M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous allons larmoyer sur les pensions et les retraites, maintenant !
Mme Marie-France Beaufils. Dans la logique de notre amendement portant sur la déduction forfaitaire des frais professionnels sur les traitements et salaires, nous proposons que le taux de déduction sur les pensions et retraites soit porté à 15 %, moyennant une réévaluation du plafond applicable. Il s'agit pour nous de faire en sorte que la situation des retraités et pensionnés soit mieux prise en compte.
Je développerai quelques points pour justifier cette proposition.
Comme vous le savez, la majorité des retraités et pensionnés de notre pays n'acquittent pour l'heure aucune cotisation au titre de l'impôt sur le revenu. En effet, le niveau des pensions et retraites est tel que 55 % des ménages retraités sont libérés de cette obligation, non pas par choix, bien évidemment, mais parce que le niveau moyen de pension se situe aujourd'hui à 1 044 euros, si l'on en croit les données de l'INSEE, et que le pouvoir d'achat de ces pensions et retraites est gelé depuis plus de dix ans !
Comment vivre avec cette somme, comment faire face aux charges du logement, aux dépenses de santé croissantes découlant de la diminution de la prise en charge par l'assurance maladie de nombreuses prestations, à la progression continue des prix des produits alimentaires... ?
Selon les indications fournies par l'INSEE, le pouvoir d'achat des petites retraites, celles qui ne sont pas soumises aux prélèvements sociaux, a connu une très faible progression. Pour les autres retraites et pensions, notamment pour celles des salariés ayant accompli des carrières complètes, qui sont assujetties aux prélèvements sociaux, le pouvoir d'achat est même en baisse, la revalorisation des pensions perdant deux à trois dixièmes de point depuis 1995.
En clair, l'indexation des retraites sur les prix, produit de la réforme Balladur, a provoqué la paupérisation des retraités - situation que la réforme Fillon de 2003 n'a pas améliorée, bien au contraire ! -, sans pour autant, faut-il le souligner, que la situation financière du régime général de l'assurance vieillesse se soit aucunement améliorée.
Le rendez-vous de 2008 sur les retraites sera pour nous l'occasion de mesurer à quel point les critiques préventives que nous formulions à l'encontre de la réforme de 2003 avaient, finalement, quelque fondement. Dans l'immédiat, il s'agit d'alléger la charge fiscale qui pèse sur les retraites et pensions, produit de longues années de travail pour chacun et chacune des assurés sociaux concernés, et de rendre un peu de pouvoir d'achat à 13,5 millions de personnes dans le pays.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission ne peut pas être favorable à cet amendement, dont le coût serait très élevé et manifestement non supportable à l'intérieur de l'épure de ce projet de loi de finances et compte tenu de la situation des finances publiques.
Je suis donc contraint d'émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je ne pense pas que l'on puisse traiter du pouvoir d'achat des retraites au travers de la fiscalité : il est bien d'autres manières de le faire !
Le Gouvernement est conscient du problème, le Président de la République s'est exprimé à plusieurs reprises sur le sujet, et un rendez-vous très important portant sur les retraites est prévu en 2008.
L'avis du Gouvernement est donc identique à celui de la commission : il est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le ministre, vous m'objectez que l'on ne peut pas traiter cette question par le biais de la fiscalité. Pourtant, elle n'est pas traitée par d'autres moyens, alors qu'elle revient régulièrement !
Vous allégez sans cesse la fiscalité pour toutes sortes de secteurs : n'avez-vous pas choisi, dans vos budgets de ces dernières années comme dans celui-ci, de retenir la solution de la fiscalité pour résoudre un certain nombre de problèmes ?
Cela paraît quelque peu contradictoire !
Mme Marie-France Beaufils. Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, la mise en oeuvre de notre amendement serait peut-être coûteuse, mais elle pourrait aussi déboucher sur des rentrées fiscales, et ça, vous ne l'avez pas mesuré !
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
M. le président. L'amendement n° I-122, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 84 A du code général des impôts, rétablir un article 85 ainsi rédigé :
« Art. 85. - Les déductions ou réductions du revenu imposable, autres que celles mentionnées aux 1° et 3° de l'article 83 ne peuvent avoir pour effet de réduire le revenu auquel s'appliquent les dispositions de l'article 193 de plus de 40 % par rapport à son montant hors application de ces déductions ou réductions. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent aux avantages procurés par les réductions et crédits d'impôt sur le revenu au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2007.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Je défendrai en même temps les amendements nos I-122 et I-123, monsieur le président.
S'agissant de l'amendement n° I-122, la sédimentation des dispositifs fiscaux dérogatoires conduit à ce que les contribuables les plus fortunés puissent, par le cumul de ces avantages, réduire considérablement leur contribution à l'impôt sur le revenu.
Nous proposons donc un plafonnement global de la réduction du revenu imposable procurée par l'ensemble de ces dispositifs.
Cette réduction maximale serait de 40 % en dehors, bien sûr, de l'application de l'abattement de 10 % pour frais professionnels et de la déduction des cotisations sociales. Les divers plafonds applicables à chaque réduction ou déduction resteraient quant à eux applicables.
L'intérêt d'une telle mesure réside dans sa capacité à limiter fortement les effets d'aubaine liés à la multiplicité des niches fiscales existantes, auxquelles M. le rapporteur général a déclaré la guerre depuis quelques années, sans avoir agi pour l'instant ; mais il se réserve le droit de le faire bientôt, si j'ai bien compris. (M. le rapporteur général s'exclame.)
M. Michel Charasse. Si vis pacem, para bellum !
Mme Nicole Bricq. Il reviendrait donc à chaque contribuable d'arbitrer entre différents dispositifs d'incitation fiscale, en fonction de ses objectifs propres d'allocation de ses revenus. Cette solution permettrait de parvenir rapidement à une réduction sensible du coût des dispositifs fiscaux dérogatoires.
Le plafonnement que nous proposons a pour but d'éviter les déductions excessives qui profitent toujours aux mêmes. Pour ce faire, il ne nous semble pas déraisonnable de plafonner l'ensemble des réductions d'impôt ou déductions du revenu imposable à 40 % de ce revenu. Il n'est quand même pas absurde, ni même incongru, de faire en sorte que de gros contribuables ne puissent plus échapper à l'impôt sur le revenu par le jeu du cumul des niches fiscales !
Ce n'est pas en prétendant défendre les contribuables modestes par la multiplication des niches fiscales que vous convaincrez nos compatriotes de votre souci de justice. Ils commencent d'ailleurs à comprendre et à bien ouvrir les yeux et les oreilles.
D'aucuns, dans la majorité, glosent sur votre souci de simplifier notre système fiscal. On a encore entendu tout à l'heure M. le ministre s'exprimer sur la nécessité de simplifier notre système fiscal. Mais il faudrait, monsieur le rapporteur général, supprimer toutes les niches sans intérêt économique ou social. Je ne sais pas si ce sont des niches à durée déterminée ou indéterminée, verticales ou horizontales, mais nous étudierons attentivement les dispositions que vous nous proposerez.
Mais, pour le moment, non seulement on ne voit rien venir dans ce sens, mais le Gouvernement ne manque pas une occasion, au contraire, de consolider certaines niches fiscales, quand il n'en ajoute pas !
On constate une perte de recettes du fait de chaque remise en cause de l'ISF. En outre, il n'y a jamais de suppression ni de limitation de l'effet anti-redistributif de ces niches fiscales pour les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu. Cette situation est très grave.
Nous sommes dans la ligne de la philosophie fiscale que nous défendons, avec la progressivité de l'impôt sur le revenu.
Le présent amendement tire donc la conséquence du peu d'efficacité du plafonnement actuel, lequel s'ajoute à toutes les niches fiscales, qui devraient, nous dit-on souvent, être supprimées, mais qui, semble-t-il, ont encore de beaux jours devant elles. Nous proposons donc de nous y attaquer et de les plafonner d'ores et déjà dans ce projet de loi de finances pour 2008.
Dans le même esprit que l'amendement précédent, l''amendement n° I-123 prévoit que la réduction maximale de l'impôt obtenue grâce à la combinaison de plusieurs dispositifs soit de 7 500 euros. Seraient exclus du calcul de ce total les effets de l'application du quotient familial.
L'intérêt d'une telle mesure, claire et immédiatement applicable, résiderait dans sa capacité à limiter fortement les effets d'aubaine. Il reviendrait à chaque contribuable, car nous sommes attachés à la liberté individuelle et au choix, d'arbitrer entre différents dispositifs d'incitation fiscale, en fonction de ses objectifs propres d'allocation de ses revenus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lorsque le précédent gouvernement avait préparé sa réforme de l'impôt sur le revenu, qui instaurait un dispositif de plafonnement des avantages fiscaux, j'avais pensé - je n'avais pas été le seul, me semble-t-il - que cette formule hybride comportait beaucoup d'inconvénients.
En effet, on laissait ainsi subsister tous les régimes dérogatoires, incitatifs, c'est-à-dire les niches fiscales ; on maintenait l'extrême complexité et, dès lors, l'insécurité, du code général des impôts, et on demeurait très exigeant en termes de contrôle fiscal, car à chaque régime préférentiel correspondent des conditions d'éligibilité dont il faut vérifier qu'elles sont bien satisfaites.
Il pouvait donc sembler que ce dispositif hybride n'atteignait pas l'objectif de définir et de mettre en oeuvre un système fiscal plus simple et plus attractif. Au demeurant, le Conseil constitutionnel s'était fondé sur une complexité jugée excessive et non justifiée par un motif d'intérêt général suffisant pour écarter l'article 78 de la loi de finances de 2006.
J'ai le sentiment que l'amendement n° I-122 est très proche de ce qui avait été proposé à l'époque par le gouvernement de M. de Villepin. Pour ma part - et ce point de vue est largement partagé au sein de la commission des finances -, j'estime qu'il faut aller beaucoup plus loin et remettre en cause un grand nombre de niches fiscales.
M. François Marc. On peut commencer aujourd'hui !
Mme Nicole Bricq. Qui peut le plus peut le moins !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous vous proposerons, lors de la discussion des articles de la seconde partie, une méthode d'examen pour y aboutir.
Car réfléchissons un peu : à quoi cela sert-il de continuer à faire des promesses à tout vent, de multiplier les régimes préférentiels, sans cesse plus complexes, sans cesse plus nombreux, avec des « carottes », c'est-à-dire une fiscalité plus faible au bout du compte, si tout cela doit être privé d'effet pour une large part, plafonné par un dispositif général ?
Il faut avoir une démarche cohérente ! Mieux vaut recycler l'équivalent du coût des niches fiscales sous la forme d'un abaissement du barème, car un bon impôt demeure un impôt avec une large assiette et un faible taux ; c'est ce qui définit l'attractivité d'un territoire fiscal.
C'est en vertu de ce point de vue, que nous sommes nombreux à réaffirmer depuis de nombreuses années, que la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos°I-122 et I-123.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Il existe un impôt minimal, la CSG, qui touche à peu près tous les revenus à un moment donné. Je ne dis pas que c'est suffisant, mais cela existe !
Par ailleurs, il est vrai que les niches fiscales sont un sujet complexe, beaucoup ont tenté d'y revenir, tout cela a une histoire ; je partage l'esprit des propos de M. le rapporteur général.
Différentes tentatives ont été entreprises, et il faut en tirer des leçons.
Tout d'abord, la définition même de « niche fiscale » peut poser problème. Une niche fiscale, cela peut être tout simplement le fait qu'un impôt est réduit en raison de ses modalités de calcul. Le quotient familial, par exemple, est une modalité de calcul d'un impôt. S'agit-il pour autant d'une niche fiscale ? Où se situe la frontière entre les modalités de calcul d'un impôt et la niche fiscale elle-même ? Souvent, derrière chaque niche fiscale, il y a une justification économique ou sociale. Le Parlement n'a pas voté ces niches n'importe quand, n'importe comment, dans n'importe quelles conditions ! (M. Michel Charasse fait un signe dubitatif.) Donc, il faut revenir aux raisons qui ont conduit à les voter.
Supprimer des avantages fiscaux peut contrarier très fortement la situation d'un nombre important de contribuables - je pense, par exemple, à la réduction d'impôt pour les emplois à domicile - ou celle de secteurs entiers d'activités - je pense aux SOFICA. On pourrait en citer beaucoup d'autres puisque ces niches fiscales sont très nombreuses.
En 2006, la tentative de plafonnement généralisé des niches fiscales a conduit à une annulation de la mesure par le Conseil constitutionnel.
Il faut donc faire preuve de pragmatisme et examiner ces niches fiscales dispositif par dispositif. Car, tout le monde le sait, un très petit nombre de niches cumulent 80 % à 90 % du total.
Le Gouvernement a étudié l'idée d'un impôt minimal, par exemple à l'américaine ; le Sénat l'a souhaité, l'Assemblée nationale aussi.
Mme Nicole Bricq. Vous n'avez pas été écoutés !
M. Éric Woerth, ministre. Un rapport sur le sujet a été envoyé aux commissions. Il montre assez bien que toute mesure trop simple n'aboutit pas nécessairement au résultat souhaité, c'est-à-dire que l'on ne va pas toucher la population ciblée, et que toute mesure qui viserait strictement une population serait d'application très complexe.
Il faut donc tenir un raisonnement au cas par cas, avec des objectifs précis. Nous allons tenter de nous y employer rapidement, en liaison avec les commissions des finances des deux assemblées, bien évidemment.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Au-delà des explications très claires de Mme Bricq et, après elle, par M. le rapporteur général et par M. le ministre, je crois qu'il faut quand même bien avoir conscience que la réforme de l'impôt sur le revenu de 2006 est parfaitement déséquilibrée puisque le volet qui en était la contrepartie et qui remettait en cause un certain nombre de niches fiscales a été annulé par le Conseil constitutionnel.
Je voudrais insister sur un point : à l'époque, c'est non pas le travail du Gouvernement qui a été sanctionné, mais celui du Parlement, parce qu'à force de rajouter des amendements dérogatoires le texte qui était issu des délibérations des assemblées était incompréhensible, et c'est la raison pour laquelle il a été censuré par le Conseil constitutionnel.
Donc, dans cette affaire, le Conseil constitutionnel n'a pas procédé à une analyse de fond : il a déclaré simplement que ce texte était inapplicable et incompréhensible pour les contribuables.
M. le ministre nous dit qu'il faut y réfléchir et M. le rapporteur général l'y incite vivement, car cela rétablirait un certain équilibre s'agissant de la réforme de 2006, même si celle-ci ne serait pas encore totalement satisfaisante.
Je vais vous donner un conseil, monsieur le ministre : procédez par ordonnances ! Car chaque fois que vous viendrez devant le Parlement pour remettre en cause des niches fiscales, vous vous ramasserez.
Je me souviens de débats où chacun ici, et sur toutes les travées, avait des tonnes de lettres de toutes les corporations, de tous les intérêts particuliers possibles et imaginables, qui donnaient lieu à des amendements rendant la discussion fastidieuse et insupportable.
La ve République, qui a rétabli une certaine autorité de l'État, vous a donné la possibilité d'agir par ordonnances. Ne vous gênez pas !
M. le président. L'amendement n° I-186, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 5° bis de l'article 157 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 5° bis Le produit des intérêts versés dans les conditions prévues à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération ».
II. - Le 5°ter du même article est supprimé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement pose, parmi d'autres, la question du traitement particulier des revenus de capitaux mobiliers dans le cadre de l'application du barème de l'impôt sur le revenu.
Pour mémoire, l'article dont nous demandons la modification permet de déduire du revenu net global des contribuables les produits et plus-values tirés des placements réalisés dans le cadre des plans d'épargne en actions, les PEA.
Cette disposition particulière du code général des impôts n'est pas sans impact, puisque le coût de la dépense fiscale est de 1,25 milliard d'euros. Nous demandons donc que cette somme non négligeable soit réintégrée dans le cadre du barème de l'impôt sur le revenu.
Mes chers collègues, pour vous donner une idée de la portée et du poids de cette dépense fiscale, celle-ci correspond, par exemple, au produit de l'impôt sur le revenu perçu dans un département comme celui de l'Essonne, à quelques millions d'euros près.
Vous nous reprocherez peut-être de vouloir taxer l'épargne. Mais cette dernière est ici capitalisée dans des PEA, dont la gestion et le contrôle échappent en réalité aux épargnants, et elle permet aux établissements financiers de faire supporter à d'autres les risques industriels qu'ils se refusent à prendre en direction des entreprises, en leur accordant des taux d'intérêt acceptables sur les emprunts qu'elles souscrivent.
Nous souhaitons que le barème de l'impôt s'applique de manière équilibrée à l'ensemble des revenus catégoriels et que soit notamment mise en question la règle selon laquelle seuls les revenus salariaux, les pensions et retraites sont soumis à la stricte application du barème. C'est cet impératif de simple justice sociale qui nous guide.
Pour le reste, comment ne pas pointer le fait que l'allégement de la dépense fiscale, associé aux dispositions que nous évoquons dans cet amendement, est susceptible de dégager des marges de manoeuvre pour atteindre deux objectifs récurrents.
Tout d'abord, une partie de la majoration des recettes ainsi dégagées pourrait être affectée à la réduction des déficits publics, ce qui témoignerait d'une bonne gestion publique. En effet, c'est une bonne action que de réduire la charge de la dette qui pourrait découler de la persistance de ce régime dérogatoire.
Ensuite - mais ce point devrait même être prioritaire dans le budget de l'État -, il faut dégager les fonds nécessaires pour mener les politiques publiques dont notre pays a besoin. Quand on voit, par exemple, que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche ne dispose manifestement pas des moyens nécessaires pour répondre aux attentes des universités et des étudiants actuellement mobilisés contre la loi sur l'autonomie des universités,...
M. Alain Lambert. Mais si ! Ces moyens sont mal utilisés !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les universités ont besoin de plus d'autonomie !
M. Alain Lambert. Exactement !
Mme Marie-France Beaufils. ... on se dit que l'on pourrait prévoir des ressources nouvelles, qui seraient tirées du produit de l'impôt.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si, par malheur, cet amendement était adopté, les investissements des actionnaires individuels dans les fonds propres des entreprises s'en trouveraient fortement pénalisés.
Or, nous le savons bien, l'actionnariat populaire - entre 6 millions et 7 millions de personnes - constitue un élément de stabilisation du capital des entreprises. Des bataillons d'actionnaires individuels détiennent une partie du capital de certaines entreprises, et nous en sommes heureux. Nous devons donc nous efforcer de conserver leur confiance.
Afin d'éviter de tomber dans les travers d'une fiscalité qui ne tiendrait pas compte de l'environnement international dans lequel nous évoluons, il convient, mes chers collègues, de rejeter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° I-123, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Avant le dernier alinéa de l'article 193 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les réductions d'impôt, autres que celle résultant du quotient familial mentionné à l'article 194, et les crédits d'impôt ne peuvent avoir pour effet de réduire l'impôt sur le revenu d'un montant total de plus de 7 500 euros, ni de porter au-delà de ce montant la somme de l'impôt réduit et de l'impôt restitué. »
II. - Les dispositions du I s'appliquent aux avantages procurés par les réductions et crédits d'impôt sur le revenu au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2007.
Cet amendement a été défendu.
La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° I-123.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-125, présenté par MM. Marc, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le 6 de l'article 195 du code général des impôts, les mots : « 75 ans » sont remplacés par les mots : « 70 ans ».
II. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'application de cette disposition est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Cet amendement, très simple, fait écho aux propos tenus, le 11 novembre dernier, par le Président de la République, avec un lyrisme que nous ne lui connaissions pas, en tout cas que certains découvrent, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors là...
M. François Marc. ... sur le sacrifice de millions de Français dans les différents conflits. Il a aussi rendu hommage à l'action de tous les anciens combattants.
Ainsi, il me semblerait légitime d'adopter une disposition fiscale favorable à toutes les personnes qui ont servi notre pays, souvent pendant plusieurs années - je pense notamment aux appelés qui, pour certains, ont passé deux ou trois ans de leur jeunesse en Afrique du Nord -, avant qu'elles soient trop âgées.
Cet amendement vise donc à abaisser de soixante-quinze ans à soixante-dix ans l'âge permettant de bénéficier d'une demi-part supplémentaire pour le calcul du quotient familial.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement est éminemment sympathique, mon cher collègue. Dès lors que vous évoquez le 11 novembre, il va de soi que ma fibre patriotique ne peut que vibrer, car c'est une date à laquelle je suis particulièrement attaché.
Cela dit, permettez-moi de le rappeler, je suis également attaché à l'impératif de respecter le solde des comptes publics. En effet, nombre d'entre nous ont promis au ministre du budget de faire en sorte que le déficit prévu dans le projet de loi de finances ne soit pas supérieur, à l'issue des travaux du Sénat, à celui qui a été initialement proposé par le Gouvernement.
Avec l'adoption de cet amendement, nous aurions à faire face à une charge supplémentaire de 200 millions d'euros. Or je n'ai pas trouvé le gage nécessaire, au-delà du gage sur le tabac, qui est, nous le savons bien, très circonstanciel.
La commission est donc au regret de devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. La procédure consistant à accorder une demi-part supplémentaire en dehors de toute considération familiale doit demeurer exceptionnelle.
Pour cette raison, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Je souscris totalement à la proposition de notre collègue François Marc.
Le sang de tous les anciens combattants d'Afrique et d'Afrique du Nord a coulé dans les tranchées ; ceux-ci y ont laissé leur vie pour la France et, à l'époque, on ne leur a pas demandé de test ADN ! (M. le ministre s'exclame.)
Aujourd'hui, on leur refuse une demi-part supplémentaire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela n'appelle pas de commentaire !
M. le président. L'amendement n° I-124, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, le montant : « 12 000 euros » est remplacé par le montant : « 7 000 euros » ;
2° Dans le deuxième alinéa, le montant : « 20 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros ».
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Alors que la hausse du plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile ne devait bénéficier, de l'aveu même du rapporteur général, au maximum, qu'à 70 000 familles très aisées, le Gouvernement et sa majorité ont été incapables de fournir une quelconque preuve de son effet positif sur l'emploi.
Pourtant, dès qu'elle en a l'occasion, la majorité actuelle revalorise systématiquement ce plafond. Celui-ci, initialement fixé à 3 811 euros, a ainsi été relevé à 3 964 euros dans la loi de finances de 1994, puis à 13 720 euros dans le budget de 1995.
Alors que les députés socialistes avaient réduit ce plafond de moitié dans le budget de 1998, le fixant à 6 860 euros, la majorité actuelle est revenue, en 2005, à un niveau proche de celui qui avait été retenu en 1995, soit 12 000 euros, pouvant même atteindre 15 000 euros avec les diverses majorations.
Vous allez certainement m'opposer l'argument selon lequel le principe de ce dispositif a été posé par un gouvernement socialiste. Certes, je le reconnais, la mise en place de cette mesure a été une bonne chose, mais les hausses massives du plafond des dépenses prises en compte ont totalement modifié la cible et la nature même de celle-ci.
Dès lors, et conformément d'ailleurs aux multiples engagements de remettre en cause les niches fiscales qui n'auraient pas fait la preuve indéniable de leur utilité, nous proposons de revenir au plafond préexistant en 2002, soit 6 900 euros.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Là encore, ce serait un retour en arrière.
Je persiste à penser - et beaucoup ici pourraient témoigner en ce sens - que ce régime est fructueux en termes d'emplois, notamment pour les personnes peu qualifiées, que l'on peut inciter à se former dans les différents métiers d'aide à domicile, en particulier celui d'auxiliaire de vie auprès de personnes âgées.
Le dispositif fiscal actuel incite des foyers fortement fiscalisés à utiliser cette main-d'oeuvre, qui est dans l'attente d'une rémunération. Je crains qu'un abaissement aussi brutal du plafond n'ait un impact négatif sur le nombre de personnes employées à domicile.
Une telle mesure étant parfaitement contraire à la politique de l'emploi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. François Marc. Pas un seul emploi ne serait perdu !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. J'avancerai plusieurs arguments.
Premièrement, le dispositif mis en place vise à lutter contre le chômage : il n'y a jamais eu autant d'emplois à domicile qu'aujourd'hui. Il s'agit donc d'une bonne mesure.
Deuxièmement, nous le savons bien, il permet de lutter contre le travail dissimulé. C'est une façon de mettre en lumière le travail qui était effectué, en termes de droit du travail, dans l'obscurité.
Troisièmement, au-delà des différents dispositifs d'aides directes, le fait d'accorder aux familles et aux personnes âgées une déduction fiscale significative leur permet de choisir, par exemple, leur mode de garde.
Enfin - et c'est vous qui m'y faites penser, monsieur le sénateur ! -, ce sont effectivement les socialistes qui ont mis en place ce dispositif, et nous essayons de l'améliorer.
Mme Nicole Bricq. Nous saurons vous le rappeler tout à l'heure, monsieur le ministre !
M. Éric Woerth, ministre. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-126, présenté par MM. Demerliat, Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le f du 1 de l'article 200 du code général des impôts est ainsi rétabli :
« f. Des associations de défense des consommateurs visées à l'article L. 411-1 du code de la consommation ».
II. - La perte de recettes pour l'État résultant de l'application de cette disposition est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Nous proposons d'étendre aux associations de défense des consommateurs le bénéfice de la réduction d'impôt de 66 % accordée au titre des dons aux fondations et associations reconnues d'utilité publique.
Les associations de défense des consommateurs sont reconnues comme disposant des droits prévus par le code de la consommation pour agir en justice si des faits portent un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs.
Actuellement, on a tendance à vouloir renforcer les pouvoirs des consommateurs, et je crois savoir que le Gouvernement présentera prochainement un projet de loi en ce sens.
Les associations reconnues d'utilité publique qui oeuvrent en faveur des consommateurs devraient donc pouvoir bénéficier également de ces réductions d'impôt.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme François Marc vient de nous l'expliquer, cet amendement tend à étendre aux associations de consommateurs le bénéfice de la réduction d'impôt de 66 % accordée au titre des dons effectués par les particuliers aux fondations ou associations reconnues d'utilité publique. Je suppose que, dans son esprit, la mesure se limiterait à des associations reconnues d'utilité publique.
Il convient de rappeler que la dépense fiscale totale correspondant à cette réduction d'impôt est estimée à 820 millions d'euros pour 2008.
Il importe aussi de s'interroger sur les limites d'application de cet article 200 du code général des impôts. En effet, à chaque fois que nous ajoutons une rubrique supplémentaire, l'expérience montre que d'autres demandes fleurissent.
Par conséquent, après les propos que je vous ai tenus sur les niches fiscales, je ferais preuve d'une totale incohérence si j'émettais un avis favorable sur cet amendement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?