5
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission des finances a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Yves Fréville membre suppléant du Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics.
6
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs.
La liste des candidats a été affichée ; je n'ai reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 12 du règlement.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean-Jacques Hyest, François Zocchetto, Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Hugues Portelli, Robert Badinter, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Suppléants : MM. Nicolas Alfonsi, Christian Cointat, Yves Détraigne, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. Richard Yung.
7
Dialogue social et continuité du service public dans les transports terrestres
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 9.
Articles additionnels après l'article 9
M. le président. L'amendement n° 15 rectifié, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er octobre 2008, un rapport d'évaluation sur l'application de la présente loi est adressé par le Gouvernement au Parlement.
Ce rapport présente notamment le bilan :
- des accords-cadres et accords de branche signés avant le 1er janvier 2008 ;
- des procédures de dialogue social mises en oeuvre et de leur impact au regard de l'objectif de prévention des conflits ;
- des actions de substitution du représentant de l'État éventuellement intervenues en application de l'article 4 de la présente loi ;
- des plans de transport adapté et des plans d'information des usagers élaborés par les entreprises de transport ;
- des accords collectifs de prévisibilité mis en place par ces entreprises ;
- du remboursement des titres de transport aux usagers, tel que prévu à l'article 8 de la présente loi.
Au vu de ce bilan, le rapport examine l'opportunité d'étendre le dispositif de la présente loi aux autres modes de transport et, le cas échéant, de le transposer à d'autres services publics.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission spéciale. Cet amendement prévoit un bilan de l'application de cette loi un peu nouvelle, qui va développer le dialogue social et l'information des usagers, établir des plans de transport adapté et des accords de prévisibilité pour les entreprises et, enfin, permettre le remboursement des titres de transport aux usagers.
Nous souhaitons donc qu'un bilan soit établi à l'issue d'une année d'application, afin qu'il puisse être décidé, au vu de ce bilan, si le dispositif instauré par la présente loi peut être étendu aux autres moyens de transport. En l'occurrence, les transports maritimes réguliers ainsi que le transport aérien ont été souvent évoqués au cours des débats.
Ce bilan pourra être établi dans un premier temps pour tous les modes de transports collectifs réguliers à l'usage des voyageurs, afin que l'on sache si le dialogue social instauré est susceptible d'apporter des améliorations. L'extension de ce dispositif à d'autres services publics pourra éventuellement être envisagée dans un second temps.
M. le président. Le sous-amendement n° 78, présenté par M. Billout, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa de l'amendement n° 15 :
Au vu de ce bilan, si l'opportunité d'un tel dispositif n'est pas avérée, le rapport proposera dans ses conclusions l'abrogation de la présente loi.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. La commission propose que soit établi un rapport d'évaluation de l'application du dispositif instauré par le projet de loi. Nous ne sommes pas opposés à l'idée d'un bilan puisqu'il apparaît en effet nécessaire de savoir rapidement si la législation remplit l'objectif de prévention des conflits sociaux qui lui est assigné et si elle n'est pas la cause de nouveaux problèmes préjudiciables à la continuité des services publics.
Cela est d'autant plus nécessaire que cette réglementation, aggravée au cours de nos débats, comme nous avons pu le constater en fin de matinée, porte une telle atteinte au droit de grève des salariés qu'elle ne saurait se justifier ni perdurer si son inutilité était avérée.
L'idée de dresser un bilan nous paraît donc très importante. En effet, les travaux préparatoires à un tel document permettent souvent de faire mûrir la réflexion, au sein de l'opposition comme de la majorité gouvernementale, sur des législations élaborées dans l'urgence.
Le rapport établi dans le cadre de la mission commune d'information sur la sécurité d'approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver, sur l'initiative des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, a montré combien les positions pouvaient changer lorsqu'on donne aux parlementaires le temps de travailler. En effet, même les sénateurs UMP se sont inquiétés des fortes dérives provoquées par la libéralisation du secteur de l'énergie et réclament davantage de maîtrise publique.
Cela étant, par son amendement, la commission pervertit la neutralité d'un tel exercice puisqu'elle propose déjà que soit examinée l'opportunité d'étendre le dispositif de la loi à d'autres services publics. Elle prend ainsi le contre-pied de l'objectif affiché du texte, dévoilant du même coup le véritable projet de la majorité gouvernementale : porter atteinte au droit de grève et, plus généralement, à l'ensemble des libertés collectives dans tous les secteurs publics.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent fermement à ce projet de loi, qui constitue un véritable acte de régression sociale dans le secteur des transports. Fidèles à cette logique, ils ne souhaitent pas que son champ d'application soit plus vaste.
C'est pourquoi nous vous demandons de voter ce sous-amendement qui vise à établir un bilan de l'application de la loi au regard des objectifs d'amélioration du dialogue social et de garantie de la continuité du service public, bilan qui se limite à juger de l'opportunité du maintien d'une telle réglementation dans ce secteur précis.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Je note que le groupe CRC est d'accord avec la commission sur la nécessité de ce bilan.
Dans sa formulation, le sous-amendement précise bien que, si l'opportunité d'un tel dispositif n'est pas avérée au vu de ce bilan, le rapport conclura à l'abrogation de la présente loi.
Je trouverai dommage que, à l'occasion de la discussion d'un texte dont l'intitulé mentionne explicitement le dialogue social, on envisage la suppression de ce dialogue social, même si je conçois votre approche, madame David.
Si la commission veut ce bilan, c'est dans l'idée d'évaluer le fonctionnement du dispositif mis en place. S'il a bien fonctionné, il pourra être étendu et, dans l'hypothèse inverse, il ne le sera pas. Mais il serait dommage d'abroger le dialogue social et les conventions qui auront été signées.
M. Michel Billout. On peut quand même vérifier s'il y a un véritable progrès du dialogue social !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 78 ainsi que sur l'amendement n° 15 rectifié ?
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Pour les mêmes raisons que celles exprimées par Mme le rapporteur, l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 78 est défavorable.
Je voudrais en revanche insister sur l'amendement n° 15 rectifié présenté par Mme Procaccia. Le Gouvernement pourrait émettre un avis favorable sur cet amendement si le rapporteur acceptait d'en supprimer la dernière phrase.
M. Alain Gournac. Oui !
M. Jean-Luc Mélenchon. Tiens donc !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je veux m'en expliquer en détail.
Tout d'abord, il est effectivement important que l'application de la présente loi fasse l'objet d'une évaluation et qu'un bilan soit adressé par le Gouvernement au Parlement, et un bilan en effet détaillé, madame le rapporteur.
Je crois profondément aux vertus de l'évaluation des textes et vous savez qu'un secrétariat d'État placé auprès du Premier ministre est chargé de ces questions. Il me semble donc essentiel de savoir exactement si les dispositifs votés ont porté leurs fruits, avec toutes les conséquences qui doivent ensuite être assumées.
Deux raisons m'amènent cependant à vous demander de rectifier votre amendement, en l'occurrence son dernier alinéa.
Ma première objection est d'ordre juridique. Dans un texte portant sur les transports publics terrestres, vous ne pouvez pas introduire, même de façon assez elliptique, une disposition qui viserait d'autres modes de transport et d'autres services publics sans créer un problème de base juridique.
La deuxième objection porte sur le fond du débat, qui nous a déjà beaucoup occupés hier. Le service minimum au-delà des seuls transports publics terrestres n'est pas une idée taboue, nous l'avons vu. Parce que c'est un sujet de préoccupation légitime dans de nombreux secteurs, il n'est pas question de le passer sous silence. Je m'étais d'ailleurs engagé auprès du président de Rohan, hier, à saisir Dominique Bussereau de la question des transports maritimes ; je vous ai transmis aujourd'hui, monsieur le président, ainsi qu'aux sénateurs Bruno Retailleau, Philippe Nogrix et Nicolas Alfonsi, le courrier que j'ai adressé à mon collègue sur cette question.
Avec ce projet de loi, nous avons fait la preuve que ce service minimum dont on parle depuis vingt ans pourra devenir une réalité dans un peu plus de cinq mois. Mais on ne peut pas faire abstraction du besoin de dialogue et de concertation entre les acteurs concernés.
Si la question n'est donc pas taboue, il n'appartient certainement pas à un rapport d'apprécier « l'opportunité d'étendre le dispositif ». Non, mesdames, messieurs les sénateurs, cela incombe aux parlementaires, au titre de leur droit d'initiative, ou au Gouvernement, qui devra assumer ses responsabilités, mais pas au rapport.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour ces raisons juridiques, mais aussi de fond, je vous demanderai de bien vouloir rectifier votre amendement, madame le rapporteur, auquel cas le Gouvernement émettra un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean Desessard. Réunion de la commission spéciale ?
M. Charles Revet, président de la commission spéciale. Je suis, bien entendu, en plein accord avec Mme le rapporteur, car nous avons beaucoup étudié cet amendement en commission.
Je comprends bien qu'étendre ce dispositif à l'ensemble des services publics pourrait susciter des interrogations. Cependant, lors des débats qui se sont déroulés hier, j'ai entendu un certain nombre de nos collègues, sur presque toutes les travées, expliquer que le transport public ne se limitait pas aux trains ou aux autocars : il existe ainsi des problèmes de desserte journalière entre les îles ou entre les îles et le continent. Pensons à la Corse, par exemple.
Aussi, je me demande, madame le rapporteur, si nous ne pourrions pas rectifier le dernier alinéa de notre amendement pour qu'il se lise comme suit : « Au vu de ce bilan, le rapport examine l'opportunité d'étendre le dispositif aux autres modes de transport public. » Pourrions-nous obtenir votre accord sur cette rectification, monsieur le ministre ?
Nous sentons bien la volonté de nos collègues d'assurer la continuité du transport public terrestre dans une perspective un peu plus élargie afin d'apporter une réponse positive aux usagers. Nous pourrions peut-être trouver un consensus sur cette rédaction.
M. Jean Desessard. Vous n'avez qu'à écrire : « dans tous les secteurs où les syndicats nous embêtent » ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Je propose, monsieur le président, que, pour la rédaction du dernier alinéa, nous nous en tenions aux « autres modes de transport public de voyageurs », le reste de la phrase étant supprimé.
En effet, l'extension aux autres services publics serait peut-être excessive. Je ne pense d'ailleurs pas que ce texte puisse s'appliquer à d'autres services publics, en particulier s'agissant des négociations que nous avons prévues avec les autorités organisatrices de transport, par exemple. En revanche, la problématique des transports et le principe que nous propose le Gouvernement sont tout à fait transposables à d'autres modes de transport public de voyageurs.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 15 rectifié bis, présenté par Mme Procaccia au nom de la commission est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er octobre 2008, un rapport d'évaluation sur l'application de la présente loi est adressé par le Gouvernement au Parlement.
Ce rapport présente notamment le bilan :
- des accords-cadres et accords de branche signés avant le 1er janvier 2008 ;
- des procédures de dialogue social mises en oeuvre et de leur impact au regard de l'objectif de prévention des conflits ;
- des actions de substitution du représentant de l'État éventuellement intervenues en application de l'article 4 de la présente loi ;
- des plans de transport adapté et des plans d'information des usagers élaborés par les entreprises de transport ;
- des accords collectifs de prévisibilité mis en place par ces entreprises ;
- du remboursement des titres de transport aux usagers, tel que prévu à l'article 8 de la présente loi.
Au vu de ce bilan, le rapport examine l'opportunité d'étendre le dispositif de la présente loi aux autres modes de transport public de voyageurs.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je me croirais presque revenu vingt-quatre heures en arrière ! Mesdames, messieurs les sénateurs, ce débat a déjà eu lieu hier et, sauf erreur de ma part - mais je ne vais pas consulter le compte rendu des débats du Sénat - j'avais le sentiment que le rapporteur et le président de la commission spéciale avaient apporté leur soutien à la position du Gouvernement sur cette question.
Que cherchons-nous ? Ce rapport a-t-il pour but d'évaluer vraiment le dispositif ou de réfléchir, de surcroît, à l'opportunité de l'étendre à d'autres secteurs ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Nous avons toujours dit qu'il recouvrait ces deux aspects !
M. Xavier Bertrand, ministre. Justement ! Je pense qu'un problème de cohérence se pose sur ce point, le Gouvernement le dit depuis le début de la discussion et je devrai le dire visiblement jusqu'à la fin !
Vous êtes attachés à la concertation, dites-vous. Mais précisément, cette proposition a-t-elle fait l'objet d'une concertation avec les représentants des autres transports publics ?
M. Jean Desessard. Pour quoi faire ?
M. Charles Revet, président de la commission spéciale. Rien n'interdit de le faire !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je le sais, mais vous êtes attachés, tout comme moi, au dialogue et à la concertation. C'est d'ailleurs dans cet esprit que, avec Mme le rapporteur, vous avez en permanence mené les travaux de la commission spéciale. Comment alors conciliez-vous cet attachement au dialogue et la rectification proposée ?
Encore une fois, sur tous ces sujets se pose une question de cohérence juridique et de cohérence sur le fond du dossier. Voilà simplement ce que je voulais indiquer sur ce point, qui n'est pas anecdotique.
Autant je suis d'accord pour que l'on procède à une évaluation de l'application de la loi, autant j'estime que nous ne devons pas, les uns et les autres, chercher à esquiver, le moment venu, nos responsabilités politiques. Je ne suis pas du genre à me cacher derrière mon petit doigt quand il s'agit d'assumer les miennes : le Gouvernement prendra position sur d'autres dossiers qui ont été évoqués en d'autres moments et en d'autres lieux, mais ce sont les transports publics terrestres de voyageurs qui nous occupent aujourd'hui. Une fois encore, c'est avant tout une question de cohérence et de responsabilité politique.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Je rappelle simplement que le rapport prévu sera remis avant le 1er octobre 2008, ce qui nous laisse du temps, et se bornera à envisager l'opportunité d'étendre les dispositions du présent texte à d'autres modes de transport. Cela ne signifie pas que le Parlement votera un texte à cette fin.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 78.
M. Jean-Luc Mélenchon. Avec votre permission, et afin d'être synthétique, monsieur le président, je m'exprimerai à la fois sur le sous-amendement et sur l'amendement.
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue !
M. Jean-Luc Mélenchon. J'espère que ceux qui suivent cette séance ne se laissent pas abuser par l'atmosphère modérée et courtoise qui est celle du Sénat, ce qui les priverait de tout le sel de l'échange, ô combien piquant ! qui vient de se dérouler.
Résumons la situation.
On nous présente un texte concernant le service public dans le secteur des transports terrestres de voyageurs. Nous expliquons, nous, l'opposition de gauche, que c'est un projet de loi contre le droit de grève et que vous avez l'intention, monsieur le ministre, de remettre en cause l'exercice de ce droit dans les services publics en général.
Prudent et modéré, vous nous répondez, monsieur le ministre, qu'il n'en est pas du tout ainsi, que nous exagérons et que le texte vise bien exclusivement les transports publics terrestres, c'est-à-dire le train, le métro et la situation insupportable qui, selon vous, est créée par les incidents de fonctionnement liés aux grèves, lesquels ne représentent pourtant que 3 % de l'ensemble des perturbations.
Puis, ayant allumé nos téléviseurs à l'heure du repas, nous entendons le Premier ministre annoncer que, si la mise en oeuvre de la loi se révèle satisfaisante, on appliquera ses dispositions à d'autres domaines, en particulier à l'éducation nationale.
De retour dans cet hémicycle, nous interpellons le ministre, qui nous répond que cette position n'est nullement celle du Gouvernement et que tel n'est pas le sujet. Le ministre ne dit donc pas tout à fait la même chose que le Premier ministre, mais ce n'est pas grave : c'est sa parole qui compte, puisque c'est lui qui est présent dans l'hémicycle, et nous nous en tenons à ce qu'il nous dit. D'ailleurs, nos collègues de la majorité sénatoriale répètent sur tous les tons qu'il n'est ici question de rien d'autre que du service public dans le secteur des transports terrestres.
Là-dessus, arrive un amendement de la commission, prévoyant qu'à la faveur d'un rapport sur l'application de la loi on procédera à une évaluation pour une extension éventuelle du dispositif non seulement à d'autres modes de transport, mais aussi, le cas échéant, aux autres services publics, c'est-à-dire à tous les services publics.
Mme Isabelle Debré. Cela a été retiré !
M. Alain Gournac. L'amendement a été rectifié !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je l'ai bien compris, mes chers collègues, mais permettez-moi de poursuivre.
C'est bien la confirmation de la thèse que soutient l'opposition de gauche depuis le début de ces travaux, à savoir que ce texte, selon qu'il passera ou cassera, pourrait être le prélude à un réexamen plus général de l'exercice du droit de grève.
En effet, ne nous leurrons pas. À l'heure où nous parlons, en plein mois de juillet, nos concitoyens sont, naturellement et fort heureusement, occupés à tout autre chose qu'à suivre au jour le jour la vie politique. Quand ils seront revenus de vacances, on verra bien comment ils réagiront, surtout quand vous vous attellerez à la réforme des régimes spéciaux de retraite, en particulier celui, précisément, des cheminots.
En tout état de cause, on observe cette situation absolument incroyable où la commission présente un amendement dont elle a sans doute débattu,...
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Bien sûr !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... mais qu'elle modifie en cours de route, de sa propre initiative,...
M. Alain Gournac. Et alors ?
M. Jean-Luc Mélenchon. ... afin de supprimer ce qui faisait la moitié du sel de son dernier alinéa, à savoir que le dispositif pourrait être étendu, le cas échéant, à l'ensemble des services publics.
Mme Isabelle Debré. Oui, et c'est bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je ne sais si mes collègues de la majorité ou de la commission elle-même ont eu l'occasion de débattre de ce point.
Le sommet du paradoxe, c'est quand le ministre explique que, contrairement à la commission, il entend s'en tenir au seul service public dans les transports terrestres.
M. Alain Gournac. Et alors ?
M. Josselin de Rohan. Votez le texte du Gouvernement, dans ces conditions ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce malheureux ministre se trouve donc en contradiction avec le Premier ministre, avec la commission et avec la majorité sénatoriale qui est censée le soutenir ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)
M. Charles Revet, président de la commission spéciale. Ne vous inquiétez pas, monsieur Mélenchon, tout va bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas que je le plaigne, mes chers collègues, mais je veux seulement acter ce moment. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) J'ai d'ailleurs d'autant moins de raison de le plaindre que, ce matin, il m'a fait une mauvaise manière ! (Nouvelles exclamations amusées sur les mêmes travées.)
M. Alain Gournac. Il est pourtant très sympathique !
M. Christian Demuynck. Oui, c'est étonnant !
M. Philippe Nogrix. C'est pourtant un fin stratège !
M. Jean-Luc Mélenchon. Dominez votre émotion, monsieur Nogrix, vous allez bientôt être informé...
Ce matin, je mettais en exergue le caractère brutal et injuste de la décision d'exclure a priori du champ de la négociation, à la fin du conflit, le paiement des heures de grève. Je soulignais qu'en agissant de cette manière vous préjugiez des responsabilités dans le déclenchement de la grève puisque, en toute hypothèse, celle-ci n'aura lieu qu'après que les multiples procédures de concertation préalable auront été mises en jeu, celles qui existaient déjà auparavant et celles que prévoit d'instaurer ce texte. Inscrire dans la loi que l'on ne négociera pas le paiement des heures de grève, cela revient à dire que ceux qui ont tort, de toute façon, ce sont les ouvriers !
M. Jean-Pierre Godefroy. Voilà !
M. Alain Gournac. De toute manière, vous êtes contre tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. J'ai rappelé en outre qu'il en coûte et qu'il en cuit de faire grève, contrairement à l'illusion que vous répandez sur ce sujet, chers collègues.
Quoi qu'il en soit, comme il n'était pas question de répondre à mon argumentation sur le fond, en dépit des innombrables clameurs qui ont accompagné mon intervention, le ministre a cru opportun d'affirmer que c'était la loi du 19 octobre 1982 qui avait institué l'obligation de ne pas payer les jours de grève. Et quelques-uns des membres de cette assemblée, dont notre respecté collègue Philippe Nogrix, d'en conclure que c'est la gauche qui avait diminué les droits des travailleurs !
J'ai répondu ce matin qu'il n'en était rien et que, si vous vouliez vous inscrire dans l'esprit de la loi de 1982, vous deviez offrir, en compensation des brutalités dont est « agrémenté » votre texte aujourd'hui, des dispositions aussi favorables aux travailleurs que celles des lois Auroux.
Vous avez balayé cet argument d'un revers de main et accrédité la thèse selon laquelle le ministre communiste chargé du travail à cette époque et le gouvernement de gauche des socialistes et des communistes auquel il appartenait, ainsi que les majorités des deux assemblées, auraient approuvé un dispositif visant à pénaliser les travailleurs.
Je veux donc, à cet instant, rétablir la vérité telle qu'elle est. La disposition que vous avez évoquée a été introduite par la loi du 19 octobre 1982 à l'article L. 521-6 du code du travail. Elle prévoit que le gréviste n'est pas payé exclusivement pour les seules heures de grève. Mais encore faut-il savoir que cet article représentait un progrès par rapport aux dispositions préexistantes, qui ne permettaient pas de déterminer si seules les heures de grève n'étaient pas rémunérées ou si la retenue portait sur la journée entière dès lors qu'elle avait été affectée par un mouvement fusse d'un quart d'heure.
De plus, cet article constituait un second progrès en ce qu'il excluait du champ des retenues de salaire les suppléments pour charges de famille entrant dans la rémunération des ouvriers. Cela signifie que, jusqu'alors, quand on faisait la grève, on ne pouvait être pénalisé au travers de ses enfants et de sa famille.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. Par conséquent, l'article précité représente un dispositif progressiste, qui a renforcé et non réduit les droits des travailleurs, au contraire de ce que vous êtes en train de faire actuellement. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Exactement !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est la raison pour laquelle j'ai dû rétablir la vérité à la suite des propos de M. le ministre sur la loi du 19 octobre 1982, qui constituaient bien une mauvaise manière à mon égard. Cependant, ce n'est rien à côté de celle que nos collègues de la majorité sénatoriale s'apprêtent à lui faire en votant l'amendement de la commission !
Nous leur demandons non pas de se rallier à nos arguments, mais seulement d'avouer quelles sont leurs intentions véritables et d'assumer la responsabilité politique de leur démarche.
M. Alain Gournac. Nous savons ce que nous avons à faire !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous êtes en train, mes chers collègues, de transformer une victoire politique et électorale en une revanche sociale ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Outre que vous frappez, de façon très traditionnelle, sur les travailleurs, vous vous figurez, parce que vous êtes ici dans le confort d'une enceinte où l'on n'entend pas les clameurs de la rue (Rires sur les mêmes travées), ...
M. Alain Gournac. Oh là là !
M. Jean-Luc Mélenchon. ...que vous allez pouvoir, au détour d'un amendement, étendre l'application de vos dispositions anti-grève à l'ensemble de la classe ouvrière, à l'ensemble des transports publics et à l'ensemble des services publics, y compris l'éducation nationale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Alain Gournac. On se croirait à un congrès socialiste !
M. Josselin de Rohan. C'est Jaurès qui parle !
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote sur l'amendement n° 15 rectifié bis.
M. Pierre Laffitte. Je voudrais rappeler ici l'existence de la notion de continuité territoriale. À cette aune, il me semble que l'on peut légitimement espérer que les Corses ne soient pas plus mal traités que les Franciliens au regard du droit à un service minimum de transports publics.
En effet, ce service minimum, monsieur Mélenchon, concerne tout de même des millions de travailleurs, qui sont beaucoup plus nombreux que les personnels assurant le service public de transport, lesquels ne sont nullement privés du droit de grève mais privent du droit de travailler ceux qu'ils gênent par leurs mouvements de grève.
Une majorité de Français souhaitent que la liberté de travailler soit garantie. C'est de cela qu'il s'agit ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. Michel Houel. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, pour explication de vote.
M. Alain Gournac. J'ai cru voilà un instant que nous assistions à une répétition du prochain congrès du parti socialiste. Ici, nous sommes au Sénat ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Je peux, moi aussi, faire de grands gestes, mes chers collègues ! Cela fera plaisir à tout le monde, et l'on n'entendra pas davantage ce qui se passe dans la rue, monsieur Mélenchon !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le congrès de l'UMP ici !
M. Alain Gournac. Je dis ce que je veux ! Ce n'est pas à vous de nous expliquer comment nous allons voter ! Nous faisons ce que nous voulons, c'est cela la démocratie ! (Rires sur les travées socialistes et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est joli, c'est remarquable !
M. Alain Gournac. Respectez la démocratie ! Mais, si vous y tenez, je peux moi aussi vous faire un numéro ! (M. Alain Gournac joint le geste à la parole, déclenchant l'hilarité sur les travées de l'UMP.)
Plus sérieusement, et s'agissant de la proposition de Mme le rapporteur, nous en avons bien entendu beaucoup parlé au sein de la commission.
Nous avons effectivement besoin d'un bilan, d'une évaluation de l'application du texte, afin de déterminer ce qui marche bien ou moins bien, de manière à pouvoir rectifier le dispositif, le cas échéant, dès le mois d'octobre 2008.
L'amendement prévoit en outre l'examen de l'opportunité d'étendre les dispositifs du présent texte aux autres modes de transport. Nous sommes favorables à cette proposition, et nous remercions Mme le rapporteur d'avoir retiré le dernier membre de phrase de son texte, qui visait manifestement un autre sujet. Nous en avons également parlé en commission : cela relève d'autres négociations et d'autres concertations.
Nous sommes donc favorables à la nouvelle rédaction de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour éclairer complètement la Haute Assemblée, en particulier MM. Alfonsi, Nogrix, Retailleau et de Rohan, je vais vous donner lecture d'une lettre que j'ai adressée hier à M. Bussereau, conformément aux engagements que j'avais pris devant vous, madame le rapporteur :
« Au cours du débat parlementaire au Sénat sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, la question de l'extension du dispositif aux transports maritimes pour la desserte des îles proches du littoral a été longuement évoquée.
« La Haute Assemblée a rejeté, suivant en cela l'avis du Gouvernement et de la commission spéciale, »- telle était bien hier votre position, madame le rapporteur - « les amendements correspondants.
« Toutefois, il apparaît que, dans un certain nombre de cas, les dessertes en cause constituent des missions de service public et des réponses à des besoins quotidiens, voire essentiels, de certains de nos concitoyens.
« Il me semble donc souhaitable d'engager rapidement des concertations sous votre égide avec les autorités organisatrices et les entreprises et les partenaires sociaux concernés, afin que ceux-ci, sur une base volontaire, puissent transposer au cas par cas et pour ces situations précises les principes posés par le projet de loi. »
Telle est la teneur du courrier que j'ai adressé hier à M. Bussereau, conformément à mes engagements.
M. Charles Revet, président de la commission spéciale. C'est très bien !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. C'est conforme à nos échanges !
M. Xavier Bertrand, ministre. Alors, conformons-nous à ce que vous aviez vous-même recommandé hier, madame le rapporteur, à savoir que le texte porte sur les seuls transports terrestres de voyageurs, respectant un principe auquel nous adhérons vous comme moi, celui de la concertation préalable.
C'est dans cet esprit que le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Comme je l'ai indiqué, la question soulevée par la commission n'est certainement pas taboue. L'opposition du Gouvernement est avant tout due à un problème de méthode.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. Jean Desessard. Le Gouvernement est soutenu par la gauche !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, nous avons fait ce que nous avons pu ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Qui est d'accord avec qui ? C'est le congrès de l'UMP !
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 3261-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 3261-2. - L'employeur situé à l'intérieur de la zone de compétence de l'autorité organisatrice des transports dans la région d'Île de France prend en charge au moins 75 % du prix des titres d'abonnements souscrits par ses salariés pour leurs déplacements accomplis au moyen de transports publics de personnes, entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Avec cet amendement, il s'agissait d'améliorer l'organisation des transports en commun.
J'aurais pu évoquer le sous-investissement dans les transports, le combat pour obtenir un matériel fiable, la sous-traitance des activités de maintenance, le recours croissant à l'intérim et les suppressions de postes. Avec cet amendement, notre ambition était d'apporter des solutions à ces problèmes.
J'aurais pu aussi décrire l'abandon des petites gares. Dans tout le département de l'Ardèche, il n'y a plus de desserte ferroviaire pour les voyageurs !
J'aurais pu enfin parler des transports trop chers, trop peu nombreux, trop focalisés sur les centres-villes ; du contrat de plan entre l'État et la région d'Île-de-France, qui est insuffisant ; de l'étalement urbain et de l'allongement des déplacements entre le domicile et le lieu de travail.
Mais cette argumentation destinée à améliorer les services publics ne correspond pas à l'esprit du projet de loi. Si je suis d'accord pour déposer des « cavaliers », il ne faudrait tout de même pas qu'ils aillent dans le sens contraire de la troupe !
Je retire donc l'amendement n° 58, car je ne vois pas l'intérêt d'amender une loi qui veut restreindre le droit de grève.
M. le président. L'amendement n° 58 est retiré.
L'amendement n° 59, présenté par M. Desessard et Mme Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 2531-2. - Dans la région d'Île-de-France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique, à but non lucratif, dont l'activité est de caractère social, sont assujetties à un versement de transport. »
II. L'article L. 2333-64 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2333-64. - En dehors de la région d'Île-de-France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif dont l'activité est de caractère social, peuvent être assujetties à un versement destiné au financement des transports en commun :
« 1º Dans une commune ou une communauté urbaine dont la population est supérieure à 10 000 habitants ;
« 2º Ou dans le ressort d'un établissement public de coopération intercommunale compétent pour l'organisation des transports urbains, lorsque la population de l'ensemble des communes membres de l'établissement atteint le seuil indiqué. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Là encore, c'était un amendement intelligent ! (Rires.)
Il avait pour but d'améliorer le service public de transport collectif, mais, comme j'estime que nous allons dans la mauvaise direction, c'est-à-dire vers une restriction du droit de grève, je me vois contraint de le retirer.
M. le président. L'amendement n° 59 est retiré.
L'amendement n° 60, présenté par M. Desessard et Mme Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les articles L. 3261-4 et L. 3261-5 du code du travail, le mot : « peut » est remplacé par le mot : « doit ».
Monsieur Desessard, qu'en est-il de cet amendement ?
M. Jean Desessard. Monsieur le président, vous avez bien compris le sens de mes interventions ! Je vais donc retirer mon amendement, mais je souhaiterais revenir sur le débat qui nous opposait en fin de matinée et répondre à Mme Procaccia, ce que je n'ai pas pu faire puisque l'amendement n° 57, que je défendais, est tombé.
Cet amendement partait du principe, normal à mes yeux, qu'un un dirigeant d'entreprise devait être rémunéré en fonction de ses résultats et que, si un climat anti-social s'installait dans l'entreprise et que les jours de grève s'accumulaient, le dirigeant devait lui aussi en subir les conséquences.
M. Josselin de Rohan. C'est clownesque !
M. Jean Desessard. Mme Procaccia s'est demandé qui allait payer en cas de grève générale.
M. Jean Desessard. Je vais donc lui répondre : pour la grève générale de 1995, c'est Juppé qui a payé ! Et les députés de la majorité aussi, dans la mesure où un certain nombre d'entre eux n'ont pas été réélus à la suite de la dissolution !
Il y a donc bien eu paiement, madame le rapporteur.
M. Alain Gournac. C'est la démocratie !
M. Jean Desessard. Ensuite, alors que Dominique de Villepin était au plus haut dans les sondages, il y a eu l'épisode du CPE, et il est tombé au plus bas. Lui aussi a payé !
M. Alain Gournac. Et Jospin ? Battu !
M. Josselin de Rohan. Et Royal ? Battue, elle aussi !
M. Jean Desessard. Qu'y a-t-il d'anormal à ce que les dirigeants d'entreprise payent lorsqu'ils se montrent butés, bornés et anti-sociaux ? (Rires sur les travées du groupe CRC. -Protestations sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le ministre, en homme habile et, à l'instar de notre Président de la République, en communicant chevronné, vous feignez de ne pas comprendre et vous me demandez s'il s'agit dans notre esprit de permettre aux dirigeants de faire grève. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.)
Vous le savez bien, monsieur le ministre, quand un dirigeant est fatigué, il va faire un golf, et aux frais de l'entreprise ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et exclamations sur les travées de l'UMP.) La situation n'est pas comparable, monsieur le ministre !
M. Josselin de Rohan. Les chansonniers, c'est aux Deux Ânes !
M. Jean Desessard. Et quand aujourd'hui un dirigeant échoue, vous le savez aussi, il part avec des indemnités qui correspondent à plusieurs années de travail d'un cadre. Je ne vois pas pourquoi un dirigeant ferait grève alors qu'il a de telles sources de satisfaction actuellement !
Si vous croyez comme moi à la persistance des rapports de force dans l'entreprise et à l'opposition entre capital et travail, vous êtes dans votre logique quand vous voulez récompenser un patron anti-social qui est dur avec ses ouvriers : au moins, il défend les intérêts du capital. Mais ici, vous nous expliquez que nous sommes en plein dialogue social, que tout va bien dans les entreprises, que les patrons sont gentils, et que seuls les ouvriers sont parfois méchants, assez méchants même pour faire grève. (Mme Gisèle Printz s'esclaffe.)
Pourquoi les ouvriers seraient-ils obligatoirement les responsables ? La faute peut aussi en incomber aux dirigeants !
M. Alain Gournac. Et c'est reparti !
M. Jean Desessard. Je ne vois pas pourquoi les primes d'un dirigeant ne seraient pas réduites si son entreprise connaît un nombre important de jours de grève. Ce raisonnement entre bien dans votre logique, et je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi mon amendement n'a pas été repris par la commission spéciale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Cela étant, je retire l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 60 est retiré.
L'amendement n° 61, présenté par M. Desessard et Mme Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
En cas de perturbation du trafic causé par une grève, la préfecture est en droit de réquisitionner les services de mise à disposition de vélo en libre service.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement est relatif à la réquisition, en cas de grève, des services de mise à disposition de vélos. Je le retire bien évidemment : nous n'arriverons quand même pas à ce point de mobilisation générale ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 61 est retiré.