M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela faisait longtemps !
Mme Marie-Christine Blandin. …a révélé chez nous l’évidence de résonances humaines intimes pour des accents ou des parlers privés qui font lien, et même sens. Ce film, qu’un journaliste du Monde diplomatique a qualifié de premier film populaire depuis La bête humaine, a fait du bien, sans faire de mal.
Inscrire les langues régionales dans la Constitution fait sens et constitue un message symbolique, sans engendrer de fragilisation.
C’est pourquoi les Verts voteront contre la suppression. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Ce débat est très riche, mais j’ai tout de même le sentiment, au travers des différentes interventions, que les uns et les autres combattent plus souvent des démons que des réalités.
Chacun ici, me semble-t-il, – à l’exception peut-être de quelques-uns, mais ils ne se sont pas exprimés – est très attaché aux principes fondamentaux, aux éléments constitutifs de la République que sont la laïcité et la langue française.
À mon sens, c’est un combat inachevé. Je peux donc comprendre que nombre d’orateurs expriment leurs convictions et cherchent à dénicher, dans cette affaire des langues régionales, le moindre petit indice révélateur de la volonté de fragiliser ce qui n’est jamais acquis. En même temps, lorsqu’autant de doutes ou d’alertes se font jour, c’est que l’on sent monter dans la société un courant de pensée qui pourrait fragiliser l’unicité de la République, la laïcité ou la langue française.
Cela étant, je reste perplexe. L’exacerbation des nationalismes constatée dans un certain nombre de pays, notamment en Europe et tout particulièrement dans les Balkans, constitue un réel danger de destruction de nations telles qu’elles se sont constituées au xxe siècle. Mais quand j’analyse les raisons d’une telle montée en puissance, j’en arrive à chaque fois à la même conclusion : il s’agit d’États autoritaires qui ont imposé, d’une manière totalement hermétique et antidémocratique, l’écrasement de minorités, y compris au travers des langues. Avec une telle façon de faire, toutes ces langues, bien loin de s’éteindre, ont « explosé à la figure » des dirigeants à la fin du xxe siècle, dans tout un tas d’endroits où l’on pensait que la question était réglée.
La France a agi autrement. Il n’y a pas, aujourd’hui, de baïonnettes aux portes de la langue française pour imposer un séparatisme avec des langues régionales. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on serait sur la défensive.
En revanche, et cela a été évoqué tout à l’heure, je constate que la langue française est actuellement fragilisée, y compris de plus en plus dans des actes courants de la vie publique. Mais cette fragilisation est plutôt le fait de la langue anglaise.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ne rouvrons pas le débat !
M. Patrice Gélard. Ce n’est pas une explication de vote !
M. David Assouline. Loin de moi l’idée de la critiquer, car elle aussi a ses charmes. Malgré tout, elle fait peser une menace, et ce dans de multiples domaines. Il n’est qu’à voir le grand nombre d’offres d’emplois pour des postes où il faut écrire la moitié du temps en anglais. Il n’est qu’à voir le grand nombre d’anglicismes introduits en français. C’est cela, et non les langues régionales, qui fragilise notre langue.
Moderniser la Constitution, c’est veiller à défendre les socles fondamentaux, tout en reconnaissant la nécessité de prendre en compte, cinquante ans après, un certain nombre d’évidences.
Je n’étais pas présent lors du débat sur le mot « race ». Lorsque j’étais professeur d’histoire-géographie et d’éducation civique, j’avais énormément de mal à aborder la question du racisme, car comment expliquer que les races n’existent pas, comme tout le monde le sait, mais que leur mention figure dans la Constitution ?
MM. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous avons voté sur le sujet !
M. David Assouline. On me rétorque, avec de grands discours, que l’article 1er de la Constitution est intangible. Pour ma part, je préférerais que l’on fasse œuvre de pédagogie pour lutter contre le racisme.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n’est pas la question !
M. David Assouline. Je le sais bien, monsieur le rapporteur, mais je fais le lien entre ces deux thèmes !
Certains nous mettent en garde : si l’on touche aux socles tels qu’ils ont été définis à l’origine, on fragilise l’édifice. C’est une façon défensive d’aborder le problème. À mon avis, personne, dans cet hémicycle, ne veut fragiliser la langue française.
L’argumentation selon laquelle il est fâcheux de mentionner dans la Constitution les langues régionales avant la langue française est, certes, recevable. Mais si celles-ci avaient été placées au même niveau, on aurait alors entendu cette autre argumentation, tout aussi recevable : le français et les langues régionales ont la même valeur, et l’on sème la confusion sur la façon dont doit être appréhendée la question de la langue dans la Constitution.
Au final, je suis très embarrassé par ce débat, car j’ai l’impression que l’on se bat aujourd’hui non pas contre ce qui menace la langue, la République et son unicité, mais contre des épouvantails. (Marques d’exaspération sur plusieurs travées de l’UMP.) Nous abondons tous dans le même sens : il faut veiller à ne pas fragiliser aujourd’hui la République et la laïcité. Mais, en France, comme ailleurs dans le monde, le vrai danger, ce sont les intégrismes religieux, et pas les langues minoritaires régionales ! (M. François Marc applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je serai bref, car je me suis déjà beaucoup exprimé. Je tiens surtout à remercier le président et ceux de mes collègues qui ont bien voulu répondre aux arguments que j’ai fait valoir au cours du débat sur la place des langues régionales.
Je salue l’engagement de mon camarade et collègue François Marc. Il aura finalement convaincu la majorité du groupe socialiste, faute de me convaincre, comme vous avez pu le constater.
Je déplore, cependant, le recours à la citation d’un comité de l’ONU, qui ne me semble pas fondé à donner des appréciations sur la nature de la Constitution de la République française dans la mesure où lui-même méconnaît l’importance de la laïcité.
De plus, l’ordre du monde et son état justifient que nous soyons extrêmement précautionneux sur les conditions qui rendent possible l’unité et l’indivisibilité de la République française.
L’unité linguistique de la France est un bien précieux. Elle ne signifie pas l’uniformité, ni la répression des différences ; elle signifie l’unité, avec tout le sens inhérent à ce mot, donc la possibilité d’un espace public commun, que l’on nomme la République.
Pour avoir entendu largement s’exprimer la sensibilité de tous ceux qui voient dans cette culture régionale une partie constitutive de leur identité, je voudrais faire entendre à mon tour qu’il s’agit de 7 % de la population. Le reste, la nouvelle France, issue, comme moi, de l’immigration, parle avec passion le français, la langue, pour elle, de l’égalité, celle qui l’a libérée individuellement, comme elle a libéré collectivement chacun des Français.
Je tenais à ce que cela soit dit aussi ! Entendez à leur tour ceux qui sont blessés de voir sans cesse mettre en cause la France, qui ne le mérite pas : elle a fait son devoir à l’égard du développement de la diversité linguistique, mais elle a surtout fait son devoir à l’égard de tous les enfants qu’elle accueillait et qu’elle intégrait comme moi-même, qui vous parle à cet instant.
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Dans la mesure où la référence à la francophonie a été rejetée au mieux par la commission dans l’espace, après l’article 31, au pire par le Gouvernement dans le temps, après le comité de réflexion sur le Préambule de la Constitution, présidé par Mme Veil, il va de soi que nous n’avons plus la possibilité de faire remonter la référence au français avant la mention des langues régionales.
Dans ces conditions, je n’ai pas d’autre solution, en ce qui me concerne, que de voter les amendements de suppression de cette référence.
M. André Lardeux. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. En entendant notre collègue François Marc faire état de l’avis d’un comité Théodule du grand machin new-yorkais qui devait probablement s’exprimer dans quelque volapük intégré (Rires sur les travées de l’UMP.), je n’ai pas pu résister au plaisir de me demander en ce 18 juin, à dix-huit heures, soit l’heure de l’appel ou presque, ce qu’en penserait le général de Gaulle s’il nous entendait.
Pour en revenir à des choses plus concrètes, je me dois de rappeler que, pendant la dernière campagne des municipales, certains candidats ont cru bon de rédiger leur propagande électorale dans des langues étrangères. Ce genre de pratique devrait nous interpeller, les uns et les autres, et nous convaincre de la nécessité qu’il y a de renforcer toujours et partout l’usage du français.
Représentant d’un département où nous avons beaucoup de difficultés à intégrer un certain nombre de jeunes, de toutes origines d’ailleurs, venus du monde entier, et que la langue française peut rassembler, je sais le mal que nous avons à faire en sorte que la langue française soit correctement utilisée. Il me semble que la référence aux langues régionales dans la Constitution ne pourrait que compromettre nos efforts. (Bravo ! et applaudissements sur de nombreuses travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Je voudrais dire pourquoi je voterai les amendements de suppression de la mention des langues régionales à l’article 1er de notre Constitution. Il s’agit non pas de se prononcer pour ou contre ces idiomes régionaux, mais de savoir si cette mention a bien sa place dans notre loi fondamentale. Je ne pense pas que tel soit le cas, et ce pour deux raisons.
Premièrement, je suis convaincu que le premier souci dans notre pays est aujourd’hui l’apprentissage et la maîtrise de la langue française. Et je suis également persuadé que nous, Français, avons une responsabilité au regard de la francophonie. En octobre prochain, se tiendra à Québec le sommet de la francophonie. Dans cette perspective, M. Yvon Bourges a fait seize propositions intelligentes pour passer d’une position défensive à une position offensive.
Au moment où il faut défendre la langue française, ce serait un très mauvais signe que de laisser, à l’article 1er, la référence aux langues régionales. Elle précéderait ainsi celle à la langue française, bien commun de tous les Français depuis l’édit de Villers-Cotterêts. Ce serait un mauvais service à rendre à notre pays, à la langue française et à la francophonie. (Applaudissements sur plusieurs travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Joseph Kergueris.
M. Joseph Kergueris. En écoutant avec une extrême attention les échanges qui ont été les nôtres cet après-midi, mes chers collègues, j’ai constaté qu’il y a eu, formulé ou informulé, un double débat. L’un, conduit avec le talent qui est le sien par notre collègue Robert Badinter, a posé la question de la pertinence de l’inscription de cette préoccupation dans la Constitution. L’autre, contenu dans une multitude d’interventions, nous interrogeait sur le bien-fondé de cette demande, qui paraissait attentatoire à l’unicité et à la laïcité de la République, en un mot comme en cent, à la République elle-même.
En ce jour du 18 juin, on a même invoqué les mânes du général de Gaulle, un homme qui a terminé le discours de Quimper en breton, un homme dont je puis attester qu’il portait une grande considération aux langues régionales. (Marques d’approbation sur diverses travées.)
M. Michel Charasse. Vive le Québec libre !
M. Joseph Kergueris. Ce n’est pas ce qui m’a choqué le plus !
Profitant de l’une de mes rares interventions dans cet hémicycle, je voudrais vous dire que j’appartiens à une région qui a son histoire, sa particularité, son identité. Ce qui fonde cette histoire, cette particularité, cette identité, c’est en grande partie sa langue : c’est l’un de ses socles ; c’est l’une de ses valeurs.
Enfant de cette région, ayant appris les deux langues, j’ai le profond sentiment d’avoir été porté par tous ceux qui parlaient cette langue, par tous ceux, hussards noirs de la République qui nous l’ont apprise, par ceux qui ne la parlaient pas et qui le regrettaient, par les pères de ceux-là. J’ai le sentiment d’avoir été conduit par tous, par ceux que j’ai connus, mais aussi par ceux qui ont précédé ceux que j’ai connus, vers un pays auquel nous étions profondément attachés, dont nous voulions qu’il fût républicain, unique et laïc.
Le souhait, que vous pouvez ou non partager, de faire inscrire cela dans notre patrimoine, c’est-à-dire dans ce que nous avons reçu de nos pères, quelle que fût la langue qu’ils aient parlée – et je reconnais aux autres le droit de demander la même chose pour leurs pères – ce souhait, dis-je, ne croyez pas qu’il puisse être porteur de risques là où nous nous trouvons. Ne croyez pas qu’il puisse être attentatoire à une quelconque unicité de la République et ne nous ramenez surtout pas aux années quarante !
Les régions à forte identité – il n’y a pas que la Bretagne ; je pense également à l’Alsace, à la Lorraine, à la Corse, à la Catalogne, aux régions ultramarines – sont des régions profondément républicaines, profondément laïques. Si vous en doutez, comptez les morts et regardez ce que les enfants de ces régions ont donné à la France ! (Bravo ! et applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan.
M. Josselin de Rohan. Troisième Breton à m’exprimer dans cet hémicycle, je voudrais dire combien je partage le propos de mon collègue et ami Joseph Kerguéris sur le fait que la langue bretonne a été le ciment de notre identité.
Puisqu’on a fait allusion au 18 juin, je voudrais dire aussi que les premiers à rejoindre le Général de Gaulle étaient des pêcheurs de l’île de Sein. Ces hommes-là ne parlaient pas tous le français, mais avaient le cœur français. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. Jean-Luc Mélenchon. C’est vrai !
M. Josselin de Rohan. Et je ne voudrais pas que l’on vienne ici, dans cet hémicycle, dire à ceux qui s’opposent à l’article que nous allons voter tout à l’heure et qui inscrit les langues régionales dans la Constitution qu’ils sont des ennemis des langues régionales.
J’appartiens à la partie francophone de la Bretagne. En ma qualité d’ancien président du conseil régional de Bretagne, je puis indiquer que nous avons consacré beaucoup de crédits à l’enseignement du breton. Nous avons créé un office de la langue bretonne. Nous avons financé des émissions audiovisuelles en breton, même si certaines chaînes de télévision croient intelligent de doubler en breton Columbo ou des dessins animés japonais (Rires.), faisant ainsi un très curieux usage de l’argent du contribuable pour promouvoir la langue bretonne.
Le problème évoqué tout à l’heure, c’est que la loi que nous allons, je l’espère, voter donnera les moyens de conforter l’enseignement du breton, de diffuser la culture bretonne pour les locuteurs qui veulent le faire. Mais c’est dans la loi que se trouve la solution. Les langues régionales n’ont pas leur place dans la Constitution ! (Bravo ! et applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Je dirai simplement quelques mots pour expliquer mon vote en faveur des amendements de suppression, car je ne voudrais pas que l’on se trompe sur l’interprétation à lui donner.
J’estime que la Constitution doit définir des procédures, des règles, des normes pour permettre l’organisation des pouvoirs publics et le fonctionnement de l’État. Elle n’a pas à qualifier et à commenter notre patrimoine !
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Philippe Marini. Peut-être est-ce le rôle du préambule de la Constitution, mais il s’agit d’un autre débat, qui n’est pas ouvert aujourd’hui.
M. Dominique Braye. On dresse le catalogue de La Redoute !
M. Philippe Marini. C’est simplement en fonction de cette vision concrète et utile de la Constitution que je vote contre l’article ajouté à l’Assemblée nationale, sans doute avec d’excellentes intentions, mais qui risque de poser une infinité de problèmes, comme on l’a vu au cours de notre excellent débat. (Applaudissements sur de nombreuses travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe.
M. le président. Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande, monsieur le président.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures cinquante.)
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Je souhaite répondre à la question posée tout à l'heure par M. Badinter et M. Alfonsi, afin de les rassurer : le Gouvernement n’a absolument pas l’intention de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.
Je vous renvoie d'ailleurs à la décision de 1999 du Conseil constitutionnel, qui avait considéré que cette Charte était contraire aux « principes d’égalité, d’unicité et d’indivisibilité de la République ».
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, je souhaite expliquer en quelques mots la position du groupe UMP du Sénat.
Comme sans doute la plupart – sinon la totalité – de nos collègues, j’ai énormément appris au cours de cet après-midi, et je pense que nos échanges ont été extrêmement instructifs.
Il est clair que nous avons des préoccupations communes : loin d’être partisanes, celles-ci sont d'abord et avant tout nationales. Nous nous demandons tous comment servir notre pays tout en laissant les libertés locales s’exprimer sous les formes les plus diverses et en respectant les territoires.
Toute la question est donc de savoir jusqu’où nous pouvons aller s’agissant de la traduction de ce souci dans l’organisation de nos institutions. Pour notre part, nous considérons, eu égard à ce qui a déjà été fait ou voté et aux perspectives que vient de tracer Mme le garde des sceaux, qu’en cet instant nos convictions – même si, je le répète, nous ne critiquons pas ceux qui pensent autrement que nous – nous conduisent à nous prononcer en faveur des amendements identiques de suppression de l’article 1er A.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 rectifié, 77, 145, 157, 250 rectifié ter et 260 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 98 :
Nombre de votants | 324 |
Nombre de suffrages exprimés | 319 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l’adoption | 216 |
Contre | 103 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, sur plusieurs travées de l’UC-UDF, du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
En conséquence, l'article 1er A est supprimé et les amendements nos 95, 315, 57 rectifié et 356, 376 rectifié, ainsi que les sous-amendements nos 304 rectifié, 38 rectifié bis, 276 rectifié, 156, 349, 399 rectifié, 400 rectifié et 4 rectifié bis n'ont plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur le président, l’adoption des amendements de suppression de l’article 1er A rendent sans objet l’amendement n° 95 de la commission, ainsi que les sous-amendements qui y étaient rattachés. Afin de préserver les dispositions de l’amendement n° 95 qui étaient relatives à l’égalité entre les hommes et les femmes, la commission des lois dépose un nouvel amendement tendant à créer un article additionnel avant l’article 1er.
À cet amendement pourraient s’appliquer les sous-amendements qui visaient la même question de l’égalité entre les hommes et les femmes, à savoir les sous-amendements nos 156, 349, 399 rectifié et 400 rectifié. Si les auteurs de ces sous-amendements décident de les maintenir, je vous propose de poursuivre la discussion
Mme Anne-Marie Payet. Je retire les sous-amendements nos 399 rectifié et 400 rectifié, monsieur le président.
M. le président. Les sous-amendements nos 399 rectifié et 400 rectifié sont retirés.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 509, présenté par la commission des lois, et ainsi libellé :
Avant l’article 1er de la Constitution, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L’article 1er de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »
II. En conséquence, le dernier alinéa de l’article 3 de la Constitution est supprimé.
Madame Nicole Borvo Cohen-Seat, le sous-amendement n° 156 est-il maintenu ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Alima Boumediene-Thiery, le sous-amendement n° 349 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 510 est présenté par Mme Borvo Cohen-Seat.
Le sous-amendement n° 511, est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Tous deux sont ainsi libellés :
Dans l'avant-dernier alinéa de l'amendement n° 509, remplacer le mot :
« favorise »
par le mot :
« assure »
L’amendement n° 509 ainsi que les sous-amendements nos 510 et 511 ont déjà été défendus.
La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Il me semble que le sous-amendement n° 276 rectifié est toujours d’actualité.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce sous-amendement visant à supprimer la totalité de mon amendement, il n’est pas recevable.
M. Michel Charasse. Effectivement, un sous-amendement ne peut pas supprimer un amendement.
M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.
M. Patrice Gélard. J’interviens ici non pas au nom de la commission, mais à titre personnel.
Si l’amendement de la commission est adopté, certains amendements déposés sur ce sujet à l’article 11 deviendront sans objet, en particulier celui que j’ai présenté et qui tend à la suppression de cette disposition dans l’article 34 de la Constitution.
Pour ma part, je ne prendrai pas part au vote sur l’amendement n° 509, ni sur les sous-amendements nos 510 et 511, et ce pour une raison très simple : je suis membre du comité de réflexion sur le Préambule de la Constitution, présidé par Mme Veil. Or ce comité doit respecter une lettre de mission du Président de la République, qui le charge précisément de traiter ce problème.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.
Mme Gisèle Gautier. Tout d’abord, je voudrais revenir sur les propos tenus tout à l’heure par notre collègue Mme Dini. Il me semble qu’elle n’a plus en mémoire ce qui a été dit lors de la discussion du texte sur les inégalités salariales. À l’époque, nous avions déposé un amendement, qui avait été adopté, dont l’objet était de faire en sorte qu’il y ait égalité entre les hommes et les femmes concernant les pratiques professionnelles.
Malheureusement, on le sait, cet amendement a été, comme on dit dans notre jargon, « retoqué » par le Conseil constitutionnel et, en dépit des différentes mesures qui sont prises ici ou là, qu’elles soient incitatives ou dissuasives, je m’aperçois que nous n’avançons guère.
Dès lors, les dispositions qui nous sont proposées aujourd'hui concernant l’égalité entre les hommes et les femmes en matière de responsabilités professionnelles et sociales doivent être inscrites dans le marbre de la Constitution.
C'est la raison pour laquelle j’apporte mon total soutien à l’amendement n° 509 de la commission.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Mon intervention a pour objet de rappeler que le sous-amendement n° 511 vise à remplacer le mot « favorise » par le mot « assure ». En effet, ce dernier terme, contrairement au premier, apporte une garantie en matière de parité, ce qui me paraît très important.
Par ailleurs, il m’a semblé souhaitable de réunir l’égalité professionnelle et sociale et la parité dans les mandats électoraux. En revanche, il convient d’inscrire ces dispositions non pas dans l’article 1er, mais dans l’article 3 de la Constitution.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. L’article 1er de la Constitution définit la nature même de la République, à savoir : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. » ; il affirme donc les principes fondamentaux.
Or parler de l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ne me paraît pas relever de la définition de la nature de la République. Pourquoi cette disposition ne figurerait-elle pas dans l’article 34 ? Il a la même valeur constitutionnelle !
Déjà, avec les termes « Son organisation est décentralisée. », qui figurent à l’article 1er de la Constitution, nous étions descendus d’un cran s’agissant de la valeur de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. J’ai bien entendu la réponse de M. le rapporteur, qui m’a dit que c’était une avancée ; c’est déjà mieux que rien !
Toutefois, dans le même temps, s’agissant de l’inscription d’un principe dans la Constitution, je rejoins notre collègue Robert Badinter quant à la place de ces mesures introduites par l’Assemblée nationale. Quoi qu’il en soit, vous avez décidé, monsieur le rapporteur, de les faire figurer à l’article 1er de la Constitution, et c'est la raison pour laquelle nous défendons ce sous-amendement n° 510.
Plusieurs textes ont déjà été votés concernant l’égalité, notamment professionnelle, des femmes et des hommes. Malheureusement, on ne progresse pas ! La mention de la parité dans la Constitution tendait donc à donner plus de poids à nos législations pour véritablement atteindre cette parité.
Je regrette que vous ne nous ayez pas suivis et que vous n’ayez pas choisi de remplacer le mot « favorise » par le mot « assure ».