M. le président. L'amendement n° 742, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 27 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique, dont l'audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu'en mode numérique, dépasse 2,5 % de l'audience totale des services de télévision, ne peut plus bénéficier des dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode numérique.
« Elle est alors régie par les dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode analogique.
« Le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel se charge de modifier en conséquence les conventions et cahiers des charges desdites sociétés.»
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Le succès très important de la TNT doit aujourd'hui être pris en considération. Cet amendement vient utilement compléter l'assouplissement, voté à l'Assemblée nationale, du taux d'audience des chaînes de la TNT susceptible de rendre applicable les dispositifs anti-concentration. Il propose d'exclure du bénéfice des dispositions dérogatoires en matière de soutien à la création les chaînes de la TNT dont l'audience dépasse 2,5 % et de les soumettre aux mêmes obligations que les chaînes hertziennes analogiques.
De cette manière, la réglementation audiovisuelle permettra de faire des chaînes de la TNT, dont le succès d'audience et publicitaire est manifeste, des partenaires de la création, et d'accompagner utilement l'assouplissement des règles anti-concentration.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement, monsieur le président.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable, un peu pour des raisons identiques à celles que j’ai évoquées précédemment : il s’agit d’un secteur d’activité jeune, dont le modèle économique est en cours d’élaboration et dont le chiffre d’affaires est encore relativement faible. Lui imposer des obligations au demeurant très fortes et légitimes en matière de production nous paraît de nature à déséquilibrer tant ce secteur que les opérateurs s’y trouvant.
Même si, en soi, cette proposition nous paraît bonne, il est en tout cas trop tôt pour l’imposer à la TNT, car nous prendrions le risque de déséquilibrer cette dernière au moment de son expansion.
M. le président. Madame Payet, l'amendement n° 742 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 742 est retiré.
L'amendement n° 980 rectifié, présenté par MM. de Broissia et Longuet et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 48-1 A de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication est ainsi rédigé :
« Art. 48-1 A. - Les programmes diffusés par voie hertzienne terrestre des sociétés mentionnées au I, II et III de l'article 44 ne peuvent faire l'objet d'un droit exclusif de reprise, y compris dans un mode de diffusion non linéaire, dès lors que ce droit exclusif aurait pour effet de restreindre le public pouvant accéder à ces reprises.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Cet amendement vise à modifier l’article 48-1 A de la loi du 30 septembre 1986. Lors des débats sur cette dernière, je siégeais, en tant que secrétaire d’État chargé de la poste et des télécommunications, au banc du Gouvernement, avec François Léotard, et Adrien Gouteyron rapportait ce texte au nom de la commission des affaires culturelles.
Depuis, la technique a évolué. Est apparue une nouvelle forme de télévision, la télévision dite « de rattrapage », ou catch up TV, service nouveau qui permet de regarder en différé des émissions sur un support qui est en général l’ordinateur, mais qui sera de plus en plus le mobile, devenu le terminal indispensable sans lequel l’homme moderne – l’homme, la femme et l’enfant surtout, d’ailleurs – ne peut plus vivre …
Il y a là un problème pratique, madame le ministre, et c’est la raison pour laquelle Louis de Broissia et Catherine Dumas ont proposé cet amendement que j’ai cosigné : il s’agit de savoir si la commercialisation du service de télévision de rattrapage est captive ou ouverte.
En un mot, nous constatons que la chaîne publique France Télévisions, qui a d’ailleurs été créée, je crois, à l’occasion de cette loi de 1986, et Orange, qui a été dérégulé à partir de cette même loi de 1986 et qui est aujourd’hui une société de droit privé à capitaux privés majoritaires, même si l’État reste le principal actionnaire, ont conclu un accord exclusif de rachat de programmes de télévision dans le cadre d’un service de télévision de rattrapage.
Nous sommes quelque peu étonnés de cette orientation. Correspond-elle à la volonté du Gouvernement ? Elle ne correspond en tout cas pas à celle des signataires de cet amendement. Si les émissions de télévision appartiennent naturellement aux sociétés qui en ont eu la responsabilité, nous souhaitons cependant qu’elles puissent être librement achetées par tous ceux dont le métier est de diffuser de la télévision non linéaire, c’est-à-dire de la télévision ponctuelle à la demande.
Cette disposition permettrait d’éviter de créer des systèmes en silo produisant une intégration verticale, même si cette dernière est aujourd’hui le fait d’entreprises à capitaux publics principaux, exclusifs ou dominants.
Je ne pense pas que cela corresponde à l’idée d’un libre choix du consommateur et d’une libre ouverture du service de télévision, fût-elle nouvelle et fût-elle de rattrapage. Je me demande d’ailleurs parfois ce qu’il y a à rattraper…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Il faut remercier Gérard Longuet et ses collègues d’avoir abordé un important sujet.
L’amendement vise en fait l’accord d’exclusivité récemment conclu entre France Télévisions et France Télécom Orange en matière de télévision de rattrapage accessible sur tout support.
Le conseil de la concurrence s’est prononcé sur cet accord le 7 mai 2008, et il l’a validé. Son analyse tient, pour l’essentiel, dans les arguments suivants : le périmètre des programmes concernés est somme toute limité, puisqu’il s’agit de la tranche 18 heures-24 heures sans les films et les actualités ; ensuite, la durée est limitée dans le temps, l’exclusivité ne valant que pendant sept à trente jours après la diffusion des programmes à l’antenne ; en outre, l’exclusivité s’applique uniquement à la mise à disposition des programmes en location gratuite et non au téléchargement définitif.
Les programmes restent disponibles pour l’ensemble du public sur le site Internet de France Télévisions, l’exclusivité ne concernant donc que l’exploitation par un tiers. En d’autres termes, chacun, selon cet accord, peut visionner les documents en différé sur son ordinateur. C’est seulement l’usage en différé sur un téléviseur ou un mobile qui est réservé aux abonnés d’Orange.
Il demeure, au-delà de cet accord spécifique et de la décision récente du conseil de la concurrence, que ce sujet tel qu’il est soulevé par Gérard Longuet est extrêmement important. Il s’agit de savoir dans quelle mesure le choix d’un fournisseur d’accès à Internet peut conditionner l’accès au contenu. Il s’agit aussi de déterminer si un groupe public de télévision peut valablement recourir à des partenariats exclusifs en matière de vidéo à la demande. C’est précisément ce que permet le contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions.
Est-il vraiment opportun, à ce stade de notre texte, de traiter de ce sujet de manière partielle ? En effet, techniquement, l’adoption de l’amendement n° 980 rectifié reviendrait à priver France Télévisions d’une source de revenus à l’heure où existent certaines incertitudes sur la bonne visibilité financière de ce groupe public.
Il me semblerait donc raisonnable, après avoir entendu le Gouvernement, de débattre de ce sujet lorsque sera inscrit à l’ordre du jour du Sénat le projet de loi sur la télévision publique et son financement.
Mais, il serait vraiment utile, madame le ministre, que vous puissiez nous éclairer dès à présent sur les situations visées par cet amendement.
Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Très bonne intervention !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. J’ai tendance à me ranger à l’avis de M. le rapporteur en la matière.
Cette question, qui est une vraie question de fond, concerne le droit d’exploitation réservé ou non réservé, exclusif ou non exclusif, au bénéfice de tel ou tel canal, des productions de France Télévisions. Cela mérite évidemment un débat approfondi.
Vos commissions – je suppose en effet que plusieurs commissions seraient saisies en l’espèce – auront évidemment l’occasion d’explorer l’ensemble de ces questions, c’est-à-dire à la fois la question des canaux et des types de production.
L’accord actuel est limité à une période de deux ans pour un droit de catch up lui-même d’une durée limitée ; il ne porte que sur certains programmes et non pas sur toutes les créations de France Télévisions. Cet accord présente un caractère véritablement exploratoire, en tout cas aux yeux du Gouvernement. Il a par ailleurs été validé par le conseil de la concurrence.
Mais la question de fond demeure et doit être explorée. Comme je le disais devant vos commissions, cela pourra évidemment être le cas à l’occasion du débat sur la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et de l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement.
J’ajoute que la Commission européenne a elle-même engagé, au travers d’une large consultation publique, une réflexion sur le cadre futur du financement étatique des services publics de radiodiffusion, et que l’une des interrogations centrales portera sur le positionnement du service public dans le domaine des nouveaux médias.
Cette vraie question de fond pourra donc être analysée, à l’échelon communautaire, dans le cadre de cette consultation publique et, à l’échelon national, à l’occasion de l’examen de la transposition de la directive et du projet de loi sur la nouvelle télévision publique. J’invite donc M. Longuet à retirer cet amendement d’excellente qualité qui me paraît aborder un problème très vaste sous un angle trop étroit.
M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, pour explication de vote.
M. Jacques Valade. La proposition faite dans cet amendement me semble tout à fait pertinente. Il y a effectivement un problème de fond concernant notamment l’exclusivité de telles ou telles productions qui ont été financées d’une certaine façon, surtout au niveau de l’audiovisuel public.
Je partage tout à fait l’analyse de Mme la ministre, ainsi que celle de M. le rapporteur. En effet, nous avons été amenés, dans le cadre de la discussion de ce projet de loi, à examiner à plusieurs reprises des amendements qui revenaient sur des points stratégiques, mais de façon partielle, et dont l’adoption aurait abouti à modifier des dispositions fondamentales sans réelle réflexion sur la globalité du problème posé.
Par conséquent, il me paraît pertinent et prudent d’attendre un peu pour examiner ces questions de façon globale : la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et le projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement nous donneront bientôt l’occasion de le faire.
Mais je confirme qu’il s’agit d’un problème fondamental ; et je ne suis pas loin de partager les préoccupations des trois signataires de cet amendement.
M. le président. Monsieur Longuet, l'amendement n° 980 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Longuet. Non, monsieur le président. Rassuré par ce rendez-vous, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 980 rectifié est retiré.
Article 37 ter (priorité)
Le premier alinéa de l'article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi rédigé :
« L'État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, directement ou indirectement, la totalité du capital de la société Radio France Internationale. »
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.
Mme Nathalie Goulet. Cet article, qui relève du titre III relatif à l’attractivité de nos territoires et intitulé « mobiliser l’attractivité au service de la croissance », porte sur la société Radio France Internationale, ou RFI.
Radio France Internationale est la première radio française d’actualité internationale non seulement en français, mais aussi – c‘est important pour ceux de nos collègues qui, comme moi, voyagent beaucoup – en plusieurs langues. Il y a 45 millions d’auditeurs dans le monde, auxquels s’ajoutent 33 millions de visiteurs sur Internet, 649 heures de programmes en 20 langues.
Ce sujet, en dehors de l’attractivité, concerne le rayonnement de la France. Or, la politique appliquée à Radio France Internationale aboutit à la suppression d’emplois de journalistes travaillant notamment en farsi, en russe, en arabe et en chinois.
Le 1er mars dernier, lors de la deuxième journée des Français de l’étranger au sein de cette maison, nous avons longuement interrogé M. Benamou pour savoir comment le rayonnement de la France pouvait, à son avis, se faire sans transmission de la sainte parole dans une langue compréhensible.
Radio France Internationale a un cahier des charges de service public et constitue un outil de promotion de la langue française. C’est extrêmement important, notamment à l’heure où, sur l’initiative de notre collègue Jacques Legendre, un article du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République est désormais consacré à la francophonie, définie comme un espace de solidarité ayant le français en partage.
RFI est donc non seulement un outil utile à la promotion et au rayonnement de la France pour des gens qui ne parlent pas le français et qui pourront ainsi comprendre notre politique et notre culture, mais aussi un outil de promotion de la langue française. J’ajoute que RFI emploie des stagiaires étrangers et a conclu des services de partenariat avec des radios étrangères.
Aussi ai-je été plutôt surprise – et je n’étais pas la seule ! – de trouver dans ce projet de loi de modernisation de l’économie, un article visant RFI ! J’ai donc déposé un amendement de suppression de cet article.
J’ajoute que les propos tenus tant par M. Valade que par Mme la ministre concernant la TNT me confortent dans l’idée d’une nécessaire suppression de cet article en attendant, d’une part, la loi sur l’audiovisuel, puisque l’audiovisuel concerne non seulement la télévision mais aussi la radio publique, et, d’autre part, un certain nombre de dispositions européennes.
D’abord, l’article 37 ter ressemble fort à un cavalier législatif. Je vois mal le lien entre une telle mesure et la modernisation de l’économie. Mais je suis tout à fait prête à entendre vos explications sur ce point, madame la ministre.
Ensuite, un tel dispositif fait à mon avis peser des risques inconsidérés sur un outil extrêmement important pour l’attractivité de nos territoires, la promotion de notre culture et le rayonnement de la France.
Intervenant sur l’article, j’ai également défendu mon amendement n° 310, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l'article.
M. Richard Yung. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pourrais moi aussi souligner les problèmes de forme que pose l’article 37 ter, comme vient de le faire notre excellente collègue Nathalie Goulet. En effet, cet article constitue bien un parangon de cavalier législatif, et j’imagine quelle sera la réaction du Conseil constitutionnel lorsqu’il en sera saisi.
Toutefois, je préfère centrer mon propos sur des remarques de fond.
Cet article, qui a été inséré dans le projet de loi à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement d’origine gouvernementale, vise à mettre en place la holding qui s’appelle désormais « Société de l’audiovisuel extérieur de la France ». Créée le 15 avril dernier, celle-ci doit regrouper les participations de l’État dans les différentes sociétés de l’audiovisuel extérieur, France 24, RFI et TV5 Monde.
La modification proposée de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication suscite évidemment l’inquiétude des salariés de RFI. Leur réaction est d’ailleurs tout à fait légitime. En effet, la commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par M. Jean-François Copé, a proposé d’affecter à France Télévisions la part de redevance attribuée à RFI. L’avenir des personnels concernés est donc pour le moins incertain.
Heureusement, le Gouvernement n’a pas retenu cette très mauvaise idée, qui, si elle avait été mise en œuvre, aurait entraîné une perte de 60 millions d’euros pour RFI, surnommée la « radio du monde ».
Cependant, cette sage décision est loin d’apaiser les craintes des personnels de RFI, qui accueillent avec beaucoup de scepticisme les annonces intervenues depuis le début de la mise en chantier de l’audiovisuel extérieur, voilà près d’un an. Ils craignent en particulier que la mise en place de la société holding n’entraîne une fusion, totale ou partielle, des trois entreprises dont j’ai parlé tout à l’heure. Ainsi, la fusion des moyens, qui a déjà été évoquée, pourrait se traduire par la suppression d’environ 180 emplois. Mais cela pourrait aller plus loin, avec la fusion au moins partielle des rédactions de journaux télévisés et d’un certain nombre d’émissions. Par conséquent, il s’agit là d’un glissement dangereux vers une centralisation et un contrôle complet de l’ensemble de ces trois chaînes.
Selon nous – je ne développerai pas notre position à cet égard, car ce n’est pas l’objet central du débat –, cette réforme n’est pas engagée de la bonne manière. Il aurait fallu s’appuyer sur TV5 Monde, qui est présente dans tous les pays et qui rassemble plusieurs millions de téléspectateurs, au lieu d’attribuer une somme de 40 millions, de 50 millions ou de 60 millions d’euros à France 24, chaîne que personne ne regarde dans le monde.
Par conséquent, nous proposerons la suppression de l’article 37 ter. La réforme de l’audiovisuel extérieur étant une question très importante, nous sommes d'accord pour en débattre, mais en prenant le temps de la réflexion et en menant les consultations qui s’imposent.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 310 est présenté par Mme N. Goulet.
L'amendement n° 476 est présenté par MM. Ralite et Renar, Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 1008 est présenté par Mme Garriaud-Maylam.
L'amendement n° 1024 est présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, M. Yung, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 310 a déjà été défendu.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 476.
Mme Odette Terrade. Je partage les préoccupations qui ont été exprimées par les orateurs précédents.
L’article 37 ter résulte de l’adoption d’un amendement d’origine gouvernementale à l’Assemblée nationale sur la détention du capital de Radio France Internationale par l’État, afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme de l’audiovisuel extérieur.
On peut s’étonner, après l’article 37 bis, de trouver un nouvel article concernant l’avenir de l’audiovisuel, en l’occurrence public, dans la partie du projet de loi censée permettre d’attirer les financements privés pour des opérations d’intérêt général. Faut-il y voir, comme c’est à craindre, les prémices d’une profonde transformation de la nature du capital de RFI ?
Cet article vise à modifier la rédaction de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui dispose que l’État « détient la totalité du capital des sociétés France Télévisions, Radio France et Radio France Internationale ».
La nouvelle rédaction proposée précise que l’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, surtout, qu’il détient « directement ou indirectement » le capital de la société Radio France Internationale. C’est ce dernier point qui pose problème, car il s’agit, rien de moins, d’une modification fondamentale des règles de détention du capital de RFI.
Selon le rapport de la commission spéciale, l’objet d’un tel changement serait de « sécuriser juridiquement le schéma envisagé par le Gouvernement pour la réforme de l’audiovisuel extérieur. »
La réforme, menée sur la base du rapport Levitte-Benamou, qui a été remis au Président de la République au mois de décembre dernier, crée une société holding dénommée « Société de l’audiovisuel extérieur de la France », et non pas « France Monde », comme cela était indiqué par erreur dans l’exposé des motifs de l’amendement gouvernemental déposé à l’Assemblée nationale.
Cette holding réunit les participations de l’État dans Radio France Internationale, TV5 Monde et France 24 : un assemblage baroque s’il en est !
D’ailleurs, il aurait été souhaitable de débattre de ce sujet à l’automne prochain, à l’occasion de l’examen du futur projet de loi sur l’audiovisuel public. En effet, la réforme de l’audiovisuel extérieur intervient en plein débat sur le financement de l’audiovisuel public, débat au sein duquel RFI a toute sa place.
L’une des pistes retenues par la commission présidée par Jean-François Copé pour assurer le financement de France Télévisions, à la suite de la disparition de la publicité sur les chaînes publiques, est la suppression des ressources de la redevance allouées à RFI.
Pourquoi voulez-vous précipiter un tel changement juridique avant que le débat sur le financement de l’audiovisuel public ait lieu ? Les ressources de RFI issues de la redevance sont de 58 millions d’euros, soit 40 % de son budget. Cette garantie de financement assure à RFI son ambition internationale et lui permet de remplir son cahier des charges de service public. Que se passera-t-il si elle est supprimée ? Encore une fois, tout semble écrit d’avance, et les personnels de RFI sont légitimement inquiets quant à l’avenir de leur radio et de ses missions.
Par conséquent, afin de lever de telles inquiétudes, nous demandons la suppression de cet article.
M. Richard Yung. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour présenter l'amendement n° 1008.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J’ai bien entendu les propos de mes collègues et je ne reprendrai pas des arguments qui figurent déjà dans les différents documents que nous avons reçus.
Bien entendu, je partage l’inquiétude exprimée par mon collègue sénateur représentant les Français établis hors de France Richard Yung, ainsi que par Mme Nathalie Goulet.
À mon sens, nous sommes tous – c’est encore plus vrai s’agissant des sénateurs représentant les Français de l’étranger – extrêmement attachés à RFI, qui est le premier réseau FM dans le monde devant la BBC. Nous sommes donc très vigilants quant à l’avenir de cette radio.
Aussi, dans un premier temps, j’ai moi aussi été très étonnée de la présence dans le projet de loi de cet article, qui m’est apparu comme un cavalier législatif. Ma première réaction a donc été d’en demander la suppression.
Néanmoins, j’écouterai naturellement avec beaucoup d’attention les explications de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le sujet, car nous avons besoin d’être rassurés sur l’avenir de RFI. Peut-être pourrions-nous toutefois surseoir à cette discussion ?
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 1024.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Si la chaîne RFI est très peu connue en France, c’est tout simplement parce qu’elle émet seulement en Île-de-France, où elle a 1 million d’auditeurs. Mais, dans le monde, elle en a 46 millions.
Mme Nicole Bricq. Excellent argument !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. À cet égard, permettez-moi de faire référence à l’une des auditrices de cette radio, qui, détenue pendant six ans dans la jungle colombienne, n’a été reliée au monde que par ce seul fil.
Mme Odette Terrade. Absolument !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je parle d’Ingrid Betancourt, qui – nous l’avons su un peu tardivement – écoutait RFI depuis son lieu de captivité. C’est d’ailleurs par ce biais que ses enfants et sa famille ont pu lui adresser des messages.
Il est vrai que nous avons entendu nombre de philippiques, comme « RFI ne sert à rien » ou « ses programmes en ondes courtes sont ringards » ! Mais, pour l’auditrice que je viens d’évoquer, RFI, ne vous en déplaise, a joué un rôle très important ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Philippe Marini, rapporteur. Mais personne ne met RFI en cause !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Par conséquent, je refuse que, par un simple cavalier législatif, on modifie le financement de la seule chaîne d’information internationale que nous ayons en France. Ceux d’entre nous qui s’intéressent aux questions internationales n’écoutent que RFI.
Il faut le savoir, RFI tient à garder son autonomie éditoriale. Mais qu’en restera-t-il si l’État détient directement le capital de cette chaîne, comme le souhaite la commission spéciale du Sénat ?
RFI a des rédactions particulièrement compétentes et spécialisées, ainsi qu’un réseau de 600 correspondants dans le monde. Sa culture d’entreprise est faite de la recherche d’une réactivité maximale face aux événements internationaux, d’une information très pointue, d’une profondeur des analyses, d’une qualité technique et artistique des émissions et d’une bonne réception. C’est une radio qui produit 56 heures d’émission par jour, diffusées sur 200 flux différents, et qui émet 24 heures sur 24, en 19 ou en 20 langues, par tous les moyens, dont Internet et Worldspace. Elle fait tout cela pour 130 millions d’euros de dépenses publiques, avec une équipe de 1 000 personnes. Et on veut à présent mettre la main dessus, au risque de lui faire perdre son autonomie, sa spécificité, sa ligne éditoriale et sa crédibilité internationale.
Certes, nous pouvons très bien admettre l’utilité de la mutualisation des moyens des chaînes de l’audiovisuel international dans les domaines administratif ou commercial, mais à condition de respecter les droits des personnels et de ne pas créer un audiovisuel international standardisé qui parlerait d’une seule voix, en l’occurrence celle de l’État. Nous ne sommes plus au temps de l’ORTF !
L’audiovisuel international que nous voulons doit être constitué de chaînes de télévision, comme France 24 ou TV5 Monde, de chaînes de radio, notamment RFI, et de sites Internet. Il doit diffuser des informations diversifiées, non aseptisées et qui restent crédibles. Et, bien sûr, le personnel doit être réellement associé aux décisions prises, dans le cadre d’un véritable dialogue social. C’est pourquoi nous souhaitons un débat au Parlement sur l’audiovisuel international. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)