Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je traiterai cette première série d'amendements portant sur l'article 1er en même temps que la série d'amendements relatifs à l'article 2, de façon à ne pas me répéter, puisque ce sont les mêmes amendements.
L'amendement n° 6 est un amendement de suppression. Par là même, il est contraire à la politique de la commission des lois, par conséquent je ne puis qu'émettre un avis défavorable.
Les amendements nos 3, 8, 10, 12, 14, 16 et 18 posent un certain nombre de problèmes, notamment un problème de fond par rapport à notre conception du droit international : les réserves d'interprétation peuvent exister en droit international, mais elles doivent être formulées avant la signature du traité...
M. Michel Charasse. Non ! Avant la ratification !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Une fois le traité signé, on ne peut pas revenir sur les engagements pris. C'est la raison pour laquelle je ne pourrai pas donner un avis favorable à cette série d'amendements.
M. Michel Charasse. Puis-je vous interrompre, monsieur le rapporteur ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je vous en prie !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Charasse, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. Michel Charasse. Je ne suis pas de votre avis, monsieur le rapporteur. Vous avez raison quand vous dites qu'il n'est pas possible d'émettre des réserves d'interprétation une fois le traité ratifié et appliqué. (M. le rapporteur proteste.) Mais les réserves d'interprétation peuvent toujours être exprimées jusqu'au dépôt des instruments de ratification. Sinon, nous ne nous serions pas trouvés, à plusieurs reprises dans les années 1970, dans l'obligation de dire que nous allions appliquer, par exemple, telle disposition de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme que nous n'avions pas acceptée à l'époque.
Par exemple, lorsque la France a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, elle a formulé une réserve et refusé le recours individuel. Cette réserve a été levée par la suite, sous la présidence intérimaire du président Poher, après la mort du président Pompidou. Or, cette réserve n'avait pas été formulée au moment de la signature, mais de la ratification.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'était prévu ! Le traité le permettait !
M. Michel Charasse. Sous cette réserve concernant les réserves, monsieur le rapporteur, je vous rejoins sur les autres points.
M. Patrice Gélard, rapporteur. J'ajoute cependant que les réserves d'interprétation doivent être prévues, au moment de la signature, par le traité lui-même,...
M. Michel Charasse. Non !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... sinon on ne peut pas ajouter des réserves. Il est impossible de modifier unilatéralement un traité.
M. Michel Charasse. On ne modifie rien ! On indique simplement que, pour la France, telle disposition s'interprète de telle manière !
Mme la présidente. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Quoi qu'il en soit, j'estime que ces réserves, telles qu'elles sont rédigées, n'ont pas leur place dans la Constitution. Cette observation vaut pour votre amendement, monsieur Charasse, mais aussi pour la série d'amendements qui suit et qui repose sur la même conception des réserves d'interprétation.
Après ces considérations générales, j'en viendrai à des observations plus détaillées.
S'agissant de l'amendement n° 8, je rappelle que les dispositions qu'il remet en cause ne sont pas introduites par le traité de Lisbonne et qu'elles sont d'ores et déjà en vigueur. En outre, elles n'obligent la France à rien. Par conséquent, l'avis de la commission est défavorable.
L'amendement n° 10 porte sur l'Agence européenne de défense. Il introduit également une réserve d'interprétation, je ne développerai donc pas à nouveau mes arguments.
L'amendement n° 12 est un peu différent : il vise à exclure l'application de la procédure de révision simplifiée prévue par l'alinéa 7 de l'article 48 du traité sur l'Union européenne, tel que modifié par le traité de Lisbonne. Comme il a déjà été indiqué, il n'est pas envisageable de prévoir des réserves unilatérales après la négociation du traité.
Au demeurant, sur le fond, cet amendement est inutile, puisque l'objet de l'article 88-7 de la Constitution, tel qu'il est prévu par le projet de loi constitutionnelle, permet justement d'organiser un droit d'opposition, qui est en fait un véritable droit de veto accordé au Parlement français, et donne satisfaction, par conséquent, aux préoccupations exprimées par les auteurs de l'amendement n° 12. Je demanderai donc à ces derniers de retirer leur proposition,...
M. Robert Bret. Pas question !
M. Patrice Gélard, rapporteur... sinon j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 14 vise à exclure l'application, en droit français, de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif aux services publics. Là encore, c'est une réserve d'interprétation ; je ne reviendrai donc pas sur ce que j'ai déjà dit.
En fait, le traité de Lisbonne est plus favorable à la conception française du service public que ne l'est actuellement le droit communautaire. Un protocole annexé à ce traité reconnaît en effet explicitement, pour la première fois, « le rôle essentiel et le pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les services d'intérêt économique général, d'une manière qui réponde aux besoins des utilisateurs ; la diversité des services d'intérêt économique général et les disparités qui peuvent exister au niveau des besoins et des préférences des utilisateurs en raison des situations géographiques, sociales ou culturelles différentes ; un niveau élevé de qualité, de sécurité et quant au caractère abordable, l'égalité de traitement et la promotion de l'accès universel et des droits des utilisateurs. »
Par conséquent, dans une certaine mesure, vous avez satisfaction avec cet élargissement de la reconnaissance de notre conception du service public. Si cet amendement devait ne pas être retiré, la commission émettrait, bien entendu, un avis défavorable.
L'amendement n° 16 vise les dispositions relatives à l'indépendance de la Banque centrale européenne.
Le problème est que la rédaction de cet amendement est loin d'être claire, puisqu'il est écrit que « les dispositions de l'article 282 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne s'appliquent dans le respect de l'article 3 de la Constitution ». On ne sait pas très bien quelle est la portée juridique concrète de cet amendement.
De surcroît, il s'agit, une fois encore, d'une réserve d'interprétation.
Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
Enfin, l'amendement n° 18 a trait au respect du principe de laïcité.
Je dois dire que le Conseil constitutionnel, qui a lu l'ensemble du traité, n'a pas éprouvé de craintes à cet égard. Le préambule du traité ne comporte d'ailleurs qu'une simple référence à l'héritage religieux de l'Europe, quel qu'il soit, chrétien, musulman, juif...
M. Charles Gautier. N'exagérons pas !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Par conséquent, le Conseil constitutionnel n'a pas estimé qu'il y avait là une menace particulière pour la laïcité. Je le suis sur ce point également et émets un avis défavorable sur l'amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. M. Gélard a déjà dit beaucoup de choses.
S'agissant de l'amendement n° 6, je répète que l'article 1er du texte ne valide pas par avance le traité de Lisbonne. Il a pour objet de réviser la Constitution pour permettre la ratification de ce traité.
Comme l'a justement rappelé M. Hyest, sans cette procédure préalable, aucun débat ne pourrait se tenir sur le traité de Lisbonne lui-même. L'autorisation de ratifier ce traité sera soumise au vote de la représentation nationale. Le débat aura lieu le 7 février prochain.
J'ajoute que, comme cela a été souligné à plusieurs reprises, notre organisation institutionnelle place sur un pied d'égalité la ratification parlementaire et la ratification référendaire.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 3 de M. Charasse, le Conseil constitutionnel, comme cela a été relevé, s'est prononcé, dans ses décisions du 19 novembre 2004 et du 20 décembre 2007, sur les stipulations du traité de Lisbonne qui rendent nécessaire la révision préalable de notre Constitution. Il a considéré que seules sont concernées celles qui sont de nature à porter atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale et celles qui définissent les prérogatives nouvelles accordées aux parlements nationaux. Il a, en revanche, estimé que les dispositions relatives aux droits fondamentaux de l'Union européenne n'appelaient pas de révision constitutionnelle.
L'article 6 du traité sur l'Union européenne précise bien que les droits fondamentaux garantis par la Convention européenne des droits de l'homme font partie du droit de l'Union européenne, tel qu'il résulte des traditions constitutionnelles communes aux États membres. La même réserve figure à l'article 52 de la charte des droits fondamentaux. Ces droits doivent être interprétés en harmonie avec les traditions constitutionnelles communes aux États membres.
Par conséquent, les craintes invoquées par M. Charasse ne nous paraissent pas fondées, étant entendu que les propos de M. Graham Watson sur la laïcité n'engagent que lui. Cette personne a certainement des qualités, mais n'est pas le meilleur connaisseur du droit français à cet égard.
En outre, comme cela a été indiqué par M. Gélard, les réserves doivent être faites, en ce qui concerne les traités communautaires, au moment de la signature. C'est un usage qui a été reconnu par la convention de Vienne sur le droit des traités.
Par ailleurs, ainsi que je l'ai souligné, l'article 52 préserve les constitutions nationales. Comme l'a également fait observer M. Gélard, le Conseil constitutionnel n'a pas considéré que ces dispositions faisaient courir un risque à notre Constitution.
Enfin, je n'ai pas trouvé trace - mais peut-être ai-je mal cherché - des déclarations qui auraient été faites par M. Barnier lors de son intervention du 16 février 2005.
M. Michel Charasse. Je vous ferai passer leur retranscription pour la semaine prochaine !
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. Je vous en remercie, monsieur le sénateur !
Quoi qu'il en soit, il ne nous paraît pas nécessaire, dans ces conditions, d'insérer une réserve d'interprétation résultant des décisions du Conseil constitutionnel ni de prévoir dans la Constitution que tout acte européen qui méconnaîtrait les décisions du Conseil constitutionnel serait nul et de nul effet à l'égard de la France.
Pour ces raisons, je souhaiterais que M. Charasse puisse retirer son amendement. À défaut, nous préconiserions son rejet.
En ce qui concerne l'amendement n° 8, il n'a pas, en soi, de lien direct avec le projet de loi constitutionnelle ni avec le traité de Lisbonne, comme l'a remarqué M. Gélard. L'obligation d'appliquer les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe 2 de l'article 42 du traité sur l'Union européenne n'est pas une nouveauté introduite dans le cadre du traité de Lisbonne, puisque ces dispositions sont issues du traité de Nice : aucune modification n'est intervenue.
Sur le plan politique et sur le plan opérationnel, je dirai, pour être complet, que la politique européenne de sécurité et de défense s'est construite de façon non contradictoire avec l'OTAN. Cela est normal, puisque vingt et un des États membres de l'Union européenne sont également membres de l'OTAN. La France exerce d'ailleurs actuellement, dans le cadre de cette organisation, le commandement de la KFOR au Kosovo. Des arrangements entre les deux organisations garantissent l'autonomie de décision pour chacune d'entre elles.
Pour ces raisons de fond, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 10, il nous paraît quelque peu contradictoire avec l'amendement précédent, car pour construire une Europe de la défense garantissant une autonomie de son action et la paix sur le continent européen, il est indispensable que les États membres accroissent leur capacité militaire. L'Union européenne s'est dotée d'une capacité opérationnelle autonome, à la fois civile et militaire, ce qu'illustrent les opérations qui ont été conduites dans les Balkans, au Moyen-Orient, en Afrique et en Afghanistan.
C'est également dans ce cadre que le Conseil des ministres des affaires étrangères de l'Union européenne a décidé hier le lancement d'une nouvelle opération de sauvetage et de stabilisation dans le contexte de la crise au Darfour, afin de protéger les populations civiles.
Comme vous le savez, le traité prévoit la mise en place d'une coopération structurée, élargit les missions de l'Union européenne, notamment en matière de désarmement, de prévention des conflits et de stabilisation à la fin de ces conflits.
Ces mesures ne pourront être prises sans notre consentement, puisque le traité prévoit qu'elles devront l'être à l'unanimité.
Par conséquent, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 12, les dispositions en cause visent à permettre au Conseil européen, composé des chefs d'État et de gouvernement, d'autoriser le Conseil à statuer à la majorité qualifiée au lieu de l'unanimité. Cette autorisation devra être donnée à l'unanimité. Elle ne pourra pas concerner les décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense.
Le Conseil européen pourra, de la même manière, décider d'adopter la procédure législative ordinaire, qui repose sur la règle de la majorité qualifiée, au lieu d'une procédure spéciale.
Enfin, comme l'a souligné M. Gélard, il suffira de l'opposition d'un parlement national, exprimée dans un délai de six mois après la transmission des initiatives qui seront prises en la matière par le Conseil européen, pour faire obstacle à la décision. Compte tenu de cette garantie forte offerte aux parlements nationaux, ce mécanisme ne saurait être considéré comme méconnaissant l'article 3 de la Constitution.
En conséquence, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 14 relatif à l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et aux services publics, il prévoit que les règles de concurrence ne s'appliqueront aux entreprises chargées de la gestion des services d'intérêt économique général que dans la mesure où elles ne feront pas échec à l'accomplissement de leurs missions.
Vous savez, madame Borvo, que l'article 345 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit que les traités n'ont pas à préjuger le régime de propriété des entreprises dans les États membres. Comme l'a également souligné le rapporteur de la commission des lois, il y a, dans le traité de Lisbonne, une innovation concernant le protocole sur les services publics, selon laquelle les dispositions des traités ne portent en aucune manière atteinte à la compétence des États membres pour fournir, faire exécuter et organiser des services non économiques d'intérêt général.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 16, j'indiquerai que l'indépendance de la Banque centrale européenne ne constitue pas une nouveauté introduite par le biais du traité de Lisbonne, puisque l'article 108 du traité instituant la Communauté européenne définit et encadre cette indépendance. Ce principe n'est en rien contraire à la Constitution. Le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion, dans le cadre de l'examen d'autres traités, de statuer sur ce point.
À mon sens, le traité de Lisbonne consacre plutôt, dans ce domaine, une avancée, puisqu'il reconnaît l'existence de l'Eurogroupe et le dote d'une présidence stable. Il permettra aux États de la zone euro de prendre seuls les décisions qui les concernent directement. Enfin, il tend à renforcer la visibilité internationale de la zone euro, notamment dans ses relations avec ses principaux partenaires sur le plan monétaire : les États-Unis, la Chine et le Japon.
Pour ces raisons, à défaut d'un retrait de cet amendement, nous émettrons un avis défavorable.
Enfin, en ce qui concerne l'amendement n° 18, il ne nous paraît pas utile, outre les raisons de fond qui ont été évoquées par M. Gélard, puisque le Conseil constitutionnel n'a pas considéré que le nouveau préambule du traité sur l'Union européenne était contraire à la Constitution, en particulier au principe de laïcité, qui figure à son article 1er.
M. Michel Charasse. Il ne reste plus qu'à prier !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Prions !
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. Au demeurant, il convient de rappeler que l'article 4 du traité sur l'Union européenne prévoit que l'Union européenne respecte l'égalité des États membres devant les traités, ainsi que leur identité nationale inhérente à leurs structures fondamentales, politiques et constitutionnelles. La nôtre comprend la laïcité.
M. Michel Charasse. La fille aînée de l'Église !
M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État. Pour toutes ces raisons, nous serions défavorables à cet amendement, s'il devait ne pas être retiré.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. J'ai tenu à poser la question des réserves aujourd'hui, pour les raisons que j'ai exposées tout à l'heure.
Pour gagner du temps à cette heure tardive, je retire les deux amendements que j'avais déposés aux articles 1er et 2. Mais je les reprendrai la semaine prochaine quand nous examinerons le projet de loi autorisant la ratification du traité parce que, en réalité, mes suggestions doivent figurer dans le projet de loi d'autorisation pour l'élection du Parlement européen. Je renvoie les ministres à la lecture de ce texte. C'est d'ailleurs ce que m'avait dit à l'époque M. Barnier, la décision du Conseil constitutionnel sera visée dans la loi d'autorisation du traité comme en 1977.
Mme la présidente. Les amendements nos 3 et 4 sont retirés.
Je mets aux voix l'amendement n° 6.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
À compter de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé le 13 décembre 2007, le titre XV de la Constitution est ainsi modifié :
1° Il est intitulé : « De l'Union européenne » ;
2° Les articles 88-1 et 88-2 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 88-1. - La République participe à l'Union européenne constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007.
« Art. 88-2. - La loi fixe les règles relatives au mandat d'arrêt européen en application des actes pris par les institutions de l'Union européenne. » ;
3° Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 88-4, les mots : « les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne comportant des dispositions de nature législative » sont remplacés par les mots : « les projets d'actes législatifs européens ainsi que les autres projets ou propositions d'actes de l'Union européenne comportant des dispositions qui sont du domaine de la loi » ;
4° Dans l'article 88-5, les mots : « et aux Communautés européennes » sont supprimés ;
5° Après l'article 88-5, sont ajoutés deux articles 88-6 et 88-7 ainsi rédigés :
« Art. 88-6. - L'Assemblée nationale ou le Sénat peuvent émettre un avis motivé sur la conformité d'un projet d'acte législatif européen au principe de subsidiarité. L'avis est adressé par le président de l'assemblée concernée aux présidents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission européenne. Le Gouvernement en est informé.
« Chaque assemblée peut former un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne contre un acte législatif européen pour violation du principe de subsidiarité. Ce recours est transmis à la Cour de justice de l'Union européenne par le Gouvernement.
« À ces fins, des résolutions peuvent être adoptées, le cas échéant en dehors des sessions, selon des modalités d'initiative et de discussion fixées par le règlement de chaque assemblée.
« Art. 88-7. - Par le vote d'une motion adoptée en termes identiques par l'Assemblée nationale et le Sénat, le Parlement peut s'opposer à une modification des règles d'adoption d'actes de l'Union européenne dans les cas prévus, au titre de la révision simplifiée des traités ou de la coopération judiciaire civile, par le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007. »
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Josselin, sur l'article.
M. Charles Josselin. En dépit de l'heure tardive, je voudrais évoquer les dispositions de l'article 2 qui concernent le rôle des parlements nationaux, question à laquelle j'ai consacré de nombreux efforts.
J'ai eu l'honneur de présider pendant huit ans la délégation de l'Assemblée nationale aux Communautés européennes. À l'époque, nous avions déploré l'extrême difficulté pour le Parlement d'avoir connaissance de documents qui étaient déjà à la disposition du Gouvernement. J'avais même déposé une proposition de loi - qui a d'ailleurs été adoptée - pour obliger le Gouvernement à nous communiquer à temps ces informations.
M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes a insisté, devant la commission des lois, sur le rôle de lien entre démocratie européenne et démocratie nationale que les parlements nationaux seraient appelés à jouer, notamment avec le contrôle de la subsidiarité. Il affirme que le lien est établi. Mais la liaison va-t-elle se faire ? Je voulais soulever cette question à l'occasion de la discussion de cet article, en rappelant l'extraordinaire exigence que représente pour le parlement national ce rôle de surveillance du respect de la subsidiarité.
Les délégations de l'Assemblée nationale et du Sénat font l'essentiel de ce travail, mais il faudra qu'elles disposent de moyens à la mesure de cette responsabilité. Les équipes en place font du bon travail, mais les choses sont singulièrement compliquées par une législation européenne qui, d'une part, ne cesse de se densifier et de se techniciser, et qui, d'autre part, enjambe allégrement la frontière entre domaine législatif et domaine règlementaire.
Il faudra aussi que les parlementaires soient présents. Je ne peux - hélas ! - que constater qu'il en va de même à la délégation du Sénat comme à celle de l'Assemblée nationale il y a quelques années : nombreux sont ceux qui veulent en faire partie, mais peu sont ceux qui s'y investissent.
Il faudra aussi développer la coopération interparlementaire - la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires et européennes des parlements de l'Union européenne, que nous avons créée en son temps, peut certainement y contribuer -, mais aussi la coopération avec le Parlement européen. Je regrette que les occasions de rencontre entre parlementaires nationaux et européens soient rares. Des initiatives en ce sens doivent-elles être prises par l'Assemblée nationale et le Sénat ou par le Gouvernement ? En tout cas, cette absence de relations est extrêmement préjudiciable.
Enfin, il faudra que le Gouvernement ait la volonté d'entretenir un dialogue constant avec le Parlement, et plus particulièrement avec ses délégations. L'implication du Parlement - et je m'adresse à mon collègue Jean-Luc Mélenchon -, c'est aussi l'implication du peuple au travers de ses représentants. Elle est largement dépendante de la bonne application de la règle européenne et de sa transposition dans le droit national. C'est parce que le Parlement est trop souvent totalement absent du vote mais surtout de la préparation de la norme européenne qu'il est si difficile ensuite de la transposer.
Le projet de loi constitutionnelle prévoit que le Gouvernement a l'obligation de transmettre les actes législatifs européens et les autres propositions lorsqu'ils sont présentés devant le Conseil. Mais, monsieur le secrétaire d'État, c'est déjà trop tard ! Au moment où les projets arrivent au conseil des ministres, l'affaire est bouclée. Il faut que nous anticipions sur la préparation de ces textes. Nous y sommes prêts, et une relation de confiance, je le répète, solide entre Parlement et Gouvernement devrait nous aider à jouer ce rôle. Nous devons gagner du temps et être prévenus au moins en même temps que les lobbyistes de Bruxelles.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Monsieur Josselin, je suis d'accord avec vous pour l'essentiel. La question des parlements nationaux a été abordée par mon collègue Jean-Claude Peyronnet et moi-même dans deux rapports d'information dont les conclusions ont été intégralement reprises par le comité Balladur. Ce sujet sera vraisemblablement de nouveau évoqué lors du débat qui se tiendra au printemps prochain.
Mme la présidente. J'ajoute que la conférence des présidents a porté une attention toute particulière, à deux reprises, à ces rapports qui présentent un grand intérêt.
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je donne très volontiers acte à mon collègue Charles Josselin que l'implication des parlements dans le débat européen est effectivement l'une des formes de l'implication populaire.
Je n'ai peut-être pas très bien compris, ou quelque chose m'aura échappé, mais j'ai un doute sur la nouveauté que constituerait ce contrôle plus étroit du principe de subsidiarité par les parlements nationaux. M. Karoutchi nous a effectivement ici récemment affirmé, sans que nous puissions le contredire, qu'un grand progrès avait été effectué.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Un droit de veto est même prévu.
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous allez peut-être nous le prouver, monsieur le président de la commission. Ma lecture n'est pas la même.
Selon moi, le contrôle s'exerce de la manière suivante : il faut que neufs parlements concluent que le principe de subsidiarité est mis en cause. Une fois leurs observations déposées, la Commission peut maintenir, modifier, ou amender la disposition en question.
Aurais-je mal compris ? Le contrôle est-il plus important ? Mais si ce n'est que cela, je regrette, mais ce n'est vraiment pas grand-chose ! Ces neuf États finissent par s'accorder sur une position qui porte uniquement sur le non-respect du principe de subsidiarité, car, sur le contenu du texte, le droit d'amendement des parlements nationaux est toujours égal à zéro.
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
L'amendement n° 9, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe 2 de l'article 42 du traité sur l'Union européenne ne s'appliquent pas à la France.
L'amendement n° 11, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe 3 de l'article 42 du traité sur l'Union européenne ne s'appliquent pas à la France.
L'amendement n° 13, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, les dispositions du paragraphe 7 de l'article 48 du traité sur l'Union européenne ne s'appliquent pas à la France.
L'amendement n° 15, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, les dispositions de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne s'appliquent pas à la France.
L'amendement n° 17, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, les dispositions de l'article 282 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne s'appliquent dans le respect de l'article 3 de la Constitution.
L'amendement n° 19, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat, M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour l'article 88-1 de la Constitution par une phrase ainsi rédigée :
Cependant, la participation de la France à l'Union européenne s'effectue dans le respect du principe de laïcité posé à l'article 1er de la Constitution.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils sont défendus.
Mme la présidente. La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 7.
(L'amendement n'est pas adopté.)