Sommaire

PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André

1. Procès-verbal

2. Décision du Conseil constitutionnel

3. Demandes d'autorisations de missions d'information

4. Loi de finances pour 2008. - Suite de la discussion d'un projet de loi

Santé

MM. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial de la commission des finances ; Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Bernard Murat, François Autain, Mme Nathalie Goulet, M. Jean-Pierre Michel, Mme Marie-Thérèse Hermange, M. Jean-Pierre Godefroy.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

État B

Amendement n° II-6 de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Retrait.

Adoption des crédits.

Sport, jeunesse et vie associative

Rappel au règlement : M. Jean-Pierre Michel, Mme la présidente.

MM. Michel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances ; Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean-François Voguet, Jean Boyer, Robert Tropeano, Alain Dufaut, Claude Biwer, Jean-Marc Todeschini, David Assouline, Yannick Bodin.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.

État B

Amendement n° II-2 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le secrétaire d'État, Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Jean-François Voguet, Jean-Marc Todeschini, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. - Adoption.

Amendement n° II-184 de M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. - MM. Bernard Murat, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, le secrétaire d'État, Jean-Marc Todeschini, Jean-François Voguet, le président de la commission, le président de la commission des affaires culturelles. - Adoption.

Adoption des crédits modifiés.

Article 51 ter 

Amendement no II-268 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'État, le rapporteur spécial. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles 51 quater et 51 quinquies. - Adoption

Suspension et reprise de la séance

5. Dépôt de rapports du Gouvernement

6. Loi de finances pour 2008. - Suite de la discussion d'un projet de loi

Recherche et enseignement supérieur

MM Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances ; Christian Gaudin, rapporteur spécial de la commission des finances ; Pierre Laffitte, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Jean Boyer, en remplacement de M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Jean Boyer, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

MM. Pierre Laffitte, Serge Lagauche, André Ferrand, Ivan Renar, Georges Othily, David Assouline, Jean-François Voguet, Yannick Bodin, Jean-Marc Todeschini.

Mme la ministre.

Rappels au règlement

MM. David Assouline, Ivan Renar, Mme le ministre, MM. Yannick Bodin, Jean-Marc Todeschini, Mme la présidente.

État B

Amendement n° II-13 de la commission. - M. Christian Gaudin, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Retrait.

Amendement n° II-14 de la commission. - M. Philippe Adnot, rapporteur spécial ; Mme la ministre, MM. Pierre Laffitte, Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Adoption.

Amendement n° II-192 rectifié de M. Jean Bizet. - MM. Denis Detcheverry, Christian Gaudin, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Retrait.

Amendement n° II-194 rectifié de M. Christian Gaudin. - MM. Christian Gaudin, Philippe Adnot, rapporteur spécial ; Mme la ministre. - Adoption.

Adoption des crédits modifiés.

Articles 46 à 47 bis. - Adoption

Ville et logement

MM. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Bariza Khiari, MM. Marcel-Pierre Cléach, Jacques Mahéas.

Suspension et reprise de la séance

MM. Gérard Delfau, Jean Desessard, Mme Odette Terrade.

Mmes Christine Boutin, ministre du logement et de la ville ; Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.

État B

Amendement n° II-129 du Gouvernement. - Mme la ministre, M. le rapporteur spécial. - Adoption.

Amendement n° II-189 de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. - MM. Jean-Pierre Caffet, le rapporteur spécial, Mmes la ministre, Odette Terrade, M. Jean Desessard. - Rejet.

Amendement n° II-188 rectifié de M. Thierry Repentin. - MM. Thierry Repentin, le rapporteur spécial, Mme la ministre, M. Jean Desessard. - Rejet.

Amendement n° II-191 rectifié bis de M. Thierry Repentin. - MM. Thierry Repentin, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial ; Mmes la ministre, Odette Terrade. - Rejet.

Amendement n° II-47 rectifié de la commission. - M. le rapporteur spécial. - Retrait.

Amendement n° II-115 rectifié bis de M. Philippe Dallier. - M. Philippe Dallier ; Mme la ministre, MM. le rapporteur spécial, Jean Desessard, Mme Odette Terrade, M. Pierre André. - Adoption.

Amendement no II-158 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. - MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mmes la ministre, Odette Terrade. - Adoption.

Amendement n° II-183 rectifié bis de M. René Beaumont. - Mme Catherine Dumas, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Retrait.

Mme Odette Terrade.

Adoption des crédits modifiés.

Article additionnel avant l'article 60

Amendement n° II-187 de M. Thierry Repentin. - MM. Jean-Pierre Caffet, le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Rejet.

Article 60

Amendement n° II-177 de Mme Odette Terrade ; amendements identiques nos II-65 de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, et II-190 de M. Thierry Repentin. - Mme Odette Terrade, MM. Thierry Repentin, Jean-Pierre Caffet, le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Rejet de l'amendement n° II-177 ; adoption des amendements nos II-65 et II-190 rédigeant l'article.

Articles additionnels après l'article 60

Amendement n° II-156 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. - M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre, M. Thierry Repentin, Mme Odette Terrade, M. Jean Desessard. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° II-157 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. - MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° II-178 de Mme Odette Terrade. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Rejet.

Amendement n° II-180 de Mme Odette Terrade. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre, MM. Thierry Repentin, Gérard Delfau. - Rejet, par scrutin public.

Amendement n° II-181 de Mme Odette Terrade. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Rejet.

Article 61. - Adoption  

Articles additionnels après l'article 61

Amendement n° II-44 de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Retrait.

Amendement n° II-45 de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme la ministre, M. Thierry Repentin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° II-46 rectifié de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° II-66 de M. Pierre André, rapporteur pour avis. - MM. Pierre André, rapporteur pour avis ; le rapporteur spécial, Mme la ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

7. Transmission d'un projet de loi

8. Dépôt d'une proposition de loi

9. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

10. Dépôt d'un rapport

11. Ordre du jour

compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Décision du conseil constitutionnel

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel le texte d'une décision du Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi organique tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française.

Acte est donné de cette communication.

Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au Journal officiel, édition des lois et décrets.

3

Demandes d'autorisations de missions d'information

Mme la présidente. M. le président du Sénat a été saisi par les présidents des six commissions permanentes de demandes tendant à obtenir l'autorisation de désigner des missions d'information ayant pour objet de concourir à la mission de contrôle du Sénat.

Ces missions d'information pourraient se rendre dans les pays suivants :

- Pour la commission des affaires culturelles :

En Inde, pour y étudier l'organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche, notamment dans le secteur des nouvelles technologies ;

Au Brésil, dans le cadre de la préparation de l'année de la France au Brésil ;

- Pour la commission des affaires économiques :

En Russie, en vue d'étudier les fondements du dynamisme actuel de l'économie de ce pays ainsi que les enjeux énergétiques qu'il recèle ;

Au Japon, afin d'analyser les atouts de la deuxième économie mondiale ;

- Pour la commission des affaires étrangères :

Dans quatre pays des Balkans et en Russie, pour étudier l'évolution politique de cette région ;

Au Liban, au Darfour, au Tchad et en République centrafricaine, déplacements nécessités par l'actualité internationale ;

À New York, pour se rendre à l'Assemblée générale de l'ONU ;

- Pour la commission des affaires sociales :

En Polynésie, afin d'étudier la situation sanitaire et sociale dans ce territoire ;

Au Royaume-Uni et en Irlande, afin d'analyser l'organisation des services de santé et la politique familiale dans ces pays ;

Aux Pays-Bas, pour y étudier, dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la réforme du système d'assurance-maladie ;

- pour la commission des lois :

Au Canada, pour étudier les dispositifs d'évaluation de la dangerosité des délinquants et les conditions de la prise en charge des délinquants sexuels de ce pays ;

En Polynésie française, afin de préparer la réforme du régime communal de ce territoire ;

À Mayotte, pour anticiper une éventuelle demande d'évolution du statut de cette collectivité à l'issue des élections de son conseil général ;

En Europe et, le cas échéant, en Afrique, afin de préparer la présidence française de l'Union européenne ;

- et pour la commission des finances :

Au Brésil, pour y poursuivre l'étude des phénomènes de globalisation et, notamment, tenter de mieux appréhender ce pays en tant que puissance agricole de rang mondial.

Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par l'article 21 du règlement.

4

Loi de finances pour 2008

Suite de la discussion d'un projet de loi

Article 33 et Etat B (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Santé

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (nos 90 et 91).

Santé

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 33 et Etat B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après examen par l'Assemblée nationale, la mission ministérielle « Santé » rassemble près de 427,5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 425,7 millions d'euros de crédits de paiement, répartis en trois programmes d'importance inégale.

Cette présentation des crédits doit toutefois être fortement relativisée, pour trois raisons : d'abord, la mission ne comprend pas les crédits de personnel ; ensuite, les dépenses fiscales qui lui sont rattachées, d'un montant de 1,39 milliard d'euros, représentent trois fois les crédits budgétaires ; enfin, la mission apparaît à certains égards comme une mission « annexe » du budget de la sécurité sociale.

Je présenterai maintenant quelques observations sur les différents programmes.

Au sein du programme « Santé publique et prévention », les subventions accordées aux opérateurs - l'Institut national du cancer, l'INCA ; l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES ; et le GIP Drogues alcool tabac info service, ou DATIS - représentent plus d'un quart des crédits.

À l'exception de l'INPES, les opérateurs voient les subventions qui leur sont attribuées diminuer par rapport à la dotation prévue en loi de finances pour 2007. Leurs effectifs devraient également décroître, tout particulièrement ceux de l'INCA, qui fait l'objet d'une « reprise en main ».

Je regrette toutefois que, de manière globale, aucune donnée figurant dans les bleus budgétaires ne permette de disposer d'une vision consolidée de la situation des opérateurs, et je souhaiterais, madame la ministre, que des améliorations puissent être apportées sur ce point.

La lutte contre le cancer demeure la principale dépense du programme, puisqu'elle devrait mobiliser 56,4 millions d'euros en 2008, hors subventions accordées à l'INCA. On note cependant une diminution des crédits consacrés à cette action, alors que les crédits destinés à la lutte contre le VIH/SIDA, les crédits en faveur de la santé mentale et de la prévention du suicide, et les crédits affectés à la lutte contre la maladie d'Alzheimer augmentent.

Je souhaiterais toutefois disposer d'une vision consolidée des moyens mis en oeuvre par l'État et l'assurance maladie en ce domaine. L'instauration dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 d'une nouvelle franchise, qui devrait permettre de réaliser une économie de 850 millions d'euros, a pour objet d'accroître les financements en faveur de la lutte contre la maladie d'Alzheimer, du développement des soins palliatifs et de la lutte contre le cancer. Je souhaite donc, madame la ministre, que vous nous apportiez des précisions sur l'ensemble des financements destinés à ces actions : l'économie ainsi obtenue servira-t-elle effectivement à la lutte contre ces trois fléaux ?

À propos du programme « Offre de soins et qualité du système de soins », deux constats de fond s'imposent : d'une part, les crédits affectés à ce programme sont minimes par rapport aux dépenses incombant à l'assurance maladie ; d'autre part, les marges de manoeuvre du ministère apparaissent réduites pour ce qui concerne près de la moitié des crédits du programme, qui correspondent à la formation des médecins.

À terme, c'est la structure même de ce programme qui est en cause, comme l'a relevé un récent rapport du Comité interministériel d'audit des programmes ; nous aurons l'occasion d'y revenir tout à l'heure lors de l'examen de l'amendement que j'ai déposé au nom de la commission des finances.

Toujours à propos de ce programme « Offre de soins et qualité du système de soins », je formulerai deux observations plus ciblées.

D'une part, l'année 2008 s'annonce difficile pour la Haute autorité de santé, dont la subvention est maintenue à un niveau bas : 2,5 millions d'euros. Cela peut se révéler problématique dans la mesure où son fonds de roulement devrait être ramené à 13,3 millions d'euros à la fin de 2007. Or ses charges et ses effectifs ont connu une forte croissance, et l'article 29 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 prévoit une extension de ses compétences.

Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous nous apportiez des précisions sur la situation de la Haute autorité de santé. Envisagez-vous, le cas échéant, de compléter sa dotation par voie de fongibilité en cours d'année ?

D'autre part, je voudrais souligner la très forte croissance des effectifs des opérateurs de ce même programme « Offre de soins et qualité du système de soins », car elle mérite qu'on y prête attention. En effet, les opérateurs ne sauraient s'exempter des contraintes que l'État lui-même s'impose en consentant un effort pour parvenir à la maîtrise de ses effectifs. J'insiste, madame la ministre, pour que l'on suive attentivement cet aspect, car le risque existe d'un démembrement de ce programme en faveurs d'opérateurs qui ne semblent guère concernés par l'impératif actuel de maîtrise.

Concernant le programme « Drogue et toxicomanie », ma principale observation portera sur le positionnement délicat de ce programme au sein de la mission « Santé », comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner au cours des années passées. Le transfert des crédits du groupement d'intérêt public DATIS vers le programme « Santé publique et prévention » et la diminution globale des crédits du programme « Drogue et toxicomanie » conduisent à s'interroger sur la nécessité de maintenir un programme d'une si faible ampleur, dédié à une structure particulière. Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous nous fassiez part de votre analyse sur ce point.

Je voudrais enfin interpeller les services de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT, la justification au premier euro n'étant pas satisfaisante, c'est le moins que l'on puisse dire : elle est même parfois erronée. Je n'en ai pas tiré les conséquences, car des explications complémentaires m'ont été fournies, mais il est impératif qu'à l'avenir les crédits soient mieux justifiés.

Sous réserve de ces remarques et de l'adoption de l'amendement qu'elle présente, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d'approuver les crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après la présentation très complète des grands équilibres de la mission « Santé » que vient de faire notre collègue de la commission des finances, je limiterai mon propos à trois sujets qui ont plus particulièrement attiré l'attention de la commission des affaires sociales à l'occasion de l'examen du présent projet de budget.

En premier lieu, il est clair que 2008 sera une année de transition. En effet, la majorité des plans de santé publique mis en place en application de la loi du 9 mars 2004 sont parvenus à leur terme ou arriveront à échéance dans les prochains mois. Au demeurant, nous souhaitons qu'ils fassent chacun l'objet d'une évaluation approfondie avant que de nouveaux projets ne soient engagés.

Un plan, le plan Alzheimer, est toutefois prioritaire puisqu'un deuxième volet verra le jour dès l'année prochaine. L'objectif est de proposer au plus vite aux 900 000 malades et à leurs familles des solutions de prise en charge adaptées, mais aussi d'améliorer la prévention et le dépistage de la maladie chez les « seniors ». À l'occasion de la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer, le 21 septembre dernier, les grandes lignes en ont été dévoilées par le professeur Joël Ménard, président de la commission installée par le Président de la République pour dégager les axes d'action prioritaires sur cette question. Son contenu plus précis sera connu dès la fin de cette année 2007.

En 2008, le budget de l'État y contribuera pour 3,4 millions d'euros, soit deux fois plus que sa participation totale au plan précédent. Toutefois, comme pour tous les autres plans de santé publique, c'est à l'assurance maladie qu'il reviendra d'en financer l'essentiel, grâce en particulier, cette année, aux franchises médicales mises en place dans la loi de financement de la sécurité sociale que nous venons d'adopter.

L'association France Alzheimer estime à 12 milliards d'euros les besoins en matière de recherche, de prévention, de dépistage et de prise en charge. Or les franchises ne devraient rapporter que 850 millions d'euros par an et, à participation constante, la dotation de l'État ne s'élèvera qu'à une quinzaine de millions d'euros pour la durée du plan. Est-il prévu, madame la ministre, de mobiliser d'autres sources de financement, et à quelle hauteur ?

En deuxième lieu, je voudrais évoquer les mesures mises en oeuvre pour lutter contre la tuberculose. Nous sommes nombreux à nous inquiéter des conséquences du décret du 17 juillet 2007, qui a levé l'obligation vaccinale par le BCG alors que le risque infectieux est aujourd'hui préoccupant chez les publics les plus précaires, migrants et personnes sans domicile au premier chef, ainsi que dans certaines régions, notamment en Île-de-France et dans les Bouches-du-Rhône. Notre collègue Paul Blanc, qui a travaillé sur cette question dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, l'OPEPS, était d'ailleurs favorable à une obligation vaccinale ciblée.

À notre vive satisfaction, vous avez lancé, madame la ministre, un programme de lutte contre la tuberculose pour la période 2007-2011. Pouvez-vous nous en préciser le contenu et détailler les mesures qui pourront être prises dans les zones et pour les publics touchés par la recrudescence de cette maladie ?

En troisième lieu, enfin, j'aborderai le rôle de la MILDT, qui s'affirme cette année comme le pilote interministériel de la lutte contre la drogue et la toxicomanie et non plus comme un acteur sanitaire parmi d'autres de cette politique.

Deux opérations budgétaires concomitantes concourent à ce recentrage. Premièrement, les subventions aux associations seront versées par le ministère de la santé : de fait, ces associations interviennent le plus souvent pour des actions de prévention et de prise en charge, qui relèvent de la politique sanitaire. Deuxièmement, DATIS - le groupement d'intérêt public interministériel de téléphonie créé en 1990 pour conseiller et prévenir les consommations de produits psychoactifs et orienter les usagers vers une prise en charge adaptée - sera rattaché au ministère de la santé via l'INPES, qui gère déjà les autres opérateurs de téléphonie sanitaire et sociale.

Sur l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a d'ailleurs transféré de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » vers les services généraux du Premier ministre 4,5 millions d'euros correspondant aux emplois de la MILDT.

Dans la mesure où la MILDT n'engage plus directement de crédits pour des actions relevant du domaine sanitaire, le présent budget prévoit une diminution massive des crédits destinés à l'expérimentation. Il ne restera donc que 500 000 euros en 2008 pour tester de nouveaux modes de prévention, de prise en charge sanitaire et sociale et de contrôle de l'application pour le compte des ministères concernés. En 2008, les programmes expérimentaux financés par cette action concerneront la prévention dans les entreprises et la mise en oeuvre d'actions dans les zones urbaines sensibles et dans les prisons.

Si la commission des affaires sociales est favorable au repositionnement de la MILDT, elle s'inquiète néanmoins de constater que ses capacités d'expérimentation sont réduites presque à néant. En effet, certains projets innovants concernent non pas la prévention et la prise en charge sanitaire, mais la lutte contre le trafic ou l'amélioration de l'application de la loi, dont la direction générale de la santé ne se préoccupe pas. Qu'en sera-t-il de ces actions, madame la ministre ?

Sous réserve de ces quelques remarques et interrogations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Enfin, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Murat.

M. Bernard Murat. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » ayant été excellemment présentés par nos rapporteurs, je me permettrai simplement de saluer, compte tenu de la faiblesse des marges de manoeuvre budgétaires pour 2008, le maintien des crédits de cette mission à leur niveau de 2007.

Vous nous proposez, madame la ministre, un budget de continuité, un budget qui permettra à l'État de poursuivre les actions qu'il mène en faveur de la prévention et de la prise en charge des pathologies, de la gestion de l'offre de soins tout en dégageant les marges de manoeuvre nécessaires au financement des nouveaux besoins et des actions prioritaires, comme le nouveau plan Alzheimer, qui vient, dramatiquement mais naturellement, s'adosser au plan cancer lancé par le président Jacques Chirac et repris par le président Nicolas Sarkozy.

La maladie d'Alzheimer est un désastre, que malheureusement nous sommes nombreux à connaître. C'est un désastre pour le patient, qui, tel un vaisseau fantôme, s'avance vers la fin, coupé de sa famille, coupé du lien charnel et intellectuel avec les êtres qui lui sont chers.

C'est donc un drame personnel, un drame familial, un drame de société. Nous savons aujourd'hui les uns et les autres que ce drame sera de plus en plus fréquent et qu'il prendra une dimension de plus en plus importante dans l'économie de santé de notre pays.

On parle de « pathologie du monde moderne ». Qui peut le dire ? On parle de maladie que l'homme porterait dans ses gênes. Qui peut le dire ?

La maladie d'Alzheimer, associée à la longévité, touche aujourd'hui en France 860 000 personnes. Chaque année, ce sont 225 000 nouveaux cas qui se déclarent, engendrant beaucoup de souffrance et de détresse, tant pour la personne qui est atteinte par la maladie que pour son entourage. Le nombre de malades pourrait passer à 1,3 million en 2020 et à 2,1 millions en 2040, selon un rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, l'OPEPS. Qui sait ?

Dans les années à venir, les coûts humains et financiers de la maladie d'Alzheimer, nous en sommes sûrs, continueront à devenir exponentiels, ils sont d'ores et déjà élevés tant pour les familles que pour la société, sans parler, bien évidemment, de l'investissement incroyable que représente l'accompagnement d'un malade par sa famille, par son conjoint, par la personne qui a décidé de se mettre à son service.

La lutte contre cette maladie doit donc être abordée avec détermination et l'on ne peut qu'approuver l'initiative du Président de la République de lancer un ambitieux plan de lutte contre la maladie d'Alzheimer et d'en faire une priorité politique.

Favoriser la recherche médicale, parvenir à une détection précoce de la maladie et obtenir une meilleure prise en charge des patients, tels seront les objectifs de ce plan.

La commission chargée de l'élaboration des propositions à partir desquelles seront définies les orientations de ce plan, a rendu son rapport au Président de la République, il y a quelques semaines. Il comprend dix objectifs, vingt-huit recommandations, quarante-huit mesures et constitue un vaste éventail de remèdes concrets à tous les niveaux - recherche, soin, accompagnement - qui devrait nourrir parfaitement le futur plan.

L'année 2008 verra donc la mise en oeuvre de ce plan, qui s'élèvera, vous l'avez annoncé, madame la ministre, à 3,2 millions d'euros, auxquels s'ajouteront les crédits dégagés par l'assurance maladie. Le Président de la République a annoncé qu'il définira l'engagement financier total du plan sur les cinq ans à venir avant la fin du mois de décembre. Avez-vous, madame la ministre, quelques informations à nous fournir sur cette annonce ?

En matière de financement, je tiens à insister sur le fait que les efforts devront être constants pour arriver à des résultats positifs : à titre d'exemple, la commission a évalué à une cinquantaine de millions d'euros les besoins supplémentaires pour la recherche.

La recherche devra retenir toute notre attention. Comme le soulignait le Président de la République, lors de la Journée mondiale de lutte contre la maladie d'Alzheimer, « sans test diagnostic validé, sans traitement, il n'y a pas d'arrêt possible de l'évolution de maladie ».

Avant de trouver les remèdes, il faut que les chercheurs comprennent le concept et les mécanismes de cette maladie. Or, aujourd'hui, la recherche française est dispersée et insuffisante : elle devra bénéficier d'un effort sans précédent.

Les chercheurs savent d'ailleurs pertinemment que rien de sérieux ne se fera sans une coopération sinon mondiale, du moins européenne : à ce titre, la perspective de l'inscription de la lutte contre la maladie d'Alzheimer comme priorité de l'Union européenne lors de la présidence française en 2008 me semble être une très bonne chose.

Dans l'immédiat, et parce qu'il existe une période inhérente à tout essai thérapeutique qui ne nous permet pas d'envisager de réelles avancées concrètes avant 2020, les patients sont là avec leur famille.

Il y a urgence à améliorer leur prise en charge. En la matière, le rôle du médecin traitant est essentiel : médecin de proximité, il connaît le patient dans son environnement et peut le suivre dans la durée. Il est le mieux placé pour faire disparaître les diagnostics tardifs, repérer les personnes qui peuvent avoir une maladie débutante.

Le dépistage précoce reste l'une des pistes thérapeutiques les plus efficaces. Pourtant, seulement la moitié des malades font l'objet d'un diagnostic correct.

Il est vrai que le difficile problème du bien-fondé de l'annonce précoce de la maladie peut être posé.

Tant qu'il n'y a pas de diagnostic, il n'y a pas de prise en charge et bien que les médicaments aujourd'hui disponibles ne sont que modérément actifs, ils permettent tout de même, nous le savons tous, une atténuation des conséquences de la maladie.

Il me semble d'ailleurs que les médicaments « anti-Alzheimer » ne sont prescrits que par les neurologues et les psychiatres. Peut-être pourrait-on donner aux généralistes la qualité de « primo-prescripteurs », contre l'engagement d'une courte formation par exemple, ce qui permettrait aux malades d'être traités immédiatement.

Ainsi, il faudra nécessairement penser à la formation des généralistes, car l'action du médecin traitant en faveur de la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer doit être mieux organisée. Sa rémunération doit aussi être adaptée, car il s'agit de consultations longues : l'idée de la mise en place d'un « forfait Alzheimer » mérite, me semble-t-il, notre attention. Et la revalorisation de l'attractivité des métiers en lien avec la maladie doit être assurément traitée ; je pense en particulier aux médecins des zones rurales.

Je dirai un dernier mot sur l'accompagnement des familles, « l'aide aux aidants » étant l'un des aspects essentiels de la prise en charge de la maladie.

Outre les mesures visant à aider le maintien à domicile du malade qui nécessite d'aménager les logements, il faudra apporter une palette diversifiée de structures de répit pour les proches souvent totalement exténués et désemparés. Les familles peuvent avoir besoin d'être épaulées et doivent pouvoir « souffler » pendant quelques jours lorsqu'elles ont décidé de prendre elles-mêmes en charge le malade.

Jusqu'à l'accueil en établissement spécialisé lorsque ce dernier s'impose, il y a des situations où il n'est plus possible - nous en avons tous des exemples autour de nous -de demeurer au domicile. La commission a pointé les immenses difficultés à faire entrer les patients dans ces institutions, étant donné leur nombre insuffisant, avec de surcroît d'énormes écarts interrégionaux.

Il faut développer de nouvelles structures d'accueil, tout en poursuivant l'adaptation des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, à la prise en charge des malades atteints de cette maladie et en assurant la formation des personnels soignants.

Il ne faut pas oublier que la maladie d'Alzheimer est la principale cause de dépendance des personnes âgées en France. À cet égard, il a été annoncé la création d'une cinquième branche de la protection sociale qui aura pour vocation de financer la prise en charge de la perte d'autonomie, qu'il s'agisse des personnes âgées ou des personnes handicapées. Peut-être êtes-vous en mesure sur ce dossier précis, madame la ministre, de nous indiquer les éléments qui guideront le Gouvernement dans la définition des contours de cet ambitieux projet, souvent annoncé.

Je n'ai pu faire autrement que de vous interpeller sur ce sujet : l'attente de nos concitoyens touchés par cette maladie est grande, à la mesure de l'espoir suscité par les perspectives du plan de lutte annoncé.

Je profiterai des quelques minutes qui me restent pour vous demander quelles sont les orientations de l'action que vous ne manquerez pas de mener contre le développement de l'obésité en France. Il s'agit là encore d'une question qui me tient particulièrement à coeur, car l'obésité connaît, en effet, un taux de croissance annuel alarmant de 5,7 %. Si toutes les populations sont touchées, ce sont les personnes les plus jeunes et les plus précaires qui sont les plus exposées.

Le Sénat a, par l'intermédiaire de la commission des affaires sociales, demandé l'organisation en janvier prochain d'un débat sur cette question et sur les moyens d'enrayer la progression inquiétante de ce fléau. Je ne manquerai pas d'y participer ayant, il y a quelque temps, déjà déposé une proposition de loi tendant à réduire le prix des fruits et des légumes en instituant un taux de TVA réduit à 2,1 % afin de stimuler leur consommation.

Dans les restaurants scolaires de ma ville, Brive-la-Gaillarde, je fais en sorte que les enfants puissent manger tous les jours des fruits frais, et je suis abasourdi de voir sur le marché de Brive-la-Gaillarde que le prix d'une pomme est hors de portée des bourses normales des ménages.

Si cette proposition est certainement difficile à mettre en oeuvre, j'en conviens, du fait notamment de l'existence d'une disposition européenne dite « clause de gel », peut-être existe-t-il un moyen de réduire le prix de ces aliments dans la perspective de promouvoir une alimentation saine, dont l'une des composantes est, bien entendu, la consommation régulière de fruits et de légumes frais.

Je reviendrai sur l'adoption par le Sénat, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, d'une disposition instaurant une taxe sur les boissons sucrées qui n'a finalement pas été retenue, simplement pour souligner que je partage la position de notre rapporteur Alain Vasselle, en estimant - bien que je sois, en tant que maire de Brive-la-Gaillarde, le maire d'une ville pilote et exemplaire dans l'exécution du programme national nutrition santé 2001-2005 et 2006-2010 - que l'instauration d'une politique plus percutante en la matière serait nécessaire.

Madame la ministre, pour toutes ces raisons et toutes celles que je n'ai pu développer, je voterai, ainsi que les membres du groupe UMP, les crédits de la mission « Santé ».

Mme la présidente. La parole est à M. François Autain.

M. François Autain. Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé », plusieurs intervenants l'ont dit avant moi, stagnent alors qu'en 2006 et 2007 ils avaient augmenté respectivement de 10 % et 7,5 %.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. C'est pour cela que vous aviez voté contre !

M. François Autain. Cette stagnation apparente est, en fait, une régression si l'on intègre l'inflation de 2 % prévue en 2008 par l'OCDE. Cette stagnation ne résulte pas d'une diminution des besoins en santé publique, bien au contraire, mais elle traduit une pénurie de financement public consécutive aux cadeaux fiscaux faits cet été aux Français les plus riches.

Le Gouvernement doit réduire les dépenses jugées à tort improductives, parmi lesquelles figurent évidemment les dépenses de santé, mais aussi les dépenses d'éducation et plus généralement toute dépense à caractère social.

Je limiterai mon propos à l'examen des plans de santé publique et des crédits de la Haute autorité de santé.

Au cours de la période écoulée, la politique de santé publique des gouvernements successifs s'est traduite par l'annonce souvent très médiatisée et la mise en oeuvre d'une multiplicité de plans de santé.

En juin 2005, lors de l'examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, j'avais proposé un amendement visant à faire figurer, dans une annexe à la loi de financement de la sécurité sociale, les plans de santé en cours d'application, ainsi que les modalités financières de leur mise en oeuvre.

Je n'avais pas alors été suivi par le rapporteur. On peut le regretter, car il n'existe pas aujourd'hui de document qui fasse la synthèse de ces plans, retrace leur évolution, leurs conditions d'application, leur financement et présente une évaluation des résultats de ceux qui sont arrivés à leur terme. Compte tenu des informations, souvent lacunaires et dispersées, dont nous disposons, il est difficile de mesurer leur incidence sur la santé publique.

Seize plans de santé ont été décidés entre janvier 2001 et mars 2002 par M. Bernard Kouchner, alors ministre délégué à la santé d'un gouvernement de gauche. Son successeur, M. Jean-François Mattei, a été plus modeste, se contentant apparemment des cinq plans stratégiques nationaux contenus dans la loi relative à la politique de santé publique promulguée en août 2004, qui arrivent d'ailleurs à échéance l'année prochaine.

Quant à M. Douste-Blazy, il a présenté, en un an, pas moins de quinze plans, sans égaler toutefois le record de M. Bernard Kouchner.

Depuis, cette fièvre planificatrice est, je le reconnais, un peu retombée. Désormais, on se contente le plus souvent de prolonger les plans qui arrivent à échéance. Certes, quelques nouveaux plans sont encore créés, mais leur nombre est moindre.

Le suivi de ces plans pose de nombreux problèmes, en ce qui concerne tant leur financement, leur faisabilité, leurs objectifs que leurs résultats.

Leur financement est souvent confus, entouré d'un flou budgétaire préjudiciable à leur efficacité. De plus, certains plans se recouvrent partiellement.

Ainsi, le plan cancer, dont les crédits s'élèveront à 3,2 millions d'euros en 2008, financera une partie des actions menées par le plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool au titre du financement des associations de lutte contre le tabac et l'alcoolisme.

Les sources de financement sont multiples. À titre d'exemple, je citerai le plan stratégique psychiatrie et santé mentale, dont le financement relève de l'ONDAM hospitalier, de l'ONDAM médico-social, de la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, et de la mission « Santé ».

La participation financière de la mission « Santé » à tous ces plans n'est pas systématique ; son niveau, très variable, mais généralement très bas, est établi sans aucune règle. Ainsi, elle est de 17 % pour le plan psychiatrie et santé mentale, de 12 % pour le plan douleur, mais seulement de 1 % pour le plan pour l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques créé en avril 2007.

L'articulation de tous ces plans avec l'ONDAM, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, n'est pas évidente. C'est pourtant un vrai sujet qui n'a jamais été abordé de front. Leur impact n'est jamais pris en considération, ni avant ni pendant leur mise en oeuvre.

Les dépenses d'assurance maladie qui leur sont liées font partie intégrante de l'ONDAM, sans qu'il soit possible de les identifier en leur dédiant, par exemple, une sous-enveloppe.

Un ONDAM croissant de 2 %, voire de 1,5 % par an, dans l'hypothèse la plus basse, comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, peut-il prendre en compte l'augmentation du volume des soins entraînée par la mise en oeuvre de ces plans ? L'État ne doit-il pas en tirer les conséquences et prendre une part plus importante dans leur financement, dès lors qu'il les considère comme une priorité de santé publique ?

Le Gouvernement, en lançant ces plans, fait souvent l'impasse sur leurs répercussions potentielles sur différents acteurs du système de santé, tels que les agences sanitaires ou la direction générale de la santé, posant ainsi clairement la question de leur faisabilité. De même, l'anticipation des évolutions organisationnelles nécessaires à l'application de certains plans fait défaut.

Ainsi, en 2005, le lancement du plan santé au travail a correspondu à une diminution de 87 % du nombre de postes d'internes en médecine du travail.

On pourrait en dire autant du plan périnatalité engagé l'année où l'on réduisait de moitié le nombre de postes offerts aux internes en pédiatrie.

L'évaluation de ces plans n'est pas explicitement prévue, et c'est sans doute la raison pour laquelle elle est rarement pratiquée.

Ni le plan cancer ni le plan Alzheimer n'ont fait l'objet d'évaluations. Pourtant, un second plan Alzheimer est sur les rails.

En revanche, sans que l'on sache vraiment pourquoi, le plan national santé environnement a fait l'objet d'une évaluation. Monsieur le rapporteur pour avis, vous indiquez que l'état d'avancement de 60 % des actions du plan était conforme aux prévisions. En réalité, cela signifie qu'il n'est pas du tout conforme aux prévisions !

M. Alain Milon, rapporteur pour avis. C'est votre interprétation !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il n'est pas terminé !

M. François Autain. Il est vrai que les évaluations peuvent se révéler délicates lorsque les objectifs, comme c'est souvent le cas, ne sont ni clairs ni précis ; a contrario quand ils sont quantifiés, ils manquent de réalisme.

Pour conclure sur ce point, il manque un chef d'orchestre, une instance susceptible d'assurer la coordination et le suivi de tous ces plans, la détermination de leur contenu et de leurs objectifs, ainsi que la réalisation systématique d'une évaluation. Il va de soi que le budget de l'État, notamment à travers les crédits de la mission « Santé », doit prendre une part beaucoup plus importante dans leur financement, qui doit être transparent, notamment à l'égard de l'ONDAM.

De nombreux progrès doivent être réalisés pour faire en sorte que ces plans de santé deviennent des outils performants au service de la politique de santé publique.

J'en viendrai, pour terminer, à la Haute autorité de santé.

Tout d'abord, je regrette que l'examen de son budget ne s'effectue pas en même temps que celui des autres agences sanitaires, dont les missions sont très voisines.

Ensuite, je déplore le désengagement de l'État à l'égard d'une structure qui, pourtant, met en oeuvre des politiques publiques.

Cette situation est d'autant plus incompréhensible que vous venez - vous vous en souvenez certainement, mes chers collègues - d'élargir ses compétences dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, en lui demandant d'émettre des avis médico-économiques sur les stratégies de soin, de prescription et de prise en charge les plus efficientes.

On peut comprendre que la subvention n'ait été, en 2007, que de 1 million d'euros, compte tenu de l'existence d'un fonds de roulement pléthorique. Mais tel n'est pas le cas cette année, et il aurait fallu que la Haute autorité de santé retrouve le niveau de 2006, à savoir 9,6 millions d'euros. Or, en 2008, elle devra se satisfaire de 2,5 millions d'euros.

Non seulement vous mettez cette instance dans une situation financière inconfortable, mais vous l'affaiblissez, alors même qu'il faudrait la renforcer pour qu'elle relève un certain nombre de défis, parmi lesquels figure l'information des médecins.

Vous le savez, mes chers collègues, l'industrie pharmaceutique exerce aujourd'hui un quasi-monopole, soit directement soit indirectement, en matière d'information et de formation continue des médecins. Chaque année, elle y consacre 3 milliards d'euros, soit 25 000 euros par médecin, selon un rapport récent de l'IGAS, l'Inspection générale des affaires sociales. Or la Haute autorité de santé ne dispose en tout et pour tout que de 1 million d'euros pour diffuser à ces mêmes médecins une information indépendante et objective, notamment sur le médicament. C'est dérisoire !

Cette situation très déséquilibrée n'est pas sans conséquences sur la sécurité sanitaire des Français et les dépenses d'assurance maladie.

Le Sénat avait adopté, contre l'avis du Gouvernement, un amendement visant à confier à la Haute autorité de santé la mission de créer une base de données indépendantes sur le médicament. La commission mixte paritaire a dû renoncer à cette disposition devant le refus du Gouvernement de donner à cette instance les moyens de remplir cette mission.

Ce faisant, le Gouvernement rend un grand service à l'industrie du médicament, mais porte atteinte à la sécurité sanitaire des patients qui les consomment et lèse les assureurs qui les paient, tournant ainsi le dos aux principes sur lesquels repose toute politique de santé publique.

Dans ces conditions, vous comprendrez que le groupe CRC ne vote pas ce budget, madame le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La ministre !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ainsi que je l'ai dit rapidement lors du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, je réitère aujourd'hui mon attachement aux politiques de prévention, notamment aux politiques liées à l'éducation en matière alimentaire.

Je suis heureuse de constater que des enfants assistent ce matin, dans les tribunes, à nos débats, parce qu'ils vont être très intéressés par mes observations sur la prévention des risques en matière d'alimentation des enfants.

Mon mari a été longtemps président de la sous-commission de l'agriculture et de l'alimentation du Conseil de l'Europe. C'est la raison pour laquelle je suis aussi particulièrement attachée à ces questions.

On creuse sa tombe avec sa fourchette. Notre alimentation est notre première médecine.

Dans bien des domaines, l'heure n'est plus ni aux colloques, ni aux rapports, ni aux études, ni même à une journée mondiale contre l'obésité infantile.

Madame la ministre, l'heure est définitivement à l'action, surtout si l'on considère qu'un milliard de personnes sont en surpoids sur la planète, dont 300 millions sont obèses, chiffre qu'il faut comparer aux 842 millions de personnes qui souffrent de malnutrition. Dans ce domaine, se posent évidemment des problèmes de société.

L'obésité est une pandémie, c'est aussi un facteur aggravant d'autres maladies.

Avec 12,4 % d'adultes obèses, auxquels s'ajoutent 29 % de personnes en surpoids, ce sont au total 41 % de Français adultes qui sont en surcharge pondérale. Ce fléau n'épargne pas les jeunes, puisque 1,5 million d'entre eux souffrent d'obésité.

Au-delà de l'image corporelle, l'obésité a des conséquences graves sur la santé : élévation des graisses dans le sang entraînant de nombreux problèmes cardiovasculaires, insuffisances respiratoires, diabètes, augmentation de la pression artérielle.

La probabilité d'attaque cérébrale est multipliée par deux dans le cas d'un indice de masse corporel supérieur à 30, et l'espérance de vie est réduite de dix ans.

Les pathologies liées à l'obésité entraînent des coûts considérables pour les individus et la collectivité. Madame la ministre, je veux insister sur les conséquences absolument dramatiques de l'obésité ; une politique de prévention massive pourrait, me semble-t-il, alléger l'ensemble de nos déficits.

La Commission européenne a estimé que les dépenses liées à l'obésité coûtent chaque année entre 75 milliards et 130 milliards d'euros à l'Europe des Quinze. Les personnes obèses dépensent en moyenne 27 % de plus en soins de ville et 39 % de plus en produits pharmaceutiques.

Faudra-t-il en arriver à prendre les mêmes mesures que le maire de Philadelphie, qui a engagé une croisade en la matière en lançant le programme « Comment perdre 76 kilos en 76 jours ? ».

Après avoir perdu quarante kilos, une habitante de cette ville confiait qu'elle n'avait plus besoin d'insuline, de bonbonne à oxygène ni de déambulateur. Au final, cette croisade massive a permis une réduction des coûts liés à l'obésité.

Par ailleurs, aux Etats-Unis encore, une étude a été menée dans une classe qui suivait un cours de sécurité routière, au milieu duquel on a passé des spots publicitaires pour une pizza. À l'heure du déjeuner, 85 % des enfants de cette classe se sont dirigés sans hésitation vers les pizzas, alors que le pourcentage a été inférieur à 10 % dans une autre classe qui n'avait pas été sensibilisée à cette publicité.

Madame la ministre, les enjeux en matière de prévention représentent près de 40 milliards d'euros. Comme on l'a dit à plusieurs reprises, il faut absolument former les médecins. Savez-vous que plus de la moitié des patients qui commencent un traitement anti-cholestérol n'ont jamais essayé au préalable de suivre un régime pauvre en graisses ? On commence par ingurgiter des médicaments avant de faire un effort !

Je dirai un mot sur les maladies cardiovasculaires.

Une étude finlandaise montre que le fait de réduire d'un gramme notre consommation de sel entraîne une chute de près de 75 % du nombre des maladies cardiovasculaires chez les personnes âgées de moins de soixante-cinq ans.

Dès 1998, notre collègue Michel Dreyfus-Schmidt a alerté les autorités sur ce sujet, posant chaque année la même question sur les excès de sel dans l'alimentation industrielle. Il lui a été répondu que notre situation n'était pas différente de celle de nos voisins, et qu'il n'y avait pas de quoi s'alarmer. Que de temps perdu, mes chers collègues !

Quant aux affections de longue durée, qui sont remboursées à 100 % par l'assurance maladie, elles nous donnent des indications sur leur coût actuel et futur, et une bonne part d'entre elles pourraient être évitées si des mesures de prévention étaient mises en place.

Le coût des affections de longue durée, ALD, est de 38 milliards d'euros. Cela représente cinq fois le déficit annuel de la sécurité sociale en 2005, 13 % des recettes de l'État, le montant annuel des intérêts de la dette de l'État et 60 % du budget de l'éducation nationale !

Madame la ministre, il est temps de se saisir sérieusement de ce problème ! Il est indispensable de dépasser le cadre strictement médical et de concentrer nos efforts sur la prévention de l'obésité infantile.

Des informations à caractère sanitaire défilent sous les messages publicitaires relatifs aux produits alimentaires : « Pour votre santé, évitez de mangez trop gras, trop sucré, trop salé » ou « Pour votre santé, bougez plus ». Elles sont absolument insuffisantes au regard du contenu du message publicitaire : par exemple, la tartine de Nutella, si fascinante et irrésistible, ou encore la pizza dont le parfum semble crever l'écran ! La forme du message publicitaire est extrêmement importante et il reste nombre de mesures à prendre sur les points de prévention. Je pense notamment à l'obésité infantile.

Certes, ce n'est pas si simple. J'écoutais l'allusion de notre collègue Bernard Murat au coût des fruits et légumes. Pourtant, le bilan coût-avantage d'une vraie politique de prévention en matière de risques et de sécurité alimentaire est évident et prouvé ; de nombreux rapports l'attestent.

Madame la ministre, vous avez une vraie croisade à mener sur ce thème. Nous sommes tous prêts à y travailler et nous serons tous à vos côtés. Si, grâce à la prévention, nous parvenons à réduire le déficit budgétaire d'environ 38 milliards d'euros - c'est, semble-t-il, le chiffre avancé par l'OCDE -, la tâche de notre valeureux président de la commission des finances du Sénat sera facilitée !

Madame la ministre, les membres du groupe du RDSE et moi-même voterons votre budget. Toutefois, nous avons tous à travailler sur ces problèmes d'obésité qui sont extrêmement importants. Cette action marquera, je crois, votre ministère.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le temps qui m'est imparti est court ; j'adopterai donc un style télégraphique !

Tout d'abord, nous ne pouvons que déplorer la faiblesse de vos crédits. Par rapport à l'année dernière, leur augmentation est dérisoire. Ils avaient augmenté un peu plus l'an dernier, mais c'était pour financer le plan de mobilisation nationale contre le cancer, qui arrive à échéance.

D'autres plans sont en cours. Le président de la République a lancé un plan national pour la prise en charge de la maladie d'Alzheimer, qualifié de « Grande cause nationale ». Je ne reprendrai pas les propos très justes de notre collègue Bernard Murat, qui, comme chaque année d'ailleurs, évoque sa bonne ville de Brive-la-Gaillarde et même son marché rendu célèbre par Georges Brassens. (Sourires.) Fort de ce précédent UMP, je me permettrai d'évoquer également tout à l'heure des questions locales.

Le désengagement de l'État en matière de santé publique est patent, et cela d'autant plus que les financements proviennent de l'assurance maladie. D'abord, crise après crise, on exonère de charges salariales telle ou telle catégorie - en dernier lieu les pêcheurs -, ce qui réduit encore les recettes de l'assurance maladie. Ensuite, l'État rembourse mal sa dette constante à l'égard de l'assurance maladie, en tout cas pas complètement. Enfin - il fallait oser y penser ! -, on fait appel au financement des patients eux-mêmes. C'est le bouquet !

J'en viens au financement du plan Psychiatrie et santé mentale.

Face aux problèmes récurrents en matière de santé mentale évoqués tout à l'heure par mon collègue François Autain, on a entrepris en 2004 d'élaborer ce plan pour 2005-2008. Aujourd'hui, les crédits consacrés à la santé mentale et à la prévention du suicide, qui sont en augmentation, atteignent 6 millions d'euros. Mais, là encore, la part de l'État est marginale ; la majorité du financement provient d'autres sources, notamment de l'ONDAM médicosocial, de l'ONDAM hospitalier et du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP.

J'évoque cette question, car je préside le conseil d'administration d'une association qui emploie environ 1 700 personnes, dont le nombre de patients en file active est de l'ordre de 9 000 et qui, depuis le 1er janvier dernier, à la demande de la tutelle, donc de vous, madame la ministre, est engagée dans une délégation de gestion d'établissements de santé publique à un organisme à but non lucratif.

Ainsi, en plus de la Haute-Saône, où nous dispensions déjà la psychiatrie à titre exclusif, sont concernés maintenant le Territoire de Belfort et le Pays de Montbéliard, puisque cette activité a été transférée du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard à notre association.

Pour exercer cette mission qui nous a été confiée, nous nous heurtons à un certain nombre de freins. Je n'en citerai que deux.

Le premier est la différence de statuts entre les personnels du secteur privé non lucratif et ceux du secteur public. Il faut à tout prix opérer un rapprochement, notamment dans le mode de rémunération, entre ces différentes catégories de personnels médicaux publics, privés, non lucratifs ou privés libéraux.

Alors que c'est une exigence, le 16 novembre dernier, ici même, vous avez donné un mauvais signal en vous opposant à un amendement qui visait à corriger l'écart de plus de 4 % entre les charges sociales du secteur privé non lucratif et celles de la fonction publique hospitalière, et cela malgré les engagements de votre prédécesseur. Il est vrai que nous étions alors sous un autre régime et que, depuis, tout a changé : c'est la rupture, y compris dans les engagements de l'État !

Les moyens financiers sont, bien sûr, le second frein à l'exercice de ces missions. Ils restent très inférieurs aux besoins, malgré les propos encourageants que vous avez tenus le 9 octobre 2007 à l'occasion de la Quatrième journée européenne de la dépression. Vous avez alors fait un peu le point sur l'accomplissement et la fin du plan Psychiatrie et santé mentale

S'agissant de l'association que je préside, la délégation de service public de gestion comprenait la reconstruction totale des établissements psychiatriques du Territoire de Belfort et du Pays de Montbéliard, en plus de la construction d'autres établissements. Aujourd'hui, malgré les annonces faites et, bien que je ne veuille pas trop l'impliquer, les promesses du directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation, ARH, je constate que le compte n'y est pas, et même pas du tout !

Par conséquent, je profite de l'occasion pour vous le dire, madame la ministre, je compte sur vous pour rétablir les comptes et nous permettre d'assurer les missions qui nous ont été confiées. Je ne doute pas que vous prêterez une oreille attentive à mes propos.

Je conclurai sur une note plus optimiste, madame la ministre. Je vous connais bien et je ne voudrais pas terminer mon intervention sur des propos un peu durs !

Vous êtes le ministre de la santé et accessoirement celui de la jeunesse et des sports. Vous rôle ne se limite pas aux chiffres et à l'argent. Vous devez mener une certaine politique et impliquez les différents acteurs de la santé publique, notamment en matière de prévention et de consommation.

La note optimiste concerne les usagers, donc les patients citoyens, qui veulent justement être mieux impliqués dans notre système de santé. Je l'ai vérifié récemment lors d'une énième conférence de santé organisée par un grand laboratoire pharmaceutique - n'en déplaise à François Autain ! - et un organisme de sondage. Sur un panel assez représentatif de citoyens, nous avons entendu des réflexions encourageantes.

Ils souhaitent être mieux informés, notamment sur les coûts, qu'ils comprennent mal ou qu'ils ne comprennent pas.

Ils souhaitent une politique de prévention plus développée, gratuite.

Ils considèrent que le médecin traitant doit être l'interlocuteur principal dans cette politique de prévention. Beaucoup reste à faire, madame la ministre, pour inciter notamment les médecins libéraux de ville à s'impliquer plus qu'ils ne le font dans ces actions qui me paraissent fondamentales et qui, d'ailleurs, si elles sont bien menées, contribueront ensuite à diminuer le coût des soins ; ce n'est pas notre excellent rapporteur, médecin lui-même, qui me contredira !

Ces patients souhaitent que leurs associations soient mieux représentées. Elles sont, certes, encore un peu balbutiantes, mais elles méritent d'être confortées dans les différents conseils d'administration des établissements publics ou privés.

Tout cela me paraît encourageant, car cette implication et cette responsabilisation devraient faire évoluer notre système de santé vers un optimum, en quelque sorte, entre, d'une part, la qualité des soins et, d'autre part, le meilleur coût possible.

Voilà, madame la ministre, les quelques éléments que je souhaitais vous livrer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention a pour objet de vous alerter sur le manque de moyens dédiés à la politique liée au handicap et à la périnatalité, alors que, lors de la dernière session, nous avons voté des lois allant dans le sens d'un plus grand investissement de l'État dans ces domaines.

Dans le titre II, l'article 4 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit notamment que « l'État, les collectivités territoriales et les organismes de protection sociale mettent en oeuvre des politiques de prévention, de réduction et de compensation des handicaps et les moyens nécessaires à leur réalisation qui visent à créer les conditions collectives de limitation des causes du handicap ».

Certes, dans la mission « Santé » du projet de loi de finances, l'action n° 04 « Qualité de la vie et handicaps » s'attache à réduire les risques de survenance d'un handicap et à en limiter les conséquences. Mais elle reste l'action la moins bien dotée du programme, avec 3,5 millions d'euros, dont 2 millions d'euros pour les pathologies de l'enfance et de la périnatalité.

Songez qu'il n'existe entre ces crédits et ceux qui sont consacrés à l'organisation des élections de l'ordre national des infirmiers qu'une différence de 500 000 euros, le budget alloué pour l'organisation de ces élections étant 1,5 million d'euros ! De plus, sur ces 2 millions d'euros, 1,8 million d'euros est affecté à la périnatalité. Convenez avec moi que la part allouée au handicap n'est pas importante !

Dès lors, on peut se demander comment l'État compte assumer les engagements qui pèsent sur lui depuis l'adoption de la loi de 2005. D'ailleurs, dans son rapport d'information sur l'application de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, M. Paul Blanc fait d'un bilan contrasté !

Nous avons voté la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, qui recentrait les solutions liées aux problèmes de maltraitance et aux problèmes de santé rencontrés par les enfants dans une politique de périnatalité forte environnant la femme, cela pour éviter les dysfonctionnements du lien parental, notamment pendant le temps de la maternité. L'article 1er du titre IV prévoit un certain nombre d'actions nécessaires pour encourager cette politique.

Madame la ministre, je vous rappelle que 1,7 % d'enfants naissent avec un handicap physique et 1,7 % d'enfants sont en situation de rupture du lien familial, rupture bien souvent liée à une dysharmonie du lien parental due au temps de la naissance.

Or 1,8 million d'euros, ce n'est pas une somme à la hauteur d'une telle politique ! Comparez avec la mesure forte que nous avons récemment votée sur votre initiative, à l'occasion du l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, pour limiter les risques liés aux IVG chirurgicales en facilitant les IVG médicamenteuses !

De surcroît, dans ce jeu de poupées russes, sur ces 1,8 million d'euros, ce sont en fait 1,3 million d'euros qui reviennent aux services déconcentrés, notamment pour le fonctionnement des commissions régionales de la naissance.

Je regrette, madame la ministre, que l'on néglige le véritable enjeu que constitue une politique de périnatalité ambitieuse ; peut-être n'y a-t-il pas une prise de conscience collective de l'importance de ce moment matriciel que représente la naissance dans la construction de l'enfant et la relation avec ses parents.

Mme Catherine Dolto écrivait : « Les suites de couches [...] sont des enjeux de santé publique capitaux. Les professionnels le savent, personne n'en parle. Quant aux hommes politiques, ils s'en moquent. » Mme Marie-Claire Lamunière ajoute : « C'est la non-intervention et l'inattention aux problèmes, aux fragilités qui s'expriment qui sont dangereuses pour l'enfant et pour ses parents. »

Madame la ministre, compte tenu de mes remarques sur le handicap et la périnatalité, je ne prendrai pas part au vote sur ces crédits.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » ne sont pas sans intérêt, loin de là, mais il faut reconnaître qu'ils ne reflètent que très partiellement l'effort de l'État en faveur de la santé.

En fait, la majeure partie des crédits retracés dans cette mission constitue le levier de divers financements qui sont principalement pris en charge par la sécurité sociale. Les budgets se succédant, on doit constater que le périmètre des crédits de cette mission ne cesse de se réduire, l'État se désengageant chaque année un peu plus « au profit » de l'assurance maladie, voire, désormais, sur le dos des patients, nouveauté bien malvenue, qui, en faisant payer les malades pour les malades, remet en cause les principes fondateurs de notre système. Je pense bien évidemment aux franchises, dont nous avons déjà longuement discuté dans cet hémicycle.

Cette année, c'est dans le programme « Offre de soins et qualité du système de soins » que l'on observe un nouveau désengagement. En effet, l'action « Accessibilité de l'offre de soins » est supprimée, faute de crédits pour financer la Conférence nationale des réseaux, la CNR, et les actions de développement de la télémédecine dans les régions.

Les contrats de plan État-régions étant arrivés à échéance et les réseaux de télémédecine étant maintenant implantés, le financement de leur fonctionnement est désormais à la charge de l'assurance maladie. Cette situation n'est pas sans poser certains problèmes, notamment pour ce qui concerne les réseaux de soins, dont la pérennité n'est pas assurée.

Cela étant dit, je concentrerai mon intervention sur la question de la prévention.

C'est quasiment une lapalissade, mais il est toujours important de le rappeler : investir aujourd'hui dans la prévention, c'est faire des économies demain. La prévention devrait donc être la pierre angulaire de notre système de santé, mais force est de constater, au vu des montants financiers en jeu, que tel n'est pas le cas. Je rappelle que notre pays consacre 152 milliards d'euros au remboursement des soins, contre seulement 290 millions d'euros à la prévention. Le développement de la prévention reste donc un enjeu majeur pour le devenir de notre système de soins.

À première vue, les crédits du programme « Santé publique et prévention » semblent stagner. En réalité, cette situation est due au transfert vers ce programme des crédits alloués au système d'écoute téléphonique DATIS - drogue, alcool, tabac et infos-service -, auparavant rattachés au programme « Drogue et toxicomanie ». À périmètre constant, les crédits consacrés à la prévention sont donc en baisse, ce qui se traduit par une diminution des dotations en faveur des actions de ce programme, à l'exception des dispositifs regroupés au sein de l'action n° 4, « Qualité de la vie et handicaps », qui passent de 7 millions à 10 millions d'euros.

Concernant les opérateurs, il est inadmissible que leur financement soit systématiquement sous-estimé, car c'est le cas depuis plusieurs années. Il est particulièrement inquiétant que certaines de ces instances, comme la Haute autorité de santé, connaissent des problèmes de trésorerie. Quant aux observatoires régionaux de santé publique, qui guident l'élaboration des plans régionaux de santé publique, ils subissent une baisse de 12 % de leurs crédits, au moment où vous affichez, à juste titre, madame la ministre, votre volonté de régionalisation.

De son côté, l'INPES, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, va perdre la subvention de 7,5 millions d'euros qui lui était allouée dans le cadre de la mission « Sécurité sanitaire », alors qu'elle aura le même rôle à assumer. Par ailleurs, cet institut n'a reçu aucun versement au titre de la taxe sur les publicités ni aucune information sur son montant prévisible, ce qui ne facilite pas sa gestion.

Les associations constituent un autre acteur important de la prévention, mais leur situation est de plus en plus précaire. En effet, chacun de nous connaît, dans son département, des associations qui ont vu régresser le soutien financier dont elles bénéficient ; chacun a pu observer que, malgré les aides des collectivités locales, le désengagement de l'État était de plus en plus important, contraignant certaines structures à restreindre leurs actions, voire à licencier.

Dès lors, comment ne pas s'interroger, par exemple, sur le devenir du tissu associatif qui oeuvre dans le champ de la prévention de la toxicomanie quand les crédits qui lui sont alloués chutent de 26 % ?

À cet égard, nous ne pouvons que nous inquiéter du financement des différents plans de santé publique, qui ne bénéficient, dans ce budget, que d'un saupoudrage de crédits. Pour plusieurs d'entre eux, les dotations sont d'ailleurs à la baisse, et ce pour la deuxième année consécutive. Je pense notamment au plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool, dont les crédits diminuent de 4,7 %, et au programme national nutrition-santé, dont nous avons déjà beaucoup parlé, pour lequel les dotations baissent de 0,7 %. Incontestablement, il y a une contradiction entre les actes et les discours, entre les objectifs affichés et les moyens alloués.

Pourtant, vous le savez, madame la ministre, l'obésité gagne du terrain chaque année au sein de la population française, en particulier chez les enfants. Ils sont déjà 1,5 million à être concernés ! Il est urgent de stopper cette progression en prenant un ensemble de mesures fortes. À mon avis, ces dernières devraient au moins inclure la taxation des aliments déséquilibrés sur le plan nutritionnel. Nous avons d'ailleurs proposé une telle disposition lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, mais, pour l'instant, vous l'avez refusée. (Mme la ministre fait un geste de dénégation.)

J'ai bien dit : pour l'instant. Je m'efforce d'être objectif, madame la ministre !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous avez du mal ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Godefroy. Pas vraiment ! Si vous faisiez, de votre côté, un petit effort, nous pourrions peut-être parvenir à un rapprochement sur cette politique-là. Sur le reste, on verra ! (Nouveaux sourires.)

Nous avions voté, je le rappelle, l'amendement déposé par notre rapporteur, Alain Vasselle, concernant la taxation des boissons sucrées. Malheureusement, en fin de parcours, il n'a pas été retenu !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cela viendra !

M. Jean-Pierre Godefroy. Je l'espère bien !

Je souhaite également insister sur l'encadrement, à travers une législation plus contraignante, de la publicité en faveur de ces aliments ainsi que sur l'amélioration de la qualité de la restauration scolaire.

Au milieu des émissions pour enfants, que ce soit sur les chaînes généralistes ou sur les chaînes spécialisées, on voit des publicités qui vont véritablement à l'encontre de l'intérêt des enfants puisqu'elles les incitent à consommer des produits qui sont totalement dépourvus des qualités nutritionnelles dont les parent les messages diffusés. Il y a là un problème qui mérite qu'on s'y attarde.

Concernant toujours la publicité à la télévision, il est un autre point dont on parle trop peu : l'augmentation systématique du niveau sonore lors des passages publicitaires. Il est évident que c'est un moyen de retenir l'attention des téléspectateurs, notamment des enfants. Il est urgent, selon moi, de légiférer aussi sur cette question.

Malheureusement, il est très difficile, pour le moment, de se faire entendre sur ces sujets.

En ce qui concerne le programme de lutte contre les addictions, on doit regretter non seulement le retrait de l'État d'une politique de santé publique dont le financement est assumé par l'assurance maladie, mais aussi le manque de lisibilité des moyens consacrés à la lutte contre l'alcoolisme et l'éparpillement des financements. Aussi bien les deux griefs émis par la Cour des comptes dans son rapport de février 2007 sont-ils toujours d'actualité : la faible lisibilité d'une politique qui a tendance à être englobée dans une approche plus large du traitement des pratiques addictives, d'une part, la difficulté à en retracer les financements, d'autre part.

Pour ce qui est plus particulièrement de l'alcoolisme, n'allons surtout pas croire que le problème est derrière nous ! Il est malheureusement encore d'actualité, et je sais que vous en êtes consciente, madame la ministre. (Mme la ministre approuve.) Nous devons continuer de lutter contre l'alcoolisme en milieu professionnel et familial.

Je pense également à l'alcoolisme des jeunes : un phénomène que nous observons tous, hélas, en tant qu'élus locaux et qui exige des efforts importants.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Et l'alcoolisme des femmes !

M. Jean-Pierre Godefroy. Par ailleurs, à la veille du Téléthon, comment ne pas être inquiet quant à l'avenir du plan maladies rares ? L'AFM, l'association française contre les myopathies, se dit très préoccupée de l'attitude du Gouvernement.

Non seulement l'instauration des franchises aura une incidence sur toutes les personnes atteintes d'une affection de longue durée, mais la recherche sur les maladies rares, après que celles-ci ont été reconnues comme une priorité de santé publique par la loi du 9 août 2004, se trouve absorbée et se transforme, dans le cadre des prochains appels d'offres de l'Agence nationale de la recherche, en recherche sur les mécanismes physiopathologiques des maladies rares et des maladies fréquentes. Dans le même temps, le programme hospitalier de recherche clinique dédié aux maladies rares a été amputé de 50 % de ses financements.

Nos craintes portent donc sur le désengagement de l'État sur ce front de la recherche et sur la dilution de cette spécificité dans une problématique sanitaire plus globale, ce qui risque, à terme, de mener à la disparition pure et simple de cet axe de recherche. Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous dire ce qu'il en sera exactement de la pérennité de l'action de l'État dans ce domaine ?

Avant de conclure, madame la ministre, je tiens à aborder un dernier thème, très important à mes yeux.

Lors de l'examen du budget de 2007, nous avions fait remarquer à votre prédécesseur l'insuffisance des moyens alloués pour la mise en place effective du plan psychiatrie et santé mentale 2005-2008. Il nous semblait en effet que les 5,6 millions d'euros prévus étaient largement insuffisants pour répondre aux besoins ; et ce ne sont pas les crédits de 2008, 0,6 million d'euros, qui permettront de remédier à cette situation !

À ce sujet, quand comptez-vous présenter au Parlement le projet de loi relatif à l'hospitalisation sans consentement que nous avait promis par M. Xavier Bertrand ? Vous n'ignorez pas que certains articles de la loi relative à la prévention de la délinquance consacrés à cette question avaient provoqué ici de vifs débats.

Il existe, nous le savons, depuis le début de l'année 2007, un avant-projet de loi qui recueille un consensus parmi les professionnels concernés. Une fois de plus, et je le regrette, nous aborderons cette question sous l'angle judiciaire et répressif puisque ce projet de loi sera présenté par Mme le garde des sceaux. Une grande loi de santé publique est nécessaire sur ce sujet ; elle est attendue avec impatience tout autant par les professionnels de santé que par les malades et leurs familles, ainsi que par les élus locaux.

En conclusion, je suis au regret de constater que les moyens consacrés à la mission « Santé » et au programme « Santé publique et prévention » ne suffisent pas. La prévention est une politique globale qui requiert des moyens : les 430 millions d'euros inscrits dans ce budget ne sont pas à la hauteur des défis que nous avons à relever, notamment pour faire face aux inégalités sociales en matière de santé qui sont, chez nous, parmi les plus fortes d'Europe, puisque l'espérance de vie d'un ouvrier est, en France, réduite de cinq à six ans par rapport à celle d'un cadre. Et les franchises médicales que vous avez instaurées ne feront qu'aggraver ces inégalités puisqu'elles vont à rebours de toute logique de prévention en introduisant un critère financier supplémentaire dans le recours aux soins.

Pour toutes ces raisons, nous voterons donc contre ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il me soit tout d'abord permis de remercier M. Jean-Jacques Jégou et M. Alain Milon de la qualité de leurs rapports respectifs. Je remercie également l'ensemble des orateurs de leurs interventions très intéressantes.

Nous devons garantir à nos concitoyens, pour répondre à leurs attentes légitimes, la possibilité effective de bénéficier en toute sécurité de soins de qualité. En ce sens, notre première mission, protectrice par principe et solidaire par définition, est d'améliorer l'efficience de notre système.

Le deuxième axe de notre mission obéit plus généralement à l'impératif de prévention, vous avez été nombreux à le rappeler. Il s'agit d'engager une politique innovante et ambitieuse, qui satisfasse, là encore, la double exigence de protection des populations contre le risque et de responsabilisation d'individus mieux informés et mieux formés, capables de prendre en main leur santé de manière plus éclairée et plus autonome.

À ce titre, monsieur Jean-Pierre Michel, il est dans mes intentions d'associer véritablement, et plus largement que cela n'a jamais été fait, les citoyens, les associations de malades, à toutes les réformes que j'ai entreprises. Vous avez d'ailleurs déjà pu le vérifier à travers, par exemple, le lancement des états généraux de l'organisation de la santé.

Ces politiques de santé publique seront scrupuleusement menées dans le cadre clairement défini d'un budget bien pesé et animé par le constant souci d'assurer aux dépenses engagées leurs plus fructueux effets d'entraînement, qu'il s'agisse des crédits de mon ministère ou de ceux des établissements et opérateurs qui y sont rattachés.

À cet égard, monsieur Jégou, je comprends tout à fait le souhait de disposer d'une meilleure information sur le budget des opérateurs. Nous prévoirons donc, dans le prochain projet de loi de finances, des pages ou des annexes spécifiques aux opérateurs, comparables à celles qui existent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'évolution des effectifs des opérateurs pourra y être précisée, ce qui vous permettra de constater que je partage votre souci d'une approche équilibrée de la gestion des effectifs de l'administration et des opérateurs.

Monsieur le rapporteur spécial, je tiens donc à vous rassurer sur la dotation en 2008 de la Haute autorité de santé, et je réponds ainsi également à François Autain et à Jean-Pierre Godefroy qui m'ont interpellée sur ce sujet.

Des contacts réguliers ont lieu entre mon cabinet et les responsables de la Haute autorité de santé - et encore ce matin même -, afin d'étudier au mieux le budget de cette instance pour 2008, et j'ai pris l'engagement que, si des besoins étaient constatés, nous les traiterions en gestion.

J'en profite pour rassurer François Autain en lui indiquant que le Haut Conseil de la santé publique a entrepris le travail d'évaluation des plans de santé publique, pilotés et coordonnés par le ministère de la santé et les établissements et agences qui y sont rattachés, sous mon contrôle.

J'en reviens au budget de la Haute autorité de santé pour préciser que notre approche équilibrée implique, réciproquement, qu'il n'est pas non plus question d'accorder sans compter des moyens humains et financiers, que je serais, par ailleurs, contrainte de refuser à mes services.

Ainsi, les évolutions les plus importantes des effectifs des opérateurs en 2008 concernent ceux du programme « Offre de soins » et sont liées, avant tout, à des modifications structurelles, telles que la création du Centre national de gestion des personnels hospitaliers.

Le budget pour 2008 est donc un budget réaliste, mais aussi ambitieux. Il est réaliste, car il obéit au principe de réalité budgétaire, qui, en l'occurrence, nous oblige à repenser nos façons de faire et nos objectifs. Il est ambitieux, car il suppose que nous dégagions les marges de manoeuvre nécessaires au financement de besoins nouveaux.

Ce budget est pragmatique et réformateur en son principe, dans la mesure où il nous permet de financer, par redéploiement, nos priorités.

S'impose à nous au premier chef l'obligation d'améliorer l'efficience de notre offre de soins. Cette efficience constitue une des grandes arches qui soutient notre édifice de santé, celle qui permet d'en garantir l'équilibre général et la vitalité au long cours.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous, qui, dans vos départements, êtes à l'écoute de nos concitoyens, vous savez bien que l'impératif d'efficience n'est pas un impératif comptable. Mieux gérer pour soigner mieux, soigner mieux pour éviter des incohérences inutilement coûteuses et préjudiciables aux patients : la ministre de la qualité des soins que je veux être agit sur un seul et même front !

Cependant, l'amélioration de cette efficience ne se décrète pas. Elle suppose, au contraire, la participation active des soignants, des personnels et des malades. Si nous voulons gagner le combat de l'efficience, nous devons compter sur l'engagement responsable des professionnels de santé, des soignants, qui méritent de recevoir les marques de notre considération.

La création des agences régionales de santé, dont j'ai constaté avec plaisir qu'elle recueillait un assentiment sur l'ensemble de ces travées, devra constituer l'un des moyens de répondre plus efficacement aux besoins de santé. Les premiers éléments d'arbitrage du périmètre de ces futures agences seront connus à la fin de cette année, de manière à favoriser leur place dès 2009.

Dans notre esprit, soignants et praticiens seront, de toute évidence, les acteurs principaux d'une restructuration globale dont la visée est clairement qualitative. En ce sens, la qualité de la formation des professionnels de santé - évoquée à juste titre par M. Bernard Murat à propos de la maladie d'Alzheimer, mais nécessaire également pour bien d'autres maladies - constitue un déterminant essentiel de l'efficience du système.

Les crédits consacrés à cette formation atteindront 69 millions d'euros pour 2008. Cet effort significatif se justifie, notamment, par la nécessité de réévaluer la rémunération des maîtres de stage, qui accueillent les internes de médecine générale pour leur stage pratique. La revalorisation de la médecine générale constitue, en effet, un pivot essentiel du système.

Pour se donner les moyens de mener à bien toutes ces actions, mon ministère s'est résolument engagé dans un exercice de révision générale des politiques publiques, qui devrait nous permettre de redéfinir clairement nos objectifs prioritaires.

Il est temps d'engager, dans notre pays, une politique de prévention audacieuse, qui ne se réduise pas à quelques déclarations de principe, mais qui soit adaptée à chaque situation particulière.

Comment offrir à chaque citoyen les moyens d'opérer des choix réfléchis ? À ce titre, la réflexion engagée sur les programmes « Patients », conçus pour permettre l'accompagnement de ceux qui sont atteints de maladie chronique, ouvre des perspectives intéressantes.

De manière générale, nos politiques de prévention devraient subir quelques adaptations utiles et nécessaires.

À cet égard, je prends l'exemple que vous avez évoqué, monsieur Millon, sur le BCG. Le 9 mars 2007, le comité technique des vaccinations et le Conseil supérieur d'hygiène publique de France ont émis un avis recommandant la suspension de l'obligation vaccinale par le BCG et un régime de recommandation forte pour les enfants les plus exposés. Vous avez souligné, en particulier, le cas des populations résidant en Île-de-France, en Guyane et, plus largement, celui des enfants vivant en situation précaire.

Je vous indique que, pour accompagner cette suspension de l'obligation vaccinale, un renforcement de la lutte antituberculeuse est prévu dans le cadre du plan de lutte contre la tuberculose, et je vous rassure sur le fait que mon ministère suit ce dossier très soigneusement.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les attentes des patients ont évolué. De mieux en mieux informés, ils sont parfois désireux de prendre en charge leur inconfort passager, sans avoir à consulter un médecin. Ainsi, je suis favorable à la mise à disposition de médicaments d'automédication devant le comptoir, en valorisant, bien entendu, le conseil pharmaceutique.

En ce sens, toute politique de prévention n'est pas seulement un combat pour la vie ; elle est aussi, en même temps, un combat pour la liberté. Ce combat pour la liberté, en tant que ministre en charge de la santé et militante pour l'émancipation des femmes, je le poursuivrai en conduisant, notamment, une politique de santé des femmes, qui permette à chacune de s'émanciper des contraintes susceptibles de porter préjudice à sa santé ou d'obérer ses chances de guérison.

Dans cet esprit, nous engagerons les moyens nécessaires pour que l'information diffusée touche tous les publics, notamment les femmes vivant dans les conditions les plus précaires, ou celles qui sont les plus vulnérables.

De manière générale, les progrès de la prévention doivent permettre un accès universel à la pratique gynécologique et favoriser la diminution de la morbidité évitable dans notre pays.

Marie-Thérèse Hermange a souligné l'importance des actions en faveur de la périnatalité. Je tiens à préciser que les crédits dédiés à la périnatalité se retrouvent massivement dans les actions menées par l'assurance maladie. Si les crédits sont plus faibles, en apparence, dans mon ministère, c'est parce qu'ils ne concernent que des actions d'étude et d'analyse autour de la périnatalité.

Le plan périnatalité, mené depuis 2005, comporte un ensemble de mesures : renforcement de la sécurité et modernisation de l'environnement médical de la grossesse et de l'accouchement ; amélioration des conditions de prise en charge des femmes enceintes ; amélioration de l'environnement psychologique ; développement d'un système d'information en périnatalité.

J'ajoute que l'amélioration de la périnatalité et des risques liés à la grossesse et à l'accouchement sera obtenue par des plateaux techniques de très grande qualité,...

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. ... et j'appelle chacun à assumer ses responsabilités, quand nous aurons à mener les restructurations qui sont absolument nécessaires dans certains hôpitaux dits « de proximité », pour la réalisation de tels plateaux techniques.

C'est, à mes yeux, la meilleure façon de mener une politique de périnatalité.

En tout cas, au total, 224 millions d'euros ont d'ores et déjà été consommés sur les 239 millions d'euros prévus à cette fin dans le budget des établissements de santé.

En ce qui concerne, plus spécifiquement, les enfants nés avec un handicap, ces mesures s'ajoutent à celles du plan handicap, au titre duquel 62 millions d'euros ont été dépensés en 2007 pour les enfants.

S'agissant du cancer du sein, le défaut d'information, l'ignorance et, parfois, la peur expliquent qu'un trop grand nombre de femmes sont soignées si tard.

Pourtant, nous savons quel est le meilleur moyen d'accroître nos chances de guérison quand un cancer du sein se déclare : c'est le dépistage précoce.

Notre premier objectif est donc de susciter une plus grande adhésion au dépistage organisé. Pour ce faire, il est sans doute nécessaire de conférer à cette forme de dépistage une image positive. L'enjeu est de taille puisque la réduction attendue de la mortalité est de 35 %.

Pour atteindre ces objectifs, je propose, notamment, que la mammographie réalisée dans le cadre du dépistage organisé puisse bénéficier de la technologie numérique, au même titre que celle qui est pratiquée dans le cadre du dépistage individuel.

Les efforts importants qui seront engagés se justifient pleinement au regard des effets attendus en termes de santé publique : 40 millions d'euros de mesures nouvelles seront spécialement consacrés à la généralisation du dépistage du cancer du sein et à la mise en place du dépistage du cancer colorectal dans chaque département.

Les missions de santé de la puissance publique, conçues dans leur dimension préventive, sont donc protectrices autant qu'émancipatrices.

C'est dans le même esprit que je compte engager une politique de santé des jeunes plus offensive.

Les actions de prévention sont, en effet, plus efficaces quand elles sont lancées plus tôt. Les mauvais plis sont d'autant plus difficiles à défaire qu'ils sont adoptés précocement.

Dans ce cadre, le nouveau périmètre du ministère de la santé, qui associe la jeunesse, les sports et la vie associative, est une occasion à saisir.

J'ai l'intention de lutter contre les habitudes addictives, contractées de plus en plus tôt.

Je vous rejoins, monsieur Godefroy : l'alcoolisme n'est pas un combat qui est derrière nous. Le pictogramme adopté pour les boissons alcoolisées et destiné aux femmes enceintes est très important à cet égard.

Nous sommes également amenés à repenser nos politiques de prévention au regard des nouvelles manières de s'alcooliser des plus jeunes. Je pense au binge drinking qui, loin d'être une consommation de convivialité, vise à tomber le plus vite possible dans un coma éthylique.

Mais, bien entendu, il nous faut aussi lutter contre toutes les formes d'addiction : le tabac, les drogues. Je veux d'ailleurs rassurer Alain Millon au sujet de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, la MILDT : le budget pour 2008 de cette mission est un budget de transition dans le cadre de son recentrage sur son action de coordination interministérielle. Par conséquent, ces évolutions budgétaires ne traduisent en aucun cas un désengagement de mon ministère en matière de lutte contre la drogue et les toxicomanies.

À l'évidence, compte tenu de la gravité des enjeux, ces actions devront être menées en coordination avec l'éducation nationale et l'enseignement supérieur.

De même, le suicide des jeunes, l'une des premières causes de mortalité des jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans, notamment chez les jeunes homosexuels, constitue, pour moi, une préoccupation de santé publique majeure, comme je l'ai dit au moment du lancement de la campagne sur la dépression. C'est pourquoi j'ai demandé que soit instauré un groupe de travail sur la prévention du suicide.

Dans la même optique, j'ai souhaité que, au sein du plan psychiatrie et santé mentale 2005-2008, un rééquilibrage soit opéré en faveur de la psychiatrie infanto-juvénile. Que Jean-Pierre Michel et Jean-Pierre Godefroy se rassurent : la mobilisation des crédits de ce plan se déroule comme annoncé, avec une accélération en fin de plan, ce qui est normal puisque certaines opérations nécessitent de mener des études préalables.

Le programme d'actions 2005-2008 de lutte contre le sida sera, bien entendu, poursuivi. La recrudescence des conduites à risque, notamment chez les plus jeunes, nous oblige à ne pas relâcher nos efforts. Le ministère continuera de soutenir les structures de prise en charge et d'aide à domicile des personnes malades, gérées localement par les associations. Les crédits destinés à la lutte contre le VIH-sida ont ainsi été revalorisés, pour être portés à 37,3 millions d'euros. Vous pouvez compter sur mon implication totale en ce domaine.

L'efficience de notre système de soins et le dynamisme de nos politiques préventives déterminent, pour une large part, la pérennité de notre édifice de santé.

Nous donnerons, en 2008, la priorité au renforcement des moyens de lutte contre les maladies neuro-dégénératives, par le biais du déploiement d'actions orientées vers les malades et leur entourage. Si, comme l'a souligné Alain Millon, la maladie d'Alzheimer constitue bien un problème majeur de santé publique, les bouleversements sociaux induits imposent une politique résolument volontariste.

Comme vous le rappeliez, Bernard Murat, le rapport de la commission présidée par le professeur Ménard constitue un apport essentiel à l'élaboration du plan national Alzheimer que le Président de la République présentera.

S'agissant d'un tel enjeu, les efforts financiers sont importants.

Toutefois, je tiens à le souligner, l'effort en faveur de la maladie d'Alzheimer ne se limite pas aux 850 millions d'euros de financements nouveaux apportés par les franchises. C'est aussi tout l'enjeu de la restructuration hospitalière dans le cadre de la politique que nous menons conjointement avec Xavier Bertrand et Valérie Létard. Vous ne retrouverez donc pas dans ce budget la totalité des 12 milliards d'euros nécessaires à la prise en charge de la maladie d'Alzheimer.

Je veux insister sur le rôle du médecin traitant. Le Président de la République l'a évoqué, lors de la journée mondiale Alzheimer du 21 septembre 2007 : l'amélioration du parcours du malade est essentielle et le médecin traitant doit jouer un rôle primordial, évitant les diagnostics trop tardifs.

Le maillage du territoire par les « consultations mémoire » et les centres mémoire de ressources et de recherche, les CMRR, constitue un élément clef du dispositif. La formation non seulement des différents intervenants professionnels, mais aussi des « aidants », a également été présentée comme l'une des orientations nécessaires du plan.

En outre, les malades jeunes, trop souvent oubliés, doivent bénéficier de mesures spécifiques ; une mission nationale devrait être confiée à un centre de référence, sur le modèle de ce qui a été fait pour les maladies rares.

Vous avez évoqué la cinquième branche. Nous travaillons actuellement sur cette question, dont le pilotage relève plus spécifiquement de Xavier Bertrand et de Valérie Létard.

La prévention de l'obésité, en particulier chez les personnes les plus jeunes et les plus précaires, constitue un autre sujet majeur de santé public. Outre Nathalie Goulet, Bernard Murat ou Jean-Pierre Godefroy, vous avez été nombreux à l'évoquer.

Le programme national nutrition-santé, le PNNS, renforcé en 2006, a permis de développer un nombre très important d'actions concrètes. Celles-ci portent sur l'information et l'éducation à la santé, notamment par la diffusion de plus de 5 millions de guides sur la nutrition destinés aux parents, et de plus de 6 millions de guides destinés aux adolescents.

Tous les médecins de France ont reçu des outils pour le dépistage et la prise en charge précoce du risque d'obésité de l'enfant. Des documents pédagogiques ont été distribués aux enseignants. Un très grand nombre de municipalités, que je veux remercier, sont aujourd'hui mobilisées à travers le PNNS, avec un réseau de 120 villes qui développent des actions de proximité.

Le nouveau périmètre de mon ministère trouve là toute sa justification. La pratique de l'activité physique et sportive est fortement encouragée.

Concernant les publicités, les annonceurs en produits alimentaires doivent inscrire, pour toute action de promotion, des messages d'information sanitaire, y compris sonores, de façon à être compris par les jeunes enfants.

Ces campagnes, menées notamment par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES, ont d'excellents taux de reconnaissance et les principes essentiels sont désormais connus des consommateurs.

Pour autant, la véritable difficulté est de provoquer le passage à l'acte pour ces bonnes pratiques. Il s'agit là d'un chantier de long terme, qui implique notamment des chercheurs en sciences sociales. Mesdames, messieurs les sénateurs, je m'engage à être très vigilante sur ce sujet.

Sans doute les effets des décisions que nous prenons aujourd'hui se feront-ils sentir pour certains prochainement, pour d'autres à plus long terme. Toujours est-il que je conduirai ces chantiers avec la détermination qui s'impose, regardant loin devant, convaincue qu'il est nécessaire, pour tenir le cap, d'élaborer dès aujourd'hui un projet global et cohérent, un véritable projet de société et, donc, de progrès. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Santé
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Sport, jeunesse et vie associative

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Santé » figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Santé

427 548 288

425 713 288

Santé publique et prévention

287 273 179

287 273 179

Offre de soins et qualité du système de soins

114 005 978

112 170 978

Drogue et toxicomanie

26 269 131

26 269 131

Mme la présidente. L'amendement n° II-6, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Santé publique et prévention

 

 

 

 

Offre de soins et qualité du système de soins

 

5.485.644

 

5.485.644

Drogue et toxicomanie

 

 

 

 

TOTAL

 

 5.485.644

 

 5.485.644

SOLDE

- 5.485.644

- 5.485.644

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial. Cet amendement fait suite aux recommandations formulées par le Comité interministériel d'audit des programmes, le CIAP.

En effet, dans son avis sur le programme « Offre de soins et qualité du système de soins », le CIAP en préconisait une large refonte, d'une part, en transférant à l'assurance maladie le financement des stages extra-hospitaliers de médecine générale, d'autre part, en inscrivant au programme 150, « Formations supérieures et recherche universitaire », de la mission « Recherche et enseignement supérieur » les crédits afférents aux rémunérations des maîtres de stage et à l'année-recherche, dont la finalité et le pilotage relèvent de l'enseignement supérieur.

S'agissant du premier point, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 venant d'être voté sans que cette donnée soit prise en compte, il conviendra de l'intégrer dans le prochain projet de loi de financement.

En revanche, cet amendement tend à donner une suite immédiate à la seconde recommandation du CIAP en supprimant du programme « Offre de soins et qualité du système de soins » les crédits afférents à l'année-recherche, inscrits à l'action n° 1, « Niveau et qualité de l'offre de soins ».

Eu égard aux règles de recevabilité financière, qui ne permettent pas au Parlement d'y procéder, il appartiendra au Gouvernement de réaffecter ces crédits à l'action n° 6, « Recherche universitaire en sciences de la vie, biotechnologies et santé », du programme 150, « Formations supérieures et recherche universitaire », de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les stages de recherche des médecins et, d'une manière générale, leur formation répondent à des objectifs de santé publique, de valorisation d'un parcours d'excellence, d'adaptation la plus fine à l'exercice visé par chaque étudiant en médecine, de promotion de la médecine générale, dans une logique de parcours de soins et d'accès aux soins de premier recours.

Il ne s'agit donc pas de formations ou de stages de recherche classiques - peut-être y a-t-il une petite confusion dans votre esprit, monsieur le rapporteur spécial - qui pourraient être transférés sans conséquences au ministère de l'enseignement supérieur.

La ministre de la santé que je suis est extrêmement ferme sur ce point : la formation des médecins étant un levier essentiel du pilotage de la santé publique, je n'aspire aucunement à son « universitarisation ».

En outre, c'est l'administration sanitaire qui fait le choix des projets de recherche, notamment de la recherche clinique, en fonction des objectifs généraux de la politique de formation médicale. Transférer la gestion de ce dispositif au ministère de la recherche nous ferait perdre la main sur le contenu de ces formations.

Enfin, les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, les DRASS, interviennent dans la gestion des internes, dans leurs affectations semestrielles ainsi que dans l'attribution des années-recherche, en fonction du rang de classement. Un recentrage des crédits dans le champ du ministère de l'enseignement supérieur compliquerait cette gestion et démultiplierait les intervenants, sans apport complémentaire du point de vue du parcours global de formation.

Ce n'est pas une question budgétaire, mais une question de pilotage. Si une telle évolution devait être envisagée, ce que, pour ma part, je regretterais en tant que ministre de la santé, attendons au moins que l'exercice de révision générale des politiques publiques en cours au sein des ministères soit achevé.

Pour ces raisons, monsieur le rapporteur spécial, pourrais-je me permettre de vous demander de retirer votre amendement ? (Sourires.)

Mme Isabelle Debré. Demandé de cette façon... (Nouveaux sourires.)

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-6 est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Jégou. Madame la ministre, vous abusez de votre charme ! (Nouveaux sourires.)

Je voudrais éviter toute confusion : mon amendement ne concerne que l'année-recherche. En outre, le nombre d'internes pouvant en bénéficier est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, de l'éducation nationale et du budget, et donc par vous-même, madame la ministre. Aussi, il n'est pas dans mon intention de vous dessaisir de quoi que ce soit puisque vous garderiez la main sur ce dossier.

Cependant, pour cette fois, compte tenu de l'émotion que cet amendement a suscitée et dans l'attente des conclusions de la révision générale des politiques publiques, je le retire

Mme la présidente. L'amendement n° II-6 est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Santé » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Santé ».

Sport, jeunesse et vie associative

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Rappel au règlement

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et articles 51 ter, 51 quater et 51 quinquies).

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour un rappel au règlement.

Sport, jeunesse et vie associative
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Sport, jeunesse et vie associative

M. Jean-Pierre Michel. Madame la présidente, mon rappel au règlement concerne l'ordre du jour.

Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Or, comme les médias n'ont pas manqué de le relever ces derniers temps, M. Laporte est secrétaire d'État chargé des sports, et uniquement des sports. Sa ministre de tutelle le répète d'ailleurs à satiété.

Aussi, je ne comprends pas que ce soit le secrétaire d'État chargé des sports qui défende les crédits d'une mission qui déborde largement le cadre de ses attributions. La responsabilité en incombe à Mme Bachelot, qui aurait donc dû rester dans l'hémicycle.

C'est pourquoi, madame la présidente, je vous demande de bien vouloir suspendre la séance jusqu'à son retour parmi nous. (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Dufaut. C'est nouveau !

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Michel. Je dois néanmoins vous préciser qu'il appartient au seul Gouvernement de désigner celui, celle ou ceux de ses membres qui doivent le représenter lors de tel ou tel débat, y compris pour défendre les crédits de telle ou telle mission.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Et nous sommes tous heureux d'accueillir M. le secrétaire d'État !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

Rappel au règlement
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 33 et Etat B

M. Michel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme l'an dernier, je commencerai mon intervention en saluant l'efficacité du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports qui, une nouvelle fois, a répondu avant la date limite du 10 octobre à l'intégralité de mon questionnaire budgétaire. Les réponses qu'il m'a fournies étaient du reste d'une qualité satisfaisante.

Je serai un peu plus circonspect s'agissant de l'examen au fond du sujet, c'est-à-dire des crédits qui nous sont présentés.

Ceux-ci sont en baisse, ce qui peut paraître paradoxal quand on se souvient des fortes déclarations qu'avait faites sur le budget du sport, durant la campagne électorale, le candidat qui fut ensuite élu à la présidence de la République.

Surtout, nous le verrons, les baisses ne concernent pas les dépenses de structure, mais bien les crédits d'intervention inscrits à la mission, et ce pour des raisons peu satisfaisantes.

Je vais me montrer un peu plus précis en entrant dans le détail des programmes.

À périmètre constant, avant la seconde délibération de l'Assemblée nationale, qui n'a que modérément changé la donne, les crédits du programme « Sport » baissent de 24,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 17 millions d'euros en crédits de paiement, soit une diminution respectivement de 11,6 % et de 7,6 % par rapport à 2007.

Certes, cette baisse doit être, en quelque sorte, compensée par l'augmentation concomitante des moyens du Centre national de développement du sport, le CNDS, dont le budget devrait passer de 236 millions d'euros à 266 millions d'euros en 2008.

Néanmoins, je ferai deux observations.

Premièrement, le budget du CNDS dépend, par construction, de l'évolution des recettes de la Française des Jeux, d'une part, et d'une fraction du produit des droits télévisés des événements sportifs, d'autre part. Or il s'agit de deux recettes à l'évolution incertaine en raison de la prochaine ouverture à la concurrence du secteur des jeux et de la renégociation des droits télévisuels du championnat de France de football.

Deuxièmement, le CNDS, qui est certes appelé à financer des opérations visant à développer le « sport pour tous », peut se substituer au budget de l'État, mais les « coupes » concerneront aussi d'autres domaines, comme les aides aux fédérations, qui ne relèvent pas du champ du CNDS.

Certains acteurs du monde sportif risquent ainsi de faire face à des difficultés financières, notamment les « petites » fédérations, l'adjectif n'ayant évidemment rien ici de péjoratif.

Il est à craindre que la baisse de ces crédits utiles soit liée à la nécessité de financer deux dépenses d'un montant peut-être plus élevé que ce que l'État avait initialement envisagé : la rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique, l'INSEP, et le remboursement à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, de l'exonération des « droits à l'image collectifs » des sportifs professionnels.

S'agissant de l'INSEP, comme je l'ai déjà indiqué lors de l'examen de la loi du 31 juillet 2007 de règlement du budget de l'année 2006, les autorisations d'engagement affectées à la partie « nord » - les équipements extra-sportifs -, qui fait l'objet d'un partenariat public-privé, sont passées de 60 millions à 88 millions d'euros, soit une hausse de près de 50 %.

Quant à la partie « sud » du site - équipements sportifs -, qui relève uniquement de l'État, il apparaît que les autorisations d'engagement correspondantes ont été réévaluées de 13,8 millions d'euros par rapport à un engagement de départ de 55,2 millions d'euros. Il est vraiment nécessaire que le coût de la rénovation de l'INSEP, par ailleurs nécessaire, soit enfin maîtrisé.

Au sujet des droits à l'image, dont de nombreux orateurs risquent de reparler, je suis en train de mener un contrôle budgétaire dont je ne veux pas préjuger le résultat. Le monde du sport professionnel - clubs et ligues - a déjà pu me dire à quel point ce dispositif lui semblait indispensable dans un contexte de concurrence exacerbé depuis l'arrêt Bosman. J'observe simplement que le coût du dispositif paraît dériver : après 15 millions d'euros inscrits en loi de finances pour 2007 - qui devraient, en fait, approcher 30 millions d'euros en exécution -, l'inscription en projet de loi de finances pour 2008 s'élève à 32 millions d'euros - plus de 15 % des crédits de paiement du programme « Sport ». Les clubs sportifs étant, en pratique, ordonnateurs de cette dépense publique non plafonnée, celle-ci n'est pas contrôlable ni même visible pour l'État payeur.

On pourrait m'objecter que la progression des salaires engendre par ailleurs des rentrées supplémentaires de cotisations sociales.

Néanmoins, je ne peux que constater que, si des recettes existent, elles n'ont pas d'impact sur le budget du sport qui, lui, supporte les dépenses. Cette situation ne peut, à mon sens, perdurer bien longtemps.

Enfin, mais j'y reviendrai plus en détail lors de la discussion des amendements, je vous proposerai de tirer les conséquences de l'actuelle meilleure santé financière du consortium Stade de France, qui diminue le coût financier pour l'État de la pénalité pour absence de club résident.

Le programme « Jeunesse et vie associative » subit, lui aussi, une baisse de crédits, non compensée, elle, par le CNDS : si, à périmètre constant, les autorisations d'engagement sont stables, les crédits de paiement baissent d'environ 4 millions d'euros, soit près de 3 %.

Et, là aussi, ce qui est touché, ce n'est pas la structure, ce sont les crédits d'intervention.

Subissent particulièrement les effets de la rigueur au sein de l'action n° 3, les associations nationales agréées, dont les subventions directes diminueraient de 1,8 million d'euros - soit une baisse de 14,4 % -, et les crédits à la disposition des services déconcentrés pour le soutien aux politiques locales de la jeunesse dans le cadre des actions partenariales locales, dont les crédits seraient réduits de 800 000 euros, soit une baisse de 23,8 %.

Subit également ces effets dans une moindre mesure, au sein de l'action n° 2, le dispositif « Envie d'agir ! », destiné à soutenir les jeunes, notamment ceux des quartiers en difficulté, qui veulent réaliser un projet, souvent à caractère professionnel : les crédits dévolus à cette action diminueraient de 400 000 euros, c'est-à-dire de 5,4 %.

C'est pourquoi l'amendement que je proposerai tendra à compenser exactement ces baisses envisagées et, à mon sens, peu opportunes.

Enfin, le programme soutien intitulé « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative » regroupe 443 millions d'euros de crédits de paiement, soit environ 57 % des crédits de paiement de la mission. Il regroupe également la totalité des emplois de la mission, soit, pour 2008, 7 044 équivalents temps plein travaillé.

Comme je l'ai déjà dit, et même si cette centralisation peut présenter certains avantages en termes de gestion, ce format est, en soi, un problème : les gestionnaires des deux autres programmes ne disposent pas de l'ensemble des moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs objectifs.

Ce programme interdit toute comptabilité analytique des coûts pourtant prévue par la LOLF.

Je ferai deux autres remarques avant de conclure.

L'évolution des crédits de personnel - titre 2 - me paraît paradoxale : ils augmentent de 8,7 millions d'euros - soit une hausse de 2,3 % -, alors même que le plafond d'emplois diminue de 248 équivalents temps plein par rapport au plafond ministériel pour 2007, plus d'ailleurs en raison de changements de périmètre - 188 équivalents temps plein - que pour des gains de productivité - 60 équivalents temps plein. Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Dans ce contexte, la création de cinq emplois d'inspecteur général de la jeunesse et des sports, seule création en 2008, m'étonne.

L'argumentation avancée pour justifier ces créations ne me convainc pas, car les missions évoquées - audits, révisions générales des politiques publiques et contrôle interne au titre de la LOLF - relèvent de la responsabilité de l'administration centrale et non de l'inspection générale.

Par ailleurs, les dépenses d'immobilier passent de 12,6 millions d'euros à 27 millions d'euros. À ce sujet, monsieur le secrétaire d'État, vos services m'ont fait valoir qu'en 2008 les crédits demandés intégraient des crédits inscrits sur une autre ligne budgétaire en 2007. Espérons que, cette fois, « le compte est bon » et que ce poste ne causera plus de surprise à l'avenir.

Néanmoins, et sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, je vous inviterai, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, à adopter les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », modifiés par un amendement que je vous présenterai.

De même, je suis favorable à l'adoption des trois articles rattachés à la mission introduits par l'Assemblée nationale.

L'article 51 ter vise à étendre aux nouveaux médias la contribution de 5 % prélevée en faveur du CNDS sur les droits de diffusion des événements sportifs, dite « taxe Buffet ». Il s'agit d'une harmonisation logique et bienvenue du droit, qui a d'ailleurs été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Cependant, sa mise en oeuvre dès le 1er janvier pourrait poser problème à la ligue et aux clubs, dont les budgets couvrent des saisons. Il vous appartiendra, monsieur le secrétaire d'État, d'essayer de régler ce problème avec vos services.

L'article 51 quater tend à ce que le Gouvernement présente un rapport sur l'efficience de l'exonération dont bénéficient les sportifs professionnels au titre de leur « droit à l'image collectif ». Travaillant moi-même sur ce sujet, j'aurais mauvaise grâce à m'opposer à cette nécessaire évaluation.

Enfin, l'article 51 quinquies vise à ce que le Gouvernement dépose un autre rapport sur les résultats, l'actualisation et l'exploitation du recensement des équipements sportifs.

Telles sont, madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, les observations que je souhaitais formuler. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste de l'UC-UDF, ainsi que sur le banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Murat, rapporteur pour avis.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord, à titre personnel et au nom de mes collègues de l'UMP, de me réjouir de votre présence dans cet hémicycle. Dans des temps antérieurs, nous avons croisé les crampons, aujourd'hui, nous allons croiser nos idées. Croyez bien que c'est un grand plaisir pour le sportif et le citoyen que je suis de s'adresser en cet instant à un membre du Gouvernement nommé Bernard Laporte !

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports. Je vous remercie !

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. En dépit d'une contrainte budgétaire forte, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » s'établissent dans le projet de loi de finances pour 2008 à 1 045 millions d'euros, en hausse de 2,7 % par rapport en 2007.

Cette augmentation est consacrée aux priorités fixées par le Président de la République, à savoir d'une part, le développement des activités et équipements sportifs des collégiens en temps périscolaire auquel 30 millions d'euros sont dédiés et, d'autre part, l'amélioration de l'accès à la pratique sportive des publics qui en sont éloignés, notamment les jeunes filles, les personnes handicapées et les personnes en difficulté d'insertion.

Nous vous sommes très reconnaissants, monsieur le secrétaire d'État, d'accorder une attention prioritaire au sport pour tous, avec une concentration des moyens sur des publics cibles dans un souci d'efficacité renforcée. Je salue d'autant plus ces engagements financiers et les orientations dégagées, qu'ils correspondent complètement à l'idée que je me fais de la politique sportive, telle que j'avais pu la définir, notamment, dans mon avis budgétaire de l'an dernier.

Si la politique en faveur du sport pour tous est largement renforcée, le haut niveau bénéficie également d'un budget en hausse de plus de 10 %, conforme aux besoins d'une nation préparant les jeux Olympiques.

En amont de cette préparation, les fédérations sont soutenues à hauteur de 45 millions d'euros. Parce que gouverner c'est prévoir, 26 millions d'euros sont en outre budgétés pour la rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique, dans la perspective des jeux de Londres, et les sportifs des disciplines peu médiatisées sont soutenus financièrement à hauteur de 2,8 millions d'euros.

Par ailleurs 4,7 millions d'euros sont provisionnés pour les primes aux médaillés olympiques et paralympiques, qui sont désormais alignées, ce dont je me réjouis. Cette dotation est évaluée sur la base d'une anticipation de 58 médaillés aux jeux Olympiques et 120 aux jeux Paralympiques : puissiez-vous avoir vu juste, monsieur le secrétaire d'État !

Le sport de haut niveau est également soutenu à travers le mécanisme de compensation des exonérations de charges accordées au titre de la rémunération du droit à l'image des sportifs professionnels, estimé à 32 millions d'euros. La montée en charge de ce dispositif, qui a pour but d'améliorer l'attractivité des clubs professionnels français, est la preuve de son succès, mais il inquiète certains de nos collègues.

Je crois que le prochain rapport de notre collègue Michel Sergent sur ce sujet et celui que l'Assemblée nationale vous a demandé de remettre devraient nous éclairer sur les avantages et les inconvénients du dispositif et sur les éventuelles améliorations à y apporter.

Je signale en passant que le sport professionnel contribue fortement au soutien de la politique sportive française grâce à la taxe dite « Buffet », dont l'assiette a été élargie dans ce projet de loi de finances par l'Assemblée nationale. À cet égard, on peut s'interroger sur l'application, dès la promulgation de la présente loi, de la taxe à cette assiette élargie alors que les budgets des clubs sont adoptés pour la période allant de juin à juin.

Sur la problématique de la prévention des risques liés au sport de haut niveau, je signale que l'Agence française de lutte contre le dopage recevra une dotation de 7,3 millions d'euros en 2008. Nous reviendrons sur ce point lors de l'examen de l'amendement de la commission des affaires culturelles.

Concernant la politique de prévention par le sport, j'estime que la création d'un ministère regroupant les politiques sportives et de santé est une excellente idée et favorisera, d'une part, la prise en compte des problématiques de prévention par l'activité physique pour l'ensemble de la population et, d'autre part, la lutte contre le dopage pour les athlètes de haut niveau.

Je suis convaincu, monsieur le secrétaire d'État, que votre maîtrise des deux politiques publiques de sport et de santé permettra d'apporter de nouvelles synergies.

J'ai à cet égard une première question à vous poser.

Il semble que le suivi médical des sportifs de haut niveau se heurte notamment aux insuffisances d'effectifs en matière de médecine du sport. Estimez-vous qu'il faut créer une spécialité en médecine du sport afin de développer cette discipline qui semble essentielle à l'amélioration de la prévention par le sport ?

Par ailleurs, le CNDS joue un rôle essentiel en matière de politique sportive, mais son activité n'est retracée que sur deux pages du « bleu budgétaire ». Il me semblerait utile que soit transmis au Parlement un rapport annuel d'activité plus détaillé. Je souhaitais avoir votre sentiment sur cette question et éventuellement obtenir un engagement de votre part sur la transmission d'un document plus complet en 2008.

Ma seconde question concerne la partie thématique de mon rapport budgétaire que j'ai consacrée aux relations entre les collectivités territoriales et les clubs professionnels.

Les collectivités ont un rôle financier éminent à l'égard de ces clubs. Elles les subventionnent, parfois de manière importante, elles passent des contrats de prestation de service, elles mettent enfin à disposition, vous le savez bien, monsieur le secrétaire d'État, des stades municipaux.

Pourtant, leur pouvoir de négociation et de contrôle se distend à mesure que les clubs s'enrichissent et se professionnalisent. Je crois donc qu'il est temps de revoir les dispositions juridiques réglant ces relations et, à tout le moins, d'informer les maires sur leurs pouvoirs et les possibilités qui leur sont offertes. Je serai, monsieur le secrétaire d'État, ravi de pouvoir étudier cette question avec vous et vos services. Je souhaiterais au préalable avoir votre sentiment sur la pertinence du cadre juridique relatif, d'une part, aux subventions que les collectivités peuvent accorder aux clubs, et, d'autre part, à la mise à disposition des enceintes sportives.

En conclusion, je vous fais part de ma satisfaction, monsieur le secrétaire d'État, que la commission ait donné un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur le banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Martin, rapporteur pour avis.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le programme « Jeunesse et vie associative », doté de plus de 132 millions d'euros en 2008, est très légèrement inférieur à celui de 2007.

Mais, grâce à la bonne santé commerciale du Stade de France et à un amendement proposé par la commission des finances dont on reparlera tout à l'heure, 3 millions d'euros supplémentaires pourraient être transférés sur le programme, ce qui entraînerait finalement une hausse de plus de 2 % des crédits.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est un bon amendement !

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Je souhaiterais au demeurant rappeler, eu égard au faible montant des sommes évoquées, que la majeure partie des crédits consacrés au développement de la vie associative est en fait constituée de dépenses fiscales évaluées pour 2008 à plus de 1 280 millions d'euros, qui correspondent à différentes réductions d'impôt pour des dons.

Quant à la politique de la jeunesse, elle est portée non seulement par le ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, mais également, et même surtout, par le ministère de l'éducation nationale.

Je commenterai en premier lieu, les actions en faveur de la jeunesse, qui regroupent 59,1 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances.

Bien qu'elle ait un caractère largement interministériel et qu'il pourrait être difficile pour le ministère de mener des actions spécifiques, j'estime aujourd'hui que cette politique est arrivée à maturité. En effet, des priorités géographiques intéressantes ont été dégagées:

Tout d'abord, sur le plan national, en faveur des quartiers populaires, sur les 7,4 millions d'euros de crédits de l'opération « Envie d'agir ! », 2 millions d'euros seront spécifiquement consacrés, en 2008, au versement de bourses pour financer des projets, principalement à finalité professionnelle, de jeunes de quartiers populaires.

Monsieur le secrétaire d'État, pensez-vous qu'un programme spécifique en direction des zones rurales particulièrement défavorisées pourrait voir le jour ?

Sur le plan international, 10,5 millions d'euros sont dépensés en faveur des offices franco-allemand et franco-québécois pour la jeunesse, dont la performance est reconnue.

Le cas de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire, l'INJEP, mérite d'être creusé davantage. La diversité des actions qui lui sont confiées avait été critiquée dans un rapport d'information du député Denis Merville. Il considérait que les missions de l'INJEP s'apparentaient par trop à celles qui étaient menées par le ministère. L'opérateur souhaitait devenir un organisme informant les pouvoirs publics en matière de politiques publiques de jeunesse.

M. Jean-François Lamour avait, quant à lui, déclaré devant la commission des affaires culturelles, l'année dernière, que l'établissement serait appelé à jouer un rôle pilote dans la délivrance de l'agrément des associations ainsi que dans la mise en oeuvre du programme « Envie d'agir ! ».

Le projet annuel de performance 2008 ne fait apparaître aucune évolution ni dans un sens ni dans l'autre. Je considère, monsieur le secrétaire d'État, qu'il serait utile de clarifier les missions de cet opérateur, voire de demander le rapport d'activité.

J'évoquerai à présent les actions menées en faveur de la vie associative, dont les crédits s'élèvent à 72,8 millions d'euros.

Je tiens tout d'abord à souligner la réussite du volontariat associatif, mis en place par la loi du 23 mai 2006. Aujourd'hui, 5 800 volontaires ont déjà reçu l'agrément du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports, et 7 000 seraient prévus en 2008.

Je m'interroge toutefois à cet égard puisque ne sont inscrits dans le projet annuel de performance que 3,81 millions d'euros, ce qui correspond à la compensation des exonérations de charge de 4 900 volontaires. Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous m'indiquer si l'objectif de 7 000 volontaires en 2008 est néanmoins maintenu ?

Par ailleurs, je m'interroge sur le devenir de l'action « Animation sport », qui permet à des jeunes issus notamment des zones urbaines sensibles d'acquérir une formation pour accéder à un emploi d'animateur ou d'éducateur dans le champ du sport et de l'animation, tout en bénéficiant d'un contrat aidé prévu par le plan de cohésion sociale. Ce programme très intéressant, à la croisée des programmes « Sport » et « Jeunesse et vie associative », est doté de 7,1 millions d'euros pour 2008.

Sans passer en revue l'ensemble des actions menées dans le cadre de cette politique, on peut constater qu'elle est l'un des axes essentiels de votre travail. En termes d'affichage politique, il serait toutefois utile que la vie associative soit mentionnée explicitement dans le nom de votre ministère.

En dépit de cette observation de forme, et au vu de l'ensemble des éléments que j'ai cité, la commission des affaires culturelles a proposé de donner un avis favorable quant à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur le banc des commissions.)

Mme la présidente. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il faut le reconnaître, le projet de rupture prôné par votre majorité se met en place dans ce budget.

L'hypocrisie n'est plus de mise ! D'habitude on nous présente un budget en très légère hausse, pour masquer des baisses, puis on le réduit lors de sa mise en oeuvre.

Cette année, monsieur le secrétaire d'État, vous avez l'honnêteté de présenter un budget en baisse. Au moins la volonté politique est claire ! Voici venu le temps de l'application d'une politique sans ambition, si ce n'est celle de réduire les dépenses socialement utiles.

Ainsi le budget de la mission passe de 785 millions d'euros en 2007 à 782 millions d'euros pour 2008, soit une baisse apparente de 0,4%. Malheureusement, à périmètre constant, la baisse est bien plus importante. En effet, ce budget intègre des dépenses nouvelles obligatoires qui viendront réduire les dépenses effectuées l'an passé.

Ainsi, 17 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour couvrir le manque à gagner de l'ACOSS, du fait de la défiscalisation sociale honteuse d'une partie des rémunérations des sportifs professionnels les mieux payés.

Il convient d'ajouter à cette somme 2 millions d'euros au titre des loyers budgétaires des services déconcentrés et 2,6 millions d'euros de loyers à verser au prestataire chargé de la rénovation de l'INSEP.

Enfin, année olympique oblige, 4,7 millions d'euros sont provisionnés pour l'attribution des primes à nos futurs médaillés olympiques. Évidemment, nous espérons tous que cette provision sera insuffisante !

Le total de ces nouvelles dépenses obligatoires s'élève donc à près de 27 millions d'euros.

Si l'on prend en compte l'inflation, la baisse réelle de ce budget est de 40 millions d'euros, soit 5%. C'est considérable !

Ce n'est pas un budget de rigueur ; c'est un budget d'austérité. D'autant que ce budget est toujours, en cours d'exécution, une variable d'ajustement : tous les ans, il n'est réalisé qu'à 90 % ou 95 %. Ainsi, pour 2008, les dépenses seront donc, sans doute, en baisse de plus de 10 %, soit 70 millions d'euros.

Je vous entends déjà me dire que je ne dois pas oublier le financement du CNDS pour avoir une vision consolidée de votre projet de budget. Aussi me permettrez-vous de souligner qu'avec 30 millions d'euros de hausse, pour 70 millions d'euros de baisse, le compte n'y est pas.

J'ajoute que les crédits du CNDS ne concernent que le sport. Le projet de budget du programme « Jeunesse et vie associative » est donc bel et bien en baisse de 4 millions d'euros, soit de 3 %, au minimum.

Mais ce repli est en fait encore plus important pour des raisons identiques à celles que j'ai énoncées tout à l'heure : l'inflation et la non-exécution budgétaire viendront encore réduire ce projet de budget.

Enfin, cette baisse généralisée cache des diminutions bien plus importantes encore, qui remettent en cause la pérennité des actions, déjà trop peu nombreuses, que le ministère soutenait.

Les subventions aux associations nationales agréées vont diminuer de 14 %. Les interventions de partenariat local passent de 6,6 millions à 5 millions d'euros, soit une chute de 24 %. Les actions locales en faveur de l'éducation populaire sont réduites de 14 %.

Dans ces conditions, comment vont faire les associations pour continuer à porter les actions sociales qu'elles développent, au plus près des besoins des populations concernées ? Dans les faits, ce projet de budget marque leur condamnation sans appel. Toutes les associations vont devoir réduire la voilure et, vous le savez, bon nombre d'entre elles vont disparaître.

Une telle remise en cause nous inquiète gravement. Le ministère a t-il toujours la compétence relative aux associations, et que serait son action en direction de la jeunesse, si les composantes associatives et d'éducation populaire disparaissaient ?

Quelle est réellement, alors, votre politique en direction de la jeunesse ? Quelle signification ont ces restrictions budgétaires considérables sur le programme « Jeunesse et vie associative » ?

On est en droit de se poser ces questions, d'autant que le ministère, outre la santé, la jeunesse et le sport, ne porte plus l'appellation « vie associative ».

Devant la gravité de cette situation et les restrictions budgétaires considérables, vous comprendrez que j'attende une réponse claire sur le périmètre de vos compétences et sur les politiques que vous allez conduire.

Dans les médias, on entend dire que le principe des conventions d'objectifs pluriannuelles serait remis en cause. Celles-ci sont pourtant à la base de toutes les subventions portées par ce programme, mais aussi celui des sports, en particulier pour le financement des fédérations sportives.

Il semblerait que les conventions qui arrivent à échéance ne seront pas reconduites. Seraient-elles, toutes, appelées à disparaître ? Les associations perdraient ainsi toute lisibilité sur leur avenir. Comment, dans ces conditions, construire des actions dans la durée et monter des projets ? Sur cette question aussi, nous attendons des réponses.

Enfin, comment peut-on accepter de telles restrictions sans risquer de remettre en cause les équilibres fragiles que nous connaissons dans nos villes ?

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, chacun aura compris que mon groupe est pour le moins préoccupé par l'avenir de l'action gouvernementale en direction de la jeunesse et de la vie associative.

Mais notre inquiétude est encore plus forte pour les crédits du programme « Sport ».

En effet, au-delà de sa baisse apparente de 2 millions d'euros, c'est sur ce programme que porte l'essentiel des dépenses nouvelles obligatoires de la mission que j'ai évoquées au début de mon propos.

Ainsi, ce budget porte à lui seul 40 millions d'euros de dépenses nouvelles soit, à périmètre constant, une réduction de 20 %. Jamais une telle baisse n'a été proposée par un quelconque gouvernement. C'est une première !

Monsieur le secrétaire d'État, c'est pire que de l'austérité ; cette fois, c'est un projet de budget sinistré qui nous est présenté : c'est inacceptable !

Comment, en cette année olympique, la représentation nationale peut-elle accepter cette coupe drastique d'un budget essentiel à la vie de notre nation, qui concerne l'ensemble de sa population, par-delà les 10 millions de licenciés, les centaines de milliers de bénévoles qui font vivre le sport au sein de dizaines de milliers d'associations et de clubs.

Même avec le CNDS, le budget consolidé du sport sera en baisse. Outre que cette réduction reste très importante, c'est oublier ce que recouvre la fonction budgétaire du CNDS.

La mission de ce centre national est de financer les politiques territoriales du sport, d'intervenir en soutien aux associations et aux collectivités locales et non de mettre en oeuvre des politiques nationales. Or, depuis sa création quasiment aucune recette supplémentaire ne lui a été attribuée pour répondre à cette mission.

Pour 2008, vous évoquez une dotation de 30 millions d'euros supplémentaires en faveur du CNDS, mais vous oubliez de dire que ces sommes iront non pas aux missions premières du centre, mais aux actions du programme national de développement du sport, le PNDS. Pour le CNDS lui-même, aucune hausse n'est prévue.

En fait, les moyens du CNDS sont en baisse régulière du fait des charges nouvelles qu'il doit assumer.

L'an passé, il a dû absorber 16 millions de dépenses effectuées auparavant par le ministère et, à la lecture des documents budgétaires, il apparaît qu'il finance de nouveau des fédérations sportives, le Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, et même les délégations françaises aux jeux Olympiques et Paralympiques de Pékin 2008, ce qui a priori ne relève pourtant pas du tout de sa compétence.

Plus de rigueur et de lisibilité, pour plus de transparence, semble de nouveau nécessaire, monsieur le secrétaire d'État.

Mais il faut aussi attribuer plus de moyen au CNDS, pour ses propres missions.

Dès sa création, nous alertions sur la modicité des sommes mises à sa disposition et nous proposions l'augmentation et le déplafonnement du prélèvement sur la Française des Jeux.

Tous les ans, je porte le même amendement et, tous les ans, il est rejeté.

Or tout le monde sait que le CNDS ne peut répondre de façon satisfaisante à sa mission, et les millions d'euros supplémentaires annoncés couvriront une dépense nouvelle affectée à une action nationale.

En fait, les annonces sont bien trompeuses !

Monsieur le secrétaire d'État, avant de clore mon propos, je souhaite vous interroger sur la rénovation de l'INSEP.

En effet, il semble que nous assistions à une dérive certaine des coûts, dans les parties nord et sud, concernant en particulier ce qui réalisé dans le cadre de partenariats entre public-privé. Les coûts passeraient dans cette partie de 20 millions à 39 millions d'euros, soit une dérive de plus de 90 %.

Finalement, dans l'ensemble de la mission, mis à part les coûts de l'INSEP, seul le programme 3 est en hausse. Enfin une hausse, pourrions-nous dire ! Je ne pourrais que m'en féliciter si j'avais la certitude que cela correspond bien au développement du service public de la jeunesse et des sports et à l'amélioration des conditions de travail de ses agents et, si derrière cette hausse, ne se cachait une nouvelle baisse des effectifs du ministère. En effet, 248 postes vont être supprimés. Il s'agit sans doute de la plus forte saignée de fonctionnaires dans un ministère. Nous ne l'acceptons pas !

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, après l'ensemble des critiques que j'ai formulées, personne ne sera surpris que le groupe communiste républicain et citoyen vote contre les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » et élève même une protestation tant la modicité de leurs crédits met à mal le sport français.

L'ensemble du monde sportif sera sans aucun doute étonné des restrictions décidées. Il ne pourra que comparer la réalité des chiffres et les promesses qui avaient été faites.

L'incompréhension, pour le moins, va se répandre, mais la colère aussi, sans doute, tant le décalage est considérable entre votre projet de budget et les engagements de campagne du candidat Nicolas Sarkozy.

En effet celui-ci s'était engagé auprès des autorités sportives du pays à faire passer le budget des sports à 3 % du budget de la nation. Nous en sommes loin, très loin ! Nous marchons même à reculons !

Le doublement du budget aurait été plus que judicieux. Face à ce projet de budget catastrophique, nous maintenons cette exigence. Elle constituait une proposition réaliste ; elle est devenue une urgence. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen de ce budget est un élément essentiel dans l'esprit de notre cohésion sociale et de l'action en sa faveur. Il éclaire le visage de notre société moderne.

Oui, cette mission en faveur du sport, de la jeunesse et de la vie associative doit s'enraciner dans tous les territoires, à tous les niveaux. Elle se conjugue au passé, au présent, mais elle doit-être encore plus vivante au futur.

Mes engagements sportifs au sein du conseil général de la Haute-Loire m'amènent à formuler quelques inquiétudes et interrogations sur la situation des départements ruraux situés en zone de montagne.

Je salue sportivement en M. Bernard Laporte un porte-drapeau du sport, en particulier du rugby, et un secrétaire d'État qui n'hésite ni à sillonner les territoires français ni à s'investir généreusement, comme ce fut le cas lors de la dernière Coupe du monde de rugby.

Monsieur le secrétaire d'État, j'ai eu l'occasion de vous accueillir sur le plateau du Haut-Lignon, à 1 100 mètres d'altitude, à Tence plus précisément, où l'équipe du Portugal est venue s'installer lors de la Coupe du monde de rugby. J'ai pu apprécier votre fierté de servir le sport français sans oublier le monde rural. Je dois le dire, j'ai été surpris de vous voir manifester également cette dilection pour le monde rural, et je tenais à le souligner, monsieur le secrétaire d'État, ce matin, au Sénat.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. Jean Boyer. Le sport irrigue tout notre territoire. Il est l'oxygène de nos collectivités, de nos pays.

Il donne à nos enfants une identité, mais il leur fait aussi découvrir les premières armes de la vie, par le combat sur soi-même.

La victoire est à la fois individuelle et collective. C'est l'apprentissage de la solidarité dans la joie et aussi, parfois, dans la déception. Quel que soit le résultat, ce sont toujours des expériences formidables !

Pour en venir plus précisément au budget, et tout d'abord en ce qui concerne le programme « Sport », je constate qu'il est en légère baisse.

Cependant, en y regardant d'un plus près, on s'aperçoit que la majeure partie de cette baisse porte sur l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre », qui diminue de près de 50 %, les crédits de paiement passant de 42 millions d'euros en 2007 à environ 22 millions d'euros en 2008.

Pour bien restituer l'ensemble de ces crédits, mes chers collègues, il suffit de rappeler qu'ils sont gérés par nos directions départementales dans le programme consacré au sport.

La compensation vient des crédits extrabudgétaires constitués par le CNDS. Malheureusement, ceux-ci ne compensent pas totalement la diminution.

En effet, à la suite de l'échec de la candidature de Paris pour les jeux Olympiques, cette augmentation semble due en partie, à l'apport au plan national du développement du sport.

Cependant, il est important de souligner que les orientations du Centre national pour le développement du sport pour 2008 pénalisent nos petites associations locales. En évoquant ces petites associations, je pense tout naturellement aux départements ruraux, et ce pour trois raisons, sans doute quelque peu surprenantes.

Premièrement, les subventions, demain, ne pourront être inférieures à 450 euros. Dans mon département, il s'agit du tiers des demandes engagées, soit une centaine de dossiers environ.

Deuxièmement, une priorité est donnée à la pratique du sport pour nos concitoyens vivant dans les quartiers en difficulté. Qu'en est-il, monsieur le secrétaire d'État, pour les territoires ruraux, notamment pour ceux qui sont en zone de montagne ?

Troisièmement, une partie des crédits doit permettre le financement de l'encadrement sportif dans le cadre de la mise en oeuvre et de l'accompagnement éducatif dans tous les collèges.

Je suis un peu déçu à cet égard : n'est-il pas de la compétence des collèges de proposer d'inclure dans leurs programmes une valorisation du sport, permettant ainsi une parité d'accès aux activités sportives et culturelles ?

Envisager pour la rentrée de 2008 des activités culturelles, des aides aux devoirs et des activités sportives entre seize et dix-huit heures, c'est tout simplement oublier la dimension essentielle du sport à l'école, en collège et en lycée. Il ne faut pas que le sport devienne facultatif.

Permettez-moi d'insister, monsieur le secrétaire d'État, sur l'inquiétude que je ressens et de vous sensibiliser sur ce sujet. Je suis en effet profondément convaincu que le sport doit s'apprendre à l'école et que l'apprentissage du sport ne peut être efficace et porteur que s'il est pratiqué par tous, sans exception.

Donner la priorité aux quartiers en difficulté est une excellente initiative. Cependant, n'oublions pas le reste de notre territoire !

Si la « majorité silencieuse » est souvent, monsieur le secrétaire d'État, dans les zones de montagne, c'est simplement que les habitants de ces zones ont un sens particulier des valeurs, du respect et qu'ils souhaitent garder aussi le sens de l'effort.

Je suis heureux de dire, du haut de cette tribune, que mon département - nous avons tellement de handicaps que vous me pardonnerez cette petite marque de satisfaction - est l'un des tout premiers de France en nombre de licenciés sportifs par rapport au nombre d'habitants. C'est pourtant le deuxième département de France pour l'altitude moyenne d'habitation, le premier étant le département de la Lozère, ainsi que notre collègue Jacques Blanc aime à le rappeler.

En tout état de cause, que ce soit au bord de la mer ou en altitude, le sport a toute sa place !

Oui, je crains, monsieur le secrétaire d'État, que les orientations de ce budget ne compromettent nos petites associations.

II est dommage, par ailleurs, que le programme « Sport » ne prévoie pas dans son action 4, « Promotion des métiers du sport», des aides et des dispositifs particuliers pour contribuer à la professionnalisation de l'emploi sportif dans les clubs affiliés à une fédération française.

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi de vous rappeler que les métiers de l'encadrement sportif sont des clés de voûte de nos clubs, notamment en milieu rural.

L'objectif de votre ministère d'atteindre très rapidement un million de licenciés dans les clubs sportifs ne pourra être durablement et valablement atteint que par le renforcement de la qualité de l'accueil et de l'encadrement des jeunes dans les clubs.

Inévitablement, cela passe par la professionnalisation de l'encadrement. Pourquoi ne pas envisager une aide coordonnée autour d'un dispositif, comme cela se pratique dans certains départements ?

Ce dispositif, dénommé « Profession sport », est fondé sur la mutualisation des aides du conseil général, des communes ou des communautés de communes.

Il ne faudrait pas non plus que demain, monsieur le secrétaire d'État, nos dynamiques directions départementales soient menacées de disparition ou de restructuration.

En ce qui concerne le programme « Jeunesse et vie associative », même si le budget n'évolue guère il a le mérite d'exister et de soutenir des projets d'associations, d'aider également des projets de jeunes et de participer au financement des contrats éducatifs locaux.

À mon humble avis, ces contrats n'ont de contrat que le nom. En effet, les contrats éducatifs locaux ne portent pas en eux les moyens d'une véritable animation sportive et de l'émulation qui est nécessaire.

Je reste persuadé qu'il sera important d'aider davantage le fonctionnement de nos associations grâce à la mise à disposition de postes FONJEP, le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire.

Oui, certaines associations ont le mérite d'apporter beaucoup, dans divers secteurs de notre société, au service de la jeunesse, du sport et de la vie associative.

Le sport de haut niveau rassemble les Français lorsque la France gagne, particulièrement lorsqu'elle monte sur la première marche du podium. Dans ces moments, chers collègues, la France est rassemblée et fière, par-delà les différences d'âge, de sexe ou de couleur de peau.

En ce moment, la France est rassemblée et fière, mais il ne faut pas oublier le sport amateur, qui doit rester un moteur associatif incontournable.

Qu'il me soit permis, en conclusion, monsieur le secrétaire d'État, de rappeler la devise de mon canton : « La victoire aime l'effort ».

Ensemble, disons-le : vive le sport, vive la France sportive ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Robert Tropeano.

M. Robert Tropeano. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, lors des dernières campagnes électorales, le sport a été présenté comme un chantier majeur du futur gouvernement. Il s'agissait d'une promesse intéressante.

Cependant, à la lecture du budget que vous nous présentez, nous ressentons un profond malaise tant il est éloigné des attentes du monde associatif et sportif, ainsi que des préoccupations des élus locaux que nous représentons dans cette assemblée.

Une politique ambitieuse du sport ne se limite pas aux annonces. Encore faut-il y consacrer les moyens nécessaires. Sincèrement, je ne vois pas, à la lecture de ce budget, comment les nombreux engagements pris pourront être tenus.

Vous annoncez un budget de 1,048 milliard d'euros. D'entrée, la partie est mal engagée puisque vous y intégrez la dotation affectée au CNDS, qui représente tout de même 266 millions d'euros, soit le quart des crédits.

Sans ces crédits extrabudgétaires du CNDS, ce budget s'élève en réalité à 782 millions d'euros de crédit de paiement, soit 0,28 % du budget de l'État. On est loin des 3 % annoncés pendant la campagne présidentielle !

En effet, avec 761 millions d'euros en autorisations d'engagement et 782 millions d'euros en crédits de paiement, les moyens budgétaires destinés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » accusent une baisse de 0,3 % en euros constants. C'est un record qu'on ne comptera pas aux nombres des exploits, vous en conviendrez !

Les crédits du programme « Sport » sont destinés à développer le sport dans sa double dimension de sport pour tous et de sport de haut niveau.

Ce programme est censé donner corps à la fonction éducative et sociale du sport, ainsi qu'aux valeurs éthiques qu'il véhicule.

Pour 2008, ses crédits s'élèvent à 208 millions d'euros, soit une baisse de 0,9 % en euros constants par rapport à 2007.

Il est vrai que l'intégration de 266 millions d'euros du CNDS porte l'enveloppe budgétaire de ce programme à 474 millions d'euros. Mais c'est un affichage de crédits qui ne reflète pas la volonté proclamée du Gouvernement de permettre l'accès au sport à tous. L'érosion des crédits affectés au sport de masse confirme, malheureusement, le désengagement de l'État dans ce domaine.

Vous le savez parfaitement, monsieur le secrétaire d'État, les ressources du CNDS dépendent d'un prélèvement sur les recettes de la Française des Jeux et d'une taxe de 5 % sur les droits de retransmission télévisée des manifestations sportives.

Il s'agit d'un financement extrabudgétaire très fragile puisque la situation monopolistique de la Française des Jeux est pointée du doigt par Bruxelles.

Quoi qu'il en soit, les artifices de présentation ne suffisent pas à masquer cette importante baisse du budget.

Concernant l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre », elle est dotée d'un peu moins de 22,5 millions d'euros pour 2008, contre 42 millions d'euros en 2007, soit une baisse de 46,6 %. Comment accepter qu'une telle action, destinée au plus grand nombre de nos concitoyens, ne représente que 11,9 % des crédits du programme « Sport » ?

Je m'interroge sur la philosophie qui a prévalu à l'élaboration de ce budget.

Comparée à la participation des collectivités locales dans ce domaine, tant en fonctionnement qu'en investissement, l'intervention de l'État se réduit à la portion congrue, atteignant seulement 2 % des dépenses en matière se sport.

Promouvoir la pratique du sport et ses valeurs devrait mobiliser de plus amples moyens. J'espère que nous nous rejoindrons au moins sur ce point, monsieur le secrétaire d'État.

Il en va de même des crédits budgétaires financés dans le cadre du PNDS, qui s'élèvent à 73 millions d'euros, contre 120 millions d'euros en 2007, provenant de crédits temporairement prélevés sur l'enveloppe du CNDS.

Le constat est identique pour les crédits permettant, notamment, l'accueil des jeunes dans les écoles de sport en dehors du temps scolaire : ils baissent de 4,5 %.

Le plan sport emploi voit ses crédits diminuer de 42 %. Il en va de même pour les crédits destinés au soutien à l'activité et au fonctionnement du mouvement sportif national : ils baissent de 64 % par rapport à 2007.

J'insisterai, tout de même, sur un chiffre : 45 % de l'enveloppe des dépenses d'intervention sont affectés aux fédérations olympiques.

C'est certes très bien pour elles, mais quelle marge de manoeuvre laisse-t-on aux petits clubs ? À mon sens, ils en manquent singulièrement !

Vous le constatez, les crédits affectés à la promotion du sport pour le plus grand nombre sont à des années-lumière des besoins et des attentes.

Aussi, monsieur le secrétaire d'État, c'est avec plaisir que je vous invite à venir dans l'Hérault, terre de rugby, sport que vous connaissez bien, afin que vous puissiez rencontrer les acteurs du monde associatif et mesurer l'importance de ces financements, pour sont en fait primordiaux. Il n'est pas acceptable qu'ils constituent la variable d'ajustement des cadeaux fiscaux votés pendant l'été.

Je ne m'attarderai pas sur l'action relative au développement du sport de haut niveau. Je tiens simplement à souligner que les 152 millions d'euros de crédits qu'elle représente intègrent les 32 millions d'euros destinés à la compensation des exonérations des charges sociales accordées au titre de la rémunération des droits à l'image des sportifs professionnels et budgétisées en 2007.

Ce dispositif d'exonération, qui a été mis en place par la loi du 15 décembre 2004, est coûteux et son montant pèse désormais sur le programme « Sport ». Il paraît évident que les arbitrages budgétaires ont été faits majoritairement au détriment des sports les moins médiatisés

Monsieur le secrétaire d'État, votre challenge est grand. Ancien professionnel du sport de haut niveau, vous connaissez parfaitement les rouages et les financements destinés aux élites sportives. Cependant, encourager la pratique du sport, soutenir les 175 000 associations sportives et les millions de bénévoles qui oeuvrent au quotidien pour encadrer tous les publics devraient constituer le fer de lance de votre politique. N'oublions pas que le travail effectué par les clubs et les bénévoles est considérable et permet de faire émerger les talents de demain.

La facilité d'accès à des lieux de pratiques sportives permet de réduire les inégalités territoriales et sociales. Le sport, facteur de lien social, participe amplement au développement économique et contribue à l'aménagement des territoires.

Tant en investissement qu'en fonctionnement, les besoins sont considérables, notamment dans des départements enregistrant une migration démographique très forte ; l'Hérault compte au nombre de ceux-ci. L'équité entre les territoires dans ce domaine n'est toujours pas avérée et les équilibres budgétaires des collectivités s'en trouvent affectés.

Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'État, le groupe socialiste ne votera pas votre budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Dufaut.

M. Alain Dufaut. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, une nouvelle fois, nous nous retrouvons - quasiment les mêmes ! -, comme chaque année, pour débattre de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Cela doit faire une bonne quinzaine de fois que j'interviens au Sénat à propos de ce budget, et, chaque fois, je déplore qu'il soit examiné en fin de semaine, comme s'il s'agissait d'un budget annexe.

Mme la présidente. D'habitude, c'est la nuit !

M. Ivan Renar. Ou le samedi !

M. Alain Dufaut. Cette fois, c'est vrai, nous nous en tirons un peu mieux !

Pourtant, à mes yeux, malgré la modestie qu'il affiche par rapport à l'ensemble du budget de l'État, nous considérons qu'il est essentiel eu égard à tout ce que peut apporter de positif et d'enrichissant la pratique sportive.

Cette année, la nouveauté vient du changement de ministre ; c'est vrai que nous commencions à nous habituer à Jean-François Lamour, qui, incontestablement, restera un grand ministre des sports. Outre sa personnalité et son charisme, il aura en particulier eu le mérite de faire bouger les choses, dans des domaines aussi variés que la lutte contre le dopage, la lutte contre la violence dans les stades ou la réhabilitation plus que nécessaire de l'INSEP, à laquelle, dans le projet de budget de cette année, sont encore consacrés 25 millions ou 26 millions d'euros.

Monsieur le secrétaire d'État, comme l'a fait Bernard Murat et avant d'aborder véritablement les crédits de cette mission, le sportif polyvalent et assidu que je suis se doit de vous remercier pour cette belle Coupe du monde de rugby que nous venons de vivre en France. Même si nous l'avons évoquée lors de l'audition du président de la fédération française de rugby, Bernard Lapasset, devant la commission des affaires culturelles, on ne peut passer sous silence le rôle prépondérant que vous avez joué à la tête de l'équipe de France, avec votre complice Jo Maso. Même si le résultat de l'équipe de France n'est pas tout à fait celui que nous espérions, nous savons bien que, dans ce type de compétition, le pays organisateur ne peut pas toujours gagner ! Ce serait trop beau ! (Sourires.)

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Alain Dufaut. Notre consolation restera ce fabuleux match de quart de finale entre la France et les All Blacks. Pour tous les passionnés de rugby, il demeurera le match de référence de cette Coupe du monde.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Absolument !

M. Alain Dufaut. On peut, tout au plus, regretter que ce n'ait pas été le match de la finale ! Mais je m'égare...

J'en viens donc à l'analyse du budget qui nous réunit ce matin. Les valeurs du sport qu'ont défendues avec ardeur les joueurs français lors de la Coupe du monde de rugby sont parfois battues en brèche par l'inadmissible volonté de certains de s'arroger des victoires indues en s'aidant de produits illégaux, car dopants.

Ici, au Sénat, nous considérons que la lutte contre le dopage doit toujours rester une priorité pour les instances sportives nationales et internationales. À ce sujet, le rapporteur de la loi sur le dopage que je fus souhaiterait, monsieur le secrétaire d'État, vous faire part de sa crainte de voir l'action de l'Agence mondiale antidopage, l'AMA, freinée par la tendance naturelle des Anglo-Saxons à privilégier les résultats au détriment des valeurs sportives.

La récente élection de M. John Fahey à la présidence de l'AMA, dans les conditions que nous connaissons, doit nous inciter à être particulièrement vigilants quant à l'action future de cette instance, à l'application du nouveau code de l'agence et aux sanctions qui seront appliquées aux sportifs convaincus de dopage.

Bien que certains de la volonté de M. Fahey de remplir au mieux la charge qui est désormais la sienne, nous devons, nous qui, en France, sommes à la pointe du combat contre ce fléau, rester les gardiens de l'esprit sportif et les véritables leaders de la lutte antidopage. En effet, nous savons très bien que la conception de ce combat n'est pas tout à fait la même dans notre pays et dans certains pays anglo-saxons. Je crois que la France doit exiger la tolérance zéro et dénoncer toute forme de permissivité.

Tous les jours, l'actualité nous rappelle l'ampleur de ce fléau du dopage, qui bafoue totalement l'éthique sportive.

Hier, c'était l'annonce de l'arrêt de la carrière d'Alexandre Vinokourov, pris dans le Tour de France.

Ce matin, dans l'avion, monsieur le secrétaire d'État, parcourant Paris Match, j'ai lu avec stupeur cette phrase prononcée par Jean-François Lamour : « L'AMA ne prend pas le chemin pour être un gendarme. Ce sont plutôt des prestataires de service que l'on sonne pour venir à des colloques. »

Autre constat, dans le même article : « Aucun contrôle positif lors de la dernière Coupe du monde de rugby », et l'on sait que des contrôles sanguins ont été effectués.

La déclaration suivante est de vous, monsieur le secrétaire d'État, mais je ne sais pas si vous l'avez faite en qualité de membre du Gouvernement ou de sélectionneur de l'équipe de France : « En France, il y a un suivi longitudinal, le joueur ne peut pas se doper. Mais que se passe-t-il en Nouvelle-Zélande ou en Angleterre ? On n'est sûr de rien ! ».

De tels propos dans la bouche de nos ministres doivent nous inquiéter profondément, mais vous avez raison, monsieur le secrétaire d'État, de parler ainsi et de ne pas pratiquer sur ce sujet très important la « langue de bois ».

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Alain Dufaut. Aussi, je souhaite que vous puissiez, comme l'avait fait Jean-François Lamour avant vous, mettre toute votre détermination et votre engagement dans ce combat fondamental qu'est la lutte contre le dopage. Modestement, ici, au Sénat, nous vous y aiderons.

À cet égard, je tiens à saluer l'amendement déposé par le rapporteur pour avis Bernard Murat et dont l'objet est de majorer de 300 000 euros le budget de l'Agence française de lutte contre le dopage, ce montant venant logiquement s'ajouter à la dotation de 7,31 millions d'euros prévue pour 2008.

En effet, cet organisme, présidé par Pierre Bordry, que nous auditionnons régulièrement, doit être doté de moyens dignes de lui permettre d'assurer au mieux son action de lutte antidopage. Cette tête de pont du savoir-faire français, avec le laboratoire de Châtenay-Malabry, que nous avons visité, doit être valorisée et favorisée, afin de nous permettre de poursuivre notre action et pour que la France le pays le plus actif en matière de lutte antidopage.

Il faut, en particulier, augmenter le nombre de contrôles inopinés, hors compétitions - ce sont les plus efficaces - et durcir le contrôle des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques, les AUT, dont certaines, de complaisance, sont de nature à « masquer » l'usage dopant et à remettre en cause la fiabilité des contrôles. Comment peut-on admettre que, sur des courses cyclistes internationales, parfois 50 % des coureurs soient asthmatiques ? Ce n'est pas sérieux ! (Signes d'approbation sur le banc des commissions.)

Par ailleurs, pour assurer véritablement le développement de la pratique sportive dans notre pays, nous devons réaliser l'engagement du Président de la République de porter effectivement les crédits du sport à 3 % du budget global de la France à l'horizon 2012.

Même si, aujourd'hui, on en est encore loin puisque ces crédits n'en représentent que 0,38 %, cet objectif n'est pas ambitieux. Je suis convaincu qu'il suffit d'une véritable volonté politique. Soyez convaincu qu'un tel projet permettrait de dégager beaucoup d'économies dans d'autres catégories budgétaires de l'État, ne serait-ce que sur le budget de la santé ou de la sécurité sociale, et ce n'est pas Roselyne Bachelot qui me contredirait !

La hausse de 2,7 % des moyens financiers accordés par l'État au sport, à la jeunesse et à la vie associative dans ce projet de loi de finances pour 2008 est, il est vrai, surtout lié à la hausse des fonds du CNDS. Cette dernière hausse est essentiellement constituée par l'apport de 20 millions d'euros au Plan national du développement du sport, créé en 2006.

Je comprends parfaitement, monsieur le secrétaire d'État, que vous revendiquiez - comme l'a d'ailleurs fait, Roselyne Bachelot devant la commission des affaires culturelles - ces 20 millions supplémentaires comme faisant partie intégrante de votre budget : vous avez raison. Il reste que ces recettes exceptionnelles peuvent évoluer et que leur pérennité n'est aucunement garantie.

Certes, notre pays doit faire face à une situation budgétaire délicate et le passage de la part des crédits en faveur du sport de 0,38 % à 3 % du budget total de l'État, même en tenant compte de l'évolution du CNDS, sera un exercice difficile à réaliser.

Étant personnellement attaché à cet engagement du Président de la République, il me serait agréable que vous puissiez m'indiquer les moyens que vous comptez mettre en oeuvre pour le réaliser avant la fin du quinquennat.

Je souhaiterais en particulier savoir si, à partir du rapport de notre excellent collègue Pierre Martin, qui a effectué le recensement des équipements sportifs existant il y a deux ans sur l'ensemble du territoire national, vous avez réfléchi à des solutions pour corriger les anomalies qu'il a mises en évidence. Allez-vous établir un véritable projet national de développement de ces équipements sportifs en liaison, bien sûr, avec les collectivités territoriales ?

Enfin, je tiens à rappeler que, si la pratique sportive se développe parmi la population française, il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de nos compatriotes en sont parfois privés par manque de moyens. Je pense notamment aux jeunes habitants des quartiers défavorisés, tout particulièrement aux jeunes filles, surtout celles qui sont d'origine maghrébine.

J'ai constaté sur le terrain, en ma qualité d'adjoint aux sports d'une grande ville, que le sport constitue pour elles un outil d'émancipation non négligeable, leur permettant de s'épanouir, sans avoir à se soumettre à des règles qui, parfois, leur sont imposées par leur propre famille.

L'État a donc décidé d'attribuer, à juste raison, des crédits supplémentaires à ce dossier de la pratique sportive dans les quartiers défavorisés. Soyez-en félicité, monsieur le secrétaire d'État.

J'aimerais, si cela est possible, connaître la répartition prévue par vos services de ces crédits et savoir si des actions avec les grandes fédérations sportives ont été envisagées pour favoriser la pratique sportive des jeunes filles de ces quartiers dans des clubs de sport collectif, dans chacune des villes de notre territoire, comme je l'avais fait moi-même à la fédération française de volley-ball.

Vous avez compris quelles étaient, pour beaucoup d'entre nous, les priorités : une politique sans aucune complaisance dans la lutte contre le dopage ; un véritable plan national de diversification de nos équipements sportifs, en relation avec les collectivités territoriales et, en particulier, les EPCI, car c'est l'avenir ; un effort tout particulier pour favoriser la pratique sportive dans les quartiers défavorisés, surtout en direction des jeunes filles.

Il s'agit, bien sûr, globalement, de respecter l'engagement du Président de la République de voir, durant son quinquennat, le sport devenir une véritable priorité nationale.

En conclusion, soyez assuré, monsieur le secrétaire d'État, que vous trouverez au Sénat des parlementaires déterminés à vous soutenir afin de réaliser cette légitime ambition.

Le groupe UMP auquel j'appartiens votera bien sûr votre budget, plein de promesses pour l'avenir du sport français. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté aujourd'hui comporte certainement des aspects très satisfaisants mais, globalement, les 782 millions d'euros que l'État consacre au sport sont évidemment très éloignés des promesses faites par le Président de la République au cours de la campagne pour l'élection présidentielle.

Nous ne sommes cependant qu'au début du mandat et il nous reste à espérer que les crédits destinés au sport, à défaut de parvenir immédiatement aux 8 milliards d'euros promis, augmenteront au cours des années suivantes dans des proportions substantielles. À vos côtés, monsieur le ministre, nous ferons ce qu'il faut pour y parvenir.

Les ressources extrabudgétaires du CNDS, l'ancien Fonds national de développement du sport, ou FNDS, s'élèvent à 266 millions d'euros, soit 30 millions d'euros de plus qu'en 2007. L'avenir du CNDS pourrait cependant être quelque peu assombri par la perspective de l'inévitable ouverture à la concurrence des jeux et paris sportifs. Or le CNDS joue un rôle non négligeable dans le financement de la construction d'équipements sportifs réalisés par les collectivités territoriales.

Cela fait en effet bien longtemps que l'État ne finance plus directement ce type d'investissements : les clubs et associations sportifs ne peuvent finalement plus compter que sur la générosité des communes - et les petites communes, notamment, n'ont guère les moyens d'être prodigues -, de leurs groupements, voire des départements ainsi que, c'est vrai, du CNDS. Mais force est de reconnaître que l'effort consacré par cet organisme aux clubs et associations de province est insuffisant, comparé à celui qui réalisé en faveur du sport de haut niveau.

Ce problème n'est pas nouveau mais, là comme ailleurs, on a le sentiment que s'est instaurée une aide au sport à deux vitesses : une vitesse marathonienne pour les petits clubs et une vitesse de sprint pour les grands. Cette situation ne sera pas éternellement supportable.

S'agissant à présent des crédits de fonctionnement, la baisse continue de ceux qui sont consacrés à la promotion du sport pour le plus grand nombre est inquiétante : elle atteindra 46% en 2008 par rapport à 2007, même si, semble-t-il, une compensation est attendue grâce au CNDS, encore une fois. Les sportifs sont là pour participer- vous nous l'avez démontré -, pour gagner aussi - pourquoi pas ? C'est leur rôle -, mais les collectivités locales doivent les accompagner le mieux possible, c'est-à-dire les aider à préparer leurs succès futurs en assurant le confort qui doit régner autour de chacun d'entre eux.

Comment, dans ces conditions, continuer à faire vivre des clubs de province qui ont déjà bien du mal à « joindre les deux bouts » ? Je citerai comme exemple un club que j'ai la chance - ou l'honneur - de côtoyer dans ma propre commune, qui compte moins de 600 habitants. Il s'agit d'un club de triathlon qui évolue en division nationale et qui vient de terminer la saison vice-champion de France. Comment ce club pourra-t-il poursuivre son parcours alors que ses dirigeants sont venus me trouver récemment pour me dire qu'il leur manquait de 50 000 à 80 000 euros pour la saison prochaine, faute de quoi ils devront se résigner à une rétrogradation ?

J'avoue que je me suis senti dans une position délicate. Je leur ai promis de faire le nécessaire et je pense que nous trouverons, au moins pour une année, les moyens qui leur permettront de continuer. Il demeure regrettable, dans de telles conditions, que le sport dépende d'impératifs financiers, face auxquels nous nous trouvons parfois impuissants.

Si les collectivités locales veulent maintenir ce niveau de performance sportive, c'est en entourant les sportifs qu'elles y parviendront. Malgré les efforts fournis par de rares bénévoles qui portent les clubs à bout de bras, j'espère que le degré de richesse des clubs ne déterminera pas, à terme, la valeur sportive de ses membres.

Si nous voulons maintenir des sportifs de haut niveau au sein de ce club, nous devrons dégager des moyens pour y parvenir, tâche difficile pour une petite collectivité. Pouvons-nous espérer une aide ponctuelle de votre ministère ou du CNDS, ou par toute autre voie ? Il est sûr que nous ne pourrons pas tenir longtemps dans ces conditions ; c'est actuellement une question de survie qui est posée. J'ajoute que des investissements importants doivent être réalisés pour autoriser ce club à persévérer.

Les crédits consacrés par l'État à la jeunesse et à la vie associative, d'un montant de 132 millions d'euros, diminuent de 2,6% par rapport à 2007. Suffiront-ils au secteur associatif, qui compte 12 millions de bénévoles et 1,6 million de salariés, pour un total de 20 millions de membres ?

Depuis plusieurs années déjà, on observe un essoufflement du bénévolat, qui ne semble pas spécialement intéresser les jeunes générations, ce qui est tout de même très inquiétant ! De plus, les élus sont parfois harcelés par l'administration, voire la justice - je suis bien placé pour le savoir - qui assimile un peu trop facilement le bénévolat sportif à du travail clandestin. Or, dans notre société bien trop individualiste, je pense qu'il faut sensibiliser par tous les moyens les jeunes au don de soi, à la générosité d'un engagement sportif et associatif au service des autres.

Pour ma part, j'ai appuyé l'idée d'un service civique obligatoire pour tous les jeunes gens et jeunes filles qui pourraient consacrer ce temps à des missions d'intérêt général, au service des associations sportives, de jeunesse ou d'éducation populaire, par exemple, ce qui constituerait pour eux une expérience très intéressante de brassage social. Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'État, où en est la réflexion du Gouvernement sur ce sujet.

Le dernier point que j'évoquerai est la lutte contre le dopage : j'ai déjà eu l'occasion, voilà quelques années, de livrer mon point de vue à votre prédécesseur sur ce sujet. J'ai été effaré, en lisant les résultats d'une étude, d'apprendre que l'utilisation des produits dopants concernait également les collégiens et lycéens qui s'adonnent à la pratique sportive et que ce phénomène n'était absolument pas circonscrit à certains sports comme le cyclisme. Monsieur le secrétaire d'État, où allons-nous ? Les sportifs concernés, au-delà de l'aspect de tricherie, savent-ils qu'ils risquent d'abréger leur vie ?

À cet égard, la stagnation des crédits destinés à la prévention et à la protection de la santé des sportifs ainsi que la baisse de ceux consacrés à leur suivi longitudinal me préoccupent : la lutte contre le dopage ne constituerait-elle plus une priorité nationale ? Franchement, je ne peux pas le croire et je compte sur vous, monsieur le secrétaire d'État, pour me rassurer sur ce point.

Enfin, j'ai été heureux de constater que nos collègues députés ont actualisé l'assiette de la taxe sur les droits de télédiffusion des manifestations sportives qui alimente le CNDS et qui constitue un excellent outil de solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur. Espérons que les nouvelles ressources ainsi dégagées permettront d'augmenter l'aide apportée aux « petits » clubs sportifs de province !

Malgré les insuffisances que j'ai pu signaler et les difficultés que j'ai soulignées, mais en nourrissant l'espoir de voir les promesses effectivement tenues, c'est avec plaisir, monsieur le secrétaire d'État, que je soutiendrai et voterai votre budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je partirai tout d'abord d'un constat, car certains éléments de ce projet de loi de finances non relevés par mon collègue Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, méritent d'être soulignés.

Je veux parler, par exemple, de la diminution de près de 50 % des crédits inscrits à l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre », qui passent de 41 millions d'euros à 22 millions d'euros. Faut-il comprendre que le Gouvernement abandonne la quasi-totalité de ce secteur au profit du CNDS ? Nous constatons aussi que l'intervention de l'État ne représente que 2 % de la dépense sportive nationale et se décline en une stratification de dispositifs parcellaires accumulés au fil des années ! De leur côté, les collectivités territoriales investissent quinze fois plus au profit du sport pour le plus grand nombre.

Il faut également parler des crédits budgétaires destinés au développement de la pratique sportive des jeunes en âge scolaire et des habitants des quartiers défavorisés, financés dans le cadre du Programme national de développement du sport, par une enveloppe de 73 millions d'euros, contre 120 millions d'euros en 2007, provenant de crédits temporairement prélevés sur les fonds du CNDS. Cette situation est très préoccupante, car le PNDS n'est financé que pour trois ans par un prélèvement complémentaire exceptionnel sur les recettes de la Française des Jeux et par l'augmentation du produit de la taxe de 5 % sur les cessions de droits de diffusion télévisuelle des compétitions et manifestations sportives.

L'année 2008 sera la dernière année de mise en oeuvre de ce plan et on constate que, sur trois ans, l'État a relevé par deux fois le montant du prélèvement : 20 millions d'euros en 2007 auxquels s'ajoutent encore 20 millions d'euros en 2008, pour atteindre un total de 160 millions d'euros. On peut légitimement s'interroger sur les conditions de financement de ces politiques au-delà de 2009.

S'agissant du développement du sport de haut niveau, pour l'année olympique à venir, les moyens demandés semblent croître significativement : 152 millions d'euros, soit 70 % du programme, en augmentation de 13 % par rapport à 2007 et de 35 % par rapport à 2006.

Mais, à périmètre constant, la dotation budgétaire diminue de 11 % puisqu'elle intègre, en 2008, la compensation des exonérations des charges sociales accordées au titre de la rémunération du droit d'image de plus de mille sportifs professionnels, soit 32 millions d'euros de remboursement à l'ACOSS, en augmentation de 113 % par rapport à l'année dernière.

Parallèlement, les crédits de développement des pratiques sportives pour tous, qui permettent notamment l'accueil des jeunes dans les écoles de sport en dehors du temps scolaire, enregistrent une baisse de 4,5 %, atteignant 3,59 millions d'euros en 2008, contre 3,76 millions d'euros en 2007 et 7,58 millions d'euros en 2006.

De même, les crédits pour l'accès des publics particuliers à la pratique sportive et pour les actions éducatives et sociales de sport enregistrent une baisse de près de 17 %.

Enfin, nous constatons que 45 % de l'enveloppe des dépenses d'intervention concernant le soutien à l'activité et au fonctionnement du mouvement sportif national sont affectées aux fédérations olympiques, ce qui ne laisse pas grand-chose aux petits clubs.

Ce budget souligne le démentiel effort consenti pour une minorité, en l'occurrence mille personnes, par rapport à la diminution dramatique des moyens destinés au plus grand nombre !

La stagnation, à hauteur de 15,6 millions d'euros, des crédits de l'action « Prévention par le sport et protection des sportifs », suscite également des inquiétudes majeures. Le budget prévisionnel de l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD, est évalué à 7,8 millions d'euros, contre 7,6 millions d'euros l'année dernière. La faible augmentation des moyens octroyés ne permettra guère à l'agence de procéder à des investissements, notamment dans le secteur de la recherche, et fait douter, face à l'ampleur du dopage, de sa capacité à remplir ses missions de manière crédible et efficace.

De plus, l'érosion se poursuit concernant le poste « Médecine et prévention du dopage », avec une baisse de 17,2 %, ses crédits atteignant 6 millions d'euros en 2008 contre 7,25 millions d'euros en 2007.

Au moment où votre prédécesseur, M. Jean-François Lamour, vient de renoncer à briguer la présidence de l'Agence mondiale antidopage, au moment où le directeur de l'Agence française de lutte contre le dopage, M. Pierre Bordry, déplore publiquement le manque de coopération de votre ministère et la pénurie de moyens financiers et humains dont souffre son agence, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous assurer de votre détermination à lutter énergiquement contre le fléau du dopage ?

Avec ce budget, comment pouvons-nous croire que le combat pour l'intégrité physique et morale des sportifs sera poursuivi et amplifié ? Il faut développer les efforts de prévention, agir sans faiblesse dans la lutte contre le dopage, agir dans l'urgence afin que l'Agence mondiale antidopage, conserve des objectifs ambitieux - et rien n'est acquis d'avance.

L'évidence de ce combat est telle que la commission des affaires culturelles a souhaité renforcer les moyens de l'Agence française de lutte contre le dopage en lui attribuant 300 000 euros, mais cette somme serait, hélas ! prélevée sur les crédits destinés à la promotion des actions en faveur de la jeunesse, qui baissent de 1,5 % en euros constants. J'y reviendrai au moment de la discussion de cet amendement.

Laissez-moi également vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur les défis que doit relever le monde du sport. De nombreux acteurs du monde économique et financier ont la volonté de faire du sport une activité marchande comme les autres. Qu'en pensez-vous ? Quelle réaction suscite chez vous le souhait exprimé par certains grands clubs de créer des ligues professionnelles sur le modèle franchisé américain, qui entreraient en concurrence avec les compétitions européennes existantes ?

Loin de cette marchandisation à outrance, loin du « sport business », des millions de Français, de tous âges et de toutes conditions, le plus souvent des bénévoles désintéressés, s'adonnent chaque semaine à leur discipline sportive favorite. Vous comprendrez qu'ils souhaitent à présent vous entendre parler de votre conception du sport et de vos projets, alors même que votre budget semble favoriser une minorité de professionnels au détriment du plus grand nombre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, récemment, Mme Bachelot a accueilli une délégation syndicale en se présentant comme « la ministre de la jeunesse et de la santé ». La formule n'était pas anodine : la composition du gouvernement Fillon est en effet marquée par la disparition du ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, au profit d'un regroupement un peu curieux, manifestant une conception sanitaire, que l'on connaît bien, de l'action publique en faveur de la jeunesse et du sport.

Les acteurs du mouvement associatif et de l'éducation populaire n'ont d'ailleurs guère été rassurés par la nomination d'un proche du Président de la République - mais là n'est pas le problème - au Gouvernement en tant que secrétaire d'État chargé uniquement des sports.

Certes, monsieur le secrétaire d'État, cette proximité avec le chef de l'État ne nuit pas, semble-t-il, au budget dédié au sport, dont les crédits, en intégrant ceux qui sont alloués au Centre national pour le développement du sport, progressent de plus de 6 %, en euros constants entre la loi de finances initiale de 2007 et le projet de loi de finances pour 2008.

Toutefois, cette hausse significative profite en fait seulement au développement du sport de haut niveau : les moyens que l'État prévoit d'y consacrer en 2008 augmentent de plus de 13 % par rapport à 2007. Ce mouvement signe le retrait de plus en plus marqué du ministère chargé de la jeunesse et des sports du soutien à la pratique amateur du sport.

Cette tendance structurelle, qui se lit dans les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2008, participe en fait fondamentalement de la politique conduite par la droite au pouvoir depuis 2002. L'action publique en faveur de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative est la grande perdante de cette politique.

Déjà, l'une des premières décisions du gouvernement Raffarin avait consisté à supprimer 350 000 emplois-jeunes déployés dans 37 000 associations. Déjà, les crédits en faveur de la jeunesse et de la vie associative avaient connu des coupes claires dans la loi de finances de 2005, avant que le gouvernement d'alors, confronté aux émeutes urbaines de l'automne, ne réinjecte un peu d'argent dans le tissu associatif en 2006.

Depuis, le désengagement de l'État a repris, et il se poursuivra en 2008, comme le montre d'ailleurs le rapport sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » rédigé au nom de la commission des finances par notre collègue Michel Sergent. C'est ce que montre aussi la comparaison de la prévision budgétaire pour 2008 avec l'exécution du budget de 2006.

La loi de finances initiale de 2006 avait porté à 134,4 millions d'euros l'effort de l'État en faveur du programme « Jeunesse et vie associative », à la suite de l'inscription, lors des débats parlementaires, de 8,3 millions d'euros supplémentaires dédiés au plan d'urgence pour les banlieues. Cet effort n'est plus que de 132,1 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008. Il est toujours intéressant de mettre en perspective la réduction structurelle des engagements financiers.

Alors que le Gouvernement se vante de développer l'accompagnement éducatif après la classe, le financement des projets éducatifs locaux bénéficie de seulement 200 000 euros de plus que la somme consommée à ce titre en 2006, ce qui représente une baisse non négligeable en euros constants.

Alors que le Gouvernement se prévaut d'encourager la mobilité internationale des jeunes, les subventions à l'Office franco-allemand pour la jeunesse et à l'Office franco-québécois pour la jeunesse ne devraient atteindre que 13,25 millions d'euros en 2008, contre 13,9 millions d'euros versés en 2006. Encore une baisse !

Quant aux actions en faveur de l'éducation populaire, elles subissent de plein fouet l'effort de prétendue maîtrise des dépenses publiques, que le Gouvernement fait porter uniquement sur les politiques de solidarité et de protection sociale. On a vu, avec l'instauration du bouclier fiscal, que d'autres domaines étaient épargnés !

Ainsi, le soutien à l'emploi associatif par l'intermédiaire du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire, le FONJEP, devrait mobiliser 26,45 millions d'euros en 2008, soit une augmentation de ces crédits de 1 % en euros courants, c'est-à-dire une évolution négative en euros constants. Tout cela n'est que de l'affichage...

Il faut aussi noter qu'il est difficile de mesurer les résultats de la mise en oeuvre du dispositif lancé en 2006 pour inciter des jeunes à devenir animateur ou éducateur - le « parcours animation sport », le PAS -, qui doit bénéficier de 2,8 millions d'euros en 2008.

L'enveloppe budgétaire allouée au financement d'actions de formation à la conduite de projets associatifs, par l'intermédiaire du Conseil du développement de la vie associative, baissera également, en euros constants, entre 2007 et 2008. Quant aux crédits mis à disposition des directions régionales et départementales de la jeunesse et des sports pour soutenir le mouvement associatif local, ils sont en diminution de 14 % par rapport à ceux qui étaient inscrits dans la loi de finances initiale de 2007.

Enfin, présenté dans les documents officiels comme un « axe prioritaire de l'action du ministère », le soutien aux associations nationales agréées de l'éducation populaire devrait mobiliser, en 2008, des crédits à peine égaux, en euros courants, à ceux qui ont été consommés en 2006, et inférieurs de plus de 14 % à ceux qui étaient prévus dans la loi de finances initiale de 2007 ! Où est la priorité ?

À la lecture de ces chiffres, on ne peut que s'inquiéter : alors que les politiques en faveur de la jeunesse et de la vie associative contribuent, de manière décisive, à créer et à entretenir le lien social, tant dans les quartiers urbains en difficulté qu'entre les générations, le Gouvernement confirme, dans son projet de budget pour 2008, la tendance, observée depuis 2002, au désengagement systématique de l'État du soutien à l'éducation populaire et au mouvement associatif.

Dans ce contexte, on ne peut que soutenir l'amendement présenté par le rapporteur spécial, Michel Sergent, tendant à transférer 3 millions d'euros du programme « Sport » vers les crédits alloués à la « promotion des actions en faveur de la jeunesse » et à la « promotion des actions en faveur de l'éducation populaire », et on ne peut qu'afficher son scepticisme quant à la portée réelle de la déclaration du secrétaire d'État chargé des sports faite le 5 décembre dernier, dans la presse locale, en faveur de la création d'un service civique obligatoire pour les jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans.

En effet, pour avoir beaucoup travaillé sur ce projet avec les associations et les acteurs concernés afin d'essayer d'en chiffrer le coût, en vue de le mettre en oeuvre si nous arrivions au pouvoir (M. Alain Dufaut rit), je connais le caractère très « budgétivore » d'un tel dispositif, qui est néanmoins intéressant et nécessaire.

En tout état de cause, les effets d'annonce ne suffisent pas. Quand ce chantier sera-t-il ouvert, alors que rien n'est prévu dans le projet de budget ? J'espère que l'on n'ira pas prélever des crédits déjà affectés pour financer la mise en place de ce dispositif. Souhaitons que ce débat budgétaire nous apporte quelques éclaircissements sur ces points, monsieur Laporte ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, intervenant comme dernier orateur, je reviendrai, à la suite de ceux qui m'ont précédé, sur un certain nombre de points essentiels.

On le sait, le sport est une excellente école pour les enfants et pour les jeunes. Une pratique régulière permet la transmission et l'apprentissage d'une série de valeurs, telles que l'effort, la discipline, le respect de l'autre, le sens de l'équipe, la gestion des violences, ce qui est tout à fait bénéfique tant à l'individu qu'à la collectivité.

Les professeurs d'éducation physique sont d'ailleurs de très bons éducateurs, car ils tissent une relation toute particulière avec leurs élèves. Malheureusement, l'image que donne le sport professionnel sape en partie le travail fait d'abord à l'école, et ensuite par les éducateurs dans les nombreux clubs de sport amateur.

Trois maux menacent en effet la qualité du sport, qu'il soit professionnel ou amateur : le dopage, la violence dans les stades et l'affairisme.

S'agissant en premier lieu du dopage, le gouvernement de Lionel Jospin avait su prendre un certain nombre d'initiatives, au travers notamment de la loi du 23 mars 1999, dite loi Buffet, visant à encadrer la surveillance médicale des sportifs, à créer une autorité administrative indépendante, ainsi qu'à renforcer les sanctions pénales et administratives. En clôture de la conférence de Madrid, le 17 novembre dernier, il a été officiellement décidé d'inscrire dans le code mondial antidopage, récemment révisé, la possibilité d'infliger des sanctions financières aux sportifs convaincus de dopage.

Cependant, force est de constater que, aujourd'hui, le processus est arrêté et que le législateur semble courir derrière les dernières inventions des pourvoyeurs et des consommateurs. Il est par exemple déplorable d'assister au retrait, de plus en plus expéditif, des différents titres ou médailles des sportifs déclarés vainqueurs des grandes compétitions. Vous irez sans doute aux jeux Olympiques de Pékin, monsieur le secrétaire d'État ; savez-vous qui vous allez applaudir ? Savez-vous combien de temps ceux qui auront remporté une médaille d'or la garderont autour du cou ?

Dans ces conditions, quelles mesures comptez-vous prendre afin de garantir une meilleure prévention, au moins chez nous, et de faire en sorte que, sur le plan international, de véritables initiatives soient prises et respectées par tous ?

J'évoquerai en deuxième lieu la violence dans les stades.

Malgré les déclarations retentissantes de M. Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, à l'occasion de la mort dramatique d'un supporteur, le 23 novembre 2006,...

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Ce n'était pas dans un stade !

M. Yannick Bodin. ... les stades ne sont toujours pas apaisés. Les jeunes spectateurs, toujours plus nombreux et plus passionnés, s'enthousiasment pour le football, mais ont sous les yeux le spectacle de supporteurs violents. Les dispositifs d'encadrement et de sécurité sont insuffisants, comparativement à ce qui a été fait, par exemple, en Grande-Bretagne.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. En augmentant de 30 % le prix des places !

M. Yannick Bodin. On en parle depuis tant d'années ! Il serait temps de mettre en oeuvre les bonnes solutions.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. Il ne s'agit sûrement pas de copier ce qui se fait en Angleterre !

M. Yannick Bodin. S'agissant en troisième lieu de l'affairisme, on peut s'interroger sur le montant exorbitant des salaires des sportifs professionnels, ainsi que sur leur droit à l'image.

Sous la pression financière et médiatique - pour ne pas dire, tout simplement, médiatico-financière -, les sportifs paraissent souvent plus sensibles à l'image qu'ils véhiculent qu'à leurs performances. Sur le plan fiscal, les revenus découlant de ce droit à l'image sont plafonnés, afin de dissuader le départ à l'étranger des meilleurs, nous dit-on. Dans la pratique, cette mesure s'avère inefficace : il suffit, pour s'en convaincre, de regarder l'équipe de France de football, qui est généralement constituée, dans une très large mesure, de joueurs ayant quitté notre pays.

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. Parce qu'on leur donne davantage ailleurs !

M. Yannick Bodin. Ne faudrait-il pas revenir à une fiscalité plus raisonnable appliquée à des revenus plus raisonnables ?

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. On aura une équipe d'amateurs, alors !

M. Yannick Bodin. En outre, les dérives sont fréquentes, et trop d'exemples mettant en cause des clubs et des sportifs montrent que l'on passe rapidement des affaires à l'affairisme, de la rubrique « sports » à la rubrique « faits divers ». Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'État, pour mettre un terme à cette dérive qui détruit l'excellent travail de nos professeurs, de nos éducateurs, de nos bénévoles, lesquels consacrent l'essentiel de leur vie à enseigner les valeurs du sport ?

Bref, au regard des trois points que j'ai abordés, les engagements budgétaires demeurent insuffisants. Je confirme donc que notre groupe votera contre les crédits que vous nous présentez. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. C'est surprenant !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, chargé des sports. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter aujourd'hui les grandes orientations d'un projet de budget qui traduit déjà, par ses inflexions majeures, la volonté de promouvoir la pratique sportive dans notre pays.

Pour mettre en oeuvre sa politique dans le domaine de la jeunesse, des sports et de la vie associative, le ministère disposera, en 2008, de 1,048 milliard d'euros, si l'on ajoute aux crédits de la mission les 266 millions d'euros inscrits au budget du CNDS.

Les moyens financiers progressent donc globalement en 2008 de 27,5 millions d'euros par rapport à 2007, soit une hausse de 2,7 %, et non une baisse comme l'a affirmé M. Voguet.

Chacun peut avoir sa propre lecture de ce budget. Certains, comme M. Tropeano, ont jugé qu'il était décevant, et je respecte leur appréciation. Mais personne ne peut sérieusement croire qu'un gouvernement qui est entré en fonctions en mai, puisse, en quelques mois seulement, atteindre des objectifs fixés pour la mandature.

Pour ma part, je retiens que le budget alloué au sport par l'État est en progression et que la volonté politique du Président de la République et du Gouvernement dans ce domaine est très forte. En réponse à la demande de MM. Voguet et Dufaut, j'ajouterai que l'engagement présidentiel porte sur l'ensemble du périmètre de la dépense publique en faveur du sport et sur toute la durée de la mandature.

En quoi ce budget traduit-il notre volonté de promouvoir la pratique du sport ?

Tout d'abord, conformément à un engagement fort du Président de la République, notre priorité pour 2008 sera de favoriser la pratique du sport par les jeunes scolarisés et par les habitants des quartiers en difficulté. Un montant de 30 millions d'euros supplémentaires sera alloué au CNDS qui a, en outre, à notre demande, accepté d'affecter à cette priorité 30 % de ses ressources, soit environ 80 millions d'euros. Cet effort témoigne du soutien qu'apportent à cette ambition le mouvement sportif et les collectivités territoriales.

Nous avons commencé à mettre en oeuvre, avec le ministère de l'éducation nationale, un projet commun autour du dispositif d'accompagnement éducatif, dont le sport constitue l'un des volets. Ce dispositif est appliqué dans les 1100 collèges en zone d'éducation prioritaire ; son déploiement dans les autres collèges interviendra à partir de la rentrée 2008.

L'augmentation de la pratique des activités sportives à l'école primaire est également l'une de mes ambitions.

Avec l'appui du CNDS, en 2008, nous allons tout d'abord accroître et moderniser les équipements sportifs structurants ou de moindre ampleur, en particulier ceux qui sont utilisés par les jeunes scolarisés et par les habitants des quartiers en difficulté, en nous appuyant notamment sur le recensement des équipements sportifs. Nous allons ensuite aider les fédérations, les clubs sportifs et les associations sportives scolaires qui s'engageront sur des actions en faveur de ces deux populations. Enfin, nous favoriserons l'emploi sportif.

Le soutien aux quartiers en difficulté constitue une autre grande priorité gouvernementale. C'est pourquoi un effort particulier sera réalisé en faveur des équipements sportifs, souvent insuffisants et obsolètes, de l'encadrement sportif et des clubs sportifs de ces quartiers. En réponse à la question de M. Dufaut sur les moyens consacrés à la pratique sportive des jeunes filles, je rappellerai qu'en 2006 le total des crédits déconcentrés consacrés à des actions spécifiques de développement de la pratique féminine a été de 6,6 millions d'euros, dont 0,8 million d'euros au titre de la pratique féminine dans les quartiers sensibles.

De plus, dans le cadre des conventions d'objectifs nationales, en 2006, une trentaine de fédérations ont bénéficié de subventions d'un montant total de 1,36 million d'euros pour des actions spécifiques de promotion de la pratique sportive féminine.

Dans le cadre du plan national de développement de l'emploi sportif qualifié, c'est-à-dire les emplois STAPS, treize fédérations sportives et un groupement bénéficient pendant deux ans de 47 emplois intégralement financés par l'État, devant permettre la mise en oeuvre de plans de féminisation. En conséquence, les moyens mobilisés en 2007 peuvent être estimés à près de 8 millions d'euros.

Ces moyens augmenteront dans le cadre de la mise en place des aides à la pratique sportive pour les jeunes scolarisés dans les collèges situés en zone d'éducation prioritaire.

Certains exemples méritent par ailleurs d'être soulignés, comme le concours national et les concours régionaux « femmes et sport » dont l'objectif est de promouvoir l'image, la place et le rôle des femmes dans les pratiques physiques et sportives et leur accès aux responsabilités en France, notamment dans les quartiers urbains sensibles.

En outre, un pôle ressources national « sport, famille, pratiques féminines », a été mis en place en décembre 2005.

Le soutien aux quartiers en difficulté est donc l'un des chantiers prioritaires de mon secrétariat d'État.

M. Alain Dufaut. Très bien !

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Mais l'ampleur de cette tâche ne doit pas nous conduire à oublier les zones rurales. Je tiens à rassurer MM. Pierre Martin, Jean Boyer et Claude Biwer : j'y veillerai personnellement. L'action en faveur des zones rurales est déjà menée par les services déconcentrés implantés dans des départements à dominante rurale dans le cadre des actions générales conduites par le ministère.

La ruralité est prise en compte de différentes façons : par l'action volontariste du ministère sur le développement des sports de nature, avec la nomination d'un référent « sports de nature » dans chaque direction départementale de la jeunesse et des sports et dans chaque direction régionale et départementale de la jeunesse et des sports ; par le travail partenarial mené avec les parcs naturels régionaux et les pôles d'excellence rurale ; et par l'implication forte des services déconcentrés dans la mise en place des commissions départementales des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature.

J'ajoute que le programme « Jeunesse et vie associative » affecte des crédits importants aux territoires ruraux ainsi que des postes FONJEP. Vos contributions pourraient nous être fort utiles pour envisager le cadre et les dispositions les plus appropriés en vue d'approfondir ces actions.

Toutefois, pour répondre plus spécifiquement à la question de M. Boyer sur les subventions de moins de 450 euros, je souhaite rappeler qu'une étude sur le coût de traitement des subventions par le CNDS a montré que le coût moyen dépasse 230 euros. Bien sûr, il n'est pas plus coûteux ou difficile d'instruire et de traiter un dossier de demande de subvention de 300 euros ou de 3000 euros. Ainsi, s'imposer que les coûts de gestion ne dépassent pas 50 % du montant des subventions me semble un minimum, vous en conviendrez.

Il ne s'agit pas pour autant, monsieur Biwer, vous l'aurez compris, de remettre en cause la nécessité pour l'État de financer aussi des petits projets. Simplement, malgré l'effet de levier indéniable des subventions de l'État, il apparaît dans certains cas plus judicieux d'envisager de nouveaux moyens d'aider les projets concernés de façon plus efficiente.

À côté de ces deux priorités nouvelles, qui bénéficieront principalement des moyens financiers du CNDS, le programme « Sport » prolongera une politique d'encouragement aux projets permettant de faciliter l'accès à la pratique sportive régulière de publics qui en sont éloignés. Je pense notamment aux personnes handicapées et aux personnes en difficulté d'insertion. Il faudra aussi que nous prenions mieux en compte la pratique sportive par les seniors, même si des programmes tels que le plan national « Bien vieillir » sont déjà mis en oeuvre par le ministère.

Je souhaite enfin rassurer M. le rapporteur spécial pour ce qui est du soutien aux fédérations, et plus particulièrement aux petites fédérations. La diminution des enveloppes financières attribuées dans le cadre des conventions d'objectifs est compensée par un financement nouveau au titre du PNDS.

Le deuxième volet du budget du sport est consacré au sport de haut niveau.

À cet égard, le très ambitieux projet de rénovation et de modernisation de l'INSEP, d'un coût total de 147 millions d'euros, lancé par mon prédécesseur, Jean-François Lamour, sera mené à bien. Ce montant est supérieur à celui qui était initialement envisagé en 2004, comme l'ont fait observer M. Sergent, dans son rapport, et M. Voguet. Une partie de ce surcoût est liée à la progression de l'indice du coût de la construction, l'autre partie, à l'ajustement aux besoins pendant l'élaboration du projet, sans oublier une provision de 10 millions d'euros en cas de dédit, comme Mme Bachelot-Narquin avait pu le souligner lors de son audition concernant la loi de règlement pour 2006. En outre, la hausse de l'enveloppe initiale peut apparaître rétrospectivement comme intrinsèquement liée au caractère novateur de ce partenariat public-privé.

L'année 2008 constituera une année charnière pour l'INSEP. Elle sera marquée par l'ouverture des premiers bâtiments d'hébergement et de formation prévus dans le cadre d'un contrat de partenariat, et par la construction d'un nouveau pôle sportif, dont la livraison interviendra au deuxième trimestre 2009. Le ministère y consacrera en 2008 une somme de 25,6 millions d'euros en investissements et de 5,24 millions d'euros en subventions de fonctionnement.

Outre l'aide financière apportée par le CNDS aux délégations françaises aux jeux Olympiques, le ministère a provisionné 4,7 millions d'euros destinés au versement de primes pour les médaillés olympiques. Pour la première fois, les primes des médaillés paralympiques seront alignées sur celles des médaillés olympiques. Cette mesure n'est que justice et a reçu le meilleur accueil au sein du mouvement sportif. Je suis certain qu'il en sera de même de votre part.

Enfin, dans le cadre de notre politique de renforcement de la compétitivité internationale des clubs sportifs professionnels français, 32 millions d'euros seront réservés en 2008, sur le programme « Sport », à la compensation des exonérations de charges sociales accordées au titre du droit à l'image des sportifs professionnels.

Certains, comme M. Bodin, peuvent trouver le montant trop élevé, mais il faut savoir ce que l'on veut. Nous ne pouvons pas, dans le même temps, regretter le manque de compétitivité de nos clubs sur le plan international et critiquer toute initiative prise pour y remédier. En outre, il est faux d'affirmer que cet effort en faveur du sport professionnel se fait au détriment du sport pour tous. L'exemple des dernières coupes du monde de football et de rugby montre que les résultats de nos sportifs d'élite se traduisent immédiatement par une augmentation du nombre de licenciés, en particulier des jeunes.

Il me paraît en revanche important de maîtriser le coût, et je vais mener les consultations nécessaires pour y parvenir. Je compte également sur les résultats de vos travaux, monsieur le rapporteur spécial, pour m'aider à améliorer ce dispositif.

Je tiens enfin à rappeler que l'Assemblée nationale, avec l'approbation du Gouvernement, a adopté un amendement prévoyant l'établissement en 2008 d'un bilan de ce dispositif.

Concernant plus généralement le financement des clubs sportifs, et en réponse à la question de M. Murat sur leurs relations avec les collectivités locales, je souhaite rappeler que les dispositions actuelles du code du sport permettent aux collectivités territoriales d'aider les clubs professionnels, soit en leur versant des subventions pour des missions d'intérêt général, soit en passant avec eux des contrats de prestations de service dans la limite de montants précis. La décision d'attribution d'une telle aide repose donc sur la libre appréciation de chaque collectivité.

Les chambres régionales des comptes procèdent actuellement à une enquête spécifique sur le sujet. Leurs conclusions, annoncées pour le mois de mars 2008, apporteront des éléments objectifs sur ce dispositif qui me permettront de mieux vous répondre, peut-être à l'occasion de la prochaine loi de règlement.

J'aborderai à présent la protection de la santé des sportifs qui constitue une action essentielle du programme « Sport ».

Le ministère entend poursuivre son action volontariste en faveur de la lutte contre le dopage. Il suivra plusieurs axes clairs : l'amélioration du dispositif de prévention, l'accroissement de l'effort en matière de recherche, le renforcement du dispositif répressif, qui donnera lieu dans les prochains mois au dépôt d'un projet de loi, et enfin, le renforcement des contrôles urinaires et sanguins.

Au titre du programme « Sport », l'Agence française de lutte contre le dopage, l'AFLD, recevra du ministère une enveloppe budgétaire de 7,3 millions d'euros en 2008, en augmentation par rapport à 2007. Sa politique tarifaire dynamique devrait par ailleurs compléter ces financements.

J'apporterai, sur ce sujet, plusieurs précisions.

La prise en charge par l'ALFD des contrôles inopinés des sportifs français susceptibles de participer aux jeux Olympiques de Pékin n'est pas génératrice de surcoûts. En effet, les frais de déplacement induits par ces contrôles pourront être financés sur l'enveloppe globale affectée aux contrôles sur les compétitions internationales, qui, depuis 2006, ne sont plus effectués. La marge de manoeuvre dégagée équivaut à environ 2 000 contrôles sur les 8 500 financés grâce à l'enveloppe allouée par le ministère.

Les modalités de prise en charge du passeport sanguin, qui sera expérimenté dans le secteur du cyclisme en 2008, ne permettent pas de conclure à un surcoût pour l'AFLD. Le coût du passeport sanguin n'est pas encore précisément chiffré ni réparti entre les différentes parties prenantes. A priori, la mise en oeuvre du passeport sanguin ne devrait pas alourdir les charges de l'AFLD.

Enfin, l'AFLD dispose d'un fonds de roulement qu'elle évalue elle-même à environ 2 millions d'euros, soit l'équivalent de trois mois de fonds de roulement, alors même que vous connaissez le cadre raisonné du budget pour 2008, et que les nouvelles demandes de l'AFLD portent sur des moyens de fonctionnement et des personnels supplémentaires.

En conséquence je considère que l'AFLD ne sera pas sous-dotée en 2008.

Permettez-moi également de faire observer, notamment en réponse à M. Biwer, que l'on ne peut reprocher au ministère français des sports une quelconque inertie en matière de lutte contre le dopage. C'est probablement l'un des plus actifs au monde, comme l'a démontré il y a quelques semaines, l'organisation à Paris, sous l'égide du ministère, de la première Rencontre internationale contre le dopage dans le cyclisme.

Comme le soulignait M. Dufaut, nous devons rester les gardiens de l'esprit sportif et les véritables leaders de la lutte anti-dopage.

Monsieur Dufaut, sur l'Agence mondiale antidopage, je suis en total accord avec vous. Nous ne devons pas sombrer dans le procès d'intention à l'encontre de M. Fahey, mais nous devons aussi être particulièrement vigilants quant à la politique qu'il compte mener. Dans cet esprit, M. Fahey sera reçu par le Conseil de l'Europe pour des échanges sur la politique générale de l'AMA, voire une révision de la coopération intercontinentale dans les instances.

Le nouveau périmètre du ministère va aussi nous permettre de développer les actions liant le sport et la santé. Je souhaiterais, à ce titre, répondre à l'inquiétude de M. Murat concernant l'insuffisance des effectifs en matière de médecine du sport, soulignée lors des états généraux du sport, en 2002.

Le ministère a pris des initiatives dans trois directions.

II a d'abord renforcé la qualité des formations et l'attractivité de la médecine du sport avec la création, en 2002, d'un diplôme d'études supérieures complémentaire en médecine du sport. Cette formation, réservée pour l'instant aux médecins spécialistes, s'étendra très prochainement aux généralistes.

Le ministère a aussi renforcé le nombre de services hospitaliers dédiés à la médecine du sport, ainsi que les liens avec les services médicaux des établissements « jeunesse et sport », avec la création d'un centre d'investigation en médecine du sport à l'Hôtel-Dieu.

Concernant la recherche, nous avons créé un nouveau département au sein de l'INSEP : l'Institut de recherche biomédicale et épidémiologie du sport, l'IRMES. Les études et recherches développées dans ce lieu, principalement axées sur le sport de haut niveau, devraient contribuer à améliorer l'attractivité de la médecine du sport et à inciter plus de médecins à se former dans ce domaine.

Nous procéderons à une évaluation des résultats déjà obtenus au travers de ces actions, avant d'engager éventuellement une réflexion sur la création d'une véritable spécialité en médecine du sport.

J'aborderai à présent le financement en 2008 de la politique de la jeunesse et du développement de la vie associative, qui sera essentiellement stimulée par une incitation forte au bénévolat et au volontariat associatif.

Concernant le bénévolat, j'évoquerai tout d'abord brièvement les suites données par le ministère au rapport d'octobre 2005 de M. Bernard Murat sur le bénévolat dans le secteur associatif. Ce rapport était assorti de dix propositions, dont l'objectif était de susciter de nouvelles vocations, de sensibiliser les petites entreprises au mécénat et d'améliorer la reconnaissance de l'investissement bénévole.

Un certain nombre d'entre elles ont déjà été suivi d'effets, dans le cadre des vingt-cinq mesures adoptées à l'issue de la conférence de la vie associative du 23 janvier 2006. Le ministère a ainsi créé un réseau labellisé de centres de ressources et un certificat de formation à la gestion associative, proposé par le Conseil national de la jeunesse depuis le mois d'octobre 2006. Ce dispositif de formation théorique et pratique des bénévoles est ouvert à tous les bénévoles, notamment aux jeunes désireux de s'investir dans des projets associatifs. Les formations font l'objet d'une déclaration aux services de l'État. À l'issue de cette formation, un certificat est délivré par le préfet de région.

Les récents engagements du Président de la République en faveur du bénévolat viendront compléter les dispositifs existants. Il s'agit notamment de la création d'un livret d'épargne civique et d'un passeport du bénévole, qui accompagneront le bénévole pendant toute la durée de son engagement et lui ouvriront des droits. Ils pourraient ainsi donner des points supplémentaires aux examens, permettre de bénéficier de stages de formation gratuite ou être pris en compte pour le calcul des droits à la retraite.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Nous devons aussi répondre à l'aspiration de nombreux citoyens, qui souhaitent consacrer une période de leur vie à la réalisation d'une mission d'intérêt général au sein d'associations, dans le cadre du volontariat associatif.

Ainsi, en 2008, 5 millions d'euros seront consacrés au volontariat associatif pour mobiliser les citoyens, notamment les jeunes, autour de projets solidaires dans les domaines de la lutte contre l'exclusion et les discriminations, de la santé, de l'environnement, de l'éducation et de la culture.

Le soutien à l'emploi associatif sera conforté par la poursuite du programme Parcours animation sport, pour 5,3 millions d'euros. Ce programme offre à des jeunes en difficulté d'insertion sociale et professionnelle la possibilité d'obtenir une qualification reconnue tout en bénéficiant d'une rémunération partiellement prise en charge par l'État. En outre, le ministère accueillera, en 2008, 3 000 jeunes dans le cadre de la formation professionnelle initiale.

Le ministère poursuivra sa politique de soutien à l'emploi, à travers le dispositif FONJEP, à hauteur de 27,8 millions d'euros, et aux projets éducatifs locaux, en liaison étroite avec les collectivités et les associations locales, principalement en direction des zones les moins favorisées et des territoires ruraux.

Pour conclure, je répondrai à une question de Pierre Martin concernant l'INJEP. La Cour des comptes ainsi que M. Denis Merville dans son rapport ont formulé diverses recommandations. Le point essentiel concerne la clarification des missions confiées à I'INJEP par le décret du 2 juillet 1990. Le ministère travaille actuellement à sa modification afin de préciser le positionnement et le rôle de l'établissement. Cela impliquera un resserrement de ses objectifs et une définition exacte de ses actions interministérielles. D'autres améliorations plus techniques - la mise en place d'un conseil d'orientation et d'une nouvelle présidence, l'instauration d'une comptabilité analytique - sont déjà en voie de finalisation.

Enfin, en réponse aux interrogations de MM. Sergent, Voguet et Jean Boyer, j'apporterai quelques précisions sur les moyens de fonctionnement du ministère.

Tout d'abord, la dotation pour les crédits de personnel augmente essentiellement pour deux raisons. D'une part, la réduction du nombre d'emplois inclut une diminution de 151 équivalents temps plein travaillé pour les personnels rémunérés à la tâche. Il s'agit d'une correction technique et ces personnels sont toujours présents et rémunérés. D'autre part, les taux de cotisation pour les pensions ont augmenté. Hors pensions, les crédits du titre 2 diminuent de près de 1 % entre 2007 et 2008.

Pour terminer, en réponse à la question de M. Bodin, je rappellerai que la loi du 5 juillet 2006 a introduit des dispositions très utiles pour lutter contre la violence lors des manifestations sportives. Dans leur récent rapport d'information, MM. Murat et Martin ont formulé plusieurs propositions pour renforcer ce dispositif.

Mes services sont actuellement en relation avec ceux du ministère de l'intérieur pour travailler à une modification du dispositif législatif au cours du premier semestre 2008, dans le sens d'un alourdissement des sanctions.

Une mesure en particulier est à retenir : elle consisterait à porter de trois mois à un an la durée des interdictions de stade prononcées par les préfets pour les personnes signalées comme étant susceptibles de créer ou de provoquer des comportements violents.

M. Alain Dufaut. Très bien !

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, j'espère avoir répondu à l'essentiel de vos interrogations. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Sport, jeunesse et vie associative
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 51 ter

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Sport, jeunesse et vie associative

762 398 999

783 045 596

Sport

188 975 220

209 854 026

Jeunesse et vie associative

131 379 906

131 229 247

Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative

442 043 873

441 962 323

Dont titre 2

384 601 635

384 601 635

Mme la présidente. L'amendement n° II-2, présenté par M. Sergent, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport Dont Titre 2

 

3.000.000

 

3.000.000

Jeunesse et vie associativeDont titre 2

3.000.000

 

3.000.000

 

Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associativeDont titre 2

 

 

 

 

 

 

TOTAL

3.000.000

3.000.000

3.000.000

3.000.000

SOLDE

0

0

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Cet amendement trouve son origine dans le contrôle budgétaire que j'ai effectué cette année sur l'indemnité versée par l'État au consortium gérant le Stade de France, en raison de l'absence de club résident. Je vous rappelle que cette pénalité, qui découle des dispositions de l'article 39 de la convention signée le 29 avril 1995 entre l'État et le consortium, est diminuée de la moitié des excédents d'exploitation réalisés par rapport à la prévision d'origine annexée à la convention.

Or il est apparu que, après des années difficiles, la meilleure gestion commerciale du bel outil qu'est le Stade de France bénéficie à l'État. Ainsi, la pénalité nette versée au titre de 2007 ne sera que d'environ 2 millions d'euros, tout comme d'ailleurs la pénalité à verser au titre de 2008, laquelle dépend des résultats du consortium sur l'exercice achevé au 30 juin 2007. Dès lors, le montant budgété à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2008, soit 6,6 millions d'euros, est excessif.

Mon amendement vise, prudemment, à ne prélever que 3 millions d'euros de cet excédent. La somme ainsi dégagée alimentera les actions n° 2, à hauteur de 400 000 euros, et n° 3, à hauteur de 2,6 millions d'euros, du programme « Jeunesse et vie associative ». Ce prélèvement permettra de soutenir plusieurs dispositifs de ce programme, qui subit par ailleurs des réductions de crédits en 2008.

Ce prélèvement permettra de soutenir, au sein de l'action n° 3, les associations nationales agréées, dont les subventions directes diminueraient de 1,8 million d'euros, soit une baisse de 14,4 %, et les crédits à la disposition des services déconcentrés pour le soutien aux politiques locales de jeunesse dans le cadre des actions partenariales locales, dont les crédits seraient réduits de 800 000 euros.

Il permettra également de soutenir, au sein de l'action n° 2, le dispositif « Envie d'agir », destiné à soutenir les jeunes, notamment des quartiers en difficulté, à accomplir un projet, souvent à caractère professionnel, dont les crédits baisseraient de 400 000 euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Si le Gouvernement partage l'analyse qui conduit à réduire la provision de 6,6 millions d'euros inscrite dans le projet de loi de finances pour 2008 en faveur de l'indemnité pour absence de club résident, il désapprouve les modalités de répartition des crédits rendus disponibles par l'ajustement de cette dépense.

En effet, le calendrier de préparation du projet de loi de finances n'a pas permis aux services du ministère de disposer des comptes définitifs de la saison sportive 2006-2007 pour calculer le montant exact de la redevance à percevoir en 2008. Le consortium n'a présenté ses comptes à son assemblée générale que le 7 novembre 2007. Pour le projet de loi de finances pour 2008, il a donc été supposé que la redevance serait égale à la valeur moyenne constatée pour les trois derniers exercices. Cette méthode, guidée par la prudence, a conduit le ministère à programmer une enveloppe de 6,6 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008, soit une baisse de 1,9 million d'euros par rapport à ce qui avait été provisionné dans la loi de finances initiale pour 2007.

Les dernières informations transmises par le consortium au ministère permettent toutefois d'espérer obtenir une redevance plus importante que celle qui a été estimée pour l'élaboration du projet de loi de finances. L'indemnité peut donc en effet être revue à la baisse.

S'agissant toutefois de la répartition de la somme ainsi dégagée, le Gouvernement estime que les bons résultats commerciaux tirés d'un grand équipement sportif français doivent servir la cause du développement du sport pour tous.

Vous noterez que si, à l'inverse, la provision avait été insuffisante, les crédits nécessaires auraient bien dû être dégagés en gestion par un redéploiement au sein du programme « Sport », et non à partir de crédits d'autres programmes de la mission.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement afin que les crédits correspondants restent disponibles en gestion au profit du développement du sport pour le plus grand nombre.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Sergent, rapporteur spécial. J'entends bien, monsieur le secrétaire d'État, vos arguments.

J'ai reçu les dirigeants du consortium - son président et son directeur -, qui m'ont très nettement indiqué que sa santé était meilleure. Vous l'avez d'ailleurs vous-même souligné, monsieur le secrétaire d'État.

À partir du moment où on défend un amendement visant à réduire de 3 millions d'euros le programme « Sport », on ne peut pas réaffecter cette somme à ce programme, il faut l'affecter à un autre programme, ou alors il s'agit d'un redéploiement.

C'est la raison pour laquelle, eu égard également - cela a été souligné sur toutes les travées -à la faiblesse des crédits consacrés à la jeunesse, je souhaite que cet amendement soit adopté.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je tiens à saluer le travail accompli par Michel Sergent en sa qualité de rapporteur spécial de la commission des finances. Il a effectué avec beaucoup de soins une mission de contrôle sur place et sur pièces. Sur le fondement de ses observations et de ses conclusions, il a convaincu notre commission de la possibilité de dégager 3 millions d'euros de crédits.

Mes chers collègues, le contrôle, c'est certainement, comme aime à le rappeler le président du Sénat, M. Christian Poncelet, la seconde nature du Parlement. Je vous demande donc d'avoir de la considération pour cette démarche.

Je pense, monsieur le secrétaire d'État, que l'option que nous avons prise va dans la bonne direction. Après tout, la distinction entre sport et jeunesse est assez ténue : je ne doute pas que les mouvements en faveur de la jeunesse préparent aussi les jeunes à avoir l'esprit sportif.

Je ne voudrais pas que vous ayez le sentiment que nous ne suivons pas le Gouvernement, monsieur le secrétaire d'État. Nous agissons pour la bonne cause ! Par conséquent, la commission des finances souhaite que le Sénat veuille bien voter en faveur de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.

M. Jean-François Voguet. Le consortium est un organisme privé, qui soutient certes des actions sportives, mais aussi des actions commerciales. Reverser cette somme à la pratique sportive et à la jeunesse me semble être tout à fait valable.

Nous voterons donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste votera lui aussi cet amendement, car il vise à donner plus de moyens à des actions associatives et partenariales en faveur des jeunes, actions dont les crédits ont été amputés dans le projet de budget. Cette disposition va dans le bon sens.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Nous avons entendu avec beaucoup d'intérêt le rapporteur spécial, comme Pierre Martin auparavant, qui était intervenu sur la partie relative à la jeunesse.

Comme l'a rappelé M. le président de la commission des finances, un contrôle sur place et sur pièces et un examen très approfondi ont été effectués. Aussi, nous soutiendrons cet amendement, qui va dans le bon sens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-2.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité des présents.

L'amendement n° II-184, présenté par MM. Murat et Martin, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Sport

300 000

 

300 000

 

Jeunesse et vie associative

 

300 000

 

300 000

Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associativeDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

300 000

300 000

300 000

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SOLDE

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Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Murat, rapporteur pour avis.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. La commission des affaires culturelles a assisté aux premiers pas de l'Agence française de lutte contre le dopage créée le 1er octobre 2006. Elle a ensuite suivi son évolution, son rôle grandissant et les affaires qui l'ont placée à la une des médias au cours de l'année 2007. Elle estime aujourd'hui que l'Agence est au seuil de la maturité.

Afin qu'elle atteigne un âge adulte, la commission estime toutefois que ses ressources doivent augmenter, et ce pour trois raisons.

Première raison : l'impact budgétaire des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques, les AUT, créées par la loi du 5 avril 2006 n'avait pas été évalué par le ministère lors de la création de l'Agence. Or, le nombre de demandes d'AUT standard devrait atteindre 500 et celui des demandes d'AUT abrégées être supérieur à 1 500 en 2008. Si l'on veut que l'Agence continue d'exercer un contrôle médical, et non pas seulement administratif, sur ces AUT, qui sont l'un des moyens les plus classiques pour contourner la législation antidopage, il faut engager des frais supplémentaires.

Deuxième raison, il semble que la mise en place d'une politique renforcée en matière de sécurité informatique à l'AFLD soit aujourd'hui nécessaire.

À la fin de l'année dernière, une intrusion informatique dans les systèmes du laboratoire national de dépistage du dopage avait été constatée, ce qui avait déjà nuit à son image.

En outre, la mise en place au début de l'année 2008 de la procédure de localisation des sportifs et sa sécurisation, notamment dans le cadre de la préparation olympique, demandent des compétences informatiques pointues, que l'Agence n'a pas et qu'elle doit développer. Il y va de la réputation de l'Agence, qui est une donnée essentielle dans la crédibilité actuelle de la lutte antidopage.

Par ailleurs, je le rappelle, les sportifs contestent avec des moyens très importants les décisions prises à leur encontre par les fédérations ou par l'Agence sur la base des contrôles du laboratoire de Châtenay-Malabry.

Troisième raison, les nouvelles techniques de contrôle coûtent cher. Ainsi, la recherche de testostérone d'origine exogène, qui est une technique de dopage répandue, demande un investissement financier assez important et celle sur les tests de présence d'hormone de croissance dans le sérum sanguin, dont la faisabilité est attendue en 2008, sera également onéreuse.

En outre, je souhaiterais insister sur le fait que l'Agence doit absolument continuer à faire de la recherche sur les moyens de la lutte antidopage. Les moyens consacrés à la recherche pour se doper augmentent avec l'essor du sport professionnel. Ceux de la lutte antidopage doivent donc absolument suivre.

Pour ces trois raisons, et parce qu'en cette année olympique les sportifs, notamment français, doivent être irréprochables, les moyens de l'AFLD doivent augmenter. Je vous propose que, en 2008, nous allions ensemble effectuer un contrôle sur place et sur pièces à l'Agence, afin de vérifier que l'affectation des sommes a été conforme aux voeux du Parlement.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. En tant que fervent supporter de la cause associative, je souhaite m'exprimer sur la question des sommes retirées à l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire.

Cet institut, qui est doté de 18 millions d'euros, a une grande utilité, car il sert notamment à fournir des études sur la vie associative et à gérer des portails Internet donnant des informations sur la politique associative de l'État.

Toutefois, au regard de l'augmentation des crédits européens qui lui sont affectés depuis 2006 - il a obtenu plus de 1,3 million d'euros supplémentaires entre 2006 et 2008, notamment pour des études -, et ce sans que ses missions soient modifiées, le transfert de ces 300 000 euros sera, me semble-t-il, complètement indolore.

En outre, la Cour des comptes estime dans des remarques effectuées en juin 2007 que cet opérateur « ne cesse d'accumuler des missions multiples et mal délimitées » et exhorte le Gouvernement à revoir les missions de cet organisme. Cette discussion pourra l'y encourager.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Sergent, rapporteur spécial. La commission des finances partage entièrement la volonté de la commission des affaires culturelles de doter la France des moyens d'être irréprochable en matière de lutte contre le dopage. D'ailleurs, je suppose qu'il s'agit d'un avis unanime au sein de notre assemblée.

En cette matière, comme en d'autres, l'exemplarité doit se traduire non seulement en paroles, mais également en actes.

L'amendement n° II-184 permet d'aborder le débat nécessaire, comme vient de le faire notre collègue Bernard Murat.

Bien entendu, la commission des finances s'est préoccupée du gage concernant l'INJEP. Mais nous avons adopté voilà quelques instants un amendement tendant à modifier l'affectation de 3 millions d'euros, ce qui rend possible l'adoption du présent amendement.

Par conséquent, la commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur pour avis, ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le préciser tout à l'heure, je souscris totalement aux objectifs que vous avez exprimés.

Simplement, l'AFLD dispose d'ores et déjà d'un fonds de roulement de 2 millions d'euros, qu'elle peut utiliser, si cela est nécessaire, tout au long de l'année.

Certes, je comprends que l'Agence ait des besoins, notamment s'agissant de l'amélioration de son équipement informatique. Mais, dans la mesure où elle dispose déjà de 2 millions d'euros de fonds de roulement, il me semble inutile de lui affecter des crédits supplémentaires, dans le cadre du projet de loi de finances, pour l'année 2008. Si besoin est, nous pourrons toujours envisager de modifier sa dotation l'an prochain.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Todeschini. L'amendement n° II-184 nous laisse assez perplexes.

Certes, il est vrai que nous avons insisté dans toutes nos interventions sur la nécessité de lutter contre le dopage. À cet égard, nous partageons l'avis de M. Murat, rapporteur pour avis. D'ailleurs, cette position fait consensus au sein de la commission des affaires culturelles.

Pour autant, les 300 000 euros que cet amendement vise à affecter à la lutte contre les dopages seraient retirés des crédits consacrés à l'action 02 « Promotion des actions en faveur de la jeunesse » du programme 163 « Jeunesse et vie associative », ce qui ne nous semble guère cohérent, puisque nous venons d'adopter un amendement visant à affecter 3 millions d'euros de crédits supplémentaires à ce programme. D'ailleurs, avant l'adoption de cet amendement, les crédits en faveur de la jeunesse n'augmentaient que de 0,1 % pour 2008, soit une baisse de 1,5 % en euros constants.

Plus particulièrement, cet amendement tend à retirer 300 000 euros de crédits à l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire, ce qui nous gêne beaucoup. Pour notre part, nous ne partageons pas l'avis de M. Bernard Murat. En effet, comme en 2007, le budget de cet institut stagnera cette année à 3,3 millions d'euros.

C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.

M. Jean-François Voguet. Je partage les objectifs de nos collègues Bernard Murat et Pierre Martin, rapporteurs pour avis, qui souhaitent, au nom de la commission des affaires culturelles, renforcer le budget du programme « Sport », et tout particulièrement les crédits de lutte contre le dopage.

À l'heure actuelle, l'AFLD ne dispose effectivement pas des moyens nécessaires à un traitement efficace des autorisations d'utilisation à des fins thérapeutiques, les AUT, dans le cadre de sa mission de lutte contre le dopage, ce qui pose problème.

À mon sens, des moyens supplémentaires importants devraient même lui être attribués, afin de lui permettre de développer le suivi des athlètes, ce qui semble être la meilleure méthode de lutte anti-dopage.

Cependant, et chacun le comprendra, nous ne pouvons pas accepter de réduire les crédits, qui sont déjà faibles, du programme « Jeunesse et vie associative ».

Pour ma part, je peux émettre d'autres propositions, que j'ai d'ailleurs déjà évoquées lors de mon intervention sur l'amendement précédent.

Ainsi, dans le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », 32 millions d'euros sont consacrés à la réduction des cotisations sociales acquittées par les sportifs professionnels et par leur club. En l'occurrence, nous pourrions aisément trouver des financements pour favoriser la lutte contre le dopage et pour développer la pratique sportive ou la vie associative.

Au demeurant, si vous tenez absolument à maintenir ces 32 millions d'euros d'exonérations dans le projet de loi de finances pour 2008, cela devrait, me semble-t-il, figurer sur une autre ligne budgétaire, car il s'agit plus d'une mesure économique ou d'aide à l'emploi que d'un dispositif en faveur du développement du sport.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. À mon sens, l'adoption de l'amendement n°II-2 a eu pour effet de suffisamment gager le programme « Jeunesse et vie associative » pour que nous puissions retirer 300 000 euros en vue de les affecter à l'AFLD.

Monsieur Murat, nous sommes parfaitement disposés à conduire conjointement une mission de contrôle sur place et sur pièces.

M. Bernard Murat, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. D'une manière plus générale, - je le redis devant le Sénat - je souhaite que les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis, lorsqu'ils le souhaitent, puissent convenir de missions conjointes de contrôle sur place et sur pièces.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bon état d'esprit !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En l'occurrence, nous sommes en présence d'un cas particulier.

Monsieur le secrétaire d'État, s'il apparaît que l'AFLD a un fonds de roulement excessif, nous serons d'accord avec vous pour y porter remède. Que cela soit bien clair, notre objectif n'est pas d'injecter des crédits publics pour alimenter des fonds de roulement.

Simplement, dans le cadre de son programme de contrôle, la Cour des comptes a prévu une communication sur la lutte contre le dopage. Ses conclusions devraient être connues dans le courant du premier trimestre de l'année 2008. Nous pourrons alors, sur la base des observations de la Cour, organiser notre mission de contrôle sur place et sur pièces. Je pense que M. Michel Sergent, rapporteur spécial, y sera tout à fait favorable.

J'en viens à présent à la question, qui a été soulevée par M. Voguet, des 32 millions d'euros d'exonérations de charges sociales dont bénéficient certains sportifs au titre du droit à l'image.

Mes chers collègues, je crois que nous avons là une belle illustration de la mondialisation, de la globalisation.

En effet, pour éviter le départ à l'étranger d'un certain nombre de professionnels du sport, nous sommes obligés de rabattre la voilure en matière de cotisations sociales et fiscales.

M. Yannick Bodin. Mais ça ne marche pas !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Faute de quoi, ces professionnels quitteraient le territoire national.

M. Yannick Bodin. C'est déjà le cas !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous avons donc été obligés d'adopter un tel dispositif pour le sport, mais la problématique est exactement la même s'agissant de la construction d'avions, d'automobiles ou de laboratoires de recherche.

Par conséquent, je voudrais, une nouvelle fois, lancer un appel...

M. Yannick Bodin. Pour qu'ils reviennent ? (Sourires.)

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ...à une réflexion collective sur le financement de la protection sociale, dès lors que nous sommes dans une économie globale et mondialisée.

Mes chers collègues, nous devons véritablement y être attentifs. Nous aurons certainement à reparler de cette question et à envisager l'étatisation des charges sociales, ainsi qu'un autre mode de financement, par voie fiscale. Je n'en dis pas plus... (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. J'ai bien entendu la réponse de M. le secrétaire d'État à la proposition formulée par M. Bernard Murat.

Toutefois, comme le président Arthuis vient de le rappeler, nous ferons preuve de vigilance s'agissant du fonds de roulement de l'AFLD.

Pour autant, au sein de la commission des affaires culturelles, nous souhaitons adresser un signe fort en matière de lutte contre le dopage, en complément de ce que nous avons déjà collectivement fait.

Si les 300 000 euros supplémentaires que nous souhaitons affecter à l'AFLD ne constituent pas une somme extraordinaire, il s'agira néanmoins d'un message fort adressé tant aux acteurs de la communauté sportive qu'aux véritables responsables du dopage.

L'Agence se comporte convenablement, semble-t-il. D'ailleurs, nous aurons l'occasion de le vérifier.

Mais, à l'évidence, les avancées technologiques imposent des investissements supplémentaires ; les nouveaux contrôles représentent un certain coût. Au demeurant, comme M. Bernard Murat vient de le souligner, la malignité de ceux qui favorisent le dopage auprès des sportifs, conscients ou non, est telle que nous avons besoin de moyens supplémentaires.

Nous souhaitons donc adresser un signal fort et montrer l'engagement du Sénat, notamment de la commission de finances et de la commission des affaires culturelles, sur ce dossier.

Certes, j'ai bien noté la position de nos collègues socialistes et communistes, qui font preuve d'une certaine inertie. Pourtant, l'amendement que nous venons d'adopter, sur l'initiative de M. Michel Sergent, vise à doter le programme « Jeunesse et vie associative » de 3 millions d'euros supplémentaires. Dans ces conditions, mes chers collègues, 300 000 euros, comparés à 3 millions d'euros, cela ne représente pas grand-chose. Quoi qu'il en soit, vous avez choisi de vous abstenir et j'en prends volontiers acte.

Mais, monsieur le secrétaire d'État, la commission des affaires culturelles tient véritablement à l'adoption de cet amendement, d'une part, parce qu'il a été déposé en son nom (Sourires) et, d'autre part, parce que le dispositif qu'il tend à instaurer nous semble nécessaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-184.

M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste s'abstient.

M. Jean-François Voguet. Le groupe CRC également.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix, modifiés, les crédits de cette mission.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J'appelle en discussion les articles 51 ter, 51 quater et 51 quinquies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Sport, jeunesse et vie associative

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 51 quater

Article 51 ter 

L'article 302 bis ZE du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, les mots : « un service de télévision » sont remplacés par les mots : « un éditeur ou un distributeur de services de télévision au sens des articles 2 et 2-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Est également soumise à cette contribution la cession de droits de diffusion à une personne qui met à la disposition du public un service offrant l'accès à titre onéreux à des retransmissions de manifestations ou compétitions sportives sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique. »

Mme la présidente. L'amendement n° II-268, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II. - Les dispositions du I prennent effet pour toutes les manifestations sportives retransmises à compter du 1er juillet 2008.

II. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I. -

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Bernard Laporte, secrétaire d'État. Cet amendement a pour objet de décaler l'entrée en vigueur de l'extension de l'assiette de la taxe dite « taxe Buffet  prévue à l'article 51 ter au 1er juillet 2008, pour tenir compte du fait que les clubs n'ont pas budgété cette dépense.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Michel Sergent, rapporteur spécial. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-268.

M. Yannick Bodin. Le groupe socialiste s'abstient.

M. Jean-François Voguet. Le groupe CRC également.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 51 ter, modifié.

(L'article 51 ter est adopté.)

Article 51 ter
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Article 51 quinquies (début)

Article 51 quater

Le Gouvernement présente un rapport au Parlement sur l'efficience de la contribution du ministère chargé de la jeunesse, du sport et de la vie associative à la compensation, auprès de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, de la perte de recettes correspondant aux exonérations, en application de la loi n° 2004-1366 du 15 décembre 2004 portant diverses dispositions relatives au sport professionnel, sur la rémunération versée à un sportif par une société sportive au titre de la commercialisation de l'image collective de son équipe. - (Adopté.)

Article 51 quater
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Article 51 quinquies (interruption de la discussion)

Article 51 quinquies

Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 30 juin 2008, un rapport dressant le bilan des modalités de mise en oeuvre du recensement des équipements sportifs, de son actualisation ainsi que de l'exploitation de ses résultats.

Ce rapport précise notamment le coût du recensement des équipements sportifs pour l'ensemble des collectivités publiques et son incidence sur la programmation des investissements de l'État et des collectivités territoriales dans les équipements sportifs.

Il rend compte de la manière dont le recensement des équipements sportifs a permis une connaissance précise des équipements sportifs et a contribué à dresser des diagnostics partagés ainsi qu'à définir des stratégies cohérentes.

Ce rapport définit aussi les modalités selon lesquelles le recensement des équipements sportifs permettrait d'établir une politique publique de développement des équipements sportifs facilitant la prise de décisions adaptées intégrant les objectifs d'aménagement du territoire et de développement durable. - (Adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » (et articles 51 ter, 51 quater et 51 quinquies).

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures trente.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 51 quinquies (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Discussion générale

5

Dépôt de rapports du Gouvernement

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, les rapports sur la mise en application des lois suivantes : la loi n° 2007-210 du 19 février 2007 relative à l'assurance de protection juridique ; la loi n° 2007-287 du 5 mars 2007 relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats ; la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale ; la loi n° 2007-292 du 5 mars 2007 relative à la Commission nationale consultative des droits de l'homme ; la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

Ils seront transmis à la commission des lois.

6

Article 51 quinquies (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Deuxième partie

Loi de finances pour 2008

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
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Recherche et enseignement supérieur

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.

Recherche et enseignement supérieur

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Rappel au règlement

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (et articles 46, 47 et 47 bis).

La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la ministre, vous devez être une ministre heureuse ! Vous aviez déjà un budget relativement conforté, respectant un certain nombre de priorités, et l'actualité vous a permis de renforcer considérablement vos moyens.

En effet, je ne pense pas qu'il soit possible d'examiner votre projet de budget sans tenir compte des dernières déclarations du Premier ministre et du Président de la République. J'aurai d'ailleurs l'occasion de vous interroger sur la portée exacte des derniers engagements qui viennent d'être pris. Je souhaiterais en particulier savoir exactement ce que vous comptez faire du fruit de la vente de 2,5 % du capital d'EDF destiné à conforter le financement des universités.

Ces derniers développements viennent après votre très importante loi relative aux libertés et responsabilités des universités, qui restera, je pense, dans les annales de notre pays. Même si l'on a pu constater un certain nombre de manifestations, il est clair que cette réforme comptera pour l'avenir de notre pays, dans la mesure où, progressivement, la responsabilité et l'autonomie vont créer des comportements différents et permettre une modernisation réelle de notre enseignement supérieur.

Par conséquent, madame la ministre, le contexte est très différent cette année et il vous est extraordinairement favorable. Pour autant, les membres de la commission des finances ne sont pas...

M. Ivan Renar. Totalement satisfaits ! (Sourires.)

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Ce n'est pas exactement ce que j'allais dire : ils peuvent rester lucides et critiques, dans le bon sens du terme, c'est-à-dire examiner votre budget avec une totale indépendance d'esprit.

Vos crédits augmentent de 4,7 %, ce qui, dans le contexte actuel, est considérable. Si l'on intègre à ces crédits ceux de l'Agence nationale de la recherche et d'OSEO, ainsi que les dépenses fiscales, les dépenses en faveur de l'enseignement supérieur au sein de la mission augmentent de 6,1 %, et celles en faveur de la recherche de 8,2 %.

Ces chiffres méritent toutefois quelques commentaires.

S'agissant de l'évolution de la dépense fiscale, je m'interroge sur l'analyse très fine qui en est faite et sur sa portée réelle. Réjouissons-nous d'avoir de grands spécialistes capables de chiffrer de manière aussi rigoureuse la dépense liée au crédit d'impôt recherche qui dépend de l'engagement des entreprises, mais restons lucides !

S'agissant de l'évolution des crédits de programme, et notamment de ceux qui concernent l'enseignement supérieur, deux remarques s'imposent à nous.

L'augmentation du compte d'affectation spéciale « Pensions » représente, pour les programmes de l'enseignement supérieur, plus de 226 millions d'euros, soit 32 % des moyens supplémentaires. Cette augmentation ne correspond pas à des moyens supplémentaires pour l'université, mais nous respecterons ainsi nos engagements, ce dont il faut se réjouir.

De la même façon, une part importante des crédits va nous permettre d'honorer les contrats de plan État-régions et de tenir notre parole. C'est extrêmement important ; pour autant, cela ne donne pas de crédits supplémentaires pour le fonctionnement de nos universités. Nous devons être assez lucides pour vous le dire, madame la ministre.

Enfin, compte tenu de l'actualité que j'ai évoquée en introduction, madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer précisément l'utilisation qui sera faite de la vente des titres d'EDF. Nous reviendrons sur l'affectation de ces crédits, madame la ministre, car elle peut être plus ou moins efficace.

La commission des finances du Sénat se réjouit tout particulièrement des efforts que vous avez faits en faveur du plan « Licence ». Le taux d'échec, en particulier en première année de licence, est inacceptable. C'est le point faible de notre système universitaire.

Vous aviez prévu d'affecter des moyens supplémentaires au financement de ce plan. Ils ont été confortés par l'Assemblée nationale et s'élèvent à présent à 35 millions d'euros. Nous comptons également apporter notre pierre à l'édifice, à l'occasion de la discussion des amendements.

Quoi qu'il en soit, dans ce système qui ne pratique pas de sélection, l'échec atteint un tel niveau que nous ne pouvons pas l'accepter plus longtemps. Vous avez prévu de vous y attaquer très fermement ; nous vous appuierons dans cette démarche.

Autre point de satisfaction : la rénovation du système des bourses. Vous y avez affecté 54,8 millions d'euros, dont 20 millions d'euros sont rendus disponibles par la suppression de l'allocation pour l'installation étudiante, dite ALINE.

Nous nous félicitons de l'attention que vous portez à ceux qui n'ont pas les moyens matériels de réussir leurs études.

Vous devrez veiller, madame la ministre, à ce que les nouvelles bourses soient attribuées à des étudiants ayant véritablement l'ambition de poursuivre leurs études. Elles ne doivent pas constituer un avantage supplémentaire pour ceux qui voudraient simplement se servir du statut d'étudiant.

Vous avez mis l'accent sur l'immobilier universitaire, à travers le financement du CPER et l'augmentation des crédits de maintenance et de sécurité, et nous nous en réjouissons.

Au-delà des grandes évolutions, je voudrais aborder trois thématiques s'agissant de l'enseignement supérieur.

J'évoquerai tout d'abord la mise en oeuvre de la loi du 10 août 2007.

La commission des finances se félicite de l'accueil favorable réservé à votre texte par les présidents d'université et de leur ambition de réussir la réforme que vous avez préparée. Toutefois, il est nécessaire de s'assurer que les universités disposent des moyens de gestion des ressources humaines et de comptabilité analytique adaptés.

En outre, nous partageons votre ambition en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes, qui nous paraît extrêmement importante.

J'en viens, ensuite, à l'immobilier universitaire.

Avant votre réforme, madame la ministre, chaque université cherchait à obtenir des mètres carrés supplémentaires ou des rénovations de prestige. Il ne faudrait pas que les crédits provenant de la vente d'une partie du capital d'EDF ou affectés aux contrats de plan servent simplement à financer ce qui était déjà prévu, sans s'interroger sur la pertinence des moyens à mettre en oeuvre.

Pour prendre un exemple que je connais bien, il avait été prévu, dans le cadre d'un contrat de plan État-région, de réaliser une bibliothèque universitaire. Les nouvelles technologies vont certainement nous conduire à modifier significativement notre projet. Nous n'avons plus tant besoin de mètres carrés supplémentaires que de salles équipées en matériels informatiques qui permettent l'accès à la bibliothèque.

Par conséquent, je pense que les moyens que vous allez attribuer à la réhabilitation de l'immobilier doivent être reconsidérés en fonction d'ambitions un peu différentes, dans le cadre, justement, de l'autonomie. Cet aspect me paraît particulièrement important.

Enfin, je voudrais aborder la question du logement étudiant.

Madame la ministre, j'avais prévu de déposer un amendement, mais vous avez su trouver des arguments pour m'en dissuader. (Sourires.) Je voudrais vous féliciter d'avoir obtenu des crédits supplémentaires de l'Assemblée nationale, même si je considère que c'est une erreur absolue !

Le ministère de la recherche n'a pas vocation, selon moi, à financer le logement étudiant. Concentrez-vous sur votre coeur de mission, madame la ministre ! Il appartient à la ville, au secteur privé, aux offices de construire des logements étudiants. Il leur appartient d'imaginer une véritable répartition des étudiants dans l'espace urbain et des solutions adéquates. Votre ministère ne devrait pas consacrer de moyens financiers à l'offre de logement.

J'en ai fait l'expérience dans mon département. Le secteur privé et les offices ont investi dans le logement étudiant, et ils pratiquent des prix inférieurs à ceux du CROUS. Pourquoi consacrer des moyens qui vous sont indispensables ailleurs, alors que les professionnels de l'immobilier sont capables de faire beaucoup mieux ? (MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances, et Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, applaudissent.)

S'agissant des autres programmes, madame la ministre, le sujet est si vaste que je suis bien obligé de réduire mon propos. Je ne peux pas, cependant, ne pas évoquer brièvement l'enseignement supérieur et la recherche agricole.

Vous savez qu'il existe une dette de l'État envers les établissements d'enseignement supérieur privé, résultant du non-respect d'un certain nombre d'engagements qui datent du 14 octobre 2003. Cette dette s'élève aujourd'hui à 3,75 millions d'euros. Je voudrais que nous soyons capables, ensemble, à l'occasion de l'examen des amendements, de trouver des solutions. Nous ne pouvons pas rester dans cette situation.

Pour ce qui est du programme relatif à la recherche culturelle, vous ne comprendriez pas, après le rapport que j'ai remis sur le Palais de la découverte, que je n'aborde pas ce sujet avec vous.

Les travaux de sécurité n'ont toujours pas commencé, en dépit des crédits votés en loi de finances initiale pour 2007. Je souhaiterais avoir la garantie que les travaux vont vraiment débuter au premier trimestre de l'année 2008, madame la ministre.

Un certain nombre de clarifications ont été opérées dans les transferts budgétaires. Le ministère de la recherche a versé le reliquat qu'il devait. Toutefois, le problème de la tutelle n'est toujours pas réglé définitivement. Il doit y avoir un effort d'unicité dans le management de cette affaire, sinon, je crains fort que, l'année prochaine, nous ne nous retrouvions exactement dans la même situation, dans l'incapacité de mettre en oeuvre les crédits en raison d'un problème de gouvernance.

Même si j'ai maintenant remis mon rapport, je continue à avoir des réunions de travail et à suivre cette affaire. Or je n'arrive pas à savoir qui doit décider quoi et avec quel calendrier. Cette situation ne peut plus durer !

Je rappelle que le palais de la Découverte continue à être ouvert au public, sous la responsabilité de son directeur, alors même que la commission de sécurité a donné un avis défavorable. D'autres bâtiments sont dans le même cas : dans le cadre du programme immobilier concernant les établissements d'enseignement supérieur, cent soixante-huit avis défavorables ont été maintenus en dépit des travaux effectués.

Madame la ministre, tout à l'heure, j'ai souligné que vous aviez réussi à obtenir des crédits supplémentaires très importants afin que les choses se passent bien. Cela doit vous inviter à améliorer cette situation.

Mon rapport se veut lucide quant aux perspectives d'avenir et traduit mon admiration devant votre capacité à mobiliser des moyens supplémentaires. Je pense que vous avez une véritable influence sur le Président de la République (Rires), et je vous en félicite. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur spécial, que j'encourage à respecter son temps de parole de dix minutes.

M. Christian Gaudin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'intervention de Philippe Adnot concernait les sujets relatifs à l'enseignement supérieur ; mon propos portera sur les questions de recherche, au travers de l'examen des programmes qu'il me revient plus spécifiquement de rapporter.

Le programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » est directement issu d'un amendement présenté par la commission des finances lors du dernier budget. Regroupant un peu plus de 5 milliards d'euros de crédits, il finance plusieurs domaines : tout d'abord, les « grands » organismes publics de recherche - le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, l'Institut national de recherche en informatique et en automatique, l'INRIA, une partie du Commissariat à l'énergie atomique, le CEA - ; ensuite, l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, la principale agence française de financement sur projets, budgétée pour la première fois cette année, conformément aux voeux exprimés par la commission l'année dernière ; enfin, les moyens de « pilotage » de la recherche, à savoir les crédits de fonctionnement de l'administration centrale, le Haut conseil de la science et de la technologie, etc. Son examen se prête donc aux considérations transversales dans le domaine de la recherche.

Il faut avant tout se féliciter de l'effort financier consenti cette année. À périmètre constant, les crédits de l'ensemble des programmes de la mission consacrés à la recherche augmentent de 3,4 %. L'État va donc au-delà des engagements qu'il avait pris dans la loi de programme pour la recherche d'avril 2006.

De plus, cet effort est équilibré. En effet, il concerne le financement d'organismes, celui de l'ANR, dont les crédits d'intervention passent de 825 millions d'euros en 2007 à 955 millions d'euros dans le présent projet de budget, et, même si cela ne sera pas examiné aujourd'hui comme l'a indiqué Philippe Adnot, l'incitation à la recherche privée via le crédit d'impôt recherche. Je rappelle ainsi que l'article 39 du projet de loi de finances prévoit le triplement de la part « en volume » du crédit d'impôt recherche et son déplafonnement.

Cependant, je me dois d'apporter quelques nuances à cette satisfaction.

Tout d'abord, il convient de prendre en compte l'effet de l'augmentation du taux de cotisation des établissements publics à caractère scientifique et technologique, les EPST, qui doit passer de 39,5 % à 50 % au 1er janvier 2008. Pour prendre l'exemple du CNRS, sur une augmentation de crédits de 112 millions d'euros par rapport à 2007, un peu plus de 95 millions d'euros devraient être affectés à cette dépense nouvelle, ce qui atténue la portée du chiffre annoncé.

Ensuite, si je ne peux que me féliciter de l'augmentation importante des crédits de l'ANR, je dois m'avouer préoccupé par le fait que la rubrique « hors projets » de cette agence, qui représente déjà près d'un quart de ses financements, augmente encore plus vite que la partie « projets » : 11,2 %, contre 8,8 %. Il ne s'agirait pas que la vocation de l'ANR, qui doit demeurer le financement de projets de recherche intégrant des programmes « blancs » ouvrant à l'innovation, soit dévoyée à terme par ce type d'évolution. Madame la ministre, pourriez-vous nous éclairer sur la pertinence du maintien de ces financements au sein de l'ANR ?

Enfin, de fortes annonces ont été faites en faveur de la recherche à l'occasion du Grenelle de l'environnement. Le Président de la République a ainsi souhaité que 1 milliard d'euros soit débloqué en quatre ans pour des recherches spécialisées. Or le présent budget, élaboré bien sûr avant les conclusions du Grenelle, n'en porte pas la trace, non plus que la programmation pour 2008 de l'ANR. Aussi, j'aurai tout à l'heure l'occasion de proposer un amendement, que je présenterai alors plus en détail, destiné à poser clairement cette question.

Le programme « Recherche dans le domaine de l'énergie » se situe au coeur de ces problématiques. Il conviendra notamment de faire porter l'accent sur les nouvelles technologies de l'énergie.

Par ailleurs, je me félicite que, en réponse à un amendement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement se soit engagé à augmenter de 15 millions d'euros le dividende provenant d'AREVA dont le CEA pourra disposer pour financer ses travaux de recherche. Mais c'est encore trop peu ! Un tel débat mérite en effet d'être posé.

Madame la ministre, pourriez-vous nous expliquer comment s'est accumulée la dette du Réseau de recherche sur les technologies pétrolières et gazières, le RTPG, d'un montant de 29 millions d'euros ? Selon les documents budgétaires, cette dette doit être remboursée en trois ans, et le RTPG ne pourra donc plus financer aucun projet.

S'agissant du programme « Recherche industrielle », un enjeu important de l'année 2008 sera la réussite de la fusion programmée d'OSEO et de l'Agence pour l'innovation industrielle, l'AII, dont l'article 30 bis du projet de loi de finances règle les modalités financières. Madame la ministre, pourriez-vous nous expliquer comment doit être organisé le financement futur de cette agence, qui, en 2008, sera presque exclusivement « hors budget » ?

Au sujet du programme «Recherche spatiale », mes inquiétudes se dirigent vers l'évolution de la dette du CNES, le Centre national d'études spatiales, à l'égard de l'ESA, l'Agence spatiale européenne. En effet, selon les données du Gouvernement, cette dette doit encore augmenter au cours de l'année 2008, passant d'un peu plus de 354 millions d'euros à la fin de 2007 à 372,7 millions d'euros à la fin de 2008. Dans ces conditions, l'objectif de ramener la dette à zéro à la fin de 2010 paraît très difficile à atteindre, voire irréaliste.

Pour y parvenir, il faudrait, soit une réduction draconienne des programmes de l'ESA lors de la prochaine conférence ministérielle de l'Agence, qui doit se tenir en 2008, perspective ni vraisemblable ni même souhaitable, soit une augmentation très importante de la contribution de la France de façon à couvrir la participation de l'année et l'ensemble des arriérés accumulés à cette date. Il y va, madame la ministre, de la reconnaissance de la situation de la France comme moteur de la recherche spatiale.

J'estime donc indispensable de poser clairement le problème afin d'éviter tout risque de nouvelle dérive financière via, cette fois-ci, la dette de l'ESA. C'est pourquoi, sur mon initiative, la commission des finances a demandé une enquête à la Cour des comptes sur cette question, selon la procédure définie à l'article 58-2° de la LOLF.

Enfin, sur le programme « Recherche duale », je note avec satisfaction quelques progrès dans le présent projet annuel de performances s'agissant de la présentation de ce programme, que notre ancien collègue Maurice Blin avait critiquée dans ses derniers rapports budgétaires.

Malgré cela, je m'étonne que, en termes financiers, la recherche duale se trouve réduite à la participation du ministère de la défense au CNES et au CEA, alors même que les grands organismes publics de recherche et les universités, des outils comme l'ANR ou OSEO Innovation, pourraient être utilisés afin de mobiliser les acteurs de statut public ou privé sur des problématiques duales.

En conclusion, mes chers collègues, je m'associe à Philippe Adnot pour vous recommander, au nom de la commission des finances, l'adoption des crédits de la mission, sous réserve des amendements que nous présenterons. De même, nous vous proposerons d'adopter sans modification les articles 46, 47 et 47 bis du projet de loi de finances rattachés à la mission. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 2008 est excellent, comme cela vient d'être démontré. Je n'y reviendrai donc pas.

Pour ma part, je suis particulièrement intéressé par trois priorités du Gouvernement, auxquelles je souscris : l'amélioration de l'environnement des chercheurs, le renforcement de la recherche sur projets et la dynamisation de la recherche privée.

Il y a une chose très importante, qui est désormais au coeur de nos priorités en matière de recherche et d'innovation, c'est le renforcement des coopérations et des partenariats. Cette volonté prédomine depuis plusieurs années. Je pense en particulier aux pôles de compétitivité, qui ont permis d'associer la recherche publique et les industries, grandes et petites. À cet égard, j'appartiens à un comité d'évaluation, qui rassemble un certain nombre de personnalités et les différents ministères concernés, le Comité d'évaluation du CIADT des pôles de compétitivité.

Je regrette cependant l'insuffisant volume de contrats conclus dans le cadre de ces pôles de compétitivité, non seulement avec les universités, mais aussi avec les centres de recherche. Le volume de partenariats public-privé ainsi que le caractère international et la participation aussi massive que possible des petites et moyennes entreprises dans ce domaine devraient d'ailleurs faire partie des critères de l'évaluation. Qu'en pensez-vous, madame la ministre ?

Pour ce qui concerne les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES, le premier bilan apparaît positif. Toutefois, les grands organismes publics de recherche manquent d'empressement pour y participer, à la différence des organismes de taille plus modeste.

Avec Jean-Léonce Dupont, nous partageons un certain nombre de propositions du rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche sur ce sujet, en particulier l'idée de développer la réflexion stratégique sur les voies de développement de certaines universités « vulnérables », non intégrées dans les PRES. Nous partageons également le souhait que la dimension « relation avec le monde économique » soit renforcée et que la mutualisation de la valorisation soit un axe plus fréquent de développement des PRES.

Par ailleurs, je me réjouis du développement de la recherche par projets et, notamment, de l'activité de l'Agence nationale de la recherche. À cet égard, je trouve déplorable que certaines rumeurs puissent se développer. Je pense en particulier à celles qui entourent le rapport Guillaume, qui conduirait à interdire à l'ANR de financer des opérations de coopération entre les industriels et les académiques. C'est tout à fait contraire à la philosophie du projet.

Je suis d'accord pour que l'on diminue, même fortement, le taux de financement pour les grandes entreprises, mais certainement pas pour les petites sociétés innovantes, car cela va à l'encontre même de ce que nous voulons faire dans cet hémicycle. Madame la ministre, je souhaiterais que vous adoptiez une position ferme sur ce point, et je demanderai la même chose à votre collègue chargée de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je m'inquiète que l'on veuille réaliser de façon trop précoce une évaluation des projets de recherche. Ceux-ci commencent à peine ! On peut évaluer les programmes, les conditions dans lesquelles s'effectue la coopération privé-public, mais il ne faut pas aller trop vite sur les projets eux-mêmes.

Toutefois, je pense que l'on pourrait renforcer le préciput, c'est-à-dire, au sein des subventions dont bénéficie un projet de recherche, la part qui revient à l'établissement hébergeant ce projet. Cela démontrerait d'ailleurs l'inanité des slogans ultragauchistes et réactionnaires, à mon avis obscurantistes, qui servent encore à manipuler certains étudiants dans certaines facultés ; car il ne s'agit pas de « mettre la main » sur les facultés, il s'agit d'aider les facultés à se développer.

J'en viens à un autre sujet essentiel : l'évaluation. Tant Jean-Léonce Dupont que moi-même suivons ce dossier avec attention. Et si la visibilité de la nouvelle agence d'évaluation, dont la mise en place a connu des lenteurs que nous regrettons, est encore faible, la qualité des travaux qu'elle a déjà engagés et la volonté de son nouveau président nous paraissent tout à fait remarquables.

Pour conclure, j'insisterai sur un point : les évaluations doivent être suivies d'effet. En d'autres termes, et c'est fondamental, il faut que les bons soient récompensés et que les mauvais puissent être laissés de côté. Toute notre nouvelle politique est liée à la volonté de privilégier l'excellence, et nous devons nous y conformer : il n'est pas question de prendre de l'argent aux bons - M. Adnot sait à qui je pense ! - pour le répartir entre des actions qui seraient moins ciblées. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Madame la ministre, après une période récente que l'on peut qualifier, au sens étymologique du terme, de « mouvementée », je voulais vous assurer de notre estime et de notre soutien.

Prenant la parole après Pierre Laffitte, je vous présenterai les programmes « Formations supérieures et recherche universitaire » et « Vie étudiante » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit de consacrer 13,23 milliards d'euros à ces deux programmes, faisant augmenter de 405 euros la dépense moyenne par étudiant pour la porter à 7 375 euros. Je m'en réjouis, car nous avions appelé de nos voeux un rééquilibrage des dépenses consacrées respectivement aux étudiants et aux élèves de l'enseignement scolaire.

Le récent engagement du Gouvernement de consacrer 5 milliards d'euros supplémentaires à l'enseignement supérieur, soit une augmentation de 50 % du budget en cinq ans, montre une réelle volonté politique. Si, bien entendu, nous y souscrivons pleinement, nous aimerions, madame la ministre, connaître plus précisément vos intentions quant à l'usage de ces crédits.

Une sonnette d'alarme est de nouveau tirée sur l'état du patrimoine immobilier universitaire ; je vous rappelle que la commission des affaires culturelles avait déjà dressé un sombre tableau de la situation en 2003. Nul doute qu'une partie de cette somme lui sera utilement consacrée...

Parmi mes autres sujets de préoccupation, j'évoquerai tout d'abord « l'orientation active », dont il faut assurer le succès. La généralisation du dispositif est une excellente décision, mais je m'inquiète de ses modalités, dans la mesure où les résultats de sa mise en place, en 2007, se sont avérés très inégaux.

Madame la ministre, cette réforme de l'orientation doit être, selon nous, une priorité du chantier « Réussir en licence » que vous avez engagé. Il faut donc lui consacrer les moyens budgétaires nécessaires.

Certaines filières ont mis en place des tests indicatifs d'aptitude à une discipline ; tel peut être le cas, par exemple, en musicologie. Pourquoi ne pas expérimenter ce type de démarche dans les autres disciplines où elle a un sens ? Cela permettrait d'aider les jeunes à approfondir leurs motivations, à mieux évaluer leur potentiel, sans les empêcher néanmoins d'accéder à la formation concernée. Au moins prendraient-ils leur décision en ayant mieux conscience de leurs chances réelles de réussite, et à tout le moins en meilleure connaissance de cause.

Il convient aussi de mobiliser les rectorats, proviseurs, équipes éducatives et universités afin d'assurer le succès de la mise en place, en 2008, d'un service public d'orientation dans un continuum entre enseignement secondaire et enseignement supérieur. Tous doivent « jouer le jeu », l'ensemble des formations de 1er cycle étant concernées.

Nous souhaitons par ailleurs qu'une grande vigilance soit apportée à la qualité et à la fiabilité des informations figurant sur le portail électronique national. Il faut accélérer le processus : en attendant les résultats des suivis des cohortes de diplômés, pourquoi ne pas procéder par sondages afin d'évaluer l'insertion professionnelle des jeunes diplômés ? Cela nous permettrait de ne pas attendre encore deux ou trois ans avant de pouvoir commencer à éclairer les bacheliers. Aider ceux-ci à mieux s'orienter, c'est éviter de leur faire perdre inutilement six mois ou un an. Que ce soient les individus ou la collectivité, tout le monde y gagnerait.

Autre sujet de préoccupation : il est clair que le plan logement étudiant est en souffrance. Nous soutenons les amendements adoptés par nos collègues députés en faveur de l'accélération des réhabilitations et tendant à isoler les crédits des contrats de projet 2007-2013 destinés au logement étudiant. Il s'agit de garantir que ces sommes ne seront pas affectées à d'autres opérations, pratique qui a été constatée dans l'application des contrats de plan État-région et que j'avais dénoncée dans mon rapport.

S'agissant des aides sociales, la réforme des bourses représente indéniablement un grand pas en avant, attendu par tous. Il me semble qu'elle pourrait sans doute être encore améliorée, en particulier par la prise en compte du critère de l'éloignement géographique pour fixer le montant de ces aides sur critères sociaux et par le versement d'un dixième mois de bourse, en septembre. En effet, le système des bourses ne s'est pas adapté à la nouvelle organisation des études liée à la mise en oeuvre du système licence master doctorat, dit LMD, même si les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires, les CROUS, réussissent globalement à verser les bourses dans des délais plus rapprochés qu'auparavant.

Par ailleurs, il est prévu d'encourager le développement des prêts aux étudiants, à l'instar de ce que font nos partenaires étrangers. Pouvez-vous, madame la ministre, nous préciser les modalités de cette action ainsi que les moyens qui lui seront consacrés ?

Enfin, nos collègues députés ont répondu à nos préoccupations relatives aux subventions accordées à l'enseignement supérieur privé. Un effort devait être fait en faveur de ces écoles, auxquelles nous demandons de renforcer leurs actions dans différents domaines : accroissement de la recherche, renforcement de la coopération avec les universités, ouverture sociale, etc.

S'agissant du système LMD, la France figure parmi les bons élèves de la classe européenne. Certes, le dispositif doit encore être amélioré, notamment en termes de lisibilité des offres de formation, d'adaptation de l'organisation administrative des établissements et des critères d'habilitation des formations, ainsi que de mobilité des étudiants. Surtout, le processus n'est pas complètement terminé dans la mesure où l'intégration des formations médicales et paramédicales, d'une part, et celle des formations dispensées par les écoles, d'autre part, sont inachevées.

Je me suis également intéressé à la réforme des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, pour laquelle j'ai constaté de réelles avancées. Le processus d'intégration aux universités est bien engagé et présente de nombreux avantages. Pour ce qui concerne le volet pédagogique, le nouveau cahier des charges, arrêté en décembre 2006, modifie profondément la formation telle qu'elle était dispensée jusqu'à présent et va dans le sens que nous souhaitions.

J'évoquerai enfin la loi que nous avons votée le 10 août dernier, relative aux libertés et responsabilités des universités, dont j'étais le rapporteur. Elle conduit les établissements à engager d'importants travaux et réflexions en vue de se préparer à la réforme. Un cahier des charges définit les critères permettant d'apprécier la capacité d'une université à assumer les nouvelles compétences prévues par la loi et à en tirer le plus grand parti. Il était important qu'un tel cadre d'analyse et de soutien soit proposé aux établissements.

En outre, je rappelle que, conformément à nos propositions, la loi prévoit que la mise en oeuvre du budget global s'accompagne de la mise en place d'instruments d'audit interne et de pilotage financier et patrimonial. La capacité de gestion des universités sera ainsi renforcée.

En revanche, je m'inquiète quelque peu du retard observé dans l'organisation des élections qui doivent avoir lieu dans les universités en vue de renouveler leurs conseils centraux avant août 2008. Je crains qu'un grand nombre d'élections n'interviennent en période de partiels ou de stages... Qu'en est-il précisément, madame la ministre ?

Je conclurai mon intervention en indiquant que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'enseignement supérieur et à la vie étudiante pour 2008. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Boyer, rapporteur pour avis, qui intervient d'abord au nom de M. Henri Revol, également rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Jean Boyer, en remplacement de M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de vous présenter les excuses d'Henri Revol, mon corapporteur au nom de la commission des affaires économiques. Actuellement en mission à l'étranger, il ne peut pas être présent parmi nous cet après-midi.

Comme à son habitude, la commission des affaires économiques s'est concentrée sur les programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur », dite MIRES, exclusivement consacrés à la recherche. Cela ne l'a toutefois pas empêchée de suivre avec une grande attention l'évolution du mouvement dans les universités, tant celui-ci, survenant au moment même où la nation poursuit son effort sans précédent en faveur de la recherche et de l'enseignement supérieur, a pu lui paraître paradoxal.

La commission des affaires économiques se félicite en effet que les élections du printemps 2007 n'aient pas remis en cause l'effort historique pour la recherche qui avait été amorcé par le président Chirac en 2004. Bien au contraire, conformément aux engagements du nouveau Président de la République, qui avait promis que la hausse des moyens de la recherche et de l'enseignement supérieur se poursuivrait à raison de 1 milliard d'euros par an jusqu'en 2012, le projet de budget pour 2008 permet de dépasser les montants déjà élevés prévus dans la loi de programme pour la recherche que nous avons votée au début de 2006.

Les objectifs ambitieux fixés à votre gouvernement, madame la ministre, permettent d'atteindre le fameux milliard d'euros supplémentaire pour les seuls crédits budgétaires « classiques », pour lesquels il traduit une augmentation de 4,7 % des crédits de paiement par rapport à 2007.

Je me dois toutefois de préciser que M. Henri Revol assortit ce satisfecit de trois observations d'ordre général.

Tout d'abord, il faut espérer que l'effort se poursuivra effectivement en 2009 afin de compenser les effets de la hausse des cotisations de retraite, qui grève cette année l'essentiel des moyens supplémentaires.

Ensuite, si la budgétisation de l'Agence nationale de la recherche constitue une avancée incontestable en matière de transparence à l'égard du Parlement, nous osons croire qu'elle ne se traduira pas par une perte de substance liée à d'éventuels gels et annulations budgétaires. En effet, plus que d'autres, la recherche sur projet a besoin de visibilité sur la durée des programmes.

Enfin, vous ne serez pas surprise, madame la ministre, de l'attention toute particulière avec laquelle la commission des affaires économiques du Sénat suivra la fusion entre l'Agence de l'innovation industrielle et OSEO, et, surtout, la façon dont sera effectuée la mesure de la performance de la nouvelle entité.

J'en viens maintenant à deux points particuliers que M. Henri Revol souhaitait aborder en séance.

Le premier concerne le Commissariat à l'énergie atomique, le CEA, qui est confronté depuis plusieurs mois à une sorte de « double langage » de la part de l'État. Il existe en effet un décalage très net entre, d'une part, un contrat d'objectifs qui prévoit la stabilisation des subventions de l'État et, d'autre part, des engagements qui ont été pris par le Gouvernement précédent et imposent au CEA une montée en charge, à la fois pour développer la quatrième génération de réacteur nucléaire à l'horizon 2020 et pour accélérer la recherche dans le domaine des énergies renouvelables.

Il convient de saluer le début de solution que représente l'engagement pris par M. Éric Woerth devant l'Assemblée nationale d'affecter au CEA 15 millions d'euros des dividendes d'AREVA.

Toutefois, ayant attentivement étudié ce dossier et pris en compte les différents arguments, mon collègue Henri Revol estime que le compte n'y est pas. Dès lors, madame la ministre, il vous interroge : comment serait-il possible de porter cet abondement à un montant d'au moins 30 milliards d'euros ? Votre réponse, vous le devinez, est très attendue !

Par ailleurs, le rapport de M. Revol pointe une mauvaise manière faite par les services de l'État au CNES, le Centre national d'études spatiales, puisque cet organisme a été informé par un simple courrier électronique administratif que sa dotation pour 2008 serait en tous les cas inférieure de 5,3 millions d'euros au montant, conforme au contrat pluriannuel, qui est affiché en loi de finances.

Se trouve ainsi menacée, notamment, la réalisation du projet d'horloge atomique par refroidissement d'atomes en orbite, dit programme Pharao, dont l'importance est démontrée dans le rapport sur l'espace récemment rédigé par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologique. Vous me pardonnerez, mes chers collègues, si je ne suis pas en mesure d'en détailler les aspects techniques : j'ai bien reçu les données nécessaires, mais l'information ne m'est pas suffisamment accessible ! 

Pis, ce procédé est choquant. En effet, contrairement aux gels et annulations budgétaires, cette diminution ne fait l'objet d'aucune publicité. On continue donc de laisser croire aux parlementaires que le montant des crédits prévus au programme « Recherche spatiale » pour 2008 reste inchangé, alors que tel n'est pas le cas.

En conclusion, sous réserve de ces observations parfois critiques, M. Revol tient à préciser que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. Je vous redonne immédiatement la parole, monsieur Jean Boyer, pour votre propre intervention.

M. Jean Boyer, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention s'inscrit dans le cadre de l'analyse plus générale des crédits de la MIRES, que je viens de présenter au nom de mon collègue et corapporteur Henri Revol.

Pour ma part, j'ai souhaité me consacrer à une question très spécifique, à savoir l'articulation des moyens de la recherche et de l'enseignement supérieur avec les pôles d'excellence rurale, et en particulier ceux qui ont une composante technologique.

Ma première remarque sera pour regretter que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, comme le ministère de l'éducation nationale, ne figure pas parmi les onze départements ministériels qui contribuent au fonds national affecté aux pôles d'excellence rurale, à hauteur de 235 millions d'euros, c'est-à-dire une somme importante.

C'est très surprenant lorsque l'on sait que l'innovation et la formation figurent parmi les raisons d'être de plus de soixante pôles portant sur des projets concernant l'utilisation des technologies au service des entreprises industrielles et artisanales.

C'est encore plus dommage lorsque l'on connaît la vocation de nos IUT, nos écoles d'ingénieurs et nos universités, à savoir la formation, l'innovation et l'expertise au profit des acteurs locaux.

Cette absence que l'on constate dans les budgets se traduit malheureusement aussi par une absence sur le terrain, puisque l'étude que j'ai réalisée dans mon rapport montre que, hors du secteur agricole, les exemples de coopération entre l'enseignement supérieur et les pôles d'excellence se comptent sur les doigts d'une main.

Il est vrai que le pôle d'excellence rurale des volcans d'Auvergne a développé en son sein un projet de relance et de modernisation de l'ensemble de la filière concernant la pierre de lave.

Il s'agit d'une activité offrant de réels débouchés économiques, qui va de l'extraction des pierres - vous connaissez bien ce secteur également, madame la présidente - jusqu'à leur utilisation comme matériaux de construction. Ce projet est mené à bien grâce à une collaboration étroite entre les collectivités et l'École départementale d'architecture de Volvic, laquelle est une institution privée formant des techniciens dans ce secteur.

Un véritable cercle vertueux est ainsi engagé, puisque tout en développant une industrie et des services à forte valeur ajoutée, on forme les jeunes de la région dans la perspective d'emplois pérennes et qualifiés.

C'est un bel exemple de coopération, mais nous savons qu'il aurait été très difficile de réaliser la même chose avec un lycée technique, un IUT ou un organisme relevant du ministère de l'éducation nationale ou de l'enseignement supérieur.

Il me semble d'ailleurs que l'on retrouve ici un des problèmes structurels de l'innovation en France, à savoir la trop grande séparation entre, d'une part, les structures publiques d'innovation et de formation et, d'autre part, les PME, hormis peut-être dans les secteurs de très haute technologie.

Pourtant, on ne le répétera jamais assez, des coopérations sont nécessaires et souhaitables et, malgré nombre d'initiatives, madame la ministre, la France est encore loin derrière l'Allemagne et l'Italie, par exemple.

Sur ce point, je constate que la cinquantaine de pôles d'excellence rurale à vocation industrielle sont en retard par rapport aux pôles de compétitivité. Je ne veux pas faire de comparaisons négatives, mais je tenais à le dire.

Je mentionnerai aussi un autre point de comparaison avec les pôles de compétitivité, qui porte sur le financement des dépenses de fonctionnement.

Même si, comme je l'ai indiqué précédemment, cela sort du cadre strict de la MIRES, je regrette qu'aucun crédit d'État ne soit prévu pour le financement du fonctionnement des pôles d'excellence rurale.

Il est vrai que la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires tente aujourd'hui de mobiliser plusieurs réseaux professionnels pour assurer l'ingénierie de certains pôles. Mais cela se fait sur une base quasi bénévole et ne règle pas la question de l'animation du pôle lui-même.

Les pôles sont portés par des acteurs locaux de taille modeste et j'ai du mal à comprendre qu'ils ne bénéficient pas des mêmes facilités que les animateurs de pôles de compétitivité, qui disposent déjà de moyens de fonctionnements importants, puisqu'il s'agit des universités, des organismes de recherche ou des grandes entreprises.

Je sais bien qu'il existe une différence de conception entre les pôles d'excellence rurale, qui sont dédiés à un projet, et les pôles de compétitivité, lesquels ont, quant à eux, vocation à faire émerger plusieurs projets et ont, de ce fait, un plus grand besoin de gouvernance.

Cependant, je me pose toujours la même question : à quoi bon financer un million d'euros d'investissements - financement que la commission nationale a beaucoup apprécié, madame la ministre - pour le démarrage d'un pôle d'excellence rurale si l'on ne peut pas ensuite lui donner les 20 000 euros nécessaires à sa gouvernance et à l'animation de la dynamique locale qu'il doit enclencher ?

Je pense que le système actuel ne permet pas de faire jouer au maximum l'effet de levier recherché au travers des pôles.

Telles sont les observations spécifiques que je souhaitais formuler. Mais pour le reste, je vous indique, madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, que ces propos ne remettent en rien en cause l'avis favorable que je partage avec mon collègue Henri Revol, au nom de la commission des affaires économiques, sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. Je vous remercie d'avoir évoqué l'école de Volvic et la lave qui nous est chère !

La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, si vous me le permettez, je répondrai directement à l'ensemble de vos questions, puisque l'usage veut, m'a-t-on dit, que le ministre ne détaille pas de nouveau son budget dans l'hémicycle.

Je rappelle néanmoins que ce budget fait l'objet d'une hausse historique de 1,8 milliard d'euros, correspondant à l'engagement du Président de la République d'augmenter le budget de l'enseignement supérieur de 5 milliards d'euros en cinq ans et celui de la recherche de 4 milliards d'euros.

Le Gouvernement a donné des précisions sur le rythme de l'augmentation de ces crédits.

Il y a une dizaine de jours, le Premier ministre et moi-même avons signé avec les présidents d'université un engagement solennel, un protocole-cadre sur le rythme de progression des crédits du volet « enseignement supérieur », le Premier ministre garantissant aux présidents d'université que ces crédits augmenteraient de 1 milliard d'euros par an, passant de 11 milliards d'euros en 2008 à 15 milliards d'euros en 2012. Il s'agit d'un engagement sans précédent.

À cela s'ajoutent les 4 milliards d'euros du budget de la recherche et, enfin, le produit de la vente de 3 % du capital d'EDF, crédits qui seront, quant à eux, fléchés en totalité sur un investissement, la vente d'un actif ne pouvant financer qu'une dépense d'investissement, en l'occurrence dans l'immobilier universitaire.

M. Adnot m'a demandé comment serait utilisé cet argent affecté à l'immobilier universitaire.

Le ministère a, depuis un certain temps, réalisé un audit de l'état du patrimoine immobilier universitaire, dont vous connaissez les chiffres. Il est apparu que 28 % des bâtiments universitaires n'étaient pas aux normes de construction, de sécurité et ne présentent pas l'attractivité que l'on est en droit d'attendre d'une université du xxie siècle.

Cet argent va servir à reconstruire et à restructurer certains campus qui sont particulièrement dégradés, et à créer ex nihilo des campus à très forte visibilité internationale. Je citerai le projet du campus de Saclay, auquel le Président de la République tient particulièrement. Je peux également citer le projet de Cité des humanités et des sciences sociales d'Aubervilliers, qui est en voie d'être finalisé.

Enfin, cet argent servira à accélérer un certain nombre de programmes immobiliers de rénovation qui sont planifiés dans les contrats de projets État-région pour la période 2007-2012.

Nous procéderons par la voie d'appels à projets. Nous souhaitons qu'ils soient nourris par une réflexion sur la stratégie de formation et de recherche de l'université et ses importants besoins immobiliers, et par la recherche d'une très haute qualité environnementale. En effet, nous considérons que, dans le cadre de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, l'immobilier universitaire doit être une vitrine de ce que la France sait faire de plus beau en matière immobilière.

S'agissant des bourses, monsieur Adnot, vous m'avez demandé si elles ne pouvaient pas être conditionnées au fait qu'un étudiant étudie réellement. Il se trouve que j'ai donné une instruction en ce sens aux CROUS, dans le cadre de la réforme des aides sociales qui a été engagée en octobre dernier. Désormais, les CROUS vérifieront, à partir de la fin du premier semestre, l'assiduité des étudiants boursiers à travers leur relevé de notes.

Concernant la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU », Philippe Adnot et Jean-Léonce Dupont m'ont interrogée sur les postes d'encadrement et la nécessité de faire émerger des fonctions nouvelles dans l'université.

Nous allons créer 700 emplois de catégorie A par transformation d'emplois, qui permettront, à travers des plans de formation pluriannuels, mais aussi au travers de recrutements externes, de doter les universités qui veulent devenir autonomes de l'encadrement qui leur fait aujourd'hui cruellement défaut, en matière de ressources humaines, de contrôle de gestion, de comptabilité et de direction financière.

J'ajoute, pour faire le point sur la mise en oeuvre de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités et pour répondre à Jean-Léonce Dupont, que nous en sommes aujourd'hui à trente-six universités qui ont changé leur statut pour définir les contours de leur nouveau conseil d'administration dans le cadre de la loi LRU.

Trente universités sur quatre-vingt -  il y a quatre-vingt-cinq universités, mais cinq universités technologiques dont une est expérimentale et quatre sont purement technologiques - ont demandé au ministère de pouvoir passer à l'autonomie, c'est-à-dire aux compétences élargies, au 1er janvier 2009. Cela ne signifie pas qu'elles acquerront cette autonomie, cela signifie qu'elles feront l'objet, d'ici à la fin de l'été 2008, d'un audit d'organisation qui dira leurs forces et leurs faiblesses et qui donnera un certain nombre de prescriptions leur permettant ou non d'acquérir, à cette date, l'autonomie qu'elles souhaitent. Mais c'est déjà un mouvement très important d'adhésion à cette autonomie.

Enfin, parmi les trente universités qui ont fait acte de candidature, on trouve tout autant des universités de villes moyennes que des universités de grandes villes, des universités parisiennes que des universités de banlieues, des universités de sciences humaines que des universités scientifiques. La liste est longue aujourd'hui et elle montre que l'autonomie peut profiter à toutes et pas seulement à tel ou tel type d'universités.

En ce qui concerne les bibliothèques, je ferai la même réponse que précédemment. Dans le cadre du plan de rénovation des bibliothèques, nous avons prévu - c'est un des engagements du Président de la République -, que des crédits soient affectés à l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques.

La reconstruction des bibliothèques sera possible, compte tenu de l'important budget immobilier qui va être le nôtre. Vous ai-je précisé, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'argent provenant de la cession des titres d'EDF s'ajoutera bien sûr à l'engagement pris par le Gouvernement à hauteur de 15 milliards d'euros ?

Il est évident que les bibliothèques du xxie siècle ne ressembleront pas à celles du xxe siècle. Mais prévoir des espaces numériques suppose aussi de disposer d'un certain nombre de mètres carrés, et la technologie ne remplace pas nécessairement l'ergonomie. Il faut aussi que ces bibliothèques soient des lieux de vie, de passage et de transmission. Il n'est pas impossible que la numérisation des données devienne un facteur clé de la constitution d'un fonds bibliothécaire ; néanmoins, il demeure indispensable de pouvoir venir consulter ces données dans de très beaux lieux.

J'en viens maintenant aux collectivités locales et au logement étudiant.

Vous le savez, la dernière loi de décentralisation, la loi relative aux libertés et responsabilités locales, a permis aux collectivités locales de demander, de manière volontaire, la compétence du logement étudiant. À ce jour, aucune collectivité locale ne s'est manifestée pour la demander. Néanmoins, je le répète, c'est une possibilité offerte par la loi.

J'ai moi-même pris contact avec un certain nombre de collectivités pour les inciter à intervenir dans le domaine du logement social étudiant. Je dois à la vérité de dire qu'elles sont plus préoccupées par le logement social dans son ensemble que par la question très spécifique du logement social étudiant. Il m'appartiendra donc de les convaincre qu'il s'agit là d'une question majeure, car les conditions de vie difficiles des étudiants tiennent en grande partie au coût du logement, tout particulièrement dans les grandes agglomérations. Les crédits mobilisés à ce titre dans mon budget sont importants.

Par ailleurs, nous avons confié une mission à M. Denis Lambert, président de l'association des directeurs de CROUS, pour examiner l'organisation des CROUS et leur mode de fonctionnement.

En outre, le rapport du député Jean-Paul Anciaux, qui me sera remis au cours de ce mois, fera le point sur la participation des collectivités locales au financement de logements étudiants. Il y a des financements croisés. Des offices d'HLM locaux font des choses. Il faut tout mettre à plat pour voir comment dynamiser la participation des collectivités locales.

Néanmoins, je ne suis pas certaine que les collectivités locales puissent épuiser le sujet, si je puis dire ; elles ne pourront pas tout faire à elles seules. Dans le plan campus proposé par le Président de la République, il sera sans doute aussi possible d'inclure des logements étudiants au coeur même de l'immobilier universitaire. Cela s'est déjà fait par le passé dans un certain nombre de campus et pourra se refaire à l'avenir. Ainsi, ces logements feraient partie du patrimoine immobilier de l'université concernée.

Sur l'enseignement supérieur agricole et sa dette, j'ai examiné l'amendement qui a été déposé sur ce sujet, et je donnerai l'avis du Gouvernement lorsqu'il viendra en discussion. Mais, derrière les préoccupations exprimées par plusieurs d'entre vous, se pose une vraie question, sur laquelle nous allons devoir travailler tous ensemble cet après-midi.

S'agissant du palais de la Découverte, je vais vous communiquer l'exact déroulement des opérations, qui permettra de répondre aux questions que vous posez dans votre remarquable rapport, messieurs Adnot et Gaudin.

Vous le savez, le palais de la Découverte a signé au printemps 2007 un contrat avec l'Établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, l'EMOC, qui a désormais la maîtrise d'ouvrage du chantier.

L'EMOC a lancé un appel d'offres pour la maîtrise d'oeuvre des chantiers, qui a été confiée, au mois de novembre 2007, à un architecte des monuments de France. Aujourd'hui, celui-ci a terminé son étude pour les travaux concernant les sous-sols, et celle qui concerne les courettes est en cours de finalisation.

Un appel d'offres sera donc prochainement lancé pour la réalisation des travaux. Le candidat retenu devrait être connu dans le courant du premier trimestre 2008.

Certes, on peut regretter que de tels délais soient nécessaires pour réaliser des travaux de mise aux normes de sécurité d'un grand monument de la science, mais la situation est exceptionnelle. En effet, comme vous le savez, le palais de la Découverte est hébergé dans un bâtiment qui appartenait au ministère de la culture et dont la propriété a dû être transférée au premier semestre 2007 à un établissement public ad hoc : l'établissement public du Grand Palais.

Nous avons pris conscience du problème, nous nous en sommes saisis et nous avançons aussi vite que nous le permettent les procédures légales.

Concernant la tutelle du palais de la Découverte, il est vrai que la situation est aujourd'hui complexe. En effet, les travaux dépendent du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », placé sous la responsabilité du ministère de la culture, dans le cadre du budget de la MIRES.

Bien que le budget du palais de la Découverte dépende du ministère de la culture, celui-ci ne siège pas, comme vous l'avez relevé, au conseil d'administration du nouvel établissement public. La tutelle du Palais est assurée par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, le ministère de l'éducation nationale étant représenté au conseil d'administration.

Il est assez rare qu'un ministère apportant la totalité de la dotation budgétaire d'un opérateur ne siège pas à son conseil d'administration. Il faut donc absolument modifier le décret du 25 janvier 1990 portant organisation du palais de la Découverte, pour permettre au ministère de la culture et de la communication de siéger au conseil d'administration.

M. Christian Gaudin a évoqué le CNRS et l'augmentation de son budget.

Quand on analyse l'augmentation du budget des organismes de recherche, il faut toujours avoir à l'esprit - je présenterai sans doute ainsi mes prochains documents budgétaires - les crédits affectés par l'ANR à leurs équipes de recherche. En effet, ces crédits contribuent à accroître encore, et de manière importante, les dotations qui sont déjà elles-mêmes en augmentation.

De ce point de vue, le CNRS ne fait pas exception à la règle, puisqu'il est le premier bénéficiaire des crédits de l'ANR - ce qui prouve d'ailleurs la qualité des recherches qui y sont menées -, avec 250 millions d'euros, ce qui représente environ 10 % de son budget.

Vous vous inquiétez de la progression de la part hors projets au sein des financements de l'ANR. En réalité, ces financements sont de deux ordres, qui ne sont pas tout à fait similaires.

Le premier concerne le préciput ; il correspond à la partie des crédits d'appels à projet qui sont donnés non pas à l'équipe de recherche afin de poursuivre ses recherches, mais à l'organisme hébergeant cette équipe pour couvrir ses coûts fixes. À la suite d'une action résolue de mon ministère, ce préciput est passé, cette année, de 5 % à 11 % du montant des crédits alloués à chaque projet de recherche et s'ajoute aux 4 % de frais de gestion, accordés là encore aux organismes de recherche par le biais de l'ANR.

Si nous avons souhaité augmenter le préciput, c'est tout simplement parce que, comme cela a déjà été souligné du haut de cette tribune, il a un effet particulièrement bénéfique sur les organismes, dans la mesure où il les incite à recruter les meilleures équipes et à donner toutes leurs chances aux meilleurs projets.

Par ailleurs, il importe que ces organismes ou les universités - puisque 80 % de la recherche a lieu dans des locaux universitaires - aient un retour sur l'investissement que constitue l'hébergement des équipes de recherche, car ils doivent rénover les bâtiments, entretenir et acheter du matériel.

Le préciput passera donc de 28 millions d'euros à 48 millions d'euros dans le budget de l'ANR. Certes, il figure dans les crédits hors projets, mais c'est du faux hors projets, si je puis dire, car il est, en réalité, totalement lié à l'appel à projets. Sur ce point, je tenais donc à vous rassurer pleinement, monsieur le rapporteur spécial.

Le budget consacré par l'ANR aux actions régionales augmente de 5 millions d'euros, car l'Agence finance une partie du volet recherche des contrats de projets État-région. Je souscris totalement à vos propos, monsieur le rapporteur spécial, ces dispositifs ne correspondent pas au coeur de métier de l'Agence, et nous sommes favorables à leur gestion directe par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.

J'en viens à la prise en compte du Grenelle de l'environnement.

En liaison avec Jean-Louis Borloo, un groupe de travail sera prochainement mis en place au sein de mon ministère pour tirer l'ensemble des conclusions du Grenelle de l'environnement sur les programmes de recherche des organismes et des universités ainsi que sur l'ANR.

Mais la programmation de l'ANR tire d'ores et déjà les conséquences du Grenelle de l'environnement, puisque les crédits consacrés à des recherches sur l'environnement devraient progresser de 34 millions d'euros, passant de 198 millions à 232 millions d'euros, soit une augmentation de 17 % à comparer avec la progression moyenne de 8,8 % de l'ensemble de ses crédits.

S'agissant du CEA, le Commissariat à l'énergie atomique, MM. Revol et Christian Gaudin ont demandé une augmentation de ses crédits pour qu'il renforce ses activités historiques.

Il faut en effet que le CEA dispose des moyens nécessaires pour remplir ses missions essentielles, à savoir notamment le développement du nucléaire du futur. Pour ce faire, il bénéficie des moyens contractualisés en 2006, auxquels doivent être ajoutés - parce qu'ils ne sont jamais comptabilisés - les moyens qui ont été mis en oeuvre dans le Pacte pour la recherche, notamment les instituts Carnot, avec 20 millions d'euros.

En matière de recherche, l'énergie nucléaire ou renouvelable constitue vraiment l'une des priorités du Gouvernement. Compte tenu du nombre croissant des missions qui ont récemment été dévolues au CEA, le Gouvernement a proposé à l'Assemblée nationale d'augmenter de 15 millions d'euros la part du dividende d'AREVA qui revient au CEA, ce qui constitue, à mon sens, un engagement clair et très important du ministère. Je ne crois pas qu'il faille aller au-delà. Le CEA doit aussi prendre garde à ne pas trop se disperser ; il doit veiller à recentrer parfois ses activités sur son coeur de missions.

Concernant le rapprochement d'OSEO et de l'AII, l'Agence de l'innovation industrielle, l'intention du Gouvernement est claire. L'idée est de compléter le faible soutien qui est actuellement accordé aux entreprises moyennes innovantes.

À l'origine, OSEO Innovation était centré sur les toutes petites entreprises, alors que l'AII déployait malheureusement largement ses financements au bénéfice des grandes entreprises. Je dis « malheureusement » parce qu'il faut, à mon sens, que notre stratégie en matière d'innovation soit axée sur les entreprises moyennes. Nous avions un problème pour soutenir les entreprises de toute taille, car l'éventail est large. La fusion d'Oséo et de l'AII permettra d'offrir un guichet unique proposant une gamme complète d'aides adaptées à toutes les tailles d'entreprises et de projets innovants.

Pour 2008, la dotation d'OSEO garantie, fixée à 280 millions d'euros, permettra d'envisager la sélection de plusieurs dizaines de projets par an pour cette nouvelle activité. Au total, pour la partie soutien à l'innovation, le budget d'intervention d'Oséo passera de 160 millions d'euros à 520 millions d'euros, soit un triplement des moyens.

M. Laffitte a évoqué les coopérations et les partenariats entre les pôles de compétitivité et le monde de la recherche au sens large, donc, je l'imagine, entre les universités et les organismes. Ce sont 53 millions d'euros supplémentaires qui sont inscrits au budget, mais il faut bien sûr que l'on continue à travailler sur ce point.

A également été abordée la question importante de la participation des pôles de compétitivité aux conseils d'administration des universités devenues autonomes et à la constitution des réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA.

Bien évidemment, il faut construire et tisser des liens beaucoup plus étroits entre ces deux mondes qui, dans un continuum recherche fondamentale-recherche appliquée-développement industriel, ne peuvent s'ignorer.

Je dirai maintenant quelques mots sur les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, PRES.

À l'origine, les PRES ont été conçus pour regrouper des universités et des grandes écoles. C'est le cas aujourd'hui et cela fonctionne très bien. Neuf PRES ont été créés et trois sont en cours de finalisation. Nous en compterons, je l'espère, une quinzaine d'ici à la fin de l'année 2008.

Dans cette dynamique, nous devons également attirer les organismes. Mais cela suppose de donner beaucoup de contenu aux transferts de compétences initiés dans le cadre de ces pôles de recherche et d'enseignement supérieur, qui, pour moi, vont de pair avec la logique d'autonomie. En effet, cette dernière nécessite aussi que l'on mutualise les forces et qu'on ne laisse pas une université isolée par rapport à des grands centres universitaires que nous connaissons aujourd'hui. Il y a évidemment une question de visibilité internationale et de mutualisation de l'ensemble des forces de notre recherche.

J'en viens à l'ANR et à la recherche partenariale. L'Agence a une obligation de 25 % de financement sur recherche partenariale. Nous nous prononcerons lorsque nous serons saisis officiellement du rapport Guillaume, ce qui n'est pas encore le cas. Il est important que l'Agence ait un rôle dynamique dans le domaine de la recherche partenariale. Celle-ci est essentielle aujourd'hui ; aussi convient-il de la développer.

Concernant le préciput, monsieur le sénateur, nous nous sommes déjà beaucoup battus cette année pour obtenir une augmentation. Pour ma part, je crois que nous pourrions aller plus loin, mais je n'ai pas d'autre réponse à vous faire que celle d'une intime conviction.

Sur l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, AERES, et sur les processus d'évaluation, sachez que le ministère a organisé avec cette agence un colloque intitulé « Enseignement supérieur et recherche : des évaluations à la décision ».

Toutes les autorités d'évaluation des grands pays voisins étaient également conviées. Dans ce domaine de l'évaluation indépendante de la recherche et de l'université, nous avons quelques années de retard - il est intéressant de s'en rendre compte ! - par rapport à beaucoup des pays qui nous entourent et qui ont mis en place des évaluations indépendantes, légitimes, fiables, transparentes, ouvertes, lesquelles permettent d'orienter les décisions de financements publics. Quelque peu désorganisée après le départ de M. Jean-Marc Monteil, l'AERES, sous l'égide du professeur Jean-François Alexandre Dhainaut, se met définitivement en place, et c'est très important.

Il est évidemment essentiel que l'évaluation soit le corollaire de l'autonomie des universités et qu'elle accompagne aussi les organismes de recherche dans une logique non pas de sanctions, mais, au contraire, de progression. Tout le monde doit s'inspirer de ce qui fonctionne et des bonnes pratiques !

J'ai répondu à M. Jean-Léonce Dupont sur l'usage des crédits résultant de la vente d'une partie du capital d'EDF.

S'agissant de l'orientation active et des moyens budgétaires qui doivent lui être accordés, - il faut que vous le sachiez, monsieur le sénateur - j'ai ventilé dans le budget 2008 les crédits de fonctionnement destinés aux présidents d'université, en prévoyant les grandes masses de ce qui pourrait leur être attribué. Nous arrivons à des augmentations de budget de fonctionnement, hors masse salariale, très significatives : entre 10 et 20 %. Pour les sciences humaines, la progression est en moyenne de 17 % pour chaque université. Il faut le savoir, cette augmentation n'intègre pas les 60 millions d'euros qui proviendront de la création des postes de moniteurs, du repyramidage et de la création de 700 emplois de cadre A, ni la mise en sécurité des locaux, tous crédits qui ne peuvent pas être ventilés au moment où je vous parle puisqu'ils dépendront des demandes des universités.

Par conséquent, je me suis permis de faire ce petit calcul de coin de table avant même que le budget soit voté pour montrer aux présidents d'université que ce milliard d'euros qui va leur être attribué cette année, loin d'être virtuel, est très réel. Université par université, ils vont pouvoir en profiter significativement.

En contrepartie, les présidents d'université ont accepté de consacrer une petite part de leurs fonds de roulement au financement, dès février 2008, du démarrage du dispositif d'orientation active et de tutorat mis en place par le ministère. Cela permettra d'éviter les problèmes de financement de ce dispositif qui pourra ainsi être très vite mis en oeuvre, dès le mois de janvier ou de février 2008. C'est une priorité, car c'est le moment où les élèves commencent à faire leur choix d'orientation. Il y aura donc les moyens budgétaires nécessaires.

Pour ce qui est de l'insertion professionnelle, il faudra effectivement commencer par faire des sondages, car nous n'aurons pas les chiffres des débouchés avant un certain nombre d'années. Il faut mettre en place les systèmes d'information qui vont de pair. Nous procédons déjà par sondages pour connaître les taux de réussite en première année de chaque type de baccalauréat, par exemple.

Quant à la sanctuarisation du logement étudiant dans les contrats de plan État-région, CPER, c'était, je crois, une nécessité, car il faut distinguer la question du logement étudiant de la question immobilière générale. Désormais, un montant important de crédits supplémentaires nous permettra de faire face à ces défis.

En ce qui concerne le critère de l'éloignement géographique pour les bourses, il faut le maintenir, mais dans une logique de simplification et d'efficacité afin, effectivement, que personne n'y perde.

En revanche, le dixième mois de bourse est une façon de répondre à une bonne question par une réponse qui ne me paraît pas totalement adaptée. Les études durent neuf mois et non dix ; d'où neuf mois de versement d'une bourse.

L'origine de votre proposition de dixième mois de bourse est, j'imagine, le coût de la rentrée universitaire, qui a du mal à être financé sur le premier mois de bourse, lequel était versé en règle générale tardivement. C'est pourquoi, cette année, nous avions fait avancer de quinze jours le versement des bourses. Plus de 50 % l'ont été avant la rentrée universitaire si les dossiers étaient remplis. En 2008, les coûts de la rentrée universitaire seront étalés, car le paiement des frais d'inscription et des frais de sécurité sociale pourra être étalé sur trois mois. Cela permettra aux boursiers de répartir la charge financière et donc de compenser le surcoût lié au premier mois de rentrée.

Vous m'avez également demandé des précisions sur les prêts aux étudiants. Aujourd'hui, nous sommes en négociations avec l'Association française des banques, AFB, sur les modalités de ce prêt, que nous concevons comme une avance remboursable. On dit « prêt », car il est des mots quelque peu tabous ! Cette avance devrait, selon moi, être remboursée à échéance longue après la fin des études, afin que nos jeunes étudiants ne soient pas handicapés par une dette qu'ils devraient rembourser au moment de leur entrée sur le marché du travail, quand ils s'installent dans la vie et prennent leur indépendance.

Il s'agit par conséquent d'une avance remboursable à délai différé dans le temps, jusqu'à dix ans après la fin des études, à des taux qui doivent être modérés. Ce ne seront pas a priori des taux zéro car, sur cette échéance de temps, des taux très modérés sont tout à fait supportables. Une part de garanties sur la défaillance de la personne permettra de financer les études non pas seulement des étudiants de grandes écoles, mais aussi des étudiants d'université.

Vous m'avez également interrogé sur les montants inscrits dans ce budget. Initialement, il s'agissait d'une dizaine de millions d'euros. Il nous a paru peu probable que des défaillances de prêt soient constatées dès 2008. C'est pourquoi nous avons récupéré ces montants que nous pensons utiliser pour accélérer la mise en place de la réforme des bourses.

Ainsi, le sixième échelon de bourse entrerait en vigueur pour les 100 000 étudiants les plus défavorisés dès janvier 2008. Cela permettrait de donner davantage à ceux qui en ont le plus besoin et d'augmenter de 7,2 % en 2008 par rapport à 2007 les bourses de ces 100 000 étudiants-là.

Vous m'avez interrogé sur le système licence master doctorat, dit LMD, et sur les études médicales et paramédicales. J'attends beaucoup des conclusions des rapports qui vont m'être remis au premier semestre 2008. Nous devons avancer de manière très volontariste sur cette question.

S'agissant des IUFM, le rapport Geoffroy va m'être remis. Je peux d'ores et déjà vous dire que nous tiendrons les délais de la loi Fillon pour l'intégration des IUFM métropolitains. En revanche, un petit délai supplémentaire sera nécessaire pour ceux d'outre-mer, compte tenu des énormes problèmes qui se posent. Je pense notamment aux IUFM d'Antilles-Guyane : une université sur trois sites. La question est, vous l'imaginez, quelque peu complexe à gérer. Néanmoins, avec le nouveau cahier des charges de décembre 2006 que vous avez eu la gentillesse et l'amabilité de citer, cette intégration se fera sous de bons auspices. J'imagine que, dans son rapport, Guy Geoffroy proposera un certain nombre de pistes, donc d'améliorations supplémentaires, pour cette intégration des IUFM.

Concernant les élections aux conseils centraux, il est vrai que certaines ont été retardées par un certain nombre de mouvements dans les universités. Mais, en réalité, très peu étaient programmées au dernier trimestre 2008. Une élection aura lieu la semaine prochaine à Paris-V, université à la présidence de laquelle Axel Kahn est candidat. Nous attendons les nouvelles dates d'élections. Dans les programmations envoyées par les universités, le pic des élections est prévu au mois de mars, c'est-à-dire après les partiels et avant les vacances de Pâques. Cela me paraît être une bonne date, même si elle fera converger un grand nombre d'élections en même temps.

M. Henri Revol a eu raison de me demander de poursuivre l'effort en 2009 ; c'est d'ailleurs ce à quoi s'est engagé le président de la République. Il a eu également raison de me mettre en garde sur le gel des crédits de l'ANR ; nous y serons très vigilants. J'ai répondu à sa question relative à l'OSEO - AII ainsi qu'à celle qui portait sur le CEA.

Je m'arrêterai quelques instants sur le CNES, car le sujet est important.

M. Christian Gaudin, rapporteur pour avis. Ah !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Il a été présenté une subvention du CNES en augmentation, conformément à son contrat. Il est apparu depuis que le CNES bénéficierait d'une exonération de TVA. La subvention de l'établissement a donc été diminuée d'autant, et le CNES a parfaitement été informé de cette modification. L'ajustement comptable de 5,3 millions d'euros traduit donc cette baisse de charge de TVA et n'affecte en rien la capacité d'intervention de l'établissement.

M. Jean Boyer n'étant plus là, je dirai seulement, à propos des pôles d'excellence rurale, que leur logique me paraît être une logique de territoire. Ajouter des complexités de financement à ce beau dispositif n'est pas souhaitable, d'autant que cela relève davantage du ministère de l'agriculture et de la pêche, donc de mon collègue Michel Barnier. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante-cinq minutes pour intervenir.

Madame la ministre, vous avez déjà entamé ce temps de parole de trente-six minutes !

Dans la suite du débat, la parole est à M. Pierre Laffitte.

M. Pierre Laffitte. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je me limiterai à quelques remarques sur quatre points.

Le premier concerne la mission que nous avons, et qui figure d'ailleurs dans votre feuille de route, madame la ministre, de donner la priorité à l'excellence et de faire en sorte qu'elle soit, d'ici peu, étendue à un certain nombre d'universités françaises. Pour le moment, cela nous fait défaut en matière de visibilité internationale. C'est pourtant la première des priorités, car comment viser l'attractivité du territoire si, en matière de préparation de l'avenir, nous ne sommes pas excellents ?

Les dernières indications, y compris celles de l'OCDE, concernant le niveau en classe de seconde, nous placent en dix-septième position.

M. Pierre Laffitte. Le niveau de notre enseignement secondaire continue de baisser, alors qu'il était considéré comme l'un des meilleurs au monde. Nous sommes aujourd'hui largement dépassés par les pays nordiques, le Canada, mais aussi par le Royaume-Uni et l'Allemagne.

Cette situation est préoccupante, d'autant que c'est le niveau scientifique qui semble le plus faible. Vous-même, madame la ministre, ainsi que votre collègue chargé de l'enseignement secondaire, vous devrez réagir.

Peut-être le lien entre le public et le privé est-il mieux connu ailleurs que chez nous. Si les organismes de recherche savent ce qui se passe, notamment en Europe continentale, les universitaires en ont en général, me semble-t-il, une connaissance assez moyenne.

Tout récemment, j'avais organisé une mission à Munich. Les universitaires et les chercheurs des centres de recherche ont pu y constater que les instituts Max-Planck, par exemple, étaient largement au-dessus de leurs équivalents français.

Nous avons également visité différents départements de l'université technologique de Munich, avec laquelle peu d'universités françaises - je dirais même aucune -seraient capables de rivaliser. Il y a donc, tout près de chez nous, à une heure de Paris, des expériences à faire.

Madame la ministre, serait-il possible d'organiser, au niveau national, ce type de séjours, afin qu'un plus grand nombre d'universitaires soient incités à passer quelques semaines chez nos voisins, en particulier les meilleurs d'entre eux, à savoir les pays nordiques, l'Allemagne, voire le Royaume-Uni ou l'Italie, quitte à prévoir leur prise en charge. Je ne parle pas des États-Unis, car ils s'y rendent de toute façon !

Je souhaite maintenant évoquer le développement des opérations européennes. À la fin du mois de février, se tiendra un forum franco-allemand. Quelle place sera attribuée à la recherche, madame la ministre ? Allons-nous vraiment continuer ce qui a été fait jusqu'à présent, notamment par le biais de l'Association franco-allemande pour la science et la technologie ? Sur des thématiques bien précises, des centaines de scientifiques français et allemands se sont déjà rencontrés.

Se tiendra également à la fin du mois de février prochain un colloque à Stockholm sur les problèmes de l'innovation en Europe et la mise en relation des clusters les plus innovants. Il y a là toute une stratégie préparée par un high level group, dans lequel sont réunis l'ancien premier ministre du pays européen le plus avancé en matière de recherche et d'enseignement supérieur, la Finlande, le ministre de l'industrie suédois et toute une série de personnalités. On m'en a confié la présidence. Je ne sais pas très bien pourquoi, mais sans doute est-ce lié à la notoriété de Sophia-Antipolis. J'y vois une opportunité pour bien préparer la présidence française de l'Union européenne, période au cours de laquelle l'innovation européenne pourrait devenir un point clé.

J'en viens aux problèmes de l'innovation. Nous n'avons pas, en France, l'équivalent de ce qui existe en Israël ; nous n'avons pas d'incubateurs modernes ! Et je ne parle pas des États-Unis ! Or les meilleurs incubateurs permettent, en deux ans, à de petites équipes universitaires, de lever des centaines de millions d'euros. J'y vois la possibilité de « fabriquer » de véritables entreprises à croissance très rapide. Pour ce faire, toute une stratégie est à mettre en place.

Lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2008, le Sénat a adopté un amendement visant à étendre un dispositif prévu par la loi TEPA, qui permet aux personnes assujetties à l'ISF de financer, jusqu'à une certaine somme, des sociétés innovantes.

Pour ne pas effrayer le ministère des finances et la commission des finances, le dispositif favorisant l'investissement dans des incubateurs innovants demeure expérimental. Nous aurons dorénavant la possibilité de mettre en place des incubateurs privé-public, qui se calqueront exactement sur les modèles existants.

IBM a conçu un modèle tout à fait intéressant, qui fonctionne à Constance. L'entreprise est prête à participer à cette phase de transfert de technologie à partir de la science, afin de parvenir à la création de richesses et d'emplois, ce qui est capital.

Je souhaite évoquer brièvement le volet « recherche » du Grenelle de l'environnement. Bien évidemment, un certain nombre de thématiques concernent la biodiversité, l'énergie, le développement durable et les sciences humaines et appliquées, qu'il faudra, me semble-t-il, mettre en oeuvre de façon systématique. Or on me dit que l'ANR va réduire ses financements dans le domaine de l'énergie. Est-ce vrai, madame la ministre ?

Indiscutablement, les sciences humaines appliquées devraient pouvoir trouver une thématique autorisant tous nos chercheurs, dont les actions sont tout de même très diversifiées, à avoir une unité de vues, ce qui permettrait, à terme, de transformer les mentalités en matière de développement durable.

Une commission ad hoc du CNRS et des organismes concernés, en particulier la Maison des sciences de l'homme, pourraient réfléchir à des thématiques de recherche scientifique, ou considérées comme telles, car les sciences humaines possèdent aussi des aspects scientifiques.

On m'a dit, lorsque j'ai introduit une équipe de sociologie à l'École des mines, que c'était stupide. Or cette petite équipe de sociologues a fait de l'ingénierie sociologique, au point que les chercheurs ont été conviés à donner des cours au MIT, le Massachusetts institute of technology. Ce n'est donc pas si mal !

Il n'y a aucune raison pour que, dans ce domaine, nous ne soyons pas de nouveau les meilleurs. En effet, l'école sociologique française était tout de même très importante voilà un siècle, et même voilà cinquante ans. Actuellement, on a l'impression qu'elle est très dispersée. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certes, les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » sont à la hausse, mais je modérerai le satisfecit de votre majorité concernant cette progression.

D'abord, la seconde délibération intervenue à l'Assemblée nationale a déjà minoré ces crédits de près de 36,5 millions d'euros. Ensuite, la sincérité de ce budget est, bien avant son adoption définitive par le Parlement, sérieusement mise en doute par l'annonce des régulations budgétaires. Ainsi, pour le Centre national d'études spatiales, le CNES, 33 millions d'euros sont gelés.

Mais surtout, c'est la structure même de cette hausse qu'il convient de prendre en compte. La majeure partie de cet effort financier est « mangé » par l'augmentation des cotisations retraite des établissements publics à caractère scientifique et technologique, par le rattrapage des engagements non respectés par l'État dans le cadre des contrats de plan 2000-2006 et par le triplement du crédit d'impôt recherche. Il s'agit donc essentiellement de mesures déjà acquises. On retient bien peu de mesures nouvelles : en matière de recherche et d'enseignement supérieur, on est bien loin de la rupture annoncée par le Président de la République.

Le crédit d'impôt recherche équivaudra à un quart du budget de l'enseignement supérieur : par conséquent, un quart du budget ne sera soumis à aucune évaluation. Le Gouvernement attache une grande importance aux notions de contrôle, d'évaluation et de coût, qu'il érige même en dogmes lorsque celles-ci s'appliquent aux services publics, mais est nettement moins regardant quand il s'agit d'aides fiscales en direction du privé. Là, le leitmotiv de la « gestion rigoureuse des finances publiques » et l'impératif selon lequel « chaque euro dépensé est un euro utile » passe par pertes et profits.

Comme MM. les rapporteurs de la commission des affaires culturelles vous y invitent eux-mêmes, madame la ministre, il ne serait pas inutile que le Gouvernement, aussi bien en ce qui concerne la recherche que la bonne gestion de l'argent public, accepte de se poser la question du montant du crédit d'impôt recherche, en particulier au regard du faible financement - c'est une situation récurrente - des équipes de recherche et des incubateurs. Les doutes sur l'efficacité de ce dispositif ne sont en effet pas l'apanage de l'opposition.

Les modifications du crédit d'impôt recherche intervenues chaque année depuis quatre ans constituent l'aveu, il est vrai, que les résultats ne sont pas à la hauteur des espoirs exorbitants que le Gouvernement place dans ce dispositif pour développer notre recherche privée. Un bilan digne de ce nom n'en est que plus nécessaire. Il devra apporter des réponses claires aux questions suivantes : quel est l'impact du crédit d'impôt recherche en termes d'emploi ? Dans quelle proportion constitue-t-il, pour certaines entreprises, une aide publique comme une autre, au même titre que les baisses de charges, s'il n'est pas du tout réinvesti dans le budget consacré à la recherche de l'entreprise ? Le crédit d'impôt recherche représente-t-il réellement une incitation à investir dans la recherche et développement pour les entreprises qui n'en font pas du tout, ou très peu ?

Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie met en garde, pour sa part, « contre la dérive qui consiste à n'asseoir ce crédit que sur le montant absolu des dépenses. Une telle mesure bénéficie naturellement au groupe restreint de grandes entreprises - pharmaceutiques ou électroniques - qui font systématiquement de la recherche au niveau mondial. » Le conseil ajoute : « Ce soutien, souvent un effet d'aubaine, est sans proportion avec celui qui résultera pour les petites entreprises, qui ont un besoin durable de soutien à des dépenses faibles en montant, mais particulièrement risquées. »

Si les crédits de la mission représentent un effort budgétaire modéré, nuancé, ils comportent également, a contrario, un signe négatif très fort envers la communauté scientifique : pour la première fois depuis de très nombreuses années, aucune création de poste n'est prévue. Comme quoi, avec ce gouvernement, tout peut arriver, même le pire ! Et ce, alors même, madame la ministre, que vous affirmiez aux députés, voilà trois semaines : « Il va falloir recruter 3 700 chercheurs et enseignants-chercheurs par an d'ici à 2012, alors que 4 000 allocataires de recherche seulement entrent en doctorat. Le défi est donc plutôt d'ordre démographique. »

À quand une gestion prévisionnelle et pluriannuelle de l'emploi scientifique ? Elle s'avère incontournable, non seulement du fait de la pyramide des âges, mais aussi parce que c'est, en grande partie, le manque de perspective des carrières scientifiques qui restreint notre vivier potentiel de jeunes chercheurs, et les à-coups en matière de recrutement sont néfastes pour notre système de recherche.

De même, vous avez assuré aux présidents d'université que vous leur donneriez les moyens de leur autonomie. Mais vous ne prévoyez aucune création de poste administratif ou technique.

Les universités n'ayant pas les moyens humains d'assurer correctement leurs compétences de gestion, comment pourraient-elles absorber des moyens supplémentaires sans un rattrapage préalable ?

Le budget que vous consacrez au renforcement de leur encadrement, soit 6,2 millions d'euros, est notoirement insuffisant.

Dans la plupart des pays développés comparables à la France, le rapport entre personnels académiques et personnels d'appui à la recherche et à l'administration est de 1 pour 2, alors qu'il est de 2 pour 1 en France.

Dans ces conditions, comment les universités seront-elles en mesure de se doter des capacités d'un réel contrôle de gestion, à la fois sur le plan budgétaire et en matière de ressources humaines ?

En ce qui concerne la mobilisation contre la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, précisément, vous payez, sur la forme, le prix du manque de dialogue et de concertation, de l'élaboration d'une loi dans la précipitation et de son examen complètement verrouillé au Parlement, au pas de charge, en session extraordinaire, en plein été.

S'il est vrai que la mobilisation des étudiants n'est pas exempte de toute considération électorale à l'approche du renouvellement de leurs représentants au centre national et aux centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires, ainsi qu'au sein des conseils d'administration universitaires, il n'en demeure pas moins que certaines de leurs inquiétudes sont légitimes quant au fond.

Je pense au risque de double marginalisation des petites universités, si elles restent à l'écart de la constitution des pôles de recherche et d'enseignement supérieur et s'il n'y a pas de rattrapage des inégalités entre établissements avant l'absorption de toute compétence nouvelle.

D'ailleurs, tout en étant favorables à l'autonomie, nombre de présidents d'université réfléchissent déjà à la manière de corriger les aspects les plus négatifs de votre loi, que nous avions pointés du doigt : réhabilitation du rôle du Conseil scientifique, mise en place de commissions de recrutement composées d'élus et de membres extérieurs nommés, limitation des contractuels...

Pour notre part, nous serons vigilants quant à l'application de la loi et au bilan qui doit en être établi à l'issue de sa première année de mise en oeuvre. Et puisque ce gouvernement se fait le chantre de l'évaluation et du contrôle des politiques publiques, j'en déduis que nous aurons très rapidement à examiner, dans un débat serein et sans précipitation, les ajustements éventuels nécessaires.

À l'incohérence de votre politique en matière de gestion des ressources humaines s'ajoute l'incohérence entre, d'une part, les thèmes prioritaires déterminés par le Président de la République dans la lettre de mission qu'il vous a adressée cet été - comme l'énergie et le développement durable - et, d'autre part, la réalité de votre politique budgétaire.

L'analyse des programmes destinés à la recherche montre que ce sont précisément les secteurs dont les activités répondent à des missions de service public qui accusent une baisse de crédits en euros constants. Il en est ainsi pour le secteur spatial, l'environnement, l'énergie, les transports, l'équipement, l'habitat, la recherche militaire et civile.

Le Président de la République vous a fixé d'ambitieux objectifs pour le rayonnement international de la France dans vos secteurs de compétence. Malheureusement, votre politique budgétaire ne nous permet même pas de conserver le rang déjà acquis dans des secteurs clés. C'est le cas de la recherche spatiale.

Ainsi, la dette du Centre national d'études spatiales, le CNES, à l'égard de l'Agence spatiale européenne va encore augmenter en 2008, rendant complètement illusoire l'objectif de la ramener à zéro en 2010.

Nous sommes en perte de vitesse, et c'est bien notre rôle moteur dans l'Europe spatiale qui est remis en cause, au profit de l'Allemagne.

Certes, s'agissant des domaines liés au développement durable, comme l'a souligné le rapporteur spécial Christian Gaudin, cette loi de finances a été élaborée avant les conclusions du Grenelle de l'environnement et les annonces présidentielles qui vont en découler.

Mais vous auriez pu effectuer des ajustements par voie d'amendements. Au lieu de cela, la seconde délibération demandée à l'Assemblée nationale est venue minorer les crédits et, au premier rang, ceux du programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », qui joue pourtant un rôle central au regard des enjeux de la politique nationale de recherche et des domaines affichés comme prioritaires.

Plus globalement, dans votre pilotage de la recherche, c'est la concurrence entre les différents modes de collaboration et entre structures qui est prônée. Ainsi en est-il entre pôles de recherche et d'enseignement supérieur, ou PRES, d'une part, et réseaux thématiques de recherche avancée, d'autre part.

Les grands organismes de recherche ont boudé les premiers au profit des seconds, sous l'impulsion de leur direction de tutelle, aboutissant à un partage entre ces deux types de structures, sans communication ou interaction entre les deux démarches.

Le premier bilan de mise en oeuvre des PRES, qui vous a été remis en septembre dernier, a bien souligné la nécessité d'un travail commun entre la direction générale de l'enseignement supérieur et la direction générale de la recherche industrielle.

Notre système souffre, en effet, d'un déficit de coordination d'une architecture générale complexe, du cloisonnement entre structures, mais aussi de la faiblesse de la mobilité dans les déroulements de carrière des chercheurs, tant entre recherche publique et enseignement supérieur qu'entre recherche publique et milieu industriel. Le manque de reconnaissance du doctorat, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, participe à cet état de fait. Aussi, pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, quelles sont les avancées à attendre dans ce domaine ?

Nous pouvons considérer que vous gérez bien votre budget, mais le retard pris précédemment par votre majorité mériterait un effort plus grand de rattrapage. Donc, en toute logique, le groupe socialiste désapprouve les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Ferrand.

M. André Ferrand. Madame la ministre, tout d'abord, permettez-moi de vous féliciter d'avoir tenu les engagements pris lors des votes de la loi de programme pour la recherche et de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, en allant même au-delà de ce qui était prévu.

Les moyens consacrés à la recherche et à l'enseignement supérieur par la loi de finances pour 2008 connaissent une augmentation sans précédent, puisqu'ils progressent de 1,8 milliard d'euros, soit de 7,8 % par rapport à la loi de finances de 2007. Cet effort est particulièrement important dans une période de maîtrise de la dépense publique.

En effet, le Président de la République a fait de la recherche et de l'enseignement supérieur une des priorités de son quinquennat et s'est engagé à accroître de 5 milliards d'euros les moyens de l'enseignement supérieur et de 4 milliards d'euros les moyens dédiés à la recherche et à l'innovation. Notre groupe se réjouit de cette politique ambitieuse.

Nous connaissons bien les maux de notre système d'enseignement supérieur et de recherche.

En matière de recherche, la France bénéficie d'une longue tradition d'excellence et compte des scientifiques de grande valeur, mais les résultats sont trop faibles dans un contexte de forte compétition mondiale.

La loi de programme pour la recherche est venue donner un nouveau souffle à notre système en créant les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les réseaux thématiques de recherche avancée et en renforçant le pilotage de la recherche et son évaluation.

Ces réformes sont aujourd'hui poursuivies et nécessitent des investissements importants. Je rappelle que ce sont les pays qui ont le plus investi dans la recherche qui connaissent les meilleurs taux de croissance et le recul le plus significatif du chômage.

En ce qui concerne nos universités, la loi votée en juillet dernier est venue supprimer les trop nombreuses contraintes qui les entravaient, en leur proposant une gouvernance moderne et une autonomie responsable, à l'image de ce qui existe et fonctionne déjà dans d'autres pays.

Le budget pour 2008 accompagnera cette autonomie avec 381 millions d'euros supplémentaires, dont un effort particulier sur l'immobilier pour préparer son transfert aux universités.

Il est regrettable que, malgré de tels efforts, nos universités aient connu une tentative de déstabilisation entourée de la plus grande désinformation.

Le Premier ministre vient de signer, le 28 novembre dernier, un accord avec les présidents d'université, visant à garantir la hausse du budget des universités de 50 % en cinq ans.

La veille, vous aviez annoncé, madame la ministre, votre volonté d'accélérer la mise en oeuvre des chantiers de réforme lancés depuis l'été concernant les bourses, la lutte contre l'échec en premier cycle et le logement.

J'espère que votre évidente détermination ainsi que la nature exceptionnelle du budget que nous étudions aujourd'hui seront de nature à apaiser toutes les inquiétudes.

Toutefois, en tant qu'élu des Français de l'étranger, je voudrais profiter de cette tribune, madame la ministre, pour vous entraîner un instant sur le terrain international.

J'évoquerai trois points, en développant un peu plus longuement le troisième.

Tout d'abord, s'agissant des pôles de compétitivité, s'il importe de donner toute leur place aux PME - cela a été rappelé, en particulier, par Pierre Laffitte -, il faut toujours s'assurer de leur dimension internationale et s'efforcer de la développer.

Ensuite, la nécessité d'attirer en France toujours plus de talents, de chercheurs et d'étudiants étrangers est un sujet qui vous est bien connu ; il importe aujourd'hui d'instaurer une coopération avec votre collègue Brice Hortefeux, dont le ministère est chargé de porter à 50 % la part de l'immigration économique ou professionnelle.

Enfin, et surtout, je veux soulever la piste de l'enseignement technique et professionnel à l'étranger.

À cet égard, il existe dans le monde une demande extraordinairement importante, qui ne fait que croître. Tous les pays, qu'ils soient « en développement » ou « émergents », des plus petits aux plus grands, ont des besoins énormes dans tous les secteurs, des plus traditionnels aux plus pointus techniquement.

La France, par le biais de ses entreprises - qui forment elles-mêmes le personnel dont elles ont besoin en fonction de leurs marchés -, de ses différentes collectivités territoriales engagées dans des opérations de coopération décentralisée et leurs universités, de ses grandes écoles, de ses instituts universitaires de technologie, ou IUT, si appréciés à l'étranger, de certaines de ses chambres de commerce, avec une mention spéciale pour celle de Paris, a initié un grand nombre de coopérations et constitué un réseau d'une grande diversité.

Toutes ces opérations sont très positives et riches d'avenir, mais je regrette, personnellement, qu'elles ne soient pas mieux orchestrées et systématiquement encouragées.

Bien loin d'imaginer de les centraliser, il faut au contraire promouvoir ce foisonnement d'initiatives. Mais ces dernières devraient s'inscrire dans une véritable politique à la hauteur de l'enjeu qu'elles représentent en termes à la fois d'influence et de retombées économiques pour notre pays.

À cet effet, il s'agira de travailler en même temps, à l'échelon interministériel et dans un cadre de partenariat avec le secteur privé.

J'ai noté que nombre d'entreprises qui gèrent individuellement leurs problèmes de formation professionnelle imagineraient volontiers de mutualiser leurs actions avec d'autres entreprises et de les pérenniser par la création d'établissements d'enseignement spécialisé.

Les financements existent, par les entreprises elles-mêmes, qui sont parfois contraintes de consacrer un certain pourcentage de leurs marchés à des opérations d'intérêt public, dont la formation professionnelle et technique peut faire partie.

Certes, le ministère des finances, de l'économie et de l'emploi et le ministère des affaires étrangères et européennes sont également concernés par un tel enjeu, mais il me semble qu'il devrait revenir au vôtre d'être le promoteur et l'artisan d'une telle politique. C'est lui qui, mobilisant toutes nos compétences et développant un corps de missionnaires spécialistes de l'international, sera le créateur de la coopération et de la synergie nécessaires à la constitution de ce grand partenariat.

J'espère vivement, madame la ministre, que vous accepterez ce rôle de chef de « l'orchestre France » que j'ai essayé de dessiner.

Je le souhaite d'autant plus vivement que je sais que vous comptez dans votre ministère et au sein même de votre équipe rapprochée des experts aussi compétents que convaincus et capables d'assurer le succès d'une telle opération.

À présent, à titre d'encouragement et pour terminer sur une note résolument optimiste, je rappellerai, mes chers collègues, que le prix Nobel de physique a été attribué, cette année, à un Français, Albert Fert, chercheur et également professeur à l'université Paris xi, pour ses travaux liés aux nanotechnologies. Cette marque de reconnaissance de la vitalité de la recherche française et de l'excellence de ses chercheurs est un signe qui vient à propos pour nous encourager à poursuivre nos efforts.

Bien évidemment, le groupe UMP votera les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, annoncé en forte progression, le budget pour 2008 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est qualifié de « vide », voire considéré comme « l'un des pires depuis un demi-siècle » par les organisations représentatives de chercheurs et enseignants-chercheurs.

Sur les 1,8 milliard d'euros supplémentaires, 391 millions d'euros seront absorbés par l'inflation, 330 millions d'euros seront affectés aux rénovations de bâtiments universitaires, dont les trois quarts serviront à rattraper le retard pris sur divers chantiers et 470 millions d'euros seront dévolus au paiement des arriérés de salaires et de retraites de l'année 2007.

Dans les faits, madame la ministre, c'est le collectif budgétaire que l'on vous a refusé l'été dernier. Mais la priorité du Gouvernement était ailleurs, comme en témoignent les 15 milliards d'euros consacrés au paquet fiscal. Les a priori idéologiques coûtent cher !

Autant dire que les étudiants, les personnels, les universités et les organismes de recherche publique ne bénéficieront pas de l'augmentation affichée des crédits de cette mission.

Tandis que la recherche publique et l'enseignement supérieur devraient voir leurs moyens, au mieux, stagner, alors que les crédits des organismes progresseront moins que l'inflation, les dégrèvements fiscaux augmenteront dix fois plus vite que les crédits budgétaires : 450 millions d'euros supplémentaires seront consacrés aux dispositifs fiscaux destinés aux entreprises, dont 390 millions d'euros pour le seul crédit d'impôt recherche.

Si l'ensemble des acteurs de la recherche et de l'enseignement supérieur sont soumis à évaluation, il est pour le moins surprenant que le crédit d'impôt recherche, dans lequel sont investies des sommes considérables et dont le montant progresse chaque année, n'ait fait l'objet d'aucune étude d'impact objective et incontestable.

Il est grand temps, madame la ministre, qu'une évaluation sérieuse de l'impact réel du crédit d'impôt recherche soit engagée, évaluation d'ailleurs réclamée tant par la Chambre des comptes que par le Conseil supérieur de la science et de la technologie.

Cela étant, ce budget s'inscrit pleinement dans la continuité de la politique engagée ces dernières années visant à réorienter l'ensemble du système de recherche et de l'enseignement supérieur vers les besoins des entreprises.

Il est souhaitable, certes, de renforcer les liens entre ces deux mondes, mais en aucun cas en instaurant un rapport de subordination.

La recherche et l'enseignement supérieur doivent demeurer réellement autonomes et, donc, disposer de ressources propres, en ayant pour vocation première de définir ce qui, au travers des siècles, a fait de nous des humains, de produire et de transmettre de nouvelles connaissances, et non pas d'accompagner, de façon étroite, la compétitivité des entreprises.

Le rapprochement entre recherche publique et entreprises ne pourra s'effectuer pleinement, sereinement et durablement que lorsque ces dernières auront acquis une véritable culture de la recherche, c'est-à-dire lorsqu'elles seront enfin disposées, par exemple, à embaucher des docteurs ou des « post-doc » rompus aux rythmes et aux aléas de la conduite de travaux scientifiques.

Ce n'est toutefois pas cette conception qui prévaut. Une fois encore, le Gouvernement manifeste sa volonté de soutenir massivement la recherche et développement du secteur privé et l'innovation, privilégiant ainsi la rentabilité immédiate tout en sacrifiant la recherche fondamentale. Celle-ci est encore un peu plus abandonnée au profit de recherches sur projet s'inscrivant tout au plus sur une durée de trois à quatre ans.

Il apparaît pourtant plus que nécessaire et urgent d'opérer un rééquilibrage entre soutien à la recherche fondamentale et soutien à l'innovation. Les chercheurs ont beau dire et répéter que la recherche fondamentale a sa propre temporalité, ses propres dynamiques, qu'elle est faite de tâtonnements, de mises au point de concepts purement théoriques parfois invalidés, pour le Gouvernement, seuls comptent les résultats à très court terme.

Il serait pourtant avisé d'écouter les scientifiques, tel Albert Fert, en particulier l'autre jour aux Mardis de Descartes, qui, tous, nous disent qu'ils n'auraient pu mener leurs travaux à bien s'ils avaient bénéficié uniquement de financements sur projet.

Les découvertes de demain nécessitent une prise de risque incompatible avec des exigences de rentabilité à court terme. D'où l'importance de maintenir des organismes de recherche disposant de fonds propres et d'une marge de manoeuvre importante leur permettant de soutenir des axes de recherche dont la finalité n'est pas connue a priori.

De même, nous devrions entendre les propos de Mme Faust, première femme présidente de Harvard, repris dans le New York Times, qui affirmait en octobre dernier : « L'université, ce n'est pas seulement les résultats financiers du prochain trimestre, ce n'est même pas ce qu'un étudiant est devenu au moment de la remise de son diplôme. Il s'agit d'un enseignement qui modèle à vie, un enseignement qui transmet l'héritage des millénaires, un enseignement qui façonne l'avenir. »

Les orientations politiques prises depuis plusieurs années vont, à moyen terme, fragiliser durablement la recherche et l'enseignement supérieur de notre pays, d'autant que ceux-ci sont d'ores et déjà confrontés à un phénomène particulièrement préoccupant, qui ne cesse de s'accentuer : la désaffection des jeunes pour les filières et les carrières scientifiques.

En outre, on peut s'inquiéter de l'avenir de la recherche en France, alors que le nombre annuel de doctorants stagne autour de 10 000 par an. Peut-on sérieusement croire que cette tendance s'inversera si ne sont pas données de réelles perspectives aux étudiants susceptibles de se tourner vers la recherche ?

De ce point de vue, il faut souligner que ce budget se caractérise également par l'absence de créations d'emplois statutaires. Certes, les financements de l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, permettront de créer quelques emplois, mais ceux-ci seront précaires, leur durée étant liée à celle des contrats. Que deviendront alors ces chercheurs recrutés en contrat à durée déterminée et sans débouchés sur des emplois stables ?

Alors que la recherche et l'enseignement supérieur sont désormais unanimement reconnus comme étant des secteurs clés dont dépend l'avenir de notre pays, il y aurait tout lieu d'établir une programmation pluriannuelle de l'emploi scientifique. Celle-ci est d'ailleurs demandée depuis plusieurs années par le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie, le CSRT, qui rappelle qu'elle « serait indispensable tant pour lisser les remplacements des départs à la retraite que pour donner une visibilité de moyen terme à la politique scientifique et encourager les jeunes à s'engager dans cette voie ».

Mais, cette année encore, cette recommandation restera sans suite. Seules sont prévues des mesures d'accompagnement permettant aux universités de transformer des emplois de catégorie B et C en emplois de catégorie A. Il reste que l'enveloppe consacrée à ces mesures est très insuffisante, d'autant que les universités ont besoin de salariés des catégories B et C qui, à l'heure actuelle, sont loin d'être en surnombre.

Quant aux crédits destinés à revaloriser les carrières des enseignants et des enseignants-chercheurs, on ne peut que déplorer leur insuffisance : ils représentent en moyenne une augmentation de 7 euros par personnel. Celle-ci traduit-elle toute la considération que la nation porte à ses scientifiques ?

L'emploi scientifique est loin d'être la préoccupation première du Gouvernement, qui a pourtant une importante contradiction à gérer : comment atteindre les objectifs de Lisbonne et entrer pleinement dans l'économie de la connaissance quand l'investissement de l'État dans le système éducatif dans son ensemble est réduit d'année en année, quand aucun signal fort n'est donné à une jeunesse qui, de plus en plus, délaisse les mastères de recherche ?

S'il faut acter la légère revalorisation des allocations de recherche, celle-ci demeure insuffisante. La désaffection des étudiants pour les métiers de la recherche est une question majeure que l'on ne peut traiter avec des demi-mesures. Car, demain, pourra-t-on encore encourager les entreprises à développer un effort de recherche, voire à maintenir leurs activités de recherche et développement sur le territoire national, quand elles ne seront plus en mesure de trouver des personnels suffisamment qualifiés ?

Plutôt que d'engager des dépenses croissantes dans le crédit d'impôt recherche, ne serait-il pas plus pertinent de revaloriser les carrières scientifiques pour créer un véritable appel d'air ?

Madame la ministre, votre budget s'inscrit dans la droite ligne du pacte pour la recherche, voté sous la précédente législature, qui prévoyait de changer structurellement l'appareil national de recherche et d'enseignement supérieur. Croyez-le, nous aurions préféré une véritable rupture avec la politique de vos prédécesseurs !

Il est en effet grand temps de redonner souffle aux universités et aux organismes de recherche, de redonner confiance aux jeunes qui, aujourd'hui, hésitent de plus en plus à s'investir dans des études scientifiques longues, exigeantes et, au final, souvent peu gratifiantes, si ce n'est du point de vue intellectuel.

Il est plus que jamais nécessaire d'engager des moyens considérables pour répondre à la massification et à la démocratisation de notre enseignement supérieur, notamment en recrutant de nombreux enseignants-chercheurs, ce qui permettrait prioritairement de renforcer l'encadrement pédagogique en premier cycle pour, à terme, parvenir à un taux d'encadrement identique à celui des classes préparatoires.

Ce ne sont pas les modestes 40 millions d'euros affectés à la réussite en licence qui permettront de remédier au taux d'échec important des plus jeunes étudiants.

Mais pour procéder à des recrutements pertinents, fondés sur les seules qualités scientifiques des candidats, encore faudrait-il développer le vivier des thésards. Pour répondre aux seuls besoins de l'enseignement supérieur et de la recherche, il conviendrait de doubler leur nombre pendant dix ans.

Susciter des vocations impose de donner de nouvelles perspectives aux étudiants et, de ce point de vue, le crédit d'impôt recherche pourrait également jouer un rôle, dès lors qu'il ne serait accordé qu'aux entreprises embauchant des docteurs.

Il serait urgent d'enclencher une telle dynamique, qui irriguerait notre pays en connaissance et en matière grise dont dépend l'avenir de notre pays. Tel ne sera toutefois pas le cas en 2008, la politique actuellement mise en oeuvre organisant la pénurie du futur et fragilisant encore un peu plus le service public de l'enseignement supérieur et de la recherche.

L'enseignement supérieur et la recherche se portent bien, à condition qu'on les sauve. Il est exact qu'il faut des changements de structure et des ressources nouvelles. Mais c'est se leurrer que de croire que le secteur privé y pourvoira, alors que, même aux États-Unis, les universités privées reçoivent de l'État la majeure partie de leurs subsides par le biais du système fiscal.

Le mouvement de contestation actuel des étudiants, qui traduit les réelles inquiétudes de la jeunesse sur son futur - mon ami Jean-François Voguet en parlera tout à l'heure -, comme la mobilisation croissante des chercheurs et des enseignants-chercheurs, démontrent que le débat sur l'enseignement supérieur et la recherche est loin d'être clos.

La nation ne pourra pas faire l'économie d'un débat fondamental qui conditionnera les capacités de la France à répondre aux défis du monde de demain.

Si le vote, en urgence, durant l'été, de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités a permis de limiter les échanges contradictoires, force est de constater que de nombreuses questions restent en suspens et que les réponses, élaborées sans concertation suffisante avec les différents acteurs, ne sont pas satisfaisantes.

Ce budget est la traduction de ces insuffisances. C'est pourquoi nous ne le voterons pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Othily.

M. Georges Othily. Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, la dégradation du système universitaire français n'était plus à prouver, les chiffres des dépenses par étudiant, des bourses, des crédits d'équipement ou de recherche parlant d'eux-mêmes.

Il était donc largement temps d'agir, de réformer l'organisation et le fonctionnement de nos établissements d'enseignement supérieur.

C'est ce que nous avons fait grâce à la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, que nous avons votée cet été.

C'est bien l'absence d'autonomie qui entrave le bon fonctionnement des universités en les privant, jusqu'à aujourd'hui, de leurs initiatives et de leur vitalité.

Nous avons voulu libérer ces énergies et donner à nos universités les moyens de devenir plus réactives, plus modernes. Je crois que nous y sommes parvenus.

Madame le ministre, dans le budget que vous nous proposez aujourd'hui d'adopter, vous poursuivez dans cette voie.

Nous l'avons vu, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sont en hausse de 1,8 milliard d'euros, dont environ 1 milliard d'euros seront consacrés à l'enseignement supérieur.

L'une des priorités était d'accompagner la réforme des universités. Le présent budget y tendra, en consacrant 381 millions d'euros, en moyens nouveaux, au renforcement des fonctions d'encadrement des universités et à l'amélioration du parc immobilier universitaire, qui en a besoin, notamment l'université des Antilles et de la Guyane.

Je ne peux m'empêcher, madame le ministre, de vous rappeler une nouvelle fois, comme je l'avais déjà fait à l'occasion de l'examen de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, certaines caractéristiques propres à l'enseignement supérieur dans les régions ultrapériphériques d'Europe, qui montrent à quel point la Guyane, la Guadeloupe ou la Martinique méritent, du fait de leur situation géostratégique si particulière, un traitement adapté.

Plus qu'ailleurs, d'autant qu'elles sont uniques sur leur territoire, les universités des territoires d'outre-mer sont essentielles au service public de l'enseignement supérieur.

Avec des moyens sans rapport avec leurs besoins réels, et confrontées à un taux de boursiers qui bat des records nationaux, elles offrent pourtant une formation de qualité au service de la jeunesse de leurs pays.

La situation de l'enseignement supérieur en Guyane est bel et bien inquiétante.

La structure universitaire est dispersée et, par conséquent, peu lisible. Elle est composée de diverses entités : quatre établissements plus ou moins autonomes - l'institut universitaire de formation des maîtres, l'institut universitaire de technologie, l'Institut d'enseignement supérieur de la Guyane et le pôle universitaire guyanais -  et l'unité de formation et de recherche de médecine. Ces cinq entités sont administrées depuis les Antilles. La structure universitaire compte aussi des services communs délocalisés ainsi que, pour coordonner l'ensemble, une représentation du président de l'université et de son administration sur le pôle Guyane.

J'ai appelé de mes voeux, comme plusieurs de mes collègues élus d'outre-mer, la création rapide d'une université de Guyane autonome. Un établissement autonome unique est en effet une réelle nécessité.

L'enseignement supérieur en Guyane gagnerait incontestablement et considérablement en efficacité et en compétitivité si toutes ces structures fusionnaient.

Cette revendication, légitime et pertinente, émane depuis longtemps du corps enseignant, du personnel universitaire, des étudiants de Guyane, ainsi que de l'ensemble des Guyanais et de leurs élus.

Depuis maintenant vingt-cinq ans, l'université des Antilles et de la Guyane, l'UAG, assure la promotion de la culture et de la science française et européenne dans ces régions antillaise et guyanaise, sans pour autant négliger la défense des cultures caribéenne et amazonienne. Elle ne pourra cependant continuer d'accomplir cette mission que si les pouvoirs publics prennent en compte ses indéniables particularités et difficultés, qui ne l'empêchent cependant pas d'être une université performante.

Les débats sur la loi relative aux libertés et responsabilités des universités ont permis l'adoption de l'article 42 autorisant le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures portant adaptation des dispositions de la loi aux caractéristiques et aux contraintes particulières des régions et des départements d'outre-mer.

Depuis lors, nous avons eu de nombreuses réunions de travail consacrées à l'Université des Antilles et de la Guyane et nous sommes parvenus, peu à peu, à des accords sur l'avenir de cette grande structure universitaire.

Madame le ministre, vous allez donc devoir prendre une ordonnance ; nous espérons que chaque site de l'Université des Antilles et de la Guyane - Guadeloupe, Martinique et Guyane - bénéficiera d'une autonomie de gouvernance, avec un conseil d'administration et des délégués au conseil d'administration central de l'université.

Je vous rappelle que nous tenons absolument à ce que les IUFM de chaque site restent autonomes. Nous attendons une réponse à ce sujet.

Pouvez-vous nous rassurer quant à l'état d'avancement de la rédaction de cette ordonnance et nous préciser les délais de sa publication et de sa ratification par le Parlement ?

Madame le ministre, nous connaissons ²votre volonté de faire de l'enseignement supérieur et de la recherche une priorité pour les années à venir et nous vous en félicitons.

C'est pourquoi, très naturellement, la majorité des membres du groupe du RDSE voteront les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à peine quatre mois se sont écoulés depuis la publication au Journal officiel de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités.

Selon vous, madame la ministre, ce texte était censé répondre au principal mal dont souffrait notre enseignement supérieur, en tout cas celui qui était en amont de tous les autres : la gouvernance des universités.

On peut au moins aujourd'hui dresser un petit bilan rétrospectif des débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle cet été.

Pour nous, les principaux sujets étaient la condition sociale des étudiants, l'échec en premier cycle, le manque d'orientation et d'insertion professionnelle, la carrière des doctorants et des post-doctorants, l'état de délabrement de notre parc universitaire et de ses moyens et, bien entendu, les lourdeurs administratives mettant dans une situation délicate les universités désireuses de prendre des initiatives et de faire preuve de réactivité.

Nous avions dit que, si l'on devait s'attaquer à une réforme, il fallait y mettre les moyens - il était important qu'ils soient visibles - et qu'une loi de programmation devait fixer les objectifs à atteindre et aborder la question de la gouvernance au service de ces objectifs.

Vous aviez répondu qu'il fallait aller vite. Nous avions alors indiqué que l'absence de concertation avec les personnels et les étudiants ne garantissait pas une réforme acceptée et une rentrée dans les meilleures conditions.

Les faits ont montré que nous avions raison, puisque les étudiants ont manifesté une grande incompréhension à la rentrée universitaire. Ils ont senti au-dessus de leur tête l'épée de Damoclès de l'échec en premier cycle. Ils ont constaté l'état inchangé des parcs universitaires. Certains d'entre eux rencontrent des problèmes quotidiens eu égard à leur condition sociale. Les étudiants ont donc vécu la réforme de la gouvernance comme un danger potentiel d'accroissement des inégalités, notamment entre les universités performantes et celles qui connaissaient des difficultés importantes.

Vous avez donc dû donner des garanties et annoncer que les moyens seraient là. Souvenez-vous, nous avions prédit que, dès la rentrée, des problèmes se poseraient en l'absence de mesures dans le collectif budgétaire, indépendamment de votre refus de la loi de programmation. De fait, au moment où l'on annonce une loi réformant la gouvernance, il faut absolument rassurer en accordant des moyens immédiatement, et non dans un an et demi. En réponse à ce mouvement, vos annonces ont consisté à accélérer le calendrier prévu pour mettre ces moyens à disposition.

Il est important d'entrer dans le vif du sujet au moment de la discussion de ce budget. N'ayons pas la mémoire courte ; les débats parlementaires peuvent toujours servir, même lorsqu'une opposition forte combat vos mesures. Si vous l'écoutiez et acceptiez la concertation, vous auriez moins de difficultés !

Les causes du malaise sont profondes. Sur les travées de la majorité, on croit les connaître. Même si vous ne l'avez jamais complètement avoué - certains l'ont fait au détour de débats -, vous pensez que les problèmes de l'université sont dues à l'échec du projet de réforme de 1986. La massification, la non-sélection, la faiblesse des frais d'inscription, l'absence d'autonomie : c'est cela qui aurait conduit le système universitaire dans une impasse. Tel est le fond de la pensée de la majorité sur les raisons de la situation universitaire.

La démocratisation de l'enseignement supérieur serait ainsi responsable de la dégradation du niveau et des conditions des études, donc de la dévalorisation des diplômes et du chômage massif des jeunes. Cette approche est cohérente, mais je voudrais « tordre le cou » à ces présupposés qui motivent la politique du Gouvernement, et dont la loi relative aux libertés et responsabilités des universités et le budget dont on discute aujourd'hui sont les traductions concrètes.

Comme le montrent les travaux récents d'économistes, en particulier ceux de Dominique Goux et d'Eric Maurin - je vous les conseille, mais je suis sûr que vous en avez pris connaissance -, qui ont exploité les enquêtes « emploi » de l'INSEE sur les vingt-cinq dernières années, les réformes conduites à la fin des années quatre-vingt afin de démocratiser le lycée et l'enseignement supérieur ont entraîné une meilleure insertion professionnelle des générations concernées.

Symétriquement, la mise entre parenthèse des efforts de démocratisation scolaire dans les années quatre-vingt-dix a eu l'effet inverse. Autrement dit, les générations ayant bénéficié de l'ouverture de nouvelles filières au lycée et dans les universités grâce aux réformes de la fin des années quatre-vingt ont trouvé plus facilement et dans de meilleures conditions un emploi que les précédentes.

Ces résultats d'études scientifiques approfondies éclairent les choix politiques d'aujourd'hui. En effet, ce qui pose question, ce ne sont ni la démocratisation de l'enseignement supérieur ni le niveau des diplômes, ce sont l'orientation des bacheliers et l'échec à l'université.

Il faut ainsi mettre fin à une croyance tenace : quand le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche annonce un taux d'échec de 50 % en premier cycle - c'est la réalité - et que l'on s'en émeut tous, il est facile, pour certains, d'en déduire que 50 % des jeunes inscrits à l'université n'y ont pas leur place et qu'il est urgent de mettre un frein à la démocratisation de l'enseignement supérieur.

Or l'examen attentif des données sur l'échec à l'université montre que ce sont les bacheliers issus des filières professionnelles et techniques qui échouent, massivement, en premier cycle, alors que 80 % des bacheliers issus des filières générales obtiennent un diplôme en trois ans ou moins. Ce point a été peu évoqué ici, mais je tiens à le souligner compte tenu des études concrètes qui nous ont été fournies.

Ces éléments permettent d'identifier la principale cause du malaise que vivent nombre de jeunes fréquentant aujourd'hui l'université : le déficit flagrant d'accompagnement des bacheliers, puis des étudiants, dans leur orientation. Madame la ministre, en quoi consiste votre politique dans ce domaine essentiel ? Quels sont les objectifs ? Où sont les réels moyens qui sont donnés dès maintenant à ce chantier ?

Il pouvait apparaître judicieux, voire facile, de vendre des actions d'EDF. En disant « vendre », je suis gentil, car, en réalité, celles-ci ont été bradées : si l'on en croit les banquiers et les syndicats de cette entreprise, en raison de la précipitation avec laquelle l'opération a été effectuée, le produit de la vente a été deux fois moins important que ce qu'il aurait dû être. Au lieu d'inventer une solution de dernière minute face à un mouvement de grève, si vous l'aviez anticipé, comme nous le demandions, en prenant le temps nécessaire - quatre ou cinq mois -, nous aurions perdu moins d'argent.

Il ne rime à rien d'avoir précipité l'autonomisation des établissements sans concertation préalable avec tous les acteurs de la communauté éducative pour établir un diagnostic précis et exhaustif des causes de l'échec et un plan pour y remédier.

La réalité, c'est que votre gouvernement, guidé par une vision assez libérale et élitiste, a choisi de permettre dès maintenant à quelques établissements, déjà performants, de développer leurs moyens pour accroître leur attractivité au détriment de la majorité des universités.

Les universités qui ont des moyens modestes ne demandent pas nécessairement à être autonomes, mais elles n'ont pas d'autre choix et elles seraient perdantes si elles ne le faisaient pas. Le problème, c'est qu'elles n'ont pas, dans l'immédiat, suffisamment de moyens pour devenir autonomes dans de bonnes conditions, contrairement aux universités mieux dotées.

Madame la ministre, je vous le demande concrètement : votre vision de l'avenir est-elle bien de donner plus, et dès ce budget, aux universités qui en ont le plus besoin et, dans l'affirmative, dans quelles proportions ? Comment comptez-vous accompagner les universités afin que la réforme leur assurant plus d'autonomie soit réussie ?

Par ailleurs, alors que vous vous vantez de vouloir rendre plus attractive la recherche française, on est surpris de la décision de seulement « pérenniser l'emploi scientifique ». Dans la mesure où, à la fin de 2006, 1 058 emplois inscrits en loi de finances initiale n'avaient pas été consommés, dont la presque totalité - 93,2 % - concernait des postes d'enseignant-chercheur, cette stabilisation risque en fait de se traduire par une diminution du nombre d'emplois de ce type dans les universités.

Je m'interroge sur les suites de l'annonce d'un plan pluriannuel de réhabilitation des campus : comment sera élaboré ce plan ? Vous-même, madame la ministre, pouvez-vous nous apporter la garantie que ce sont les universités les moins bien dotées qui seront prioritaires ? Vu les sommes en jeu, qui représentent des marchés publics très importants, pouvez-vous également nous donner des assurances sur le fait que les établissements garderont la maîtrise d'ouvrage des travaux, autrement dit que ces investissements ne seront pas réalisés dans le cadre de partenariats publics-privés ?

J'en viens à la vie étudiante, plus spécifiquement aux questions de santé. Je ne reviendrai pas sur l'étude qui a été réalisée par la mutuelle des étudiants, car j'ai dépassé mon temps de parole.

En ce qui concerne les logements étudiants, vous dites que les collectivités territoriales peuvent postuler pour en avoir la maîtrise d'ouvrage. Mais, pour ce faire, il faut qu'elles aient la garantie que l'État ne se défaussera pas et leur donnera les moyens nécessaires. Car elles sont déjà nettement engagées dans la construction de logements sociaux.

À Paris, nous avons construit 3 500 logements étudiants, soit presque dix fois plus que sous la précédente mandature municipale. Quelles garanties l'État offre-t-il aux régions, aux départements, à l'ensemble des collectivités locales pour que, le jour où elles s'engagent dans des programmes de construction, elles se sentent épaulées au lieu d'avoir le sentiment, une fois de plus, que l'État délègue pour ne pas avoir à le faire lui-même ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Voguet.

M. Jean-François Voguet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, tout le monde le reconnaît aujourd'hui, la situation sociale des étudiants ne cesse de se dégrader.

Si la question du pouvoir d'achat touche toute notre société, les étudiants sont souvent en première ligne. En septembre, la hausse des prix qu'ils ont subie est de 3,7 %. Ainsi, pour la sixième année consécutive, leur pouvoir d'achat va régresser.

Pourtant, dans les annonces du Président de la République, rien n'a été prévu sur la nécessaire relance des moyens attribués à la vie étudiante, alors que ceux-ci sont directement de votre compétence, et que les mesures portées par votre budget ne répondent pas, me semble-t-il, aux besoins. Elles sont même notoirement insuffisantes. Depuis 2001, aucune mesure nouvelle n'a pris en compte l'évolution des difficultés que les étudiants rencontrent au quotidien.

D'après le Conseil économique et social, plus de 75 % des étudiants sont aujourd'hui obligés de travailler pour payer leurs études, alors que seulement 30 % d'entre eux sont boursiers. Encore faut-il noter que les boursiers sont, eux aussi, obligés de travailler, du fait de la modicité des bourses qu'ils perçoivent et de leur retard constant sur le coût de la vie.

Pour trois étudiants sur quatre, travailler est donc devenu une obligation, et nombre d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Lorsqu'on est majeur, que l'on a entre dix-huit et vingt-cinq ans, la vie est devant soi, pleine de promesses. On souhaite s'y engager pleinement, avec ses envies et ses rêves, de façon autonome.

Est-il normal que, pour faire face à leurs dépenses, les étudiants doivent demander en permanence de l'aide à leurs parents, d'autant que ces derniers, dans la plupart des cas, ne disposent pas des revenus nécessaires ?

Les étudiants des familles en difficulté, mais également de familles appartenant aux classes moyennes, ne disposent pas des conditions optimales pour poursuivre avec succès leurs études. C'est la première cause de leur échec !

Depuis des décennies, notre société n'a pas pris la mesure de ce défi pour son avenir. Pour dispenser une formation supérieure à des centaines de milliers de jeunes, il faut s'en donner les moyens. Sinon, leur échec est notre propre échec.

Il faut créer les conditions du succès pour tous, en permettant à chacun de suivre un parcours de réussite. Pour y parvenir, les aides à la vie étudiante sont essentielles ; elles doivent être démultipliées.

Le Premier ministre a fixé l'objectif de conduire 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur. Bel objectif, auquel nous ne pouvons que souscrire ! Mais n'est-ce là pas un simple affichage politique, une promesse mensongère, si l'on ne dégage pas des aides substantielles en faveur des étudiants ?

Or les quelques mesures que vous prévoyez en 2008 ne sont pas du tout à la hauteur de cette ambition. Aujourd'hui, vous le savez, les étudiants vivent de plus en plus mal. Leurs difficultés sont innombrables pour accéder au logement, pour se nourrir, se soigner, se vêtir, se déplacer, se distraire, se détendre, se cultiver, partir en vacances, et même pour accéder aux documents pédagogiques nécessaires à leurs études.

La vie étudiante est devenue un véritable parcours d'obstacles, au cours duquel beaucoup trébuchent, s'accrochent et finalement tombent, abandonnant leurs études. C'est un gâchis pour eux, bien sûr. Mais quel énorme gâchis pour notre société !

Madame la ministre, lors des questions d'actualité, je vous ai interpellé pour vous demander d'augmenter votre budget. Vous ne m'avez pas répondu ! Cependant, le soir même, le Président de la République reconnaissait, d'une certaine façon, que le compte n'y était pas. Il soulignait le besoin urgent d'investissements dans les locaux et le logement étudiant.

Il faut maintenant des actes, et pas seulement dans ce domaine. Le défi de la réussite pour tous passe par le soutien de chacun. C'est pourquoi il faudra bien parvenir à mettre en place une véritable allocation d'étude et d'autonomie pour tous. Madame la ministre, dans cette attente, votre budget devrait au moins répondre aux urgences. Il ne le fait pas !

Dès le 1er janvier, il faudrait augmenter sérieusement les bourses et élargir le nombre des allocataires. Nous devrions nous fixer l'objectif d'aider 50 % des étudiants le plus rapidement possible.

Il faut aussi attribuer un dixième mois de bourse pour permettre aux boursiers de faire face à une année universitaire qui commence maintenant en septembre.

Bon nombre de solutions, qu'il est urgent de prendre, sont contenues dans le rapport de M. Wauquiez, devenu porte-parole du Gouvernement. Qu'attendez-vous pour les mettre en oeuvre ?

Il devient tout aussi urgent de prendre la mesure de la véritable crise du logement, pour les étudiants en particuliers. Est-ce trop demander que d'avoir au moins l'ambition de réaliser réellement le plan Anciaux, notamment ses engagements pour 2008, afin de rattraper le retard ?

Certes, toutes ces mesures ont un coût. Nous considérons que notre pays a les moyens d'y faire face. Il suffit d'avoir de l'ambition, une ferme volonté et de faire le choix de la jeunesse et de l'avenir, contre celui de la rente et de la spéculation. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'actualité particulièrement chargée de la rentrée universitaire l'a une nouvelle fois démontré : l'inquiétude, la grande inquiétude des étudiants du supérieur demeure.

L'objet principal de cette appréhension tient à la sélection. Le climat général tendu qui règne dans les universités est à rapprocher de la véritable nébuleuse que constitue le premier cycle universitaire. Les étudiants craignent, à juste titre, que ne s'aggrave leur parcours du combattant post-bac qui, dans presque un cas sur deux, n'aboutit même pas à l'obtention d'un diplôme. C'est la raison pour laquelle je centrerai mon intervention sur la réforme nécessaire du premier cycle universitaire, ainsi que sur l'articulation entre les filières dites « sélectives » et celles qui ne sont pas reconnues comme telles.

La réforme du premier cycle universitaire n'a que trop tardé. Madame la ministre, quelles mesures envisagez-vous pour l'engager, puisque aucune disposition ne figure à ce titre dans l'exercice budgétaire pour 2008 de la recherche et de l'enseignement supérieur ?

Votre loi sur l'autonomie des universités ne vise en effet que les modalités techniques de la gouvernance et non la mise en place de solutions novatrices luttant contre ce constat inadmissible : en premier cycle, la sélection à l'université se fait par l'échec.

Il faut que cesse l'hypocrisie latente qui consiste à prétendre qu'en France on ne sélectionne pas à l'université. Cette mascarade brouille les pistes et prolonge le malentendu entre les étudiants et l'institution universitaire. Dans la réalité, on pratique la pire des sélections après le baccalauréat : la sélection naturelle !

Abandonnent d'abord ceux qui n'ont pas eu accès à la bonne information d'orientation et qui se perdent rapidement dans le dédale des filières, pour terminer sur les bancs de formations qui essuient jusqu'à 40 %, voire 60 % d'échecs dès la première année.

Partent ensuite ceux qui ne résistent pas à l'effort financier exigé et qui doivent travailler ; c'est le cas d'un étudiant sur deux environ

Le taux d'échec des étudiants qui travaillent est de 40 % supérieur à celui des autres. Un quart d'entre eux renoncent aux soins médicaux et, chaque année, 20 % abandonnent leurs études pour des raisons financières.

Partent enfin ceux qui ne possèdent pas un capital culturel ou conceptuel suffisant pour réussir dans des filières plus difficiles qu'il n'y paraît, les sciences humaines par exemple.

Les critères économiques et sociaux se chargent donc de la sélection des étudiants dès la première année.

À l'inverse, la sélection pour les formations courtes et professionnalisantes que sont les BTS et les IUT, ou pour les grandes écoles et leurs classes préparatoires, se fait sur dossier scolaire ou sur concours.

Le système français de l'enseignement supérieur est donc complètement bicéphale : 50 % sur concours ou sur dossier et 50 % par l'échec.

Cette situation ne peut plus durer et l'on comprend la révolte universitaire.

Les filières sélectives courtes sont utilisées par les étudiants comme solution d'évitement au premier cycle de l'université, tant ce dernier est mal conçu et mal perçu. La population des bacheliers à laquelle elles s'adressaient à l'origine, c'est-à-dire les bacheliers des filières technologiques et professionnelles, est dessaisie de ces places.

C'est dans ce cadre particulier de révolte que nous sommes amenés à voter le budget de la recherche et de l'enseignement supérieur. Comme l'ont indiqué mes collègues, il s'agit d'un budget en trompe-l'oeil !

Les augmentations sont superficielles, voire virtuelles, contrairement aux annonces faites au mois du juin. La vie étudiante n'est malheureusement toujours pas une priorité pour le Gouvernement et les boursiers passeront l'hiver avant d'être éventuellement reconsidérés par le ministère à la rentrée.

Les exonérations fiscales des parents ne concernent, bien évidemment, que ceux qui sont imposables. Et la problématique cruciale du premier cycle universitaire n'est même pas posée.

Pourquoi donc, si le premier cycle n'est pas réformé, les meilleurs élèves se bousculent-ils pour intégrer les formations sélectives ? C'est le « tout sauf la fac » qui règne dans les lycées. Les filières sélectives sont en effet les seules à proposer un encadrement professoral satisfaisant, c'est-à-dire adapté, des liens avec le monde de l'entreprise - formation en alternance, stages - ainsi qu'un réseau relationnel à taille humaine. Ces filières - BTS, IUT, classes préparatoires aux grandes écoles, médecine, pharmacie - concernent 50 % de nos étudiants, ce qui n'est pas négligeable.

Comme l'indiquent les conclusions du rapport de la mission d'information dont j'ai été le rapporteur cette année - je vous en ai remis un exemplaire, madame la ministre - la diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles a nettement régressé ces dernières décennies, passant sous la barre des 10 % d'élèves issus de catégories sociales défavorisées.

On est donc en droit de se demander si la sélection sur dossier ne profite qu'aux bons élèves issus des classes sociales les plus hautes, si les dossiers scolaires des éléments issus des familles les plus modestes sont véritablement étudiés en vue de développer réellement leurs points forts et si ces élèves sont convenablement orientés et accompagnés vers des formations qu'ils sont capables de suivre. Cette sélection à deux vitesses est tout à fait injuste !

Il est également nécessaire d'ouvrir le débat des liens qu'il faut créer entre ces filières, ces écoles d'excellence et l'université. Aujourd'hui, ces liens sont bien trop ténus, ce qui accentue le sentiment de bicéphalie, voire de schizophrénie du système de l'enseignement supérieur.

Madame la ministre, quel avenir envisagez-vous pour les formations courtes et sélectives dans le cadre d'une réforme du premier cycle ? Quel avenir envisagez-vous pour hisser l'université au niveau de ses ambitions et des attentes des étudiants de notre pays ?

Ce n'est pas dans votre projet de budget pour 2008 que nous trouvons des réponses satisfaisantes. Vous comprendrez donc que notre groupe ne votera pas les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Madame la ministre, vous annoncez une augmentation de l'ordre de 5 % des moyens budgétaires. En réalité, vous comptabilisez dans cette augmentation le report de TVA et le rattrapage de salaires et de retraites, qui correspondent à des impayés de l'État au titre de l'année 2007, voire d'années précédentes. Bref, vous ne faites que payer les dettes !

En 2008, sur les 1,8 milliard d'euros supplémentaires destinés à la mission « Recherche et enseignement supérieur », 1,326 milliard d'euros seront destinés aux programmes de recherche. Mais ces 1,3 milliard d'euros supplémentaires consacrés à l'ensemble des programmes de la recherche ne permettront malheureusement pas de combler le retard de financement pris lors des exercices budgétaires précédents, pour honorer les termes de la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006, qui prévoit un effort cumulé de 19,4 milliards d'euros sur la période 2005-2010, dont 6 milliards d'euros pour la seule période 2005-2007.

Dans les faits, les lois de finances pour 2005 et 2006 n'ont prévu, chacune, qu'un milliard d'euros supplémentaires et celle de 2007 seulement 765 millions d'euros, pour la recherche. L'effectivité de ces 2,7 milliards est très contestable. De plus, le Gouvernement avait fait savoir que le milliard d'euros de 2005 n'était pas comptabilisé dans les 6 milliards d'euros, ce qui signifie que la loi de finances pour 2008 aurait dû prévoir au moins 6 milliards d'euros supplémentaires pour atteindre l'objectif fixé. On est loin du compte !

L'objectif fixé par les conseils européens de Lisbonne en 2000 et de Barcelone en 2002 - et partagé par les états généraux de la recherche - de porter à 3 % du PIB le budget de la recherche en 2010 ne sera donc vraisemblablement pas atteint. D'autant que les études prouvent que la part des dépenses de recherche dans le PIB, en France, ne cesse de baisser : de 2,23 % en 2002, elle est passée à 2,13 % en 2005 et 2006. Le collectif « Sauvons la recherche » estime que 14 milliards d'euros supplémentaires sont nécessaires pour pouvoir atteindre les objectifs européens de 2010.

Une analyse rapide fait apparaître que les crédits destinés à l'ensemble des programmes croissent en moyenne de 2,4 %, ce qui, à structure constante, compte tenu de l'inflation, dont le taux est fixé à 1,8 %, signifie une hausse extrêmement modique des moyens de 0,6%, qui ne permettra pas d'honorer les obligations légales et les enjeux européens.

Je constate, avec mon collègue Serge Lagauche, que les secteurs dont les activités répondent à des missions de service public sont les plus sacrifiés, leurs crédits accusant tous des baisses en euros constants.

Permettez-moi de revenir sur l'autonomie scientifique des universités. Comme l'a rappelé le collectif « Sauvons la recherche », elle ne sera qu'une façade dans une construction dirigiste et centralisée entièrement contrôlée par l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, imposant une recherche sur projets à court terme, sans prise de risque, sur les axes détaillés établis par le ministère, avec un nombre croissant de personnels précaires.

Ce dispositif de contrôle du champ scientifique par le politique est complété par Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, agence dont la direction est entièrement constituée de personnalités nommées.

Les phénomènes de concentration de pouvoirs sans contrepouvoirs seront aggravés par la disparition programmée des établissements publics à caractère scientifique et technologique en tant qu'organismes de recherche ayant une politique scientifique autonome, en particulier le CNRS, principal vecteur d'une recherche non finalisée sur le long terme, privilégiant la pluridisciplinarité et la prise de risques.

Les unités mixtes de recherche dépendant d'une université et d'un organisme de recherche représentent l'endroit où peut s'articuler une vision nationale et internationale assurée par les organismes de recherche et la dimension locale qui relève de l'université de tutelle. Cette articulation permet de coordonner l'effort de recherche dans chaque champ disciplinaire et dans le contexte international.

La commission d'Aubert prépare aujourd'hui la suppression de fait de cette double tutelle et s'apprête ainsi à casser un système qui a fait la preuve de ses vertus structurantes.

Madame la ministre, alors que de nombreux pays d'Europe, les États-Unis, le Japon et les pays émergents consacrent d'énormes efforts financiers à la recherche en se concentrant sur des technologies clés, permettez-moi de vous demander comment une si faible ambition gouvernementale peut assurer l'entrée de la France dans une véritable économie de la connaissance, dont nous savons qu'elle est aujourd'hui le moteur de la croissance dans le monde ?

J'en viens au crédit d'impôt, prévu à l'article 39 du projet de loi de finances.

Cette mesure représente une dépense fiscale supplémentaire de 390 millions d'euros selon les sources gouvernementales. En réalité, le coût supplémentaire pourrait atteindre 800 millions d'euros. Le coût estimé du crédit d'impôt, en 2007, est de 1,39 milliard d'euros, avant la réforme.

Jusqu'à présent, depuis 2005, 10 % des dépenses réalisées dans l'année pouvaient être déduites et 40 % de la part des nouvelles dépenses constatées d'une année à l'autre.

La réforme prévoit un crédit d'impôt de 30 % des dépenses de recherche, plafonné à 100 millions d'euros. Ce taux est néanmoins porté à 50 % la première année pour les entreprises n'ayant pas bénéficié de ce crédit d'impôt depuis cinq ans. Les subventions publiques sont exclues de l'assiette des dépenses prises en considération.

Il apparaît évident que cette réforme profitera d'abord aux grandes entreprises au détriment des PME. Il aurait sans doute mieux valu diminuer les sommes affectées au crédit impôt recherche, pour augmenter celles qui sont octroyées aux laboratoires par le biais des universités et des organismes de recherche.

En conclusion, depuis 2002, notre pays a fait l'impasse sur l'avenir. La France accuse un retard dans le domaine de la recherche, de la formation supérieure et de l'innovation. Ce retard est flagrant au regard de la situation qui prévaut aux États-Unis ou au Japon et alors que des pays émergents comme l'Inde ou le Brésil contribuent à changer la donne.

La politique qui est conduite depuis près de six ans par les différents gouvernements de droite a considérablement aggravé la situation. Le retard tend à devenir irrémédiable.

En outre, la fuite des doctorants soit vers les États-Unis et le Japon, soit vers des carrières industrielles ou commerciales, s'explique notamment par la précarité de leur situation et par l'absence de perspective.

L'amélioration des échanges entre chercheurs et enseignants-chercheurs et l'attractivité des carrières sont pourtant des priorités. Cela suppose un rapprochement progressif et assumé entre l'université et les organismes de recherche.

Notre recherche est malade du cloisonnement des acteurs publics et d'une absence de visibilité, aggravée par le phénomène omniprésent représenté aujourd'hui par l'ANR.

La précipitation à engager la réforme pour l'autonomie des universités a escamoté, globalement, la réflexion sur les moyens et les objectifs de l'université.

Le lien intime qui relie les destins de la recherche et de l'université doit guider les efforts à accomplir pour une nécessaire réorganisation.

C'est pourquoi le groupe socialiste souhaite voir associer universités, écoles, organismes de recherche, en particulier sur une base de coopération territoriale, pour développer les complémentarités et les synergies indispensables, et revenir aux principes de mutualisation, de pluridisciplinarité et de démocratie définis par les états généraux d'octobre 2004. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je serai brève, car j'ai déjà utilisé une grande partie de mon temps de parole.

Je dirai simplement à M. Pierre Laffitte que je partage son souhait de voir les incubateurs se développer sur notre territoire.

Monsieur Lagauche, ce budget prévoit de créer 700 équivalents temps plein dans les universités au travers des 2 250 postes de support de monitorat. Ils permettront aux doctorants d'acquérir une véritable expérience professionnelle dans l'université. Par ailleurs, 700 emplois d'encadrement seront repyramidés pour permettre l'autonomie.

Monsieur Ferrand, nous avons aujourd'hui douze formations technologiques à l'étranger. C'est une priorité de mon ministère que vous connaissez bien, puisque vous travaillez sur la mise en oeuvre de formations technologiques en Afrique du Sud et au Venezuela. Ces formations se poursuivront, car il s'agit de partenariats extrêmement fructueux.

Monsieur Othily, le texte de l'ordonnance sera transmis au Conseil d'État mercredi prochain. J'attends aujourd'hui les retours de l'ensemble des élus des Antilles et de la Guyane sur la proposition d'ordonnance qui leur a été transmise, compte tenu des remarques faites par M. Virassamy, le président de l'université des Antilles et de la Guyane. Le 23 janvier prochain, le texte sera soumis au conseil des ministres et l'ordonnance pourrait être publiée au début du mois de février.

En ce qui concerne les IUFM, monsieur le sénateur, la réflexion se poursuit.

Ayant épuisé tout mon temps de parole, je ne pourrai pas réfuter l'ensemble des contre-vérités qui ont été prononcées à cette tribune sur la philosophie de notre budget. La vision que nous avons de l'enseignement supérieur et de la recherche n'est pas celle qui a été décrite par MM.  Renar, Assouline, Voguet, Bodin et Todeschini. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Ivan Renar. Ce n'est pas parce que vous allez dans le mur en klaxonnant que ce sont des contre-vérités !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Assouline, nous donnerons plus aux universités qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire à celles qui accueillent les publics les plus fragiles. Ce sera le critère d'attribution des crédits destinés à financer le dispositif de réussite en licence.

Monsieur Voguet, la situation sociale des étudiants nous préoccupe puisque nous avons engagé une réforme des bourses. Nous augmenterons de 7,2 % celles des 100 000 étudiants les plus défavorisés.

Monsieur Bodin, les formations courtes et sélectives feront partie de notre plan « Licence ».

Enfin, monsieur Todeschini, quand il y a un effet point dans la fonction publique, il se répercute d'une année sur l'autre. Il s'agit non pas d'impayés, mais de tenir les engagements de l'État. (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jean-Marc Todeschini. Autant dire que notre débat ne sert à rien !

M. David Assouline. C'est honteux !

M. Ivan Renar. Tout à fait !

Rappels au règlement

Recherche et enseignement supérieur
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 33 et Etat B

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour un rappel au règlement.

M. David Assouline. C'est la première fois que les choses se déroulent ainsi ! Normalement, les rapporteurs s'expriment, puis les différents orateurs des groupes ; ensuite, le ou la ministre présente son budget en intégrant à son intervention les réponses aux orateurs.

Or Mme la ministre a jugé bon de parler plus de trente minutes, avant même de connaître la position des différents groupes. Je pensais qu'elle consacrerait un peu de temps à nous répondre réellement. Mais non : elle balance rapidement quelques réponses très ramassées, comme si nous discutions d'un amendement ! Pourtant, les différents groupes ont, pendant plus d'une heure, développé des arguments.

Madame la ministre, c'est une façon un peu cavalière de débattre et de prendre en compte la parole des parlementaires !

Mme la présidente. La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Madame la ministre, c'est la première fois que les élus de l'opposition sont traités comme des invités de raccroc. Nous sommes des élus à part entière !

Les choses ne sont pas aussi simples que vous voulez bien le dire. Je le répète, ce n'est pas parce que vous allez dans le mur en klaxonnant que nous énonçons des contre-vérités ! Sinon, pourquoi des gens manifesteraient-ils dans les rues ? Pourquoi des étudiants seraient-ils inquiets ? Le problème est bien réel !

Nous pouvons ne pas être d'accord, mais échanger quand même nos idées. C'est ce que nous avons essayé de faire, sans agressivité aucune de notre part envers votre politique.

Je n'en veux pas à mes collègues rapporteurs, mais il semblerait qu'il y ait dans cet hémicycle des wagons de première classe et des wagons de seconde classe, voire de dixième classe !

C'est la première fois que cela se produit, et ce n'est pas bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. La plupart des orateurs des groupes ont malheureusement repris les questions posées par MM. les rapporteurs. Et ayant répondu très longuement aux rapporteurs, je pense avoir épuisé un grand nombre de questions.

Je suis désolée de vous dire que, compte tenu de l'organisation du débat, je n'ai plus suffisamment de temps de parole pour reprendre les explications que j'ai déjà données aux rapporteurs. J'aurais dû, effectivement, et c'est une leçon pour l'avenir, attendre que tous les orateurs se soient exprimés pour répondre globalement. Quoi qu'il en soit, l'ensemble des sujets ont été largement débattus.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Madame la ministre, voilà quelques mois, lorsque nous avons discuté du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités des universités, nous avons eu un débat parlementaire digne de ce nom : chacun s'est exprimé ; nous nous sommes écoutés les uns et les autres. Nous avions alors beaucoup apprécié - je vous en avais moi-même fait la remarque - le fait que vous ayez tenu à répondre à la totalité des questions posées par les orateurs.

Cet après-midi, franchement, nous n'avons pas eu ce sentiment ! Il y a eu un dialogue entre vous et les rapporteurs des différentes commissions, ce qui peut se justifier. Puis, par raccroc, on a consenti à laisser du temps à la discussion générale.

Si vous voulez un débat parlementaire digne de ce nom, madame la ministre, il faut que vous répondiez non seulement aux rapporteurs, mais aussi à tous les sénateurs qui ont ressenti le besoin de s'exprimer devant vous. C'est du reste leur devoir !

Vous nous dites que vous avez répondu par avance à nos questions. Considérez que nous éprouvons une sorte de frustration, car nous aurions préféré que vous nous répondiez après avoir entendu nos interventions.

Si vous le voulez bien, pour l'avenir, nous aimerions ne plus être privés d'un vrai débat parlementaire.

Ce soir, nous avons attendu pendant deux heures et demie une réponse qui n'a duré que cinq minutes : ce n'est pas acceptable ! C'est une marque de mépris envers notre assemblée.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Je suis particulièrement irrité par l'attitude de Mme la ministre, qui a répondu sous forme de litanie aux questions des élus de l'opposition.

Madame la ministre, s'il nous suffit de lire le compte rendu officiel des débats de l'Assemblée nationale, ce n'est pas la peine de venir au Sénat ! Si vous répondez par avance à toutes nos questions, soit vous avez peur du débat parlementaire, soit les élus de l'opposition vous indisposent !

Lors de l'examen du texte sur l'autonomie des universités, auquel mon collègue Yannick Bodin a fait référence, j'étais intervenu pour mon groupe et le ton était monté. Je vous avais demandé de rectifier le tir, et le débat s'était poursuivi sereinement.

Mme Valérie Pécresse, ministre. C'était l'inverse, monsieur Todeschini !

M. Jean-Marc Todeschini. Pas du tout ! Vous aviez haussé le ton, madame la ministre, en nous accusant de vouloir chercher l'incident de séance !

Aujourd'hui, vous nous méprisez totalement ; ce n'est pas l'habitude au Sénat. Le mot est fort, madame la ministre, mais je considère que vous nous avez traités par-dessus la jambe.

Vous étiez obligée de venir devant le Sénat pour que votre budget soit adopté. Mais vous discutez uniquement avec les rapporteurs, qui, certes, sont des sénateurs honorables. Dites que nous sommes de trop ! Ainsi, nous ne perdrons pas notre temps !

La façon dont vous avez répondu aux parlementaires de l'opposition est inadmissible ! Je n'ai jamais vu ça !

En cette période, certains souhaitent venir s'exprimer devant l'Assemblée nationale et le Sénat, et tout le monde met le petit doigt sur la couture du pantalon. Eh bien ! cela ne se passera pas ainsi aujourd'hui avec les parlementaires de l'opposition, madame la ministre !

C'est la première fois, au cours de ce débat budgétaire pour 2008, qu'un ministre répond par avance aux rapporteurs aussi longuement, en dépassant largement son temps de parole - certes, nous avons également dépassé le nôtre et Mme la présidente a été très clémente -, et qu'il dit ne plus avoir le temps de répondre ensuite aux orateurs ; vous avez parlé, messieurs les sénateurs de l'opposition, mais cela ne sert à rien : circulez, il n'y a plus rien à dire !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Todeschini, vous savez bien que c'est indépendant de ma volonté ! Je n'ai que quarante-cinq minutes de temps de parole et je les ai malheureusement dépassées ; je ne peux donc pas vous répondre plus longuement. J'aurais été très heureuse de pouvoir le faire.

C'est une erreur, je le reconnais : j'aurais dû répondre non pas après les interventions des rapporteurs, mais après celles des orateurs des groupes.

Mme la présidente. Mes chers collègues, l'an prochain, la conférence des présidents examinera la possibilité qui a été ouverte pour les débats de plus de deux heures de consacrer un temps de réponse aux rapporteurs. Cette expérience n'a pas été concluante. Nous en tiendrons compte, de façon que tous les débats, quelle que soit leur durée, soient traités de la même manière.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Tout à fait !

Rappel au règlement
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 46

Mme la présidente. Mme la ministre a considéré qu'elle avait épuisé son temps de parole ; j'aurais été indulgente avec elle comme je l'ai été avec vous.

Nous allons procéder à l'examen des amendements portant sur les crédits de la mission  « Recherche et enseignement supérieur » figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Recherche et enseignement supérieur

23 335 545 897

23 242 625 033

Formations supérieures et recherche universitaire

11 187 970 799

11 270 248 935

Dont titre 2

8 424 189 285

8 424 189 285

Vie étudiante

1 981 528 751

1 965 528 751

Dont titre 2

81 378 865

81 378 865

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

4 982 496 835

4 982 496 835

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

1 216 843 527

1 216 843 527

Recherche spatiale

1 277 749 726

1 277 749 726

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

279 739 068

279 739 068

Recherche dans le domaine de l'énergie

671 314 416

671 314 416

Recherche industrielle

687 269 892

564 419 892

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

413 357 413

376 118 413

Recherche duale (civile et militaire)

200 000 000

200 000 000

Recherche culturelle et culture scientifique

159 744 726

157 194 726

Dont titre 2

36 457 741

36 457 741

Enseignement supérieur et recherche agricoles

277 530 744

280 970 744

Dont titre 2

159 636 008

159 636 008

Mme la présidente. L'amendement n° II-13, présenté par MM. C. Gaudin et Adnot, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2

 

 

 

 

Vie étudianteDont Titre 2

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

6.000.000

 

6.000.000

 

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de l'énergie

 

6.000.000

 

6.000.000

Recherche industrielle

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

  6.000.000

  6.000.000

  6.000.000

  6.000.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Christian Gaudin, rapporteur spécial.

M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet d'apporter une première traduction des engagements présidentiels pris à l'occasion du Grenelle de l'environnement.

À cette fin, il vous est proposé d'abonder le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplaires », plus précisément la rubrique « Énergie durable et environnement » de l'Agence nationale de la recherche, l'ANR.

En effet, cette rubrique ne progresse que de 3 % en 2008, contre 8,8 % pour l'ensemble des crédits de l'ANR.

Un effort supplémentaire de 6 millions d'euros permettrait de ramener la partie « Énergie durable et environnement » de l'ANR au niveau moyen d'augmentation des crédits de l'agence.

Ces 6 millions d'euros de fonds nécessaires pourraient provenir du programme 188 « Recherche dans le domaine de l'énergie », plus précisément des actions de l'Institut français du pétrole, l'IFP, visant à repousser les limites du possible dans l'exploration et la production du pétrole et du gaz.

Il semble en effet que les sociétés pétrolières pourraient accroître leur participation financière à ce type de recherche. Elles bénéficient d'une conjoncture économique favorable et peuvent également prétendre au déplafonnement du crédit impôt recherche.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

La part « projets » de l'ANR progresse bien, je m'en suis expliquée tout à l'heure, car il faut y inclure le préciput. L'effort en faveur de l'environnement dans ce budget est assez important puisque 34 millions d'euros de crédits nouveaux, soit 17 % d'augmentation, sont dédiés à la recherche sur l'environnement, qui bénéficie au total de 232 millions d'euros.

L'Institut français du pétrole a un contrat, qui doit être respecté. J'ajoute qu'il effectue des recherches en matière d'énergies nouvelles et d'économies d'énergie auxquelles sont consacrés 25 % de ses moyens.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?

M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. Madame la ministre, j'ai bien entendu vos arguments. Il nous semblait intéressant de porter sur le programme 172 les actions de l'Institut français du pétrole visant à « repousser les limites du possible dans l'exploration et la production du pétrole et du gaz ».

Cependant, compte tenu des éléments que vous venez de nous apporter, il semble que des moyens supplémentaires pour traiter le problème que nous évoquons et traduire les engagements pris à l'occasion des conclusions du Grenelle de l'environnement puissent être inscrits dans ce budget.

Je retire donc cet amendement, puisque vous répondez à la préoccupation que nous avons exprimée concernant l'inscription de crédits en faveur de l'énergie durable et de l'environnement.

Mme la présidente. L'amendement n° II-13 est retiré.

L'amendement n° II-14, présenté par MM. Adnot et C. Gaudin, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2

3.000.000

 

0

 

3.000.000

 

0

 

Vie étudianteDont Titre 2

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de l'énergie

 

3.000.000

 

3.000.000

Recherche industrielle

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

3.000.000 

  3.000.000 

3.000.000 

  3.000.000 

SOLDE

0

0

La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Certes, Mme la ministre nous a répondu longuement, mais elle a été brève en la matière et elle n'est pas allée dans le sens que nous souhaitons.

Cet amendement vise à vous aider, madame la ministre, à réussir le plan « Licence », dont l'importance nous paraît cruciale. C'est au travers de cette action que vous ferez la démonstration que vous êtes en train de faire évoluer l'université. Vous avez déjà obtenu des crédits supplémentaires à ce titre, et nous vous proposons de les renforcer.

Bien entendu, mes sources de financement sont les mêmes que celles qu'a évoquées mon collègue Christian Gaudin dans l'amendement précédent. Je suppose donc que cet amendement recevra de votre part le même avis.

Pour autant, j'aimerais quand même que vous preniez en compte la situation globalement. La question ne porte pas uniquement sur l'IFP et sur son école. Celle-ci forme des ingénieurs qui sont destinés à travailler dans l'industrie pétrolière. Les autres industries participent très activement au financement des écoles d'ingénieurs, de chaires, etc. Les sociétés pétrolières, à l'heure actuelle, peuvent parfaitement dégager des crédits pour aider l'IFP à conduire et à améliorer ses recherches en profondeur.

Comme l'a très bien dit Christian Gaudin, le déplafonnement du crédit d'impôt recherche servira essentiellement aux très grandes entreprises pétrolières et les fonds qu'elles pourront lever à cette occasion seront très supérieurs aux prélèvements opérés.

Je vous demande donc d'y réfléchir à deux fois avant de vous prononcer défavorablement sur cet amendement, dans la mesure où, de surcroît, il a pour objet de vous aider à réussir le plan « Licence ».

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Mon avis est le même que pour l'amendement précédent.

Le plan « Licence » que nous allons présenter jeudi prochain à nos principaux partenaires de la concertation est évidemment un chantier phare pour l'enseignement supérieur. Les moyens qui sont dédiés à ce plan dans le projet de loi de finances pour 2008 ne représentent qu'un tiers d'année d'un plan pluriannuel. Il est donc évident que nous aurons des moyens beaucoup plus importants dès la deuxième année.

Mais mobiliser des crédits destinés au réseau des recherches technologiques et gazières pour apurer le passif de l'État vis-à-vis d'un certain nombre d'entreprises me paraît extrêmement difficile. Il ne faut pas allonger au-delà du raisonnable les délais de paiement des entreprises qui, pour une part importante, sont des PME, directement ou indirectement, au travers du porteur du projet.

C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?

M. Philippe Adnot., rapporteur spécial. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Je suis fermement opposé à cet amendement, pour un certain nombre de raisons.

La première se fonde sur une question de principe. Nous avons adopté une série de lois avec la volonté de développer des centres d'excellence. Un certain nombre de ces centres d'excellence, baptisés « instituts Carnot », travaillent avec l'industrie. Si, sous prétexte qu'ils ont des possibilités de travailler avec une industrie,...

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Nous ne retirons rien aux instituts Carnot !

M. Pierre Laffitte. L'IFP est un institut Carnot parce qu'il travaille avec l'industrie et que cette industrie passe des conventions pluriannuelles avec l'État. D'une part, il est alimenté par les taxes sur l'industrie pétrolière et, d'autre part, il passe des conventions avec les industriels. Il a conclu une convention pluriannuelle avec l'État afin de développer massivement, sur la période 2006-2012, un programme de recherches concernant le développement durable, en particulier le confinement du gaz carbonique, qui est étroitement lié aux techniques pétrolières. L'IFP est le seul organisme français capable de développer de telles recherches, avec le bureau de recherches géologiques et minières qui le fait pour des zones moins profondes. Cette recherche est l'une des grandes priorités non seulement nationales, mais également européennes et internationales.

En ce domaine, la compétence de l'IFP est reconnue mondialement et les ingénieurs qu'il forme sont considérés comme étant les meilleurs. L'un d'entre eux vient de recevoir un prix Nobel, ce qui prouve qu'il fait de la recherche amont. S'il ne fait plus de recherche amont parce la dotation de l'État lui est supprimée, il sera dans une situation très difficile.

J'ai moi-même développé des recherches dans le cadre de l'École des mines de Paris. Je peux vous assurer qu'à partir du moment où plus de moitié des recherches sont financées par des industriels, si l'on n'a pas la capacité de faire des recherches amont, on est fichu et, à ce moment-là, les industriels vont voir ailleurs. Les centres de recherche ne manquent pas, en Allemagne, en Angleterre, aux États-Unis. Les industries pétrolières ne sont pas des enfants de coeur, ce sont des multinationales, qui peuvent même se déplacer.

Elles réalisent beaucoup de profits ; tant mieux pour nous ! Total réalise 95 % de ses profits à l'étranger mais, pour l'essentiel, ils sont distribués en France, lorsqu'ils le sont ! L'entreprise procède d'ailleurs au rachat de ses propres actions de façon à pouvoir mieux se défendre en cas d'OPA étrangère. Cette stratégie me paraît plutôt positive. D'ailleurs, je crois que ses titres s'en ressentent puisqu'ils n'augmentent pas.

Il nous faut préparer l'avenir. La naissance de l'industrie pétrolière et parapétrolière française, qui fut très difficile, résulte d'une décision du général de Gaulle, et elle a été soutenue de façon continue pendant toute la Ve République. Il serait quand même dommage que disparaisse ce fleuron de notre économie.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je suis très attentif aux arguments qu'a présentés Mme la ministre et que Pierre Laffitte vient de développer. Toutefois, je voudrais ramener l'amendement à sa juste mesure.

D'abord, l'amendement n° II-14 ne vise pas l'IFP. Les arguments de Pierre Laffitte valaient donc sans doute plus pour l'amendement précédent, qui a été retiré, que pour celui-ci.

Les groupes internationaux tels que Total font notre fierté, c'est vrai, mais je ne suis pas sûr que leurs dividendes soient nécessairement distribués à des actionnaires français,...

M. Pierre Laffitte. Une grande proportion des bénéfices le sont !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ... car, aujourd'hui, un certain nombre de fonds d'investissement échappent au contrôle de l'actionnariat français. Ce phénomène, loin d'être enrayé, pourrait être appelé à se développer.

Le présent amendement constitue, en quelque sorte, un appel lancé aux entreprises, d'autant que le crédit d'impôt recherche que nous avons voté est un puissant levier pour favoriser les partenariats constructifs avec les entreprises. Dans ces conditions, je ne pense pas que le Sénat manque à ses devoirs en lançant un appel aux entreprises afin qu'elles se mobilisent pour compenser un amendement dont l'adoption aurait pour conséquence de retirer 3 millions d'euros au programme 188.

C'est pourquoi la commission des finances souhaite maintenir cet amendement, qui est aussi un appel à la responsabilité, à l'engagement des entreprises, notamment dans le secteur du pétrole et du gaz. Chacun, et non pas seulement l'État au travers de ce budget, doit apporter sa contribution.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Je souhaite apporter quelques explications complémentaires.

Madame la ministre, pour aller vite et parce que vous avez le sens de l'efficacité pour les étudiants, notamment via le plan « Licence », vous allez mobiliser une part des réserves des universités. C'est un geste important que vous allez demander aux universités. L'ajout de 3 millions d'euros dans votre corbeille vous aiderait un peu à faire de ce plan une réussite.

Par ailleurs, je voudrais dire à mon collègue Pierre Laffitte que nous n'avons pas visé l'école qui forme les ingénieurs de l'IFP. Le programme en question est beaucoup plus large et il appartiendra donc à chacun de faire ensuite son arbitrage.

Je rappelle en outre que le crédit d'impôt recherche va passer de 10 millions d'euros à 100 millions d'euros. À l'heure actuelle, la capacité de récupération de ces entreprises pétrolières est relativement faible ; si, grâce à cette mesure, elles font faire une partie de leurs recherches par l'IFP, elles pourront doubler le montant des dépenses de recherche éligibles.

Tous les éléments me paraissent donc réunis pour favoriser une solidarité au niveau de la recherche qui ne diminuera en rien l'efficacité de l'IFP, ni celle de son école.

L'adoption de cet amendement, madame la ministre, témoignera de l'effort que nous voulons accomplir en direction des étudiants. Cette mesure immédiatement opérationnelle ne diminuera en rien l'efficacité dans la recherche pétrolière.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-14.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-192 rectifié, présenté par MM. Bizet, Braye, Detcheverry, Dulait, Gruillot, G. Larcher et Trillard, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2

 

 

 

 

Vie étudianteDont Titre 2

 

 

 

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

 

 

 

 

Recherche dans le domaine de l'énergie

 

2.500.000

 

2.500.000

Recherche industrielle

 

 

 

 

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2

2.500.000

 

 

 2.500.000

 

 

TOTAL

  2.500.000

  2.500.000

  2.500.000

  2.500.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Denis Detcheverry.

M. Denis Detcheverry. Par cet amendement, il est proposé de transférer 2,5 millions d'euros de l'action n° 3 « Réseau de recherche sur les technologies pétrolifères et gazières »  du programme 188 « Recherche dans les domaines de l'énergie » vers l'action n° 1 « Enseignement supérieur » du programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles » , afin de renforcer les crédits octroyés aux Écoles nationales vétérinaires.

En effet, les Écoles nationales vétérinaires sont des établissements pour lesquels le coût de la formation est sans doute le plus élevé dans le système des grandes écoles en raison, en particulier, de la formation clinique qui nécessite un encadrement important en enseignants, des charges supplémentaires dans les bâtiments et le matériel de clinique, ainsi que dans la gestion.

Actuellement, ces établissements rencontrent de graves difficultés pour respecter les normes imposées par l'Europe.

Les insuffisances principales sont d'abord liées aux bâtiments, surtout pour l'École nationale vétérinaire d'Alfort dont trois actions sont particulièrement prioritaires : la création d'une nouvelle salle d'autopsie, la rénovation des toitures les plus abîmées, la mise en sécurité électrique des circuits généraux et des bâtiments.

Elles sont également inhérentes à l'encadrement enseignant : il est nécessaire en particulier de disposer de praticiens hospitaliers en plus des enseignants-chercheurs et des animaliers ayant une formation adaptée. Actuellement, le nombre d'animaliers est très insuffisant et le personnel est non qualifié et souvent précaire.

Enfin, les insuffisances concernent les cadres supérieurs administratifs : actuellement, les directions des études, des relations internationales, de la pédagogie sont sous la responsabilité d'enseignants-chercheurs, alors que des établissements comme les écoles d'ingénieurs agronomes disposent d'ingénieurs ou d'inspecteurs vétérinaires.

En conclusion, l'abondement proposé, bien que pouvant apparaître pour certains un peu élevé dans le cadre d'un budget contraint, permet en fait aux quatre Écoles nationales vétérinaires de disposer des moyens juste suffisants pour préserver leur compétitivité aux niveaux européen et international.

Il convient, pour bien évaluer le coût de cet amendement, de tenir compte du rôle de la profession sur le plan de la protection de la santé publique, de la protection du consommateur et de la protection de la santé animale.

Il semblerait logique, alors que l'enseignement supérieur agricole et les Écoles nationales vétérinaires, en particulier, ont été oubliés dans l'attribution de crédits supplémentaires à l'enseignement supérieur en France au cours de ces dernières années, qu'une petite part du complément annoncé la semaine dernière par le Président de la République leur soit attribuée. C'est une question de cohérence dans la politique de soutien de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Cet amendement tend donc à prélever 2,5 millions d'euros sur l'action n°3 « Réseau de recherche sur les technologies pétrolifères et gazières » du programme 188. Il est à noter que les dispositions de l'article 39 du présent projet de loi de finances visent à déplafonner le crédit d'impôt recherche dont peuvent bénéficier les entreprises de ce secteur, qui profitent, de plus, des cours historiquement et durablement élevés des produits pétroliers.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Gaudin, rapporteur spécial. La préoccupation de nos collègues semble légitime. Cependant, et je pense que Mme la ministre va nous le confirmer, les écoles qui relèvent du programme 142 ont vocation à bénéficier du produit de la vente d'actions d'EDF par l'État dans la mesure où elles font partie intégrante du système d'enseignement supérieur français.

La commission des finances souhaiterait donc connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. L'avis du Gouvernement est défavorable, car cet amendement est le deuxième qui vient ponctionner les crédits de la recherche en matière d'énergie. Le premier tendait à transférer 3 millions d'euros en faveur du plan « Licence » et celui-ci vise à prélever 2,5 millions d'euros pour l'enseignement agricole privé, ce qui représente 70 % des crédits prévus pour le paiement des dettes de l'État envers les entreprises pétrolières et gazières.

Je comprends que le président de la commission des finances ait souhaité mettre ces entreprises à contribution, mais à un tel niveau, cela me paraît exagéré ! Mon avis est donc défavorable surtout en raison de ce gage, que je juge excessif.

En revanche, je partage évidemment le souci exprimé par les auteurs de cet amendement de voir entretenu et rénové le patrimoine immobilier historique propre à l'École nationale vétérinaire d'Alfort. Les travaux sont urgents : réfection des toitures, mise aux normes de sécurité électrique, construction d'une salle d'autopsie.

Pour 2008, le ministère de l'agriculture et de la pêche a inscrit au budget primitif de l'école 1,4 million d'euros en crédits de paiement pour financer ces travaux. Dans le cadre du budget pour 2008, le Gouvernement ne peut pas aller au-delà. S'agissant d'une école relevant de l'enseignement supérieur, elle pourra bien entendu participer aux appels à projets qui seront lancés dans le cadre des réfections d'établissements d'enseignement supérieur réalisées grâce aux fonds issus de la vente par l'État d'une partie du capital d'EDF.

J'ajoute que les auteurs de l'amendement pourraient peut-être le retirer en considérant qu'il est satisfait.

Mme la présidente. Monsieur Detcheverry, l'amendement n° II-192 rectifié est-il maintenu ?

M. Denis Detcheverry. Compte tenu des explications données par Mme la ministre, je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° II-192 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-185, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2

Vie étudianteDont Titre 2

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

Recherche spatiale

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

Recherche dans le domaine de l'énergie

Recherche industrielle

2 350 000

2 350 000

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2

Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2

2 350 000

2 350 000

TOTAL

2 350 000

2 350 000

2 350 000

2 350 000

SOLDE

0

0

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° II-194 rectifié, présenté par MM. C. Gaudin, Adnot, Retailleau, Mercier, Badré et Soulage, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaireDont Titre 2

1 000 000

1 000 000

Vie étudianteDont Titre 2

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

Recherche spatiale

Recherche dans le domaine des risques et des pollutions

Recherche dans le domaine de l'énergie

Recherche industrielle

Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2

Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2

1 000 000

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Christian Gaudin.

M. Christian Gaudin. Le rapport d'audit du Conseil général de l'agriculture, de l'alimentation et des espaces ruraux affirme que « les différentes mesures de régulation budgétaire n'ont pas permis à l'État de respecter intégralement les engagements pris à l'égard des établissements d'enseignement privés dans le cadre de l'application du décret n° 2003-1003 du 14 octobre 2003 ». Le retard cumulé à la fin de 2007 atteindrait 3,75 millions d'euros. Cette dette, non contestée par le ministère de l'agriculture, devrait faire l'objet d'un plan de résorption, comme le préconise le rapport sur la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Cet amendement a donc pour objet d'amorcer cette résorption. Il organise une solidarité entre les établissements d'enseignement supérieur privés, puisqu'il s'agit de ventiler les crédits supplémentaires votés par l'Assemblée nationale : 1 million d'euros sur ces 5 millions d'euros sont ainsi transférés du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » vers le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles ».

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. La commission des finances est très favorable à cet amendement puisqu'il ne crée pas de dépense nouvelle et qu'il instaure une solidarité.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. L'avis du Gouvernement est également favorable. En effet, cet écart cumulé de 3,75 millions d'euros a été mis en évidence. Du fait de l'exonération de la taxe sur les salaires et d'un amendement voté par l'Assemblée nationale ajoutant des crédits, l'enseignement supérieur privé va bénéficier en 2008 d'une augmentation de 34 % de sa subvention en un an, après une augmentation de près de 70 % observée dans les cinq dernières années. Il est donc possible d'opérer une petite péréquation, ainsi que le souhaite M. Gaudin.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-194 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de cette mission, modifiés.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mme la présidente. J'appelle en discussion les articles 46, 47 et 47 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Recherche et enseignement supérieur

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 47

Article 46

Dans le 3 du I de l'article 24 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, l'année : « 2007 » est remplacée par l'année : « 2008 ». - (Adopté.)

Article 46
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 47 bis

Article 47

Le V de l'article 131 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) est ainsi rédigé :

« V. - L'exonération prévue au I est applicable au plus jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'entreprise. Toutefois, si au cours d'une année l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises pour bénéficier du dispositif relatif aux jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement et fixées par l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, elle perd le bénéfice de l'exonération prévue au I pour l'année considérée et pour les années suivantes tant qu'elle ne satisfait pas à l'ensemble de ces conditions.

« Pour bénéficier à nouveau du dispositif, elle doit obtenir l'avis exprès ou tacite prévu au IV du présent article. » - (Adopté.)

Article 47
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Ville et logement

Article 47 bis

Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport aux commissions chargées des finances de chacune des assemblées parlementaires pour déterminer les conditions dans lesquelles les personnels titulaires des établissements publics scientifiques et technologiques de recherche peuvent percevoir des rémunérations complémentaires financées sur les ressources autres que celles provenant de la subvention pour charges de service public, ainsi que les modalités selon lesquelles le conseil d'administration desdits établissements fixe les critères d'attribution de ces rémunérations complémentaires. - (Adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Ville et logement

Article 47 bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 33 et Etat B

Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Ville et logement » (et articles 60 et 61).

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, compte tenu du temps bien trop court qui m'est imparti pour vous présenter les programmes de la mission « Ville et logement », je vous renvoie à mon rapport pour le détail des chiffres et vous me permettrez de centrer mon propos sur les points les plus sensibles de ce projet de budget pour 2008.

L'examen de cette mission doit être fait en tenant compte du contexte économique et social qui influe sur une bonne partie des crédits, plus particulièrement sur les aides à la personne en matière de logement. Il doit également tenir compte des cinq textes majeurs que nous avons votés : le programme national de rénovation urbaine ou PNRU, le plan de cohésion sociale, la loi portant engagement national pour le logement ou loi ENL, la loi pour l'égalité des chances et la loi instituant le droit au logement opposable.

Je vous rappelle les objectifs de construction que nous nous sommes fixés en matière de logement ainsi que les engagements financiers qui en découlent.

Pour le PNRU, mis en oeuvre par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, il s'agit de la démolition et de la reconstruction de 250 000 logements sociaux ainsi que de la réhabilitation de 400 000 autres, avec un engagement financier initial de l'État de 5 milliards d'euros, porté ensuite à 6 milliards d'euros.

Le plan de cohésion sociale prévoit, entre 2005 et 2009, la construction de 591 000 logements sociaux, dont 80 000 prêts locatifs aidés d'insertion ou PLAI, le conventionnement de 200 000 logements et la remise sur le marché de 100 000 logements vacants, pour un engagement financier de l'État de 3,2 milliards d'euros.

Autre loi importante qui aura une forte incidence sur la mission en 2008, et plus encore les années ultérieures : la mise en oeuvre du droit au logement opposable avec, d'une part, la décision d'indexer les barèmes permettant le calcul des aides au logement et, d'autre part, la nécessité de se préparer à la mise en place des commissions de médiation qui doivent être opérationnelles en début d'année prochaine.

Mme Christine Boutin, ministre. Elles le seront !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Enfin, pour ce qui est de la politique de la ville, 2008 sera la première année de vie des contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, dont l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, l'ACSé, assurera le suivi opérationnel.

La question est donc, mes chers collègues, de savoir si la mission « Ville et logement » est à la hauteur de ces ambitions ; c'est ce que je vous propose de voir.

Cette mission compte quatre programmes et représente 7,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 7 milliards d'euros en crédits de paiement, respectivement en hausse de 5,27 % et de 0,25 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2007.

Notons cependant que ces crédits sont ceux qui étaient initialement proposés par le Gouvernement dans son projet de loi de finances, avant que l'Assemblée nationale ne les diminue en seconde délibération : 14 millions d'euros pour les crédits de la politique de la ville et 13,8 millions d'euros pour les crédits relatifs au logement. À ces chiffres s'ajoutent plus de 10 milliards d'euros de dépenses fiscales, en progression de 10,6 %, dont 400 millions d'euros relatifs à la déductibilité des emprunts pour l'acquisition de la résidence principale.

Venons-en maintenant à la présentation des programmes en commençant par le programme 202 « Rénovation urbaine ».

Ce programme comprend deux actions dont la principale est la mise en oeuvre du programme national de rénovation urbaine par l'ANRU. Il prévoit 385 millions d'euros en autorisations d'engagement et 230 millions d'euros en crédits de paiement. Ces crédits, constitués exclusivement de dépenses d'intervention, sont en baisse respectivement de 3,71 % et de 40,04 %.

Face à ces diminutions, nous devons nous poser la question de leur incidence sur le respect des engagements de l'État concernant l'avancement du PNRU.

Pour les inscriptions en autorisations d'engagement, nous devons d'abord constater le respect de la loi de programmation. En effet, celle-ci prévoit une dotation annuelle minimale de 465 millions d'euros durant la période d'application du PNRU. Or, avec 383 millions d'euros de crédits budgétaires et une contribution extrabudgétaire de 100 millions d'euros, en provenance de la Caisse des dépôts et consignations, les autorisations d'engagement de l'ANRU s'élevaient au total à 483 millions d'euros avant d'être réduites à 480,3 millions d'euros par l'Assemblée nationale, en seconde délibération. On peut néanmoins considérer que le compte est bon.

Mme Christine Boutin, ministre. Merci !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. En ce qui concerne les crédits de paiement, leur forte diminution pourrait soulever une véritable inquiétude mais, en fait, elle ne devrait pas avoir d'incidence en 2008 puisque, selon les informations dont je dispose, l'ANRU peut encore s'appuyer sur une trésorerie confortable.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela ne va pas durer !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. De plus, l'évolution des paiements est bien évidemment largement dépendante du rythme de réalisation de leurs projets par les collectivités locales et nous savons que beaucoup de ces projets enregistrent un décalage en la matière.

Mais il ne s'agit là que d'un report dans le temps, d'engagements qui devront bien évidemment être satisfaits et nous devons noter la forte progression de l'écart entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement, qui se situe aujourd'hui à 1,3 milliard d'euros.

Le programme 202 « Rénovation urbaine » comporte une seconde action relative aux anciennes opérations, les grands projets de ville, ou GPV, et aux opérations de renouvellement urbains, ou ORU, qui ne prévoit que des crédits de paiement, pour 30 millions d'euros. Cette somme servira en fait au règlement partiel des dettes de l'État envers les collectivités locales, qui ne devraient être apurées qu'en 2009.

Le programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien » se décompose en trois actions et regroupe les crédits destinés aux volets économique et social de la politique de la ville. Au total, le programme portait sur 760 millions d'euros en autorisations d'engagement et 794 millions d'euros en crédits de paiement, soit une quasi-stabilité en euros courants, avant que la seconde délibération à l'Assemblée nationale ne ramène ces crédits à 748,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 782,6 millions d'euros en crédits de paiement, les faisant repasser sous la barre des crédits votés l'année dernière.

Je ne peux que déplorer cette situation, d'autant que je n'ai pas réussi à obtenir de réponse claire à une question importante. En effet, l'augmentation significative du nombre des CUCS par rapport aux anciens contrats de ville entraîne-t-elle un risque de dilution des crédits ?

Cette question est fondamentale, puisque 144 CUCS couvrent désormais un territoire précédemment non couvert par les anciens contrats. C'est pourquoi, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, je souhaiterais que vous puissiez nous rassurer sur ce point, qui serait d'autant plus sensible si les crédits de paiement devaient être adoptés en l'état.

Vous savez également, mes chers collègues, car les médias s'en sont fait largement l'écho, que la gestion des crédits d'intervention de la politique de la ville a donné lieu récemment à une audition pour suite à donner sur les résultats de l'enquête demandée à la Cour des comptes. Ces débats ont mis en évidence un certain nombre de dysfonctionnements que je vous propose de corriger, en partie, par le biais de trois amendements.

Le premier amendement vise à une clarification rapide des domaines de compétence de la Délégation interministérielle à la ville, la DIV, et de l'ACSé, par la suppression des crédits dits « expérimentaux » que la DIV continue de gérer.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le deuxième amendement a pour objet de rendre obligatoire la révision quinquennale de la géographie prioritaire de la politique de la ville.

Le troisième amendement tend à unifier, au sein d'un même document, les trois rapports que les collectivités territoriales doivent rendre, portant sur leur gestion de la politique de la ville et l'utilisation des soutiens financiers dont elles bénéficient à ce titre.

Examinons maintenant les deux programmes relatifs au logement.

Le programme 109 « Aide à l'accès au logement » a trait aux aides personnelles. Il représente près de 5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Sur ce total, 4,98 milliards d'euros correspondent à la contribution de l'État au Fonds national d'aide au logement, le FNAL. Cette dotation est en augmentation de 1,07 % et correspond à une progression de 374 millions d'euros des charges du FNAL, qui résulte, pour une large part, de l'entrée en vigueur des nouvelles règles concernant l'indexation automatique des barèmes sur l'évolution du nouvel indice de référence des loyers, l'IRL, lequel entrera en vigueur au 1er janvier 2008.

Nous pouvons d'ailleurs, mes chers collègues, nous interroger sur la pertinence de ce nouvel indice, à la suite des récentes déclarations de M. le Président de la République.

Dans l'attente d'un éventuel changement des règles, le coût de cette indexation pour le budget de l'État a été estimé, selon une hypothèse d'augmentation de 2,65 % de l'indice de référence des loyers pour 2008, à 220 millions d'euros.

Notons également que l'effet du relèvement de 1 euro de la participation minimale des bénéficiaires à la dépense de logement, qui passe de 30 euros à 31 euros, rapportera 33 millions d'euros.

Sur ce point, j'estime d'ailleurs qu'il serait certainement préférable, plutôt que de recourir à des relèvements ponctuels, de poursuivre le processus d'indexation des différents éléments concourant au calcul des aides au logement et d'inclure la participation minimale des bénéficiaires à la dépense de logement. C'est pourquoi je présenterai un amendement en ce sens.

Examinons maintenant le programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement », qui regroupe les crédits des aides à la pierre.

Ce programme représente 1,5 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,1 milliard d'euros en crédits de paiement, ces montants étant en hausse, respectivement, de 2,9 % et de 15,12 %.

En ce qui concerne la première action « Construction locative et amélioration du parc », qui regroupe la « ligne fongible », c'est-à-dire l'ensemble des subventions à la construction et à la rénovation du logement locatif social et les moyens octroyés à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, les crédits inscrits en autorisations d'engagement sont en progression de 30 % : 798 millions d'euros seront consacrés au financement de 80 000 PLUS, de 20 000 PLAI et de 42 000 PLS ; 500 millions d'euros, complétés par le produit de la taxe sur les logements vacants, estimé à 20 millions d'euros, sont destinés à l'ANAH.

Je formulerai quelques observations sur ce programme.

Tout d'abord, l'accent mis sur les nouvelles constructions et la nécessité de préserver le programme national de rénovation urbaine ont conduit à restreindre sensiblement les crédits de réhabilitation PALULOS - prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale - hors conventions avec l'ANRU, ce qui gène manifestement les offices et les sociétés anonymes d'HLM, comme cela est apparu lors du récent congrès de l'Union sociale pour l'habitat qui s'est tenu à Lyon.

Ensuite, en ce qui concerne le parc social privé, on peut également regretter la baisse des objectifs de l'ANAH, en particulier dans le domaine de la remise sur le marché de logements vacants, car la mobilisation de ce parc social de fait sera certainement un élément déterminant dans la réalisation des objectifs en matière d'application du droit au logement opposable.

Enfin, s'agissant précisément du droit au logement opposable, qui concernerait, selon les estimations les plus basses, 600 000 ménages, dont 230 000 vivent dans la région d'Île-de-France, l'action « Soutien » du programme fait apparaître les coûts de fonctionnement liés à la gestion de ce dispositif. Ces coûts comprennent notamment les dépenses résultant de la création de 100 emplois liés à l'installation obligatoire, au 1er janvier prochain, de commissions de médiation dans chaque département, ainsi qu'un crédit de 4,12 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, prévu pour financer le recours à des prestataires externes qui seront chargés de l'instruction des dossiers présentés aux commissions de médiation.

La perspective de la mise en application du droit au logement opposable pose enfin la question du bien-fondé du découpage entre plusieurs missions budgétaires de l'action de l'État pour l'hébergement et le logement. Les crédits de l'hébergement, gérés par le ministère du logement et de la ville, sont en effet inscrits dans le programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables », qui fait partie de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Il serait sans doute plus cohérent de les faire figurer au sein de la mission « Ville et logement ».

Telles sont, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, mes observations sur la mission « Ville et logement », que j'ai essayé de vous présenter de façon aussi concise que possible, afin de respecter le temps de parole qui m'était imparti.

La commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits de cette mission, ainsi que l'article 60 rattaché, sous réserve du vote des quatre amendements que je vous ai présentés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les politiques de la ville et du logement sont à la veille d'une année décisive, d'une année charnière. Ramener la République dans les cités et garantir un toit à chacun : les ambitions sont immenses et belles, mais le chemin est semé d'embûches.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Ça, c'est vrai !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Ce n'est pas vraiment, cette année en tout cas, une question d'argent, puisque le Gouvernement, à une exception près sur laquelle je reviendrai, s'est doté des moyens nécessaires : les objectifs de construction de logements seront tenus, et Mme la secrétaire d'État devrait bénéficier de fonds suffisants pour déclencher son « plan Marshall » des banlieues, même si l'effort de l'ANRU est repoussé aux années à venir.

La difficulté est non pas dans le manque de crédits, même si on peut toujours en souhaiter davantage, mais dans la mise en oeuvre, la gestion, le pilotage des projets.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire et de l'écrire : la politique de la ville a certes besoin d'argent, mais cet argent doit être mieux dépensé. Que de gaspillages à cause de ces subventions trop tardives, de ces zonages trop anciens, de ces dispositifs trop complexes ! Que d'énergie perdue, de bénévoles démotivés, de projets avortés !

Je voudrais le dire simplement, mais fermement : on pourra dépenser tout l'argent que l'on veut, solliciter tous les acteurs que l'on juge compétents, envoyer toutes les circulaires que l'on estime nécessaires, on ne réussira la mise en oeuvre de la politique de la ville qu'à la condition de résoudre son problème structurel, celui du pilotage local. La politique de la ville a besoin d'un pilotage local fort, rassemblant les différents acteurs autour d'un projet commun, établi à partir d'un diagnostic partagé et bénéficiant d'une enveloppe globale pluriannuelle.

Non, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, ce n'est pas là une revendication « corporatiste » d'élu local, ce n'est pas une ruse de plus pour affaiblir l'État ; c'est un simple constat, et aussi le conseil bienveillant d'un rapporteur pour avis qui, pour vous avoir écoutées attentivement en commission, croit à la sincérité et à la force de votre engagement.

Madame la ministre, vous avez convaincu le Président de la République que la politique de la ville était une priorité nationale. Vous l'avez aussi convaincu de consacrer à cette politique les moyens nécessaires. C'est à moi, maintenant, de vous convaincre de nous faire confiance, à nous les acteurs de terrain, pour réussir votre grand projet.

Il faut nous faire confiance, nous donner les marges de manoeuvre nécessaires, nous laisser libres d'inventer les politiques les mieux adaptées aux réalités locales. L'État ne doit plus perdre son temps à exercer des contrôles tatillons, à éplucher des dossiers ésotériques pour distribuer des subventions au compte-gouttes. L'État a mieux à faire, il a à accomplir une tâche plus noble, plus fidèle à son histoire : définir les grandes orientations, et surtout évaluer l'efficacité des politiques menées, notamment en tenant à jour tous les indicateurs de performance du programme, contrairement à ce que l'on constate cette année. Nous avons déjà perdu trop de temps et trop d'argent à cause de l'enchevêtrement des compétences et de la superposition des rôles. Il faut maintenant que chacun se rappelle sa vocation et se concentre sur ce qu'il sait le mieux faire : au préfet la maîtrise d'ouvrage et l'évaluation, au maire la maîtrise d'oeuvre et le pilotage.

Madame la ministre, nous sommes convaincus, comme vous, qu'il n'est plus permis que la politique de la ville ne réussisse qu'à moitié. Nous sommes déterminés à vous aider dans votre projet, mais nous avons besoin de votre confiance pour être efficaces.

Je voudrais maintenant dire quelques mots sur la politique du logement, en évoquant brièvement trois points.

Le premier point concerne le manque de logements, et surtout de régulation du logement social.

C'est un « serpent de mer », j'en suis bien conscient, mais c'est aussi un problème qui nous coûte et va nous coûter de plus en plus cher, notamment avec l'instauration du droit au logement opposable, lorsque l'État devra payer s'il ne parvient pas à loger tout le monde.

À cet égard, quelques chiffres sont à peine croyables : avec les plafonds de ressources actuels, 84 % des ménages ont théoriquement droit, en France, à un logement social, soit plus de quatre ménages sur cinq !

Mme Odette Terrade. Les salaires sont trop bas !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. De tels plafonds ouvrent la voie à des abus trop nombreux, que nous connaissons grâce au rapport triennal sur l'occupation du parc locatif social. Mais surtout, en légalisant les abus, ces plafonds démesurés peuvent fermer le chemin du logement social à ceux qui en ont vraiment besoin.

Il faut mettre un terme à cette situation, et puisque cela relève du domaine réglementaire, je vous demande, madame la ministre, de vous engager à le faire.

Le deuxième point a trait à l'évaluation de l'efficacité des dépenses fiscales liées à la construction et à la rénovation de logements.

Ces dépenses sont estimées, pour 2008, à plus de 10 milliards d'euros, montant à comparer aux 1,1 milliard d'euros de crédits budgétaires alloués au même objectif. Que l'efficacité de telles dépenses ne soit pas évaluée n'est pas sain : elles deviennent l'objet de toutes les suspicions, sans que la réalité de leurs effets, souvent ambivalents, soit analysée. C'est le cas notamment du dispositif « Robien », qui d'un côté stimule indéniablement la construction de logements, mais est de l'autre incontestablement insatisfaisant, puisque beaucoup de ces logements restent vides.

Nous avons donc besoin de cette évaluation pour choisir et décider en connaissance de cause, et il est important d'entreprendre les efforts nécessaires pour que cela soit fait.

Enfin, et ce sera mon troisième point, il me semble qu'il y a un domaine, sans doute le seul, pour lequel les crédits prévus ne sont pas suffisants : celui de la résorption de l'habitat indigne.

En effet, 700 000 ménages, soit 1,2 million de personnes, vivent aujourd'hui, en France, dans un logement indigne, c'est-à-dire insalubre, dangereux ou exposant ses occupants à une intoxication par le plomb. La commission des affaires sociales a donc déposé un amendement visant à augmenter de 10 millions d'euros les crédits destinés à la résorption de ce type d'habitat. Nous en discuterons tout à l'heure.

Avant de conclure, j'ajouterai quelques mots sur l'accession à la propriété. Vous dites, madame la ministre, vouloir la favoriser par le développement de la vente de logements HLM. L'idée est séduisante et mérite d'être soutenue, j'en conviens. Cependant, elle est aussi porteuse d'effets pervers potentiellement redoutables. On ne pourra améliorer les conditions de logement dans notre pays sans remettre l'ensemble du parc en mouvement, sans recréer une chaîne du logement fluide et souple. Je sais que vous êtes d'accord avec nous sur ce point.

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Or la vente des logements HLM pourrait précisément freiner ce mouvement, « ossifier » la chaîne, en incitant les locataires à rester où ils sont. La vente de logements sociaux devra donc être compensée intégralement, et sans doute bien au-delà, par la construction de logements locatifs nouveaux, afin de ne pas appauvrir le parc.

Vous le voyez, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, le projet de budget que vous nous présentez suscite à la fois beaucoup d'espoirs, grâce aux moyens qu'il comporte, et beaucoup d'inquiétudes, ne nous le cachons pas, à cause des difficultés qui entourent sa mise en oeuvre.

En tout état de cause, nous vous donnerons les crédits nécessaires, mais écoutez ceux qui veulent vous aider ; c'est à cette condition que vous atteindrez vos objectifs. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

Mme Christine Boutin, ministre. Nous les écouterons !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre André, rapporteur pour avis.

M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget pour 2008 marque une continuité. Il permettra de financer les principaux dispositifs de la politique de la ville mis en place depuis 2003 : le programme national de rénovation urbaine, les contrats urbains de cohésion sociale, les zones franches urbaines, mais aussi des dispositifs divers, notamment celui, extrêmement important, dont l'objet est de favoriser la réussite éducative.

Ces dispositifs ont en commun de rencontrer un réel succès, mais aussi de connaître des retards dans leur mise en oeuvre.

C'est pourquoi je souhaite tout d'abord insister sur la nécessité d'instaurer, en matière de politique de la ville, de la stabilité et de la visibilité dans les financements.

À cet égard, nous ne pouvons que regretter que, au moment de l'examen du budget, nous ne disposions pas d'informations sur le contenu et sur le financement du plan « Respect et égalité des chances », qui, entendons-nous dire, doit être annoncé le 22 janvier prochain.

Vous est-il possible, à ce stade, de nous éclairer sur ce point ?

Sans revenir dans le détail sur les crédits pour 2008, je souhaiterais insister sur la nécessité impérative d'accélérer le rythme de leur consommation. En effet, une fois de plus, en 2007, les crédits ont été délégués trop tardivement aux associations, puisque, au 31 août, seuls 30 % des crédits du programme « Équité sociale et territoriale et soutien » avaient été mandatés. Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, ce qu'il en sera en 2008 ?

En ce qui concerne l'ANRU, dont le succès atteste de l'utilité, le programme enregistre, lui aussi, un retard en matière d'engagements de crédits. Sans revenir sur les causes diverses et multiples de ce retard, dont l'État et l'ANRU ne sont pas les seuls responsables, je souhaiterais connaître les mesures envisagées à court terme pour y remédier.

Sur les crédits du deuxième programme, qui est relatif au volet social de la politique de la ville, les principales observations de la commission sont les suivantes.

Premièrement, le financement des actions prévues par les contrats urbains de cohésion sociale doit être sanctuarisé pour les trois prochaines années.

Deuxièmement, le transfert des crédits d'intervention de la Délégation interministérielle à la ville à l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances doit aller à son terme, sous peine d'une complexité de gestion incompatible avec l'objectif d'une meilleure efficacité de la politique de la ville.

Troisièmement, le dispositif de réussite éducative rencontre un vrai succès sur le terrain ; il faut garantir dès maintenant son financement au-delà de 2009.

Quatrièmement, le programme fait apparaître cette année une nouvelle ligne de crédits, à hauteur de 11 millions d'euros, qui est destinée au financement du service civil volontaire institué par la loi pour l'égalité des chances de 2006. Un redéploiement de crédits au sein du budget de la ville a permis de financer ce dispositif en 2007. Or une grande incertitude règne actuellement sur la pérennité de celui-ci, les 11 millions d'euros prévus permettant seulement de financer les conventions déjà conclues ; il ne peut donc pas y avoir de nouvelles conventions Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet ?

En outre, d'après une première étude, les 1 300 jeunes engagés ont en général un bon, voire un très bon niveau d'études, et, paradoxalement, seulement 15 % d'entre eux sont issus des zones urbaines sensibles. En conséquence, un effort particulier doit être accompli pour que les jeunes les plus en difficulté bénéficient de ces crédits ; sinon, il faudra retirer cette action du budget de la ville. Pouvez-vous, madame la ministre, nous apporter également des précisions sur ce point ?

En conclusion, la politique de la ville a plus que jamais besoin de temps pour porter ses fruits, de stabilité dans ses dispositifs et de visibilité dans ses financements. Je souhaiterais qu'il soit tenu compte de cette nécessité au moment de l'élaboration du plan « Respect et égalité des chances ».

Sous le bénéfice de ces observations, madame la ministre, je vais lever le suspense. (Sourires.) La commission des affaires économiques a émis un avis très favorable à l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis.

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, cet exercice budgétaire est déterminant pour la politique du logement, puisque, conformément à la loi du 5 mars 2007, le droit au logement opposable entrera en vigueur le 1er décembre 2008.

Je m'interroge sur un point essentiel : combien de ménages seront capables de faire valoir cette opposabilité devant les tribunaux administratifs dès la fin de l'année prochaine ? Madame la ministre, j'ai été quelque peu surpris, je dois l'avouer, de la réponse que j'ai obtenue de votre ministère à cette question. Il m'a en effet été indiqué que ce travail d'évaluation serait réalisé en vue de la préparation de la prochaine loi de finances, ce qui m'apparaît un peu tardif.

Le comité de suivi du DALO estime, de son côté, que plus de 600 000 ménages seraient concernés, soit 1,7 million de personnes, ce qui est considérable. Il est donc urgent de « mettre le paquet », si vous me permettez l'expression, sur le développement du parc locatif afin que le DALO devienne un droit véritablement effectif.

Quelle sera la situation en 2008 ? En application de la nouvelle programmation de la loi DALO, 142 000 logements locatifs sociaux seront financés - devrais-je dire finançables ? - au cours de l'année à venir. J'en conviens, ce chiffre est loin d'être négligeable, mais je voudrais néanmoins faire deux observations.

D'une part, il s'agit d'un chiffre relatif aux prévisions maximales de financement et non aux réalisations. Or, entre ces deux réalités, il y a malheureusement souvent un écart substantiel. Par exemple, alors qu'il nous a été constamment expliqué que la construction locative sociale s'était redressée depuis quelques années, les statistiques officielles sur le site du ministère montrent que le nombre de logements sociaux mis en service entre 2002 et 2005 plafonne, de façon linéaire, sous la barre des 48 000.

D'autre part, les 142 000 logements constituent, certes, un objectif louable, mais quels sont les moyens qui sont dégagés pour l'atteindre ? C'est sur ce point que mon analyse personnelle diffère de celle de la commission. La subvention budgétaire moyenne versée pour chaque nouveau logement social est insuffisante, puisqu'elle stagne depuis 2004 aux alentours de 2 700 euros pour un logement PLUS et de 12 000 euros pour un logement PLAI.

Or, dans le même temps, vous le savez tous, les coûts de la construction se sont accrus de 19 %, l'indice des prix de 7 %, et le taux du livret A a lui aussi augmenté, renchérissant ainsi le coût des prêts. En conséquence, les finances des collectivités territoriales ainsi que les fonds propres des organismes HLM sont de plus en plus souvent sollicités pour équilibrer les opérations.

Au total, la mise en oeuvre du DALO me semble commander, au-delà de la mobilisation de crédits budgétaires supplémentaires, quelques réformes urgentes.

Tout d'abord, il est indispensable d'élargir le champ des logements concernés pour loger les publics prioritaires. Dans sa rédaction actuelle, la loi n'évoque que le contingent préfectoral, ce qui sera très insuffisant pour répondre aux nombreuses demandes et aura pour conséquence de concentrer les populations concernées sur les seuls territoires pourvus en logements dans le secteur locatif social.

À mon sens, il convient de trouver les modalités permettant de solliciter également les contingents des collectivités territoriales et du 1 % logement, mais aussi le parc locatif privé.

Sur ce sujet, madame la ministre, je regrette que le Sénat ait rejeté un amendement que j'avais présenté lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances : il tendait à accorder aux propriétaires privés de logements à loyers très sociaux une exonération totale d'impôts sur leurs revenus locatifs dès lors que le logement était destiné à un ménage prioritaire au sens du DALO. Votre soutien permettra peut-être à l'avenir de changer la donne...

En outre, un recentrage de l'effort de l'État en faveur du logement m'apparaît plus qu'indispensable. Chaque année, avec l'amortissement Robien, ce sont 400 millions d'euros de recettes fiscales qui échappent à l'État. Pire encore, le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt représentera près de 4,5 milliards d'euros de ressources en moins à l'horizon 2013. En comparaison, le prêt à taux zéro ne coûte que 500 millions d'euros par an. Tout cela n'est pas très raisonnable : cet argent public pourrait être utilisé à meilleur escient, compte tenu de la pénurie actuelle de logements abordables, que ce soit en locatif ou en accession sociale à la propriété.

Pour terminer, madame la ministre, je souhaiterais vous interroger sur l'avenir du livret A, dont le mode de distribution a été remis en cause par la Commission européenne. Quelles sont les chances d'aboutir du recours déposé par la France ? Pouvez-nous nous dire quelques mots du rapport que M. Camdessus doit vous remettre sur le sujet ?

Il me semble fondamental de défendre notre système de financement du logement social, dont l'efficacité n'est plus à démontrer. Sinon, nous risquons d'aller au-devant de graves problèmes pour les organismes HLM et de remettre en question l'accessibilité bancaire dans les ZUS, qui est liée au financement du logement social.

En définitive, si je reconnais que le Gouvernement a accompli un certain nombre d'efforts, je crains que ceux-ci ne soient pas suffisants pour atteindre les objectifs ambitieux que vous vous êtes fixés avec la loi du 5 mars 2007, madame la ministre, puisque vous étiez le rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale.

C'est dans cet esprit que j'avais appelé la commission à émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission. Celle-ci ne m'ayant pas suivi, je me dois de vous dire qu'elle a, après argumentation, donné un avis favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite du débat, la parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, en ce qui concerne le budget de la mission « Ville et logement », je voudrais insister sur les contradictions d'un discours où compassion et fermeté résistent mal à l'épreuve des faits.

Les inégalités entre Français se creusent de plus en plus. Aujourd'hui, rien ne permet de dire que la situation des banlieues s'est améliorée. C'est même l'inverse : le recul du pouvoir d'achat y est plus durement ressenti, le nombre de RMIstes n'a pas diminué, le chômage demeure, et la désespérance est plus que jamais présente.

Nous serons certainement plusieurs ce soir à évoquer la baisse annoncée de la progression de la dotation de solidarité urbaine. Cette décision est en contradiction évidente avec le mécanisme de préservation prévu par la loi Borloo, avec les annonces gouvernementales et, surtout, avec la réalité que vivent ces communes de banlieues ; la récente actualité nous a encore montré leur degré de fragilité.

La pression est d'ailleurs tellement forte que l'on entend, ici ou là, dire que le Président de la République serait prêt à remettre les 30 millions d'euros qui manquent à la dotation de solidarité urbaine. Mais rien ne permet d'être optimiste sur ce point à l'examen du collectif budgétaire actuellement en discussion à l'Assemblée nationale.

L'argent manque pour les aides au logement. Les crédits consacrés aux aides personnelles restent stables à moins de 5 milliards d'euros. Grâce à un amendement socialiste à la loi DALO, nous avions obtenu une revalorisation de ces aides. Mais l'enveloppe supplémentaire de 230 millions d'euros n'est pas encore garantie. Or on estime que la non-revalorisation des aides au logement depuis 2002 a entraîné une baisse du pouvoir d'achat des ménages modestes de près de 10 %.

L'argent manque pour faire du vrai logement social. Dans les quartiers, la règle d'une reconstruction pour une démolition n'est pas respectée. Les logements reconstruits sont souvent plus petits et plus chers, de 40 à 150 euros par mois, que les logements démolis.

Le Gouvernement ne financera, en 2008, que 100 000 logements véritablement sociaux - 80 000 PLUS et 20 000 PLAI -, alors que le nombre de familles prioritaires est estimé à 600 000 par le comité de suivi de la loi DALO.

L'État ne remboursera pas sa dette aux organismes de logement social - elle est estimée à 200 millions d'euros au début de l'année 2007 - et les collectivités en font déjà beaucoup, un peu plus chaque année d'ailleurs.

Le budget pour 2008 de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat accusera lui aussi une baisse, alors qu'elle soutient le financement de logements à loyer modéré, de la remise sur le marché de logements vacants, de la lutte contre l'habitat indigne, et j'en passe.

Quant à la sécurisation des propriétaires privés mettant leur bien en location, prévue dans la loi DALO, elle ne restera qu'un voeu pieux, à moins que vous ne vous prononciez dès ce soir, madame la ministre, en faveur de l'amendement du groupe socialiste, qui vise à favoriser les actions comme celles que mène actuellement le maire de Paris et qui consiste à remettre sur le marché locatif des biens vacants au prix du logement social.

Mais revenons à l'argent de l'État. Il en manque pour assurer une mission qui vous tient à coeur, madame la ministre : l'hébergement d'urgence. Nous vous proposons donc de doubler dès ce soir la ligne budgétaire consacrée à l'hébergement d'urgence, en diminuant un peu les crédits consacrés à la communication des dispositifs d'animation de la politique de la ville.

L'argent manque, enfin, pour les associations qui oeuvrent dans nos quartiers : les crédits des associations d'éducation populaire sont en baisse de 5 % ! Or, il est fondamental, et Mme la secrétaire d'État ne me contredira pas sur ce point, de ne pas laisser la place à d'autres associations, attachées moins que nous aux principes républicains, dans des quartiers où s'installe parfois un sentiment d'abandon, qui fait le lit de comportements plus radicaux.

Par ailleurs, comment ferez-vous pour désenclaver les quartiers sans investir dans les transports en commun ?

Vous songez à un fonds spécifique pour les transports en banlieue. Nous y sommes favorables. Nous l'avions d'ailleurs proposé, dans le cadre d'une mission sénatoriale présidée par Alex Türk l'an passé, et nous le répétons à loisir aujourd'hui. Que les 4 milliards d'euros annoncés lors du Grenelle de l'environnement pour les 1 500 kilomètres de transports en commun en sites propres soient consacrés à désenclaver les quartiers, ce serait un engagement rassurant et crédible.

M. Thierry Repentin. Excellent !

Mme Bariza Khiari. Comment ferez-vous, enfin, pour favoriser l'emploi des jeunes de ces quartiers ? Je fais partie de ceux qui pensent que le mal-être et le malaise des banlieues sont liés à une question non pas identitaire ou comportementale, mais sociale. Ce point est essentiel.

Le logement et le travail sont des repères majeurs pour les individus. Au-delà de la question importante du salaire, le travail est un facteur de dignité. Il est donc temps de passer à « l'emploi franc », comme le propose l'association Ville et banlieue, qui consiste à alléger les charges sociales des emplois occupés par des personnes vivant dans les banlieues.

Les zones franches ont certes permis de créer des emplois, mais ils profitent peu aux habitants des banlieues. L'emploi franc permettrait de rendre attractif et durable tout emploi d'une personne habitant effectivement dans une zone sensible, quelles que soient ses particularités.

Lier les avantages au lieu de résidence fera des habitants des banlieues des « pépites recherchées » par les entreprises.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, que pensez-vous d'un tel dispositif ?

Évidemment, la mise en oeuvre technique d'une telle mesure requiert de faire preuve d'un peu d'imagination. Nul doute que certains esprits chagrins y verront des effets pervers, comme pour tout d'ailleurs ! Souvenez-vous des débats qui accompagnèrent la création des zones franches urbaines. Il ne viendrait pourtant à l'idée de personne aujourd'hui de les supprimer.

En conclusion, votre gouvernement fait des cadeaux fiscaux aux ménages les plus aisés et aux entreprises sans véritables contreparties en termes d'emplois et de salaires. Faites, enfin, un geste au profit des milliers d'habitants de nos quartiers en prenant des décisions audacieuses afin de rendre effective la promesse républicaine d'égalité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marcel-Pierre Cléach.

M. Marcel-Pierre Cléach. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de budget pour 2008 intègre les objectifs de la loi du 5 mars dernier instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale et ceux des deux lois qui encadrent le secteur du logement et de la rénovation urbaine.

L'essentiel de l'effort budgétaire pour 2008 est concentré dans le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », afin de poursuivre et d'amplifier l'effort déjà considérable entrepris depuis 2003.

Ce programme d'aide à la pierre comprend cinq actions. Je ne commenterai que l'action « Construction locative et amélioration du parc », dont les crédits enregistrent une progression de 14,99 % et les autorisations d'engagement une augmentation de 30 %.

Les besoins sont importants, c'est vrai, mais le Gouvernement fait un effort sans précédent. Je tiens à le saluer.

Mme Christine Boutin, ministre. Je vous remercie, monsieur le sénateur !

M. Marcel-Pierre Cléach. Toutefois, comme M. le rapporteur spécial, je déplore que la part réservée aux constructions nouvelles et à la rénovation urbaine ait conduit à réduire sensiblement les crédits de réhabilitation, hors convention ANRU.

Je pense qu'un équilibre entre ces deux catégories de concours de l'État devra être rétabli pour des raisons que je développerai plus loin. J'ajoute que cet équilibre devra être recherché territoire par territoire, département par département, tant la situation est différente d'un endroit à l'autre.

Pour illustrer mon propos, je m'appuierai sur une expérience locale, certes, mais bien représentative de la situation du logement social et des bailleurs sociaux en régions, hors grandes agglomérations.

Dans cette perspective, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, je voudrais vous faire part des réflexions et des interrogations du président d'un Office public d'aménagement et de construction que je suis depuis douze ans. J'aborderai successivement les problèmes posés par la spécificité des territoires et la différence des besoins des uns et des autres, les difficultés financières de la construction neuve, ainsi que celles, encore plus criantes, des opérations de réhabilitation.

Vous avez évoqué, madame la ministre, à l'occasion du congrès de l'Association des maires de France, « la nécessaire prise en compte de la dimension territoriale de la politique du logement ».

En effet, la situation du logement en France profonde n'est pas celle des banlieues des grandes villes, et les besoins n'y ont rien de comparable avec ceux des banlieues lyonnaises ou parisiennes. À l'intérieur même des régions, les situations sont différentes.

Dans mon département, qui est aussi celui du Premier ministre, le plan Borloo a entraîné l'obligation de construire en priorité des logements neufs, alors que l'ensemble des constructeurs sociaux souhaitaient un renforcement des aides à la réhabilitation.

La production en PLUS, en PLAI et en PLS a effectivement augmenté de 50 % entre 2005 et 2006, en raison du volontarisme parisien, relayé par l'impulsion préfectorale, mais l'objectif pour 2006 n'a été atteint, et bien difficilement, qu'à 85 %.

Le département de la Sarthe compte 36 500 logements sociaux. Plus de 700 logements étaient vacants au 31 décembre 2006. Le secteur privé compte, pour la seule ville du Mans, plus de 1 500 logements disponibles, qui sont le produit des dispositifs Borloo ou Robien.

La réalité oscille autour de 4 000 demandeurs - ils étaient initialement 8 000 -, qui ne veulent pas des logements trop vétustes du parc HLM. Par ailleurs, ils ne peuvent accéder au locatif privé, les effets du marché n'ayant pas encore suffisamment régulé les loyers, et la taille des logements disponibles dans le secteur privé - il s'agit souvent d'opérations Robien - ne correspondant pas à la demande.

L'importance de la vacance dans le secteur HLM souligne à la fois, pour mon département, l'absence de crise aiguë et la nécessité de moderniser, voire de démolir et de reconstruire des logements refusés par les candidats à la location en raison de leur vétusté.

On peut aussi déduire de cette situation qu'il faut tenir compte des spécificités territoriales et rééquilibrer, quand c'est nécessaire, les crédits destinés au logement en faveur des réhabilitations.

Le patrimoine social non réhabilité du département représente 8 555 logements, concentrés dans les villes moyennes et les communes rurales. Il apparaît donc nécessaire, pour éviter une augmentation de la vacance, de procéder à leur mise aux normes et à leur réhabilitation.

Les bailleurs sociaux ont besoin d'aide pour renouveler cette partie obsolète de leur parc. Le coût moyen de la rénovation d'un logement, pour l'OPAC de la Sarthe, est d'environ 30 000 euros, sans prendre en compte les travaux nécessaires à la réduction des consommations énergétiques, qu'il faudra pourtant prévoir.

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Marcel-Pierre Cléach. Nous recevons 2 370 euros d'aide par appartement, la région et le département confortant l'aide de l'État. Il reste donc à financer 27 270 euros par logement, soit sur fonds propres, soit par emprunt. C'est, par conséquent, à peu près 90 % de l'investissement que nous ne pouvons répercuter intégralement dans les loyers, en raison du niveau de ressources des locataires.

Et pourtant, ce patrimoine réhabilité est nécessaire, compte tenu du profil social et économique des demandeurs et des locataires. En effet, 80 % des demandeurs et 76 % des locataires de l'organisme que je préside ont des revenus inférieurs à 60 % des plafonds de ressources HLM.

Un renforcement significatif de la PALULOS, la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, me paraît s'imposer, la plupart des offices ne disposant pas de fonds propres suffisants pour rendre ces opérations supportables pour les locataires. Cette réévaluation devrait prendre en compte l'évolution des coûts de construction constatés depuis dix ans.

À défaut, le patrimoine ancien continuera de se marginaliser, la vacance d'augmenter et les ressources des constructeurs sociaux de se tarir. Les moins fortunés de nos compatriotes ne pourront toujours pas se loger.

Dans le domaine de la construction neuve, les problèmes financiers se posent en termes différents, mais la problématique est la même. Pardonnez-moi d'évoquer encore une expérience locale, mais je pense qu'elle est semblable à celles des constructeurs sociaux sur l'ensemble du territoire, hors grandes agglomérations.

L'aide de l'État pour un logement financé en PLUS est de 2,5 %. Les coûts de construction ont augmenté d'environ 20 % en trois ans. Nous ne pouvons plus construire de logements au-dessous de 95 000 à 100 000 euros l'unité, hors foncier. L'équilibre d'opération en zone 3 - c'est-à-dire dans l'ensemble du territoire départemental, à l'exception de l'agglomération centre - se situe à environ 80 000 euros. Le constructeur doit donc injecter 20 % de fonds propres par logement, soit 20 000 euros en moyenne, c'est-à-dire 2 millions d'euros pour 100 logements.

Sans l'aide du département, nous ne pouvons pas construire ! En effet, quel organisme peut aujourd'hui dégager autant de fonds propres ? La question contient la réponse ! Ceux qui se risqueraient à compléter le financement de la Caisse des dépôts et consignations par un emprunt complémentaire se trouveraient rapidement confrontés à un déséquilibre abyssal de leurs finances, qui les placerait inéluctablement dans une situation désagréable !

Construire ou réhabiliter devient donc de plus en plus difficile, en raison de l'augmentation du coût de la construction et du prix du foncier, de la nécessaire prise en compte des normes environnementales, ainsi que de l'absence de revalorisation du concours de l'État à l'unité logement.

C'est une situation paradoxale : la masse des crédits budgétaires en faveur du logement est en constante progression pour augmenter la production globale, mais les crédits à l'unité logement sont de plus en plus marginalisés, au point de rendre les équilibres d'opération impossibles. Pour certains offices, construire ou réhabiliter devient suicidaire. Vous ne devez pas, madame la ministre, sous-estimer cette situation, qui peut miner de l'intérieur l'ambitieux programme que vous défendez.

Quelles solutions reste-t-il ? On peut certainement vendre une partie du patrimoine ancien, mais à un rythme et suivant des modalités propres à chaque organisme, en fonction de sa politique patrimoniale et en considérant un ratio raisonnable de deux logements construits pour un logement vendu.

J'ajoute qu'il ne faut pas tirer de plans sur la comète, la demande d'achat devant être fortement sollicitée pour des résultats plutôt moyens.

Faut-il chercher à réaliser des gains de productivité ? Le maximum est fait en termes de limitation des coûts de construction. Sans doute la plupart des organismes peuvent-ils faire des économies au niveau des frais de gestion, le ratio nombre de locataires par gestionnaire pouvant vraisemblablement être amélioré.

Faut-il compter sur l'aide des collectivités locales ou de leurs groupements ? Elle est déjà fortement sollicitée et axée principalement sur l'allègement du coût du foncier et des viabilisations.

Reste une réévaluation des concours de l'État. Il me semble, madame la ministre, que nous y sommes contraints, sous peine de voir la construction et la rénovation sociales retomber à leur plus bas niveau, à un moment où les besoins exigent notre mobilisation commune.

Je pense que vous savez tout cela et que vous recherchez, de bonne foi, le croisement de toutes ces pistes pour maintenir le cap qui vous a été fixé.

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Marcel-Pierre Cléach. Dans cet esprit, vous avez évoqué, lors du congrès de l'Association des maires de France, le rôle de l'habitat privé pour résoudre le problème de l'insuffisance de logements à coût maîtrisé.

Les propriétaires privés n'y sont plus opposés. Ils sont même demandeurs, leurs organisations représentatives proposant des solutions qu'il serait judicieux d'explorer. Un partenariat avec les organismes HLM pourrait être organisé et amplifié. (Mme la ministre fait un signe d'approbation.)

Il vous restera, pour les convaincre, à lever de nombreux obstacles, dont certains ne relèvent pas de votre volonté ou de votre détermination. Je crains, en effet, que la perception qu'ils ont de leur situation, face à des locataires indélicats et à des décisions de justice lentes et souvent laxistes, n'ait guère changé depuis le constat que j'en avais fait pour la commission des affaires économique du Sénat en 2003.

Il n'en reste pas moins que l'investissement locatif privé constitue l'une des clés du problème qui nous est posé et qu'il convient sans doute de s'en préoccuper.

Telles sont, madame la ministre, les quelques observations que le terrain m'inspire et auxquelles je souhaitais vous sensibiliser, tout en étant bien conscient de la quadrature des cercles à laquelle vous êtes confrontée pour mener à bien la difficile mission qui vous a été confiée.

Mme Christine Boutin, ministre. Merci !

M. Marcel-Pierre Cléach. En acteur engagé, je souhaite que vous meniez cette mission à son terme, pour le bien des Français. J'espère que vous tiendrez compte, pour un prochain budget, des observations que j'ai développées ce soir, qui ne sont pas de nature à réduire l'image positive que j'ai des efforts que fait le Gouvernement en faveur du logement de nos compatriotes, en particulier du logement social. Ce budget mérite une appréciation positive, de ma part bien sûr, mais également de la part du groupe UMP, qui le votera. Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mahéas.

M. Jacques Mahéas. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale dispose que la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, la DSU, bénéficie d'une augmentation prioritaire de 120 millions d'euros par an entre 2005 et 2009, sous réserve que le montant de l'accroissement de la dotation globale de fonctionnement des communes et de certains de leurs groupements soit supérieur à 500 millions d'euros chaque année sur cette période. Dans le cas contraire, l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale serait limitée à 24 % de l'accroissement constaté.

Jusqu'à présent, la règle de la progression de 120 millions d'euros par an avait été respectée. Mais ce ne sera plus le cas pour l'année 2008. En effet, la dotation globale de fonctionnement n'augmentera que de 463,6 millions d'euros pour les communes et leurs groupements. Par conséquent, la DSU progressera de seulement 90 millions d'euros, soit 30 millions d'euros de moins que ce qui était prévu par le plan de cohésion sociale, dit « plan Borloo ».

Voilà trois ans, à l'occasion de l'examen du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale par le Sénat, M. Marc-Philippe Daubresse, alors ministre délégué au logement et à la ville, se montrait rassurant et déclarait : « Nous garantissons, pour les cinq années à venir, une visibilité financière à nos communes : celles-ci pourront, enfin, connaître le montant de DSU et de DSR sur lequel elles pourront compter. »

Or, cette année, une solution de continuité a été retenue et 30 millions d'euros escomptés ne seront pas au rendez-vous. Au demeurant, la progression de la DSU n'est même pas de 24 %, auquel cas le montant de la dotation s'élèverait à 111 millions d'euros.

M. Jacques Mahéas. Pire encore, en voulant sauver la face, le Sénat a adopté mercredi soir un amendement tendant à réduire la garantie annuelle de progression de la DSU de 5 % à 1,6 %, sous prétexte que cela permettrait de redistribuer les sommes ainsi économisées.

Mais, en l'occurrence, il s'agit bien de déshabiller Paul pour habiller Pierre ! De fait, la « solution » adoptée dans cet hémicycle, qui a été combattue par mes collègues du groupe socialiste, pénalisera plus de 350 communes,...

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Pas tellement !

M. Jacques Mahéas. ... et pas forcément les moins nécessiteuses !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Et au bénéfice des plus pauvres

M. Jacques Mahéas. Certes, au sens strict, il s'agit d'une moindre augmentation, et non d'une diminution, de la DSU.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Eh oui !

M. Jacques Mahéas. Mais, en pratique, certaines communes perdront 200 000 euros ou 300 000 euros, ce qui est une somme considérable en valeur absolue.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Ce n'est pas à cause du taux de 1,6 % !

M. Jacques Mahéas. Monsieur Dallier, la commune dont vous êtes le maire ne perdra rien, puisqu'elle est riche ! Elle ne perçoit pas la DSU !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Mais si ! Vous affirmez n'importe quoi !

M. Jacques Mahéas. Je vous donnerai tout à l'heure le tableau chiffré dont je dispose, monsieur Dallier.

Un tel manque à gagner diminue d'autant les capacités d'investissements des communes les moins riches.

J'ai bien pris note du communiqué de presse de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, le 15 novembre 2007. De même, je l'ai bien entendue affirmer mercredi soir, dans cet hémicycle, que le comité des finances locales, le CFL, pouvait aller au-delà de la progression minimale de 90 millions d'euros. Mais elle a simplement botté en touche !

En effet, le CFL ne se réunira qu'au mois de février 2008. Or, comme le « pacte de stabilité » imposé aux collectivités par le Gouvernement affecte toutes les dotations, le comité, pour pouvoir se montrer plus favorable aux communes de banlieue, serait tenu de prendre de l'argent à d'autres collectivités locales, ce qui serait pour le moins indélicat.

M. Pierre André, rapporteur pour avis. C'est le principe de la péréquation !

M. Jacques Mahéas. Dès lors, comment tenir la promesse électorale d'un « plan Marshall » pour les banlieues ?

Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, n'y a-t-il pas une contradiction majeure...

Mme Christine Boutin, ministre. Mais non ! (Sourires.)

M. Jacques Mahéas. ... entre un tel coup porté à la DSU et le plan pour les banlieues que vous devez annoncer à la fin du mois de janvier prochain ? Au demeurant, ce plan n'aura pas de marges de manoeuvre financière, puisque le projet de loi de finances pour 2008 aura déjà été adopté !

Faut-il rappeler l'extrême disparité des situations locales et la nécessité d'une juste péréquation ? Permettez-moi de vous faire part de quelques ordres de grandeur à titre d'illustrations.

Le pouvoir d'achat par habitant de la commune la mieux dotée représente 8 500 fois celui de la commune la moins bien pourvue. En outre, 1 % des communes les plus riches disposent de 44 fois plus de pouvoir d'achat, 7 403 euros par habitant, que les 1 % les plus pauvres, 168 euros par habitant. De surcroît, 10 % des communes les plus riches disposent de près de 30 % du pouvoir d'achat, tandis que, à l'opposé, les 10 % les plus pauvres n'en bénéficient qu'à hauteur d'un peu plus de 1 %.

Ces chiffres édifiants montrent combien les communes les plus défavorisées concentrent les difficultés. C'est pourquoi elles ont besoin de cette visibilité et de cette pérennité promises par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

Sur cette foi, certaines collectivités locales ont engagé des projets de rénovation urbaine d'envergure. Cette situation est particulièrement inacceptable pour des villes qui doivent encore se mettre à niveau en matière d'offre de services publics et d'équipements. Les maires de banlieue sont inquiets d'une telle remise en cause de la dotation de solidarité urbaine.

Comme j'ai effectivement pour habitude d'étayer mes affirmations par des éléments concrets, je me suis permis d'apporter le résultat d'une étude réalisée par les directeurs généraux des communes de la Seine-Saint-Denis. Nous disposons de trente-huit réponses sur quarante.

Les conclusions de cette enquête prouvent non seulement que certaines communes connaissent des difficultés, mais également que le fait de réduire de 30 millions d'euros le montant global de la DSU n'arrange pas la situation ; les communes les plus pauvres le restent bien.

Certes, il y a bien une exception, en Seine-Saint-Denis : la commune de Clichy-sous-Bois.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Avec un facteur quatre !

M. Jacques Mahéas. Mais, je le répète, c'est une exception !

La commune la plus pauvre du département, Stains, le reste bien, avec ou sans la DSU.

Avec la DSU, la deuxième commune la plus pauvre de Seine-Saint-Denis est la ville dont je suis le maire, Neuilly-sur-Marne. Sans la DSU, elle était quatrième...

Je pourrais multiplier les comparaisons, pour évaluer les véritables effets de la DSU.

Mme Christine Boutin, ministre. Il faudra revoir la DSU !

M. Jacques Mahéas. Ce serait positif et permettrait d'éviter de telles disparités, notamment en Seine-Saint-Denis.

Actuellement, compte tenu du produit de leurs quatre taxes, même augmenté des dotations des structures intercommunales et de la DSU, certaines communes pauvres disposent de trois fois moins de ressources que les communes les plus riches. Je le dis très nettement, c'est inadmissible !

Naturellement, dans les communes pauvres - je suis le maire de l'une d'elles -, nous acceptons la DSU.

Mme Christine Boutin, ministre. Ah ! Tout de même ! (Sourires.)

M. Jacques Mahéas. Elle est toujours la bienvenue, mais elle ne gomme pas les inégalités. Et comme elle sera réduite de 30 millions d'euros par rapport à ce qui était prévu, cela nous pose un véritable problème.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Et grâce à mon amendement, l'écart sera un peu réduit !

M. Jacques Mahéas. Je peux vous donner le classement de votre commune, monsieur Dallier. Vous étiez au seizième rang et vous êtes passé au quatorzième.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Ce sont les chiffres de 2006 ?

M. Jacques Mahéas. Oui ! Je me suis fondé sur le produit des taxes pour l'année 2006 !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Mais ma commune est devenue éligible à la DSU en 2007 ! Vos chiffres sont périmés !

Mme la présidente. Veuillez laisser parler l'orateur, monsieur le rapporteur spécial !

M. Jacques Mahéas. Ces informations m'ont été fournies - excusez du peu - par l'enquête des directeurs généraux des communes ! (Brouhaha.)

Je vois que M. Dallier est impatient de connaître les chiffres dont je dispose...

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Surtout qu'ils sont périmés !

M. Jacques Mahéas. Je les lui communiquerai bien volontiers !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je n'en ai pas besoin !

M. Jacques Mahéas. Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, si vous le permettez, je souhaiterais enfin attirer votre attention sur la situation des personnes sans domicile fixe, notamment dans ma commune.

Pour les héberger, vous avez, sans le dire vraiment, réquisitionné des locaux qui étaient dans un hôpital.

Outre que cela ne passe pas bien, je me permets de vous rappeler les dispositions de la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, selon lesquelles les locaux qui sont réquisitionnés de fait ne doivent pas se situer dans des communes où existent d'importants déséquilibres entre l'offre et la demande de logements au détriment des personnes défavorisées ou ayant des revenus modestes.

En clair, de telles réquisitions devraient plutôt avoir lieu dans la commune de M. Dallier. (Sourires.)

En revanche, dans la mienne, où l'on dénombre déjà 45 % de logements sociaux et où nous réalisons des efforts considérables, les personnes sans domicile fixe que l'on nous impose représentent un problème supplémentaire.

Bien entendu, nous ne refusons pas de les accueillir, mais nous voudrions le faire en compagnie des associations spécialisées dans ce domaine. Aujourd'hui même, j'ai dû interpeller Mme la commissaire sur les difficultés suscitées par des personnes sans domicile fixe, qui ont squatté une surface commerciale moyenne.

Par conséquent, madame la ministre, je souhaiterais que nous puissions résoudre ensemble un tel problème. Je vous ai écrit, mais la situation n'a malheureusement pas évolué depuis. Certes, j'en suis conscient, il s'agit de cas difficiles à régler, mais, dans d'autres départements, certaines villes ont également des locaux libres dans leur hôpital et elles ne sont pas traitées de la même manière que nous.

C'est la raison pour laquelle j'attire votre attention sur de telles difficultés et je vous remercie d'essayer de les résoudre, madame la ministre, madame la secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen des crédits de la mission « Ville et logement ».

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la crise du logement atteint un niveau dramatique pour un nombre de plus en plus important de Français, au point que le logement est passé en tête des préoccupations de nos concitoyens dans les enquêtes d'opinion.

Désormais, même ceux qui travaillent éprouvent des difficultés à se loger décemment. Et quand ils y parviennent, c'est trop souvent en payant un loyer au coût démesuré par rapport à leurs ressources, jusqu'à 30 % à 40%, contre 15 % à 25% dans les années quatre-vingt-dix.

Environ 900 000 personnes seraient privées d'un domicile personnel. Pour elles, il n'existe que des solutions de fortune : rester chez les parents, être hébergées par des amis ou par un CHRS... Nombre d'entre elles sont abritées provisoirement, mais le provisoire dure, dans des hôtels vétustes, où l'insalubrité et l'inconfort vont de pair avec des loyers exorbitants, acquittés par la collectivité. Il faudrait y ajouter les copropriétés dégradées, appartenant le plus souvent à des offices d'HLM, et, plus grave encore, les personnes qui vivent dans des logements dépourvus d'eau et de sanitaire, ou dans des résidences de type mobile home et caravane.

N'oublions pas, enfin, les 100 000 « sans domicile fixe », les SDF, qui sont la honte de notre société.

Pourquoi observe-t-on une dégradation si rapide de l'habitat ? La flambée des prix immobiliers depuis neuf ans, avec une augmentation cumulée de 125 %, et l'affaiblissement continu des ratios de solvabilité ont peu à peu écarté du marché de l'acquisition une bonne part des ménages à faibles revenus. De même, les fortes hausses de loyers du secteur privé, principalement en Île-de-France et dans le sud du pays, proches de 5 % par an, réduisent l'accès de certains ménages au marché locatif, tandis que l'offre en matière de logement social demeure inférieure aux besoins.

Mais les difficultés d'accès au logement ont aussi des causes plus anciennes. Elles sont, d'abord, la conséquence d'une insuffisance du rythme de construction au cours des années quatre-vingt-dix.

Par ailleurs, la demande de logement a augmenté du fait de l'allongement de la durée de vie, de la multiplication du nombre de célibataires, de divorcés et de familles monoparentales. Le déficit de logements cumulé de 1990 à 2004 peut être estimé à environ 600 000.

En 2005, les mises en chantier se sont redressées, pour atteindre 390 000 unités. C'est un progrès important, mais il correspond en réalité au besoin global annuel de logements. Donc, sur les prochaines années, il faudrait des mises en chantier durablement supérieures à 400 000 par an pour résorber peu à peu le déficit.

Chacun peut faire le constat qu'il manque beaucoup de logements sociaux. Cette situation s'explique par les chiffres suivants : le nombre de nouveaux logements sociaux construits était de l'ordre de 100 000 dans les années soixante-dix, de 60 000 dans les années quatre-vingt. Or, de 1992 à 2004, le nombre de logements sociaux neufs n'a été que de 41 000 par an, d'où un décrochage que nous payons aujourd'hui au prix fort.

Ces chiffres sont notoirement insuffisants, compte tenu de la forte demande en logements à bon marché. Certes, le plan de cohésion sociale, présenté en 2004, prévoit la construction de 500 000 logements sociaux entre 2005 et 2009 et, en 2005, 80 000 nouveaux logements sociaux ont été financés. C'est, là encore, un vrai progrès, mais la mise en service de l'ensemble des logements programmés sera forcément graduelle et ne va résorber que lentement les besoins accumulés.

De plus, selon la fondation Abbé-Pierre, une partie seulement de ces nouveaux logements sera accessible aux ménages cumulant de faibles ressources et des difficultés sociales ; ces logements seront financés en prêt locatif aidé d'intégration, avec des loyers plafonnés entre 4 euros et 5 euros environ le mètre carré.

Face aux besoins marqués de logement et à l'insuffisance de l'offre, une piste fréquemment évoquée est celle d'une taxation accrue, voire d'une réquisition des logements vacants. En réalité, quand on étudie de près cette question, on se rend compte que, s'il existe sans doute une marge possible, elle est loin d'être suffisamment importante pour donner une solution d'ensemble à ce problème.

Au total - j'y insiste - seul un effort marqué de construction de logements, particulièrement de logements sociaux, permettra d'ici à quelques années d'avoir une offre adaptée à la demande, notamment à celle des ménages à faibles ressources. Cela suppose un effort budgétaire important, mais aussi le respect par l'ensemble des communes du fameux article de la loi SRU qui prévoit que les logements locatifs sociaux doivent atteindre 20 % du nombre de résidences principales. Sur ce point, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, la volonté politique fait encore défaut.

Mme Christine Boutin, ministre. Non !

M. Gérard Delfau. Si ce n'est pas le cas, je serais vraiment très heureux de vous l'entendre dire à cette tribune, madame la ministre !

L'augmentation excessive des loyers, indexés sur le coût de la construction dans le privé, est l'une des causes de la crise actuelle. Je n'ai cessé de dénoncer ce fait, je n'étais d'ailleurs pas le seul, et de proposer que les loyers varient annuellement en fonction de la hausse des prix. Je constate avec satisfaction que le Président de la République vient d'annoncer une mesure de ce type.

Mais je suis plus dubitatif sur un autre aspect de son annonce concernant la fin du système de la garantie et la réduction à un mois de la caution. Je crains que cela ne rende frileux les propriétaires-bailleurs à l'égard des familles à petits revenus. Il faudrait, en contrepartie, développer une assurance, dotée pour partie de financements prélevés sur la plus-value de l'immobilier. Où en êtes-vous à ce sujet, madame la ministre ?

Un problème alourdit encore le climat, celui des crédits à risques dans le cadre de l'accession à la propriété. L'évolution des taux variables met en difficulté des dizaines de milliers de ménages. Certains emprunteurs français commencent à avoir du mal à rembourser leurs crédits immobiliers. Certes, la situation en France n'a rien de comparable avec la crise que connaissent les Américains, voire les Britanniques et les Espagnols, car, chez nous, heureusement, le taux fixe est la norme - encore que je me souvienne d'un débat au Sénat où le Gouvernement nous proposait de développer les prêts hypothécaires, et nous étions quelques-uns à y être fermement opposés.

Mais cette crise révèle que des crédits à risques à la française existent bel et bien, en dépit de règles très protectrices pour les consommateurs. Ces emprunteurs en difficulté découvrent que la durée de leur crédit s'est allongée, souvent de cinq à six ans, que leurs mensualités se sont alourdies et que la part du capital remboursé diminue d'une année sur l'autre. On estime à 100 000 le nombre de ménages concernés par la hausse brutale des taux, avec des mensualités pouvant augmenter de 27 % à 50 %, ce qui est évidemment insupportable pour un budget moyen.

Face à cette situation du mal-logement, le Gouvernement a réagi, entre 2003 et 2007, avec une série de textes législatifs. Mais, surtout, le nombre de mises en chantier a substantiellement augmenté. L'effort a porté principalement sur les quartiers urbains classés en zone sensible et relevant de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, au détriment, il est vrai - et je l'avais dit en son temps - du reste du territoire, ce qui ouvrirait un autre débat.

Sur ces sites, cette démarche de renouvellement de l'habitat combine la démolition, le relogement, la reconstruction d'immeubles plus petits et d'une réelle qualité architecturale. La difficulté, c'est que ce genre de chantier doit coordonner des partenaires nombreux - État, collectivités, opérateurs publics, HLM, et privés - ce qui induit des retards importants et reporte la dépense sur les années 2009-2010. Il faudra alors prévoir un effort budgétaire considérable : or, nous n'avons aucune certitude à cet égard.

La loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite loi  DALO, que j'ai approuvée malgré quelques réserves, est venue compliquer encore la lecture de votre budget et ajouter des zones d'incertitudes.

Je passe sur le fait qu'il faille, dans ce but, créer 100 nouveaux emplois et que le seul redéploiement des fonctionnaires existants ne suffise pas. Ma crainte, comme celle de notre excellent rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, est qu'elle n'ait pour effet pervers de recréer les ghettos que le programme national de rénovation urbaine avait pour vocation d'abolir.

Cela pose la question délicate de la mixité de l'habitat. Il faudrait inventer une incitation financière de l'État pour les opérations entreprises courageusement par les communes intégrant une réelle diversité de logements, de l'accession à la propriété à toute la palette des logements locatifs aidés.

De ce point de vue, votre budget donne le sentiment de rechercher seulement l'aspect quantitatif. Même si la priorité est bien de combler rapidement le déficit de logements, il conviendrait d'intégrer l'urbanisme dans cette démarche, afin de produire des éco-quartiers mêlant toutes les catégories de population et répondant aux préconisations du Grenelle de l'environnement. J'espère que vous aborderez ce point dans vos réponses, madame la ministre, madame la secrétaire d'État.

Cela me conduit à parler du foncier. Malgré les efforts du Sénat - et nous étions quelques-uns, répartis sur toutes les travées, à aller dans ce sens -, aucune mesure dissuasive n'a été prise pour casser la hausse vertigineuse du foncier et prélever une partie de la rente foncière au profit de la commune - et non du département ou de l'État -, qui, seule, subit le contrecoup de cette envolée du prix du mètre carré. Où en êtes-vous de la réflexion à ce sujet ? Pourquoi les projets d'établissements publics fonciers, comme celui de la région Languedoc-Roussillon, sont-ils bloqués par l'État ?

J'aurais bien d'autres choses à dire, notamment pour déplorer la baisse de 30 millions d'euros des crédits alloués à la DSU, baisse incompréhensible et contre-signal total de la politique affichée par le Gouvernement !

Par ailleurs, je me réjouis, je le dis au passage, de la création de l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, à laquelle je souhaite bonne chance.

Au total, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, le budget que vous nous présentez n'a pas la consistance de celui des années 2006, 2007. Il est loin de répondre aux ambitions des grandes lois qui ont été récemment adoptées, notamment la loi DALO.

Il pose, une fois de plus, le problème du décalage entre l'ampleur des objectifs affichés et les ressources financières affectées aux missions. Pour autant, c'est un effort significatif dans une période de pénurie causée, il est vrai, par les choix hasardeux du Président de la République en faveur de ce que l'on nomme le « paquet fiscal ».

Je vais attendre vos réponses et la discussion des amendements avant de me déterminer, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, tandis que mes collègues du groupe appartenant à la majorité sénatoriale approuveront votre budget.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je me réjouis que cette mission soit présentée par deux femmes, sous l'autorité, ce soir, d'une vice-présidente. (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il faut au moins reconnaître une évolution en politique, c'est l'avancée de la parité !

Mme Christine Boutin, ministre. Ce que vous dites fait plaisir à entendre !

M. Jean Desessard. Mais je ne sais pas si je vais rester dans ce ton, madame la ministre ! (Nouveaux Sourires.)

Mme Christine Boutin, ministre. J'imagine !

Mme la présidente. C'est un bon début !

M. Jean Desessard. Comme chaque année, on ne peut que déplorer la pénurie de logements, qui alimente l'inflation des loyers et rogne le pouvoir d'achat des ménages modestes.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le ton change, en effet !

M. Jean Desessard. Depuis 2005, les alertes sociales autour du mal-logement se sont multipliées : incendies d'immeubles vétustes, révolte des banlieues, tentes des Enfants de Don Quichotte, ouverture du ministère de la crise du logement, campement de familles rue de la banque, etc. Ces actions sont le révélateur d'un malaise sans précédent autour de la question essentielle du logement, qui est devenue l'une des trois priorités des Français.

Longtemps, les pouvoirs publics n'ont pas anticipé la crise. Aujourd'hui, tout le monde en est conscient, mais elle est toujours là : les loyers sont toujours aussi chers, les mal-logés et les SDF toujours aussi nombreux !

Où va donc l'argent dépensé pour le logement ? Le problème, c'est que si la majorité des budgets débloqués vont temporairement aider les plus nécessiteux, les pauvres et les classes moyennes modestes, qui sont majoritairement locataires, ils profitent en réalité aux plus aisés. Ce sont des aides à la personne détournées !

Comme les années précédentes, 5 milliards d'euros seront encore consacrés aux APL. Si l'on compte tous les crédits - organismes paritaires, collectivités locales, État - en faveur des aides à la personne pour le logement, ils représentent la somme importante de 14 milliards d'euros chaque année. Or, si ces aides ne sont pas conditionnées à des loyers décents, à des loyers modérés, elles ont un effet pervers inflationniste, comme l'a démontré l'INSEE dans l'étude de 2005 de Gabrielle Fack. De plus, les APL sont maintenant indexées sur l'évolution des loyers. Donc, plus les loyers montent, plus les aides augmentent et plus les propriétaires en profitent !

M. Jean Desessard. Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche dans le Gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, a reconnu elle-même récemment cet effet pervers, lors d'une émission sur le logement étudiant : « Le problème, c'est que nous avons un effet d'aubaine que nous constatons, qui est que la plupart des bailleurs qui mettent des petites surfaces en location augmentent le loyer à due concurrence des aides, et ça c'est quelque chose contre lequel il faut lutter ». Mais, apparemment, rien n'est à l'étude pour passer à l'action !

Mme Christine Boutin, ministre. Si !

M. Jean Desessard. Seuls 798 millions d'euros de l'enveloppe budgétaire sont consacrés au financement des logements sociaux. Vous me rétorquerez que cette somme est en hausse et que vous avez prévu un plan de financement de logements sociaux extraordinaire, mais cela fait déjà plusieurs années que nous entendons cela ! Et la réalité ne suit toujours pas les promesses ! Le rapport du député Jean-Pierre Abelin souligne en effet que, en 2006, 102 000 agréments de subvention ont été octroyés, mais que seuls 57 000 logements locatifs sociaux ont été mis en chantier.

L'ANAH mène une action déterminante. C'est là que les financements devraient porter en priorité. Or on en reste à du saupoudrage avec 13 500 logements insalubres et 21 000 copropriétés dégradées rénovés en 2007. Franchement, c'est très peu, tout comme les malheureux 25 millions d'euros attribués pour la lutte contre l'habitat indigne !

En comparaison, combien coûtent les investissements locatifs « Robien » ? Ils reviennent à 22 000 euros par logement, soit 300 millions d'euros en 2006, 580 millions d'euros en 2007, 670 millions d'euros en 2008, 700 millions d'euros en 2009, et je m'arrête là !

M. Jean Desessard. Au total, plus de 2 milliards d'euros seront partis en fumée pour construire des logements en décalage avec la demande. Même l'un de vos collègues du Gouvernement, Martin Hirsch, demande leur suppression.

M. Gérard Delfau. Très bien !

M. Jean Desessard. La principale innovation de ce projet de loi de finances passerait presque inaperçue : je veux parler, bien sûr, de la déduction des intérêts d'emprunt immobilier, qui s'applique à tous les accédants, sans condition de ressources ni condition écologique.

En cette première année, elle ne coûtera « que » 440 millions d'euros, contre 1,8 milliard d'euros l'année suivante, puis 2,5 milliards d'euros en 2010, pour aboutir au coût faramineux de 4,6 milliards d'euros en année pleine, soit les deux tiers du budget que l'on nous présente aujourd'hui. C'est un bouleversement majeur !

Quand le rapporteur spécial Philippe Dallier évoque à ce sujet « un certain rééquilibrage de ces dépenses en faveur de l'accession à la propriété », on a l'impression qu'il manque d'anticipation. Ce n'est plus du rééquilibrage, monsieur le rapporteur spécial, c'est une rupture avec la politique sociale du logement ! Reste que ce n'est pas une rupture avec les cadeaux fiscaux, comme M. Delfau l'a rappelé : le paquet fiscal qui va aux plus riches est aussi transposé dans le domaine du logement ! (Mme Odette Terrade acquiesce.)

Vous parlez de rééquilibrage ; comparez donc, par exemple, avec les crédits de l'hébergement, qui représentent 198,67 millions d'euros en autorisations d'engagement et 149,44 millions d'euros en crédits de paiement.

Le PARSA, le plan d'action renforcé en direction des personnes sans abri, négocié l'an dernier par Jean-Louis Borloo avec les Enfants de Don Quichotte, n'est pas doté des crédits nécessaires pour entrer en vigueur.

Mme Christine Boutin, ministre. Mais si !

M. Jean Desessard. Si bien que les associations, qui avaient accueilli avec bienveillance ce plan d'urgence du gouvernement précédent, sont aujourd'hui très déçues.

Mme Christine Boutin, ministre. Pas du tout !

M. Jean Desessard. Elles annoncent même un nouveau campement dans les semaines qui viennent. Il faut vous y préparer, madame la ministre !

Mme Christine Boutin, ministre. C'est un autre problème !

M. Jean Desessard. Non, c'est le même problème, celui du logement !

Mme Christine Boutin, ministre. Je ne peux pas vous laisser dire que les crédits ne permettent pas d'atteindre les objectifs !

M. Jean Desessard. Non seulement on peut annoncer que le droit opposable au logement ne sera pas mis en oeuvre l'an prochain, ...

Mme Christine Boutin, ministre. Mais si !

M. Jean Desessard. ... mais, hélas ! on peut également être pessimiste sur sa réalité au cours du quinquennat, si les grands équilibres budgétaires restent inchangés. (Mme la ministre proteste.)

Quant à la politique des faubourgs, ou des banlieues, madame la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville, les crédits sont reconduits et elle reste la même. Que croyez-vous donc qu'il arrivera ? Eh bien, ce seront les mêmes émeutes sociales, puisque sont concentrées dans ces banlieues la pauvreté, l'exclusion et les discriminations !

Vous souhaitez organiser un plan Marshall. Mais avec quels moyens ? Comment voulez-vous lutter sans moyens contre une politique qui fabrique de plus en plus de pauvres, qui délocalise l'économie, qui crée un fossé de plus en plus important entre les riches et les pauvres ? Il faudra bien qu'ils se logent quelque part tous ces pauvres. Ce sera, bien sûr, dans les faubourgs !

Avec une telle politique, c'est un plan Marshall sur papier,-3 avec des avions et des camions miniatures ! Vous ne résoudrez rien face à la politique antisociale du Gouvernement. Je vous souhaite malgré tout bon courage, mais je n'y crois pas beaucoup !

Dans le domaine du logement, alors tout va mal, que rien ne change et que rien ne changera, sinon en pire, vous comprendrez que les sénatrices et les sénateurs Verts ne puissent voter ce budget.

M. Gérard Delfau. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, parler en l'espace de huit minutes des crédits du logement et de la ville est une forme de gageure, eu égard aux enjeux recouverts par cette mission et aux préoccupations majeures vécues par les Français en ces matières, que nous rappellent les nombreuses associations mobilisées pour le droit au logement.

L'année a, en effet, été marquée par l'acuité toute particulière de la question du logement consacrée, si l'on peut dire, par l'adoption de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit opposable au logement, dont nous attendons encore qu'elle commence à prendre sens dans la vie quotidienne des habitants de notre pays. Ainsi, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées a-t-il pu pointer le fait que la définition même des personnes pouvant faire valoir le droit opposable au logement n'était pas encore arrêtée, faute de publication du décret prévu à l'article 1er de la loi !

Au total, ce sont plus de vingt dispositions règlementaires diverses prévues par cette loi qui n'ont toujours pas été prises. Pendant ce temps, des familles sont contraintes de camper rue de la Banque, des milliers d'autres attendent un logement, et l'arbitraire de l'intervention policière se substitue à toute politique de relogement des plus démunis !

L'autre évènement de l'année, c'est la renaissance des incidents dans les quartiers sensibles, et souvent prioritaires aux sens de la politique de la ville.

Les évènements récents de Villiers-le-Bel, dans le quartier de la ZAC Derrière-les-Murs-de-Monseigneur, faisant suite à ceux qu'a connus le quartier du Vert-Bois à Saint-Dizier, montrent à l'envi que tous les équilibres que d'aucuns pensaient avoir trouvés sont pour le moins fragiles.

Le rapport de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles nous a montré, au fil de ses chapitres, que rien de fondamental n'avait changé pour les habitants des quartiers sensibles. Les jeunes, les salariés, les femmes, les habitants de ces quartiers disposent de plus faibles ressources et demeurent moins formés, plus privés d'emploi, discriminés à plus d'un titre que n'importe quel autre groupe social de notre pays.

Les injustices sociales se voient dans ces quartiers comme au travers d'une loupe grossissante : elle accuse, chaque jour, tous ceux qui délocalisent les activités, qui discriminent et qui ignorent et méprisent les potentiels créatifs de ces habitants de notre pays, de ces membres à part entière de notre communauté nationale.

Face à ces énormes enjeux, quelles réponses apporte ce budget de la mission « Ville et logement » ? Celles qu'il donne sont liées aux contraintes de réduction des déficits et des dépenses ; c'est dire si elles sont incomplètes et imparfaites.

Si les sommes engagées au titre de la ville et du logement progressent légèrement - très légèrement - en crédits de paiement, d'environ 31 millions d'euros sur 7,14 milliards en 2007, ces engagements sont à apprécier au regard de la réalité.

Or, la réalité, c'est le programme « Rénovation urbaine », qui a été amputé de plus de 150 millions d'euros, tandis que le programme destiné à la construction de logements progresse de 128 millions d'euros. Le programme « Aide à l'accès au logement », quant à lui, est déterminant en regroupant près de 5 milliards d'euros - nous y reviendrons en examinant les amendements - sur les 7,17 milliards d'euros inscrits dans la mission.

En outre, ces crédits ont un caractère d'affichage assez marqué et constituent de longue date - nous l'avions déjà pointé du doigt par le passé - l'une des variables d'ajustement des collectifs budgétaires de fin d'année.

Ils sont, d'abord, à mettre en regard des politiques de dépenses fiscales associées à la mission, qui atteignent 150 millions d'euros sur le programme « Rénovation urbaine », 216 millions d'euros sur le programme « Équité sociale et territoriale et soutien », 35 millions d'euros sur le programme « Aide à l'accès au logement » et, surtout, près de 13 milliards d'euros pour le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ». Encore cette dernière évaluation ne mesure-t-elle pas l'impact de la taxation séparée des plus-values de cessions immobilières, celle du régime des sociétés d'investissements immobiliers cotées, les SIIC, ou encore l'effet de l'imputation des déficits fonciers reportables sur le revenu des propriétaires.

De fait, la politique de la ville et du logement dans notre pays est d'abord une politique de dépense fiscale. Il n'est donc pas étonnant que, malgré vos communiqués sur la construction et la production de logements dans notre pays, nous ayons quelque peine à faire face aux énormes besoins sociaux. On construit des logements « Robien » défiscalisés avant de construire des logements sociaux - tout à l'heure, notre collègue Marcel-Pierre Cléach a souligné combien ces logements restaient vides dans son département -, et l'on construit des logements en accession à la propriété faiblement aidés - en fait, ce sont les banques qui touchent la prime du « prêt à taux zéro » -, qui portent en eux la bombe à retardement du surendettement des ménages

Avec cette mission, vous mettez en oeuvre la théorie de l'État passif avant toute véritable politique de développement du logement.

Si l'on examine attentivement le collectif budgétaire pour 2007, il finit de nous en apprendre sur la gestion des crédits de la mission. En effet, dans quelques jours, nous allons examiner un projet de loi de finances rectificative comportant, entre autres mesures, des annulations de crédits : annulation de 237 millions d'euros, soit près de 62 % des crédits ouverts, sur le programme « Rénovation urbaine » : annulation de 29 millions d'euros sur le programme « Équité sociale et territoriale et soutien » ; annulation de 76 millions d'euros sur le programme « Aide à l'accès au logement » ; annulation de 177 millions d'euros sur le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

Au total, le budget voté à la fin de 2006 sera finalement amputé de près de 520 millions d'euros. De fait, il y a des moments où la réduction du déficit budgétaire ainsi permise se construit sur l'aggravation des déficits sociaux dont souffrent les quartiers et que la politique du Gouvernement n'est pas prête de réduire, loin de là !

Quant au guichet unique de l'ANRU, mis en place par M. Borloo, on a fortement l'impression qu'il ne fonctionne pas tous les jours ouvrables, compte tenu du fait que l'État ne tient pas les engagements pris dans la loi d'août 2003 ! Celle loi disposait pourtant, dans son article 7, qu'aucune dotation annuelle de l'État, entre 2004 et 2008, ne pouvait être inférieure à 465 millions d'euros.

Vous pouvez, mesdames les ministres, nous annoncer un énième plan pour les banlieues : quelles que soient les intentions affichées, la pratique nous incite à la méfiance plus qu'à la prudence, eu égard aux politiques finalement suivies...

Sabrer comme on le fait aujourd'hui dans les budgets de la rénovation urbaine, c'est retarder toujours plus des projets de reconquête urbaine, pourtant indispensables au bien-être des populations !

Alors que nombre d'associations s'accordent sur le chiffre de 900 000 logements sociaux nouveaux à construire dans les cinq ans à venir et d'au moins 150 000 autres logements sociaux à réhabiliter pour faire face aux urgences, rien dans le projet de budget pour 2008 ne semble devoir nous inciter à adopter ces crédits, largement insuffisants et, de surcroît, promis à la régulation budgétaire. (M. Jean Desessard applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord souligner la qualité des rapports qui ont été présentés ce soir sur la mission « Ville et logement » et remercier leurs auteurs.

Je vais essayer de répondre, sur l'ensemble des points qui ont été soulevés, aux différents orateurs en traitant du logement, puis de la politique de la ville, sur laquelle Mme Fadela Amara s'exprimera plus longuement.

Monsieur le rapporteur spécial, vous avez abordé la question de la revalorisation des aides personnelles, à hauteur de 2,76 %, décidée dans le cadre de la loi DALO et mise en oeuvre pour la première fois en 2008. Le Gouvernement a choisi de maintenir cette augmentation. Vous sera néanmoins proposée très bientôt la révision des loyers sur la base de l'indice des prix à la consommation. C'est là, madame Khiari, une vraie garantie de l'évolution des aides personnelles, puisque les aides seront indexées sur l'indice de référence des loyers, et les loyers sur l'indice des prix à la consommation.

Vous avez souligné, monsieur le rapporteur spécial, l'effort budgétaire considérable consenti dans le présent projet de loi de finances pour assurer la réalisation des objectifs, à savoir, je le rappelle, la construction de 500 000 logements neufs, dont 120 000 logements sociaux, auxquels s'ajoutent 22 000 logements sociaux financés.

Vous avez également fait part de votre inquiétude quant aux crédits consacrés à l'entretien du parc social, préoccupation qui rejoint celle de plusieurs de vos collègues, notamment M. Cléach.

Je partage votre souci. Les moyens doivent être suffisants, car il ne s'agit pas seulement de construire des logements neufs, il ne s'agit pas uniquement de faire du quantitatif, il faut aussi assurer l'entretien. C'est important pour les personnes qui vivent dans les immeubles concernés. Au demeurant, l'absence d'entretien finit par avoir, au bout de quelques années, un coût supérieur puisqu'elle débouche sur des opérations lourdes, menées avec l'ANRU, destinées à transformer des quartiers, ou sur la vacance de logements sociaux, comme l'évoquait M. Cléach.

Par ailleurs, l'ambition du Gouvernement est de réhabiliter 40 000 logements, conformément à l'accord-cadre signé le 21 décembre 2004 par l'État et l'Union sociale pour l'habitat, l'USH, et portant sur la mise en oeuvre du volet logement du plan de cohésion sociale.

M. Repentin a évoqué les statistiques de la construction de logements. Le nombre de permis de construire, qui s'établit en métropole à 554 000 pour les douze derniers mois, demeure dans la fourchette annuelle des 550 000 à 560 000 constatée depuis vingt mois, ce qui est excellent. Toujours au cours des douze derniers mois, en métropole, 429 000 nouveaux logements ont été mis en chantier. Il s'agit d'une progression sensible par rapport aux 425 000 atteints au mois de septembre 2006 ; qui plus est, je le rappelle, c'est le cinquième mois consécutif, depuis juin dernier, que ce chiffre augmente. Le nombre de logements commencés demeure donc à un très haut niveau historique.

Ce résultat est vraiment encourageant. Le rythme annuel de construction de logements neufs, établi à la fin du mois d'octobre 2007, se situe nettement au-dessus du niveau constaté à la fin de 2006, qui était, en métropole, de 421 000 logements. Il est au plus haut niveau depuis trente ans, et je dois dire que j'en éprouve une certaine satisfaction. Pourtant, nombreuses étaient les Cassandre, quand je suis arrivée à la tête de ce ministère, qui me disaient que jamais je n'y parviendrais !

Quant au décalage avec les mises en service, il s'explique tout simplement par les délais de construction : compte tenu des chiffres que je viens d'indiquer, on peut s'attendre à une augmentation sensible du nombre de logements mis en service.

Pour le logement social, plus spécifiquement, on observe la même tendance. Aux 58 774 PLUS et PLAI financés en 2006 - l'objectif, je le rappelle, était de 63 000 - s'ajoutent 33 098 PLS et 4 495 logements PLS réalisés par l'Association Foncière Logement. Au total, plus de 96 000 logements locatifs sociaux ont été financés en 2006, alors que l'objectif avait été fixé à 100 000.

Pour 2007, les opérations sont montées sur le second semestre, et nous ne disposons pas encore de la totalité des résultats. Nous continuons de financer des projets dans plusieurs régions, mais il est encore trop tôt pour établir le bilan.

Monsieur Repentin, vous avez abordé la question du nombre de personnes susceptibles d'être concernées par le droit au logement opposable. Aujourd'hui, je ne conteste aucun chiffre, parce qu'aucun n'est vrai : il est impossible, à l'heure actuelle, de savoir exactement combien de personnes relèveront, le 1er décembre 2008, des sites publics prioritaires. Il s'agit assurément de plusieurs milliers, certains évoquent même plusieurs centaines de milliers, mais je ne me livrerai pas à une bataille de chiffres, parce que je sais que je ne peux en donner aucun.

Monsieur Vanlerenberghe, vous vous interrogez sur la proportion des ménages qui pourront accéder au logement social. Je partage votre point de vue, et une réflexion est menée par ailleurs. Comme vous le savez, la mobilité est faible dans le parc social, et je travaille à ce qu'elle puisse devenir réalité.

Il faut que vous preniez bien conscience, mesdames, messieurs les sénateurs, que la situation du logement est grave, très grave, et qu'elle concerne tout le monde - et c'est moi, ministre du logement, qui le dis clairement ! -, depuis celui qui n'a pas de logement jusqu'à celui qui est bien logé. Il n'y a aujourd'hui aucune mobilité dans le parc de logements, si bien que les personnes qui sont en centre d'hébergement et de réinsertion sociale, en CHRS, et qui devraient pouvoir libérer une place en allant occuper un logement ordinaire, qu'il soit social ou privé, ne peuvent pas le faire faute de fluidité du parcours résidentiel ; et parce que ces personnes sont « gelées » dans les CHRS, les centres d'hébergement d'urgence sont à leur tour « embolisés »...

C'est la raison pour laquelle, je le répète, monsieur, la priorité des priorités est effectivement de construire, de construire encore et de construire toujours des logements de tout type, social ou privé.

Vous m'interrogez également sur la mesure de l'efficacité de la dépense fiscale consacrée au logement. L'examen de votre amendement, monsieur, me donnera l'occasion de revenir sur cette question ; d'ores et déjà, sachez que je partage votre préoccupation.

Monsieur Repentin, monsieur Cléach, vous avez rappelé la nécessité de prendre en compte la réalité du terrain. Je suis, naturellement, bien consciente du fait que le logement répond à une logique géographique fine. Aussi, la modulation des plafonds de loyer dans le parc privé a fait l'objet d'un groupe de travail qui permettra, en 2008, de définir une approche plus fidèle à la réalité locale. De même, le développement des délégations des aides à la pierre va dans le sens de l'adaptation des politiques aux spécificités locales.

Monsieur Repentin, monsieur Cléach, madame Khiari, vous évoquez les moyens destinés à augmenter le parc de logements dont peut disposer le préfet et à renforcer le rôle du parc locatif privé. Cela rejoint mes préoccupations, et une série de mesures allant dans ce sens sont en cours d'examen. C'est ce qui explique la position du Gouvernement, qui souhaite proposer un dispositif qui soit le plus cohérent possible.

Des mesures sont déjà effectives ; je pense en particulier à la solution de l'usufruit locatif social, qui prend la forme d'un accord conclu entre un propriétaire privé et un organisme d'HLM. En septembre, lors de la décentralisation de mon ministère à Lyon, j'ai signé une convention avec les représentants des propriétaires privés pour développer cette possibilité. Toujours en septembre, une autre convention a été signée avec le 1 % et l'ANAH, portant sur 70 000 logements très sociaux.

Monsieur Desessard, je tiens à souligner que je ne refuse a priori aucune piste. C'est ainsi que je n'écarte pas l'idée de réquisitionner des logements vacants si cela s'avère nécessaire ; je l'ai déjà dit, et je le répète à la tribune de la Haute Assemblée. En effet, le recours au pouvoir de réquisition peut être un moyen, un instrument : je n'en élimine aucun tant il est nécessaire de rétablir la fluidité du parcours résidentiel. Dans cette éventualité, j'ai demandé aux services fiscaux d'établir la liste des logements vacants.

Toutefois, comme vous le savez, quand elle a été utilisée dans le passé, la réquisition a permis au total de ne reloger que quelques centaines de personnes. Le dernier ministre du logement qui y ait recouru était Mme Lienemann : quarante-trois personnes en ont bénéficié. (Sourires.) C'était naturellement indispensable pour ces quarante-trois personnes, mais ce n'est malheureusement pas du tout à la hauteur des besoins ! Pour autant, je l'utiliserai.

Cette préoccupation rejoint celle qu'a exprimée M. Dallier. Compte tenu de l'importance de la crise du logement, les efforts ont d'abord porté sur la production d'offres nouvelles. Il faut poursuivre en ce sens, car nous manquons toujours de logements. Cependant, la nécessité d'assurer l'amélioration du parc existant n'a pas été sous-estimée. Ainsi, figure parmi les objectifs fixés à l'ANRU la réhabilitation de 400 000 logements entre 2004 et 2013.

Pour les territoires qui ne sont pas en ZUS, l'État s'est engagé, dans la convention signée en décembre 2004 avec l'USH, à financer 40 000 PALULOS par an. Cet engagement est largement tenu puisqu'en 2005 plus de 57 000 logements ont été financés, et en 2006 près de 48 000, pour un montant de 46 millions d'euros. L'objectif devrait de nouveau être dépassé.

Enfin, lorsque nous préparerons le projet de loi de finances pour 2009, nous ferons le bilan des trois premières années d'application de la convention et des quatre premières années d'intervention de l'ANRU. Ce sera aussi l'occasion d'examiner le contenu des plans stratégiques de patrimoine des organismes en liaison avec les objectifs d'économie d'énergie sur le parc existant.

Monsieur Vanlerenberghe, vous faites part de vos craintes relatives aux moyens budgétaires dégagés pour lutter contre l'habitat indigne. Je précise qu'ils seront complétés par des crédits de l'ANAH, qui consacrera un effort exceptionnel à cette tâche.

Monsieur Repentin, vous vous inquiétez de la pérennité des financements assurés par le livret A. À la suite de la décision prise par la Commission le 10 mai dernier, le Gouvernement a, d'une part, déposé une requête en annulation devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes et, d'autre part, engagé une mission de réflexion, confiée à M. Camdessus, pour examiner les meilleures conditions possibles d'une éventuelle banalisation.

La décision du Tribunal ne devrait pas intervenir avant le milieu de l'année 2008, et nous espérons qu'elle donnera raison à la France. Pour l'heure, les différents acteurs concernés - HLM, banques, associations, économistes - ont été auditionnés par la mission Camdessus, qui a bien présents à l'esprit les deux objectifs premiers de son travail : assurer les meilleures conditions possibles au logement social ; assurer l'accessibilité bancaire aux plus démunis. La mission remettra ses conclusions dans quelques jours, je ne peux donc pas vous en dire davantage pour l'instant.

Je voudrais maintenant évoquer les crédits des programmes « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien ».

Vous l'avez bien compris, 2008 sera - et cela se traduit dans le projet de budget - une année de transition, marquée par la révision générale des politiques publiques, qui conduit à revoir l'efficacité des crédits et les structures de l'État chargées de les mettre en oeuvre, mais aussi, en application d'un engagement pris par le Président de la République, par la préparation du plan « Respect et égalité des chances ».

Il appartient à Mme Amara de vous exposer les priorités de la politique de la ville pour 2008 et de faire le point sur la préparation de ce plan. Pour ma part, en réponse aux remarques des rapporteurs, tout particulièrement de MM. André et Dallier, je voudrais insister sur quelques orientations clefs.

Tout d'abord, je constate, comme vous, que le projet de loi de finances pour 2008 permet de tenir les engagements adoptés par le Parlement dans les différentes lois de programmation. Les autorisations d'engagement respectent le montant prévu par la loi, et les crédits de paiement sont adaptés au rythme des réalisations et à la trésorerie abondante de l'ANRU.

Je suis doublement intéressée à la réalisation de ces opérations. En tant que ministre du logement, d'abord, parce que, naturellement, elles contribuent à améliorer le parc social : il faut savoir que les bâtiments voués à la démolition affichent des taux de vacance de 33 % alors que, par ailleurs, nous souffrons d'un terrible manque de logements sociaux. En tant que ministre de la ville, ensuite, parce que ces opérations sont essentielles à la dignité de vie de tous les habitants, mais surtout à la réintégration de ces quartiers dans la ville. Je suis donc particulièrement motivée pour accélérer la réalisation du programme de rénovation urbaine.

D'ores et déjà, j'ai demandé à l'ANRU d'alléger les procédures pour tout ce qui concerne les adaptations mineures à des programmes déjà validés. Je tiens cependant à préciser que, s'agissant du programme de rénovation urbaine proprement dit, autant je poursuis les orientations et les engagements de mon prédécesseur, autant je souhaite que la dimension sociale soit davantage prise en compte.

Je réfléchis de façon plus générale au coût d'un logement. Il faut étudier ce coût non seulement en ce qui concerne la pierre, le béton ou le ciment - le « dur » -, mais également au point de vue de l'accompagnement social, en particulier pour les logements sociaux, afin d'y intégrer la dimension humaine.

Vous m'avez interrogée également sur les centres anciens. Je partage tout à fait les observations de votre rapporteur sur la précarité qui touche les habitants des centres anciens dans plusieurs dizaines de centres villes.

N'est-il pas étonnant que l'on démolisse certains quartiers, qui nécessitent certes de l'être, et que l'on oublie des centres anciens dans lesquels le niveau de confort des logements est inférieur à celui des logements que nous démolissons ?

Mme Odette Terrade. Vous avez raison !

Mme Christine Boutin, ministre. Il faut remettre un peu de cohérence dans cet ensemble.

J'ai demandé à l'ANRU et à l'ANAH, qui ont chacune leur propre savoir-faire en la matière, de me proposer des méthodes d'action. Ce travail sera achevé au début de l'année 2008 et je reviendrai devant vous sur la base de ces propositions afin que nous avancions ensemble.

Pour terminer sur le programme de l'ANRU et faire la transition avec le programme 147, je ne crois pas qu'une fusion entre l'ANRU et l'ACSE améliorerait l'efficacité de l'État au service de ces habitants, même si une meilleure coordination entre les deux agences s'impose.

S'agissant du programme « Équité sociale et territoriale et soutien », j'ai bien entendu le message concernant le partage entre la DIV et l'ACSE. Je suis d'accord pour que tous les crédits d'intervention soient désormais gérés par l'ACSE, dès lors qu'ils sont ensuite mis en oeuvre par les préfets des départements.

C'est ce que je ferai dès 2008, c'est-à-dire que les crédits expérimentaux et les crédits des départements d'outre-mer seront gérés par l'ACSE. La DIV ne conservera que les crédits régionaux des centres de ressource.

Par ailleurs, j'ai donné des instructions à l'ACSE pour que les subventions aux associations soient versées dès le premier trimestre de 2008.

Lorsque j'étais parlementaire, la situation me choquait profondément et l'une des premières instructions que j'ai données lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, c'est que, dans le cadre du budget pour 2008, on fasse en sorte que les associations perçoivent leurs subventions - en tout cas, pour les plus importantes - non pas à la fin de l'année, mais au premier trimestre de 2008 ; j'espère que cette demande se traduira concrètement dans les faits.

M. Delfau a émis un certain nombre de remarques sur les dépôts de garantie.

J'ai, bien sûr, entendu les observations des uns et des autres quant à la caution. Je suis pour ma part absolument convaincue, mesdames, messieurs les sénateurs, que la garantie du risque locatif, que nous avons rendue universelle dans son principe dans la loi DALO, répondra aux nombreuses questions que vous vous posez et que se posent les propriétaires et les bailleurs aujourd'hui.

C'est la raison pour laquelle cet après-midi, juste avant de venir devant vous, j'ai réuni à mon ministère l'ensemble des professionnels et des acteurs concernés - propriétaires, administrateurs de biens, partenaires sociaux du 1 %, assureurs - de façon à regarder comment nous pouvons travailler ensemble ; ils doivent me remettre leurs propositions la semaine prochaine.

Je n'ai pas pu assister à la fin de cette réunion puisque j'étais au Sénat, mais mes collaborateurs m'ont fait savoir qu'elle s'était fort bien passée et que nous allons finir par trouver un accord.

Monsieur Desessard, vous avez fait allusion aux crédits d'hébergement. Je veux tordre le cou à des idées fausses.

M. Jean Desessard. Pas à moi, madame la ministre ! (Sourires.)

Mme Christine Boutin, ministre. Non, pas à vous, monsieur le sénateur ! (Nouveaux sourires.)

J'en ai assez d'entendre dire qu'il n'y a pas de crédits pour financer les engagements pris par mon prédécesseur concernant d'hébergement ! En fait, les 93 000 places prévues sont financées ! Nous avons simplement du retard s'agissant des maisons relais ; l'objectif était de 12 000, 6 000 ont été réalisées et les 6 000 autres sont financées.

Vous tous ici qui êtes sensibilisés à la problématique de l'hébergement social savez que la maison relais est un concept beaucoup plus difficile à mettre sur pied, car il s'agit non pas uniquement de construire, mais de proposer un accompagnement. Toutefois, les 6 000 maisons relais seront terminées en 2008. Pour le reste, je le répète, les objectifs qui avaient été fixés par mon prédécesseur ainsi que par le plan d'action renforcé en direction des personnes sans abri, le PARSA sont financés.

Cependant, je vais vous faire une confidence, monsieur Desessard : en réalité, je ne suis pas certaine que les 93 000 places suffisent, cet hiver, à satisfaire la demande...

Monsieur le sénateur, comme un certain nombre d'autres intervenants, vous m'avez interrogée sur la remise en cause du dispositif Robien. Il faut savoir qu'il a été resserré le 1er octobre 2006, dans la loi portant engagement national pour le logement. Nous attendons les résultats, même si je reconnais que, en zone détendue ou zone C, on peut s'interroger sur sa pérennité. Je n'irai pas plus loin ce soir, mais je m'interroge sérieusement sur cette question. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux avant toute chose vous dire combien je suis honorée et fière de présenter devant vous, pour la première fois, le projet de budget consacré à la politique de la ville pour l'année 2008.

Je ne reviendrai pas sur la situation sociale, culturelle et économique des quartiers prioritaires, que nous connaissons tous. Je ne reviendrai pas non plus sur le contexte particulier dans lequel nos débats s'inscrivent aujourd'hui. Au cours des jours qui viennent de s'écouler, beaucoup, peut-être même trop, a été dit sur le sujet et je partage les propos de Mme Bariza Khiari sur la situation des banlieues.

Je sais que, comme moi, vous entendez régulièrement le cri de détresse qui émane de ces quartiers, cette souffrance rentrée qui nous rappelle l'urgence de la situation.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises dans ces lieux, ici, où les représentants de la nation construisent les conditions du « vivre ensemble » de notre pays, il s'agit aujourd'hui de se surpasser, de tout faire pour remettre la République dans ces quartiers.

À cet égard, le budget que je vous demande d'approuver répond à une attente. Il est raisonnable. Il affiche, hors gel, une légère augmentation par rapport à l'exercice actuel, de 1 % en autorisations d'engagement, soit 760 millions d'euros, et de 0,5 % en crédits de paiement, soit 794 millions d'euros.

Cet effort de l'État, dans un cadre budgétaire contraint, est à souligner. Il doit, à tout le moins, être maintenu, tant en affichage que dans les faits. À l'heure où tout le monde s'accorde à dire que la situation des banlieues dans notre pays demande une mobilisation générale, la progression des crédits qui sont consacrés à la politique de la ville doit refléter cet engagement républicain, quels que soient les impératifs budgétaires que ni vous ni moi n'ignorons.

Dans toutes nos décisions, gardons en mémoire les attentes fortes de ces 5 millions de personnes qui vivent dans ces quartiers prioritaires. Pensons à la solitude que connaît quotidiennement une partie des 821 maires bénéficiaires de la dotation de solidarité urbaine, qui doivent, avec des moyens limités, compenser le manque de services publics criant dans ces quartiers trop souvent oubliés.

Surtout, rappelons-nous que, dans le cadre de nos travaux d'aujourd'hui, nous allons débattre sur le fait d'accorder ou non une simple enveloppe de 1,3 milliard d'euros, soit 0,37 % du budget de l'État, pour contribuer à améliorer la vie de 8 % de la population de notre pays. J'ai conscience, monsieur Desessard, qu'il nous faut aller encore plus loin. En effet, je sais que, malgré les efforts passés, et en dépit de tous les plans qui se sont succédé, cela reste insuffisant par rapport aux besoins.

Dans les toutes prochaines semaines, je reviendrai, dans un autre cadre, vous présenter le plan « Respect et égalité des chances », dont l'ambition a été souhaitée par le Président de la République. Il sera audacieux, notamment sur l'emploi, comme le souhaitent les élus de l'association Ville et Banlieue ainsi que Mme Bariza Khiari.

Mais au-delà de toute perspective d'évolution budgétaire, je veux vous dire que je suis déterminée à entendre toutes les propositions de bon sens que vous, messieurs les rapporteurs, mais aussi d'autres ont faites pour nous inciter à agir plus efficacement. Si je sais qu'il faudra faire plus, je suis déterminée à dépenser mieux.

J'ai surtout entendu les diagnostics que vous avez dressés, ainsi que vos propositions. Elles rejoignent celles qui ont pu m'être faites dans les plus de trois cent réunions publiques que j'ai organisées dans toute la France, pour la préparation du plan « Respect et égalité des chances ». Elles convergent avec mon propre sentiment, avec les convictions qui sont les miennes depuis que j'agis, en tant que responsable associative et politique, sur le terrain, au plus près des besoins.

Alors oui, je partage l'avis de Philippe Dallier, lorsqu'il demande la clarification rapide des missions des agences et de la délégation interministérielle à la ville, chargée de l'exercice de leur tutelle. Je vais même plus loin. Pour moi, la politique de la ville a vocation à redevenir interministérielle et l'administration qui en a la responsabilité doit être clairement positionnée dans un rôle de coordination globale de l'action de l'État et des agences dans ces quartiers.

Cela suppose qu'elle se consacre à la prospective, à l'évaluation et au pilotage national. Cela suppose surtout qu'elle dispose d'une vraie capacité d'action interministérielle. C'est l'un de nos axes de travail dans le cadre de la revue générale des politiques publiques, dont les propositions seront mises en oeuvre dès 2008.

Je suis, tout comme Philippe Dallier, déterminée à donner de la cohérence au zonage, trop complexe, illisible, et tellement figé qu'il stigmatise alors qu'il est fait au départ pour améliorer. Sa proposition de révision tous les cinq ans va dans le bon sens. Il faut aller plus loin et tout remettre à plat, pour mieux évaluer, « mettre le paquet » là où sont les vrais besoins et sortir, à terme, ces quartiers de la politique de la ville. C'est aussi cela la logique du « plan banlieue » et je suis sûre que nous sommes d'accord sur ce point, madame Terrade.

Je partage aussi la volonté de simplification des procédures de l'ANRU, exprimée par Pierre André, Thierry Repentin et Jean-Marie Vanlerenberghe. Un travail de fond a été engagé par le conseil d'administration de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, sous l'impulsion de son directeur général, Philippe Van de Maele. Il se traduira très rapidement par une plus grande déconcentration des pouvoirs aux préfets et la systématisation des avances, pour faire progresser plus vite les projets.

Comme M. Vanlerenberghe, je fais le constat d'un manque de coordination des acteurs au niveau local. C'est pourquoi je proposerai, dans le cadre du plan, une clarification du pilotage local, avec le renforcement des pouvoirs du binôme maire-préfet. La notion de chef de file est séduisante. Nous y travaillons dans le cadre de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, avec des propositions innovantes que j'aurai l'occasion de vous présenter ultérieurement.

La mobilisation du droit commun, évoquée par Pierre André et Thierry Repentin, est, enfin, pour moi, une priorité ; je ne cesse de le dire. La politique de la ville, à force d'être trop spécifique, a fini par combler les lacunes du droit commun. C'est le cas dans tous les domaines, qu'il s'agisse des transports, de l'éducation, de la sécurité et de la prévention de la délinquance, et même de l'accès aux droits.

Si je dois apporter quelque chose de neuf à cette politique, ce sera cela : le retour à la normalité. Le droit commun doit prendre toute sa place dans ces quartiers, d'abord et avant tout. La politique de la ville doit redevenir exceptionnelle.

À très court terme, je souhaite revisiter les dispositifs, simplifier, donner de la lisibilité et de la visibilité, et, dans chaque mesure, systématiser la culture de l'évaluation et du résultat.

Il faudra aussi reconnaître davantage les responsabilités des élus locaux, notamment des maires, dans notre action commune. À cet égard, je proposerai une refondation de la solidarité financière locale, qui doit dépasser le simple pyramidage de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, dont il a beaucoup été question dans cette enceinte ces derniers jours. Sur ce sujet, je reste sur la même ligne : les communes parmi les plus pauvres, qui connaissent le plus de difficultés doivent être plus aidées que les autres. Monsieur Mahéas, je vous ai entendu.

Mesdames, messieurs les sénateurs, mon propos était de vous convaincre que Christine Boutin et moi-même avons une haute ambition pour la politique de la ville. Notre séance d'aujourd'hui est une première étape. Je forme le voeu qu'il y en ait d'autres et qu'ensemble nous réussissions ce pari fou de réimplanter la République et ses valeurs dans nos quartiers. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Ville et logement
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article additionnel avant l'article 60

Mme la présidente. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Ville et logement » figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Ville et logement

7 664 072 348

7 148 822 348

Rénovation urbaine

382 299 349

227 299 349

Équité sociale et territoriale et soutien

749 201 368

783 201 368

Aide à l'accès au logement

4 993 942 500

4 993 942 500

Développement et amélioration de l'offre de logement

1 538 629 131

1 144 379 131

Dont titre 2

155 490 000

155 490 000

Mme la présidente. L'amendement n° II-129, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

 

 

 

 

Équité sociale et territoriale et soutien

 

 

 

 

Aide à l'accès au logement

 

 

 

 

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

 

438 444438 444

 

438 444438 444

TOTAL

 

438 444

 

438 444

SOLDE

-438 444

-438 444

 

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Le présent amendement vise à tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Ville et logement » de l'ajustement du droit à compensation du transfert aux départements effectué lors de l'examen de l'article 14 en première partie du projet de loi de finances.

La correction de la compensation a porté sur les transferts prévus aux articles 65 et 104 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, et résulte de la prise en compte de personnels supplémentaires ayant opté pour l'intégration ou un détachement dans la fonction publique territoriale.

Comme cela a été annoncé lors du débat à l'Assemblée nationale, les transferts de personnels supplémentaires, qui correspondent pour le ministère du logement et de la ville à douze équivalents temps plein travaillé, n'avaient pu être pris en compte au moment de l'élaboration du projet de loi de finances, compte tenu des délais d'exercice du droit d'option.

Conformément à ce qui a été exposé lors du vote de la première partie, nous proposons de gager l'ajustement du droit à compensation par une annulation des crédits sur le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », action n° 5 « Soutien » de la mission « Ville et logement » correspondant au montant des dépenses de rémunération des personnels associés au transfert du Fonds de solidarité pour le logement, le FSL, pour un montant de 438 444 euros.

Un amendement de coordination à l'article 37, relatif aux plafonds des autorisations d'emplois, est également présenté.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je tiens tout d'abord à dire que la commission des finances ne s'est pas prononcée sur les amendements que nous allons examiner, sauf naturellement sur ceux qu'elle présentera.

Cet amendement étant un amendement de conséquence, j'y suis, à titre personnel, favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-129.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-189, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

 

60.000.000

 

60.000.000

Équité sociale et territoriale et soutien

 

60.000.000

 

60.000.000

Aide à l'accès au logement

120.000.000

 

120.000.000

 

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

120.000.000 

120.000.000 

  120.000.000

  120.000.000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.

M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement, qui porte sur le délai de carence, est traditionnellement déposé par le groupe socialiste, mais il n'a pas rencontré jusqu'à présent le succès qu'il méritait.

En vertu de la législation en vigueur, l'allocation n'est actuellement versée, lorsque les droits sont ouverts, qu'à compter du premier jour du mois suivant l'entrée dans le logement. Ainsi, un ménage qui entrerait dans son logement la première semaine du mois perd quatre semaines d'allocations.

Or, jusqu'en 1995, le mois de carence n'existait pas, le ménage bénéficiait donc immédiatement du droit aux allocations. Par conséquent, cet amendement vise à revenir à la situation antérieure à 1995.

Cette mesure est d'autant plus justifiée que le premier mois de l'entrée dans un logement est souvent synonyme de dépenses importantes, qu'il s'agisse du versement du dépôt de garantie, dont nous verrons à l'avenir son évolution, des frais d'agence, d'ameublement ou de police d'assurance.

De plus, certaines catégories, comme les travailleurs saisonniers, par exemple, qui changent de logement à deux ou trois reprises dans l'année, se trouvent encore plus pénalisés que les autres. D'une manière générale, le mois de carence est, avec d'autres mesures, un frein à la mobilité professionnelle.

Pour contrecarrer cette disposition, certains bailleurs privés conviennent avec leurs locataires d'antidater les baux de quelques journées afin de ne pas les pénaliser et de leur permettre de percevoir l'allocation logement dès leur entrée dans les lieux. En revanche, les organismes de logements sociaux respectent scrupuleusement la date de signature des baux, et ce sont une fois de plus les personnes les plus défavorisées qui sont pénalisées.

Selon nos évaluations, cette mesure représenterait un coût budgétaire de 120 millions d'euros environ. Nous proposons de créditer l'action n° 1 du programme 109 « Aide à l'accès au logement » de 120 millions d'euros, prélevés pour moitié sur l'action  Programme national de rénovation urbaine » du programme 202 et, pour l'autre moitié, sur les exonérations de charges sociales en zone franche urbaine, c'est-à-dire sur les crédits de l'action n° 2 du programme 147.

Vous conviendrez, madame la ministre, que cette mesure pourrait sans doute améliorer le pouvoir d'achat des ménages modestes à un moment crucial de leur vie, puisqu'un déménagement est aussi, le plus souvent, synonyme de nouveau départ. (M. Jean Desessard applaudit.)

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le groupe socialiste a de la suite dans les idées ...

M. Jean-Pierre Caffet. C'est vrai ! Je vous l'accorde !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. ... puisqu'il défend cet amendement depuis l'examen du projet de loi de finances pour 2005, qui a institué la règle d'un mois de carence précédant le versement de l'APL, l'allocation personnalisée au logement, de l'ALS, l'allocation de logement sociale, et de l'ALF, l'allocation de logement à caractère familial.

Mais, les années précédentes, la proposition du groupe socialiste était déclarée irrecevable, car elle modifiait les textes applicables, augmentant ainsi les charges de l'État.

Cette année, vous avez essayé de trouver une autre voie, monsieur Caffet, pour parvenir à vos fins !

M. Thierry Repentin. Nous nous améliorons !

M. Jean-Pierre Caffet. Nous persévérons !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Vous proposez de déplacer les crédits sans modifier les articles des codes de la construction et de l'habitation et de la sécurité sociale, pour que votre amendement soit, en théorie, recevable.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Toutefois, celui-ci est inopérant puisque la règle n'est pas modifiée en droit.

De plus, le coût de cette mesure s'élève à 120 millions d'euros, que vous proposez de prélever sur le programme 202 « Rénovation urbaine » et sur le programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien ».

Compte tenu de mon intervention liminaire, notamment, je ne vois pas comment je pourrais émettre un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur le sénateur, c'est la première fois que j'ai à vous répondre.

M. Jean-Pierre Caffet. C'est la première fois que je vous interroge, madame la ministre !

Mme Christine Boutin, ministre. Je ne connais pas votre persévérance, mais je n'en doute pas !

Je dois dire que la question que vous posez me semble importante.

M. Thierry Repentin. C'est vrai !

Mme Christine Boutin, ministre. Du reste, lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère, j'ai effectivement été sollicitée par un certain nombre de personnes sur ce sujet.

Mais ce n'est pas pour autant que je vais vous donner satisfaction, monsieur le sénateur !

M. Jean-Pierre Caffet. Je n'en espère pas tant !

Mme Odette Terrade. C'est dommage !

Mme Christine Boutin, ministre. Cette question mérite d'être posée, mais il faut la replacer dans son contexte.

Actuellement, le dispositif comprend, comme vous le savez, de très nombreuses exceptions, puisque les ménages qui sont confrontés aux difficultés les plus importantes perçoivent l'aide personnelle dès le premier mois d'occupation du logement.

C'est le cas des personnes défavorisées qui étaient auparavant hébergées par un organisme percevant l'aide au logement temporaire, l'ALT. Le mois de carence ne s'applique pas non plus aux personnes qui étaient précédemment logées dans un logement insalubre et qui sont relogées. De même, les occupants de foyers de jeunes travailleurs, de foyers de travailleurs migrants ou de résidences sociales perçoivent l'aide personnalisée au logement dès le premier jour. Enfin, cette mesure ne s'applique pas non plus en cas de déménagement, lorsque le ménage bénéficiaire percevait déjà une aide au titre de son ancien logement.

Comme l'a dit excellemment M. le rapporteur spécial, il convient de souligner que la suppression du mois de carence se traduirait par une augmentation des charges publiques très importante, puisqu'elle serait de l'ordre de 150 millions d'euros au titre du budget et de 230 millions d'euros au titre des prestations.

Il est aujourd'hui absolument impossible d'envisager le financement que vous prévoyez, monsieur le sénateur, car il constituerait une charge pour l'État.

Tout en comprenant votre préoccupation, j'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Décidément, la LOLF est un exercice difficile. Les membres du groupe CRC sont finalement assez fiers d'avoir refusé de voter, en 2001, en faveur de la loi organique.

Mme Odette Terrade. En effet, avec cet amendement, notre collègue Thierry Repentin se trouve contraint, pour respecter les règles de la loi organique, d'amputer de manière assez sensible les moyens accordés aux programmes « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien », afin de pouvoir abonder le financement des aides personnelles au logement.

Au-delà de cet amendement, se pose en filigrane la question récurrente de l'insuffisance de la participation budgétaire de l'État dans le financement des aides personnelles, insuffisance dont nous retrouvons d'ailleurs la trace dans le présent budget avec l'article 60, destiné à « raboter » la hausse des crédits ouverts en loi de finances initiale sur le programme concerné.

Le financement des aides à la personne est de plus en plus souvent confié à d'autres intervenants que l'État. De fait, la Caisse nationale d'allocations familiales finance de plus en plus le dispositif des aides personnelles au logement, alors que la parité de la participation de l'État était jusque là assurée.

On notera d'ailleurs que le mouvement de réduction de la part de l'État a été accompagné de deux phénomènes : d'une part, la réduction progressive de la part des aides consacrées aux familles accédant à la propriété et, d'autre part, l'élévation du taux d'effort des ménages, liée à la moindre revalorisation des aides avant la création de l'indice de révision des loyers.

Nous sommes en présence d'un crédit de 4, 991 milliards d'euros cette année, alors qu'il était supérieur à 5,1 milliards voilà deux ans, ce qui signifie qu'il stagne.

Notre collègue nous propose de relever le niveau du financement des aides à la personne, accroissant, de fait, leur pouvoir d'achat. Nous souscrivons à cette proposition, mais nous nous demandons, madame la ministre, comment vous allez faire pour tenir la promesse du Président de la République d'augmenter de trois points le niveau des aides personnelles au 1er janvier, en contractant les crédits ouverts. Mais, avec 520 millions de crédits annulés sur la mission en 2007, nous commençons à deviner...

Oui, dans le droit-fil des recommandations du Médiateur de la République, il faut augmenter l'APL et l'ALS, et permettre notamment aux exclus de percevoir l'allocation mensuelle !

Oui, il faut renforcer l'efficacité des aides au logement, en réduisant sensiblement le taux d'effort des familles, qui n'a cessé de croître !

Oui, il faut prendre plus en compte la réalité des charges locatives, comme il convient aussi de se demander comment nous pouvons réduire le montant des loyers. La maîtrise des loyers et des charges, y compris dans le secteur locatif social, impose d'autres choix et exige de toutes autres réflexions que celles qui président encore pour l'heure à la politique du logement !

Pour tous ces motifs, nous voterons l'amendement du groupe socialiste.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Madame la ministre, vous avez indiqué que c'était la première fois que vous répondiez à M. Caffet. C'est aussi la première fois que je discute avec vous, et j'apprécie votre manière de débattre !

Vous nous avez fait une confidence, en expliquant que les 93 000 hébergements d'urgence ne seront pas suffisants.

Mme Christine Boutin, ministre. Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Jean Desessard. Ensuite, vous nous avez confié qu'en arrivant au ministère vous vous êtes interrogée sur le délai de carence. Fort bien !

Enfin, vous nous avez indiqué qu'un certain nombre de catégories en sont exemptées.

Mme Christine Boutin, ministre. Oui !

M. Jean Desessard. Mais, dans le même temps, comme Mme la secrétaire d'État d'ailleurs, vous prétendez vouloir simplifier.

À mes yeux, la meilleure manière de simplifier consiste à mettre tout le monde au même niveau, et donc à étendre cette exemption à toutes les personnes concernées !

Mais, madame la ministre, vous avez omis de nous faire la confidence la plus importante : toutes les actions que vous avez envie de conduire, vous n'allez pas les mener ! Et pourquoi ? Parce que vous n'avez pas l'argent nécessaire !

Certes, vous nous avez fait une grande confidence en nous confiant que vous auriez bien envie de faire une autre politique du logement,...

Mme Christine Boutin, ministre. Non, non ! Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Jean Desessard. ... que le groupe socialiste, les Verts et le groupe CRC avaient de bonnes idées ! Mais vous ne pouvez les satisfaire parce que vous n'avez pas d'argent à y consacrer !

Voilà ce que vous nous avez dit ! Quelle confidence : nous savions déjà que vous aviez de bonnes intentions, mais pas de crédits !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Caffet. Je ne veux pas allonger les débats, mais je tiens à remercier Mme la ministre de sa réponse.

En effet, depuis 2005, c'est la première fois qu'un ministre estime que cet amendement présente un véritable intérêt. Auparavant, il était souvent balayé d'un revers de la main.

Certes, je comprends bien votre souci financier - M. Desessard a été beaucoup plus éloquent que moi en la matière ! (Sourires.) - mais il serait intéressant que la représentation parlementaire sache combien de personnes sont susceptibles d'être exemptées de ce délai de carence.

Vous estimez le coût de la mesure que je propose à 150 millions d'euros, mais j'ai le sentiment que cela ne concernerait qu'une part relativement faible des personnes éligibles à ces aides.

Je comprends que vous ne puissiez nous communiquer ce chiffrage ce soir, mais il serait souhaitable que nous soyons éclairés sur ce point.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-189.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-188 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Rénovation urbaine

15.000.000

15.000.000

Équité sociale et territoriale et soutien

Aide à l'accès au logement

15.000.000

15.000.000

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

TOTAL

15.000.000

15.000.000

15.000.000

15.000.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thierry Repentin

M. Thierry Repentin. Perseverare diabolicum ; mais nous persévérons tout de même !

Pour revenir un instant sur l'amendement qui vient d'être repoussé, je veux dire qu'en le déposant cette année nous avions un peu d'espoir...Mais il faut en parler au passé !

Madame la ministre, le dispositif relatif au mois de carence n'existait pas avant 1995 et c'est aussi cette année-là que M. Juppé a supprimé la déductibilité des intérêts d'emprunt, estimant ce mécanisme économiquement inopérant.

La déductibilité des intérêts d'emprunt étant rétablie cette année, nous nous sommes dit que, peut-être, le mois de carence serait également supprimé par le Gouvernement. Certes, le parallèle était quelque peu audacieux, mais nous espérions avoir une chance supplémentaire. Nous verrons donc l'année prochaine ! (Sourires.)

J'en viens à l'amendement n° II-188 rectifié.

Actuellement, en vertu du droit en vigueur, lorsque les droits ouverts en matière d'APL sont inférieurs à 15 euros par mois, ils ne sont pas versés à leur bénéficiaire.

Nous proposons de supprimer purement et simplement cette règle dite du seuil de non-versement, en quelque sorte une franchise, afin que tout allocataire, dès lors que son droit à recevoir une aide a été reconnu, puisse en bénéficier pour diminuer le poids du logement dans son budget.

D'après les évaluations faites par les auteurs du présent amendement, l'adoption d'une telle mesure présenterait un coût budgétaire somme toute modeste de 15 millions d'euros. D'après les données statistiques émanant cette fois de la CNAF, à la fin de l'année 2004, un peu plus de 100 000 allocataires sont passés en deçà du seuil de non-versement, quand il a été relevé de 15 euros à 24 euros en 2003. En y ajoutant les allocataires du régime agricole, ce sont environ 120 000 ménages qui auraient bénéficié de la mesure inverse de réduction de ce seuil de 24 euros à 15 euros en application de plusieurs arrêtés publiés le 23 décembre 2006, sous le gouvernement précédent - c'était une bonne mesure ! -, suite à un long combat mené dans cet hémicycle par le groupe auquel j'appartiens.

En fait, 15 euros par mois, c'est peu, mais, 180 euros par an, c'est une somme, surtout pour des familles qui peinent à boucler leurs fins de mois et qui ont perdu, entre 2002 et 2006, plus de 10 % de pouvoir d'achat, du fait de l'absence, ces années-là, de revalorisation des aides au logement.

Aussi, l'amendement que nous vous proposons ce soir vise à transférer 15 millions d'euros prélevés sur le programme national de rénovation urbaine, le PNRU, vers les crédits des aides personnelles au logement, afin de financer la suppression de ce seuil de non-versement.

Chers collègues, c'est pour vous l'occasion de prendre une décision concrète en faveur du pouvoir d'achat. N'est-ce pas une priorité réaffirmée tout récemment encore par le Président de la République ?

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je vous remercie tout d'abord d'avoir salué indirectement les auteurs de cet amendement, à savoir Roger Karoutchi et moi-même, qui, voté l'année dernière par le Sénat, avait permis d'abaisser le seuil de non-versement de 24 euros à 15 euros.

M. Thierry Repentin. J'ai dit que c'était une bonne mesure !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Et je tenais à vous en remercier !

Cela dit, revenir au paiement à partir du premier euro a un coût. Vous l'estimez à 15 millions d'euros, mais encore faut-il les trouver !

Et le coût du versement ne risque-t-il pas d'être supérieur à la somme versée si celle-ci n'est que de un, deux ou trois euros ?

M. Jean Desessard. Non ! C'était vrai du temps où les fiches étaient dressées à la main, mais cela ne l'est plus aujourd'hui avec l'informatique !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Même avec l'informatique, monsieur Desessard, cela a un coût ! La mesure me semble donc assez déraisonnable.

Mme Odette Terrade. L'APL n'est versée qu'une fois ou deux par an, en gros !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Faudrait-il encore trouver les 15 millions d'euros !

Mme Odette Terrade. Mais pour les familles, c'est important !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je le répète, il faut encore trouver de quoi assurer le financement de la mesure. De ce point de vue, le problème reste entier.

M. Jean Desessard. Moi, quand je paie une amende, c'est 12 euros !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il n'est de toute manière pas question de « déshabiller » le programme national de rénovation urbaine !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Repentin, je m'étonne que vous proposiez de prélever 15 millions d'euros sur les crédits destinés à la rénovation urbaine, car une telle disposition, en réduisant les crédits à 459 millions d'euros, les ramène sous le seuil minimal de 465 millions d'euros fixé par la loi de 2003 !

De plus, cette mesure conduirait naturellement à retarder un certain nombre d'opérations qui sont d'ores et déjà programmées en faveur de populations qui connaissent des conditions de vie très difficiles.

Cette proposition est donc absolument inacceptable. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. C'est quand même incroyable : on doit de l'argent aux gens, mais on ne leur donne pas !

Moi, j'ai une proposition à vous faire, madame la secrétaire d'État chargée des banlieues, des faubourgs et de la ville : pourquoi ne pas étendre cette règle du non-versement à tous les jeunes des quartiers ? Vous devez 15 euros ? Inutile de les payer, cela crée plus de problèmes que cela n'en résout, car finalement cela coûte plus cher.

Vous prenez un café le matin ? S'il vous en coûte moins de 15 euros, vous êtes tranquille ; vous n'avez rien à payer. Vous allez acheter des journaux ? N'en prenez que quelques-uns, afin de rester en deçà des 15 euros !

J'arrête là ma démonstration : vous aurez compris que l'on ne peut pas raisonner de cette façon-là !

Quant à l'argument du coût du traitement de ces petits versements, il était peut-être valable du temps des fiches établies à la main, mais il ne l'est plus maintenant. Je pense même qu'opérer une distinction entre les petits versements et les autres coûte plus cher. C'est d'ailleurs souvent le cas, lors de la création d'un fichier, lorsqu'on veut faire une différence entre ceux qui ont droit à quelque chose et les autres.

Pensez au temps qu'il vous faut, mes chers collègues, quand vous organisez une soirée, pour savoir qui vous invitez et qui vous n'invitez pas ! (Sourires.) Encore une fois, je suis sûr que cela coûte plus cher d'établir une différence.

Outre donc que ce système est injuste, il signifie que l'État encourage les impayés. Si vous étendiez ce principe à l'ensemble de la société, comme je vous l'ai montré tout à l'heure, il faudrait fixer le prix minimal de chaque produit à 15 euros. C'est aberrant !

Cela dit, je reconnais que la mesure a été instaurée sous un gouvernement socialiste. Ce fut une petite erreur... (Sourires.) Mais ce n'est pas une raison pour recommencer !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-188 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-191 rectifié bis, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Rénovation urbaine

Équité sociale et territoriale et soutien

40 000 000

40 000 000

Aide à l'accès au logement

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

40 000 000

40 000 000

TOTAL

40 000 000

40 000 000

40 000 000

40 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Madame la présidente, permettez-moi tout d'abord de répondre à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous n'allons pas nous répondre d'un amendement à l'autre !

M. Thierry Repentin. La LOLF nous contraint à trouver des solutions dont personne ici ne peut dire qu'elles sont positives. (M. Jean Desessard applaudit.) J'ai le sentiment qu'en adoptant cette réforme ni le Gouvernement ni les parlementaires n'ont trouvé les solutions susceptibles de fournir au législateur les marges de manoeuvre dont il a besoin pour accomplir sa tâche.

L'an dernier, lorsque vous avez vous-même fait passer le seuil de 24 euros à 15 euros, nous avons trouvé l'argent, tout comme, ensemble, dans le cadre de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, nous avons trouvé des marges de manoeuvre financières. Mais visiblement, nous ne savons plus en trouver cette année pour qu'au 1er janvier prochain les aides personnalisées au logement soient revalorisées.

Par le passé, nous pouvions faire des choses que nous ne pouvons plus faire aujourd'hui. C'est un constat sur lequel nous devrons collectivement nous interroger.

J'en viens à cet amendement, qui a un double objet.

Le premier est de doubler les dotations consacrées à l'hébergement d'urgence, c'est-à-dire aux places dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS.

Suite à la reconnaissance du droit au logement par la loi du 5 mars 2007, il est nécessaire aujourd'hui de créer des places dans les CHRS, qui proposent un accompagnement social des publics concernés.

Pour mémoire, le plan d'action renforcé pour les sans-abri, le PARSA, annoncé le 8 janvier 2007, prévoyait la création ou la transformation de 27 100 places d'hébergement ou de logement en 2007 pour les sans-abri. En fait, seules 14 000 devraient être réalisées d'ici à la fin de l'année 2007.

Selon l'analyse de l'association Les Enfants de Don Quichotte, les crédits de paiement consacrés à l'hébergement seraient en recul de 3 % par rapport à l'an dernier et, en tout état de cause, ils seraient insuffisants pour atteindre les objectifs du PARSA et améliorer les conditions d'accueil des sans-abri.

Les crédits consacrés à l'urgence sont d'ailleurs difficiles à repérer, puisqu'ils sont ventilés aussi sur la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », dont les crédits ont déjà été examinés. Je n'y reviens pas, le rapporteur spécial l'ayant très bien expliqué dans son intervention liminaire.

Pour l'amélioration des places d'hébergement existantes, dans le budget de la mission « Ville et logement », seuls 15 millions d'euros sont consacrés aux subventions d'investissement pour la création de nouvelles places d'hébergement. C'est évidemment bien insuffisant. La majorité en convient elle-même, puisqu'un amendement visant à doubler ces crédits avait été déposé à l'Assemblée nationale. Malheureusement, il visait à prendre ces 15 millions d'euros sur les crédits consacrés au personnel chargé de la mise en oeuvre du droit au logement. À juste titre, madame la ministre, vous avez émis un avis défavorable sur une telle ventilation nouvelle.

Ce soir, le groupe socialiste propose de ponctionner les moyens consacrés à l'action n° 3 du programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien » intitulée « Stratégie, ressources et évaluation », laquelle a pour objet de financer les multiples dispositifs d'animation de la politique de la ville.

L'amendement vise également à doubler les crédits destinés à l'action n° 3 du programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement » intitulée « Lutte contre l'habitat indigne ».

Cette action est aujourd'hui dotée de 25 millions d'euros. Nous vous proposons tout simplement de la doubler, notamment pour les opérations de résorption de l'habitat insalubre et les opérations de relogement des familles.

Les associations, au nombre desquels la Fondation Abbé Pierre, mais aussi le Secours Catholique, ATD Quart Monde et Les Enfants de Don Quichotte, le réclament. Le Premier ministre lui-même aurait admis qu'il était favorable à une telle augmentation de ces crédits. Reste que, pour lui, nul besoin de modifier le PLF, puisqu'il pourrait envisager de prendre ces millions sur le budget de l'ANAH...

Nous ne souhaitons pas, nous, socialistes, que l'ANAH perde ces crédits, déjà légèrement inférieurs à ceux de l'an passé dans ce budget. Comme vous le savez, l'ANAH a plutôt vocation à monter en puissance, notamment pour accompagner les propriétaires privés. Nous ne souhaitons donc pas qu'elle réduise son engagement. En revanche, nous sommes circonspects sur le montant des dépenses consacrées à l'action n° 2 « Revitalisation économique et emploi »

Vous le savez, madame la ministre, la priorité est désormais à la prise de responsabilités, suite à de multiples annonces et à la menace de nouveaux campements dans nos grandes villes. C'est pourquoi je ne désespère pas que vous vous montriez favorable à cette double proposition.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. S'agissant du plan d'action renforcé pour les sans-abri, Mme la ministre vous a déjà répondu. Je n'y reviens donc pas.

Pour ce qui est des 40 millions, nous connaissons les contraintes de la LOLF. Je les vis comme tous les autres parlementaires ! MM. Migaud et Lambert, qui, par un travail commun, avaient d'une certaine manière fait progresser l'organisation du débat budgétaire, sont sans doute également conscients des problèmes que cela nous pose. En tout cas, c'est la règle, et nous sommes bien obligés de nous y soumettre.

Quant à ponctionner des crédits sur le programme « Équité sociale et territoriale et soutien », bien évidemment, je ne peux y être favorable. Tout à l'heure, vous disiez que les budgets de communication étaient trop importants. Cela m'étonnerait tout de même beaucoup que ces 40 millions d'euros soient uniquement consacrés à de la communication ! Je suis tout à fait d'accord pour que la Délégation interministérielle à la ville se centre sur le pilotage et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances sur l'opérationnel. Mais il faut laisser à la DIV ses moyens ! Il serait totalement déraisonnable de les supprimer comme vous voulez le faire.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Comme vient de le dire excellemment le rapporteur spécial, en aucun cas il n'est possible de diminuer les crédits des programmes « Équité sociale et territoriale et soutien » de la politique de la ville. C'est même invraisemblable de l'envisager !

De plus, l'essentiel des crédits de ce programme sont contractualisés dans les contrats urbains de cohésion sociale, CUCS, qui viennent d'être signés, en 2007. Or, naturellement, l'État entend honorer sa signature.

En dernier lieu, le rapport de la Cour des comptes réalisé à la demande de votre assemblée préconise de renforcer l'évaluation au titre de ce programme.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme  Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Cet amendement présenté dans le même esprit que celui qui porte sur les aides personnelles au logement participe des orientations que nous avions déjà défendues lors de la discussion de la loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

Ce qui est à porter au crédit de la proposition qui nous est faite est, bien entendu, le contenu même du rapport du comité de suivi de la loi de mars 2007.

Dans son premier rapport, le comité de suivi de la loi sur le droit au logement opposable souligne en effet la nécessité d'inscrire l'hébergement d'urgence dans les parcours d'insertion et d'exercice du droit au logement, ce qui suppose des moyens financiers adaptés, moyens financiers qui ne peuvent qu'aller de pair avec les objectifs affichés de réalisation de places de CHRS, entre autres.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-191 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-47 rectifié, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

3.000.000

3.000.000

Équité sociale et territoriale et soutien

17.500.000

17.500.000

Aide à l'accès au logement

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

14.500.000

14.500.000

TOTAL

17.500.000

17.500.000

17.500.000

17.500.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il s'agissait d'un amendement d'appel qui visait à la clarification des rôles respectifs de la DIV, la Délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain, et de l'ACSé, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances.

À de nombreuses reprises, nous avions souhaité que les crédits expérimentaux qui étaient maintenus en gestion auprès de la DIV puissent être transférés à l'ACSé, de même que ceux qui étaient destinés à l'outre-mer.

Vous nous avez annoncé, madame la ministre, que vous y étiez favorable. Cet amendement n'ayant donc plus lieu d'être, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° II-47 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-115 rectifié, présenté par MM.  Dallier et P. André, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

2.704.651

2.704.651

Équité sociale et territoriale et soutien

11.339.632

11.339.632

Aide à l'accès au logement

 

14.044.283

 

14.044.283

Développement et amélioration de l'offre de logement

Dont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

14.044.283

14.044.283

14.044.283

14.044.283

SOLDE

0

0

La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Cet amendement, qui est cosigné par Pierre André, n'est, lui, absolument pas un amendement d'appel !

Je l'ai écrit dans le rapport et je l'ai dit à la tribune, l'Assemblée nationale, en seconde délibération, a « raboté » les crédits du programme 147 « Équité sociale et territoriale et soutien » et du programme 202 « Rénovation urbaine » respectivement de 11 339 632 millions d'euros et de 2 704 651 millions d'euros, ce qui ne nous paraît pas acceptable.

Les crédits de la politique de la ville ne peuvent pas servir de variable d'ajustement, Jean-Louis Borloo nous l'avait toujours dit ici et il avait, me semble-t-il, parfaitement raison. C'est pourquoi nous proposons d'en revenir à la proposition initiale du Gouvernement, qui nous avait semblé une base pertinente lors de la présentation de ce budget.

Rappelons que la hausse des crédits de paiement affectés au programme 147 était déjà relativement modeste. Par conséquent, la diminution qui a été adoptée par l'Assemblée nationale, un vendredi soir, très tard, ne peut pas être acceptée.

Je rappelle que le programme 147 permet de financer, notamment, les associations, les équipes de réussite éducative, les ateliers santé-ville et les adultes relais.

Madame la ministre, je me permets de vous reposer la question, puisque vous n'y avez pas répondu : l'augmentation du nombre de contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, qui sont plus nombreux que les précédents contrats de ville - on dénombre en effet 144 nouveaux contrats - entraîne-elle une dilution des crédits ? Si tel est le cas, le fait de « raboter » encore les crédits de paiement du programme 147 serait, à mon avis, une grave erreur.

Mes chers collègues, nous avons déposé cet amendement Pierre André et moi-même à titre personnel. Je souhaite véritablement que le Sénat l'adopte, même s'il nous faut ensuite trouver les moyens de compenser les sommes que nous vous proposons d'inscrire en faveur du programme 147.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le rapporteur spécial Dallier pense que l'amendement des sénateurs André et Dallier est excellent ! (Sourires.)

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. C'est limite !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Dallier, je vous répondrai un peu longuement, car votre question est importante et mérite des précisions.

Le programme « Aide à l'accès au logement » supporte quasiment exclusivement la contribution de l'État au financement des aides personnalisées au logement, qui bénéficient à tous les ménages modestes remplissant certaines conditions de ressources et de loyers.

Les aides personnelles au logement constituant des dépenses obligatoires qui doivent impérativement être financées, elles nécessitent des ressources pérennes et croissantes pour financer leur revalorisation.

Le montant des crédits inscrits en 2008 sur ce programme a été déterminé en ce sens, en tenant compte tant de l'évolution tendancielle de ces prestations que de leur revalorisation, qui, comme le Premier ministre s'y est engagé, atteindra 2,76 % en 2008. Il s'agit d'une mesure concrète en faveur du pouvoir d'achat des ménages les plus modestes.

Dans ce contexte, vous comprendrez qu'il n'est pas souhaitable de réduire les crédits du programme « Aide à l'accès au logement », sauf à ne pas compenser à la sécurité sociale le coût réel des aides distribuées. Au demeurant, je connais l'attachement de la commission des finances à la sincérité de la budgétisation.

Abonder les crédits de la politique de ville est, naturellement, un souhait légitime, car ceux-ci doivent être à la hauteur de nos ambitions. Croyez bien que Mme Amara et moi-même y veillons tout particulièrement. Toutefois, il faut rappeler qu'une grande partie des crédits dédiés à la rénovation urbaine n'ont pas été consommés en 2007 et que les dotations des programmes 147 et 202 pour 2008 prévoient d'ores et déjà de soutenir la montée en puissance de la politique de la ville.

Par ailleurs, j'aimerais relativiser la portée des annulations votées en seconde délibération par l'Assemblée nationale. Dans leur ensemble, celles-ci visaient à gager l'ouverture de crédits découlant des différents votes de l'Assemblée nationale. Elles ont été réparties sur l'ensemble des programmes du budget général, hormis ceux qui comportent essentiellement des dépenses inéluctables, comme c'est le cas pour le programme « Aide à l'accès au logement », ou ceux qui retracent des politiques tout à fait particulières, notamment le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables ».

J'ajoute que ces réductions s'imputeront sur les crédits mis en réserve et qu'elles n'amputeront pas, par conséquent, les marges de manoeuvre des gestionnaires.

Vous avez également évoqué, monsieur Dallier, les contrats urbains de cohésion sociale. Si 144 nouveaux CUCS ont bien été signés au titre de la politique de la ville, ils ne représentent que 7 % des communes et 2 % à 3 % des crédits.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous serais reconnaissante de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Dallier, l'amendement n° II-115 rectifié est-il maintenu ?

M. Philippe Dallier. Avant d'en décider, je dois vous dire, madame la ministre, que je n'ai pas très bien compris l'explication que vous venez de me donner.

En effet, par rapport aux territoires que couvraient les anciens contrats de ville, le présent dispositif de contractualisation est plus vaste puisque l'on dénombre déjà 144 CUCS supplémentaires. Cet élargissement à des territoires non couverts précédemment doit, selon moi, susciter des dépenses de subventionnement nouvelles. Or vous êtes en train de me dire que, avec moins de crédits de paiement en 2008 qu'en 2007, on peut prendre en charge 144 CUCS supplémentaires !

À défaut de preuves concrètes précisant, CUCS par CUCS, les sommes à imputer, je ne peux pas comprendre l'argument qui m'est opposé. Ce n'est pas faute d'avoir demandé ces éléments au cours des auditions auxquelles j'ai procédé. Mais je ne les ai pas obtenus ! Je suis donc aujourd'hui tout à fait fondé à penser que les crédits du programme 147 seront, avec la signature de ces 144 CUCS, en quelque sorte dilués. Aucun élément ne me permet de penser le contraire.

De surcroît, madame la ministre, l'Assemblée nationale en votant, en seconde délibération, une diminution des crédits du programme 147, a osé faire ce que personne n'avait fait avant : depuis 2005, je me permets de le dire, c'est la première fois que ces crédits sont remis en cause. Je sais que Jean-Louis Borloo devait être très attentif à cette question. Peut-être certains, à Bercy, considèrent-ils que l'on peut d'un clic sur un tableau Excel enlever tel pourcentage d'un programme ! Or nous avons fait les calculs, et il en ressort que le programme 147 est proportionnellement plus touché que beaucoup d'autres, avec des crédits en diminution de 1,5 %, si mes souvenirs sont exacts.

Je ne sais pas comment on procède quand il s'agit de rééquilibrer le budget, mais je ne comprends pas la logique politique qui consiste à diminuer les crédits de la politique de la ville à l'heure où, chacun le sait, le dossier est d'une particulière actualité.

Je ne vous demande pas un effort budgétaire trop important, madame la ministre. Bien évidemment, les aides personnelles au logement seront revalorisées, vous avez raison de le rappeler, de 2,76 %. Mais vous savez bien que ces crédits sont purement évaluatifs, puisque, de toute façon, nous avons l'obligation de répondre à la demande. Il est donc très difficile d'évaluer la somme nécessaire en début d'année, puisque le nombre d'ayants droit, par exemple, varie en cours d'exercice.

Par conséquent, la suppression de ces 14 millions d'euros du programme « Aide à l'accès au logement » ne conduit absolument pas à remettre en cause ces aides personnelles. Elles sont là ; elles existent : le Gouvernement devra bien évidemment faire le nécessaire pour assurer leur paiement à tous ceux qui y ont droit. Les barèmes sont clairs et nets ; ces aides ne sont pas attribuées à la tête du client !

Ce n'est pas un simple problème de gestion, c'est un vrai problème politique. Tout comme je l'ai fait, mercredi soir, à propos de la dotation de solidarité urbaine, j'en appelle à la majorité, en lui disant, même si cela peut déplaire, que le fait de ne pas abonder les crédits du programme 147 de ces 14 millions d'euros constitue une grave erreur politique. Je ne comprends pas la logique qui veut que les crédits baissent, alors que le nombre de CUCS augmente.

J'aimerais que Pierre André s'exprime également pour me soutenir. S'il a cosigné cet amendement, vous pouvez nous faire confiance, madame la ministre, c'est pour de bonnes raisons. L'effort budgétaire demandé n'est pas très important ; il faut que nous le fassions !

Je ne peux donc pas retirer l'amendement n° II-115 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Je conçois que vous n'ayez pas compris ma réponse sur les CUCS, laquelle, je le reconnais, manquait de précision.

D'ores et déjà, je m'engage à vous faire parvenir une liste très précise des CUCS.

Les 144 nouveaux contrats concernent de toutes petites communes, qui ne représentent que 7 % de l'ensemble, pour un montant total de 2 %, ce qui est très peu. Franchement, il n'y a pas de problème particulier dans cette affaire.

En revanche, monsieur Dallier, je ne peux pas vous laisser sous-entendre que le Gouvernement, notamment son ministre du logement et de la ville, ne serait pas attentif aux besoins de budgétisation de la politique de la ville en général et du programme 147 en particulier. Cela, je ne peux pas l'accepter !

En effet, mes convictions sociales et humanistes font que je n'aurais jamais laissé passer cette modification de la répartition des crédits sans de solides raisons ! Et il en va de même pour Mme Amara.

Figurez-vous, monsieur Dallier, que nous voulons que les budgets soient sincères, raison pour laquelle nous sommes en train de les réexaminer avec le souci d'approcher la réalité des choses. Si nous disposons cette année de financements pour le programme 147, c'est parce qu'il existe des réserves, l'ACSé ayant moins dépensé, compte tenu de la lenteur qui affecte la réalisation de ses constructions.

Si ces financements n'existaient pas, je n'aurais pas accepté la mesure votée par l'Assemblée nationale. Permettez-moi de vous le dire, ce n'est pas Bercy qui a modifié des tableaux sur Excel !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je ne voudrais pas, madame la ministre, que vous preniez en mauvaise part ce que je vous ai dit. Pour autant, je ne comprends toujours pas !

Vous nous dites que ces 144 nouveaux CUCS représentent 7 % des communes et 2 % ou 3% des crédits. Mais raison de plus, madame la ministre ! Comment pouvez-vous accepter de voir diminuer les crédits de paiement du programme 147, alors que la population concernée par ces contrats est en augmentation ?

Je suis désolé, mais, avec la meilleure volonté du monde et avec toute la solidarité à l'endroit de la majorité que l'on peut imaginer, je ne comprends toujours pas ! Non pas que je sois buté sur le sujet, ...

M. Jean Desessard. Si ! C'est l'entêtement du visionnaire !

M. Philippe Dallier. ... mais, si la démonstration était claire, elle s'imposerait à tous !

Je souhaite cependant rendre hommage à l'ACSé et à votre ministère, puisque, cette année, pour la première fois, les associations percevront, dans les trois premiers mois de l'année, les subventions auxquelles elles ont droit.

Mais imaginez ce qui va se passer avec ce nombre de CUCS supplémentaires...

Mme Christine Boutin, ministre. Mais non !

M. Philippe Dallier. Que votre administration me démontre le contraire, madame la ministre ! Je suis navré, je n'ai pas obtenu ces informations, bien que je les aie demandées avant et pendant mes auditions, et encore aujourd'hui. Je me dois d'agir en parlementaire responsable et de veiller, moi aussi, madame la ministre, à la sincérité des budgets. Dans cette optique, je demande simplement que l'on en revienne aux crédits que vous aviez présentés avant qu'ils ne soient rabotés par l'Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Pardonnez-moi d'intervenir dans ces querelles de famille, de famille politique, s'entend (Sourires.), mais, après tout, elles nous concernent.

M. Dallier nous intéresse à plusieurs titres : il est sénateur-maire et rapporteur spécial de la mission « Ville et logement » pour 2008. Les ministres ont jugé son rapport excellent, fiable, crédible, et allant dans le bon sens. En outre, Mme la secrétaire d'État a dit qu'elle écouterait les élus des villes de banlieue et qu'elle était prête à prendre en considération leurs arguments.

Donc, il n'est pas illégitime de reprendre l'argumentaire de M. Dallier à l'appui de son amendement : « Ces crédits avaient pourtant fait l'objet d'un effort particulier maintenu depuis les événements de l'automne 2005. Alors que le Gouvernement annonce un ?plan Marshall des banlieues ? pour le début de l'année 2008, ces restrictions budgétaires, auxquelles s'ajoute la moindre augmentation de la dotation de solidarité urbaine [...] constituent un signe négatif qui sera perçu comme un recul de la politique de l'État en faveur des quartiers les plus en difficulté. »

Tout est dit !

M. Jean-Pierre Caffet. Il a raison !

M. Jean Desessard. Merci, monsieur Dallier, d'avoir été aussi clairvoyant. ! J'avais dit à peu près la même chose lors de mon intervention liminaire, mais vous m'avez surpassé non seulement en fougue mais surtout en autorité puisque, en tant que rapporteur spécial et membre de la majorité présidentielle, vous êtes bien placé pour parler de ces sujets. Merci encore de l'avoir fait, mon cher collègue.

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, comme je l'ai souligné dans mon intervention liminaire, l'un des aspects délicats des crédits de la mission « Ville et logement » tient au fait qu'ils sont depuis de trop longues années sujets à régulation budgétaire.

La régulation budgétaire signifie, notamment, que l'on regarde, au détour du collectif budgétaire de fin d'année, quel est l'état de consommation des crédits de paiement autorisés en loi de finances initiale et combien d'économies dites de « constatation » on peut réaliser.

Dans les faits, s'agissant de cette mission, nous sommes loin de la simple constatation de l'inutilité des « réserves de précaution ».

Tout d'abord, cela vient d'être dit, l'État ne respecte pas les termes de la loi d'orientation et de programmation pour la ville d'août 2003.

Je le rappelle, l'article 7 de cette loi disposait que, entre 2004 et 2008, l'État devait engager chaque année 465 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement. Or aucun des budgets votés depuis cette loi de programmation n'a respecté cet engagement, et les crédits pour 2008 consacrent l'abandon pur et simple de cette obligation !

Les amendements portant sur les crédits de la mission ont donc un défaut - n'en déplaise aux auteurs -, celui d'organiser le partage de la misère, faute pour Gilles de Robien, puis Jean-Louis Borloo, et désormais vous-même, madame la ministre, d'avoir pu respecter la parole de l'État !

Ensuite, la rareté des crédits de l'État a une conséquence : elle prive l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, d'une partie de ses moyens, malgré ce que peut en dire notre collègue Jean-Paul Alduy.

En dépit du rythme, en apparence satisfaisant, de la poursuite du programme de rénovation urbaine, nous sommes encore loin du compte.

Ainsi, plus de la moitié des constructions de logements locatifs sociaux - cet ensemble ne constituant au demeurant qu'environ 11 % des 421 000 logements construits en 2006 -ne fait que remplacer les logements sociaux détruits dans le cadre des opérations de rénovation urbaine ou vendus à leurs occupants.

Le parc locatif social, qui est censé répondre aux besoins croissants et urgents des mal-logés, augmente donc de manière particulièrement faible avec, pour l'année 2005, par exemple, un accroissement de 24 200 unités seulement !

Comment veut-on répondre aux 1,3 million de demandeurs de logements avec un parc progressant de moins de 25 000 logements par an ? Dans ces conditions, il faudrait cinquante ans pour éponger le déficit de construction !

Tailler dans les crédits de l'ANRU, comme on a taillé hier dans la dotation de solidarité urbaine, c'est laisser les élus locaux des communes de banlieue aux prises avec les difficultés des habitants des quartiers !

C'est laisser ces habitants démunis, malgré l'abondance de l'argent public, face à la crise du logement, aux discriminations à l'embauche, aux inégalités de formation et d'éducation !

C'est organiser le saupoudrage au petit bonheur la chance des aides publiques, ce qui est d'autant plus vérifiable que les financements de l'ANRU sont d'importance variable...Par exemple, à Meaux, M. Jean-François Copé a obtenu un financement de l'ANRU à hauteur de 64 % de son programme destiné à la rénovation urbaine sur la Pierre Collinet et sur Beauval, alors que le programme portant sur la cité des Quatre Mille, à la Courneuve, n'est financé par l'Agence qu'à hauteur de 35 %.

De même, le taux de subvention de l'ANRU est de moins de 30 %, par exemple, pour un programme que je connais quelque peu, celui du Grand Ensemble d'Orly.

Dès lors, nous n'entrerons pas dans les arcanes de cette misère partagée qui est organisée par l'amendement no II-115 rectifié, ainsi que par les amendements précédents nos II-47 rectifié et II-129.

M. Philippe Dallier. La « misère partagée » ! J'aurai tout entendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre André, pour explication de vote.

M. Pierre André. Tout d'abord, je veux dire à Mme la ministre que pas une seconde nous ne mettons en doute sa volonté de mener à bien cette politique de la ville, et nous lui réaffirmons notre soutien plein et entier.

Ensuite, je demanderai à mon collègue Philippe Dallier de garder son calme, surtout à cette heure tardive. Ce sera mieux pour sa santé, et, de toute manière, il ne sert à rien de s'énerver. (Sourires.)

Madame la ministre, nous pensions vous aider en retournant à la proposition initiale du Gouvernement dans le cadre de la discussion budgétaire.

Nous regrettons l'existence d'une forte sous-consommation des crédits, que j'ai signalée à plusieurs reprises. Puisque l'on nous annonce un plan extrêmement important, ne pourrions-nous pas convenir de revoir l'année prochaine les crédits annulés cette année ?

Il faut savoir que ce qui nous intéresse, nous, les maires, c'est la traduction sur le terrain des propos qui sont tenus dans cette enceinte. Or nous sommes désorientés quand les services de l'État nous demandent de prévoir, d'ores et déjà, une diminution de 15 % sur le budget de l'an prochain pour la réussite éducative et à peu près la même baisse pour les CUCS. Nous pouvons donc parfois être énervés quand nous regagnons l'hémicycle, comme Philippe Dallier à l'instant.

J'aurais voulu être agréable à mon collègue, tant il met de conviction dans son engagement en faveur de la politique de la ville, mais j'estime que nous devons nous montrer raisonnables et laisser la sagesse du Sénat s'exprimer.

C'est pourquoi je me retire de la liste des signataires de cet amendement, madame la ministre, en vous faisant confiance pour un an !

Mme la présidente. Il s'agit donc de l'amendement n° II-115 rectifié bis, présenté par M. Dallier et ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

2.704.651

2.704.651

Équité sociale et territoriale et soutien

11.339.632

11.339.632

Aide à l'accès au logement

14.044.283

14.044.283

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

TOTAL

14.044.283

14.044.283

14.044.283

14.044.283

SOLDE

0

0

La parole est à M. Dallier.

M. Philippe Dallier. Je remercie Pierre André de ses conseils et du souci qu'il manifeste pour ma santé ! (Sourires.)

Mais quand on a grandi en Seine-Saint-Denis, quand on y vit et que l'on voit ce qui s'y passe, cela prend aux tripes ! Et l'on aimerait bien que les élus, le plus d'élus possible, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, comprennent nos préoccupations.

Pierre André, qui est un très bon spécialiste de la politique de la ville et qui connaît ces sujets depuis très longtemps, doit comprendre ce que je ressens.

Je ne me vois pas, de retour dans mon département, aller expliquer que, pour la première fois depuis 2005, nous avons accepté, au nom de cette majorité, de raboter les crédits du programme 147 !

Je demande donc au Gouvernement de revenir à son intention initiale excellente - je la soutiens pleinement - et de rétablir les crédits proposés à l'origine.

C'est tout ce que je demande, et je pense que cette majorité s'en trouverait bien.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-115 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. Jean-Pierre Caffet. Bravo, monsieur Dallier !

M. Jean Desessard. Vous avez été convainquant, monsieur Dallier !

Mme la présidente. L'amendement n° II-158, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

 

 

 

 

Équité sociale et territoriale et soutien

 

 

 

 

Aide à l'accès au logement

10.000.000

10.000.000

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

10.000.000

 

10.000.000

 

TOTAL

10.000.000

10.000.000

10.000.000

10.000.000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à transférer 10 millions d'euros prélevés sur les frais de gestion du Fonds national d'aide au logement, le FNAL, vers la lutte contre l'habitat indigne.

Le FNAL reçoit une subvention visant à compenser les frais qu'il supporte pour la gestion de deux prestations logement, l'allocation de logement à caractère social, l'ALS, et l'aide personnalisée au logement, l'APL. Cette subvention est égale à 2 % du montant des prestations versées, soit 220 millions d'euros en 2008.

S'il est légitime que les frais de gestion du FNAL fassent l'objet d'une juste compensation, il n'y a aucune raison que cette compensation soit corrélée au montant des prestations versées.

En effet, les frais de gestion, vous en conviendrez, dépendent essentiellement du nombre de dossiers traités, et non pas du montant des allocations servies.

Or, le nombre de bénéficiaires de ces deux prestations est en baisse. Ainsi, en 2006, on dénombrait 300 000 allocataires de l'APL, en diminution par rapport à 2000, et 53 000 bénéficiaires de l'ALS, en diminution par rapport à 2005.

Dans ces conditions, il me semble qu'il n'y a pas lieu d'augmenter les frais de gestion, qui oscillent entre 206 millions d'euros et 210 millions d'euros depuis trois ans.

En revanche, les crédits destinés à la lutte contre l'habitat indigne sont cruellement insuffisants. Ils s'élèvent à 25 millions d'euros seulement, alors que, selon l'Agence nationale de l'habitat, 700 000 ménages sont concernés.

La lutte contre l'habitat indigne constitue une priorité nationale, et cet amendement tend à en apporter la preuve budgétaire.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il paraît intéressant de réutiliser cette somme de 10 millions d'euros et de lui donner l'affectation proposée.

La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Cet amendement a pour objet de réduire de 10 millions d'euros les crédits du programme « Aide à l'accès au logement », qui est essentiellement constitué de la contribution budgétaire de l'État au FNAL pour le financement des dépenses obligatoires, l'aide personnalisée au logement et l'allocation de logement à caractère social.

L'adoption de cet amendement, tel que vous le proposez, monsieur le rapporteur pour avis, aurait pour conséquence de compromettre l'équilibre financier du FNAL.

Dès lors, les ressources du fonds ne seraient plus suffisantes pour couvrir les dépenses de prestation. Pour retrouver l'équilibre financier, il serait alors nécessaire de prendre des mesures d'économie, qui pénaliseraient les bénéficiaires des aides personnelles au logement, ce à quoi se refuse le Gouvernement.

Ces sommes sont, par ailleurs, destinées à financer les frais de gestion supportés par les organismes payeurs pour la gestion des aides personnelles au logement.

Vous évoquez le caractère inopportun du mode de calcul de ces frais de gestion à concurrence de 2 % du montant des prestations versées : je vous précise que procéder au calcul des frais de gestion en fonction du nombre de bénéficiaires, comme vous le proposez, ne serait pas plus pertinent, dans la mesure où les coûts de gestion véritables résultent davantage du nombre d'actes effectués pour chaque dossier que du nombre de bénéficiaires.

Il serait évidemment très complexe de déterminer les coûts réels de gestion en fonction du nombre d'actes réalisés. La règle des 2 % du montant des prestations présente le mérite de la simplicité, pour le FNAL comme pour les organismes payeurs.

J'ajouterai que les caisses d'allocations familiales vont intervenir en appui de l'application de la loi instituant le droit au logement opposable.

Je sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi je devrais émettre un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-158 est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Je ne suis pas convaincu.

Tous ceux qui ont à gérer les collectivités connaissent la réalité de la gestion : ce sont bien les dossiers traités qui comptent, et non pas les montants.

Vous me dites, madame la ministre, qu'un bénéficiaire peut faire l'objet de plusieurs actes de gestion. Certes, c'était vrai l'année dernière comme cette année, mais je veux insister sur le fait que le nombre de bénéficiaires a diminué.

Par conséquent, je propose de récupérer ces 10 millions d'euros et de les affecter à l'habitat indigne, qui est une réelle urgence et qui constitue l'une de vos priorités.

Cet amendement vous offre donc une opportunité. J'essaie de vous aider, madame la ministre ! (Sourires.)

Alors que l'État s'efforce aujourd'hui de faire des économies, je propose précisément de rogner sur les frais de gestion du FNAL, en consacrant les économies ainsi réalisées à des dépenses plus opérationnelles. C'est un enjeu capital, notamment pour la politique de la ville et pour la politique du logement. Si l'on ne comprend pas cela, on se trompe totalement !

C'est pourquoi, madame la présidente, je ne retire pas mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Le financement de la politique de résorption de l'habitat insalubre, sur lequel porte l'amendement de notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe, est une question d'importance.

En effet, les crédits ouverts au titre de l'action « Lutte contre l'habitat indigne » s'élèvent pour l'heure à 25 millions d'euros.

Selon le rapport de notre collègue, 700 000 ménages vivent aujourd'hui dans un logement insalubre ou indigne. Cette mauvaise qualité de l'habitat entraîne une forte demande de logements locatifs sociaux et, à des degrés divers, une sollicitation pressante de nombreux services publics.

L'habitat indigne est un scandale en soi, mais un scandale aussi quand on sait le niveau des loyers qui sont imposés aux locataires et les dépenses de santé qu'il entraîne, notamment pour les enfants. C'est aussi bien souvent une charge imposée aux collectivités territoriales, charge à laquelle elles ne peuvent décemment et réellement faire face.

La réduction de 1 million d'euros, par rapport à 2007, des crédits affectés à cette action budgétaire est à la fois symbolique et discutable.

Au demeurant, mes chers collègues, il avait déjà été procédé à une réfaction d'une partie de ses crédits, cette année, lors de l'examen du dernier collectif budgétaire.

Le caractère relativement imprécis de la ligne ouverte- 25 millions d'euros - permet d'ailleurs de lui donner un caractère provisionnel susceptible d'être encore rectifié à la baisse le moment venu.

Les familles dont les enfants sont intoxiqués au plomb apprécieront de devoir attendre plus longtemps...

Nous voterons sans hésiter l'amendement de notre collègue Jean-Marie Vanlerenberghe, qui nous semble, malgré les limites de l'exercice de la LOLF, adapté, au moins dans l'intention de son auteur, aux exigences budgétaires de la solidarité nationale.

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-158.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-183 rectifié bis, présenté par M. Beaumont, Mme Dumas, MM. Balarello, Fouché et Puech, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Rénovation urbaine

Équité sociale et territoriale et soutien

Aide à l'accès au logement

1 000.000

1 000.000

Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2

 

1 000.000

 

1 000 000

TOTAL

1 000 000

1 000 000

1 000 000

1000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Catherine Dumas, à qui nous souhaitons la bienvenue à l'occasion de sa première prise de parole. (Applaudissements.)

Mme Catherine Dumas. Merci, madame la présidente, mes chers collègues.

Cet amendement vise à octroyer une enveloppe budgétaire supplémentaire de 1 million d'euros au profit de l'action n° 2 « Accompagnement des publics en difficulté » du programme 109 « Aide à l'accès au logement ».

Cette augmentation de 1 million d'euros des crédits attribués à l'Agence nationale pour l'information sur le logement, l'ANIL, et à ses agences départementales, les ADIL, est compensée par une diminution, à due concurrence, des crédits du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », selon le schéma suivant : 500 000 euros au titre de l'action n °4 « Réglementation de l'habitat, politique technique et qualité de la construction » et 500 000 euros au titre de l'action n° 5 « Soutien ».

La diminution des subventions allouées aux ADIL, telle qu'elle est envisagée dans le projet de loi de finances pour 2008, risque en effet de décourager tous les acteurs de ce réseau, dont on connaît la compétence et l'attachement à servir l'intérêt général.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Bien que ce soit la première fois que Mme Dumas défende un amendement, je suis au regret de lui demander de bien vouloir le retirer.

Mme la présidente. Madame Dumas, l'amendement n° II-183 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Catherine Dumas. Non, je le retire, madame la présidente, ...compte tenu des explications que m'a données Mme la ministre. (Sourires.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-183 rectifié bis est retiré.

Vous commencez très bien votre apprentissage, ma chère collègue. (Rires.)

M. Jean-Pierre Caffet. Vous commencez mal ! (Nouveaux rires.)

Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Ville et logement » figurant à l'état B.

J'ai été saisie d'une demande d'explication de vote de la part de Mme Odette Terrade.

La parole est donc à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Plus de un million trois cent mille demandeurs de logement, plus de quatre millions de nos compatriotes résidant dans les zones urbaines sensibles, et quelle politique ?

Quelle politique, quand on constate la stagnation des crédits de la mission « Ville et Logement », stagnation qui masque mal le non-respect de la parole donnée ?

Quelle politique, quand on constate que les crédits transversaux de la politique de la ville connaîtront en 2008 une réduction de 175 millions d'euros, frappant notamment la rénovation urbaine et le développement de l'offre de logement ?

Il nous faut être précis à ce stade du débat : que signifie concrètement cette réduction des crédits consacrés à la politique de la ville ?

C'est le quartier HLM où l'on a détruit des logements anciens, dits « inadaptés », et où l'on n'a pas encore simplement ouvert le chantier de terrassement préparant la construction des logements neufs destinés à les remplacer.

C'est l'association de lutte pour l'insertion qui va perdre une partie de sa subvention, avec les conséquences que cela implique pour les jeunes sans diplôme, pour les chômeurs de longue durée, pour les femmes en recherche d'une nouvelle activité professionnelle, qui ne pourront plus être placés sur un parcours individualisé de réinsertion sociale et professionnelle.

C'est l'association d'alphabétisation qui ne disposera plus des moyens de son action, avec les conséquences qui s'ensuivront pour la population qu'elle contribue à intégrer à la vie collective et sociale du quartier, de la cité, de la ville.

Voilà ce que signifie cette diminution : toutes ces actions sont appelées à connaître une contraction, voire à être remises en cause, alors que ces dépenses ont un caractère redistributif affirmé, tant il est vrai que l'on prélève des impôts pour répondre aux besoins des plus modestes de nos compatriotes.

J'ai rappelé dans mon intervention liminaire que les grands ciseaux de la régulation budgétaire avaient déjà largement taillé dans les crédits affectés à la mission pour 2007, remettant ainsi en question l'adoption de ceux de cette année.

Si nous votons aujourd'hui la stagnation de ces crédits pour constater, demain, la réduction des crédits de paiement consommés, cela ne vaut pas le coup !

Cela ne vaut pas le coup pour les habitants des quartiers sensibles, qui ont d'autant plus besoin de la solidarité nationale qu'ils souffrent, au quotidien, de difficultés multiples autrement plus importantes que les autres.

Quand il y a aujourd'hui 20 % de chômage dans les quartiers sensibles, on ne peut pas « chipoter » sur les moyens financiers si nécessaires que la collectivité nationale se doit d'engager. Il faut au contraire y aller « à donf », comme on dit dans les cités que je connais bien. (Mme la secrétaire d'État sourit.)

À ce stade de la discussion, comment ne pas manifester aussi notre inquiétude devant le risque de banalisation du livret A, banalisation encouragée par la Commission européenne et qui risque de priver le logement social des moyens de son financement dans les années à venir.

Mme Odette Terrade. Du crédit plus cher pour construire des logements sociaux, ce sont des loyers plus chers et c'est de l'exclusion en plus !

C'est d'ailleurs pour cette raison que les organisations syndicales de la Caisse des dépôts et consignations appellent, suivant en cela la fédération des finances CGT, à manifester et à pétitionner pour maintenir la spécificité du financement du logement social.

M. Marcel-Pierre Cléach. Ce n'est pas la seule raison !

Mme Odette Terrade. Le gouvernement français et la Caisse des dépôts et consignations doivent, à l'instar, faut-il le rappeler, de ce que le Danemark a pu obtenir de la Commission européenne, tout mettre en oeuvre pour préserver le livret A et clarifier leur position sur cette question.

Sous le bénéfice de ces observations, nous ne pouvons que confirmer notre vote négatif sur les crédits de cette mission « Ville et logement ».

Mme la présidente. Je mets aux voix les crédits de la mission « Ville et logement », modifiés.

(Ces crédits sont adoptés)

Mme la présidente. J'appelle en discussion les articles 60 et 61 ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Ville et logement ».

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 60

Article additionnel avant l'article 60

Mme la présidente. L'amendement n° II-187, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :

Avant l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Dans le cinquième alinéa, les mots : «, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs » sont supprimés ;

2° Dans la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et les employeurs » sont remplacés par les mots : «, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs ainsi que les employeurs ».

II. - La perte de recettes pour le Fonds National d'Aide au Logement résultant de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.

M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement vise à supprimer la cotisation qui, pesant sur la masse salariale des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, est destinée à financer le FNAL.

Lors de la discussion de la loi de finances pour 2007, le groupe socialiste, comme le Sénat tout entier, s'était déjà opposé au principe même de cet assujettissement des collectivités territoriales à cette taxe, en faisant valoir qu'il occasionnerait une charge supplémentaire de 65 millions d'euros en 2007.

Le doublement consécutif à l'adoption de l'article 60 du projet de loi de finances pour 2008 conduirait donc à un alourdissement des charges de 130 millions d'euros par rapport à l'année 2006.

De surcroît, le gouvernement précédent s'était engagé à ce qu'une concertation soit menée avec les associations de collectivités territoriales afin d'étudier les modalités de l'augmentation du taux de cotisation. Or, à notre connaissance, aucune consultation de ces associations n'a été effectuée. Ces dernières ont d'ailleurs pris connaissance de la mesure lors de la présentation du projet de loi de finances.

Je souhaite en outre rappeler que cette cotisation vise à augmenter les ressources du FNAL, qui sert à financer les aides aux ménages. Or, l'an passé, c'est à l'occasion de la discussion de la loi DALO que la majorité s'est rendue à nos arguments et a voté l'inscription de l'indexation des aides au logement sur le nouvel indice de référence des loyers. Car, depuis 2002, votre majorité n'a pas pris les arrêtés nécessaires à la revalorisation annuelle de ces aides. Cela représente pour chaque famille une perte de pouvoir d'achat d'environ 10 %.

Ce qui est inquiétant, avec cet article 60, c'est que vous semblez compter sur les collectivités et les établissements publics, comme sur les hôpitaux, déjà exsangues, pour honorer vos engagements. De là à dire que vous faites payer aux collectivités territoriales, auxquelles vous avez récemment transféré des personnels en quantité - les personnels techniciens, ouvriers et de service ou les agents des directions départementales de l'équipement - sans en évaluer justement le coût, il n'y a qu'un petit pas que je franchis.

En conséquence, cet amendement vise à rétablir, au bénéfice des collectivités et de leurs établissements publics administratifs, l'exonération qui prévalait avant 2007.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas examiné cet amendement, mais elle avait proposé d'adopter cet article sans modification. Cet amendement nous ferait nous écarter de cette position. Par conséquent, l'avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Le FNAL, qui assure le financement de l'aide personnalisée au logement et de l'allocation de logement à caractère social, a été constitué pour mutualiser les ressources financières apportées par les différents contributeurs : l'État, la sécurité sociale, les employeurs privés et les employeurs publics. Je rappelle en effet que tous les employeurs publics sont aujourd'hui assujettis au financement des aides personnelles.

Ce financement partenarial s'explique par la nature des aides versées, qui bénéficient à tous les ménages remplissant les conditions de ressources et de loyers, quelle que soit leur situation au regard de l'emploi : sans emploi, bénéficiaires de minima sociaux, salariés du public ou du privé.

Pour cette raison, rien ne justifie objectivement une différence de traitement entre les employeurs publics et les employeurs privés. Il en va différemment, par exemple, des cotisations versées au 1 % logement ou aux organismes de formation professionnelle, dont la collecte assure le financement de mesures en faveur des salariés du seul secteur assujetti.

En outre, le FNAL nécessite des ressources pérennes et croissantes afin d'assurer le financement des revalorisations en faveur des bénéficiaires.

Vous le savez, pour l'année 2008, le barème des aides personnelles progressera de près de 3 %, comme s'y était engagé le Premier ministre.

Or, pour financer ces mesures, il n'est guère souhaitable d'accroître les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises privées, qui sont aujourd'hui soumises à une cotisation presque deux fois supérieure à celle des employeurs publics.

C'est pourquoi l'option consistant à relever le niveau de leur cotisation, actuellement de 0,5 %, a été clairement écartée par le Gouvernement.

À l'inverse, l'alignement des cotisations des employeurs publics sur ce niveau de cotisation est parfaitement légitime et de nature à assurer un financement soutenable du FNAL.

Par ailleurs, je rappelle que l'État ne s'est en aucun cas exonéré de cette cotisation supplémentaire, qui a été prise en compte dans le projet de loi de finances.

Afin de ne pas accroître de façon trop brutale les charges pesant sur les collectivités locales, les établissements publics ou les hôpitaux, le gouvernement précédent s'était engagé, dans la loi de finances pour 2007, sur la voie d'un alignement progressif, en deux ans. Je vous demande aujourd'hui d'achever ce nécessaire alignement.

Sans méconnaître l'effort supplémentaire demandé aux employeurs publics, je vous invite néanmoins à conserver le texte proposé par le Gouvernement, dont la finalitéet la légitimité ne font pas de doute, puisqu'il s'agit d'assurer la pérennité du financement des aides personnelles.

J'ai tenu à vous répondre sur le fond ; j'espère vous avoir convaincu du bien-fondé de cette disposition, monsieur le sénateur.

J'ajoute que votre amendement aurait pour conséquence d'aggraver, à hauteur de 200 millions d'euros, la charge pesant sur le budget de l'État au titre de la subvention versée au FNAL, sauf à ne pas compenser la sécurité sociale du coût réel des aides au logement.

Pour toutes ces raisons, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la présidente. Monsieur Caffet, l'amendement n° II-187 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Caffet. Oui, madame la présidente, je le maintiens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-187.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 60
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Articles additionnels après l'article 60

Article 60

Le cinquième alinéa de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-177, présenté par Mme  Terrade, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet article 60 prévoit de faciliter la réduction du déficit de l'État par mise à contribution, marginale en apparence, des collectivités territoriales.

En l'espèce, il s'agit de soumettre à la cotisation du Fonds national d'aide au logement destinée à alimenter le budget des aides personnelles au logement, les collectivités locales et leurs groupements, au même niveau que les autres catégories d'employeurs.

Cette décision présente les apparences séduisantes de l'équité : il s'agirait, dans le cas précis, de faire cesser une intolérable situation en mettant les collectivités territoriales, en qualité d'employeur, à égalité avec l'État, comme avec les entreprises du secteur concurrentiel, normalement mises à contribution.

Mais les apparences séduisantes de l'équité disparaissent rapidement derrière le caractère conjoncturel de la mesure, visant à permettre, dès cette année, au budget général de se ménager une marge de réduction de son déficit, et de se libérer à bon compte de l'une de ses missions, qui est d'alimenter le Fonds national d'aide au logement.

Nous entrons ensuite dans la structure des choses, qui consiste notamment à créer les conditions d'une moindre participation, à l'avenir, du budget général au financement des aides à la personne.

Pour faire bonne mesure, il suffira ensuite de prévoir, par voie réglementaire, une réfaction sur le montant de l'allocation due, ou encore de relever le seuil de non-versement mensuel pour aboutir, sans difficulté majeure, à orienter à la baisse le montant du programme « Aide à l'accès au logement », qui consomme près de 5 milliards d'euros en 2008.

Je me permettrai à nouveau de rappeler que ledit budget, en 2007, fera l'objet d'une réfaction de 76,15 millions d'euros, soit 500 millions de francs d'avant l'euro, permettant d'ores et déjà au budget général de se libérer d'une partie du déficit.

Enfin, comment ne pas dire que, s'agissant de cet article 60, les engagements du Gouvernement n'ont pas été tenus ?

En 2006, un article de cette nature avait déjà été présenté dans la loi de finances. Il avait été amendé par le Sénat, sur proposition commune des rapporteurs spéciaux, notre ancien collègue Roger Karoutchi, qui fait maintenant partie du Gouvernement, ce dont je le félicite, ainsi que Thierry Repentin et Pierre André.

C'est sur la modification des dispositions arrêtées par le Sénat et promulguées sous l'article 148 de la loi de finances pour 2007 que nous sommes aujourd'hui saisis d'un article écrit sans concertation précise et circonstanciée.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement de suppression de l'article 60.

Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° II-65 est présenté par MM. Repentin et P. André, au nom de la commission des affaires économiques.

L'amendement n° II-175 rectifié est présenté par MM. Braye, Vasselle, Doligé et Béteille.

L'amendement n° II-190 est présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Dans le cinquième alinéa de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « l'État, » sont supprimés.

La parole est à M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-65.

M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis. J'ai le privilège rare, exceptionnel, même, de vous présenter, au nom de la commission des affaires économiques, en tant que rapporteur du budget « logement », un amendement cosigné par Pierre André, rapporteur du budget « ville ».

Mes chers collègues, ceux d'entre vous qui étaient en séance voilà un an se souviennent certainement que, à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, la commission des affaires économiques avait, à l'unanimité et à l'instar de la commission des finances, adopté un amendement sur un article rattaché à la mission « Ville et logement ».

Cet article prévoyait d'assujettir l'État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics à une nouvelle cotisation assise sur leur masse salariale afin de financer le budget des aides personnelles au logement, alors que ces employeurs publics, contrairement aux employeurs privés, étaient jusqu'alors dispensés de son paiement. Le taux de cette cotisation aurait été fixé à 0,2 % en 2007, puis porté à 0,4 % à partir de l'année 2008.

Les deux commissions s'étaient élevées contre cette disposition, dont l'adoption aurait conduit à alourdir les charges pesant sur les collectivités territoriales de 65 millions d'euros en 2007 et, mécaniquement, de 130 millions chaque année à partir de 2008.

Les amendements des commissions des finances et des affaires économiques avaient, de ce fait, été adoptés lors de la discussion des crédits de la mission « Ville et logement », malgré l'avis défavorable du gouvernement de l'époque.

Mme Catherine Vautrin, alors ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, avait cependant fait un pas vers nos positions en proposant de pérenniser le taux de 0,2 % et donc de supprimer le doublement de la cotisation l'année suivante. Le Gouvernement avait immédiatement donné suite à cette proposition, lors de la seconde délibération du projet de loi de finances pour 2007, en demandant au Sénat de revenir sur son vote.

M. Jean-François Copé, alors ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, avait indiqué qu'une concertation serait engagée l'année suivante « pour poursuivre l'harmonisation du taux de cotisation des employeurs publics sur celui des employeurs privés ». En définitive, la loi de finances pour 2007 assujettissait les employeurs publics à une cotisation de 0,2 % sans prévoir son doublement automatique pour les années suivantes.

Nous nous retrouvons cette année à débattre une nouvelle fois de ce sujet, puisque l'article 60 du projet de loi de finances pour 2008 revient à doubler le montant de la cotisation pesant sur les communes, les départements, les régions et les intercommunalités.

En ma qualité de rapporteur pour avis du budget « logement », j'ai reçu un courrier émanant des principales associations de collectivités territoriales : l'Association des maires de France, l'Assemblée des communautés de France, l'Assemblée des départements de France, l'Assemblée des régions de France, l'Association des maires des grandes villes de France et l'Association des maires ville et banlieue de France. Celles-ci m'ont indiqué qu'elles n'avaient pas été associées aux discussions sur ce sujet.

Toutes, sans exception, m'ont fait savoir que l'harmonisation du taux de cotisation n'avait jamais été évoquée lors de leurs discussions avec l'État et qu'elles avaient pris connaissance de la mesure au moment de la présentation du projet de loi de finances. De même, toutes, sans exception, m'ont fait part de leur hostilité à l'égard de cette disposition qui tend à alourdir, pour la deuxième année consécutive, de 65 millions d'euros les charges pesant sur les collectivités territoriales.

Dans ces conditions, toujours opposée aux alourdissements de charges incombant aux collectivités territoriales, la commission des affaires économiques a adopté, par cohérence avec les positions prises l'an dernier, et toujours à l'unanimité, un amendement qui tend à supprimer le doublement de la cotisation à laquelle ces collectivités seraient assujetties si l'article était adopté en l'état, étant précisé que la suppression, à cet alinéa de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, des mots : « l'État, » signifie que le taux de la contribution de l'État sera de 0,40%.

Mme la présidente. L'amendement n°II-175 rectifié n'est pas soutenu.

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour présenter l'amendement n° II-190.

M. Jean-Pierre Caffet. Ces trois amendements sont rigoureusement identiques, celui de Thierry Repentin et Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques, celui de mes excellents collègues Dominique Braye, Alain Vasselle, Éric Doligé et Laurent Béteille, et celui de Thierry Repentin et des membres du groupe socialiste.

Une fois n'est pas coutume, je reprends intégralement à mon compte les arguments qui figurent dans l'objet de l'amendement n° II-175 rectifié. Ces amendements identiques devraient, je l'espère, recueillir une large majorité dans cet hémicycle.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission des finances ne s'est pas prononcée sur ces amendements et n'a pas entendu non plus l'argumentaire qui vient d'être développé. Je ne peux donc pas me prononcer au nom de la commission des finances. Pour ma part, je m'abstiendrai.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. L'heure avance et je constate une unanimité, du moins apparente, de la Haute Assemblée.

J'ai bien entendu les arguments que M. Repentin a fort bien développés. Néanmoins, et vous n'en serez pas surpris, je ne suis pas favorable à ces amendements identiques.

J'ai bien compris que les différentes associations d'élus s'étaient manifestées. Mais je mets chacun d'entre vous devant ses responsabilités. Pensez à ce mot important de notre devise républicaine : « Égalité » ! Pour quelle raison les employeurs publics ne participeraient-ils pas autant que les employeurs privés à l'aide au logement ? C'est en ces termes que l'on peut se poser la question.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-65 et II-190.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 60 est ainsi rédigé.

Article 60
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Article 61

Articles additionnels après l'article 60

Mme la présidente. L'amendement n° II-156, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

En annexe à la loi de finances, le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport évaluant l'efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l'amélioration de l'offre de logements.

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. L'efficacité des dépenses fiscales contribuant à développer et à améliorer l'offre de logement n'est aujourd'hui pas évaluée.

Pourtant, ces dépenses devraient représenter, en 2008, plus de 10 milliards d'euros, comme je l'ai signalé tout à l'heure.

Certaines sont sans doute légitimes et efficaces, mais d'autres le sont sûrement moins. Or, comment trier entre les exonérations utiles et les dépenses inutiles s'il n'existe aucune évaluation ?

Cet amendement a donc pour objet, non pas d'initier une chasse aveugle aux dépenses fiscales, mais de doter le Parlement, et le Gouvernement par la même occasion, des moyens de juger en connaissance de cause. Quand nous connaîtrons les effets de ces dépenses, nous pourrons décider s'il y a lieu de les maintenir, d'en augmenter certaines ou d'en supprimer d'autres.

En tout cas, nous ne resterons pas dans cette ignorance qui nous amène à reconduire d'année en année un dispositif très coûteux, mais dont on ne sait pas ce qu'il rapporte.

La commission des affaires sociales propose donc que les dépenses fiscales liées au logement fassent l'objet d'une évaluation annuelle, sous la forme d'un rapport qui sera remis au Parlement en annexe du projet de loi de finances.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Une évaluation annuelle serait une contrainte un peu forte. Je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Il ne me revient pas de dire quels documents doivent être annexés à la loi de finances, mais, personnellement, je ne vois que des avantages à ce que mes services et ceux de la législation fiscale se rapprochent en vue de mieux évaluer la dépense fiscale en matière de logement. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry RepentinNous voterons l'amendement présenté par M. Vanlerenberghe, en souhaitant qu'il trouve une concrétisation et que le rapport soit effectivement présenté au Parlement.

Nous sommes à moins d'une semaine du 15 décembre, qui est la date ultime pour que le Parlement soit destinataire d'un rapport sur l'évaluation d'une dépense fiscale que nous connaissons tous ici : il s'agit du dispositif de Robien. J'espère, madame la ministre, que vos services y travaillent assidûment, car nous attendons ce cadeau de Noël avec une grande impatience ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Dans mon intervention sur les crédits de la mission, j'avais indiqué que, face aux 7 176 millions d'euros de crédits de paiement inscrits, et sans préjuger de leur consommation effective, nous avions un ensemble de plus de 13 milliards d'euros de dépenses fiscales associées aux différents programmes.

En clair, en lieu et place de la dépense budgétaire, moteur de l'action publique pour le logement, vous préférez depuis plusieurs années la dépense passive, c'est-à-dire la dépense fiscale, qui n'est même pas toujours incitative.

Mme Odette Terrade. Et encore cette situation n'est-elle qu'imparfaitement connue. Il fut un temps où nous avons dû faire un arbitrage entre, d'une part, la baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée pour la construction et les travaux d'entretien des logements locatifs sociaux et, d'autre part, le niveau de subvention des opérations de construction ou de réhabilitation des mêmes logements.

M. Jean Desessard. Absolument !

Mme Odette Terrade. Mais la généralisation de dispositifs incitatifs à l'investissement immobilier privé n'a cessé, chaque année, d'accroître la part de la dépense fiscale dans la dépense publique pour le logement.

L'efficacité des dispositifs Périssol, Besson, Robien ou « Borloo populaire » est ainsi mise en question.

Quels locataires trouvent-ils une réponse à leur problème de logement grâce aux logements construits sous l'empire de ces modes de financement ? Quelle occupation de l'espace, quelle qualité de construction constate-t-on dans les programmes défiscalisés ?

Ne sommes-nous pas d'ores et déjà confrontés au gaspillage de possibilités foncières du fait de la réalisation dans de nombreuses agglomérations, de province notamment, de programmes Robien ou Borloo n'ayant pas de demande à mettre en face d'une offre ainsi défiscalisée ?

Les tensions que l'on a pu observer sur les prix ne sont-elles pas contradictoires avec l'impression d'abondance des logements disponibles que semblerait laisser croire l'état de la production depuis plusieurs années ?

Dans un autre ordre d'idées, l'aide fiscale à l'accession sociale à la propriété nous permet-elle de nous prémunir réellement contre le risque croissant de surendettement des ménages ? Elle peut faire craindre que notre pays ne connaisse à nouveau une crise des prêts immobiliers plongeant des centaines de familles dans les pires difficultés.

En outre, la dépense fiscale n'est pas totalement chiffrée. Combien coûte, par exemple, le report des déficits fonciers en termes de rendement de l'impôt sur le revenu ? Contribue-t-il réellement à la politique publique du logement ?

Combien coûte le dispositif Marini, destiné à border confortablement la situation des sociétés immobilières d'investissement cotées en allégeant de manière très substantielle leurs obligations fiscales ?

Je crois savoir que les plus grosses de ces opérations foncières bénéficient chaque année d'une remise d'impôt sur les sociétés plus importante que les crédits engagés chaque année par l'État au titre de la construction neuve de logements sociaux, et plus encore que les crédits inscrits pour l'exécution du programme national de rénovation urbaine !

C'est pourquoi il faut étudier la politique publique du logement à l'aune de l'examen des incitations fiscales diverses dont elle est largement tributaire.

En conclusion, il semble qu'il n'y ait pas en France de logements qui, d'une manière ou d'une autre, ne soient aidés sur les fonds de l'État, que ce soit par le budget ou par l'impôt. Mais ils ne sont pas tous aidés dans les mêmes proportions. Ainsi, et cela a déjà été dit, les exonérations fiscales au titre de l'APL et des ALS sont chiffrées à 30 millions d'euros pour 4,8 millions de familles, soit six euros par famille et par an. Mais si l'on considère les exonérations fiscales pour le dispositif Robien, on obtient un total de 400 millions d'euros pour 120 000 familles, soit 3 300 euros par famille et par an.

Il est donc normal que nous y regardions de plus près. C'est pourquoi nous voterons cet amendement, qui vise à instituer le dépôt d'un rapport annuel.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je voterai moi aussi cet amendement, car je suis opposé à ces déductions fiscales.

Madame la ministre, vous avez reconnu que le dispositif Robien devait être réexaminé et que les aides qui y sont attachées devaient être revues. Vous avez également admis que, dans certaines zones, il se révélait inutile. J'espère que ce rapport annuel nous aidera à y voir plus clair.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-156

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 60.

L'amendement n° II-157, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 441-2-3-2 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 441-2-3-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 441-2-3-3. - Lorsque le propriétaire, ou l'exploitant d'un établissement recevant du public aux fins d'hébergement, n'a pas rempli l'obligation d'hébergement ou de relogement qui lui incombe en application de l'article L. 521-1 et que le préfet, à titre exceptionnel et nonobstant les dispositions des articles L. 521-1 et suivants, a pourvu à l'hébergement ou au relogement des personnes concernées selon les dispositions de l'article L. 441-2-3, l'indemnité dont le propriétaire ou l'exploitant est redevable en application du IV et du VI de l'article L. 521-3-2, est versée à l'État.

« Cette créance est recouvrée comme en matière de contributions directes. Elle est garantie par le privilège figurant au 8° de l'article 2374 du code civil, mis en oeuvre selon les articles 2384-1 et suivants du même code, ainsi que par les dispositions des articles L. 541-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation. »

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis. Le présent amendement vise à permettre à l'État, lorsqu'il a assuré le relogement de personnes bénéficiaires du droit au logement opposable, le DALO, à la place de propriétaires louant des logements insalubres, d'être indemnisé par ces propriétaires défaillants.

Il existe en effet un vide juridique. Il est bien prévu que l'État est indemnisé par les propriétaires lorsqu'il reloge des personnes vivant dans des logements insalubres, mais le droit ne dit pas si cette disposition s'applique aussi lorsqu'il s'agit de personnes prioritaires au sens de la loi instituant un droit au logement opposable.

Il faut donc donner à l'État les moyens de mettre en place le DALO tout en le prémunissant contre les éventuels abus de propriétaires défaillants. Tel est le sens de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Très favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-157.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 60.

L'amendement n° II-178, présenté par Mme Terrade, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le premier alinéa du I de l'article 244 quater J du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il peut également financer le rachat du prêt principal destiné à l'acquisition de cette résidence. »

II. - Dans le troisième alinéa du 2° du I du même article, le montant : « 64 875 euros » est remplacé par le montant : « 50 000 euros ».

III. - Dans le quatrième alinéa, le montant : « 32 500 euros » est remplacé par le montant : « 65 000 euros ».

IV. - Pour compenser les pertes de recettes découlant pour l'État des dispositions ci-dessus, les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Les dispositions prévues dans cet amendement sont relatives au pouvoir d'achat des ménages.

Le prêt à taux zéro, créé lorsque M. Pierre-André Périssol était ministre du logement, a évolué à plusieurs reprises.

La principale évolution tient au fait que, s'agissant de la dépense fiscale associée, nous sommes passés d'un dispositif destiné aux ménages à un dispositif d'allégement de l'impôt sur les sociétés dû par les établissements de crédit distributeurs de ces prêts.

Ainsi, à la place d'une aide directe aux ménages, au demeurant discutable de par son mode de financement - je n'y reviens pas - et de par ses caractéristiques, nous sommes passés à un petit cadeau fiscal fait aux banques et établissements spécialisés dans la distribution de prêts immobiliers.

Une autre caractéristique tient au fait que le prêt à taux zéro, eu égard à son montant plafonné, a été positionné, dès sa création, comme un prêt complémentaire au prêt immobilier principal. Il ne permettait aux emprunteurs que de réduire la charge globale d'intérêts grevant leur emprunt.

Avec 32 500 euros de plafond, alors que le prix de vente des maisons individuelles est le plus souvent supérieur à 90 000 euros et que celui des habitations tourne aux alentours de 120 000 à 130 000 euros, seule une partie de la charge financière est ainsi corrigée.

Notre proposition vise donc, concrètement, à recentrer le prêt à taux zéro vers les principaux intéressés.

Nous proposons notamment de réduire le plafond de ressources pris en compte pour réserver ce produit aux familles qui en ont le plus besoin. Le relèvement de plafond effectué voilà quelques années avait entraîné un effet d'éviction de nombreuses familles de salariés.

Nous proposons ensuite de doubler le montant de l'avance sans intérêt, ce qui, dans un contexte de redressement des taux à long terme, permettra aux ménages de « structurer » leur dette immobilière. Par voie de conséquence, cela évitera les mensualités de remboursement trop importantes et pourra prévenir quelque peu le risque de surendettement, qui frappe durablement les ménages depuis plusieurs années.

Cet amendement vise donc à recentrer le dispositif, en rendant effectivement du pouvoir d'achat aux jeunes ménages salariés accédant à la propriété, qui sont la cible principale des taux sans intérêt.

Quant à la disposition relative au rachat éventuel d'une partie du prêt principal, elle résulte naturellement du relèvement du plafond.

Les établissements prêteurs seraient donc habilités, pour les opérations engagées, à faire valoir cette possibilité auprès des emprunteurs pour l'année d'imputation du crédit d'impôt.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Je suis également défavorable à cet amendement. Ce dernier aurait en effet pour conséquence de diminuer le nombre de personnes éligibles au prêt à taux zéro, ce qui va à l'encontre de la volonté du Gouvernement de favoriser l'accession à la propriété du plus grand nombre.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-178.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-180, présenté par Mme Terrade, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa du d) de l'article 17 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et modifiant la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est ainsi rédigé :

« L'augmentation du loyer qui en résulte ne peut excéder l'indice de l'évolution des prix à la consommation. À défaut de clause contractuelle fixant la date de référence, cette date est celle du dernier indice publié à la date de signature du contrat de location. »

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet amendement vise à renforcer le pouvoir d'achat des familles.

Madame la ministre, en mettant en place l'indice de révision des loyers, votre prédécesseur, M. Jean-Louis Borloo, avait voulu créer les conditions à la fois d'une revalorisation accrue des aides personnelles au logement et d'une meilleure capacité de fixation des loyers.

Il s'agissait, en intégrant l'ensemble des coûts réels de la construction et du logement, de faire en sorte que le pouvoir d'achat des aides personnelles au logement soit préservé et que le taux d'effort des ménages soit lissé. Il y avait en la matière beaucoup à rattraper !

Mais, dans le même temps, il y avait la face moins sympathique de l'indice de référence des loyers : il mettait un terme à l'alignement des loyers sur l'indice des prix à la construction et à leur progression par référence à l'indice des prix à la consommation.

Même si la démarche était cohérente, le résultat fut fort déplaisant pour les locataires, notamment dans le secteur locatif privé. Il en est résulté une hausse des loyers supérieure à l'inflation, et donc une rentabilité accrue des investissements immobiliers.

La vérité est connue : compte tenu de la tension sur le secteur de la construction, l'indice de référence des loyers progresse bien plus vite que l'indice des prix à la consommation, atteignant 2,78 % en glissement annuel contre 2 % pour la hausse des prix à la consommation.

Dans une allocution récente, M. le Président de la République a proposé que les loyers soient soumis à une règle d'évolution alignée sur l'indice des prix à la consommation.

Même s'il ne faut pas exagérer les conséquences de cette mesure au regard des différences entre l'indice des prix à la consommation et l'indice de référence des loyers -  huit dixièmes de point représentent 8 euros par mois pour un loyer de 1 000 euros -, il nous semble souhaitable de mettre cette disposition en oeuvre dès la fin de la discussion du présent projet de loi de finances. De plus, cette mesure permettrait de contenir la consommation des aides personnelles au logement attribuées aux locataires des logements conventionnés du secteur locatif privé.

Nous tenons cependant à souligner que d'autres possibilités, notamment réglementaires, existent pour contrer le processus de hausse des loyers.

Je rappelle pour mémoire, madame la ministre, que l'article 18 de la loi Mermaz-Malandain sur les rapports locatifs stipule entre autres : « Dans la zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, peut fixer le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants définis au b de l'article 17 et des contrats renouvelés définis au c du même article.

« Ce décret précise sa durée de validité qui ne peut excéder un an et peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués. »

M. Thierry Repentin. Voilà une excellente référence !

Mme Odette Terrade. Cela signifie, madame la ministre, que, dans les zones où existent de fortes tensions sur l'immobilier, vous pouvez décider soit du blocage des loyers, soit de la limitation de leur augmentation, à un niveau inférieur à l'indice de référence des loyers, comme à l'indice des prix.

Dans cette attente, nous vous proposons une mesure directement applicable et nous demandons un scrutin public sur l'amendement no II-180.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Madame la présidente, je comprends que les annonces faites par M. le Président de la République soient source d'interrogation.

Cela dit, il me semble assez difficile d'adopter un tel amendement. Je souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Madame Terrade, comme vous l'avez rappelé à juste titre, M. le Président de la République a fait récemment une annonce qui se concrétisera dans le futur projet de loi sur le pouvoir d'achat. Par ailleurs, la mesure à laquelle vous faites référence doit faire l'objet d'un décret en Conseil d'État. Le Gouvernement ne peut donc qu'être défavorable à cet amendement.

Mme Odette Terrade. C'est dommage !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Madame la présidente, la discussion des crédits de la mission « Ville et Logement » nous permet de vivre une soirée bien particulière ! (Sourires.)

Plusieurs amendements ont été adoptés en dépit de l'avis défavorable du Gouvernement. Il faut reconnaître que leurs auteurs avaient su justifier leur bien-fondé en présentant, avec beaucoup de conviction, des arguments très pertinents.

Nous assistons maintenant à une convergence que je résumerai par la formule suivante : « Odette et Nicolas : même combat ! » (Sourires.)

Mme Odette Terrade et les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent en effet voir se concrétiser le plus vite possible, pour le plus grand bien de nos concitoyens, l'annonce faite voilà une semaine par le Président de la République.

Je regrette d'ailleurs que nous n'ayons pas nous-mêmes déposé un amendement identique. Nous allons donc nous associer au vôtre, madame Terrade.

Mme Odette Terrade. Bien volontiers !

M. Thierry Repentin. Nous souhaitons adopter une attitude cohérente dans le temps.

Nous avons le sentiment, monsieur Roger Karoutchi, que le Gouvernement aura à connaître du même amendement d'ici à quelques semaines, quand un projet aura été présenté en conseil des ministres.

Or, le Sénat ne peut se déjuger à quelques jours d'intervalle, au seul motif que l'auteur de l'amendement, ce soir, n'est pas issu de la majorité présidentielle.

Le Président de la République a vocation à rassembler derrière lui tous les Français. Ce soir, il les rassemble tous, y compris les partis de l'opposition.

Nous vivons un moment historique. (Sourires.) C'est la raison pour laquelle je vous invite à devancer le projet de loi que Mme Christine Boutin aura peut-être l'honneur de nous présenter, pour la partie qui la concernera, dans quelques semaines.

Je vous rejoins donc, madame Terrade, derrière Nicolas Sarkozy, sur cette disposition.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.

M. Gérard Delfau. Je fais partie de la cohorte, venue de toutes les travées de cette assemblée, qui a proposé inlassablement que la hausse des loyers soit indexée sur la hausse des prix, pour dire les choses le plus simplement possible. Je me réjouis donc de cet amendement.

J'ai indiqué tout à l'heure que j'étais particulièrement heureux de l'annonce du Président de la République. Oserai-je dire qu'il a rejoint nos positions ? Il ne m'avait en effet pas semblé que cette position était si fréquente au sein de sa famille politique. Quoi qu'il en soit, il n'est pas trop tard pour bien faire.

Je voterai donc avec beaucoup de satisfaction en faveur de l'amendement n° II-180.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Je tiens à dire devant la Haute Assemblée que l'avis défavorable émis par le Gouvernement sur cet amendement n'est nullement motivé par le fait que ses auteurs appartiennent à l'opposition. La question ne se pose absolument pas dans ces termes.

Cette affaire demande une certaine forme de technicité. Une loi est en préparation. Ce texte doit suivre une certaine procédure. Le projet est actuellement devant le Conseil d'État.

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-180.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 50 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 328
Majorité absolue des suffrages exprimés 165
Pour l'adoption 125
Contre 203

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Odette Terrade. C'est dommage !

M. Jean Desessard. Nous étions encore une fois en avance ! (Sourires.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-181, présenté par Mme Terrade, M. Foucaud et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 60, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 200 nonies du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art. 200 nonies. - Les personnes qui louent un ou plusieurs logements dans le cadre d'une convention mentionnée à l'article L.353-2 du code de la construction et de l'habitation bénéficient d'un crédit d'impôt sur le revenu lorsqu'elles concluent un contrat d'assurance contre les impayés de loyer respectant le cahier des charges mentionné au g de l'article L. 313-1 du même code. Ce crédit d'impôt est égal au montant de la prime d'assurance payée au cours de l'année d'imposition.

« Les personnes mentionnées au premier alinéa ne peuvent bénéficier, pour un même contrat d'assurance, des dispositions prévues au présent article et de celles prévues au a bis du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts. »

II. - Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

III. - Pour compenser la perte de recettes découlant pour l'État des dispositions ci-dessus, il est créé une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Cet amendement vise tout simplement à rendre un peu plus incitatif le dispositif du crédit d'impôt accordé aux propriétaires immobiliers participant au système mutuel de garantie des risques locatifs.

En portant le montant du crédit d'impôt au montant de l'assurance souscrite, nous souhaitons que les propriétaires soient incités à mettre en location des appartements aujourd'hui vacants, à des conditions plus acceptables pour les locataires.

Ainsi pourrions-nous, par cette disposition, mettre en oeuvre la gratuité du dépôt de garantie réclamé aux primo-demandeurs de logements, gratuité qui me paraît faire partie des objectifs que s'est assigné récemment le Gouvernement.

Permettez-moi d'ailleurs, à ce stade de la discussion, de regretter que notre amendement tendant à modifier l'article 3 de la loi Mermaz limitant le dépôt de garantie à un mois de loyer principal n'ait pas été rattaché à la présente mission, où il avait sa place naturelle.

C'est donc, entre autres choses, pour faciliter la réalisation de cette gratuité que nous vous invitons à adopter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Cet amendement tend à porter le taux de crédit d'impôt à 100 %, ce qui revient à considérer que c'est l'État plutôt que le bailleur qui paye la prime d'assurance.

Compte tenu de l'effort financier déjà réalisé par l'État pour ce produit, il n'est pas acceptable de transférer toute la charge du risque du bailleur à l'État.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-181.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 60
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Articles additionnels après l'article 61 (début)

Article 61 

La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et l'habitat des gens du voyage est ainsi modifiée :

1° L'article 2 est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. - Un délai supplémentaire est accordé, jusqu'au 31 décembre 2008 à compter de la date d'expiration du délai prévu au III, à la commune ou à l'établissement public de coopération intercommunale qui a manifesté, dans les conditions fixées au III, la volonté de se conformer à ses obligations et qui, au terme de ce délai, n'a pu néanmoins s'en acquitter. » ;

2° Le début du premier alinéa du I de l'article 3 est ainsi rédigé :

« Si, à l'expiration des délais prévus à l'article 2 et après mise en demeure... (le reste sans changement). » ;

3° L'article 4 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« L'État prend en charge, dans la limite d'un plafond fixé par décret, les investissements nécessaires à l'aménagement et à la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II de l'article 1er, dans la proportion de 70 % des dépenses engagées dans les délais fixés aux I et III de l'article 2. Cette proportion est de 50 % pour les dépenses engagées dans le délai prévu au IV du même article 2. » ;

b) Le deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« L'État peut assurer la maîtrise d'ouvrage de ces aires. Dans ce cas, le montant des dépenses qu'il engage est soumis au plafond précité. » - (Adopté.)

Article 61
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Articles additionnels après l'article 61 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 61

Mme la présidente. L'amendement n° II-44, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. L'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

II. L'article L. 542-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

III. Avant l'avant-dernier alinéa de l'article L. 831-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - le terme constant de la participation personnelle du ménage. »

IV. Les dispositions I à III s'appliquent à compter du 1er janvier 2009.  

V. La perte de ressources résultant pour l'État des dispositions des I à IV est compensée par une augmentation à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il s'agit, dans la logique de l'indexation des éléments du barème des aides au logement, d'indexer également la participation minimale des allocataires.

Une telle disposition nous dispenserait d'avoir à revenir régulièrement sur ce sujet, qui pose des problèmes à chaque fois. En effet, en général, cette participation minimale n'est pas modifiée pendant deux ou trois années ; et, quand on procède à sa réévaluation, des protestations s'élèvent souvent.

L'indexation de cet élément, à l'instar de tous les autres, permettrait donc de résoudre le problème.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. La proposition de M. le rapporteur spécial est intéressante.

Néanmoins, avant l'adoption d'une telle disposition, une réflexion pourrait à notre avis être engagée à cet égard dans le cadre des travaux de la révision générale des politiques publiques.

Nous tiendrons compte de votre suggestion, monsieur le rapporteur spécial, mais, pour l'instant, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Non, je le retire, en attendant d'y voir plus clair.

Mme la présidente. L'amendement n° II-44 est retiré.

L'amendement n° II-45, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. La seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 1111-2 du code général des collectivités territoriales est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Chaque année, dans les communes ayant conclu avec l'État un contrat d'objectifs et de moyens relevant de la politique de la ville, ou ayant bénéficié de la dotation de solidarité urbaine, au cours de l'exercice précédent, il est présenté, avant la fin du deuxième trimestre qui suit la clôture de cet exercice, un rapport aux assemblées délibérantes des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents sur les actions menées en matière de développement social urbain. Ce rapport retrace l'évolution des indicateurs relatifs aux inégalités, les actions entreprises sur les territoires concernés et les moyens qui y sont affectés. »

II. L'article L. 2334-19 du même code est abrogé.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il s'agit de simplifier les procédures. J'espère donc que tout le monde se retrouvera sur cet amendement !

Aujourd'hui, les collectivités locales peuvent être conduites à rendre trois rapports différents sur l'utilisation des crédits dans le cadre de la politique de la ville.

La commission propose donc de fusionner ces rapports afin de n'en demander qu'un seul aux collectivités locales, l'État devant s'assurer que ces dernières rendent effectivement bien cet unique rapport.

En effet, s'agissant de la dotation de solidarité urbaine, par exemple, très peu de collectivités - un tiers ou la moitié d'entre elles, les choses ne sont pas très claires - rendent véritablement le rapport demandé, ce qui n'est pas normal.

En simplifiant les choses d'un côté, nous pourrions tout à fait être plus exigeants de l'autre.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Il s'agit d'une mesure de clarification et de simplification. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement présenté par M. le rapporteur spécial, Philippe Dallier, à qui je souhaite d'ailleurs un bon anniversaire ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Je voterai en faveur de cet amendement de simplification auquel je souscris totalement.

Madame la ministre, puisque vous avez indiqué que des réflexions étaient menées sur la DSU, je souhaiterais que l'on puisse s'assurer que, dans les communes bénéficiaires de la DSU, cette dernière est bien utilisée pour des actions qui relèvent de la politique de la ville.

Mme Christine Boutin, ministre. Vous avez raison !

M. Thierry Repentin. Cette dotation de péréquation ne doit pas servir qu'à alimenter le budget général et ne doit pas se substituer à des actions de politique courante.

Pour l'avoir vécu moi-même en tant qu'adjoint chargé de la politique de la ville, je mesure combien il est difficile, lorsqu'il s'agit d'accompagner au titre de la politique de la ville, des actions soit de fonctionnement, soit d'investissement, de retrouver le fléchage de la DSU.

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Thierry Repentin. En outre - je m'exprime bien évidemment à titre personnel - je propose que la DSU puisse également, un jour, avoir un fléchage vers l'intercommunalité, notamment dans les communes qui ont transféré à l'intercommunalité la politique de la ville. Dès lors que l'intercommunalité assume totalement cette mission, le regroupement intercommunal ne doit-il pas être le destinataire de la dotation ?

Il y a donc devant nous des champs d'investigation que, les uns et les autres, nous n'avons peut-être pas explorés suffisamment, en ce qui concerne tant l'utilisation de la DSU pour mener de vraies actions en matière de politique de la ville que la réflexion sur le niveau de territoire le plus pertinent pour recevoir, dans l'avenir, en totalité ou en partie, cette dotation de péréquation.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Repentin, je suis très sensible à vos observations.

Je rappelle à la Haute Assemblée que la DSU représente 1 milliard d'euros.

Il est donc effectivement grand temps de réfléchir à son attribution et de veiller à ce qu'elle ne retombe pas sans aucun contrôle, sans aucun fléchage, dans les budgets généraux des communes.

Je suis donc totalement d'accord avec vous, monsieur le sénateur, sur les appréciations que vous avez portées.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-45.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

Mme la présidente. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.

L'amendement n° II-46 rectifié, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le cinquième alinéa de l'article 42 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elle fait l'objet d'une actualisation tous les cinq ans. »

II. - La première actualisation de la liste des zones urbaines sensibles est effectuée en 2009.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il s'agit, au travers de cet amendement, d'imposer une révision de la géographie de la politique de la ville, au moins tous les cinq ans, en fixant l'année 2009 comme point de départ, ce qui nous laisse l'année 2008 pour y réfléchir en toute sérénité.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-46 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.

L'amendement n° II-66, présenté par MM. P. André et Repentin, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur le bilan de la mise en oeuvre du dispositif de réussite éducative et sa poursuite au-delà du 31 décembre 2009.

La parole est à M. Pierre André, rapporteur pour avis.

M. Pierre André, rapporteur pour avis. Le dispositif de réussite éducative mis en place depuis 2005 rencontre aujourd'hui un succès grandissant. Toutefois, les crédits affectés à ce programme dans les lois de finances depuis 2005 ont été très inférieurs à la programmation prévue par la loi de 2005, du fait des délais de mise en place des différents projets.

Ainsi, sur une enveloppe de 1,4 milliard d'euros prévue, moins de 400 millions d'euros ont été budgétés à un an de la fin de la programmation.

Il manque donc encore aujourd'hui une centaine de projets pour parvenir à l'objectif de six cents projets fixés par la loi de 2005. Ceux-ci correspondent à des quartiers situés en zone urbaine sensible ou en zone prioritaire des contrats urbains de cohésion sociale. Or, en application de la circulaire de la délégation interministérielle à la ville de 2005, les conventions passées entre l'État et les collectivités ne peuvent dépasser le terme du 31 décembre 2009.

On imagine facilement que, dans ces conditions, les collectivités concernées hésitent désormais à s'engager sur un dispositif dont la poursuite au-delà de 2009 n'est pas garantie.

La commission des affaires économiques a donc souhaité, par cet amendement, obtenir des garanties explicites à ce sujet, notamment sur la possibilité de conclure des conventions au-delà de 2009, afin de permettre aux acteurs locaux de s'engager.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission est tout à fait favorable à cet amendement.

Les équipes de réussite éducative rencontrant un grand succès, on aurait pu espérer que ce dispositif, en dépit d'un retard au démarrage, d'ailleurs explicable, soit beaucoup plus employé. Financé sur les crédits du programme 147, il présente un intérêt particulier, et j'espère qu'il pourra être renforcé à l'avenir. En effet, beaucoup de choses se mettent en place à l'école, et ce dispositif me semble, à cet égard, avoir de grandes qualités.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Avis très favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-66.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.

Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Ville et logement ».

Articles additionnels après l'article 61 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Discussion générale

7

Transmission d'un projet de loi

Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par L'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2007.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 119, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

8

Dépôt d'une proposition de loi

Mme la présidente. J'ai reçu de Mmes Odette Terrade, Evelyne Didier, MM. Michel Billout, Gérard Le Cam, Jean-Claude Danglot, Mmes Eliane Assassi, Marie-France Beaufils, Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Robert Bret, Mmes Annie David, Michelle Demessine, MM. Guy Fischer, Thierry Foucaud, Mmes Brigitte Gonthier Maurin, Gélita Hoarau, Josiane Mathon-Poinat, MM. Robert Hue, Jack Ralite, Ivan Renar, Bernard Vera, Jean-François Voguet, François Autain et Pierre Biarnès une proposition de loi tendant à créer une action de groupe.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 118, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

9

Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Proclamation par le Parlement européen, le Conseil et la Commission le 12 décembre 2007 à Strasbourg. Autorisation de proclamer la Charte au nom du Conseil.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3720 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Décision du Conseil relative à la mise en oeuvre des articles 9 C, paragraphe 4, du traité sur l'Union européenne et 205, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, d'une part, et à partir du 1er avril 2017, d'autre part.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3721 et distribué.

10

Dépôt d'un rapport

Mme la présidente. J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur « L'évaluation et la prévention du risque du tsunami sur les côtes françaises en métropole et outre-mer », établi par M. Roland Courteau, sénateur, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le rapport sera imprimé sous le n° 117 et distribué.

11

ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 10 décembre 2007 à quinze heures et le soir :

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (n° 90, 2007 2008). Examen des articles de la seconde partie non rattachés à l'examen des crédits.

Rapport (n° 91, 2007-2008) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le samedi 8 décembre 2007, à une heure cinq.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD