M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le 2 décembre prochain vont se dérouler en Russie des élections législatives.
L'opinion publique a été alertée à plusieurs reprises par des atteintes graves et répétées à la liberté d'opinion, à la liberté d'expression, et même par l'incarcération des opposants.
M. Marcel-Pierre Cléach. Kasparov !
M. David Assouline. Et en Chine ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Et en France ?
M. Josselin de Rohan. Or la Russie appartient au Conseil de l'Europe et à l'OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah oui !
M. Josselin de Rohan. Il entre dans la vocation de ces organisations internationales de contrôler les élections dans les pays membres.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ça leur va bien !
M. Josselin de Rohan. Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme, ou BIDDH, qui est une émanation de l'OSCE, s'est vu imposer par la Russie des restrictions sans précédent : limitation de la période d'observation, plafonnement draconien du nombre des observateurs, prétention à influer sur la composition de la mission.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vraiment, ça ne va pas du tout !
M. Josselin de Rohan. Devant ces obstructions répétées, le BIDDH a dû renoncer à exercer sa mission.
M. Yannick Bodin. Dommage qu'il n'aille pas en Chine !
M. Josselin de Rohan. Quant à l'assemblée parlementaire de l'OSCE, elle s'est vu proposer 30 postes d'observateurs pour 95 000 bureaux de vote. Dans ces conditions, le président de la délégation française à l'assemblée parlementaire de l'OSCE comme le président de la délégation britannique ont refusé de se rendre en Russie.
M. Yannick Bodin. Ils ont eu raison !
M. Josselin de Rohan. Parallèlement, le gouvernement français, comme d'autres gouvernements européens, a reçu une invitation bilatérale du gouvernement russe à envoyer des observateurs. Il a également été invité à prier son ambassadeur à Moscou d'assister à une réunion où le président de la commission de contrôle présenterait les observations de ladite commission et de se présenter le jour de l'élection pour observer la légalité dans les bureaux de vote.
M. le président. Exact !
M. Josselin de Rohan. Madame la secrétaire d'État, ma question est la suivante.
Le gouvernement français va-t-il accepter l'invitation des Russes, au risque de cautionner des élections antidémocratiques ? (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)
Deuxièmement,...
M. Ivan Renar. Une seule question !
M. Josselin de Rohan. ...le gouvernement français est-il disposé à intervenir auprès de la Russie pour qu'elle respecte ses engagements internationaux ?
Troisièmement, et enfin, le gouvernement français est-il disposé à intervenir pour qu'on libère les opposants qui ont été injustement incarcérés ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Henri de Raincourt. Très bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. La guerre froide est finie, mon pauvre monsieur de Rohan !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. Monsieur le sénateur, le 2 décembre, vous venez de le rappeler, de nouvelles élections législatives se tiendront en Russie. Ce scrutin marquera une étape essentielle avant l'élection présidentielle du 2 mars prochain.
Vous le savez également, le seuil minimal pour qu'une formation puisse siéger à la Douma a été récemment relevé de 5 % à 7 % des suffrages.
Compte tenu des conditions strictes fixées à l'enregistrement des partis politiques et des difficultés faites à des forces d'opposition divisées, ces élections opposeront pour l'essentiel le parti présidentiel « Russie Unie » et le parti communiste.
M. Jean-Luc Mélenchon. Eh bien ! Il n'y a qu'à voter communiste !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. Ce tête-à-tête n'est malheureusement pas un gage de pluralisme politique.
Les conditions dans lesquelles se déroule la campagne électorale ont conduit le mouvement d'opposition « Une autre Russie » aux « marches du désaccord » du week-end dernier, qui se sont soldées par l'arrestation de son chef, Gary Kasparov, condamné depuis à cinq jours de prison ferme.
Ce lundi, la France a exprimé publiquement son inquiétude devant ces événements, comme l'Allemagne et comme l'Union européenne dans son ensemble.
Vous l'avez rappelé, l'OSCE a effectivement dû renoncer à l'envoi d'une mission d'observation. Les autorités russes l'ont en effet invitée tardivement et ont fixé des règles draconiennes qui ne permettaient pas à cette mission d'observation de se dérouler dans de bonnes conditions.
La France, comme la plupart de ses partenaires européens, a décidé de ne pas envoyer d'observateurs dans un cadre bilatéral, parce que, comme l'OSCE, elle considère que les conditions d'un suivi sérieux de ce scrutin - 95 000 bureaux de vote répartis sur un territoire immense de 17 millions de kilomètres carrés - ne sont pas réunies.
Une présence internationale sera néanmoins assurée, et je tiens à remercier les parlementaires français qui y prendront part, soit au titre de l'assemblée parlementaire de l'OSCE, soit au titre de celle du Conseil de l'Europe.
Sur le terrain, il y aussi des ONG russes, des représentants de petits partis politiques, certes en nombre insuffisant, mais qui auront une part active dans la dénonciation des éventuelles errances du scrutin.
C'est d'ailleurs là que se trouve notre espérance : dans le développement de la société civile. Le combat mené par les avocats, par les journalistes, par les défenseurs des droits de l'homme, par les militants politiques, au péril de leur vie ou de leur liberté, est la preuve manifeste de sa vivacité. Nous avons tous à l'esprit le cas emblématique d'Anna Politkovskaïa.
Certes, ce combat s'accompagne de souffrances, mais nous ne devons pas nous contenter d'espérer que le temps fasse son oeuvre, au prix de nombreux sacrifices. Ici, notre devoir est double : d'une part, favoriser, multiplier les contacts de société civile à société civile et, d'autre part, sur le plan politique, convaincre le président Poutine, dans sa responsabilité d'homme d'État, que la Russie, ce grand pays, a tout à gagner à accélérer sa marche vers la démocratie. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, « la France a un problème de pouvoir d'achat ». Ce sont vos propres termes. Enfin, les difficultés quotidiennes des Français sont arrivées à la connaissance du Gouvernement ! (Protestations et rires sur les travées de l'UMP.)
M. René Garrec. Le « enfin » est de trop !
M. Bernard Frimat. Depuis plusieurs semaines, les sénateurs socialistes vous interrogent sans obtenir une réponse qui prenne en compte les inquiétudes des ménages n'arrivant plus à joindre les deux bouts.
Votre réponse se limite à décliner le slogan de campagne « Travailler plus pour gagner plus » et à développer sur les ondes une campagne glorifiant le supposé bonheur futur du salarié qui verrait ainsi son revenu majoré.
Cette propagande sera appréciée à sa juste valeur par ceux dont les revenus stagnent...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ou baissent !
M. Bernard Frimat. ...ou baissent.
« Gagner moins et payer plus » est un slogan plus illustratif des conséquences de votre politique.
Plusieurs sénateurs socialistes. C'est vrai !
M. Bernard Frimat. Que proposez-vous pour augmenter les salaires des travailleurs postés qui ne peuvent pas faire d'heures supplémentaires ?
Que proposez-vous pour augmenter les salaires des travailleurs auxquels leur patron n'accorde pas d'heures supplémentaires ?
Que proposez-vous pour améliorer la situation des chômeurs, qui demandent non pas à travailler plus, mais, tout simplement, à travailler ?
Les choix de votre gouvernement ont aggravé la situation. Vous avez refusé de donner un coup de pouce au SMIC. Vous avez refusé d'augmenter la prime de rentrée scolaire.
M. Josselin de Rohan. Et Jospin, qu'a-t-il fait ?
M. Bernard Frimat. Vous ignorez la vie difficile des bénéficiaires des petites retraites et vous ne leur proposez dans le budget prochain qu'une augmentation de 1,1 %. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Aucune négociation salariale sérieuse n'a été engagée ni dans le privé ni dans le public. Vous maltraitez les fonctionnaires. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Mahéas. Ah oui !
M. Jacques Valade. Démagos !
M. Bernard Frimat. Ils vous l'ont crié dans la rue. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ne vous plaignez pas de ce qui est fait !
Mme Éliane Assassi. Assumez !
M. Bernard Frimat. Vous répétez, monsieur le Premier ministre, qu'il n'y a pas d'argent à distribuer. Vous devriez dire que vous n'avez plus d'argent, puisque vous avez préféré arroser généreusement les plus favorisés. (Protestations sur les mêmes travées.)
Les Français ont besoin de mesures concrètes et rapides pour améliorer le pouvoir d'achat. Le parti socialiste a fait des propositions (Oh ! sur les travées de l'UMP), le Gouvernement attend.
Ma question sera simple : l'action du Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat se limite-t-elle à attendre passivement que le Président annonce à la télévision des recettes miracles ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - M. Nicolas Alfonsi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Eh bien non, monsieur le sénateur : nous ne sommes pas restés dans l'attente.
M. Jacques Mahéas. Ça ne s'est pas vu !
Mme Christine Lagarde, ministre. En revanche, j'ai l'impression que vous, vous n'étiez pas dans l'écoute ! Car la préoccupation du pouvoir d'achat a été au coeur de la campagne de Nicolas Sarkozy pendant des mois. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Bel. Quelle arrogance !
Mme Christine Lagarde, ministre. J'ai déjà indiqué quel était l'ensemble des mesures qui avaient été prises, et je vous rappellerai un certain nombre des principes qui fondent la logique de notre action.
Je vais, puisque après tout je suis ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, vous raconter une histoire de chiffres : 1, 2, 3, 4, 5.
1 : c'est moins 1 % en termes de salaires.
2 : ce sont 2 années, les années 1999 et 2000.
3 et 4 : c'était la croissance au cours de ces deux années-là.
5 : c'est un chiffre qui était à mon avis une erreur historique, celui qui a été accolé au chiffre 3 pour faire les 35 heures. (Bravo ! et applaudissements nourris sur les travées de l'UMP ; M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également. - Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Cette logique était celle du « travailler moins pour gagner moins ». (Nouveaux applaudissements nourris sur les travées de l'UMP. - Fort brouhaha sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Et 1, et 2, et 3, et 4, et 5... (Rires.)
M. le président. Mes chers collègues, laissez le calme revenir, s'il vous plaît ! Ce n'est pas sérieux ! (Le brouhaha continue.)
Nous ne bénéficierons pas de la retransmission télévisée ! (Le brouhaha s'éteint lentement.)
Veuillez poursuivre, madame la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. La logique que nous avons adoptée était une logique exactement inverse puisqu'elle consiste non pas à travailler moins et à gagner moins, mais à travailler plus et à gagner plus.
À nouveau quelques chiffres rapides : quatre heures supplémentaires par semaine, c'est la possibilité d'un treizième, parfois même d'un quatorzième mois pour les salariés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Charles Gautier. Encore des histoires !
M. Yannick Bodin. Quinze milliards d'euros pour les riches !
Mme Christine Lagarde, ministre. Vous nous reprochez de ne pas nous occuper du chômage. Eh bien, le chômage, et depuis des mois, continue de baisser : actuellement, il est de 8,1 %. Qui plus est, aujourd'hui, les chiffres de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, indiquent une poursuite de la baisse du nombre de chômeurs en France.
M. Yannick Bodin. Formidable !
M. Jean-Pierre Michel. C'est à cause de la démographie ! Il n'y a pas d'emplois nouveaux, vous le savez bien !
Mme Christine Lagarde, ministre. Ce combat-là, nous sommes en train de le gagner.
Vous nous reprochez également de ne rien faire non plus en matière de négociation salariale. Je me contenterai de faire de nouveau appel à votre mémoire. Oh ! je ne remonterai pas très loin : le 23 octobre dernier, lors de la conférence « emploi-pouvoir d'achat », qui portait également sur le coût du travail, nous avons posé au nom du Gouvernement, sous la direction du Premier ministre François Fillon, le principe que l'allégement des charges serait subordonné à l'engagement de la négociation annuelle des salaires.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est mal parti !
Mme Christine Lagarde, ministre. C'est un principe fondamental, et il devra s'appliquer dans les entreprises.
M. Yannick Bodin. On verra !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous en entendrons certainement parler de nouveau !
Alors, ne nous dites pas que nous ne faisons rien en matière de salaires et de pouvoir d'achat ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs sénateurs socialistes. Si ! Vous ne faites rien du tout !
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Gisèle Gautier. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, la table ronde « Mobilité et transports » organisée dans le cadre du Grenelle de l'environnement a conclu, à la fin du mois d'octobre dernier, au lancement de programmes de développement d'autoroutes maritimes sur la Méditerranée et la façade Atlantique.
Étant ligérienne, cette partie du territoire m'intéresse plus particulièrement. Le « merroutage », on le sait, participe à la protection de l'environnement. Il s'inscrit dans une perspective d'alternative au transport routier.
Cette décision a été fort bien accueillie par tous les acteurs qui travaillent depuis plusieurs années sur cette troisième voie autoroutière dédiée au trafic de marchandises à longue distance pour plusieurs raisons. En effet, la voie maritime est d'une durée plus courte. Par exemple, sur un parcours donné nécessitant vingt-deux heures de route, la voie maritime restreint ce laps de temps à quinze heures. En outre, cette option coûte deux fois moins cher que la route, ce même parcours revient à 400 euros au lieu de 810 euros. De plus, cela permet de décongestionner les axes terrestres, notamment pour le franchissement des Pyrénées. En outre, ce mode de transport présente l'énorme avantage - il va de soi - d'être beaucoup moins polluant.
Il existe déjà une ligne régulière avec plusieurs rotations par semaine entre Montoir, près de Saint-Nazaire, et Vigo, au nord de l'Espagne. Celle-ci connaît une progression de 16 % depuis le début de l'année.
Reste le coût des lignes financées, majoritairement, par les armateurs.
Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais savoir si le Grenelle de l'environnement peut contribuer à apporter un concours financier, et surtout à quelle hauteur ?
Par ailleurs, afin d'assurer la continuité à terre du transport par mer, il est nécessaire que soient réalisées des infrastructures ferroviaires et terrestres pour l'acheminement des camions et, bien sûr, des remorques.
Madame la secrétaire d'État, vous est-il possible de m'indiquer la participation financière que l'État prévoit d'apporter, avec l'Europe, dans ce dossier ?
Au-delà d'éventuelles aides espérées au lancement des lignes, il serait souhaitable d'imaginer de simplifier les formalités administratives et douanières afin de permettre aux remorques et aux bateaux d'opérer rapidement. Je vous remercie de répondre à ces questions.
Monsieur le président, si vous me le permettez, je ferai un petit aparté.
Mes collègues et moi-même apprécions beaucoup que les membres du Gouvernement qui répondent aux dix questions qui ont été posées aujourd'hui soient toutes des femmes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) C'est un moment historique ! Je voudrais vous féliciter, mesdames. Je remercie également MM. les ministres qui sont à leurs côtés, et en particulier le premier d'entre eux, auquel je rends hommage. (Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Catherine Tasca. La parité, un jour par an !
Mme Raymonde Le Texier. C'est parce que le niveau de leurs questions est médiocre !
Mme Catherine Tasca. Nous sommes comblées !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Madame la sénatrice, je vous remercie de ce bel hommage.
Le Président de la République, en tirant les conclusions du Grenelle de l'environnement, a fixé un objectif de deux millions de trajets de camions en moins traversant la France en 2020, objectif, me semble-t-il, que nous pouvons tous partager.
La mise en place d'autoroutes de la mer fait partie de cette politique de report modal au côté du transport ferroviaire et fluvial.
Le transit de camions en provenance et à destination de l'Espagne et de l'Italie est, en effet, de moins en moins supportable, et c'est un constat que nous pouvons également tous partager. C'est la raison pour laquelle le Grenelle de l'environnement préconise « un programme de développement massif d'autoroutes maritimes ».
Sur la façade Atlantique, plusieurs lignes de cabotage existent déjà, comme la ligne maritime que vous avez citée, entre Nantes et Vigo.
Dans le cadre de l'appel à projets lancé conjointement par la France et par l'Espagne pour le projet d'autoroutes de la mer, les États ont choisi d'apporter un soutien financier sous forme d'une aide au démarrage, c'est-à-dire en fait de subventions aux opérateurs pendant les premières années d'exploitation. Plusieurs offres de qualité ont déjà été déposées début novembre et elles sont actuellement en cours d'examen conjointement avec l'Espagne.
Les conditions de financement - je le précise pour être exhaustive sur ce sujet - sont encadrées de façon très stricte par des règles communautaires auxquelles il nous faut, bien entendu, nous conformer. Les autoroutes de la mer figurent dans les projets prioritaires du réseau transeuropéen de transport, le programme Marco Polo II, elles sont éligibles aux fonds structurels comme le Fonds européen de développement régional, le FEDER, et à la coopération transfrontalière. Nos dispositifs nationaux de financement s'inscrivent donc dans ce cadre, qui est à la fois utile et contraint.
En matière de financement, la France a d'ores et déjà programmé, pour commencer, un budget de 41 millions d'euros. L'Espagne a, pour sa part, prévu un montant maximal de 15 millions d'euros.
Pour ce qui est des simplifications douanières et administratives pour le trafic maritime, le constat que vous faites est partagé à travers l'Europe et la Commission européenne travaille d'ores et déjà à des éléments de simplification qui nous seront proposés prochainement.
Pour conclure, dans les suites du Grenelle de l'environnement, le Gouvernement compte aller plus loin. C'est la raison pour laquelle, avec Jean-Louis Borloo, un comité opérationnel a été mis en place sur ce sujet comme sur d'autres, visant à mettre en oeuvre de façon concrète les propositions du Grenelle de l'environnement. Ce comité opérationnel accueillera tous les acteurs concernés pour faire des propositions très concrètes afin d'aller plus loin en matière technique et en matière financière, au-delà des 41 millions d'euros que j'ai déjà cités. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
vidéosurveillance
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Louis de Broissia. Ma question s'adresse à une femme ministre...
M. Henri de Raincourt. Il n'y a que cela aujourd'hui !
M. Louis de Broissia. ...puisque c'est aujourd'hui la série et je m'en réjouis.
Madame le ministre de l'intérieur, après déjà deux questions et deux réponses concernant les dramatiques événements et la disparition tragique de Moushin et de Larami, après les violences faites aux policiers et aux pompiers - que je ne saurais oublier -, j'aimerais évoquer aussi les violences faites aux enseignants - il y a quinze jours, l'agression à l'arme blanche d'un principal-adjoint de collège -, tout cela nous indiquant - tous mes collègues l'ont dit quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent dans cet hémicycle - qu'un climat de contestation de l'autorité, de l'ordre ou de la cohésion sociale peut être observé.
À cela, beaucoup de réponses sont possibles. Il va de soi qu'il s'agit - Fadela Amara y a très bien répondu, nous semble-t-il - de changer les mentalités, de résorber un problème d'éducation, de passer à l'emploi des jeunes ; nous nous en occupons dans nos villes, nos départements et nos régions. C'est une tâche qui nécessite des mesures d'urgence, madame le ministre, car les premières victimes sont les Français les plus modestes.
À cet égard, j'aimerais vous interroger sur le développement de la vidéosurveillance.
À l'image de ce qui se pratique en Grande-Bretagne avec des résultats encourageants, c'est un des moyens de confondre les auteurs de violences ou de dégradations. Et je voudrais le relier à l'assassinat il y a quelques jours dans le RER D d'Anne-Lorraine Schmitt car la vidéosurveillance a joué un rôle important pour confondre son meurtrier. Cette jeune femme s'est d'ailleurs comportée d'une façon héroïque, puisqu'elle s'est défendue contre son agresseur et c'est ainsi qu'il a pu être arrêté.
Madame le ministre, vous avez installé voilà quelques semaines au sein de votre ministère une commission nationale de la vidéosurveillance, dont font partie nos excellents collègues Jean-Paul Alduy et Christian Cambon.
Je souhaiterais que vous indiquiez au Sénat où en est cette commission et quels seraient les obstacles qui s'opposeraient à ce qu'elle aboutisse à des résultats concrets. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. André Vallet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, s'il est vrai que notre attention a été attirée principalement sur les événements ponctuels mais très violents de ces derniers jours dans certains endroits, c'est au quotidien et sur tout le territoire national que le ministère de l'intérieur doit assurer la protection de nos concitoyens.
La sécurité, c'est la première des libertés des Français, celle qui conditionne toutes les autres et c'est aussi la première obligation de l'État.
Or nous sommes dans une société qui bouge : la délinquance bouge, la violence bouge, les technologies bougent et il est normal que nous utilisions au mieux ces technologies à la fois pour essayer de prévenir les éléments d'insécurité de nos compatriotes, pour élucider, pour intervenir quand c'est possible. Et il est vrai que si le train où Anne-lorraine Schmitt a été sauvagement agressée et mortellement blessée avait été équipé de vidéosurveillance, on aurait sans doute pu intervenir tout de suite.
D'ailleurs, nos compatriotes ne s'y trompent pas. Alors que voilà quelques années ils étaient réticents à la pose de caméras, aujourd'hui plus de 78 % d'entre eux estiment que la vidéosurveillance les protège. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il est important de parler, en effet, de vidéoprotection dans tous les endroits sensibles.
Il existe, en effet, un certain nombre de textes à l'élaboration desquels vous avez participé les uns et les autres et qui encadrent la vidéoprotection, mais il faut maintenant développer les moyens.
La mise en place de la commission n'est qu'un élément pour accompagner une politique qui a commencé dès aujourd'hui. Actuellement, nous sommes très en retard sur d'autres pays. Nous avons en effet très peu de caméras.
J'ai décidé de mettre en place sur la voie publique trois fois plus de caméras. Il y en a vingt mille aujourd'hui, l'objectif, qui n'est pas énorme, est de passer à soixante mille dans les deux ans car la protection doit se faire rapidement.
Mais ce qui est important aussi, c'est que nombre de communes et d'institutions se sont déjà dotées de caméras, et pour développer nos possibilités d'action, j'ai décidé de réaliser des raccordements avec les mairies et les institutions qui le souhaitent.
D'ores et déjà cette année, alors que vingt-deux communes sont reliées au commissariat national dans leur ville, vingt et une autres communes se sont inscrites pour être raccordées dans les prochaines semaines ou au début de 2008. L'objectif est d'en raccorder quatre-vingts d'ici à 2009. Nous aurons ainsi, avec tous les investissements de la RATP et de la SNCF, accompli de véritables progrès pour la protection de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
pouvoir d'achat
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ma question s'adresse à M. le Président de la République (Exclamations sur les travées de l'UMP)...
M. René Garrec. Il n'est pas là !
M. Robert del Picchia. Il faut accepter qu'il vienne !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. ...puisqu'il se veut et est responsable de la situation, en particulier de l'appauvrissement croissant de celles et ceux qui, parce qu'ils sont les plus nombreux, se voient réclamer tous les sacrifices.
Il est curieux d'ailleurs que le même Président de la République n'aspire pas encore à répondre aux questions d'actualité. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. René Garrec. Il veut bien, mais il n'en a pas le droit !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce que nous voulons savoir, c'est ce que nous devons répondre à toutes celles et à tous ceux que nous rencontrons et qui nous interrogent. À celles et à ceux qui nous demandent comment faire devant l'augmentation de 15 % depuis le début de l'année du prix du carburant, soit en moyenne 150 euros de plus par ménage, doit-on répondre que, pour aller travailler, ils n'ont qu'à prendre une bicyclette, selon votre originale suggestion, madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, même si vous vous gardez bien de renoncer à l'usage de votre propre voiture de fonction ? (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)
M. Jacques Valade. C'est minable !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Que répondre à celles et à ceux qui se chauffent au fioul ? De changer de chaudière ou de s'installer à Agadir ?
Que répondre à celles et à ceux qui se plaignent que les loyers augmentent de 3 % par an depuis cinq ans, ce qui représente une dépense supplémentaire de 380 euros en moyenne pour un couple avec deux enfants ?
Que répondre aux 780 000 personnes âgées qui, dorénavant, paieront 116 euros par an de redevance audiovisuelle, alors qu'elles en étaient jusqu'à présent exonérées ?
M. Yannick Bodin. Effectivement !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Que répondre à celles et à ceux qui ont déjà du mal à vivre et à se soigner et qui, avec les franchises médicales, subiront, dès le 1er janvier 2008, un véritable impôt santé ?
Que répondre à celles et à ceux dont la retraite ne progresse pas et qui doivent faire face à de considérables augmentations des prix alimentaires,...
M. Jacques Valade. La question ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. ...soit, depuis l'été, 8 % pour le pain - c'est ce qui s'appelle « mener les gens à la baguette » ! (Exclamations sur les travées de l'UMP) - et 40 % pour les produits laitiers ? Les augmentations sont également très importantes pour la viande, le poisson, les pâtes, et plus généralement pour les produits des grandes surfaces.
Aujourd'hui, consommer 400 grammes de fruits et légumes par personne et par jour coûte, chaque mois, 60 euros pour un couple et 115 euros pour une famille avec deux enfants !
M. le président. Poser votre question, mon cher collègue !
M. Robert Hue. Il ne dit pas la vérité ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Que pouvez-vous nous répondre, monsieur le Président de la République ? Nous le saurons ce soir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. René Garrec. C'est le président Poncelet qui va répondre ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, je suis dans l'impossibilité de demander à M. le Président de la République de répondre à votre question ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Murmures sur diverses travées.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Il faut modifier la Constitution !
M. René Garrec. Il faut attendre ! (Sourires.)
M. le président. Mes chers collègues, je sais que vous êtes nombreux à vouloir prendre ma place, mais, pour l'instant, c'est moi qui préside ! (Nouveaux sourires.)
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur Dreyfus-Schmidt, la retransmission télévisée étant achevée, je vais prendre le temps de répondre point par point à chacune de vos propositions, en vous rappelant quelques-unes des mesures que nous avons déjà prises.
Pour ce qui concerne l'augmentation des carburants, qu'avons-nous fait ?
M. Yannick Bodin. Rien !
Un sénateur socialiste. Vous proposez le vélo !
Mme Christine Lagarde, ministre. Nous avons doublé, pour les ménages les plus modestes, la prime à la cuve, qui est passée de 75 euros à 150 euros.
Mme Éliane Assassi. La TIPP !
Mme Christine Lagarde, ministre. C'est le bénéfice que les ménages modestes retireront de cette mesure lorsqu'ils rempliront leur cuve à fioul.
Par ailleurs, nous avons demandé à toutes les compagnies pétrolières de prendre l'engagement de lisser les hausses et de répercuter immédiatement les baisses des prix.
M. Yannick Bodin. Cela ne s'est pas vu !
Mme Christine Lagarde, ministre. Il s'agit de mesures concrètes. Nous leur avons également demandé d'être transparentes et de nous communiquer en permanence l'ensemble des augmentations et des diminutions des prix à la pompe.
M. Yannick Bodin. Vous pouvez toujours demander ! Mais ne vous faites pas trop d'illusions !
Mme Christine Lagarde, ministre. Voilà pour ce qui est des carburants.
S'agissant de la TIPP flottante, puisque vous m'incitez à vous répondre sur ce point, j'indique que ce mécanisme a coûté à la France 2,7 milliards d'euros, pour une diminution du prix à la pompe d'à peine trois centimes !
M. François Marc. Ce n'est pas vrai !
M. David Assouline. Vos chiffres sont faux !
Mme Christine Lagarde, ministre. Ce n'est donc pas véritablement une mesure efficace ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Vous avez ensuite parlé, monsieur le sénateur, de la conditionnalité des aides à l'ouverture de négociations sur les salaires. C'est une bonne mesure, que nous avons préconisée, et nous nous sommes mis d'accord avec un certain nombre d'organisations syndicales, lors de la conférence du 23 octobre dernier, pour lier les allégements de charges à la négociation annuelle sur les salaires, pour laquelle le sénateur Gérard Larcher avait beaucoup oeuvré en son temps...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Hélas !
Mme Christine Lagarde, ministre. ...et que nous nous engageons à poursuivre.
Pour ce qui concerne les baisses des prix à la consommation, que proposez-vous ? Le blocage, une économie administrée ? Ce sont des recettes d'un autre âge ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il faut tenir vos promesses !
Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement vous proposera prochainement d'examiner le projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Voilà qui est tout de même un peu plus innovant et plus moderne, et qui permettra, là aussi, de faire bouger les prix au bénéfice des consommateurs, la grande distribution devant répercuter dans ces prix de vente les baisses dont elle profitera sur les prix des produits.