M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement est favorable à cet amendement sur le fond. Néanmoins, il va vous faire une proposition.
Vous souhaitez réformer le comité consultatif pour la répression des abus de droit, en laissant la charge de la preuve à l'administration, y compris lorsque le comité a émis un avis favorable à cette thèse. Vous voulez renforcer la composition du comité par la présence de professionnels de la vie des affaires. Vous voulez affirmer le caractère contradictoire de la procédure devant ce même comité.
Nous partageons évidemment ce souci d'équilibre et de renforcement de l'efficacité du comité.
Comme vous le savez, la jurisprudence du Conseil d'État a beaucoup évolué ces derniers temps, puisqu'elle reconnaît désormais deux types de répression pour l'abus de droit : d'une part, la répression des abus de droit stricto sensu ; d'autre part, la possibilité, pour l'administration, de contester certains actes ou montages sur le terrain de ce qu'un certain nombre de spécialistes nomment la fraude à la loi.
Les garanties prévues dans le cadre de la procédure codifiée, notamment la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit, qui vous préoccupe, monsieur le rapporteur général, ne sont pas applicables aux situations susceptibles de relever de l'élargissement jurisprudentiel de la notion d'abus de droit à la notion de fraude à la loi.
De même, les sanctions sont différentes selon la nature de l'abus de droit poursuivi par l'administration.
Une telle extension de cette notion constitue l'un des objectifs du Gouvernement. J'ai donc demandé voilà peu de temps à Olivier Fouquet, ancien président de la section des finances du Conseil d'État, de conduire une réflexion d'ensemble sur la sécurisation juridique des relations entre l'administration fiscale et les contribuables. Évidemment, les procédures que nous évoquons sont au coeur de ces réflexions, et M. Fouquet procède actuellement aux consultations indispensables dans ce domaine très sensible.
Même si le Gouvernement partage l'essentiel de vos conclusions, monsieur le rapporteur général, il me paraît donc prématuré de légiférer aujourd'hui sur ce sujet.
Mais je voudrais aller plus loin : M. Fouquet fera un certain nombre de propositions d'ici à janvier ou février prochain, ce qui pourrait donner lieu, si vous vous associez à ce projet, à la rédaction d'une proposition de loi plus générale sur ces notions extrêmement importantes, tels le rôle nouveau du comité pour la répression des abus de droit, l'extension de ses pouvoirs et sa composition. Dès que le rapport sera en cours de finalisation, nous serions prêts, si vous souhaitez vous joindre à ce travail, à favoriser l'émergence d'une proposition de loi dans ce domaine.
M. le président. L'amendement n° 2 est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le ministre, je me réjouis de cet échange, qui vient en quelque sorte prolonger l'initiative de la commission des finances. Je serai bien entendu heureux de rencontrer dès que possible M. Olivier Fouquet, pour aborder les thèmes que vous avez cités.
Notre initiative doit sans doute être replacée dans un cadre un peu plus large. Outre le comité consultatif pour la répression des abus de droit, d'autres instances extérieures proches de l'administration seraient peut-être susceptibles de faire l'objet d'une telle réflexion. Selon moi, nous pouvons réellement progresser, en termes à la fois d'efficacité et d'équité, pour faire en sorte que ces deux aspects se rejoignent.
Il me semble important, monsieur le ministre, que ce travail puisse se dérouler dans les prochains mois, car la manière dont les procédures fiscales sont administrées constitue aussi - nous n'y faisons pas suffisamment attention -un facteur d'attractivité. Nous sommes en effet le plus souvent focalisés sur la définition de l'impôt, sur son taux et son assiette, pour dresser le tableau de la compétitivité de notre fiscalité. Mais le fonctionnement des procédures, l'administration de l'impôt, la rectification des anomalies, les liens susceptibles d'apparaître entre l'administration et les professionnels représentent aussi, me semble-t-il, un facteur extrêmement appréciable de compétitivité.
Dès lors que le travail de M. Fouquet s'inscrit bien dans cette logique et que l'échéance fixée est proche, je pense que la commission peut retirer cet amendement, pour entrer dans ce processus susceptible de déboucher, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, sur une proposition de loi. Ce serait là un excellent moyen de faire avancer les idées que j'ai exprimées.
M. le président. L'amendement n° 51 rectifié, présenté par MM. Fouché, Gaillard et Trucy, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 298 septies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2008, le taux de 2,1 % prévu au premier alinéa est applicable aux éditeurs de presse de jeux et de loisirs. »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
«Les pertes de recettes pour l'État sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ».
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy. Je souhaite, par cet amendement, attirer l'attention de M. le ministre sur la situation de la presse de jeux, non pas celle qui offre des jeux, mais celle qui communique sur les jeux.
Ce secteur est confronté à une baisse d'activité en volume et en valeur, consécutive à une forte concurrence des éditeurs étrangers, dont l'activité est beaucoup plus développée, et à l'arrivée du numérique.
Seuls une gestion rigoureuse et dynamique et le lancement de nouveaux produits en France et sur les marchés à l'exportation permettront aux entreprises françaises de résister. Or celles-ci sont handicapées par le taux de TVA de 19,6 % qui est appliqué en France aux magazines de jeux, alors que la plupart des produits de presse bénéficient d'un taux réduit ou super-réduit et que la quasi-totalité des États membres de la Communauté européenne appliquent des taux bien inférieurs.
Cet amendement vise donc à appliquer le taux de TVA super-réduit aux éditeurs de presse de jeux et de loisirs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je comprends bien la sollicitude des auteurs de l'amendement pour ces magazines, mais la mesure préconisée a un coût budgétaire. Par ailleurs, je m'interroge sur la procédure communautaire qu'il faudrait appliquer. En effet, celle-ci ne semble pas tout à fait respectée en l'espèce.
J'imagine donc qu'il s'agit plutôt d'un amendement d'appel destiné à être retiré...
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le taux super-réduit de TVA de 2,1 % est destiné à la presse. Les éditeurs de jeux ne relèvent en aucun cas de la presse, puisqu'ils ne fournissent aucune information. Or il n'est pas envisagé d'étendre à d'autres secteurs ce taux super-réduit, dont la presse bénéficie pour des raisons économiques bien connues.
Par ailleurs, une telle mesure poserait probablement un problème sur le plan communautaire, comme vient de le dire M. le rapporteur général.
M. le président. L'amendement n° 51 rectifié est-il maintenu, monsieur Trucy ?
M. François Trucy. Non, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 51 rectifié est retiré.
Article 16
I. - Après l'article 1651 G du code général des impôts, sont insérés cinq articles 1651 H, 1651 I, 1651 J, 1651 K, 1651 L ainsi rédigés :
« Art. 1651 H. - 1. Il est institué une Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.
« Cette commission est présidée par un conseiller d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État. Le président de la commission peut être suppléé par un magistrat administratif nommé dans les mêmes conditions. Elle comprend en outre trois représentants des contribuables et deux représentants de l'administration ayant au moins le grade d'inspecteur départemental. Pour les matières mentionnées aux articles 1651 I et 1651 J, l'un des représentants des contribuables est un expert-comptable.
« Le président a voix prépondérante.
« 2. Cette commission est compétente pour les litiges relatifs à la détermination du bénéfice ainsi que du chiffre d'affaires des entreprises qui exercent une activité industrielle ou commerciale et dont le chiffre d'affaires hors taxes excède 50 000 000 € s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou de 25 000 000 € s'il s'agit d'autres entreprises.
« Art. 1651 I. - I. - Pour la détermination du bénéfice industriel et commercial et du chiffre d'affaires, les représentants des contribuables, autres que l'expert comptable, de la commission nationale visée à l'article 1651 H sont désignés par l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie.
« II. - Le contribuable peut demander que l'un des représentants des contribuables soit désigné par une organisation ou un organisme professionnel ou interprofessionnel, national, régional ou local de son choix. Ce représentant doit être membre de cette organisation ou de cet organisme ou, à défaut, y exercer des fonctions salariées.
« Art. 1651 J. - Pour l'examen des différends relatifs à la déduction des rémunérations visées au 1° du 1 de l'article 39 ou à l'imposition des rémunérations visées au d de l'article 111, les représentants des contribuables de la commission nationale visée à l'article 1651 H comprennent deux membres désignés par l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie et un salarié désigné par les organisations ou organismes nationaux représentatifs des ingénieurs et des cadres supérieurs.
« Art. 1651 K. - Pour la détermination de la valeur vénale retenue pour l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée, dans le cas prévu au 4° du I de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, la commission comprend par dérogation à l'article 1651 H du présent code, outre le président, trois agents de l'administration, un notaire et trois représentants des contribuables.
« Les représentants des contribuables sont désignés respectivement par les fédérations nationales des syndicats d'exploitants agricoles, les organisations ou organismes représentatifs des propriétaires d'immeubles bâtis et par l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie.
« Le contribuable peut demander que l'un des représentants des contribuables soit désigné par une organisation ou un organisme professionnel ou interprofessionnel, national, régional ou local de son choix. Ce représentant doit être membre de cette organisation ou de cet organisme ou, à défaut, y exercer des fonctions salariées.
« Art. 1651 L. - Lorsque des rehaussements fondés sur les mêmes motifs sont notifiés à des sociétés membres d'un groupe au sens de l'article 223 A, chaque contribuable peut demander la saisine de la commission nationale mentionnée à l'article 1651 H, si au moins l'une de ces sociétés réunit les conditions fixées au 2 de cet article. La commission nationale est alors compétente sur l'ensemble des désaccords persistant sur les rehaussements notifiés à ce contribuable et relevant de ses attributions.
« Les contribuables dont les bases d'imposition ont été rehaussées en vertu du d de l'article 111 peuvent demander la saisine de la commission nationale visée à l'article 1651 H si l'entreprise versante relève de cette dernière. »
II. - Dans l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, après les mots : « l'article 1651 du code général des impôts, », sont insérés les mots : « soit de la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 H du même code, ».
III. - Après l'article L. 59 B du même livre, il est inséré un article L. 59 C ainsi rédigé :
« Art. L. 59 C. - La Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 H du code général des impôts intervient pour les entreprises qui exercent une activité industrielle et commerciale sur les désaccords en matière de bénéfices industriels et commerciaux et de taxes sur le chiffre d'affaires dans les mêmes conditions que celles définies à l'article L. 59 A. »
IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 60 du même livre, après les mots : « la commission départementale », sont insérés les mots : « ou nationale ».
V. - Dans l'article L. 136 du même livre, après les mots : « du code général des impôts », sont insérés les mots : « ou la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 H du même code ».
VI. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 190 du même livre, après les mots : « la commission départementale », sont insérés les mots : « ou nationale ».
VII. - L'article L. 250 du même livre est ainsi rédigé :
« Art. L. 250. - Les demandes présentées par les contribuables en vue d'obtenir la remise des majorations prévues par l'article 1729 du code général des impôts sont soumises pour avis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ou à la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsque ces majorations sont consécutives à des rectifications relevant de la compétence de l'une ou l'autre de ces commissions, telle qu'elle est définie aux articles L. 59, L. 59 A et L. 59 C du présent livre. »
VIII. - Un décret précise les conditions d'application du présent article.
IX. - Les I à VII sont applicables aux propositions de rectifications adressées à compter du 1er juillet 2008.
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 16 est très utile ! On ne sait jamais ce qui peut se passer !
M. Bernard Vera. L'article 16 vise à créer une Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires concernant de manière spécifique les plus grandes entreprises.
Pour l'heure, nous sommes dotés de commissions départementales, dont l'activité est d'ailleurs relativement réduite, puisqu'elle ne porte, chaque année, que sur 4 000 dossiers en procédure précontentieuse, chiffre qu'il convient de rapprocher des 2,5 millions d'entreprises que compte notre pays.
La commission nationale dont il est question dans cet article se préoccuperait des plus grandes entreprises, dont le comportement fiscal est suivi, entre autres, par des directions spécialisées - la DVNI, la direction des vérifications nationales et internationales, et la DGE, la direction des grandes entreprises -, puisque leur chiffre d'affaires devra excéder un seuil élevé.
Si l'on examine l'activité des commissions départementales, ce sont moins de 100 entreprises qui ont saisi les commissions en précontentieux. On peut donc se demander quelle est l'utilité d'une structure de « concertation », où les contribuables disposent d'ailleurs de la présence de « professionnels » de l'expertise comptable, dont le champ d'activité serait aussi réduit. Mais peut-être l'objectif visé est-il autre !
Il nous semble en effet que, derrière la création de la commission nationale, peuvent se profiler non seulement la mise en cause de l'action des directions fiscales spécialisées dans les grands comptes, mais aussi la constitution d'une jurisprudence spécifique de plus en plus guidée par l'avis de la commission nationale.
En fait, tout se passe comme si l'on créait les conditions d'une fiscalité au service exclusif des contribuables, avant de mettre en oeuvre le principe de juste contribution aux charges publiques.
S'agissant des décisions prévisibles de la commission nationale, la rédaction de l'article 16 ne nous rassure pas. S'il est tout à fait compréhensible de procéder à un audit des pratiques des services fiscaux, mettre certains contribuables en situation de disposer d'un traitement fiscal sur mesure, c'est autre chose ! C'est ce que nous refusons au nom du principe d'égalité entre contribuables.
Telle est la raison pour laquelle nous proposons, mes chers collègues, de supprimer l'article 16.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne partage pas l'analyse de M. Vera. Elle observe en effet que les commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires remportent, en tant qu'instances préjuridictionnelles, un vrai succès et qu'elles développent leurs activités, ce qui influe favorablement les relations entre l'administration, les contribuables et leurs conseils.
Dans ces conditions, elle ne voit pas pourquoi le même phénomène ne se produirait pas au niveau national avec la création de la commission nationale, qui pourrait tirer conséquence de l'utilité des commissions départementales. Il s'agit en effet d'harmoniser les pratiques administratives, et pas seulement à l'égard des grandes entreprises, puisque le seuil d'intervention de la commission nationale est fixé à 25 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel pour les prestations de service et à 50 millions d'euros pour les autres entreprises. Il s'agit donc, à proprement parler, non pas de très grands groupes, mais d'entreprises moyennes et de grandes entreprises.
L'amendement de suppression de l'article 16 ne peut pas être accepté par la commission, qui souhaiterait donc son retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Il est réellement nécessaire de créer une commission nationale. On se rend compte en effet que la problématique des grandes entreprises est fréquemment très différente de celle des entreprises plus petites. Par ailleurs, les commissions départementales ne sont le plus souvent pas outillées pour répondre aux besoins spécifiques des grandes entreprises.
Il s'agit évidemment non pas de procurer des « avantages », mais, tout simplement, de placer les bonnes compétences au bon endroit. D'ailleurs, quand la direction générale des impôts a créé la direction des grandes entreprises, il s'agissait non pas d'un avantage octroyé aux grandes entreprises, mais d'une spécialisation des personnes en fonction des problèmes. Tel est l'objet de la création de cette commission.
Sous le bénéfice de ces explications, je souhaiterais, monsieur Vera, que vous retiriez cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. J'ai simplement une question à vous poser, monsieur le ministre.
Si j'ai bien compris, cette commission nationale fera pour les plus grosses entreprises ce que fait actuellement la commission départementale, ce qui signifie que cette commission nationale sera consultative. (M. le ministre acquiesce.) Comme l'article 16 n'apporte pas ces précisions...
M. Michel Charasse. Oui, mais l'exposé des motifs, ce n'est pas la loi !
Il vaudrait mieux que soit précisé au cours du débat que, comme la commission départementale, la commission nationale n'est que consultative.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Je confirme que la commission nationale, au même titre que la commission départementale, est de nature consultative.
M. Michel Charasse. Merci !
M. le président. L'amendement n° 56 est-il maintenu, monsieur Vera ?
M. Bernard Vera. Oui, monsieur le président !
M. le président. Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article additionnel après l'article 16
M. le président. L'amendement n° 175, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 103 A du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 103 B ainsi rédigé :
« Art. L. 103 B.- Les commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévues à l'article 1651 du code général des impôts, les commissions départementales de conciliation prévues à l'article 1653 A du code général des impôts et la commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue par l'article 1651 H du code général des impôts peuvent solliciter, à la demande du contribuable et aux frais de celui-ci, toute personne dont l'expertise est susceptible de l'éclairer.
« Les commissions visées au premier alinéa peuvent communiquer à cette personne, sans méconnaître la règle du secret professionnel, les renseignements destinés à lui permettre de remplir sa mission.
« Les personnes consultées sont tenues au secret professionnel dans les conditions prévues par l'article L. 103. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lors de la discussion des articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances initiale pour 2008, nous avons examiné un amendement de nos collègues Michel Houel et Colette Mélot, visant la possibilité de recourir à des expertises extérieures en matière d'évaluation des entreprises pour les besoins de la fiscalité des transmissions.
Estimant alors que cette idée méritait d'être approfondie, la commission a émis le souhait que la rédaction de la disposition soit améliorée d'ici au débat relatif au collectif budgétaire.
Ce débat ayant lieu aujourd'hui, nous soumettons au Sénat l'amendement en question, avec une rédaction améliorée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je veux souligner qu'il s'agit là d'une réforme importante, qui permettra de franchir un grand pas dans les relations entre les contribuables et les administrations, et je tiens à en remercier particulièrement M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 175.
M. Bernard Vera. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 16.
Article 16 bis
I. - Après l'article L. 1618-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un chapitre IX ainsi rédigé :
« CHAPITRE IX
« Dispositions financières relatives aux hippodromes
« Art. L. 1618-3. - Les communes et leurs groupements qui disposent d'un hippodrome bénéficient d'un prélèvement de 0,1 % du produit des paris, engagés en pari mutuel sur l'hippodrome et hors hippodrome lors des courses hippiques organisées sur leur territoire, dans la limite d'un plafond de 500 000 €. »
II. - Un décret fixe les modalités d'application du I.
III. - La création de ce nouveau prélèvement ne se fait pas au détriment des finances de l'État. L'ajustement portera sur le retour aux parieurs.
M. le président. L'amendement n° 114 rectifié ter, présenté par MM. A. Dupont, Arthuis, Trucy, Lambert, Revet et Grillot, Mmes Panis et Gourault et M. J. Blanc, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy. L'article 16 bis, introduit par l'Assemblée nationale, instaure, au bénéfice des communes et de leurs groupements disposant d'un hippodrome sur leur territoire, un prélèvement supplémentaire de 0,1 % sur le produit des paris engagés en pari mutuel sur l'hippodrome, ou PMH, et hors hippodrome, soit les paris mutuels urbains, ou PMU, effectué sur la part revenant aux parieurs.
Cet amendement vise à supprimer cet article, car le dispositif proposé nous paraît inapproprié.
Il est inapproprié, tout d'abord, pour des raisons d'opportunité : la France négocie actuellement avec la Commission européenne les modalités de l'ouverture des paris en ligne, dans le cadre d'une procédure d'infraction - monsieur le ministre, vous en savez quelque chose, puisque c'est l'un des dossiers les plus délicats que vous avez à gérer.
Or la Commission européenne et la Cour de cassation française reprochent notamment à la France de maintenir « sous couvert d'ordre public » - nous ne prenons pas cet argument au sérieux - un monopole, dont l'objectif est d'abonder les finances publiques. Dans ces conditions, ce nouveau prélèvement, illustrant le reproche fait par la Commission à la France, constituerait, dans un premier temps, un signal contre-productif dans ce contexte.
Le dispositif proposé est inapproprié, ensuite, pour des raisons d'équité entre les collectivités locales : en effet, alors que les conseils généraux et régionaux participent beaucoup plus souvent à la réalisation des hippodromes que les communes, ces dernières se verraient affecter des recettes pérennes, sans lien avec leur participation éventuelle aux investissements réalisés. Autrement dit, une commune qui n'apporterait pas son aide aux sociétés hippiques locales et n'engagerait pas de travaux sur les hippodromes recevrait néanmoins cette contribution. À cela, s'ajoute le problème, délicat à régler, du cas où l'hippodrome se situe sur le territoire de plusieurs communes.
Le dispositif proposé est inapproprié et contradictoire pour des raisons économiques : le niveau de prélèvement serait significatif par rapport à l'investissement qui a été consenti par l'État et la filière hippique, notamment en avril 2007, pour relancer efficacement l'activité des paris, affichant alors un recul inquiétant.
Il est inapproprié, enfin, pour des raisons de concurrence : cet article aurait pour effet d'encourager le parieur français en PMU ou PMH à fréquenter plutôt les sites de paris en ligne illégaux, dont les taux de retour proposés sont d'ores et déjà bien meilleurs, d'autant que les systèmes français ne sont pas les plus compétitifs à cet égard sur le plan mondial.
L'adoption de l'article 16 bis ne ferait que compliquer les choses.
Enfin, dès lors qu'une mission d'information sur le jeu vient d'être mise en place par le Gouvernement, il paraît pour le moins prématuré de créer un prélèvement avant qu'elle n'ait rendu ses conclusions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une question extrêmement délicate pour la commission des finances, qui, je m'empresse de le dire, ne s'est pas prononcée, les avis n'ayant été émis qu'à titre individuel.
Je dirai à titre personnel que les arguments du monde des courses et de l'élevage concernant cette contribution sur les paris, d'ailleurs très modeste et plafonnée, au bénéfice de la commune siège d'un hippodrome, ne me semblent pas fondés ; je ne vois en effet pas de lien juridique entre, d'une part, le droit communautaire et les négociations en cours sur le système des jeux dans son ensemble et, d'autre part, la contribution particulière visée par cet amendement. Il me semble que l'on fait un amalgame entre des choses de nature tout à fait différente.
Par ailleurs, je rappelle que, grâce à Alain Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, les activités de la filière équestre ont pu bénéficier du régime fiscal agricole. De ce fait, un certain nombre de communes ont vu disparaître les bases de taxe professionnelle dont elles disposaient. C'est bien là une réalité, et, si elle ne concerne pas les hippodromes, elle s'applique néanmoins à un domaine connexe.
En outre, il convient de préciser que l'implantation d'un hippodrome sur le territoire d'une commune entraîne des coûts pour cette dernière en termes de police municipale, de parkings, de voirie, autrement dit de toutes sortes de choses qui ne sont pas gratuites !
Aussi, l'idée du député Jacques Myard de faire bénéficier la commune d'un très modeste retour financier ne me paraît pas mauvaise.
Cela étant, je le répète, la commission des finances ne s'est pas prononcée sur cet amendement émanant de l'un de ses membres les plus expérimentés et respectés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Bricq. M. le ministre n'est pas neutre !
M. Éric Woerth, ministre. Monsieur Trucy, ayant une connaissance approfondie du sujet en tant que maire de Chantilly et, en même temps, ayant un intérêt dans cette affaire, je suis mal placé pour me prononcer sur ce point. Aussi, je m'en remettrai à la sagesse du Sénat, comme je m'en suis remis à celle de l'Assemblée nationale, lors de l'examen de l'amendement présenté par le député Jacques Myard, qui est lui-même président du groupe d'études sur le cheval au Palais-Bourbon.
Je souhaite néanmoins vous indiquer que je souscris aux propos tenus par M. le rapporteur général.
En effet, certaines collectivités - non pas la totalité d'entre elles - financent l'extérieur de l'hippodrome, mais aussi les frais de fonctionnement de ce dernier. Elles engagent parfois de fortes dépenses à ce titre, parce qu'elles considèrent que c'est une question de survie pour la filière économique que constituent les hippodromes.
Or, lorsque la filière des courses leur a quasiment mis un pistolet sur la tempe voilà quelques années, en leur disant : « ou vous payez, ou vous fermez »,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vrai !
M. Éric Woerth, ministre. ... elles ont accepté de payer pour sauver cet élément économique et culturel d'importance. En échange, dès lors qu'il y avait sur leur territoire une activité d'entraînement, elles ont bénéficié d'une part de taxe professionnelle.
À juste titre, Alain Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a, avec beaucoup d'intelligence, fait avancer les choses, avec l'accord des collectivités qui ont seulement souhaité, pour s'en sortir, un système dégressif de compensation sur quelques années. Je n'ai pas demandé, ni comme député ni comme ministre, qu'il soit mis fin à ce système. Aujourd'hui, il n'y a d'ailleurs plus de compensation. Il faut donc respecter ce qui avait été décidé à ce moment-là.
En même temps, il convient de ne pas perdre de vue le fait que le modèle économique des courses représente plusieurs milliards d'euros. L'idée de Jacques Myard consistait à en prendre 0,1% pour permettre non pas de réaliser un gain, mais uniquement de compenser les coûts à la charge des collectivités locales liés au système des courses.
En réalité, par ce biais, il s'agissait d'intéresser les territoires à leur hippodrome. En effet, il est un peu curieux de constater que les collectivités sur le territoire desquelles ces hippodromes, qui sont la source de tant de milliards d'euros alimentant la filière des courses et les caisses de l'État, soient les seules - avec les propriétaires - à perdre de l'argent ! C'est en ce sens que le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
J'ajoute, monsieur le sénateur, que la proposition de Jacques Myard est sans lien avec les négociations que nous menons à l'échelon européen sur le système des jeux, et je suis bien placé pour le savoir, étant en première ligne à cet égard avec le commissaire McCreevy.
Nous avons d'ailleurs chargé Bruno Durieux de mener une mission sur ce sujet, et nous allons l'accompagner, avec la volonté de conserver les intérêts français, pour faire en sorte que le jeu, que vous connaissez parfaitement bien, continue à s'inscrire dans un cadre déontologique et de sécurité conforme à nos choix, tout en prenant en compte l'extension nécessaire due à l'arrivée d'Internet et des paris en ligne. Nous nous efforçons d'instaurer un équilibre qui soit, à l'évidence, favorable à la France. Je ne crois pas que cela ait le moindre rapport avec la proposition de Jacques Myard votée par l'Assemblée nationale.
Cela étant, je m'en remets bien évidemment à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, M. le rapporteur général vous a indiqué qu'il y avait, en effet, des différences d'appréciation au sein de la commission des finances.
La disposition que nous examinons nous vient de l'Assemblée nationale, sur l'initiative de notre excellent collègue Jacques Myard, qui a constitué, à la fin des années quatre-vingt, une association des maires ayant le privilège d'avoir un champ de courses sur le territoire de leur commune.
À l'époque, il dénonçait l'avantage dont bénéficiait la ville de Paris, qui percevait 1 % sur tous les jeux des hippodromes parisiens, en application d'une ordonnance de 1945, qui avait vu le jour bien avant le tiercé et à une époque où le pari mutuel n'était pas ce qu'il est devenu. M. Michel Charasse, alors ministre chargé du budget, avait trouvé l'idée excellente et abrogé cette ordonnance.
M. Michel Charasse. À la demande du président Dailly !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. De ce fait, la ville de Paris avait alors perdu 400 millions de francs. On avait donc nettoyé le système !
Aujourd'hui, Jacques Myard nous propose une mesure qui, en soi, est sympathique pour toutes les communes ayant un champ de courses sur leur territoire. Je comprends les contraintes qui en résultent pour elles et, à cet égard, j'ai de la reconnaissance pour les maires de Chantilly, de Compiègne et de Maisons-Laffitte.