Article 43
Le VII du E de l'article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003) est ainsi rédigé :
« VII. - Le taux de la taxe est fixé comme suit :
« 1° Pour les produits des secteurs de la mécanique : 0,1 % ;
« 2° Pour les matériels et consommables de soudage et les produits du décolletage : 0,112 % ;
« 3° Pour les produits du secteur de la construction métallique : 0,3 % ;
« 4° Pour les produits du secteur des matériels aérauliques et thermiques : 0,14 %. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 43
M. le président. L'amendement n° II-63, présenté par MM. Houel, Barraux, Bécot, J. Gautier, Pointereau, P. Blanc et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 43, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au quatrième alinéa (a) de l'article 1601 du code général des impôts, les montants : « 100 euros », « 14 euros » et « 109 euros » sont remplacés par les montants : « 101 euros », « 15 euros » et « 110 euros ».
La parole est à M. Michel Houel.
M. Michel Houel. Cet amendement a pour objet de majorer les plafonds du droit fixe de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de métiers et de l'artisanat, les CMA, et de l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat, l'APCM, afin que les chambres puissent exercer pleinement leurs missions.
Cette revalorisation, inférieure à 1,4 % pour l'année 2008, est très modérée par rapport aux augmentations intervenues les années précédentes.
En ce qui concerne l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat, il est proposé de porter de 14 euros à 15 euros le plafond du droit fixe la concernant. Cette revalorisation correspond au renforcement de la péréquation nationale gérée par cette tête de réseau en faveur des chambres régionales, en plus du système de péréquation applicable aux chambres départementales de moins de 5 000 ressortissants.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Éric Doligé, rapporteur spécial. La commission est favorable à cet amendement, qui tend à augmenter le plafond du droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers et de l'artisanat. Ainsi, la part des CMA de métropole passerait de 100 à 101 euros, celle de l'APCM de 14 à 15 euros et celle des chambres ultramarines de 109 à 110 euros. Seul le montant alloué aux chambres régionales de métiers et de l'artisanat, les CRMA, resterait inchangé.
Cette mesure a déjà été proposée à plusieurs reprises ; MM. les secrétaires d'État qui ont suivi ces budgets lorsqu'ils étaient parlementaires se souviennent certainement d'avoir eu à débattre de cette question (M. Hervé Novelli, secrétaire d'État, opine.). Il serait donc souhaitable de voir clair dans les missions des chambres de métiers. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé, au titre du contrôle budgétaire pour 2008, avec l'assistance d'un magistrat détaché par la Cour des Comptes, à pouvoir clarifier ce sujet afin de ne pas avoir à y revenir les années suivantes.
Bien sûr, la commission est favorable à cet amendement, en espérant que le groupe CRC l'approuvera totalement dans la mesure où il vise à aider, non pas le MEDEF, mais l'artisanat. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, dont l'objet est intéressant à plus d'un titre.
En effet, s'il tend à majorer les plafonds de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle pour les chambres de métiers et de l'artisanat et l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat, il le fait de manière très modérée au regard des augmentations précédentes, puisque le taux avait été majoré de 7,6% entre 2003 et 2004 et de 4,3 % entre 2005 et 2006. Cette hausse, qui sera inférieure à 1,4 % pour 2008, va permettre à ces chambres de métiers d'exercer leurs missions de service public.
Pour ce qui concerne l'l'Assemblée permanente, il est proposé de porter de 14 à 15 euros le plafond du droit fixe la concernant. Ce plafond n'avait été revalorisé ni en 2006 ni en 2007. Cette augmentation, qui, là encore, est très modérée, va nous permettre de développer le service qu'offre l'APCM aux artisans et aux chambres de métiers.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 43.
Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Développement et régulation économiques ».
Pilotage de l'économie française
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pilotage de l'économie française ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Pilotage de l'économie française » constitue l'une des innovations du projet de loi de finances pour 2008.
Elle résulte de la modification des périmètres ministériels et comprend deux programmes. Le premier, intitulé « Statistiques et études économiques », est issu de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », aujourd'hui disparue de la maquette budgétaire ; le second est un nouveau programme, dénommé « Politique économique et de l'emploi ».
Les crédits de paiement de cette mission s'élèvent à 844,1 millions d'euros et se répartissent de manière relativement équilibrée entre le programme « Statistiques et études économiques », doté de 451,5 millions d'euros, soit 53,5 % des crédits de la mission, et le programme « Politique économique et de l'emploi », dont l'enveloppe budgétaire s'élève à 392,6 millions d'euros, soit 46,5 % des crédits de la mission.
Si le programme « Statistiques et études économiques » a atteint un régime de croisière satisfaisant en termes de performances et d'évolution des emplois, le programme « Politique économique et de l'emploi » souffre de lacunes certaines au regard de la mesure de sa performance.
Le programme « Statistiques et études économiques » fait l'objet d'un contrat pluriannuel de performances, signé en 2007 et portant sur la période 2007-2009. Il convient de souligner que ce contrat joue un rôle très utile en permettant d'accroître la visibilité à moyen terme, tout en préservant des marges de manoeuvre nécessaires. Le programme ne connaît qu'une légère progression de son enveloppe budgétaire : les crédits de paiement augmentent de 1,3 %, pour un montant total de 451,5 millions d'euros.
Parmi ces crédits, les dépenses de personnel sont prépondérantes, absorbant 83,7 % de l'enveloppe budgétaire. Pour autant, le plafond d'emplois diminue de 111 équivalents temps plein travaillé, pour se fixer à 6 131 en 2008. Cette évolution est conforme à la logique du plan d'ajustement des effectifs fixé par le contrat pluriannuel de performances.
Le programme « Statistiques et études économiques » pâtit de l'absence préjudiciable d'une comptabilité analytique, qui permettrait l'analyse de ses coûts et un véritable contrôle de gestion. Cette piste d'amélioration devra être rapidement empruntée pour maintenir le niveau de performance de ce programme, qui était jusqu'à présent satisfaisant.
Le nouveau programme « Politique économique et de l'emploi » cherche à décloisonner les politiques en faveur de la compétitivité des entreprises et les politiques de l'emploi.
Dans cette perspective, il vise à faire travailler en commun la direction générale du trésor et de la politique économique, la DGTPE, la direction de la législation fiscale, la DLF, et la direction générale de l'emploi et de la formation professionnelle, la DGEFP. Si cet objectif doit être encouragé, seul le temps permettra toutefois de juger de la réussite en la matière. En effet, il ne faut pas se cacher que les directions concernées se caractérisent par des cultures administratives a priori relativement éloignées les unes des autres. Au total, les crédits de ce programme s'élèvent à 392,6 millions d'euros.
Très hétérogène, ce dernier doit encore être perfectionné pour remplir véritablement son rôle de « trait d'union » entre la politique en faveur de la compétitivité des entreprises et la politique de l'emploi. Ainsi, des dépenses fiscales sans lien direct avec le programme y figurent pourtant, par exemple, des réductions de droits pour les donations dont le rattachement doit être incontestablement modifié.
Plus largement, l'hétérogénéité du programme et la multiplication des interactions entre les différents programmes du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, rendent extrêmement complexe l'analyse des coûts relatifs à la DGTPE, à la DLF et à la DGEFP.
De même, la mesure de la performance de ce programme n'est pas satisfaisante et les indicateurs proposés ne sont pas suffisamment adaptés. Surtout, son volet « emploi » ne fait l'objet d'aucune évaluation de performance, ce qui traduit une volonté politique n'ayant pas encore trouvé sa pleine application en loi de finances.
Tout se passe comme si le programme « Politique économique et de l'emploi » n'était pas allé au bout de sa logique et s'était, en définitive, arrêté au milieu du gué ! Dans ces conditions, il conviendra de suivre avec la plus grande attention sa nécessaire évolution l'année prochaine, en espérant une plus grande homogénéité de ses actions dans le prochain projet de loi de finances.
En conclusion, et malgré ces remarques finales qui devront trouver des réponses dans les prochains projets de budget, la commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits de la mission et de chacun de ses programmes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission que nous examinons aujourd'hui, intitulée « Pilotage de l'économie française », ne représente pas de gros enjeux budgétaires en tant que tels, puisque, sur les 841 millions d'euros dont elle est dotée pour 2008, les crédits de personnels en représentent 70 %, le reste étant essentiellement constitué de crédits de fonctionnement.
En revanche, elle soulève des questions importantes sur les outils de pilotage de l'économie française, puisque la moitié de ses crédits concerne le financement de l'INSEE, qui se trouve cette année au coeur de plusieurs débats importants.
Le premier débat d'importance, dont notre commission s'était largement fait l'écho l'an dernier, porte sur la mesure de l'inflation et l'indice des prix. Depuis l'année dernière, cette question a fait son chemin et les points principaux qui expliquent le décalage entre l'indice des prix et la perception de nos concitoyens ont été identifiés.
Vous avez annoncé, monsieur le secrétaire d'État, la constitution d'une commission dédiée à la mesure du pouvoir d'achat. Pouvez-vous nous indiquer les évolutions envisagées sur ce sujet et nous préciser, notamment, s'il est prévu de modifier l'indice des prix à la consommation lui-même ou s'il est envisagé simplement de créer de nouveaux indices ?
Le deuxième débat qui a concerné l'INSEE cette année concerne le calcul du taux de chômage. L'institut a en effet décidé, au mois de mars de cette année, de reporter à l'automne la publication des chiffres du chômage pour 2006, du fait d'une trop grande divergence entre les résultats de son enquête « Emploi » et les données de l'ANPE.
Depuis, un groupe de travail s'est mis en place au sein du Conseil national de l'information statistique, le CNIS, dont les conclusions devraient être connues d'ici la fin de l'année. Parallèlement, un autre rapport a été confié à l'Inspection générale des finances et certaines de ses préconisations ont d'ores et déjà été retenues. Ainsi le taux de chômage pour 2006, publié finalement le 12 novembre, intégrait-il déjà des modifications de calcul suggérées par ce rapport.
Je regrette, pour ma part, que l'on n'ait pas attendu les conclusions du groupe de travail du CNIS avant de modifier ainsi le mode de calcul du taux de chômage. Je relève en revanche que, parmi ces propositions, figurait une bonne suggestion, consistant à doubler la taille de l'échantillon de l'enquête « Emploi ». Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'État, si cette mesure sera mise en oeuvre ? Dans ce cas, l'INSEE sera-t-il doté de moyens supplémentaires ou ce doublement s'effectuera-t-il à moyens constants ? La réduction mécanique des effectifs de l'INSEE, observée d'année en année, sera-t-elle atténuée ?
Le troisième débat a trait à l'indépendance de l'INSEE. Le code de bonnes pratiques de la statistique européenne, promulgué en 2005, prévoit que l'indépendance de l'autorité statistique est inscrite dans le droit. Or la France est l'un des rares pays européens qui ne respecte pas ce principe.
Une réflexion est en cours à l'INSEE sur ce sujet. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'État, où en est cette réflexion ? Une loi est-elle envisagée ? Est-il prévu de créer un haut conseil composé de personnalités indépendantes ?
En tout état de cause, notre commission juge qu'il serait préjudiciable de transformer l'INSEE en établissement public ou en agence. Le statut public des administrateurs de l'INSEE garantit, en effet, à la fois leur indépendance, leur polyvalence et leur rôle de coordonnateurs de l'ensemble des statistiques produites par les différents ministères.
J'en viens à présent au deuxième programme de la mission, doté de 392,7 millions d'euros, qui regroupe notamment les crédits des personnels de la direction générale du Trésor. Ce programme a subi directement les conséquences des modifications intervenues au mois de mai dans les découpages ministériels, puisque la politique économique et la politique de l'emploi ont été regroupées sous l'autorité d'un même ministère.
Je regrette que ce changement se soit effectué dans une certaine précipitation, qui explique sans doute que le programme ne comporte aucun objectif ni aucun indicateur de performance relatifs à la politique de l'emploi. Pouvez-vous nous indiquer quelles évolutions sont envisagées sur ce sujet, et nous préciser en quoi le rattachement à la présente mission des crédits de personnel de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle permettra une meilleure coordination des politiques ?
Sous le bénéfice de ces observations, la majorité de la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur les crédits de cette mission.
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose. Toutefois, le groupe du Rassemblement démocratique et social européen a souhaité reporter une partie du temps de parole dont il bénéficiait au titre d'autres missions ; il dispose donc de dix minutes pour la présente mission.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
M. Jean-Claude Danglot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, compte tenu des cinq minutes qui me sont allouées pour exprimer l'avis du groupe communiste républicain et citoyen sur la mission « Pilotage et conduite de l'économie », je concentrerai mes propos sur l'Institut national de la statistique et des études économiques.
Récemment, l'Institut a annoncé une série de modifications concernant ses enquêtes sur l'emploi, notamment l'augmentation de la taille de l'échantillon de référence. Selon nous, cette évolution ne peut être envisagée que si des moyens financiers et en personnels supplémentaires sont accordés
Or, la loi de finances et le contrat pluriannuel de performance, signé en février dernier entre le secrétaire général du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le directeur du budget et le directeur général de l'INSEE, ne vont pas dans ce sens. Ainsi, le contrat de performance prévoit une réduction des emplois équivalents temps plein travaillé de 5,4 % sur trois ans. Le Gouvernement confirme donc, encore une fois, sa politique de démantèlement des administrations de l'État, poussant vers la privatisation un nombre croissant de missions d'enquête et de contrôle.
En ce qui concerne plus précisément les missions de l'INSEE, je voudrais maintenant aborder deux questions d'importance pour nos concitoyens : les chiffres du chômage et l'indice des prix.
Notre assemblée - comme chacun d'entre nous, j'en suis persuadé - est convaincue qu'une statistique indépendante est un outil essentiel de démocratie politique. Garantir cette indépendance nécessite de s'interroger sur l'existence d'éventuelles pressions politiques sur les institutions statistiques mais, également, d'assurer la transparence méthodologique.
Or, en janvier dernier, l'INSEE a pris une décision unique dans son histoire en reportant la publication des chiffres du chômage au lendemain de l'élection présidentielle. En effet, contrairement aux déclarations triomphales du gouvernement de Villepin, le taux de chômage moyen n'était vraisemblablement pas descendu à 8,7 % de la population active, mais avoisinait les 9,8 %.
Ce taux était certainement très gênant pour un candidat à l'élection présidentielle, membre du gouvernement depuis plusieurs années, et qui n'entendait pas mener une politique économique et sociale très différente ! Nous ne pouvons que constater l'existence d'un véritable problème d'indépendance de la statistique et de sa crédibilité.
Selon le Gouvernement, le chômage baisse. Or, comme l'a rappelé la sénatrice Odette Terrade dans son rapport, l'INSEE confesse lui-même que la modification de sa méthode de calcul a abouti à réduire le taux de chômage de presque un point au deuxième trimestre de 2007 ! Une chose est sûre, si le chômage baisse, le nombre de chômeurs au sens du Bureau international du travail est supérieur aux 2,2 millions affichés à la fin du mois de juillet 2007 par le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi !
Pourquoi croyez-vous que nos concitoyens ne ressentent pas l'amélioration du marché de l'emploi ? Sans doute parce que les chiffres que vous assénez ne rendent pas compte de la réalité ! Dans les chiffres de l'ANPE, des populations entières ne sont pas prises en compte : est-ce à croire que ces personnes n'existent plus ? Or, si le taux de chômage s'est stabilisé, l'ensemble des gens privés d'emploi, se trouvant dans des situations précaires, a continué de progresser.
À titre d'exemple, dans mon département, tous les secteurs sont touchés. C'est ainsi que 10 000 emplois industriels ont été supprimés durant ces quatre dernières années, dans le textile, et notamment dans le secteur de la dentellerie, qui continue à délocaliser à outrance, dans la chimie, chez les équipementiers automobiles, dans l'agroalimentaire, la verrerie - avec Arc international -, l'industrie papetière et dans bien d'autres encore. Le secteur public n'est pas épargné : hôpitaux, tribunaux, enseignement. L'annonce récente de 7 000 suppressions de contrats de travail dits « aidés », dans le seul département du Pas-de-Calais, sème également le doute sur les résultats que vous présentez. En revanche, ces salariés attendent pour cette fin d'année leur lettre de licenciement, qui, elle, sera bien réelle !
Je ne souhaite pas continuer dans la froideur de vos statistiques. Je m'attacherai surtout à vous dire ce qu'elles représentent dans la vie concrète de milliers de personnes, qui souhaitent tout simplement vivre dignement de leur travail !
En octobre 2007, une délégation d'une centaine de demandeurs d'emploi du Nord-Pas-de-Calais a entrepris une marche pour le respect de la dignité humaine et le droit au travail. Le samedi 27 octobre, à l'issue de leur périple qui les a conduits à traverser six départements, ils ont remis 4 500 curriculum vitae à l'Élysée, à l'intention du Président de la République.
À ce jour, aucune offre d'embauche n'est parvenue à ces milliers de demandeurs d'emploi qui ont fait cette démarche. Pourtant, le Président de la République avait promis, lorsqu'il était candidat, de proposer deux emplois adaptés à chaque chômeur. La livraison se fait toujours attendre dans les ANPE ! Le Gouvernement est-il vraiment capable d'honorer cet engagement chiffré ?
Au regard de l'inadéquation des mesures annoncées par le Président de la République pour répondre à la baisse du pouvoir d'achat des Français et à la précarisation accrue du monde du travail, je crois qu'il n'était pas inutile, dans une mission consacrée au pilotage et à la conduite de l'économie, d'aborder la question des décalages existant entre la perception de la réalité par le Gouvernement et par les Français. Même si je reste persuadé que l'insuffisance des actions menées relève plus de l'absence de volonté politique que de la cécité ! (Mme Odette Terrade applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Pilotage de l'économie française » est la nouveauté de ce projet de loi de finances pour 2008. Elle est majeure, en l'état actuel des choses, tant il est vrai que notre politique budgétaire ne permet ni une allocation efficace des ressources, ni leur redistribution équitable, ni une stratégie macroéconomique de l'État.
Si notre pays ne dispose plus de l'ensemble des leviers budgétaires depuis le traité de Maastricht, celui-ci nous laisse néanmoins une latitude d'action importante. Mais - c'est un point capital - il serait absolument contre-productif d'agir sans tenir compte de ce que font nos voisins européens.
Le principal mal dont souffre notre économie réside aujourd'hui, sans aucun doute, dans une compétitivité très moyenne. Le forum économique mondial nous classait ainsi, en 2006, au dix-huitième rang mondial, en recul de six places. Sont en cause notre déficit public, l'efficacité limitée de notre système éducatif et l'incroyable rigidité de notre marché du travail. Certes, nous sommes restés au même rang en 2007, mais est-ce une consolation ?
Nos compatriotes demandent légitimement à mieux vivre du fruit de leur travail. Or, une hausse des salaires doit absolument s'accompagner de profondes réformes structurelles en faveur de la compétitivité. Rappelons la crise de 1983, lorsque la politique de hausse des coûts avait conduit à une explosion de l'inflation, au creusement abyssal de notre déficit commercial et à trois dévaluations. Aujourd'hui, l'euro fort semble nous protéger, mais, en réalité, il cache les maux qui nous frappent.
Agissons donc sans attendre, monsieur le secrétaire d'État !
Avant tout, la résorption de notre déficit public est en cause. Pourquoi ne pas s'inspirer de nos voisins allemands ? D'un déficit de 2,5 % en 2005, comparable au nôtre, ils passeront probablement à excédent budgétaire à partir de 2010, voire 2009, selon certains experts.
Depuis vingt-sept ans, aucun Premier ministre français n'a présenté devant le Parlement un budget en équilibre. Quelles raisons pouvez-nous donner, monsieur le secrétaire d'État, pour que l'on puisse croire que cela va changer ?
Selon le programme de stabilité 2009-2012, transmis à la Commission, l'objectif de réduction de la dette publique a encore été modéré pour viser 63,2 % en 2009 et 60 % en 2012. Pourquoi ? Cette politique est très négative vis-à-vis tant de nos partenaires que de nos compatriotes, l'État montrant en la matière un exemple déplorable.
La littérature est abondante et tous les avis d'experts convergent pour estimer que notre dette ne sera plus soutenable à terme.
Je citerai quelques exemples, pour mémoire.
En 2004, le rapport Camdessus préconisait notamment une décrue des effectifs de fonctionnaires, la généralisation de la contractualisation dans le secteur public ou l'adoption d'une approche budgétaire contra-cyclique ; en 2005, le rapport Pébereau recommandait, quant à lui, de stabiliser les dépenses de l'État en euros courants, d'affecter intégralement les recettes exceptionnelles au désendettement, ou encore de gager une dépense nouvelle par la suppression à due concurrence d'une autre dépense ; enfin, dans son récent rapport sur les perspectives économiques 2008-2012, notre collègue Joël Bourdin en appelle, de son côté, au ciblage d'une croissance potentielle plus élevée tout en resserrant la norme des dépenses publiques.
Monsieur le secrétaire d'État, rationaliser les postes de dépenses de l'État est impératif. La fonction publique représente 25 % de la population active française, contre 16 % en moyenne dans les pays de l'OCDE. De 1990 à 2001, ses effectifs sont passés de 3,9 millions à 4,7 millions d'agents, soit une hausse de 23 %, supérieure de neuf points à celle du nombre des salariés du privé. Enfin, en 2003, la rémunération moyenne nette d'un agent public était supérieure de 14 % à celle d'un salarié du privé, à fonctions équivalentes.
Cet aperçu donne le ton de la nécessité d'une réforme de l'État. Mettons en place une gouvernance déterminée et efficace.
Que s'est-il fait, ailleurs ?
En 2000, la Suisse a supprimé le statut de fonctionnaire pour y substituer un contrat individuel de droit public, fondé sur l'efficacité et la mobilité de l'agent, ouvrant la possibilité d'un licenciement, en contrepartie d'une meilleure rémunération. Les effectifs sont ainsi passés, à qualité constante, de 140 000 en 1996 à 110 000 en 2004.
Dans les années quatre-vingt-dix, la Suède a diminué de moitié ses effectifs de fonctionnaires. Ceux-ci sont aujourd'hui employés sous contrat de droit privé avec pour objectif la gestion la plus efficace des services de l'État, ce qui, au final a conduit à une amélioration de la qualité de ces services.
Monsieur le secrétaire d'État, la discussion des crédits de la mission «Pilotage de l'économie française » ne revêt malheureusement pas la dimension qui devrait être la sienne. Les montants engagés - 392,6 millions d'euros - paraissent bien faibles comparés à la masse des quarante-huit missions de l'ensemble du budget pour 2008. Ils financent pourtant des services essentiels au redressement de notre économie, destinés à mettre en place une véritable révolution culturelle élaborant la stratégie qu'il nous faut adopter.
Nous ne pouvons plus nous contenter aujourd'hui d'une politique budgétaire d'accompagnement, aux marges de manoeuvre dérisoires. Seule une politique ambitieuse, mais aussi courageuse, qui, si elle est sans doute difficile à mettre en place, n'en est pas moins vitale, pourra remettre la France sur la voie de la prospérité.
Vous êtes convaincu, monsieur le secrétaire d'État, de l'efficacité et de l'équité d'une politique sociale libérale. Je souhaite que vous en soyez l'initiateur. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons ce matin une partie des crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, regroupés dans la mission « Pilotage de l'économie française ».
Je souhaiterais, sans attendre, remercier les deux rapporteurs, tant M. Massion que Mme Terrade, pour leur contribution à ce débat ; j'y reviendrai dans quelques instants.
Il est vrai que, pour la première fois, quatre grandes directions ont été réunies au sein d'une même enveloppe budgétaire : la direction générale du Trésor et de la politique économique, la direction de la législation fiscale, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, ainsi que l'Institut national de la statistique et des études économiques.
Je souhaiterais, plutôt que de m'attarder sur tel ou tel chiffre, répondre aux interrogations et aux remarques qui ont été formulées sur cette mission. À cet égard, je voudrais souligner la convergence de vues ente le Gouvernement et les deux rapporteurs
Je centrerai mon propos sur l'INSEE.
En effet, aujourd'hui, l'INSEE constitue bien le coeur d'une politique destinée à donner au Gouvernement, ainsi qu'à l'opinion, un certain nombre d'indicateurs économiques pertinents. Je profite de cette occasion pour saluer la présence parmi nous de son nouveau directeur général, M. Jean-Philippe Cotis, et je veux redire combien le Gouvernement est attaché à la fois à la clarté des chiffres et à l'indépendance de cet institut national.
Deux indicateurs doivent être complétés, ou tout au moins modernisés - tel est le sens de certains de vos propos que nous partageons -, à savoir l'indice des prix à la consommation, pour mieux tenir compte de la réalité vécue par les ménages, et les chiffres du chômage.
Vous le savez, le 23 octobre dernier, le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi a annoncé la constitution d'une commission consacrée à la mesure du pouvoir d'achat. L'Assemblée nationale elle-même a initié une mission d'information sur ce même sujet.
Quant à la mission qui a été confiée à M. Alain Quinet par Mme le ministre de l'économie, elle rendra ses conclusions au printemps 2008, et proposera des indicateurs complémentaires, affinés, concernant la mesure du pouvoir d'achat. Cette commission fait porter son attention, en particulier, sur le thème des « dépenses contraintes », en proposant une définition suffisamment précise et consensuelle pour permettre le calcul, sur une base régulière, des indices d'évolution. De plus, elle devrait suggérer à l'INSEE - telle est, en tout cas, son intention - de mettre au point des indicateurs complémentaires distinguant l'évolution du coût de la vie pour les locataires, d'une part, et pour les propriétaires, d'autre part. Nous lui laissons le temps de travailler.
Pour ce qui est des chiffres du chômage, le rapport de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des affaires sociales a été rendu le 24 septembre dernier. Il dresse un constat précis des divergences entre les différentes sources. Aucune suspicion n'a donc plus lieu d'être à cet égard, monsieur Danglot !
Sur la base des améliorations statistiques entreprises, l'INSEE a rendu publique, le 14 novembre, une série révisée de taux de chômage jusqu'au premier semestre de 2007.
Le taux de chômage en France - la pente est avérée - diminue continûment pour atteindre 8,1 % au deuxième trimestre de 2007. Il s'agit là, à mes yeux, d'une excellente nouvelle, qui ne peut qu'être bien accueillie sur toutes les travées de cette assemblée, et qui nous encourage, monsieur de Montesquiou, à aller plus loin dans les réformes structurelles dont notre économie a besoin. J'en dirai un mot dans quelques instants.
Enfin, un groupe de travail présidé par M. Jean-Baptiste de Foucauld au sein du Conseil national de l'information statistique, le CNIS - Mme Terrade en a parlé - a été chargé de proposer de nouveaux indicateurs en matière d'emploi, de chômage, de sous-emploi et de précarité de l'emploi.
Ce groupe de travail, je tiens à le préciser, analyse des situations intermédiaires se situant entre l'emploi et le non-emploi. Il vise à proposer un élargissement de la palette des indicateurs, et non pas à modifier l'indicateur concernant la mesure du taux de chômage, ces deux éléments étant distincts. Cette mesure a d'ores et déjà été modifiée et restera inchangée dans les mois qui viennent.
Vous avez évoqué, madame Terrade, l'indépendance de l'INSEE.
Je veux vous dire une nouvelle fois que le Gouvernement est très attaché à cette indépendance, dans la mesure même où, comme vous l'avez justement indiqué, elle constitue la garantie de l'efficacité de cet institut, de sa fiabilité et de la confiance que les citoyens mettent dans notre appareil statistique.
Cette indépendance est déjà assurée de facto et je puis vous indiquer aujourd'hui que, comme vous, nous envisageons de l'inscrire dans le droit. Cela nous permettra de faire coïncider le droit et la pratique, conformément aux recommandations du code de bonnes pratiques de la statistique européenne de 2005. Nous ferons, dans quelques temps, des propositions dans ce sens.
Je répondrai maintenant sur quelques points, qui ont été mentionnés par les uns et les autres.
Je vous rappellerai, madame Terrade, que le CNIS réalise en ce moment même un certain nombre de travaux distincts de ceux qui concernent la nouvelle mesure du taux de chômage ; nous attendons leur conclusion.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez souligné que les indicateurs accolés à la mission « Pilotage de l'économie française » ne sont pas pertinents. Personnellement, je suis prêt à partager votre avis, mais je souhaiterais vous faire remarquer que la pertinence des indicateurs concernant le travail et l'emploi doit s'apprécier au sein de la mission « Travail et emploi ».
En effet, comparons, si vous le voulez bien, les moyens dévolus à cette mission à ceux qui sont inscrits dans la mission « Développement et régulation économiques ». La mission « Travail et emploi » bénéficie de 11,3 milliards d'euros, contre 20 millions d'euros consacrés aux moyens de fonctionnement des administrations dans le programme que nous examinons en cet instant !
Dès lors, il est clair que ces indicateurs ont toute leur place dans la mission « Travail et emploi », même si je vous donne acte du fait que l'on peut améliorer les indicateurs qui se trouvent accolés à la mission que nous étudions aujourd'hui.
Monsieur de Montesquiou, vous vous êtes livré à une profession de foi sur la nécessité de doter notre pays de finances équilibrées. Tel est, évidemment, le dessein de ce Gouvernement. Vous avez également remarqué, avec raison, que, sous tous les gouvernements précédents, les finances publiques avaient affiché des déficits. Pour notre part, nos objectifs sont clairement définis : rétablir ces équilibres et faire baisser l'endettement de l'État.
Le Gouvernement s'est engagé dans une double politique.
D'une part, il entend relancer la compétitivité des entreprises et de l'économie françaises. Une économie durablement sous-compétitive serait, en effet, dans l'incapacité de rétablir l'équilibre de nos finances. C'est pour cela que les pouvoirs publics font adopter par le Parlement des textes qui visent par exemple, à libérer le travail ou à favoriser l'investissement dans le capital des PME par des mesures relatives à l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est encore pour cela que le Gouvernement mène une politique globale en faveur de l'innovation, ainsi que nos débats de ce matin viennent de le montrer. Toutes ces actions tendent vers un unique but, mettre nos entreprises en situation de compétitivité.
D'autre part, le Gouvernement se livre à une revue générale des politiques publiques, afin de réformer l'État et de le rendre plus efficace pour un coût moindre. Il va de soi que, comme vous, monsieur le sénateur, je suis partisan de la baisse de nos dépenses publiques. Elle est nécessaire, mais elle ne peut se faire que dans ce cadre !
Je ne saurais trop vous encourager à soutenir ce Gouvernement, monsieur le sénateur. Vous faites partie de la majorité...