or, vous nous proposez d’ajouter « et de clôture ».

Ce point est très important. Je ne vous demanderai pas de m’apporter une réponse définitive ce soir, mais sachez que les modalités selon lesquelles pourra être clôturé un livret A ne sont pas anodines pour les nouvelles banques. Il serait assez surprenant que l’on puisse transférer son livret A d’un opérateur historique à une nouvelle banque sans qu’il y ait de contact avec l’opérateur historique. Nous espérons que les détenteurs de livret A seront d’abord obligés de clôturer leur livret avant d’en ouvrir un ailleurs, afin d’éviter ce que l’on appelle le « siphonnage ».

Les conseillers de Mmes les ministres comprendront certainement mes propos, et ce qui est sous-entendu pour la Banque Postale, la Caisse nationale d’épargne et le Crédit mutuel…

M. le président. En tant que président de séance, je n’ai pas à intervenir dans le débat. Néanmoins, monsieur Repentin, permettez-moi de répéter ce que M. le rapporteur vous a précédemment indiqué.

Le premier alinéa du texte proposé par le projet de loi pour l’article L. 221-4 est ainsi rédigé : « Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’ouverture et de fonctionnement du livret A. », le quatrième alinéa du même article étant ainsi conçu : « Le même décret fixe les modalités de clôture du livret A. »

M. le rapporteur a simplement réuni les deux alinéas. C’est la raison pour laquelle le mot « clôture » figure désormais dans la première phrase. (M. le rapporteur le confirme.)

M. Jean Desessard. C’est donc un « siphonnage » rédactionnel ! (Rires.)

M. le président. Cette précision devrait vous permettre de voter en toute quiétude intellectuelle. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 560 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 878 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier :

« Les versements effectués sur un livret A sont soumis à plafonnement dans des conditions fixées par le décret prévu à l’alinéa précédent. »

La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 560.

M. Thierry Repentin. Actuellement, les intérêts du livret A ne sont pas comptabilisés dans le plafonnement. Ainsi, certains livrets dépassent d’ores et déjà les 15 300 euros d’encours à ce titre. Ce sujet est d’ailleurs cher à M. le rapporteur.

Cette disposition, dans le système de centralisation totale à la Caisse des dépôts et consignations, permet de maintenir le bénéfice de la totalité des sommes épargnées pour le financement du logement social. Les sommes centralisées seraient en effet moindres si aucun livret A ne devait dépasser le plafond, intérêts compris. Pis, au fil des années, les détenteurs de livrets plafonnés seraient obligés de retirer une partie de leur épargne pour l’affecter à un autre compte bancaire ou placement. Force est de constater que cela serait totalement absurde et pour le moins compliqué dans la mesure où les détenteurs de ces livrets seraient contraints de faire des démarches inutiles.

Cet amendement vise simplement à réaffirmer, comme le prévoit la réglementation en vigueur, que seules les sommes déposées sur le livret comptent dans le calcul du plafonnement. Ainsi, les intérêts cumulés ne sont pas comptabilisés dans le montant soumis au plafonnement du livret. L’amendement a pour objet d’inscrire dans le code monétaire et financier ce principe qui est actuellement fixé par décret en Conseil d’État.

En cohérence avec ses autres amendements visant à maintenir un haut niveau de collecte malgré la banalisation du livret A, le groupe socialiste entend, par cette modification de l’article 39, contribuer à limiter l’érosion de la ressource essentielle pour le financement du logement pour tous qu’est l’épargne des livrets A.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l’amendement n° 878.

M. Thierry Foucaud. Cet amendement présente une caractéristique rédactionnelle évidente.

Il s’agit, concrètement, de faire en sorte que le décret établisse le niveau du plafonnement des versements sur le livret A. Cette question n’est pas tout à fait secondaire puisque, comme nous l’avons vu précédemment, la fixation du plafond demeure du domaine réglementaire et n’a pas pu être matérialisée dans la loi.

Au demeurant, les conditions de fixation de ce plafond de versement devront, à notre sens, obéir à deux impératifs précis.

Le premier, c’est d’offrir aux épargnants le moyen de disposer d’une épargne qui soit suffisamment liquide et sûre et qui corresponde à la capacité d’épargne réelle des ménages. Il n’est pas nécessaire, par exemple, de laisser courir ces livrets défiscalisés à des niveaux astronomiques si cela nuit à leur liquidité.

Le second, c’est qu’il convient de mettre cette collecte au service des missions d’intérêt général confiées à l’épargne populaire défiscalisée.

Nous aurons donc besoin, dans le cadre de ce décret, d’une règle d’indexation du plafond qui permette de dégager les moyens financiers des politiques publiques adossées à la collecte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Le principe est clair : le plafond ne doit pas être dépassé par un versement. Il peut l’être par l’imputation des intérêts auxquels le détenteur du livret ne touche pas. La formulation qui nous est proposée dans le projet de loi aligne le droit sur la pratique ; elle nous semble donc tout à fait satisfaisante.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, ainsi que sur l’amendement n° 879.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 560 et 878.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 879, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les sommes versées en excédent du plafond fixé par le décret prévu à l’alinéa précédent peuvent être déposées sur un ou plusieurs livrets supplémentaires. »

La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Cet amendement vise tout simplement à reprendre les dispositions existantes en matière d’utilisation de l’épargne quand le plafond de placement sur le livret A est atteint.

Dans la situation actuelle, les épargnants placés dans cette situation peuvent ouvrir des livrets complémentaires qui ne bénéficient évidemment pas des conditions particulières offertes au livret A.

Il s’agit d’un simple ajustement rédactionnel.

M. le président. La commission a déjà donné un avis défavorable sur cet amendement.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je ne comprends pas pourquoi M. le rapporteur et Mme la ministre sont défavorables à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement parce qu’il tend à proposer le maintien dans le code monétaire et financier de la notion de livret supplémentaire, qui permettrait de collecter les suppléments d’épargne dépassant le plafond.

Or, il n’est pas nécessaire de faire figurer cette mention dans le code puisque ces livrets supplémentaires ne bénéficient d’aucune règle spécifique en matière notamment de fiscalisation et d’accessibilité.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 879.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 375, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans l’avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

précise les montants minimaux des opérations

par les mots :

fixe à 1,5 euro le montant minimal des opérations

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. À notre sens, le rôle fondamental dévolu au livret A dans la problématique de l’accessibilité bancaire doit être bien évidemment conservé.

En effet, de nombreuses personnes se servent de leur livret A comme d’un compte courant pour gérer de très petites sommes, alors que plus de la moitié des livrets A détenus à la Banque Postale ont un solde inférieur à 150 euros et que, pour la Caisse d’épargne, à peu près la moitié des livrets A ont un dépôt inférieur à 75 euros.

Pour cette raison, le montant minimal d’opérations effectuées sur ce livret doit rester extrêmement faible afin de garantir à tous l’accès au service bancaire assuré par le livret A. La souplesse et la liquidité de ce produit d’épargne doivent rester les plus larges possible, pour permettre à tous les Français, y compris les moins aisés, de gérer leur épargne aussi finement qu’ils sont, hélas ! contraints de le faire.

En conséquence, notre amendement vise à éviter que les montants minimaux des opérations de dépôt et de retrait ne soient relevés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement nous conduit à revenir sur le concept d’accessibilité bancaire et sur le rôle joué par la Banque Postale.

Nous avons déjà assez largement traité de ce sujet. À notre avis, il n’est pas possible de remettre en cause l’équilibre qui a été trouvé. Je le rappelle, cela aurait pour conséquence de fragiliser la situation de la Banque Postale en ne lui permettant pas de recevoir des aides, comme une aide à l’aménagement du territoire ou aux services rendus à la clientèle la plus précarisée. En effet, si une telle aide lui était apportée sans qu’elle ait une mission bien spécifique définie par la loi, la situation de la Banque Postale serait très fragile, pour ne pas dire davantage, au regard des règles du droit communautaire de la concurrence.

Il n’est donc pas possible d’accepter cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. J’ajouterai un argument supplémentaire lié au caractère pratique des transactions : si le seuil fixé est très bas, nous allons nous heurter à nouveau à l’écueil des pièces. Les banques ne sont tout simplement pas en mesure de se conformer à cette obligation en raison de la distribution de pièces qu’elle impliquerait.

Mme Odette Terrade. Mais pourquoi donc ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Des raisons de sécurité, de logistique et de coût, qui sont attachées aux transactions de pièces, rendent la chose tout simplement impossible.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 375.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 561 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 880 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après le mot :

Livret A

supprimer la fin du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier.

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° 561.

Mme Nicole Bricq. Il s’agit d’un amendement de repli. Nous souhaitions, avec l’amendement précédent, présenté par Bariza Khiari, fixer un plancher à 1,50 euro, mais le maniement des pièces ne le permet pas.

Par cet amendement, nous souhaitons que les montants minimaux soient les mêmes dans tous les établissements qui distribueront le livret A, afin d’éviter toute discrimination et que chacun puisse être libre de choisir l’endroit où il veut ouvrir son livret, quelles que soient les modalités d’utilisation du livret A.

M. Jean Desessard. Cela paraît normal !

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 880 rectifié.

Mme Odette Terrade. Notre amendement tend également à prévoir que les montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de dépôt soient déterminés de façon égalitaire pour tous les établissements concernés par la distribution des livrets A. Les modalités de ces opérations soulèvent en effet deux questions.

La première est relative à l’égalité de traitement entre les épargnants. Il s’agit, avec cet amendement, de faire en sorte que chaque épargnant puisse faire toute opération sur son livret A, quels que soient l’endroit et l’établissement. Tous les épargnants seront traités de manière équitable, quel que soit le réseau qui collectera son épargne, quand bien même il ne le fréquenterait que pour ce seul service financier.

La seconde question porte sur l’équilibre de la concurrence. Qu’on le veuille ou non, le projet de loi prévoit insidieusement de confier à la Banque Postale la gestion des petits livrets et des petits comptes, ceux sur lesquels s’effectueront les opérations les moins importantes.

Comme nous l’avons déjà souligné, la Banque Postale, au fil de l’ouverture à la concurrence de la distribution des livrets défiscalisés, sera amenée, malgré la compensation prévue, à prendre à sa charge les plus petits épargnants, tandis que les réseaux bancaires banalisés capteront les livrets les mieux remplis.

Une telle démarche, nous l’avons également déjà souligné, entraînera, entre autres choses, la remise en question de l’existence du réseau de la Banque Postale, sans placer les autres réseaux en situation de remplir des exigences naturelles d’aménagement du territoire et d’accessibilité.

Comme nous ne voulons ni de l’exclusion bancaire ni de l’exclusion des épargnants, il nous paraît naturel que l’ensemble des réseaux distributeurs soient mis en situation d’assurer l’ensemble des opérations à l’ensemble des épargnants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Il s’agit toujours de la mission spécifique de la Banque Postale ; il n’est pas possible d’émettre un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Je précise simplement que, pour le Gouvernement, l’objectif sera de fixer un niveau différent justifié par le principe de l’accessibilité, niveau qui serait de 1,50 euro pour la Banque Postale et de 10 euros pour les autres banques.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. J’ai mal compris.

Mme Nicole Bricq. C’est pourtant très clair !

M. Jean Desessard. Mme la ministre a bien dit que le montant minimal s’élevait à 1,50 euro pour la Poste et à 10 euros pour les autres établissements ?

Mme Odette Terrade. Madame la ministre, il existe des billets de 5 euros…

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 561 et 880 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 584 rectifié, présenté par MM. Longuet et Gournac, est ainsi libellé :

Après le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-4 du code monétaire et financier, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le même décret précise le plafond que les versements effectués sur les livrets A — ouverts dans les réseaux autres que le Crédit Mutuel, la Banque Postale et les Caisses d’Epargne à compter du 1er janvier 2009 — ne peuvent dépasser pour les années 2009, 2010 et 2011.

La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 584 rectifié est retiré.

M. Thierry Repentin. C’est dommage !

M. Gérard Longuet. Vous pouvez le reprendre, cher collègue !

M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.

M. Philippe Marini, rapporteur. Je voudrais m’exprimer, si vous le permettez monsieur le président, sur l’article L. 221-5 du code monétaire et financier. J’aimerais préciser quelques points avant que nous n’entrions dans la discussion des différents amendements relatifs au taux de centralisation de la ressource.

À la lecture des nombreux amendements déposés sur les articles 39 et 40, j’ai constaté qu’il existait de réelles inquiétudes sur les questions concernant le taux de centralisation des fonds du livret A et du livret de développement durable, ou LDD – l’ex-CODEVI – et sur les garanties apportées par la loi au financement du logement social.

Ces garanties, qui ont été explicitées par Mme le ministre de l’économie mais également tout à l’heure par madame le ministre du logement, sont pourtant déjà nombreuses : coefficient multiplicateur de 1,25 ; affirmation de la vocation prioritaire des fonds centralisés pour le logement social.

Je souhaite donc, mes chers collègues, vous livrer quelques éléments d’information et vous présenter l’économie générale des nouveaux amendements que la commission spéciale a adoptés hier et qui, je l’espère, devraient répondre à la plupart de vos préoccupations et vous apporter des garanties supplémentaires.

Comme cela figure dans mon rapport écrit, la fixation du taux de centralisation à 70 % dans la loi constituerait un facteur de rigidité, notamment dans la perspective de l’organisation du système transitoire entre le régime actuel et le régime futur, dans lequel les taux de centralisation du livret A et du LDD seront identiques.

Sur ce point, j’attire votre attention sur la complexité de l’opération puisque l’on part d’un système dans lequel trois établissements distribuant le livret A centralisent ses fonds à 100 % et où tous les établissements bancaires distribuant le LDD ne centralisent que 9 % des fonds. Or, il est impératif, pour ne pas mettre les deux produits d’épargne en concurrence, de faire converger les taux de centralisation d’une part de 9 % à 70 % et d’autre part de 100 % à 70 %.

Une telle opération ne se fera pas en un jour, si l’on se réfère notamment à l’exemple du passage du taux de centralisation du livret bleu de 50 % à 100 %, évolution qui a pris près de dix ans. Il ne faut pas négliger les difficultés techniques liées à un tel parcours qui se fait sous une triple contrainte.

Première contrainte : garantir le maintien des fonds centralisés auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts à leur niveau actuel.

Deuxième contrainte : éviter tout effet d’assèchement de la liquidité des banques en ne distribuant que le LDD, ce qui résulterait d’un passage brutal d’un taux de centralisation de 9 % à 70 %, alors même que ces réseaux n’auraient pas encore eu le temps de se constituer une « clientèle livret A ».

Et ce n’est pas théorique, mes chers collègues. La liquidité des banques est une préoccupation ! Il ne va du tout de soi, dans le contexte de crise financière dont nous ne sommes pas sortis, que la liquidité bancaire se règle de manière automatique ou simple.

M. Thierry Repentin. Quel aveu !…

M. Philippe Marini, rapporteur. Non, c’est un constat, cher collègue. C’est le constat de la complexité de cette opération.

Troisième contrainte : il serait injuste que les trois réseaux historiques bénéficient subitement d’un surcroît de liquidités qui serait lié à la diminution du taux de centralisation du livret A de 100 % à 70 %. Je pense que vous en conviendrez.

D’après les informations qui m’ont été fournies, la transition durerait entre sept et huit années et s’organiserait de la manière suivante.

Une première phase de transition durerait de deux à trois ans. Au cours de cette période, les règles de centralisation seraient établies en volume et non en pourcentage : les mouvements de centralisation ou de décentralisation ne devraient porter que sur les flux résultant d’une collecte supplémentaire. Pour les transferts de fonds du livret A entre établissements, le volume transféré resterait centralisé en totalité ; quant à la collecte nouvelle, elle ne serait pas centralisée mais devrait être répartie entre les anciens et nouveaux distributeurs selon une règle à déterminer.

C’est notamment au cours de cette première période qu’il peut très clairement se produire un mouvement de sur-collecte et qu’il serait nécessaire, en conséquence, de régler finement le taux de centralisation, qui pourrait, de manière marginale et transitoire, passer sous la barre des 70 %, ce qui ne saurait compromettre pour autant le financement des missions de la Caisse des dépôts puisque le volume total d’épargne « livret A + LDD » aurait, quant à lui, augmenté.

Je suis d’ailleurs surpris de tous les commentaires qui nous prédisent une baisse de la collecte alors que logiquement, dès lors que ce produit attractif sera distribué dans tous les guichets, c’est plutôt à une hausse de la collecte qu’il faut s’attendre,…

M. Thierry Repentin. Dans un premier temps !

M. Philippe Marini, rapporteur.… surtout dans une période de marchés financiers particulièrement chahutés, de mauvaise visibilité financière, comme une de nos collègues du groupe CRC le disait à juste titre.

Mme Nicole Bricq. Que fait le Gouvernement ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Vous savez très bien que le Gouvernement n’est pas le grand organisateur des marchés ! On ne va pas développer ce sujet, vous en connaissez la mesure.

Mme Nicole Bricq. Le contexte n’est pas favorable à votre opération !

M. Philippe Marini, rapporteur. Il faut procéder avec soin et prévoyance.

Venons-en à la seconde phase de transition. Cette phase, d’une durée de cinq ans, verrait quant à elle s’établir une convergence progressive des taux de centralisation.

Par ailleurs, les fonds du LDD non centralisés conserveraient leurs obligations d’emplois qui s’imputeraient sur les 30 % non centralisés. La seule ressource libre conservée par les banques serait donc, dans la première phase, dépendante de la collecte supplémentaire et, dans la deuxième phase, dépendante de l’aménagement des règles d’emploi des fonds du LDD.

Pardonnez-moi, mes chers collègues, de vous avoir fait un exposé un peu technique et un peu long, mais cela me semblait nécessaire pour vous convaincre de l’inadéquation des amendements qui voudraient introduire dans la loi le taux de centralisation de 70 %.

Je comprends bien qu’ils traduisent les inquiétudes éprouvées à l’égard des garanties apportées par le texte au financement du logement social. C’est pourquoi la commission spéciale vous proposera trois amendements.

Le premier amendement vise à faire précéder le décret qui fixera le taux de centralisation d’un avis de l’observatoire de l’épargne réglementée.

Le deuxième amendement tend à donner à cet observatoire un rôle de suivi de l’adéquation prévisionnelle et réelle de la ressource centralisée de la Caisse des dépôts au montant nécessaire au financement des organismes d’HLM. À cet effet, l’amendement prévoit que l’observatoire peut émettre des avis et formuler, en tant que de besoin, des recommandations visant à garantir cette adéquation.

Il s’agit, par un troisième amendement, d’inscrire directement dans la loi la composition de l’observatoire, ce qui lui donnera un statut plus solennel et plus d’indépendance. Cet observatoire, présidé par le gouverneur de la Banque de France, serait composé de onze membres, comprenant notamment deux députés et deux sénateurs, dont nous avons imaginé qu’ils pourraient être désignés respectivement par les commissions des finances et des affaires économiques de leur assemblée, des personnalités qualifiées en matière de logement social ou d’accessibilité bancaire et des hauts fonctionnaires qui, par leurs responsabilités, sont amenés à traiter de ces sujets.

Voilà, monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, les quelques éléments que je souhaitais livrer pour mettre en perspective les positions de la commission spéciale.

Je dis par avance que celle-ci est défavorable à tous les amendements qui vont être présentés…

M. Thierry Repentin. Non, ne nous dites pas ça avant ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur. Je préfère vous le dire au sein d’une analyse globale.

… et qui viseraient à inscrire dans le marbre de la loi les 70 % de centralisation. Par ailleurs, je pense vous avoir présenté de manière suffisante les trois amendements que la commission spéciale va vous soumettre.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Tout à l’heure, Mme la ministre nous a dit que la rémunération des banques qui n’ont pas de guichets devait leur permettre de payer leur système informatique, les logiciels performants, etc. »

Or, après le discours de M. le rapporteur et vu l’aspect laborieux de la mise en place de ces dispositifs, je me demande si nous avons vraiment fait le bon investissement informatique ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Mettre dix ans, à l’heure de l’informatique, pour résoudre ces problèmes, c’est vraiment incroyable !

Certes, les explications techniques sont valables, mais, s’il y avait la volonté politique de retenir les 70 %, on trouverait les systèmes techniques, informatiques et les logiciels pour mettre en place le système.

M. le président. Je vous rappelle, mes chers collègues, que, pour la clarté des débats, il a été décidé, sur proposition de la commission spéciale, d’examiner séparément l’amendement n° 377.

L’amendement n° 377, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-5 du code monétaire et financier :

« Art. L. 221-5. - L’intégralité des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est centralisée par la Caisse des dépôts et consignations dans le fond prévu à l’article L. 221-7. »

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Je remercie M. le rapporteur de nous avoir expliqué la logique d’ensemble de la commission. Pour ma part, j’ai pris la précaution de vous indiquer en début de soirée, mes chers collègues, quand nous avons abordé l’article 39, la logique générale des amendements que nous avions déposés et qui repose sur quatre principes.

Parmi ces quatre principes, se trouve l’attachement à la centralisation auprès de la Caisse des dépôts. C’est pourquoi cet amendement n° 377 vise à ce que les sommes collectées soient intégralement centralisées à la Caisse des dépôts et consignations.

M. Jean Desessard. C’est très clair !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Je souscris totalement à l’ensemble des remarques qui ont été excellemment formulées par M. le rapporteur Philippe Marini lors de son intervention générale sur le texte proposé pour l’article L. 221-5 du code monétaire et financier.

Toutefois, je souhaite y apporter brièvement quelques éléments complémentaires.

D’abord, d’une manière générale, je vous informe que le Gouvernement émet un avis défavorable sur tous les amendements visant à maintenir le taux de centralisation par la Caisse des dépôts et consignations à 100 % ou à fixer un seuil de 70 % dans la loi.

Ensuite, et je m’adresse tout particulièrement à ceux d’entre vous qui m’ont demandé des informations chiffrées, je voudrais vous faire part d’un petit calcul simple, afin de vous permettre d’établir des comparaisons entre la situation actuelle et le système qui entrera en vigueur si le dispositif que nous proposons est adopté.

Actuellement, nous avons deux taux de centralisation différents. Le premier, qui s’applique au livret A, correspond à une collecte d’environ 137 milliards d’euros et à un taux de centralisation de 100 %. Le second, celui du livret de développement durable, concerne une collecte d’environ 62 milliards d’euros, pour un taux de centralisation de 9 %. Dès lors, si nous additionnons 100 % de 137 milliards d’euros et 9 % de 62 milliards d’euros, nous obtenons un montant total de 143 milliards d’euros centralisés.

Si la réforme que nous proposons est adoptée – nous voulons continuer de soutenir et de financer le logement social, et ce au-delà du taux de 1,25 % évoqué tout à l’heure par Mme Christine Boutin –, nous aurons un taux de centralisation unique, 72 %, qui sera applicable au total des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable, soit 199 milliards d’euros. Par conséquent, le montant des sommes centralisées s’élèvera à 143 milliards d’euros, c’est-à-dire exactement autant qu’actuellement.

En outre, d’un point de vue macroéconomique, avec le nouveau dispositif, nous ne mettons pas particulièrement les banques en position de disposer de plus de liquidités. D’ailleurs, même si c’était le cas, elles ne les placeraient pas pour faire des profits que certains d’entre vous trouveraient sans doute abusifs… En tout état de cause, nous leur demanderons de participer au financement des petites et moyennes entreprises.

M. Thierry Repentin. Ce que personne ne vérifie jamais !

Mme Christine Lagarde, ministre. Mais si !

M. Jean Desessard. Vous n’avez pas répondu sur la centralisation à 100 % !

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote.

M. Michel Billout. Nous l’avons bien compris, quels que soient nos arguments, le point de vue de M. le rapporteur Philippe Marini ne changera pas. Cela étant, je me permettrai tout de même de les présenter.

Si j’ai bien compris les propos de Mme la ministre, le mieux que nous puissions espérer, c’est le statu quo. En clair, cette réforme ne permettra de dégager aucun moyen supplémentaire pour le logement social,…

Mme Christine Lagarde, ministre. Mais si !

M. Michel Billout.… puisque le montant des sommes centralisées sera identique à son niveau actuel.

De notre point de vue, il est un peu dommage que de telles questions soient ainsi évacuées au nom d’arguments prétendument « techniques », sur lesquels nous restons tout de même un peu sceptiques.

En effet, la centralisation des dépôts sur les livrets défiscalisés est une question majeure dans le débat relatif à l’épargne réglementée.

Comme nous avons eu l’occasion de le souligner, le livret A a une particularité essentielle. Produit défiscalisé, il constitue aujourd’hui un élément primordial des politiques publiques, puisque la collecte de l’épargne est affectée de manière exclusive au financement du logement social.

Par ailleurs, et cela nous a été expliqué, les règles de centralisation sont différentes pour le livret de développement durable, l’ancien CODEVI, ce que nous pouvons d’ailleurs regretter, car les dépôts collectés à ce titre risquent d’être détournés de leur objet initial, qui était le financement des petites et moyennes entreprises.

Le taux de centralisation des dépôts du livret de développement durable est de 9 % seulement. Nous sommes donc très loin du niveau approprié pour pouvoir substituer l’utilisation de cette ressource tout de même moins onéreuse que nombre de crédits bancaires à certaines formules coûteuses d’aides financières aux PME.

Comme tout le monde le sait, la collecte de l’ancien CODEVI est souvent utilisée par les établissements de crédit pour se pourvoir en ressources moins coûteuses, afin de recycler avantageusement des prêts bancaires ordinaires aux entreprises, prêts dont le taux d’intérêt est évidemment sans commune mesure avec le niveau de la rémunération accordée aux épargnants.

De fait, il s’agit là d’une question centrale. En décidant la centralisation intégrale des dépôts collectés au titre du livret A comme du livret de développement durable, nous pourrions trouver les moyens de financer les politiques publiques les plus essentielles. Nous ne devons donc pas manquer de souffle à cet égard !

Nous pourrions enfin mener la politique de rénovation urbaine correspondant aux exigences de construction de logements locatifs sociaux, lutter contre l’exclusion sociale et mettre en œuvre une réhabilitation et une requalification du parc existant. Nous pourrions trouver les moyens de donner sens au plan pour les banlieues, qui, pour avoir quelque efficacité, devra quitter les sentiers rebattus des incitations fiscales à la petite semaine, et opter pour l’aide concrète et directe au développement social et économique des quartiers.

Une ligne prioritaire de financement de la réalisation d’infrastructures socialement utiles peut être dégagée sur les ressources de la collecte de l’épargne populaire.

On peut ensuite supprimer de notre droit fiscal l’ensemble des dispositions dérogatoires du droit commun concernant le financement des PME, en ouvrant de nouvelles lignes prioritaires adossées sur la collecte des livrets de développement durable.

D’ailleurs, la suppression de ces dispositions dérogatoires, que nous appelons de nos vœux – nous demanderons d’ailleurs qu’elle soit inscrite dans le prochain projet de loi de finances – permettrait de bonifier encore l’usage de la collecte de l’épargne réglementée.

Et ne venez pas nous dire que nous serions des nostalgiques de l’économie administrée ! Compte tenu de l’état de la croissance, du niveau de l’inflation, de la situation boursière et de la dégradation des relations interbancaires, nous n’avons pas l’impression que l’économie de marché, dite économie « libre », ait vraiment démontré son efficacité !

C’est donc sous le bénéfice de ces observations que nous voterons l’amendement n° 377.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je souhaite demander une clarification à Mme la ministre.

Selon les objectifs qui sont affichés, les ressources collectées au titre du livret A et du livret de développement durable non centralisées devraient être affectées au financement, entre autres, des travaux d’économie d’énergie dans les bâtiments. A priori, cela paraît souhaitable. Mais je crains que cela ne soit qu’une astuce.

En effet, je me souviens de la pratique qui était en vigueur à la ville de Paris sous une ancienne municipalité. Lorsque la majorité municipale d’alors voulait supprimer un espace vert, elle proposait de le remplacer non pas par une résidence, mais par de l’habitat social, disait-elle. Du coup, nous, les écologistes, nous étions « coincés » : nous ne pouvions pas nous opposer à la construction de logements sociaux.

En l’occurrence, la proposition du Gouvernement semble bien argumentée, puisque que l’on nous explique que les sommes non centralisées seront affectées au financement à la fois des économies d’énergie dans les bâtiments anciens et des petites et moyennes entreprises.

Mais nous pourrions trouver un mode de financement autre que le livret A pour les PME. À mon sens, ce produit d’épargne doit contribuer à financer des actions d’intérêt général, comme la construction de logements sociaux ou des travaux écologiques et environnementaux et des économies d’énergie, puisqu’il y a une masse supplémentaire non utilisée grâce au livret de développement durable.

Dès lors, la question est posée. Pourquoi de tels fonds, qui sont uniquement destinés à financer des actions d’intérêt général, ne seraient-ils pas intégralement centralisés par la Caisse des dépôts et consignations ? La Caisse pourrait très bien gérer l’ensemble des dépôts collectés au titre du livret A et les affecter à la construction de logements sociaux, voire, en cas de surplus, au financement de travaux d’économie d’énergie dans les bâtiments anciens.

À mon sens, le Gouvernement veut fixer un taux de centralisation de 72 % pour pouvoir ensuite jouer sur le curseur. Le taux qui est actuellement proposé présente l’avantage de maintenir le montant des fonds centralisés à leur niveau actuel. Ainsi, personne ne se rend compte que l’on est en train de modifier le système. Ensuite, il sera toujours possible de faire évoluer le curseur en fonction des intérêts du moment…

Il serait tout de même plus simple de fixer un taux de centralisation de 100 %, qui garantirait en priorité le financement de la construction de logements sociaux et de travaux d’économie d’énergie ou écologiquement responsables. Le cas échéant, nous pourrions mettre en place un logiciel pour étudier la meilleure manière de gérer ces dépôts. Mais, en tout état de cause, il faut qu’ils soient d’abord centralisés à la Caisse des dépôts et consignations.

M. Thierry Repentin. Décidément, l’amendement n° 377 suscite un débat très intéressant !

M. Jean Desessard. Mais qu’en pensent nos collègues du groupe de l’UMP, que je trouve bien silencieux sur le sujet ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 377.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 562 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L’amendement n° 881 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

du livret A et du livret de développement durable régi par l’article L. 221-27 par les établissements distribuant l’un ou l’autre livret

par les mots :

des livrets définis aux sections 1 à 4 du chapitre Ier du titre II du livre II du présent code

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l’amendement n° 562.

Mme Bariza Khiari. Monsieur le rapporteur, malgré votre brillant exposé nous rappelant la philosophie de la commission spéciale, nous ne renoncerons pas à essayer de vous convaincre, du moins pour ce soir.

Nous venons de rappeler notre attachement à la centralisation totale des fonds épargnés sur le livret A. Malgré l’importance de cette ressource pour l’avenir des politiques du logement, et contre l’avis de la Commission européenne, au nom de laquelle vous réformez le livret A, vous vous obstinez à mettre fin à la centralisation.

L’amendement n° 562, qui est un amendement de repli, vise à centraliser à la Caisse des dépôts et consignations, certes, une quote-part seulement du livret A et du livret développement durable, mais également du livret d’épargne populaire et du livret jeune.

En effet, tout comme le livret A, ces deux autres produits d’épargne bénéficient d’un régime fiscal spécifique les exonérant d’impôt. Il paraît donc logique que le manque à gagner pour l’État ne s’effectue pas uniquement au bénéfice des banques et des usagers. Il doit aussi contribuer à financer des missions d’intérêt collectif, comme le financement du logement abordable.

Ainsi, la défiscalisation du livret jeune et du livret d’épargne populaire trouverait son aboutissement dans la centralisation d’une partie de leur collecte au bénéfice du financement du logement social.

Cet élargissement apparaît d’autant plus opportun qu’il renforce la garantie de l’encours centralisé à la Caisse des dépôts et consignations, et ce alors que vous visez la baisse du taux de cette centralisation.

Dois-je rappeler ici l’ingénieux système de financement du logement ? L’épargne liquide des Français est transformée en prêts de long terme, d’une durée de cinquante ans, à taux bonifiés, accordés par la Caisse des dépôts et consignations aux organismes d’HLM. Ces prêts représentent environ 70 % du financement des opérations de logement social en France. C’est dire si les aides à la pierre, pour indispensables qu’elles soient, ne remplaceront jamais cette ressource !

Dois-je également rappeler que ce mode de financement présente le considérable avantage d’avoir un coût très modéré pour les finances publiques ? À peine 300 millions d’euros par an de non-recettes – la défiscalisation – pour 148 milliards de collecte, dont 70 % sont transformés en prêts ! Imaginez si le budget de l’État devait prendre le relais : c’est bien évidemment impossible !

M. Thierry Repentin. Totalement impossible !

Mme Odette Terrade. Exactement !

Mme Bariza Khiari. Permettez-moi de vous faire part de quelques chiffres. Aujourd’hui, 900 000 logements font défaut. Nous avons 3 millions de mal-logés. Il y a 1,4 million de demandes de logement social en souffrance, et les délais d’attribution des logements s’allongent. Ainsi, à Nanterre, la durée moyenne est de quatre ans. En outre, au regard des revenus des ménages, certains loyers ont atteint les plafonds de l’acceptabilité.

Désormais, le logement est le premier budget des familles. Il est urgent de réaliser des logements à loyer modéré. L’enjeu est aujourd’hui de maintenir la ressource qui permettra de répondre à cette urgence, ce qui passe incontestablement par le maintien d’un niveau élevé de centralisation.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l’amendement n° 881 rectifié.

M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à placer la centralisation au cœur du dispositif défiscalisé,…

M. Philippe Marini, rapporteur. Eh oui ! Toujours le centralisme démocratique ! (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Thierry Foucaud.… afin de faciliter le bon usage de la collecte au mieux des intérêts vitaux de la nation, de l’économie et de la société.

Comme chacun s’en doute, le montant de la collecte de l’épargne centralisée, qui est aujourd’hui proche des 200 milliards d’euros, intéresse particulièrement les marchés financiers. En effet, toutes ces sommes échappent aux plans d’épargne en actions, aux SICAV, aux fonds communs de placement, aux fonds d’investissement de proximité, aux contrats d’assurance vie ou aux marchés de titres. Quel dommage, doivent se dire certains !

Ce n’est sans doute pas sans raison que l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, dans la rédaction proposée par le présent projet de loi, n’offre aucune garantie effective quant à la centralisation ! Rien n’est sûr, d'ailleurs, pour ce qui est du taux de centralisation puisque, comme le rappelait Michel Billout, il pourra varier en fonction de l’encours des prêts consentis au bénéfice du logement social ou de la politique de la ville.

En résumé, il suffira que l’État, et lui seul, décide de revenir sur le niveau des subventions accordées aux opérations de construction et de réhabilitation de logements sociaux, par exemple, ou bien ampute allègrement – il l’a déjà fait dans le passé ! – les crédits de la politique de la ville pour que se mette en place un dispositif tout à fait redoutable. En effet, la compression du niveau des aides directes de l’État conduira à reporter la réalisation de certaines opérations, donc à émettre moins de nouveaux prêts permettant d’ajuster la quote-part de la centralisation dédiée.

Dans la rédaction qui nous est proposée, l’article L. 221–5 du code monétaire et financier constitue donc une authentique bombe à retardement et la plus sûre garantie que la collecte de l’épargne défiscalisée trouvera bien d’autres usages que ceux qui sont affichés.

Madame la ministre, vous avez affirmé aux élus locaux, aux demandeurs de logements, aux sans-abri et aux habitants des quartiers dits « sensibles » que la généralisation du livret A permettrait de faire face à leurs besoins et à leurs attentes. Selon nous, c’est faux !

Ce que nous savons, c’est que l’ouverture de la distribution vise surtout à donner dès à présent aux établissements de crédit banalisés le moyen de « se refaire une santé » après les déboires qu’ils ont commencé de subir sur les marchés financiers ou que l’on voit poindre avec la crise immobilière.

À l’inverse, la centralisation que nous proposons est vertueuse et conduira à éviter la dispersion de l’épargne populaire que ce texte encourage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Je confirme l’avis défavorable que j’ai déjà émis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 562 et 881 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 572 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les sommes excédentaires visées à l'article précédent sont centralisées en totalité par les établissements visés à l'article L. 221-1, après accord du titulaire.

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Cet amendement a pour objet de permettre à l’établissement bancaire, après accord du détenteur du livret A, de conserver les sommes correspondant aux intérêts perçus qui excèdent le plafond, dans le calcul duquel, comme nous l’avons rappelé, elles ne sont pas comptabilisées.

Cette disposition aura pour conséquence la création d’une émulation commerciale. Elle incitera les banques à conserver des livrets A ayant atteint leur plafond et évitera, de ce fait, le risque de siphonage de cette épargne vers d’autres produits bancaires.

Si les sommes excédant le plafond sont centralisées par la banque, celle-ci aura tout intérêt à encourager ses clients détenteurs de livret qui ont atteint cette limite réglementaire à garder cet argent et à le faire fructifier, plutôt qu’à le rediriger vers d’autres types d’épargne.

En effet, la banalisation du livret A peut entraîner une « cannibalisation » de la collecte, les sommes placées sur les livrets les mieux garnis risquant de fuir vers des produits au rendement plus avantageux, comme, pour le moment du moins, des contrats d’assurance vie.

En créant cette possibilité supplémentaire, l’adoption de notre amendement rendra intéressante pour les banques la conservation des livrets dont les montants auront atteint le plafond autorisé, ce qui permettra de maintenir le niveau de la collecte.

Il est d’autant plus essentiel de favoriser l’attrait des banques pour la conservation des livrets les mieux garnis que, je le rappelle, ceux-ci représentent 40 % de la collecte alors qu’ils ne constituent que 2,4 % des livrets A.

En renforçant l’intérêt des banques pour la détention du plus grand nombre possible de livrets pleins, on les incite même à accroître la collecte en faveur du financement du logement social et de la politique de la ville.

II nous paraît indispensable que la banque obtienne préalablement l’accord du détenteur du livret, car cela permet, d’une part, d’associer celui-ci à l’utilisation qui est faite de ses fonds et, d’autre part, de ne pas détourner des sommes collectées sur le livret A de leur destination première, à savoir le financement parfaitement transparent d’une mission d’intérêt général.

Cette mesure permettra, en outre, de responsabiliser les titulaires de livrets A, auxquels il reviendra de choisir la centralisation à la Caisse des dépôts et consignations ou à la banque.

Cette proposition, madame la ministre, montre bien que nous ne sommes pas sourds aux intérêts des banques. Nous avons bien conscience que, si la banalisation du livret A doit avoir lieu, il faut qu’elle se fasse dans l’intérêt de tous, afin de sécuriser le niveau d’encours de la collecte.

Ce qui nous différencie, c’est que nous estimons, pour notre part, que cette réforme doit se faire avant tout au bénéfice du financement du logement social, et non des lobbys, ce qui ferait courir le risque d’un effondrement de la collecte et donc du système vertueux de financement du logement social.

C’est dans cette perspective de maintien et d’augmentation de la collecte, au bénéfice de tous, que nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 882 rectifié, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I. - Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, ajouter un alinéa ainsi rédigé :

Il en est de même des sommes excédentaires visées à l'article L. 221-1, après accord du titulaire.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... Les pertes de recettes résultant pour la Caisse des dépôts et consignations de l'application des dispositions de l'article L. 221-5 du code monétaire et financier sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Cet amendement a pour objet l’affectation des sommes excédentaires déposées sur les livrets défiscalisés. Même si celles-ci sont aujourd’hui peu importantes, il convient, nous semble-t-il, de donner aux épargnants le droit d’autoriser expressément leur réseau collecteur à apporter ces excédents à la centralisation réalisée au sein du fonds d’épargne réglementée géré par la Caisse des dépôts.

Cette mesure aurait le mérite de donner un sens au concept d’épargne citoyenne puisque cette affectation découlerait du choix de l’épargnant lui-même.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur. Ces amendements sont assez complexes, …

M. Thierry Repentin. Et audacieux !

M. Philippe Marini, rapporteur. … et je ne les ai peut-être pas analysés en profondeur. Malgré tout – et je me limiterai à cette observation –, je ne crois pas qu’ils s’accordent avec l’analyse d’ensemble élaborée par la commission spéciale sur cette question.

En outre, le dispositif que vous préconisez, mes chers collègues, en prévoyant un taux de centralisation différent selon que les sommes sont inscrites sur les livrets en deçà ou au-delà du plafond, avec dans ce dernier cas l’accord de chacun des titulaires, me paraît d’un maniement très lourd. Je crains que cette solution ne soit pas très opérationnelle...

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Ce que je comprends, c’est que ces amendements visent à établir un taux de centralisation de 100 % et que les sommes versées qui dépasseraient le plafond du livret A seraient également centralisées, avec l’accord du titulaire du compte.

Je me suis déjà exprimé sur le taux de 100 %, auquel je ne suis pas favorable ; quant à la centralisation au-delà de ce seuil, elle semble bien difficile à mettre en œuvre, comme l’a souligné M. le rapporteur.

Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 572 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 882 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 379 rectifié est présenté par Mme Bricq, MM. Repentin, Massion, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung, Josselin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 676 est présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste - UDF.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Remplacer les deuxième et troisième alinéas du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le taux minimal de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé à 70 %.

« En outre, les ressources centralisées au titre de ces deux livrets dans le fonds prévu à l'article L. 221-7 sont au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la  politique de la Ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,25.

« Un décret en Conseil d'État définit les conditions de mise en œuvre de ces dispositions, et notamment les conditions dans lesquelles le taux visé au deuxième alinéa est atteint, pour chaque réseau distributeur, au plus tard le 1er janvier 2012.

La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 379 rectifié.

M. Thierry Repentin. Nous le savons, le plancher fixé dans le projet de loi, soit 1,25 fois l’encours des prêts, représente actuellement environ 50 % du total de la collecte, c'est-à-dire, dans les faits, un montant très inférieur au taux de 70 % que le Gouvernement s’est engagé à respecter. Il y a tout de même là de quoi s’interroger, pour le moins !

En effet, ce seuil risque de ne pas permettre aux fonds d’épargne de dégager les résultats nécessaires pour assurer les bonifications de prêts qui se révèlent indispensables au financement du logement social, qu’il s’agisse des bonifications permanentes pour les prêts les plus sociaux, c'est-à-dire les PLAI – prêts locatifs aidés d’intégration – et les PLUS-CD – prêts locatifs à usage social-construction-démolition – ou de celles qui sont temporaires, lorsque la ressource est chère. Il est donc nécessaire que cet objectif soit fixé par la loi.

Si nous laissons 30 % de liquidités aux banques, nous leur accordons déjà un avantage substantiel, car ces dépôts leur sont rémunérés à un taux de 3,5 % alors que le taux Euribor à douze mois est actuellement de 5 %.

Il est nécessaire de laisser aux fonds d’épargne un excédent sur les montants affectés au logement social afin de répondre à des emplois d’intérêt général, comme le plan Universités ou le plan Hôpitaux, pour ne citer que les exemples qui ont été évoqués à l'occasion du débat à l’Assemblée nationale.

Toutefois, l’application, à chaque réseau distributeur, de l’objectif d’un taux de centralisation de 70 % nécessite une mise en œuvre progressive, compte tenu des différences de situation, que nous avons bien notées, entre les anciens et les nouveaux distributeurs du livret A.

C’est dans cette perspective que nous présentons un amendement visant à fixer clairement les modalités de centralisation de la collecte, avec deux garanties : un coefficient multiplicateur de 1,25 et un taux de centralisation minimum de 70 %.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l'amendement n° 676.

Mme Anne-Marie Payet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 378 rectifié est présenté par Mme Bricq, MM. Repentin, Massion, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung, Josselin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 677 rectifié est présenté par Mme Payet et les membres du groupe Union centriste - UDF.

L'amendement n° 930 rectifié est présenté par MM. Gournac et Longuet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Remplacer les deuxième et troisième alinéas du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le taux minimal de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé à 70 %.

« En outre, les ressources centralisées au titre de ces deux livrets dans le fonds prévu à l'article L. 221-7 sont au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la Ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,25 sans que ce coefficient puisse être supérieur à 2.

« Un décret en Conseil d'État définit les conditions de mise en œuvre de ces dispositions, et notamment les conditions dans lesquelles le taux visé au deuxième alinéa est atteint, pour chaque réseau distributeur, au plus tard le 1er janvier 2012.

La parole est à M. Thierry Repentin pour présenter l’amendement n° 378 rectifié.

M. Thierry Repentin. Cet amendement vise à prévenir un risque fort d’augmentation de la centralisation, qui serait cette fois préjudiciable aux liquidités nécessaires au financement de l’économie par les banques.

Nous proposons un dispositif qui permettrait au Gouvernement de laisser tout ou partie d’une éventuelle surcollecte aux distributeurs, en arbitrant librement entre les besoins de la Caisse des dépôts et ceux des banques. En effet, si celles-ci souffrent actuellement d’un manque de liquidités, l’inverse peut également se produire, et il n’y a aucune raison pour que l’État renonce par la loi à affecter à des usages d’intérêt général une épargne défiscalisée, comme c’est le cas dans la rédaction actuelle du projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter l'amendement n° 677 rectifié.

Mme Anne-Marie Payet. Cet amendement tend à limiter à deux, au maximum, le coefficient multiplicateur par rapport à l’encours des prêts, afin de prévenir les conséquences d’une surcollecte, préjudiciable aux liquidités des banques.

M. le président. L’amendement n° 930 rectifié n'est pas soutenu.

L'amendement n° 554, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier :

« Le taux de centralisation des dépôts collectés par la Caisse des dépôts et consignations au titre du livret A est fixé à 100 %.

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Avec cet amendement, nous nous trouvons une fois de plus au cœur du sujet, madame la ministre.

En proposant de maintenir la centralisation de la collecte à la CDC à un taux de 100 %, nous nous efforçons de contrer une initiative du Gouvernement, et non une exigence de l’Union européenne.

Vous voulez mettre fin à la centralisation totale de la collecte et, parallèlement, madame la ministre, vous nous donnez oralement l’assurance que la centralisation ne pourra être inférieure à 70 % des encours. Pardonnez-nous, mais nous ne pouvons nous contenter de cette simple assurance. En effet, nous ne pouvons prendre le risque de sacrifier l’un des rares systèmes vertueux de financement de notre économie, un système qui, actuellement, ne pèse pas sur le budget de l’État ; bien au contraire, il lui apporte des excédents, ponctionnés chaque année.

En outre, nous ne pouvons jouer avec l’avenir du financement du logement social alors que notre pays connaît de graves retards dans ce domaine !

Afin de garantir le service d'intérêt général assuré par l'épargne collectée par la Caisse des dépôts et consignations, un taux de centralisation de 100 % doit être maintenu.

M. le président. L'amendement n° 555, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier :

« Le taux minimal de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé à 70 %. En outre, les ressources centralisées au titre de ces deux livrets dans le fonds prévu à l'article L. 221-7 sont au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la Ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,33 sans que ce coefficient puisse être supérieur à 2. Un décret en Conseil d'État définit les conditions de mise en œuvre de ces dispositions, et notamment les conditions dans lesquelles le taux visé au premier alinéa est atteint, pour chaque réseau distributeur, au plus tard le 1er janvier 2012. 

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Si l’on appliquait le plancher fixé dans le projet de loi, à savoir 1,25 fois l'encours des prêts, au niveau actuel de cet encours, on ne dépasserait pas 50 % du total de la collecte aujourd'hui centralisée à la Caisse des dépôts : on serait donc bien loin des 70 % auxquels le Gouvernement ne cesse de se référer, sans pour autant accepter de faire figurer ce taux dans le texte de la loi.

Nous ne pouvons que rester très sceptiques devant les justifications que vous apportez au maintien de cette incertitude, madame la ministre. Vous nous dites qu’il s’agit de se prémunir contre les années de vaches maigres en matière de collecte. Vous reconnaissez ainsi implicitement au passage qu’il existe bien un risque de décollecte

Cela étant, pour parer à la situation où 70 % des fonds centralisés seraient insuffisants en regard de l’encours des prêts, une solution toute simple consiste dans l’institution du « double verrou » : la conjonction d’un taux minimum – disons 70 %, puisque c’est ce taux qui semble avoir votre préférence – et d’un coefficient multiplicateur, le niveau adéquat de ce coefficient étant, selon nous, de 1,33. La différence entre 1,25 et 1,33 représente tout de même un supplément de7 milliards d’euros de fonds centralisés. Là encore, il ne s’agit pas d’une ressource négligeable pour le logement social, non plus que pour la Caisse des dépôts.

J’attire en outre votre attention sur le fait que, pour prévenir les conséquences d’une sur-collecte préjudiciable aux liquidités des banques, le coefficient multiplicateur est lui-même verrouillé puisqu’il est limité à 2.

M. le président. L'amendement n° 563, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

du livret A et du livret de développement durable

par les mots :

de ces livrets

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Voyez comme nous sommes bons : malgré les avis défavorables qu’essuient systématiquement les amendements du groupe socialiste, celui-ci vous en soumet un qui vise à améliorer la rédaction du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, afin d’éviter une répétition fâcheuse. (Sourires.)

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 564 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Raoul, Pastor, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 883 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, remplacer les mots :

au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la ville par la Caisse des dépôts et consignations

par les mots :

aux montants des besoins, satisfaits par des prêts consentis, ou à satisfaire par des prêts à consentir, de financement par la Caisse des dépôts et consignations du logement social et de la politique de la ville

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l'amendement n° 564.

Mme Nicole Bricq. Il est impératif que le taux minimum de centralisation corresponde non seulement aux besoins actuels, mais aussi aux besoins de financement à venir, pour mettre en œuvre la politique de construction, de réhabilitation et de renouvellement du logement.

Mme Boutin a affirmé tout à l'heure qu’un coefficient multiplicateur égal à 1,25 constituait un « matelas » suffisant. Pour nous, c’est loin d’être un matelas confortable ! En effet, si nous appliquons ce coefficient multiplicateur au nombre de logements construits chaque année depuis 2002, on n’obtient que la moitié des 120 000 logements locatifs sociaux sur la réalisation desquels le Gouvernement s’est engagé !

L’adoption de cet amendement permettrait d’inscrire dans la loi la subordination des moyens financiers aux décisions politiques. Nous enverrions de la sorte un signal qui s’accorderait aux nombreuses déclarations de ce gouvernement en matière de logement : ainsi, celles-ci pourraient enfin être suivies d’effets !

J’ajoute que notre acharnement à défendre la centralisation peut se justifier par la déclaration qu’a faite le Président de la République au Québec et selon laquelle il voulait, par le biais de la Caisse des dépôts et consignations, constituer un fonds souverain européen.

Mme Christine Lagarde, ministre. Non !

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour présenter l'amendement n° 883.

M. Michel Billout. Avec cet amendement, nous abordons la question de la centralisation de la collecte et de l’allocation de la ressource.

Dans la pratique budgétaire, nombre de politiques publiques font aujourd’hui l’objet d’une programmation pluriannuelle, qui est alors assortie d’engagements financiers adaptés. C’est notamment le cas de la politique de la ville, qui comprend le programme national de rénovation urbaine, de la politique de sécurité intérieure, de la politique judiciaire de la ville ou encore de la politique relative au développement de nos universités.

Soyons en cohérence avec cette démarche de programmation en inscrivant dans le projet de loi le principe d’une affectation de la collecte des livrets défiscalisés à hauteur des objectifs fixés en matière de réalisation d’équipements.

Nous notons cependant, à notre grand regret, que nombre de dispositions de programmation qui ont pu être votées depuis 2002 ont eu quelque peine à trouver leur traduction concrète. Peut-être était-ce d’ailleurs dû au fait que les sommes nécessaires à leur mise en œuvre n’avaient pas été vraiment prévues…

M. le président. L'amendement n° 1057, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, après les mots :

Caisse des dépôts et consignations

insérer les mots :

et de l'observatoire de l'épargne réglementée prévu à l'article L. 221-9

La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements.

M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est le premier élément de la trilogie que j’ai présentée tout à l’heure.

Au regard de l’analyse d’ensemble que j’ai livrée, la commission spéciale demande le retrait de l’ensemble des autres amendements de cette discussion commune. À défaut de ce retrait, elle y serait défavorable dans la mesure où leur adoption créerait des rigidités extrêmement difficiles à gérer.

La proposition de la commission spéciale vise à renforcer l’Observatoire de l’épargne réglementée en soumettant à son avis préalable le décret précisant le taux de centralisation de la collecte, en en définissant la composition dans la loi et en lui confiant explicitement le soin de veiller, en prévision et en réalisation, à une bonne adéquation entre ressources centralisées et besoins de financement du logement social.

Ce dispositif devrait permettre de satisfaire l’essentiel des préoccupations exprimées par les auteurs des autres amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Sous le bénéfice des explications que j’ai apportées au début de l’examen de cet article, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune, à l’exception de l'amendement n° 1057, auquel il est favorable.

En effet, avec l’adoption de l'amendement n° 1057, l’Observatoire de l’épargne réglementée se verra attribuer une fonction consultative, lui permettant notamment d’apporter au Gouvernement les éclairages nécessaires lorsque celui-ci fixera par décret le taux de centralisation, en particulier en fonction du besoin de financement du logement social. C’est une bonne proposition, qui fait intervenir des experts dans le domaine du logement social.

Je souhaite apporter trois précisions complémentaires.

Tout d’abord, c’est au Creusot, et non au Québec – où s’est rendu le Premier ministre –, que le Président de la République a évoqué une fonction de fonds souverain européen pour la Caisse des dépôts et consignations.

Mme Nicole Bricq. Je suis un peu fatiguée ! (Sourires.)

Mme Christine Lagarde, ministre. Bien entendu, disant cela, il ne visait pas le rôle de cette institution dans le financement du logement social : ce rôle demeure intact et il est parfaitement sécurisé. Il songeait à ses activités de gestion et d’investissement dans d’autres domaines. Et il a en outre immédiatement rappelé que les fonds souverains étaient bienvenus en France, mais sous un certain nombre de conditions.

Ensuite, je ne peux laisser sans réponse certaines remarques sur le nombre de logements sociaux construits. Sans entrer dans une querelle d’experts ou stigmatiser qui que ce soit, il faut rendre hommage à ceux qui ont entrepris de faire du logement social et du logement en général une priorité. Christine Boutin l’a rappelé : 437 000 logements ont été construits en 2007, contre 310 000 logements en 2000 ! (M. Thierry Repentin s’exclame.) Le Gouvernement auquel j’ai l’honneur d’appartenir n’a donc pas à rougir de ce qu’il met en œuvre.

Enfin, l’un des effets de la réforme que vous êtes en train d’examiner, mesdames, messieurs les sénateurs, et dont il n’est jamais question, est de faire baisser le taux des prêts au logement social, ce qui permet de financer plus de logements sociaux. Cela représente 250 millions d’euros par an de gain pour le montage des opérations destinées à financer le logement social, soit plus de 20 000 logements sociaux par an. Il était utile de le rappeler.

M. le président. Madame Payet, les amendements nos 676 et 677 rectifié sont-ils maintenus ?

Mme Anne-Marie Payet. Compte tenu des explications de Mme la ministre et de M. le rapporteur, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 676 et 677 rectifié sont retirés.

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’amendement n° 379 rectifié.

M. Jean Desessard. Je remercie Mme la ministre de ses précisions, y compris celles qui concernent Le Creusot ! (Sourires.)

Pour ce qui est du « matelas » que constituerait le coefficient multiplicateur de 1,25, Mme Boutin m’a affirmé l’avoir conquis de haute lutte – c’est donc bien que des forces contraires existent ! – et m’a assuré que je ne devais nourrir aucune inquiétude à ce sujet. Pourtant, mes collègues socialistes ont avancé des chiffres tendant à montrer qu’il y avait effectivement de quoi être inquiet. Dans la mesure où vous ne leur avez pas répondu sur ce point, madame la ministre, en avançant des chiffres précis qui auraient infirmé ceux qu’avaient cités mes collègues, j’en déduis que Mme Boutin s’est trompée.

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. C’est bien la question de la centralisation de la collecte qui est au cœur du débat sur l’article L. 221-5 du code monétaire et financier.

Nous avons déjà eu l’occasion d’indiquer à quel point le dispositif mis en place par le texte, tel qu’il est aujourd’hui rédigé, souffrait d’être imprécis, ou peut-être trop précis.

À partir du moment où la quote-part est uniquement déterminée par référence au montant de l’encours des prêts susceptibles d’être mobilisés par la Caisse des dépôts et consignations pour le logement social et la politique de la ville, on peut s’attendre que se produisent des phénomènes divers.

Soit la collecte est importante et l’appel de fonds des collectivités locales et des organismes bailleurs sociaux est élevé, et dans ce cas la quote-part s’élèvera d’autant ; soit la collecte est importante – à en croire le discours ministériel, la généralisation de la distribution du livret A entraînera une augmentation de la collecte – et la demande de prêts est plus faible, et dans ce cas la quote-part se réduira ; soit la collecte ralentit, et il est impossible d’anticiper la répercussion que cela aura sur la quote-part.

Au demeurant, la situation actuelle du pouvoir d’achat peut peser sur le taux d’épargne des ménages, même si cette inflexion à la baisse est, pour le moment, contrariée par l’incertitude qui entoure les marchés financiers, dont les indices sont nettement orientés à la baisse.

Selon le rapporteur, dans tous les cas de figure, « la fixation d’un taux de centralisation dans la loi constituerait un facteur de rigidité » et il convient au contraire d’inscrire dans la loi un principe permettant aux établissements de crédit banalisés d’user et d’abuser de la collecte de l’épargne populaire pour en faire un usage le plus éloigné possible des missions aujourd’hui dévolues au livret A ! Et les explications qu’il nous a données au début de l’examen de cet article sur le décret en préparation ne sont certes pas susceptibles d’apaiser notre inquiétude.

La lecture du rapport confirme par ailleurs l’impréparation du texte qui nous est soumis. C’est pourquoi nous estimons nécessaire de fixer avec le plus de précision possible les paramètres suivants : un taux minimal de centralisation fixé à 70 %, affecté d’un coefficient multiplicateur de 1,25.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Sans faire durer le plaisir, surtout quand il s’agit de commenter des affaires de matelas à une heure aussi avancée (Rires), je souhaite m’inscrire en faux contre les accusations portées à l’encontre de ma collègue et amie Christine Boutin et selon lesquelles elles auraient dit des bêtises ou en tout cas des choses fausses.

Je rappelle les termes du deuxième alinéa de l'article L. 221-5 : « Le taux de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé de manière que les ressources centralisées sur ces livrets dans le fonds prévu à l’article L. 221-7 soient au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d’un coefficient multiplicateur égal à 1,25. »

Les propos de Christine Boutin étaient donc parfaitement justes : le coefficient multiplicateur égal à 1,25 constitue un « matelas » largement suffisant.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 379 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 129 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 296
Majorité absolue des suffrages exprimés 149
Pour l’adoption 126
Contre 170

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 378 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 554.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 555.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 563.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 564 et 883.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1057.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 39 (priorité) (début)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'économie
Discussion générale

7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée, à aujourd’hui, vendredi 4 juillet 2008 à dix heures, à quinze heures et le soir :

- Suite de la discussion du projet de loi (n° 398, 2007-2008), adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, de modernisation de l’économie.

Rapport (n° 413, 2007-2008) de M. Laurent Béteille, Mme Élisabeth Lamure et M. Philippe Marini, fait au nom de la commission spéciale.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 4 juillet 2008, à une heure.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD