Article 10
L'article L. 35-1 du code des postes et télécommunications électroniques est ainsi modifié :
1° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « catégories de » et les mots : «, en raison notamment de leur niveau de revenu » sont supprimés ;
2° Ce même alinéa est complété par la phrase suivante : « Les tarifs tiennent notamment compte des difficultés d'accès au service téléphonique pour les usagers dont les revenus du foyer sont, au regard de la composition familiale, inférieurs à un plafond fixé par décret, en instaurant à leur profit une tarification sociale téléphonique. » - (Adopté.)
Article 11
I. - Le code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :
1° Après le sixième alinéa de l'article L. 351-3, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Il n'est pas tenu compte des ressources perçues pendant la période de référence lorsqu'il est justifié que leur perception est interrompue de façon certaine à la date de la demande.
« Le montant de l'aide personnalisée au logement peut être révisé en cours d'année, à la demande du bénéficiaire, pour tenir compte de changements importants dans sa situation financière, professionnelle ou familiale. La révision prend effet à compter du mois au cours duquel est intervenu le changement qui l'a motivée. » ;
2° L'article L. 351-3-1 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa du I, les mots : « suivant celui » sont supprimés ;
b) Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
c) Les deux dernières phrases du dernier alinéa du III sont supprimées.
II. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 542-2 est ainsi modifié :
a) Dans la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « suivant celui » sont supprimés ;
b) Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour le calcul du montant de l'allocation, il n'est pas tenu compte des ressources perçues au cours de la période de référence lorsqu'il est justifié que leur perception est interrompue de façon certaine à la date de la demande.
« Le montant de l'allocation peut être révisé en cours d'année, à la demande du bénéficiaire, pour tenir compte de changements importants dans sa situation financière, professionnelle ou familiale. La révision prend effet à compter du mois au cours duquel est intervenu le changement qui l'a motivée. » ;
2° Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 552-1, après les mots : « de l'allocation de parent isolé, », sont insérés les mots : « de l'allocation de logement familiale, » ;
3° Après le premier alinéa de l'article L. 831-4, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour le calcul du montant de l'allocation, il n'est pas tenu compte des ressources perçues au cours de la période de référence lorsqu'il est justifié que leur perception est interrompue de façon certaine à la date de la demande.
« Le montant de l'allocation peut être révisé en cours d'année, à la demande du bénéficiaire, pour tenir compte de changements importants dans sa situation financière, professionnelle ou familiale. La révision prend effet à compter du mois au cours duquel est intervenu le changement qui l'a motivée. » ;
4° L'article L. 831-4-1 est ainsi modifié :
a) Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « suivant celui » sont supprimés ;
b) Le second alinéa est supprimé. - (Adopté.)
Article 12
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 262-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu'elles décident d'attribuer des aides à caractère individuel, elles s'assurent que leurs conditions d'attribution n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, eu égard à l'objet de l'aide, et ayant les mêmes ressources rapportées à la composition du foyer. » ;
2° L'article L. 263-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu'elles décident d'attribuer des aides à caractère individuel, elles s'assurent que leurs conditions d'attribution n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, eu égard à l'objet de l'aide, et ayant les mêmes ressources rapportées à la composition du foyer. »
II. - Le premier alinéa de l'article L. 726-1 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il détermine les principes présidant à l'attribution des prêts et des aides à caractère individuel et collectif, en s'assurant notamment que les conditions d'attribution des prêts et aides à caractère individuel n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, eu égard à l'objet de l'aide, et ayant les mêmes ressources rapportées à la composition du foyer. »
III. - Le premier alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans ce cas, il s'assure que leurs conditions d'attribution n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, eu égard à l'objet de l'aide, et ayant les mêmes ressources rapportées à la composition du foyer. » - (Adopté.)
TITRE III
Sécurisation du parcours professionnel et accompagnement des bénéficiaires de minima sociaux
Article 13
Après le premier alinéa de l'article L. 351-6-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'allocation est due à compter du lendemain de la fin du contrat de travail. La prise en charge ne peut être reportée que pour tenir compte du versement en fin de contrat d'une indemnité compensatrice de congés payés ou d'indemnités de rupture non prescrites par le présent code. » - (Adopté.)
Article 14
I. - L'article L. 262-38 du code de l'action sociale et des familles est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - A l'occasion de la conclusion du contrat d'insertion et de chacune de ses révisions, l'allocataire et les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 262-37 reçoivent une information sur :
« 1° Les droits dont ils sont susceptibles de bénéficier, compte tenu de leurs ressources ;
« 2° L'évolution prévisible de leurs ressources en cas de retour à l'activité. »
II. - En conséquence, le premier alinéa du même article est précédé de la mention : « I. - ». - (Adopté.)
Article 15
I. - Après l'article L. 524-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 524-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 524-8. - Les titulaires de l'allocation de parent isolé bénéficient d'un contrat d'insertion dans les conditions prévues à la section 4 du chapitre II du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles.
« Les contrats d'insertion conclus avec les allocataires de la présente section comportent obligatoirement des dispositions relatives à l'accès aux modes de garde pour les enfants âgés de moins de trois ans qui sont à leur charge. »
II. - La section 5 du chapitre III du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifiée :
1° L'article L. 263-18 est ainsi rédigé :
« Art. L. 263-18. - Le président du conseil général peut, par convention, confier l'élaboration des contrats d'insertion des titulaires de l'allocation de parent isolé mentionnée à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale et la coordination des différents aspects économiques, sociaux, éducatifs et sanitaires de ces contrats aux caisses d'allocations familiales ou, pour leur ressortissants, aux caisses de mutualité sociale agricole. » ;
2° L'article L. 263-19 est abrogé. - (Adopté.)
Article 16
Après l'article L. 351-10 du code du travail, il est inséré un article L. 351-10 bis A ainsi rédigé :
« Art. L. 351-10 bis A. - I. - Les titulaires de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L. 351-10 bénéficient d'un contrat d'insertion dans les conditions prévues à la section 4 du chapitre II du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles.
« II. - L'élaboration des contrats d'insertion des allocataires mentionnés au I et la coordination des différents aspects économiques, sociaux, éducatifs et sanitaires de ces contrats peuvent être confiées par convention passée avec le président du conseil général, à l'Agence nationale pour l'emploi. » - (Adopté.)
TITRE IV
Expérimentations
Article 17
Les titres Ier à III de la présente loi entrent en vigueur après une expérimentation dont la durée est fixée à cinq ans à compter de la publication du décret mentionné au deuxième alinéa.
Les départements intéressés par cette expérimentation doivent se faire connaître dans un délai d'un an auprès du représentant de l'État dans le département. Un décret fixe la liste des collectivités et des projets retenus.
Dans un délai de six mois avant le terme de cette expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d'évaluation de celles-ci, afin d'en mesurer l'efficacité et d'en envisager la prolongation éventuelle dans le temps, l'extension à d'autres départements volontaires ou la généralisation à l'ensemble du territoire. - (Adopté.)
TITRE V
Dispositions diverses
Article 18
I. - Les pertes de recettes et les dépenses résultant pour les départements de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
II. - Les pertes de recettes et les dépenses à la charge des organismes de sécurité sociale résultant de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus à l'article 403 du code général des impôts.
III. - Les pertes de recettes et les dépenses résultant pour l'État de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par une majoration de la contribution prévue à l'article 527 du code général des impôts. - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 18
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 18, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. Dans le premier alinéa de l'article L. 115-1 du code de l'action sociale et des familles, les mots : « qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l'économie et de l'emploi, se trouve dans l'incapacité de travailler, » sont supprimés.
II. Le premier alinéa du même article est complété par les mots : « sous certaines conditions de ressources ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à rendre inconditionnel le droit à un revenu social minimum, garantissant des « moyens convenables d'existence ». La seule condition doit être un manque de revenu suffisant. Cette disposition permettrait que personne ne passe à travers cet ultime filet de protection sociale. En effet, rien ne peut justifier que, dans une société relativement prospère comme la nôtre, on puisse manquer du strict nécessaire.
Aujourd'hui, la loi accepte de garantir des moyens convenables d'existence à ceux qui se trouvent « dans l'incapacité de travailler ». Cette notion bien floue ouvre la porte à toutes les exclusions. Qui détermine ceux qui sont dans l'incapacité de travailler ? On perçoit bien la tentation permanente d'assimiler les chômeurs à des fainéants qu'il faudrait punir ou inciter pour les ramener à l'emploi.
Je vous propose de faire dépendre ce droit d'une seule condition, celle des ressources, afin que les minima sociaux bénéficient à tous ceux qui en ont besoin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer toute référence à l'âge, l'état physique ou mental, la situation de l'économie et de l'emploi dans la définition du droit à obtenir de la collectivité un revenu convenable d'existence. La rédaction actuelle de l'article L. 115-1 du code de l'action sociale et des familles est une reprise du préambule de la Constitution de 1946, qui dispose : « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. »
Il me paraît donc préférable de respecter ce parallélisme, à moins que les auteurs de l'amendement ne considèrent qu'il faille également modifier le préambule de 1946 !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le RMI est déjà attribué aujourd'hui sous deux conditions seulement : l'insuffisance des ressources et l'engagement dans une démarche d'insertion. On n'a jamais demandé de justifier d'une incapacité de travailler. Le RMI n'a jamais été refusé à qui que ce soit ayant une telle incapacité.
Par conséquent, le Gouvernement, qui ne souhaite pas modifier l'article visé, est défavorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 18, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 115-1 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les minima sociaux doivent permettre à chaque résident sur le sol français de subvenir à ses besoins de base, et donc de bénéficier d'un revenu au moins égal au montant du seuil de pauvreté tel que défini par l'Institut national de la statistique et des études économiques. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à rendre effectif le principe mentionné dans le premier alinéa de l'article ici visé, selon lequel « toute personne a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».
Pour cela, aucun des minima sociaux, quand ils constituent la seule ressource de leurs allocataires, ne doit être d'un montant inférieur au seuil de pauvreté. Le seuil retenu est un revenu par unité de consommation inférieur à la moitié du revenu médian avant impôts, soit en 2004, selon l'INSEE, 657 euros par mois et par personne.
Actuellement, 4,2 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté, soit 8 % de la population.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. En fait, il s'agit d'une façon détournée de modifier les modalités de révision du montant des minima sociaux.
Le seuil de pauvreté se définit comme le revenu égal à la moitié du revenu médian d'un pays donné. En prenant comme référence le seuil de pauvreté, on est en réalité conduit à indexer les minima sociaux sur les salaires et non plus sur les prix.
En outre, pour apprécier le niveau de revenu des bénéficiaires de minima sociaux, il est nécessaire de tenir compte des autres prestations sociales dont ils bénéficient. Les droits connexes ont une importance considérable dans les ressources des foyers à bas revenu.
Il convient donc d'aborder de façon plus globale la problématique des revenus des bénéficiaires de minima sociaux. C'est pourquoi nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je rappelle d'abord que le Gouvernement a augmenté le RMI de 1,8 % au 1er janvier dernier.
J'ajoute que la mesure proposée dans cet amendement aurait un coût supérieur à 3 milliards d'euros par an. Le vrai problème qui se pose est d'utiliser cet argent pour aider les personnes concernées à retrouver un emploi et leur permettre de sortir durablement de l'exclusion et de la pauvreté. C'est le choix qu'a fait le Gouvernement et c'est pourquoi il est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Selon le Gouvernement, la mesure que je propose coûterait 3 milliards d'euros, et il n'a pas envie de faire cet effort.
Madame le rapporteur, vous refusez l'attribution de ces 657 euros par mois. Considérez-vous que la somme attribuée aujourd'hui est suffisante ? Sinon, quel montant d'indemnité minimale serait-il juste, selon vous, d'attribuer aux plus démunis ?
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Valérie Létard, rapporteur. Notre propos est de montrer que, aujourd'hui, le revenu de base d'un bénéficiaire du RMI représente 30 % de ses ressources, les droits connexes représentant les 70 % restants. Par conséquent, le plus important, c'est non pas d'établir le revenu de base à 657 euros, mais de veiller au revenu global dont disposera le bénéficiaire de minima sociaux ou le travailleur précaire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Valérie Létard, rapporteur. Or, aujourd'hui, la difficulté est précisément qu'à chaque statut correspond un niveau différent de prestations sociales.
Mme Valérie Létard, rapporteur. Par conséquent, les disparités de traitement sont liées non pas aux minima sociaux, mais aux droits dont vous bénéficiez en raison du statut auquel vous appartenez. De ce fait, même s'ils percevaient 657 euros demain, nombre d'allocataires disposeraient de ressources globalement inférieures à la somme du RMI et des droits connexes.
Mme Valérie Létard, rapporteur. C'est pourquoi l'expérimentation est essentielle : notre législation sociale est si compliquée qu'elle en devient illisible et plus personne ne s'y retrouve ! Seul l'échelon départemental, grâce à un travail très fin et complexe d'ajustement de l'ensemble des prestations, nous permettra de parvenir, avec le dispositif de droits sociaux, à une vraie équité entre toutes les personnes dont le revenu est précaire, qu'elles travaillent ou qu'elles ne travaillent pas d'ailleurs, et de rendre beaucoup plus attractif le retour à l'activité. En effet, les mécanismes actuels ne sont malheureusement pas suffisamment efficaces dans la mesure où le retour à l'activité entraîne la neutralisation de certains droits.
C'est ainsi que nombre de bénéficiaires du RMI refusent des heures d'activité dans le cadre des services à la personne précisément pour ne pas le perdre le RMI, car, avec seulement dix euros de plus, ils ne seraient plus exonérés des impôts locaux, de la redevance audiovisuelle, ils ne bénéficieraient plus de la gratuité de la cantine et des transports, de la CMU ! Accepter deux ou trois heures supplémentaires de travail, c'est retourner au travail, donc recouvrer le statut de salarié et, bien que n'ayant pas un revenu plus important, perdre le droit à tous ces « avantages » !
Il est donc essentiel de prendre en compte tous ces éléments et non de s'en tenir au seul revenu, monsieur Desessard. L'expérimentation nous aidera à y voir beaucoup plus clair et à obtenir des avancées concrètes. (M. le président de la commission des affaires sociales, Mme Gisèle Printz et M. Jean-Pierre Godefroy applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 18, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Au début de l'article L. 262-8 du code de l'action sociale et des familles, les mots : « Les personnes ayant la qualité d'élève, d'étudiant ou de stagiaire » sont remplacés par les mots : « Les personnes ayant la qualité d'élève ou d'étudiant ».
La parole est à de nouveau à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cette proposition de loi vise à rendre le travail profitable dès la première heure. Cet amendement a donc pour objet de permettre aux stagiaires de percevoir le RMI, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
En effet, dans la situation actuelle, les stagiaires peuvent n'obtenir aucune « gratification » de la part de leur employeur. La plupart d'entre eux reçoivent environ 300 euros par mois. Ils en sont donc réduits à payer pour travailler ! On sait bien que le stage, en général, inclut l'accomplissement de tâches productives, qu'il se caractérise souvent comme un mélange de formation et de véritable travail.
Cette situation a pour conséquence d'empêcher les personnes sans ressources, notamment sans soutien financier familial, d'effectuer des stages, alors que ces stages constituent souvent une porte d'entrée obligatoire vers un emploi. Assurer aux stagiaires les moyens de subvenir à leurs besoins élémentaires serait donc un outil pour assurer l'égalité des chances et l'accès ou le retour à l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Ouvrir le bénéfice du RMI aux stagiaires n'est pas une solution au problème de la modicité de la gratification de ces derniers. Au demeurant, mieux vaudrait aborder cette vaste question dans un texte global, ce que fait d'ailleurs M. Godefroy dans une proposition de loi ayant pour objet de définir le statut des stagiaires et la rémunération des stages.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement pense comme la commission, mais émet d'emblée un avis défavorable.
Je rappelle qu'il a, dans la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006, rendu obligatoires la conclusion d'une convention de stage et l'attribution d'une gratification à partir du quatrième mois. En outre, pour que chacun ait les mêmes chances d'accéder aux stages les plus intéressants, il mettra en place une bourse des stages avant la fin du premier trimestre.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles est supprimé.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Le deuxième alinéa de l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles exclut, pour la détermination du montant du revenu minimum d'insertion, la prise en compte de certains enfants étrangers : ceux qui ne sont pas nés en France ou y sont entrés après 1988 ou qui y séjournent dans des conditions irrégulières. Cela se traduit concrètement par le fait que les caisses d'allocations familiales exigent un certificat médical OMI pour les enfants non nés en France à charge d'allocataire étranger.
Aujourd'hui, cette législation empêche des enfants de bénéficier du droit fondamental à être protégé de la misère. En effet, la charge d'un enfant, qu'il soit ou non entré régulièrement sur notre territoire, à quelle que date que ce soit, représente toujours un coût financier. Refuser d'en tenir compte dans la détermination du montant du RMI, c'est condamner ces enfants à la pauvreté.
Je vous rappelle que le préambule de la Constitution de 1946 prévoit que la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ».
Je pourrais également citer la convention 118 de l'Organisation internationale du travail, la convention européenne des droits de l'homme, les accords conclus entre l'Union européenne et des États tiers, les conventions bilatérales de sécurité sociale ou la convention internationale des droits de l'enfant.
Je vous rappelle par ailleurs que Claire Brisset, ex-défenseure des enfants, dans son rapport au comité des droits de l'enfant des Nations unies, en mai 2004, et dans une proposition de réforme datée du 9 juin 2004, adressée au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, déplorait le refus par les autorités françaises d'accorder des prestations familiales à tous les enfants d'allocataires étrangers. Elle demandait que soit supprimée la condition de régularité de séjour de l'enfant et que ne soit conservée que la condition du séjour de la personne qui en a la charge. Ce principe devrait également prévaloir pour l'attribution du RMI.
J'attends donc des explications de la part du Gouvernement au sujet de cette disposition législative, pénalisante et discriminatoire pour certains enfants, et cela pour des raisons strictement administratives dont ils ne devraient certainement pas avoir à souffrir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Il s'agit là d'un sujet très important et très complexe. La présente proposition de loi ne nous paraît pas être le cadre idéal pour en débattre. Il me semble donc difficile d'émettre un avis sur ce sujet.
Dans le droit, la régularité du séjour a toujours été la condition du versement des prestations sociales aux étrangers. Revenir sur ce principe, ce serait indirectement cautionner le contournement des règles d'entrée et de séjour sur notre territoire telles qu'elles existent aujourd'hui.
En outre, j'observe que l'exclusion dont il s'agit n'est pas définitive, l'enfant étant réintégré dans la composition du foyer prise en compte pour le calcul du RMI dès lors qu'il est régularisé.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement partage totalement l'avis de Mme le rapporteur.
J'ajoute que le Gouvernement a pleinement tenu compte, dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2006, des conventions internationales et du rapport de la défenseure des enfants que vous avez cité, monsieur le sénateur.
Cette loi permet notamment de prendre en compte les enfants d'étrangers régularisés et de sécuriser la prise en compte des enfants de réfugiés. Le certificat OMI n'est donc plus systématiquement exigé.
J'entends bien que d'autres débats sur ce sujet sont nécessaires, mais pas dans le cadre de ce texte.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix les conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, j'ai présenté plusieurs amendements visant à supprimer des contrôles tatillons et certaines démarches administratives. Or, chaque fois, il m'a été répondu que ce n'était pas l'objet du texte, qu'on allait voir...
Malheureusement, si nous ne prenons pas des mesures simples pour mettre fin à la misère, en particulier l'augmentation des minima sociaux, nous n'arriverons à rien ! Dans quelques mois, dans quelques années, nous ferons toujours face aux mêmes difficultés !
Nous devons donc mettre en place un système simple, le revenu d'existence pour tous, et assurer un minimum social pour tous, sans autre condition que celle des ressources.
Pour ces raisons, même si cette proposition de loi va dans la bonne direction, je m'abstiendrai, car elle ne traite pas les problèmes en profondeur.
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de cette explication de vote, je tiens à remercier notre collègue Valérie Létard de l'initiative qu'elle a prise. Notre débat, qui prolonge d'ailleurs un certain nombre de discussions que nous avons eues ici et ailleurs, a été extrêmement intéressant.
Sans évidemment revenir sur les points que notre collègue Janine Rozier a développés dans la discussion générale, je souhaite faire quelques observations.
Tout d'abord, le revenu minimum d'insertion existe depuis 1988. Au fond, il aura fallu son transfert aux départements dans le cadre de la loi de décentralisation du 18 décembre 2003 pour que l'on commence à prêter attention à sa finalité principale - c'est-à-dire l'insertion - et à réfléchir de manière plus approfondie aux moyens d'aider et inciter ceux de nos compatriotes qui survivent avec le RMI à se remettre au travail.
Le groupe de travail qui a été constitué au sein de la commission des affaires sociales, chère Valérie Létard, travaille depuis le printemps 2005, si ma mémoire est bonne.
Mme Valérie Létard, rapporteur. Depuis décembre 2004 !
M. Henri de Raincourt. Beaucoup a été fait assez rapidement, en deux ans seulement. Ce groupe de travail a effectué un travail de fond extrêmement important, qui a ouvert des perspectives intéressantes.
Ensuite, M. le Premier ministre a confié à Michel Mercier et à moi-même le soin, dans le cadre d'une mission, de réfléchir sur un sujet plus restreint que celui sur lequel travaillait le groupe animé par Valérie Létard. Il s'agissait d'essayer d'harmoniser certains minima sociaux - il y en a beaucoup - et d'activer la dépense sociale.
Par ailleurs, comme l'a très bien rappelé Janine Rozier tout à l'heure, nous avons voté le 23 mars 2006 la loi relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux. Ses dispositions commencent à entrer en application ; les décrets ont été publiés au début de l'automne.
Enfin, je rappelle - même si cela a déjà été dit - que le projet de loi de finances pour 2007 prévoit un certain nombre de possibilités nouvelles. L'une d'entre elle - la possibilité de procéder à des expérimentations - avait retenu l'attention de notre collègue Valérie Létard.
Ainsi, en deux ans, nous avons beaucoup progressé. C'est si vrai que, aujourd'hui, semble-t-il, le nombre d'allocataires - en l'espèce, je préfère ce mot à celui de « bénéficiaires » - du RMI se stabilise globalement, voire commence à décroître à certains endroits. Sans doute la situation économique n'est-elle pas totalement étrangère à ce phénomène, mais tout ce que nous avons fait, les uns et les autres, depuis deux ans n'y est pas non plus totalement étranger.
Je tiens donc à remercier le Gouvernement des mesures qu'il a prises, à dire à quel point le groupe UMP apprécie et approuve le travail qui a été conduit par le groupe animé par Valérie Létard et combien nous souscrivons à nombre des conclusions du rapport sur la proposition de loi qu'elle nous présente ce matin.
Néanmoins, il nous a semblé que, en cet instant, nous ne pouvions pas - et, au fond, nous le regrettons beaucoup - approuver cette proposition de loi. Pourquoi ? Pour une raison simple : à l'heure où nous parlons, nous ne savons pas encore comment dégager les moyens qui nous permettraient de mettre en oeuvre ces dispositions.
J'aimerais que l'on saisisse bien la portée de notre abstention : nous sommes favorables à la plupart des mesures de cette proposition de loi, pour ne pas dire à la totalité d'entre elles, mais il nous semble qu'il est possible, dans le cadre d'expérimentations, de pousser plus loin certains dispositifs qui ont déjà été mis en oeuvre. Nous souhaitons non seulement que ce mouvement ne soit pas ralenti, mais au contraire, qu'il soit accentué.
Aujourd'hui, dans le cadre de la préparation des campagnes électorales, beaucoup se penchent sur cette question. Il nous paraît que le simple fait de nous abstenir doit être considéré comme un encouragement moral à persévérer dans la voie dans laquelle nous nous sommes tous engagés.
M. Guy Fischer. Ça, c'est un comble !
M. Henri de Raincourt. Grâce à Mme Létard, nous franchissons en cet instant une étape supplémentaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, comme je l'ai déjà annoncé, les sénateurs du groupe CRC voteront contre cette proposition de loi, non parce qu'ils sont opposés à ce texte - nous considérons, comme d'autres collègues, qu'un certain nombre de problèmes devaient être abordés -, mais parce qu'ils voient une véritable hypocrisie dans les positions du groupe UMP, comme en témoigne son intention de s'abstenir.
Aujourd'hui, la France compte 7 millions de travailleurs pauvres. M. de Raincourt a souligné le rôle prépondérant qu'ont joué les départements dans l'évolution de la situation des RMIstes, notamment. Soit, mais quelle est la réalité ? Dans la plupart des cas, c'est le RMI contre un contrat d'avenir ou un contrat d'accompagnement dans l'emploi. Les études qui seront effectuées ne manqueront pas de révéler que, même si les chiffres du chômage sont en baisse et si ceux du RMI stagnent, la précarité est plus que jamais le lot d'un très grand nombre de personnes dans notre pays. La réalité sociale, la voilà !
Je vous demande donc de vous interroger sur l'exercice des droits fondamentaux. Aujourd'hui, nous avons tous évoqué l'abbé Pierre et son action. La France connaît des problèmes de logement sans précédent. Les logements dont le Gouvernement favorise la construction sont avant tout des appartements défiscalisés. Quant aux logements sociaux, ceux que l'on construit sont essentiellement financés par des PLAI et des PLS. En revanche, on ne construit pas suffisamment de logements « PLUS », ceux qui permettraient d'accueillir les plus démunis.
Ce débat sur les minima sociaux est aujourd'hui l'occasion de nous pencher sur les besoins réels des plus démunis : droit fondamental au logement, à l'accès à l'emploi, à la santé. Martin Hirsch, qui est une référence, a déclaré que, même en matière de santé, les inégalités d'accès, qui se creusent, étaient fondamentalement liées à l'origine sociale.
Tous ces problèmes méritent d'être posés.
Au cours des cinq dernières années, la politique du Gouvernement a largement contribué à creuser les inégalités. Ce n'est pas en se souciant d'alléger les « charges » des entreprises, de doper les performances du CAC 40 que l'on avancera, au contraire ! Durant ces cinq années, nous nous sommes rapprochés d'un certain modèle anglo-saxon, où les inégalités sont légions.
Réfléchissons-y au moment de voter !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier Mme Valérie Létard de tout le travail qu'elle a accompli et à lui dire qu'il ne faut surtout pas qu'elle se décourage.
En cet instant, nous sommes dans une situation un peu singulière puisque le groupe socialiste, qui a plutôt voté contre l'ensemble des articles,...
M. Jean-Pierre Godefroy. Pas du tout !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.... va s'abstenir, que le groupe UMP, qui a approuvé l'ensemble des articles, va lui aussi s'abstenir et que le groupe CRC, qui est plutôt pour le texte, va voter contre ! En gros, chacun va adopter une attitude liée au climat électoral.
Je suis ravi que, dans le fond, tout le monde soit d'accord avec ce texte. L'avenir nous démontrera, quel que soit le futur gouvernement, qu'il fallait le voter aujourd'hui. Peu importe le nombre de ceux qui le voteront ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je veux seulement préciser que nous n'avons voté contre aucun article ; j'ai bien indiqué que nous nous abstenions sur chacun. Au demeurant, ma collègue Christiane Demontès a parfaitement explicité notre position lors de la discussion générale.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Valérie Létard, rapporteur. Ce texte est le fruit d'une réflexion collective à laquelle beaucoup de mes collègues ont participé, siégeant sur toutes les travées de cet hémicycle.
Sur le fond, tout le monde reconnaît la nécessité de passer à l'action, en tout cas d'explorer de nouvelles pistes. Les minima sociaux bénéficient à 6 millions de personnes si l'on considère les familles dans leur ensemble, et il faut aussi penser aux 7 millions de travailleurs pauvres. Tous ces gens sont concernés, à un moment ou à un autre, par cette proposition de loi.
Les questions évoquées par ce texte seront déterminantes, demain, pour que l'action publique puisse accompagner les travailleurs précaires, toutes ces personnes qui cherchent un emploi, qui souhaitent devenir ou redevenir actives, mais qui ont peur de s'engager et - c'est un comble ! - de se trouver dans la précarité. Il y a là quelque chose qui défie le bon sens !
Je suis bien consciente des enjeux qui sont derrière cette question et du coût que cela représente. Nous sommes loin d'être irresponsables et nous y avons tous travaillé. L'expérimentation a justement pour objet de mesurer, avec responsabilité, les contours du dispositif, les améliorations qu'il induira, son coût, mais aussi les économies qu'il permettra éventuellement de réaliser,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Valérie Létard, rapporteur .... sans parler de son appréciation par nos concitoyens, qui ont aujourd'hui le sentiment que la législation sociale va à l'encontre du bon sens.
Aujourd'hui, ils attendent d'être encouragés dans leurs efforts ; c'est tout le sens de cette proposition de loi que chacun d'entre nous, sur le fond, est conscient de devoir soutenir. Cependant, je comprends que certains, pour des raisons diverses, en particulier de coût, puissent adopter des positions différentes.
Quoi qu'il en soit, nous devons avancer sur cette question. Je vous remercie, les uns et les autres, de votre contribution. Le débat n'est pas clos et reviendra très prochainement. En tout cas, le Parlement a fait son travail : il a largement contribué à la réflexion.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Le Sénat !
Mme Valérie Létard, rapporteur. J'espère que le travail réalisé par le Sénat depuis deux ans trouvera un écho positif et sera un point de départ pour inverser la situation incompréhensible dans laquelle nous vivons aujourd'hui ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Alain Milon applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?....
Je mets aux voix les conclusions du rapport de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi n° 425.
(La proposition de loi est adoptée.)
(Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)