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MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville.

M. Yves Fréville. Monsieur le président, je tiens à préciser que, lors du scrutin public n° 67, j'ai voté pour l'amendement n° II-29, présenté par MM. Arthuis et Marini, rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et concernant les pensions outre-mer.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur Fréville.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-deux heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

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Loi de finances pour 2007

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale.

Enseignement scolaire

Articles additionnels après l'article 43 ter (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B
Articles additionnels après l'article 43 ter (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article 34 et état B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est toujours impressionnant de traiter d'un projet de budget de plus de 59 milliards d'euros, à vingt-deux heures trente, dans l'enthousiasme et la mobilisation intense de la Haute Assemblée.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Je remercie mes collègues présents : leur attention équilibre largement la faiblesse des effectifs. L'heure, il est vrai, ne facilite rien ; on peut imaginer et espérer qu'un important travail en commission apportera une valeur ajoutée à nos débats !

Dans le cadre de nouvelles procédures liées à la LOLF et à sa mise en oeuvre, votre rapporteur spécial, mes chers collègues, s'efforcera à une grande brièveté, vous renvoyant aux documents écrits pour connaître le sentiment de la commission des finances sur ce projet de budget.

Je développerai dans mon intervention trois idées simples.

La première idée, peut-être la plus réjouissante pour chacun ici, monsieur le ministre, est qu'en matière d'enseignement scolaire l'analyse bouge, et ce dans une optique qui n'est plus nombriliste, qui n'est plus franco-française ni strictement partisane.

L'analyse globale qui situe l'enseignement scolaire en France au regard des performances de l'enseignement scolaire dans les autres pays de l'Europe et, surtout, de l'OCDE nous permet de mieux nous connaître. Nous constatons, par exemple, qu'en ce qui concerne l'enseignement secondaire, tout particulièrement le second cycle, nous sommes plutôt plus chers et moins performants que la moyenne des pays de l'OCDE, qu'en matière d'enseignement primaire, au contraire, notre performance est assez comparable à celle des pays de l'OCDE auxquels nous pouvons nous confronter. Il apparaît également que la généralisation de l'enseignement préscolaire ne garantit en rien la performance, puisque c'est la Finlande, pays où l'accès à l'enseignement primaire obligatoire est le plus tardif - à sept ans -, qui, au terme des analyses conduites par le PISA, le programme international pour le suivi des acquis des élèves, présente les meilleurs résultats scolaires. Encore faut-il ne pas oublier que ce pays organise différemment, mais utilement, son enseignement préscolaire.

Tel est donc le regard global que nous pouvons porter sur nous-mêmes. Nous n'avons pas de raison de penser que nous sommes les meilleurs : nous sommes moyens, et plutôt moins bons dans l'enseignement secondaire.

J'en viens, monsieur le ministre, aux analyses ponctuelles, qui découlent certes, en grande partie, des travaux obstinés et récurrents de la commission des finances sur les enseignants qui n'ont pas d'élèves, mais auxquelles l'analyse des audits apporte une valeur ajoutée qui enrichit nos travaux.

Je rappellerai qu'en effet, monsieur le ministre, vous avez progressé dans l'évaluation et l'identification des enseignants en surnombre : vous en avez restreint les effectifs et, surtout, vous les avez mobilisés vers d'autres tâches, notamment vers des tâches de soutien. C'était sans doute presque inévitable, compte tenu de la mobilité de la demande d'enseignement et de la rigidité de l'offre correspondante, mais vous vous êtes attaché à réduire cet écart. Soyez-en remercié.

Trois audits sont particulièrement utiles. S'agissant tout d'abord de l'audit sur les examens, monsieur le ministre, je forme le voeu qu'il soit suivi d'effet, même si, force est de le reconnaître, il pose un problème de principe non négligeable : celui de la place du contrôle continu par rapport aux examens de fin d'année. Nous savons l'attachement de nos compatriotes, fussent-ils jeunes et lycéens, à des notations nationales et à des labels nationaux dont, semble-t-il, le contrôle continu pourrait les priver.

Un deuxième audit passionnant porte sur les décharges de service. Celles qui ont perdu les justifications historiques qui les avaient fait accepter par vos prédécesseurs - je ne dirai pas depuis la nuit des temps, mais au moins depuis les débuts de la IVe République - correspondent à près de 23 000 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT. Vous avez pris la mesure courageuse, mais limitée, de résorber l'équivalent de 2 300 ETPT ; le débat nous donnera l'occasion, monsieur le ministre, de vous proposer un petit effort supplémentaire.

Un troisième audit analysant les grilles des horaires est particulièrement significatif des singularités, et peut-être des faiblesses, de l'enseignement français. Il se décompose en fait en deux études, portant l'une sur les collèges, l'autre sur les lycées, qui montrent très clairement que nos grilles d'horaires sont très largement supérieures, de près de 20 % en moyenne, à celles en vigueur dans les pays auxquels nous sommes confrontés dans le cadre de l'OCDE.

Tous ces éléments nous donnent donc une connaissance de la performance de notre système, qui ne mérite pas les excès de critique dont il est parfois accablé mais qui, manifestement, peut progresser, en particulier au regard de la dispersion de l'offre et de sa richesse excessive, ainsi que de diverses petites faiblesses liées notamment à l'accumulation et à la sédimentation d'avantages historiques ; je pense en cet instant aux décharges, mais, monsieur le ministre, vous les avez vous-même traitées.

La deuxième idée qui articule cette présentation au nom de la commission des finances est que les chantiers ouverts par votre prédécesseur et par vous-même progressent utilement.

Un chantier auquel nous sommes attachés est celui de la mise en oeuvre de la LOLF dans votre ministère. Soyez remercié, monsieur le ministre, de la création du secrétariat général et de la volonté de rechercher la performance dans l'établissement qui s'exprime à travers elle. L'éducation nationale, ce sont des établissements : la réorganisation, en particulier donc le rôle du secrétariat général, nous donne à penser que, pour vous, la performance de l'établissement, primaire ou secondaire, doit devenir un coeur de sujet et guider l'action de votre administration. Là encore, l'évolution me paraît bonne.

Un deuxième chantier a été ouvert avec la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, présentée par votre prédécesseur, M. François Fillon. Vous la mettez globalement en oeuvre, et les tableaux de l'évolution des effectifs annexés au rapport spécial montrent très clairement que la plupart des rendez-vous sont tenus, en particulier le difficile rendez-vous des PPRE, les programmes personnalisés de réussite éducative.

Permettez-moi encore un mot sur la décentralisation, plus précisément sur le passage des personnels TOS, techniciens, ouvriers et de service, vers les départements et les régions. Les pourcentages du choix en faveur des collectivités locales sont spectaculaires et montrent très clairement que les appréhensions, légitimes, d'une partie de nos collègues n'étaient pas fondées. Ces personnels choisissent d'avoir pour employeur les départements et les régions plutôt que de rester sous l'autorité lointaine et parfois, il faut le reconnaître, indifférente de l'État.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Très juste !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Je voudrais évoquer un dernier chantier qui a été ouvert non par vos prédécesseurs, monsieur le ministre, mais par vous-même ; là encore, soyez-en remercié. Oui, il existe bien une « valeur ajoutée Robien » en général, et en particulier sur deux points que la commission des finances a retenus.

Il s'agit tout d'abord de la mise en oeuvre du programme « ambition réussite », qui permet d'apporter une réponse à la dilution des moyens destinés aux zones d'éducation prioritaires, les ZEP. La concentration sur des territoires moins nombreux, plus difficiles, de moyens plus importants correspond en effet à une hiérarchie de moyens rares.

Il s'agit ensuite de la solution que vous avez apportée à la longue crise des directeurs d'école, solution globalement satisfaisante même si nous constatons de ci de là qu'elle n'a pas totalement épuisé les sujets.

Je voudrais en conclusion, et ce sera la troisième idée structurant mon intervention, évoquer les craquements qui apparaissent à partir de ce symbole que constitue le débat sur la carte scolaire. Je n'aurai pas la prétention de traiter du sujet, les uns et les autres semblant vouloir s'en charger pendant la campagne présidentielle.

Sur le fond, cependant, nous devons encore une fois reconnaître que nos compatriotes, les parents d'élèves, ne se contentent plus d'attendre avec sagesse, sérénité et patience l'évolution de l'éducation nationale : ils anticipent les bons comportements et prennent de plus en plus souvent l'initiative de choisir l'établissement de leurs enfants. L'adaptation entre l'offre et la demande scolaire en souffre nécessairement.

Je prendrai quelques exemples, qui ne sont pas des exemples polémiques, pour montrer la mesure des difficultés qui sont les vôtres.

D'abord, je peux dire, en l'absence de votre collègue M. Dominique Bussereau, que règne entre la Rue de Varenne et la Rue de Grenelle une meilleure compréhension. Nous nous en réjouissons, même si cela ne va pas jusqu'à la complémentarité et à la coexistence positive, puisque nous constatons que les compétitions d'effectifs demeurent entre les établissements qui dépendent de l'éducation nationale et ceux, très minoritaires - moins de 2 % -, qui relèvent de l'agriculture.

Je citerai également la compétition entre le public et le privé ; de nombreux collègues souhaiteront intervenir sur ce point, et je ne m'y attarde donc pas. Comme votre prédécesseur, monsieur le ministre, vous avez eu la sagesse de fixer un ratio. Cela a le mérite d'entretenir la paix scolaire, mais n'épuise pas la demande de libre choix des parents, qui tient à l'image qu'ils ont, à tort ou à raison, de la qualité de l'offre scolaire.

Mentionnons deux autres compétitions, moins connues, mais qui, devant la pénurie d'élèves, pourraient devenir presque féroces : d'abord, la compétition entre les élèves orientés vers l'enseignement général et ceux qui sont dirigés vers les enseignements professionnels ; ensuite, la compétition au sein de l'enseignement professionnel entre les systèmes d'apprentissage fondés sur le contrat de travail et les systèmes fondés sur le temps plein avec, éventuellement, des stages et une forme d'alternance.

J'ajoute enfin la compétition géographique, que les élus du territoire, évidemment très représentés dans cette assemblée, connaissent au quotidien, qu'il s'agisse d'ailleurs de la compétition entre établissements primaires publics, liée à la qualité des services ou au confort des parents, ou de la compétition entre le privé et le public dans le secteur primaire, difficile à vivre sur le plan financier. Mais nous attendons tous la décision du Conseil d'État pour la mise en oeuvre de cette liberté scolaire.

En un mot, monsieur le ministre, notre système scolaire est tenu, évolue, prend conscience de sa performance, de ses forces et de ses faiblesses. Cependant, il est manifeste qu'il ne pourra pas indéfiniment refuser de répondre à une demande de plus grande adaptation, de plus grande proximité qu'expriment les parents. Au demeurant, les enseignants n'y sont pas hostiles dès lors qu'ils disposent dans leurs établissements des moyens de satisfaire à ces attentes qualitatives.

Telles sont à cet instant, monsieur le ministre, les réflexions de la commission des finances, qui a naturellement adopté votre projet de budget et qui propose au Sénat d'en faire autant. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, rapporteur pour avis.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dispose de cinq minutes pour vous présenter un budget, celui de l'enseignement scolaire, qui s'élève à 59,6 milliards d'euros et constitue une partie importante de l'investissement que la nation consacre à l'éducation ! Ce budget est en augmentation de 1,3 % par rapport à 2006.

Alors que de récents audits ont mis en avant la forte progression du coût d'un collégien et d'un lycéen depuis quinze ans sans amélioration notable des résultats, je salue les efforts pour passer d'une logique de moyens à une logique de performance et de résultats en renforçant à la fois l'efficacité et l'équité de notre système scolaire.

Dans un budget composé à plus de 95 % de dépenses de personnels, la modernisation de la gestion des moyens d'enseignement constitue le principal levier de cette action.

Ainsi, la réforme des décharges de service des enseignants me paraît tout à fait légitime et justifiée. Il ne s'agit pas de supprimer toutes les décharges et partout. Prenons l'exemple des décharges des professeurs d'éducation physique et sportive, EPS. Il s'agit de supprimer les décharges de trois heures pour ceux qui n'assurent pas l'Union nationale du sport scolaire, l'UNSS, et de les maintenir pour ceux qui l'assurent. Quoi de plus normal que ceux qui n'assurent pas ce pour quoi ils étaient payés ne bénéficient plus de la décharge? Cela me paraît la logique même !

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Une autre avancée importante est introduite avec équilibre et subtilité : je veux parler de la promotion d'une forme de bivalence par la mise en place des mentions complémentaires, qui apporte un peu de souplesse dans la gestion de la ressource d'enseignement. Les professeurs seront incités à enseigner dans deux disciplines par le biais d'une prime spécifique.

L'objectif de réduction des surnombres disciplinaires, dont M. le rapporteur spécial vient de parler, ne peut qu'inciter à avancer dans cette voie, et je me réjouis, monsieur le ministre, que vous engagiez ce premier pas.

Au terme d'un rapide calcul - 3 500 enseignants en surnombre, 50 000 euros par an et par enseignant en moyenne -, l'économie doit être d'environ 150 000 euros par an, ce qui n'est pas complètement négligeable.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous en précisiez les contours et les modalités d'application. Je préférerais en effet les apprendre directement de vous plutôt que par la presse, comme c'est le cas pour l'instant.

Ces efforts de bonne gestion permettent de dégager des moyens en faveur de l'égalité des chances, priorité affichée du présent projet de budget.

En application des objectifs fixés par la loi d'orientation pour l'avenir de l'école, il est prévu d'ouvrir 200 nouvelles unités pédagogiques d'intégration, ou UPI, pour l'accueil des élèves handicapés et 200 classes relais. Mille assistants pédagogiques supplémentaires viendront accompagner la mise en oeuvre des programmes personnalisés de réussite éducative, en priorité dans les réseaux « ambition réussite ».

En outre, 300 emplois d'infirmières scolaires sont créés cette année encore. S'y ajoutent 50 emplois d'assistantes sociales, ainsi que 10 postes de médecins scolaires. Ce sont des avancées, dans ce domaine où il y a de réels besoins. Je ne suis d'ailleurs toujours pas persuadé que le rattachement des médecins scolaires et des assistantes sociales à l'éducation nationale soit réellement un gage de meilleure gestion. Les choses auraient à mon avis pu être simplifiées par un transfert aux départements.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est bien vrai !

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. À l'époque, nous l'avions proposé, mais l'Assemblée nationale avait rectifié le tir après le Sénat. J'y vois une petite erreur dont nous pourrions parler longtemps.

Un autre sujet sur lequel nous pouvons - et devons -faire plus est celui des bourses. J'évoque d'ailleurs ce sujet tous les ans !

Pour une famille dont les ressources mensuelles s'élèvent à 970 euros, le montant de la bourse en collège est de 60,30 euros par an. Certes, il y a un progrès, monsieur le ministre, puisque vous prévoyez 2 % d'augmentation, c'est-à-dire 1,2 euro par an. Cela ne nous semble pas tout à fait suffisant. La commission des affaires culturelles, unanime, propose 25 % d'augmentation. Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous donniez la possibilité d'adopter cet amendement et que vous fassiez le nécessaire pour que notre proposition devienne ensuite une réalité.

J'avancerai, pour finir, quelques observations sur les réformes qui se mettent actuellement en place. Elles me semblent aller dans le bon sens, et j'insisterai, monsieur le ministre, sur la nécessité de les inscrire dans la durée. Notre système éducatif doit, en effet, se moderniser, mais il a surtout besoin de stabilité, de sérénité et de continuité dans les politiques menées.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est vrai !

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Je pense, monsieur le ministre, que vous nous donnez l'exemple en la matière, et je vous en remercie.

La définition du socle commun est une avancée réelle. Dans très peu de temps, on se rendra compte des efforts qui auront permis de réaliser de vrais progrès.

Sur la réforme de la formation des maîtres, il faudrait que, là aussi, nous ayons une véritable information pour pouvoir aller plus loin. Nous serions heureux d'en apprendre un peu plus ce soir.

S'agissant enfin du pilotage des écoles et des établissements scolaires, vous avez réussi à apaiser ce débat. De 70 à 80 % des directeurs ont répondu aux questionnaires statistiques de la rentrée. Plus de 20 000 emplois de vie scolaire, ou EVS, sont déjà en poste pour apporter une assistance administrative. Monsieur le ministre, il faut, à mon sens, réussir à mettre en place un véritable statut des directeurs d'école.

De la même façon, les chefs d'établissement du second degré ont récemment manifesté pour exprimer leur mécontentement. Ils constituent, à mon avis, un maillon essentiel dans la perspective d'une réforme de l'éducation nationale au niveau de l'enseignement secondaire.

Nous avons, en la matière, l'opportunité de tirer profit de l'apport de la décentralisation. En effet, nous avons désormais l'expérience du transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service, qui s'est bien passé. Les chefs d'établissement nous conseillent aujourd'hui de nous inspirer des conventions passées entre les conseils généraux ou les conseils régionaux avec les établissements scolaires pour clarifier leurs relations avec l'État. À persister à agir par injonctions plutôt que par contrats, il s'ensuit une complexité croissante, une certaine confusion, ainsi qu'un manque de cohérence et de suivi des actions. Enrichis de l'expérience de la décentralisation, nous devons faire plus confiance aux chefs d'établissement.

Je me réjouis donc de votre initiative, monsieur le ministre, consistant à lancer une réflexion sur les missions des établissements publics locaux d'éducation, les EPLE. Je souhaite que ces travaux puissent aboutir à des propositions concrètes.

En conclusion, je vous indique que la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2007, mais qu'elle souhaite unanimement qu'une réponse forte soit apportée à la question des bourses en collège. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis.

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la LOLF réunit, au sein d'une même mission, les crédits de l'éducation nationale et ceux de l'enseignement technique agricole, précédemment discutés dans le cadre du budget du ministère de l'agriculture.

Cette nouvelle architecture budgétaire apporte une plus grande visibilité à cette voie de formation « hors norme », qui représente 2,15 % des crédits de la mission.

Cela doit inciter, dans le même temps, à mieux valoriser les complémentarités entre ces deux systèmes de formation. En effet, par ses spécificités, qui tiennent à sa pédagogie concrète, son ancrage territorial ou sa dimension humaine, l'enseignement agricole présente de nombreux atouts pour répondre aux défis de la qualification et de l'insertion professionnelle des jeunes : notre système éducatif a tout intérêt à s'enrichir de cette diversité.

Je n'insisterai pas plus longuement sur les réussites de cet enseignement, qui accueille 175 000 élèves, de la quatrième au brevet de technicien supérieur, et 30 000 apprentis : nous avions été nombreux l'an passé, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, à les mettre en avant pour demander la remise à niveau des crédits, qui étaient, de toute évidence, déphasés par rapport aux besoins.

L'abondement de 30,5 millions d'euros a permis à l'État d'honorer ses engagements à l'égard des établissements, d'ajuster les crédits d'aide sociale ou de poursuivre le recrutement des assistants d'éducation. Il s'agissait, monsieur le ministre, non pas d'opposer l'éducation nationale à l'enseignement agricole, mais de rétablir une plus grande équité de traitement entre les deux.

Ces messages forts ont été pris en compte dans la préparation du projet de loi de finances pour 2007, et je m'en réjouis : ce budget est donc abordé de façon plus sereine, même s'il reste encore à inscrire ces avancées dans la durée.

Or, le projet d'annulation de 9 millions d'euros sur les 19 millions d'euros mis en réserve au printemps dernier a suscité mes plus vives inquiétudes.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est vrai !

Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis Cette décision viendrait compromettre, sur un budget déjà tendu, la réalisation des engagements que nous croyions acquis après le vote des crédits pour 2006.

Après en avoir alerté les ministres de l'agriculture et du budget, puis le Premier ministre, j'ai appris, vendredi dernier, que 6 millions d'euros seraient - j'emploie bien le conditionnel - finalement réattribués, 3 millions d'euros étant annulés dans le cadre de décrets d'avances. Je me félicite de cette décision, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez nous apporter la confirmation de la réouverture de ces crédits.

Ces gels ont en effet entraîné un manque de visibilité et des retards dans la mise en oeuvre de certaines mesures : ainsi, le décret fixant les conditions de reclassement des enseignants de catégorie 3 des établissements privés du temps plein reste en attente de publication. Or sa parution doit intervenir avant la fin de l'année pour rendre son application effective.

Tout en saluant les efforts en faveur d'une remise à niveau des crédits inscrits pour 2007, je regrette que les capacités d'accueil des établissements soient encore contraintes, en fonction des moyens disponibles. Ce manque d'ambition n'est pas acceptable à l'égard d'un enseignement dont l'efficacité et la qualité sont reconnues par tous. Je l'ai d'ailleurs souligné dans un rapport d'information adopté par la commission des affaires culturelles le 18 octobre dernier, en formulant des propositions destinées à consolider la place de l'enseignement agricole au sein de notre paysage éducatif, au service des jeunes et de nos territoires.

En effet, les formations se sont diversifiées, au-delà de la production agricole, et sont désormais en prise avec des enjeux d'avenir : la « deuxième révolution agricole », liée aux biocarburants ou à la valorisation de la forêt, aussi bien que le développement de nouvelles activités dans nos territoires ruraux ouvrent des perspectives qui placent l'enseignement agricole au coeur d'une modernité renouvelée.

Toutefois, si cet enseignement a des atouts, il souffre d'un manque de reconnaissance et d'une image désuète qui ne correspond plus à cette réalité. Des efforts restent à accomplir, monsieur le ministre, pour faire connaître aux jeunes, mais aussi aux enseignants de l'éducation nationale et aux professionnels de l'orientation, ces établissements, ces filières, ainsi que les métiers auxquels ils préparent.

Il faut, pour cela, que les deux ministres travaillent main dans la main, en dépassant des logiques de concurrence qui ne servent pas l'intérêt des jeunes.

L'enseignement agricole doit également s'adapter pour rester en phase avec la demande de formation. La déconcentration au niveau des directions régionales de l'agriculture et de la forêt, les DRAF, doit permettre de mieux répondre aux besoins et aux situations locales, mais aussi d'afficher une cohésion entre ses différentes « familles » d'établissements, publics et privés.

Je place beaucoup d'espoir dans les concertations qui se sont engagées, ces dernières semaines, au sein de la direction générale de l'enseignement et de la recherche du ministère de l'agriculture, en vue de clarifier le pilotage stratégique de l'enseignement agricole.

Dans l'attente vigilante des conclusions de ces travaux, la commission des affaires culturelles a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement agricole pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, rapporteur pour avis.

Mme Annie David, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'interviendrai, pour ma part, sur l'enseignement professionnel.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Très bien ! C'est un bon sujet !

Mme Annie David, rapporteur pour avis. J'aborderai, en premier lieu, l'orientation des élèves vers ces filières.

Lorsqu'il s'agit d'entrer en lycée professionnel ou en apprentissage, l'orientation doit prendre appui sur un véritable projet. Pour le préparer, les jeunes et leur famille ont besoin, en amont, d'un accompagnement personnalisé, notamment pour les aider à décrypter la masse d'informations disponibles.

À ce titre, monsieur le ministre, vous proposez que l'entretien d'orientation avec le professeur principal soit généralisé, dès cette année, à tous les élèves de troisième accompagnés de leurs parents.

Je m'interroge néanmoins sur la vocation des professeurs principaux à interférer dans la mission des conseillers d'orientation-psychologues. L'orientation n'est pas une simple concordance entre un métier et un élève ; elle répond à des critères plus larges, ne serait-ce qu'en matière de motivation des élèves, facteur prégnant dans la réussite scolaire.

En outre, les enseignants bénéficieront d'une formation ; mais de quel ordre ? Surtout, auront-ils le temps nécessaire pour se consacrer à cette tâche ? Par ailleurs, s'il faut sans doute mieux outiller les conseillers d'orientation-psychologues, les orientations du ministère concernant ces professionnels restent encore incertaines, ce qui suscite des inquiétudes chez ces personnels. Leurs effectifs sont actuellement très insuffisants pour assurer leurs missions dans de bonnes conditions : en effet, on compte en moyenne un conseiller d'orientation-psychologue pour 1 400 élèves.

En outre, j'ai pu entendre qu'un grand nombre de jeunes abordaient avec une certaine angoisse l'entrée en lycée professionnel, notre système d'orientation ne leur accordant pas de véritable droit à l'erreur. À ce titre, je rejoins les inquiétudes énoncées par notre collègue Jean-Léonce Dupont vendredi dernier, lors de la présentation du budget de l'enseignement supérieur.

Dans l'objectif de réduction des sorties sans diplôme ni qualification, qui concerne de 150 000 à 160 000 jeunes chaque année, il faudrait sans doute assouplir les parcours de formation et les modes de certification, afin de faciliter les réorientations, les poursuites ou reprises d'études, par exemple après une interruption précoce de scolarité ou un échec à un examen.

J'insiste, à cet égard, pour que les évaluations qui seront menées sur la mise en place du module de découverte professionnelle de six heures ou de l'apprentissage junior conduisent à garantir les possibilités d'aller et retour vers le cursus général. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez nous apporter des garanties sur ce point.

Par ailleurs, je vous avais interrogé sur les mesures destinées à promouvoir l'enseignement professionnel sous statut scolaire, car je ne souhaite pas que les efforts déployés en faveur de l'apprentissage le soient au détriment des formations scolaires.

Or, les enseignants des lycées professionnels se sentent délaissés ces derniers temps. Il nous faut mieux valoriser les complémentarités entre les deux pour ne pas entrer dans une logique de concurrence.

Toutefois, la revalorisation de ces filières ne peut se faire sans l'appui des professionnels. En effet, si certains secteurs peinent à attirer les jeunes, il faut s'interroger sur les conditions de travail et de rémunération qu'ils offrent, mais aussi sur l'image que la société renvoie de certains métiers.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est vrai !

Mme Annie David, rapporteur pour avis. J'insisterai, pour conclure, sur les enjeux liés à l'évolution de la carte des formations professionnelles.

Si toutes les filières ne peuvent être présentes sur l'ensemble du territoire, il est essentiel de rendre ces formations accessibles en développant l'offre d'internat, encore insuffisante puisque seuls 12 % des lycéens professionnels sont actuellement internes.

Par ailleurs, le temps de réactivité de l'offre de formation, nécessairement long par rapport aux demandes des jeunes et aux besoins de la société, constitue une contrainte en matière d'orientation.

Ainsi, toutes les demandes d'affectation ne peuvent être satisfaites. C'est par exemple le cas dans le secteur des services à la personne ou, de façon plus inattendue, de la plomberie, où les besoins de recrutement sont pourtant conséquents et appelés à s'accroître.

En revanche, d'autres filières offrent un grand nombre de places alors que leurs débouchés sont désormais de plus en plus étroits.

Monsieur le ministre, avec le ministère en charge du budget, vous avez lancé en avril dernier un audit sur la carte de l'enseignement professionnel. J'aimerais que vous nous en présentiez les principales conclusions. En effet, si des évolutions sont sans doute nécessaires, il ne faudrait pas pour autant céder à une trop grande tentation de rationalisation,...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ah ! vous êtes contre la rationalisation !

Mme Annie David, rapporteur pour avis. ... guidée par des préoccupations budgétaires de court terme. Eh oui, monsieur Arthuis, il s'agit bien d'une politique à court terme !

Or, je m'inquiète d'un indicateur de performance du programme « Enseignement scolaire du second degré », mesurant « le pourcentage d'heures d'enseignement délivrées devant des groupes de 10 élèves ou moins ». Ce chiffre atteint près de 18 % dans les lycées professionnels. Pour autant, cela ne saurait conduire à la fermeture des classes en question, à la fois au regard de l'intérêt de ces formations et de l'impact qu'aurait la fermeture en termes d'aménagement du territoire.

En effet, dans le passé, certaines sections ont été trop vite abandonnées au motif qu'elles étaient peu attractives. Ces décisions n'ont pas toujours été opportunes puisque l'on a constaté ensuite, par endroits, les difficultés des professionnels des secteurs professionnels concernés à recruter des personnels qualifiés.

Compte tenu de ces observations, et dans l'attente de vos réponses, monsieur le ministre, je ne voterai pas, à titre personnel, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour 2007, auxquels la commission des affaires culturelles a toutefois donné un avis favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi qu'au banc des commissions.)

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Très bon rapport, madame David !

M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 53 minutes ;

Groupe socialiste, 37 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 19 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 16 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 15 minutes.

Je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

Je rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'avenir des enfants se joue avant six ans.

Les dés sont jetés très tôt. Les écarts de connaissances des enfants qui entrent en cours préparatoire sont déjà très marqués par le milieu familial.

C'est dire le rôle central de l'école dans la promotion de l'égalité des chances. Il s'agit sans aucun doute, sinon de la plus importante, du moins d'une des missions les plus importantes de l'État. C'est un véritable chantier d'intérêt national pour les milliers de jeunes qui sortent chaque année de l'école sans moyens pour se défendre sur le marché du travail.

Il faut réduire ce type de faiblesses de notre système éducatif et s'attacher à former les non-qualifiés. C'est ce que j'appellerais la « relance par l'école ».

Monsieur le ministre, je voudrais vous proposer au cours de mon intervention quelques réflexions sur les sujets suivants : l'enseignement préélémentaire, l'enseignement des premier et second degrés, la carte scolaire et la place des jeunes handicapés.

Je commence par noter que, globalement, le présent projet de loi finances respecte les engagements de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école votée en 2005.

Au demeurant, le montant des crédits relevant du ministère de l'éducation nationale connaît une progression par rapport à 2006 à structure constante. C'est dire l'impression favorable que je tiens à manifester d'entrée.

L'enseignement préélémentaire concerne les enfants scolarisés de deux à six ans, est-il précisé dans un rapport. Je m'arrêterai un instant sur cette tranche d'âge, car, dans les communes rurales, il s'agit là d'une demande et d'un espoir manifestés de très longue date. J'en ai fait l'expérience encore récemment.

La fermeture d'une classe n'est bien sûr qu'un aspect du problème, mais une fermeture prononcée en raison du faible nombre d'enfants de trois ans pourrait être évitée si les enfants de deux ans étaient pris en compte.

« La préscolarisation », nous fut-il répondu il n'y a guère plus d'un an, « n'a pas d'effet sur la suite de la scolarité. » Pour autant, faut-il arrêter la scolarisation à deux ans ? Bien sûr que non, nous précisa-t-on, notamment dans les ZEP et les zones rurales, lorsqu'il n'y a ni crèche ni structure d'accueil. En effet, maintenir l'équilibre des territoires, c'est aussi cela. D'où ma question : monsieur le ministre, quelle est aujourd'hui la politique du ministère dans ce domaine ?

Hormis ce point précis, la mission « Enseignement scolaire » doit plus généralement permettre aux élèves d'acquérir les éléments fondamentaux du savoir, notamment le socle de compétences indispensable à leur future vie d'adulte.

Pour atteindre cet objectif, ont été créés les réseaux « ambition réussite », les réseaux d'éducation prioritaire, le dispositif relais - 200 nouvelles classes - avec les assistants d'éducation, le programme personnalisé de réussite éducative, étendu aux élèves de cinquième avec des assistants pédagogiques supplémentaires. J'ajoute que le recrutement d'emplois de vie scolaire permet encore de renforcer le nombre d'adultes présents dans les établissements.

Voilà une grande et belle diversité de dispositions. Chacune d'elles est certes justifiée, mais je vous poserai quand même une question : toutes les personnes concernées par ces dispositifs ont-elles réussi à se les approprier de façon à choisir la formule la mieux adaptée à chaque situation ? Ne pourrait-on faire déjà le point pour que l'utilisation des mesures mises en oeuvre soit toujours la meilleure possible ?

La carte scolaire est un autre élément contribuant aux équilibres territoriaux et sociaux. Des négociations sont en cours, je crois, sur le sujet. Quoi qu'il en soit, le sentiment qu'elle doit évoluer me semble partagé. L'un des arguments avancés est le possible détournement du dispositif actuel.

Je ne saurais cacher que je trouve pour le moins singulier qu'il faille changer une règle au motif qu'au lieu d'être respectée - ce qui est la norme - elle est enfreinte, parfois même bafouée. Cela me fait penser à la suppression du service militaire obligatoire sous prétexte que trop de jeunes « pistonnés » échappaient à ce dernier !

La carte scolaire, quelle que soit finalement sa forme, exigera toujours un minimum d'esprit civique et une acceptation de la règle commune. Tel est bien le fond des choses.

Enfin, je m'arrêterai un instant sur la scolarisation des jeunes handicapés. Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, le Premier ministre vous a demandé, ainsi qu'à M. Bas, de préparer avant la fin de l'année 2006 un plan d'action pour favoriser durablement la réussite de la scolarisation des élèves handicapés. Réussir la scolarisation des enfants handicapés était aussi le but du rapport de Guy Geoffroy.

S'agissant de la scolarisation des handicapés, je voudrais rappeler quelques éléments essentiels. Les moyens budgétaires ont été augmentés ; une hausse de 13 % d'élèves handicapés en milieu ordinaire est intervenue, de même qu'un accroissement du nombre d'auxiliaires de vie scolaire, ou AVS - 600, je crois -, et le dispositif emploi de vie scolaire monte en puissance.

Y a-t-il lieu, comme cela a été proposé, de transformer les auxiliaires de vie scolaire et les emplois de vie scolaire en un seul corps, celui des assistants de vie scolaire ?

Selon moi, l'essentiel réside sans doute plus dans le niveau de formation initiale des personnels. Tout aussi essentielle, et peut-être plus, est la durée de leur contrat. Limités dans le temps, ces contrats sont une source d'instabilité, en raison de la forte rotation des personnels qu'ils provoquent, dommageable pour les enfants concernés.

Or, il s'agit bien d'un véritable métier auquel peuvent prétendre les assistants de vie scolaire. Je préconise donc pour eux, autant que faire se peut, la validation des acquis de l'expérience.

Demeure, entre autres problèmes, celui de la situation des jeunes handicapés après le collège. Il n'y a pas si longtemps, je vous ai soumis un projet, qui a recueilli un avis favorable du comité régional de l'organisation sociale et médico-sociale, ou CROSMS, du Limousin et se trouve actuellement entre les mains de M. Bas. Je me permettrai de vous en faire parvenir un exemplaire, monsieur le ministre.

Pour clore ma réflexion sur la scolarité des jeunes handicapés, je note que, sur les 11 millions d'euros réservés à la politique d'égalité des chances, 7,5 millions sont consacrés à l'accompagnement pédagogique des étudiants handicapés, et que 200 postes sont réservés lors du recrutement des enseignants en 2007.

À l'image de ce dernier point, je considère que des efforts bien ciblés ont été faits dans la mission « Enseignement scolaire ». C'est pourquoi, monsieur le ministre, avec la majorité de mon groupe, j'approuve ce budget et vous encourage à persévérer. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Monsieur le ministre, je ne me lancerai pas dans un inventaire à la Prévert qui me conduirait à citer une série de chiffres indigestes démontrant le manque d'ambition de votre budget pour la réussite de tous nos jeunes. Je préfère consacrer le temps qui m'est imparti à vous exprimer l'ambition qui nous anime, sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, pour l'école de la République.

Loin de renoncer aux valeurs fortes de notre République, nous voulons, bien au contraire, en remettre les principes au centre de notre ambition pour l'école.

Commençons par le principe de liberté, celle-ci étant l'émancipation acquise par l'éducation. Participer à l'émancipation des individus, c'est socialiser les jeunes, leur transmettre des valeurs, les former à l'esprit critique, les aider à se construire, à s'épanouir, leur donner les clés pour comprendre le monde.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Et peut-être aussi les instruire, non ?

Mme Annie David. C'est aussi contribuer à former le travailleur et le préparer à l'insertion professionnelle.

Tel est véritablement le sens que nous donnons au mot liberté, lorsqu'il s'agit de l'éducation.

Vient ensuite le principe d'égalité, auquel d'ailleurs le plan Langevin-Wallon faisait déjà référence comme principe premier. Il est lié à celui de justice, qui offre en effet deux aspects non point opposés mais complémentaires : l'égalité et la diversité.

« Tous les enfants, quelles que soient leurs origines familiales, sociales, ethniques, ont un droit égal au développement maximum que leur personnalité comporte. [...] L'enseignement doit donc offrir à tous d'égales possibilités de développement, ouvrir à tous l'accès de la culture. [...] La diversification des fonctions sera commandée non plus par la fortune ou la classe sociale mais par la capacité à remplir la fonction. »

Même si la formulation peut sembler désuète, nous nous retrouvons dans cette définition du mot « égalité », qui vise bien l'égalité des droits, l'égalité d'accès et non pas l'égalité des chances.

Plus récemment, Jean-Yves Rochex a d'ailleurs dénoncé la dérive à laquelle nous assistons, à savoir la volonté de promotion de tous prônée dans ce plan et la promotion d'une « élite élargie », souhaitée par le gouvernement auquel vous appartenez.

Quant au principe de fraternité, il se retrouve dans notre refus de la sélection sociale et économique, territoriale, culturelle, religieuse.

Pour tous les républicains, cette fraternité, c'est-à-dire ce principe d'équité de traitement sur tout le territoire national fondamentalement lié à l'école de la République, est intangible. En cela, cette école est laïque et gratuite, car ouverte à toutes et tous, sans distinction aucune.

À cet égard, je souhaite exprimer mon indignation devant la « chasse aux enfants » orchestrée cet été par le ministre de l'intérieur et qui se poursuit avec plus d'intensité encore.

Pendant les vacances scolaires, enseignants, parents, citoyens, militants se sont dressés ensemble pour dire « non » à ces expulsions et aux méthodes associées, indignes de notre République.

Aujourd'hui, le combat pour le droit à l'éducation de tous les enfants et la régularisation de leurs parents continue, et les événements de ce week-end, à Lyon-Saint-Exupéry puis à Roissy, m'indignent profondément, car la famille maltraitée, d'origine kosovare, est en France depuis cinq ans, et deux des trois enfants sont nés dans notre pays. Ils y sont d'ailleurs scolarisés tous les trois et auraient dû « entrer » dans le champ de la circulaire de juin.

Le droit à l'école pour tous a été bafoué ce week-end, monsieur le ministre.

L'école de la République, c'est aussi l'école de la démocratie, de la tolérance, une école humaniste. Considérant ses élèves comme des citoyens en formation, renforçant les liens entre l'équipe éducative et les parents, elle s'enrichit de l'échange, de la confrontation d'idées et reste centrée sur le développement et l'épanouissement de l'enfant, tout en prenant en compte les besoins de la société.

Elle est donc aux antipodes de l'école élitiste prônée par le Gouvernement, école au sein de laquelle, dans le même temps, des élèves auront accès à un socle de connaissances et de compétences minimum pendant que d'autres, plus nantis ou se comptant parmi ceux, peu nombreux, qui auront droit à une bourse au mérite, auront la « chance » de bénéficier d'un « socle bis ».

Monsieur le ministre, vous n'empruntez pas la bonne voie pour permettre à l'école d'atteindre l'objectif de réussite pour toutes et tous les élèves. En effet, une nouvelle fois, le budget se caractérise par des suppressions de postes : en 2007, un peu plus de 8 500 suppressions sont prévues !

Par ailleurs, toutes les méthodes sont utilisées pour réduire le budget : en diminuant la durée de l'enseignement ; en finançant, d'une part, les dédoublements en langues par la suppression des travaux personnels encadrés, les TPE, en terminale et, d'autre part, le plan « ambition réussite » par la suppression d'une demi-heure de cours au collège ; en diminuant les salaires des enseignants, puisque les décharges supprimées se traduisent souvent en heures supplémentaires.

M. Gilles de Robien, ministre. Ah bon ?...

Mme Annie David. D'ailleurs, Bercy a déjà calculé l'économie pour les finances de l'État et la perte salariale, soit 6 % environ sur la fiche de paie d'un enseignant.

Quant aux frais de déplacement, l'ensemble des personnels nous ont fait part des difficultés qu'ils rencontrent pour leur remboursement.

Je n'insiste pas sur la lente érosion du budget qui se manifeste, entre autres choses, par la diminution du nombre d'adultes dans les établissements, mais il est vrai que le ministre de l'intérieur et vous-même souhaitez remplacer les personnels de l'éducation nationale par des policiers...

Cette érosion ne peut que détériorer de manière inexorable les conditions de scolarisation et de travail des enseignants, alors que la lutte contre l'échec scolaire doit au contraire nous inciter à renforcer l'équipe éducative.

À cet égard, la mise en oeuvre généralisée des programmes personnalisés de réussite éducative, en dépit d'un récent rapport de l'Inspection générale qui souligne « l'absence d'avancée significative dans l'aide aux élèves en difficulté », est parfaitement incohérente, d'autant que les 1 000 assistants pédagogiques seulement affectés à cet effet travailleront à mi-temps, comme M. Richert l'a d'ailleurs indiqué dans son rapport.

J'en viens à la complémentarité des personnels de la communauté éducative en matière de lutte contre l'échec scolaire ; médecins scolaires, psychologues scolaires et conseillers d'orientation-psychologues, ou conseillers d'orientation psychologues, infirmières et infirmiers scolaires, assistantes et assistants sociaux, ils sont toutes et tous en nombre plus qu'insuffisant !

Certes, vous créez 300 postes d'infirmière, mais c'est en vertu de la loi Fillon sur l'école et sans aucune véritable concertation avec les principales concernées. En effet, la répartition de ces postes reste plus que floue, certains d'entre eux devant être prioritairement attribués aux 249 établissements « ambition réussite », les autres répondant à des critères d'attribution bien complexes, ne tenant pas compte de la légitime revendication des infirmières visant non pas à « identifier » une infirmière par établissement mais à permettre la présence de l'une d'elles en permanence.

Quant aux médecins scolaires, seulement 85 postes sont ouverts au concours en novembre 2006 et à peine 10 postes sont créés en médecine scolaire - et encore, ils le sont par un amendement voté par l'Assemblée nationale ! -, alors que la moyenne est d'un médecin scolaire pour 7 678 élèves.

Et que dire du manque de matériel, tant informatique, pour les services administratifs, que médical ?

Je n'en dirai pas davantage sur les conséquences que recouvrent ces chiffres, car toutes et tous nous les connaissons parfaitement.

De plus, alors que la loi du 11 février 2005 a permis la scolarisation en milieu ordinaire des élèves handicapés et suscité beaucoup d'espoirs et d'attentes de la part des jeunes et de leur famille, le manque de personnels qualifiés rend la scolarité de ces élèves très aléatoire.

Quant aux auxiliaires de vie scolaire, censés accompagner ces élèves dans leur scolarité, ils seront pour la plupart recrutés sous contrat d'avenir ou sous contrat d'accompagnement dans l'emploi. Or, non seulement ces contrats sont précaires et induisent donc une inéluctable rotation des personnels, mais ils ne requièrent aucune qualification à l'embauche.

Ainsi, là où il faudrait des emplois stables avec des personnels formés et qualifiés, vous instaurez un dispositif particulièrement instable.

Il en est ainsi pour l'aide donnée aux directeurs d'école, transformés en directeurs des ressources humaines ! Quant aux proviseurs, elles et ils ont manifesté dimanche 26 novembre pour la première fois depuis douze ans, justement pour dénoncer la baisse constatée dans le budget de fonctionnement de leurs établissements.

Monsieur le ministre, allez-vous continuer à nous parler d'égalité des chances là où il faut parler d'un droit à l'éducation pour toutes et tous ?

Force est de constater que cette égalité n'existe pas aujourd'hui.

Par exemple, les zones rurales et montagnardes se caractérisent toujours par une offre éducative plus restrictive et plus onéreuse que sur le reste du territoire. Pourtant, contrairement aux préjugés, la réussite scolaire est indéniable dans ces écoles aux atouts multiples, la classe à plusieurs niveaux en étant le principal.

Quant à l'enseignement agricole, public ou privé, il subit lui aussi des diminutions. Mais je souhaite insister sur la baisse des moyens octroyés à l'enseignement public. Tant en postes, en dotations globales horaires, en enseignements facultatifs qu'en formation continue, ces moyens ont été réduits comme peau de chagrin depuis 2003, ce qui a contraint plusieurs établissements à refuser des élèves.

À ce propos, monsieur le ministre, je tiens à votre disposition une pétition exprimant la colère des personnels de l'enseignement agricole public, déjà signée par un peu plus de 2 200 personnes auxquelles s'ajoutent chaque jour de nouveaux signataires.

Ces personnels dénoncent une disparité de traitement dans la politique menée, notamment, en matière de dégels budgétaires. En effet, après une forte disparité dans le budget de 2006, l'enseignement agricole public n'a pas été destinataire du moindre euro sur les crédits dégelés par M. Bussereau, et cela malgré les engagements pris par ce dernier.

J'ai appris à cette occasion qu'existaient des « décrets de virement » permettant, en dehors de tout contrôle du Parlement, des prélèvements entre programmes décidés unilatéralement et tout à fait arbitrairement par Bercy. M. Arthuis pourra d'ailleurs peut-être nous éclairer à ce sujet.

Je dirai pour terminer quelques mots sur la diffusion de la culture dans nos écoles, et, à nouveau, je vous invite à parcourir le plan Langenvin-Wallon : « Nous concevons la culture générale [...] comme une initiation aux diverses formes de l'activité humaine, non seulement pour déterminer les aptitudes de l'individu, lui permettre de choisir à bon escient avant de s'engager dans une profession, mais aussi pour lui permettre de rester en liaison avec les autres hommes, de comprendre l'intérêt et d'apprécier les résultats d'activités autres que la sienne propre, de bien situer celle-ci par rapport à l'ensemble...

« Une culture générale solide doit donc servir de base à la spécialisation professionnelle et se poursuivre pendant l'apprentissage de telle sorte que la formation de l'homme ne soit pas limitée et entravée par celle du technicien. »

Or, avec le socle commun de connaissances et de compétences que vous imposez dans nos écoles, vous êtes à mille lieues de cette conception !

Par là même, vous privez nos jeunes d'une possible formation tout au long de la vie, formation dont vous vantez pourtant les bienfaits.

Pour le groupe du CRC, cette conception est toujours d'actualité, non pas par nostalgie d'une école d'antan, qui reviendrait à une méthode syllabique d'enseignement de la lecture, à la bivalence des enseignants ou à la primauté de la grammaire dans les programmes, mais parce que nous vivons dans un monde marqué par l'explosion des savoirs et la révolution de l'information.

Aussi, les métiers impliquent de plus en plus de qualifications, de même qu'il n'est plus rare de changer plusieurs fois de métier dans une vie professionnelle. Tous ces bouleversements supposent la mise en place d'un système de formation tout au long de la vie qui ne peut être viable sans une formation initiale scolaire de haut niveau.

Monsieur le ministre, telle est notre ambition pour une école de la réussite pour toutes et tous nos jeunes ; telle n'est pas la vôtre. Aussi, nous nous opposerons au vote des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année, encore plus que les années précédentes, la mission « Enseignement scolaire » est mise au régime. Cela fait quatre ans que le Gouvernement lui « serre la ceinture » et, cette année, c'est une diète sévère !

Avec 59,56 milliards d'euros pour 2007,...

M. Gilles de Robien, ministre. Une paille...

M. Yannick Bodin. ...ce qui peut en effet paraître beaucoup, les crédits destinés à l'enseignement scolaire enregistrent pourtant une baisse de 0,3 % en euros constants et de 2 % à structure constante ! Encore une fois, les collèges et les lycées payent un lourd tribut à l'équilibre budgétaire avec 9 000 postes de moins sur l'ensemble de la mission.

Chaque fois que l'on vous pose la question, monsieur le ministre, vous expliquez cette baisse de l'encadrement par une baisse du nombre des élèves, mais vous conviendrez que depuis cinq ans vous supprimez plus facilement des postes que vous n'en créez ! Un emploi supplémentaire est créé pour soixante élèves supplémentaires dans l'enseignement primaire, alors qu'il y a une suppression pour onze élèves en moins dans l'enseignement secondaire.

Ces suppressions, ces non-recrutements et les départs à la retraite ne font que creuser le fossé entre les besoins de l'éducation nationale et les moyens que vous y mettez. Quelle contradiction entre les paroles et les actes, mais surtout entre les besoins réels et votre budget !

Vous avez une vision strictement comptable de l'éducation. Loin de vouloir vous attaquer aux inégalités, vous les accentuez et vous segmentez les niveaux d'éducation.

L'enseignement secondaire est maltraité. Or c'est là que les besoins sont importants, notamment pour garantir l'égalité des chances ou éventuellement pour orienter les jeunes vers des filières d'apprentissage.

À ce propos, la loi pour l'égalité des chances préconisait la mise en place du dispositif « apprenti junior ». Nous avons eu l'occasion de dénoncer cette mesure, car elle ne résout en rien les problèmes de scolarisation des élèves les plus fragilisés et risque même d'aggraver la situation. Au lieu d'accorder une attention supplémentaire à chaque enfant et de mobiliser les moyens adéquats pour lui offrir une chance de se former, le Gouvernement a choisi d'orienter des élèves d'une façon prématurée.

Je tiens ici à rappeler que l'apprentissage à quatorze ans est une mesure inefficace, injuste et réactionnaire. Elle est loin d'ailleurs de rencontrer le succès que vous escomptiez, les professions restant elles-mêmes très réservées. Il suffit d'écouter leurs représentants pour s'en convaincre !

La situation des directeurs des établissements primaires est, elle aussi, préoccupante : bien que vous ayez accordé une journée de décharge de classe pour les directeurs à quatre classes, vous ne leur offrez qu'une prime de 15 euros par mois. C'est dérisoire !

Surtout, vous négligez le fait que, en dessous de quatre classes, les directeurs ont aussi des tâches administratives et d'animation à accomplir. Comptez-vous ainsi favoriser des vocations de directeur ?

Je pourrais tenir des propos de même nature concernant les proviseurs et les principaux, qui ont manifesté massivement ces jours derniers pour vous dire leur désarroi et exprimer leurs besoins. Cela faisait bien longtemps que des chefs d'établissement n'étaient pas descendus dans la rue ! Le sens de leur mouvement n'en est que plus fort.

Vous avez créé les collèges « ambition réussite », mais les postes que vous leur attribuez sont en fait retirés à d'autres collèges qui sont tout autant en difficulté ou en passe de l'être ! L'éducation prioritaire, c'est donner plus à ceux qui en ont besoin, mais pas en retirant des moyens là où cela va à peine mieux !

Les collèges « ambition réussite » ne profitent que du redéploiement de 1 000 postes que l'on obtient en supprimant les heures de soutien scolaire en cinquième et en quatrième, ainsi que les travaux personnels encadrés en terminale ! Dans ces conditions, je doute que vous puissiez arriver à l'objectif, pourtant indispensable à atteindre, de quinze élèves par classe dans les collèges « ambition réussite ».

Les crédits que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le ministre, sont en totale contradiction avec vos discours sur l'aide individualisée et sur le renforcement de la présence des adultes, notamment pour lutter contre la violence.

Quant à la note de vie scolaire, je vous en prie, monsieur le ministre, renoncez-y ! Comme nous le craignions, elle n'a plus aucun sens avant même d'avoir été mise en oeuvre. Certains établissements refusent tout simplement de noter les élèves (M. le ministre fait un signe de dénégation.), dans d'autres, c'est 20 sur 20 pour tout le monde, là, c'est le prix de camaraderie, ailleurs, une note de non-absentéisme, mais, le plus souvent, c'est la fameuse note de conduite comme au siècle dernier...

Bref, il est grave qu'une note soit attribuée uniquement sur des critères subjectifs -  j'insiste sur ce mot - variant d'un établissement à l'autre, et surtout qu'elle soit prise en compte pour l'obtention du brevet.

Enfin, je voudrais profiter de cette tribune pour soulever le problème de l'orientation. Nous avons déjà évoqué ce sujet vendredi dernier en séance publique, lors du vote des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Comment voulez-vous faire régresser sérieusement l'échec en première année d'université lorsque certains lycées ne reçoivent la visite de quelques conseillers d'orientation que deux fois par an ? Ceux-ci sont d'ailleurs tellement peu nombreux que les élèves ne les connaissent pas suffisamment pour seulement penser à aller leur demander conseil ! Et pourtant, le succès dans les études supérieures ne commence-t-il pas par une meilleure orientation au lycée ? Or les moyens que vous proposez en la matière sont dérisoires.

Lors du vote de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, le Gouvernement s'était engagé à ce que chacun des quelque 8 000 établissements de l'enseignement secondaire bénéficie des services d'une infirmière. On en est loin !

Certes, vous annoncez la création de 300 nouveaux postes, mais ceux-ci ne couvriront pas les besoins. Pis encore, la création de postes de médecins scolaires se fait, si j'ose dire, à dose homéopathique. À cet égard, je vous rappelle qu'en 1998, en 1999 et en 2000, ce sont 1 050 postes de médecins, d'infirmières et d'assistantes sociales qui ont été créés.

Dès lors, l'interruption de l'effort de rattrapage engagé sous la précédente législature aura des conséquences directes pour de nombreux enfants ayant besoin, outre d'un dépistage précoce, d'une surveillance médicale, que les familles n'ont pas toujours les moyens d'assurer.

De même, nous savons combien il est nécessaire que chaque collège dispose d'une infirmière à plein-temps, non seulement pour des raisons sanitaires évidentes, mais aussi afin d'engager des actions de prévention et pour accompagner les adolescents, souvent fragiles. Un plan a été annoncé, c'est vrai, mais il est urgent d'en accélérer la mise en oeuvre, tant il est vrai que 300 postes par an, ce n'est pas suffisant !

Je tiens également à souligner que le programme « Vie de l'élève » est alarmant s'agissant des crédits destinés à l'accompagnement des élèves handicapés, en diminution de 3 %. Vous aviez promis la création de 6 000 postes d'assistants de vie scolaire dans le cadre du plan d'adaptation et d'intégration scolaire des élèves handicapés. Encore un plan et des promesses qui ne se réaliseront pas, au détriment d'élèves qui en auraient le plus besoin !

Contrairement à ce que vous prétendez, monsieur le ministre, l'appauvrissement de l'école et le recul de l'égalité des chances auront été les caractéristiques majeures de la politique menée depuis cinq ans. Chaque année, vous élaborez un budget qui n'a pour ambition que de faire croire qu'il vise à améliorer les conditions dans lesquelles s'effectue la transmission du savoir. Or, en réalité, vous hypothéquez l'avenir de nos jeunes, l'avenir de nos enseignants, l'avenir de l'éducation nationale. Votre vision à court terme handicape chaque année un peu plus le budget de l'année suivante.

Parce que nous croyons qu'une société plus juste passe par une éducation plus juste pour tous, il lui faut les moyens de ses actions, moyens qui ne figurent pas dans votre budget ; c'est la raison pour laquelle nous ne pourrons voter ce dernier.

Rappelez-vous cette phrase de Jules Michelet rapportée dans Le Peuple, en 1845, phrase qui n'était sans doute pas politiquement correcte à l'époque et dont je souhaiterais qu'elle le soit aujourd'hui : « Quelle est la première partie de la politique ? L'éducation. La seconde ? L'éducation. Et la troisième ? L'éducation. » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Gilles de Robien, ministre. Cette phrase, je la fais mienne !

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous attendons du budget de l'enseignement scolaire qu'il garantisse, voire améliore considérablement, la qualité de la formation dispensée aux élèves, tout en respectant les principes de responsabilité budgétaire, afin de ne pas creuser inutilement un déficit public déjà bien important. C'est pourquoi le fait d'avoir pris le parti d'augmenter les moyens là où cela se révélait nécessaire, c'est-à-dire dans l'enseignement primaire et de mieux les utiliser là où des marges de manoeuvre existaient, c'est-à-dire dans l'enseignement secondaire, relève d'une politique saine.

Par ailleurs, monsieur le ministre, le groupe UC-UDF partage plusieurs de vos priorités, à savoir renforcer le soutien aux élèves en difficulté, aider les élèves méritants issus de familles modestes à poursuivre leurs études, améliorer l'apprentissage des langues vivantes et accroître l'encadrement des élèves. Telles sont d'ailleurs les positions que nous avions défendues lors de l'examen de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.

Plusieurs des dispositions prises à la rentrée 2006- 2007 vont dans le bon sens. Je mentionnerai, notamment, les crédits destinés à la scolarisation des élèves handicapés et aux emplois de vie scolaire, les mesures prises en faveur des directeurs d'école et pour les réseaux « ambition réussite », la création de 1 000 postes de professeurs des écoles et de 300 postes d'infirmières.

Quant au développement des programmes personnalisés de réussite éducative, qui s'adressent aux élèves en difficulté, grâce à la marge de manoeuvre dégagée par une meilleure mobilisation des moyens de nos écoles, c'est une bonne chose.

Toutefois, sans vouloir, bien au contraire, rallumer la guerre scolaire, dans le respect de chacun et compte tenu de la mission de service public de l'enseignement privé sous contrat, je souhaiterais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la suppression de 300 postes dans l'enseignement privé sous contrat à la rentrée 2007.

Au-delà de cette diminution des effectifs, nous devons prendre nos responsabilités et revoir le rapport 80-20 qui règle la dotation de l'enseignement privé par rapport à celle de l'enseignement public et qui, aujourd'hui largement dépassé, pénalise considérablement certains établissements dont le taux d'encadrement actuel est inacceptable.

Cette année, l'enseignement privé a ainsi dû refuser 30 000 inscriptions. Au nom de quel principe républicain refuse-t-on aujourd'hui à certains parents le droit de choisir librement l'établissement scolaire de leurs enfants ? Pourquoi s'obstine-t-on à traiter de façon inégalitaire les élèves du privé et ceux du public ?

M. Philippe Nogrix. Alors que le forfait communal est de 1 000 euros en moyenne pour un élève du public, il s'élève à 440 euros pour un élève du privé.

L'on s'obstine à appliquer la loi de 1985, qui ne correspond plus aux réalités d'aujourd'hui ni aux attentes de nos concitoyens ; l'afflux d'inscriptions en est la preuve.

Cette loi prévoit d'attribuer aux établissements sous contrat une dotation en moyens horaires au prorata des effectifs de l'enseignement public. Or ces derniers sont en baisse depuis plusieurs années, et la suppression, parfois malheureuse, de postes qui en résulte touche également l'enseignement privé, dont les effectifs augmentent pourtant. Ainsi, plus l'enseignement privé a d'élèves, moins il a de postes ! Il ne dispose, en outre, d'aucune marge de manoeuvre...

M. Philippe Nogrix. ...car, contrairement à ceux du public, tous les enseignants du privé sont tenus d'être présents devant les élèves.

Cessons de voir dans l'enseignement privé un concurrent de l'enseignement public. La complémentarité de ces deux secteurs est une vraie chance pour les élèves, vous le savez pertinemment. Les innovations et les richesses de l'un et de l'autre ne peuvent être que d'un grand profit pour notre service de l'éducation nationale.

Ainsi, l'enseignement privé sous contrat accueille avec succès beaucoup d'enfants en échec scolaire issus des banlieues ou des communautés de confession musulmane. L'enseignement public et l'enseignement privé doivent donc pouvoir s'enrichir mutuellement de leur complémentarité, voire de leurs différences.

J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez apporter une réponse satisfaisante à ce problème.

J'ajoute, monsieur Signé, que, chez moi, le nombre d'élèves est plus important dans l'enseignement privé que dans l'enseignement public. Or doit-on les rejeter pour autant ? Ne sont-ils pas aussi citoyens que ceux que vous semblez vouloir défendre ?

M. René-Pierre Signé. Je n'ai pas dit cela !

M. Philippe Nogrix. Enfin, parce que l'éducation, qui représente un investissement pour l'avenir de nos enfants, doit être réellement la première priorité du Gouvernement, le groupe UC-UDF votera les crédits relatifs à la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme Annie David. C'est tout ce que vous aviez à dire ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord, comme l'a fait M. le rapporteur spécial, de regretter l'heure tardive - il est bientôt minuit - à laquelle nous discutons de la première ligne du budget de la nation. C'est regrettable, même si cela constitue un progrès par rapport à ce qui s'était passé voilà quelques années : nous avions été appelés à nous prononcer sur le budget de l'enseignement scolaire un dimanche après-midi !

Cela étant, monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter pour l'action que vous menez. Le projet de budget que vous nous présentez traduit en effet votre volonté de ne pas relâcher l'effort en faveur de l'éducation et d'appliquer pleinement les dispositions de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.

Si les moyens sont élevés - ils atteignent plus de 59 milliards d'euros -, l'enseignement scolaire représente en fait 22 % du budget de l'État. Je note cependant une inflexion louable. Il est temps, en effet, de mettre un terme à la politique du « toujours plus », qui ne donne pas les résultats espérés, pour passer à une politique que je qualifierai du « toujours mieux ».

Récemment, une note de l'OCDE a classé la France parmi les pays investissant le plus dans l'enseignement - 1 850 euros par an et par habitant -, mais pour des résultats qualifiés par ce même organisme de seulement « moyens ». Cela donne à réfléchir sur la direction à suivre. Notre pays, s'il veut obtenir des résultats, ne peut s'en tenir à la seule inflation budgétaire.

À côté des moyens, il doit y avoir un projet, et, je le répète, c'est la politique que vous suivez, monsieur le ministre, à savoir celle du « toujours mieux », qui doit permettre d'assurer la réussite de chacun de nos enfants.

Vous avez choisi la voie de la discussion, procédant à de multiples concertations avec le monde éducatif pour mener à bien les vingt-trois chantiers engagés. Ce dialogue constant constitue, je crois, un gage de réussite.

Le budget que nous examinons ce soir poursuit des objectifs déterminants pour notre système éducatif : d'une part, il accentue fortement les moyens consacrés à l'égalité des chances et, d'autre part, il vise à utiliser plus efficacement l'argent public.

À ce sujet, je rappellerai que le contexte budgétaire national appelle à la responsabilité des gestionnaires publics et à l'amélioration de la gestion de la dépense publique.

L'ajustement des emplois à la réalité des besoins, tel qu'il est prévu dans ce budget, s'appuie sur le travail rigoureux des deux audits de modernisation réalisés à la demande du ministère des finances, ainsi que l'a rappelé tout à l'heure Gérard Longuet.

Nous parvenons, notamment, à un meilleur encadrement de l'octroi de certaines décharges, régulièrement souhaité par nos rapporteurs.

Aujourd'hui, il ne doit plus y avoir d'enfants laissés au bord du chemin en raison de leurs différences, qu'il s'agisse de différences de milieu social, de différences culturelles ou géographiques, ou encore de différences liées au handicap.

Votre politique, monsieur le ministre, s'inscrit dans la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, texte autour duquel doit se mobiliser l'ensemble de la communauté éducative.

Ce budget concentre l'effort sur les catégories d'élèves qui en ont le plus besoin et met l'accent sur la nécessité d'apporter un soutien individualisé à certains élèves, car tous les enfants n'avancent pas au même rythme.

Tel est le sens des programmes personnalisés de réussite éducative. Je rappelle qu'il s'agit là d'un plan d'action conçu par l'équipe pédagogique en concertation avec les parents afin d'aider l'enfant à acquérir le socle commun qui lui sera indispensable par la suite.

Cette aide a montré toute son efficacité lors de l'expérimentation qui vient d'être menée dans 8 500 classes de l'enseignement primaire et 149 collèges. Aussi, je me félicite que ces programmes soient progressivement étendus à tous les établissements depuis la dernière rentrée.

Grâce au présent budget, les programmes personnalisés de réussite éducative pourront bénéficier de 1 000 assistants pédagogiques supplémentaires.

Je me réjouis également que le projet de loi de finances prévoie, en outre, le financement de 50 000 emplois de vie scolaire, recrutés sur des contrats d'avenir et affectés à des tâches administratives ou à des fonctions d'assistance éducative dans les premier et second degrés.

La création de 200 classes relais, chargées d'accueillir temporairement les élèves en rupture avec l'institution scolaire, est par ailleurs prévue à la rentrée 2007. Ainsi les chances de réinsérer ces élèves dans un cursus ordinaire s'en trouveront-elles augmentées.

Je souhaiterais également évoquer la question de la scolarisation des élèves handicapés.

En réponse au souhait du Président de la République, la loi du 11 février 2005 a, pour la première fois, affirmé leur droit d'être inscrits « comme tous les autres » dans une école ordinaire de leur quartier. L'expérience démontre le bien-fondé de cette mesure de même que l'avancée significative qu'elle représente pour l'enfant. Les témoignages que je reçois de la part de certains parents sont la preuve du formidable espoir qu'ils placent dans cette loi.

Depuis 2002, le nombre d'enfants handicapés scolarisés a progressé de 70 %, passant de 89 000 élèves accueillis en 2002- 2003 à 151 000 élèves en 2005- 2006.

Il est également important de permettre un accueil collectif dans des structures adaptées, lorsque la scolarisation dans une école ordinaire est impossible.

Conformément à la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, le présent budget prévoit la création de 166 unités pédagogiques d'intégration dans l'enseignement public et de 34 autres dans l'enseignement privé.

En termes d'encadrement, 200 emplois d'enseignants du second degré seront créés à la rentrée 2007 et 166 auxiliaires de vie scolaire seront recrutés dans les unités pédagogiques d'intégration. À cela viendra s'ajouter une partie des 50 000 contrats aidés financés dans les premier et second degrés. L'engagement de l'État d'accompagner la scolarité des enfants handicapés est donc fermement tenu.

En outre, je pense qu'il sera nécessaire de professionnaliser davantage les nouveaux métiers liés à l'accompagnement des élèves handicapés. Ils devront offrir des rémunérations attractives, une bonne intégration des frais liés à ces activités spécifiques, de réelles perspectives de carrière, de vraies possibilités de validation de la pratique professionnelle ainsi qu'une véritable ouverture vers d'autres métiers ou carrières tant dans l'éducation nationale que dans le monde médico-social et au sein des collectivités locales. Le rapport remis récemment au Premier ministre par le député Guy Geoffroy appelle à cette réflexion.

Par ailleurs, j'évoquais déjà l'an dernier le besoin de formation de l'ensemble des enseignants et des chefs d'établissement, tant il est vrai que, trop souvent, c'est la volonté d'accueillir un enfant différent qui fait défaut. Cette question pourrait notamment être traitée, à mon avis, dans le cadre de votre projet de réforme des IUFM, monsieur le ministre.

Permettez-moi maintenant d'aborder un sujet qui m'interpelle, comme bon nombre d'entre nous, je veux parler des bourses.

Si je me réjouis de l'ouverture de 89 000 bourses au mérite pour les élèves boursiers reçus avec mention au brevet, ce qui permettra aux élèves méritants issus de familles modestes de poursuivre leurs études, je suis en revanche particulièrement choqué - le terme n'est pas trop fort, monsieur le ministre - par le montant dérisoire des bourses affectées aux collégiens.

Le montant de base est de 60 euros par an. Une famille de deux enfants, dont le revenu mensuel est inférieur à 1 000 euros, ne reçoit donc, à ce titre, que 5 euros par mois. Cette somme est indécente et presque insultante pour ces familles, même si ces dernières bénéficient d'autres dispositifs d'aide sociale, comme l'allocation de rentrée scolaire, que le Gouvernement a régulièrement réévaluée.

Monsieur le ministre, vous n'êtes pas responsable de cette situation, et ceux qui, aujourd'hui, seraient tentés de crier au loup ou au scandale doivent faire preuve d'un peu de retenue et de responsabilité.

Le Gouvernement vient de réévaluer les plafonds de ressources de ces bourses de 5,8 % pour l'année 2006-2007, alors que la réévaluation moyenne n'avait jamais dépassé 1,4% sous les gouvernements de gauche ! Vos prédécesseurs, qu'il s'agisse de M. Jospin, de M. Lang ou de Mme Royal, qui vous accusent très souvent de « brader le système », n'ont guère accompli d'efforts pour les familles en difficulté (M. Serge Lagauche s'exclame.) et n'ont pas augmenté significativement le montant des bourses. Les chiffres sont là pour rappeler certaines vérités à celles ou à ceux qui voudraient nous donner des leçons ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. Ne devenez pas méchant ! Ne dérapez pas !

M. Jean-Claude Carle. Le montant des bourses de collège est ridiculement bas, comme M. Philippe Richert, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, ne cesse de le rappeler depuis des années. Une prestation de 60 euros, monsieur le ministre, doit coûter presque autant en frais de gestion !

Notre devoir est de corriger cette injustice. Aussi, mes chers collègues, je vous proposerai, à budget constant et par redéploiement de crédits depuis d'autres lignes, un amendement visant à porter le montant de base des bourses de 60 euros à 100 euros, afin que cette aide soit simplement décente. J'y reviendrai lors de la discussion des amendements.

Enfin, je souhaiterais évoquer la situation de l'enseignement agricole, auquel je suis particulièrement attaché, tout comme Mme Françoise Férat,...

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est vrai !

M. Jean-Claude Carle. ... que je tiens d'ailleurs à féliciter de son rapport d'information, adopté à l'unanimité par la commission des affaires culturelles le mois dernier.

L'enseignement agricole a pu bénéficier, l'année dernière, d'un abondement de 30,5 millions d'euros, à l'issue des débats du Parlement. J'étais alors heureux d'avoir pu contribuer à soutenir cette filière particulièrement performante, qui constitue une importante voie d'insertion professionnelle pour les quelque 174 000 élèves qu'il accueille.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir permis à nos demandes de crédits supplémentaires d'aboutir. Je remercie également M. le ministre de l'agriculture d'avoir inscrit ces crédits dans le projet de loi de finances pour 2007.

Je regrette néanmoins que des gels de crédits aient affecté les engagements pris, et je souhaite que ce problème soit réglé rapidement.

Les reports de charges ont été de 20 millions d'euros sur la période 2005-2006. Comme les gels des crédits s'aggravent malheureusement chaque année, nous pouvons penser qu'ils atteindront 24 millions d'euros en 2006-2007, ce qui représente plus de 12 % de l'aide affectée par l'État aux maisons familiales rurales et aux établissements de l'UNREP, l'Union nationale rurale d'éducation et de promotion !

Il est totalement anormal que, par simple décision de l'administration des finances, le vote du Parlement soit ainsi remis en question, pour ne pas dire bafoué. Mes chers collègues, nous pouvons nous interroger sur notre rôle et sur l'utilité de nos débats, même si ceux-ci ont lieu tard dans la nuit. C'est tout simplement inadmissible ! Monsieur le ministre, imaginons un seul instant qu'une entreprise privée fonctionne de cette manière et perde 12 % de ses recettes. Elle disparaîtrait inévitablement !

Je comprends parfaitement que le Gouvernement décide de geler un certain nombre de crédits pour faire face à des imprévus. Je ne reviens pas sur le principe de telles décisions, mais je suis stupéfait que des gels puissent affecter une ligne de crédits prioritaire.

Ne pourrions-nous pas nous pencher sur d'autres crédits, tels que, par exemple, ceux qui permettent à certains fonctionnaires de passer leur retraite dans les territoires d'outre-mer ? (Sourires.) Un quotidien paru aujourd'hui - Le Monde, pour ne pas le citer -, évoque à ce sujet des « retraites jackpot » !

Ces crédits sont-ils plus prioritaires que ceux qui sont destinés à l'éducation de nos enfants ? Je ne le pense pas, d'autant que l'enseignement agricole remplit autant un rôle éducatif qu'une fonction d'intégration sociale, ses succès se rencontrant bien souvent auprès de jeunes en voie de déscolarisation, dont le maintien dans l'enseignement général aurait certainement conduit à une sortie sans qualification.

De plus, l'enseignement agricole peut se prévaloir de résultats remarquables en termes d'accès à la vie professionnelle. Il constitue un véritable aiguillon pour l'ensemble de notre système éducatif. Je suis donc heureux que la politique menée par le Gouvernement lui permette de mieux fonctionner, pour peu que les crédits qui lui sont destinés ne soient ni gelés ni débloqués trop tard !

Pour conclure, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous adresser une remarque et de vous faire part d'une interrogation.

Ma remarque concerne le transfert des TOS. Voilà quelques mois, certains, dans cet hémicycle, dénigraient cette mesure. Or, aujourd'hui, force est de constater, comme l'a rappelé M. le rapporteur spécial, que ce transfert se passe très bien : je rappellerai simplement que, dans ma région, 60 % des personnels ont choisi à ce jour la fonction publique territoriale.

Mon interrogation porte sur le projet de modification du décret du 25 mai 1950 concernant les obligations de service des enseignants. Une fois remanié, ce texte préciserait à nouveau que les trois heures destinées à l'animation du sport scolaire font partie de l'horaire hebdomadaire de service des enseignants d'éducation physique et sportive.

Certains syndicats véhiculent une information selon laquelle le principe des trois heures destinées à l'association sportive des établissements serait supprimé. Or je pense que le texte conditionne simplement ces trois heures au fonctionnement effectif de cette association. Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez me le confirmer.

Bien évidemment, comme l'ensemble des membres du groupe UMP, je voterai les crédits de cette mission qui accorde à l'égalité des chances une priorité que nous avions peut-être un peu oubliée durant des décennies. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le ministre, mes collègues de la majorité ayant été particulièrement laudateurs à votre égard, je n'aurai pas à l'être également ! J'essaierai de discerner ce qui, selon moi, pourrait être amélioré dans ce projet de budget, et ce qui devrait être gommé.

Voilà deux ans, j'avais quelque peu brocardé votre prédécesseur qui avait signé un texte aboutissant à écrire, pour évoquer des enfants jouant au ballon dans une cour de récréation : « les apprenants tentent de maîtriser le paramètre rebondissant » - « aléatoire », lorsqu'il s'agit d'un ballon de rugby ! - « dans un espace interstitiel de liberté » ! (Sourires.)

Monsieur le ministre, vous avez évité ce travers, mais, lorsque l'on tombe sur certains textes issus de vos services, on retrouve malheureusement le même galimatias, un langage totalement ésotérique. Pour résoudre ce problème, il n'est pourtant pas besoin de moyens considérables : il suffit simplement d'un peu de bon sens.

Le fondement de l'égalité des chances, c'est se faire comprendre de ceux à qui l'on s'adresse.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C'est vrai ! D'ailleurs, cela vaut aussi pour d'autres administrations !

M. François Fortassin. C'est exact, monsieur le rapporteur spécial !

Par ailleurs, monsieur le ministre, je regrette personnellement que vous n'ayez pas suffisamment insisté sur les notions d'école de la République et de laïcité. En effet, l'école doit être avant tout le socle sur lequel se fondent les valeurs républicaines. (M. René-Pierre Signé acquiesce.) Il serait donc logique que vous insistiez avec force sur ces principes.

De même, je regrette que vous n'ayez pas apporté de solution au malaise des chefs d'établissement. Ceux-ci, au-delà des manifestations qu'ils ont organisées, se sentent isolés, inquiets et souvent démunis face aux problèmes auxquels ils se trouvent confrontés.

Monsieur le ministre, votre budget comporte des dispositions intéressantes, et vous avez fait preuve d'une certaine bonne volonté. Toutefois, j'y remarque pour ma part un certain manque d'audace, et je m'exprime ici à la fois comme pur produit de l'école de la République, comme individu ayant, dans une vie antérieure, quelque peu enseigné, et comme parent d'élèves, père d'une nombreuse famille : la première de mes filles était en terminale en 1981 et la dernière, vingt-cinq ans plus tard.

Or j'observe que le niveau des élèves a baissé, mais que les programmes sont de plus en plus ambitieux. (M. le rapporteur spécial acquiesce.), ce qui pose tout de même un véritable problème.

Tout se passe, au fond, comme si nous dispensions notre enseignement au seul profit d'une élite. Les élèves les plus intelligents, qui disposent d'un appétit de savoir, y trouvent leur compte, alors que les gros bataillons, champs laissés en jachère, s'ennuient dans les établissements scolaires.

Pourtant, l'objectif fondamental d'une nation est d'essayer d'apporter un minimum de savoir à l'ensemble de ses citoyens. Les élèves intelligents réussiront malgré tout, et ils s'en sortiraient même sans professeurs ! Il s'agit là, me semble-t-il, d'une donnée essentielle à prendre en compte. Que nous le voulions ou non, l'école de ce pays est très élitiste. Dès lors, nous pouvons bien adopter des mesures pour tendre vers cette égalité des chances que nous prônons tous, quelle que soit notre sensibilité politique, ...

Mme Annie David. Pas nous ! Nous prônons l'égalité des droits, pas celle des chances !

M. François Fortassin. ... cette conception élitiste n'en perdure pas moins.

En outre, ce projet de budget manque d'audace à mes yeux s'agissant de ce que j'appellerai, quelle que soit la terminologie officielle utilisée, les établissements des quartiers difficiles.

Certes, des mesures ont été adoptées en leur faveur. Mais on envoie souvent dans ces établissements des enseignants en début de carrière.

M. Gilles de Robien, ministre. Non ! C'est terminé !

M. François Fortassin. Pas tout à fait, monsieur le ministre !

Je considère, pour ma part, qu'il serait assez logique d'y envoyer des enseignants chevronnés,...

M. René-Pierre Signé. Ce serait même très logique !

M. François Fortassin. ...quitte à les payer un peu plus parce que leur métier est plus difficile.

Je souhaite enfin évoquer brièvement, car le temps m'est compté, le problème des TOS. Monsieur Carle, vous avez souligné qu'un très grand nombre d'entre eux ont choisi les collectivités territoriales. Mais peut-être faudrait-il connaître leurs motivations !

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Les primes ! Et la proximité !

M. François Fortassin. Les collectivités territoriales proposent souvent un régime indemnitaire plus avantageux qui a pu séduire ces personnels, au-delà de l'avantage de la proximité ! Celle-ci a joué, mais elle n'a pas été le seul facteur de leur choix.

Mes chers collègues, là où le bât blesse, même si nous parviendrons sans doute à trouver des solutions intelligentes à ce problème, c'est dans la double responsabilité qu'exercent sur ces personnels les principaux de collège et les présidents de conseil général, d'une part, les proviseurs et les présidents de conseil régional, d'autre part.

J'en prendrai un exemple. Dans un esprit d'égalité, les TOS devront travailler autant que les autres membres de la fonction publique territoriale, soit quelque 1 600 heures par an. Or, aujourd'hui, vous le savez, cette durée n'est pas tout à fait atteinte dans certains établissements. (Sourires.)

Bien entendu, le président du conseil général passera un contrat avec le chef d'établissement. Mais si cet accord n'est pas respecté, qui devra-t-il sanctionner ? Le TOS qui se trouve placé sous sa responsabilité ou le chef d'établissement, sur lequel, naturellement, il ne dispose d'aucun pouvoir ? Il s'agit d'un véritable problème.

Il est probable que l'on n'a pas voulu trop mécontenter les chefs d'établissement. Toutefois, mes chers collègues, nous le savons pour en avoir fait l'expérience - et, monsieur le ministre, vous le confirmerez, vous qui avez eu à arbitrer ces questions quand vous étiez chargé de l'équipement -, la double responsabilité ne donne en général pas de résultats très heureux !

Telles sont les observations que je souhaitais formuler.

Je conclurai en regrettant que le Gouvernement n'ait pas choisi une autre date qu'un lundi soir pour l'examen du budget de l'éducation nationale ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur les grandes lignes de cette mission, car elles ont déjà largement été exposées et commentées de part et d'autre de l'hémicycle. Je souhaite, encore une fois, pointer l'incohérence de votre politique budgétaire au regard des objectifs que vous vous êtes pourtant fixés à travers deux de vos priorités : l'accueil des élèves handicapés et la refonte de l'éducation prioritaire.

Il est ainsi particulièrement alarmant de constater la baisse générale des crédits de paiement du programme « Vie de l'élève », qui regroupe notamment les crédits d'action sociale, les crédits de santé scolaire et ceux qui sont destinés à l'accueil des élèves handicapés. En effet, les cinq actions de ce programme voient tous leurs crédits diminuer, à l'exception des actions « Santé scolaire » et « Action sociale ». L'action « Accompagnement des élèves handicapés » enregistre une baisse de 3 %, alors que 2007 constitue la dernière année de mise en oeuvre du plan d'adaptation et d'intégration scolaire des élèves handicapés qui, sur la période 2003-2007, prévoyait la création de 6 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire, chargés de l'accompagnement des élèves handicapés.

D'ailleurs, cette carence ne soulève pas seulement la désapprobation de l'opposition, puisqu'un député UMP a déposé un amendement visant à rattraper en partie la situation, en abondant les crédits pour la formation des auxiliaires de vie scolaire.

Afin de mettre tant bien que mal en oeuvre la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école et la refonte des ZEP, vous ne faites que déshabiller Pierre pour habiller Paul ! Ainsi les crédits pédagogiques des collèges accuseront-ils, en 2007, une baisse de l'ordre de 35 % ! Et c'est la demi-heure de soutien en classes de cinquième et de quatrième qui est sacrifiée pour financer, par redéploiement, 1 000 postes dans 250 collèges bénéficiaires du dispositif « ambition réussite ». Il est inacceptable que ce soit le soutien scolaire qui en pâtisse !

En outre - cette remarque n'est pas sans lien avec le débat sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » que nous avons eu vendredi dernier -, il est tout à fait schizophrène de regretter la désaffection des étudiants pour les filières scientifiques, d'un côté, et de baisser les crédits qui servent à des actions pédagogiques, comme « La Main à la pâte », de l'autre.

La baisse drastique des dépenses d'intervention dans le programme « Enseignement scolaire public du premier degré » est d'autant plus inquiétante que le « bleu » budgétaire indique qu'il s'agit de transferts aux collectivités territoriales, dans le cadre du plan d'accès aux technologies de l'information et de la communication pour l'éducation, les TICE, afin de « subventionner des associations qui soutiennent les politiques éducatives développées dans l'enseignement élémentaire », telle la Société française de physique qui promeut l'opération « la Main à la pâte ». Encore un désengagement de l'État ! Le Gouvernement n'en finit donc jamais de charger la barque des collectivités, monsieur le ministre !

Au-delà de ces remarques particulières sur la réalité des différents programmes de cette mission, il convient de se pencher sur la logique globale que cette dernière met en pratique. Bien souvent, il nous est reproché, à nous socialistes - de manière assez caricaturale d'ailleurs -, de n'aborder l'éducation que sous l'angle de l'emploi. Or, contrairement à ce que nous reproche la droite, nous apprécions la politique éducative du Gouvernement non pas en fonction des seules créations d'emplois qu'elle permet, mais selon une question essentielle pour nous : cette politique éducative permet-elle une réelle égalité des chances ? Ce sont le Gouvernement et sa majorité qui se focalisent sur les emplois, mais pour les baisser, au nom d'un raisonnement simpliste qui leur est propre : la modernisation, c'est la suppression d'emplois.

Plusieurs éléments démontrent cette logique.

Tout d'abord, le ratio justifiant la création et la suppression de poste n'est absolument pas identique : il diffère de un à six ! Ainsi, monsieur le ministre, si vous créez un poste pour 60 élèves en primaire, vous en supprimez un pour 11 élèves dans le secondaire.

Ensuite, ces suppressions massives ont des conséquences sur l'évolution des effectifs. Sur environ 500 000 enseignants du secondaire, 3 600 postes de professeur ne seront pas offerts aux concours et 2 000 départs à la retraite ne seront pas remplacés. Cette tendance est particulièrement inquiétante au regard d'une étude de la Direction de l'évaluation et de la prospective réalisée en 2005 qui concluait que, compte tenu des départs à la retraite et de l'évolution démographique, 17 331 recrutements annuels seraient nécessaires pour le second degré sur la période 2006-2013.

Mais le pire est atteint avec la démarche des audits appliqués à l'éducation nationale, l'objectif principal étant de réaliser des économies budgétaires, dans une démarche de modernisation de l'État, bien évidemment ! Au nombre de trois, ces audits, pilotés par l'Inspection générale des finances, ont porté respectivement sur les décharges statutaires, sur la grille horaire des collèges et sur celle des lycées.

S'il est légitime de s'interroger sur l'utilisation des deniers publics, cela doit se faire non pas uniquement à l'aune des économies budgétaires réalisables, mais bien selon une démarche visant une meilleure efficacité du service public d'éducation au service de sa mission, la réussite de tous. Appliquer le modèle de l'entreprise fondé sur la productivité au service de l'éducation nationale est une aberration et une conception politique dangereuse pour l'avenir de notre pays.

Il est facile de dénoncer, dans ces audits, la hausse des dépenses d'éducation par rapport à la stagnation du taux d'accès au bac ou au brevet, ainsi que le niveau de nos dépenses d'éducation par rapport à d'autres pays de l'OCDE. Ainsi, les dépenses cumulées pour la durée des études primaires et secondaires s'élèvent à 85 084 dollars en France, contre 77 204 dollars pour la moyenne des pays de l'OCDE.

Une analyse plus approfondie des statistiques révèle une situation plus complexe. D'une part, le montant de ces dépenses dépasse les 100 000 dollars aux États-Unis, au Danemark, en Norvège, au Luxembourg, en Italie... D'autre part, si le budget de l'éducation nationale est passé de 55 milliards d'euros à 65 milliards d'euros de 2000 à 2005, cette hausse correspond à un simple maintien en termes de PIB, de l'ordre de 3,9 %. La dépense intérieure d'éducation en France, après avoir progressé dans les années quatre-vingt-dix, est orientée à la baisse, passant de 7,6 % du PIB à 7,2 % en 2005.

La réalité est la suivante : l'efficacité de l'école ne suit pas une logique arithmétique. Ainsi, on sait que les dépenses éducatives progressent avec le niveau de qualification de la population. En outre, si l'alphabétisation a un coût modéré, la réussite de tous mobilise des moyens de plus en plus importants, puisque, pour réduire des « poches » de résistance de plus en plus difficiles, il faut inventer des moyens nouveaux. Tous les pays développés connaissent une hausse rapide de leurs budgets éducatifs.

Enfin, des particularités françaises jouent, comme le fort taux de redoublement.

Nous atteignons en effet un taux de redoublement record de près de 40 % pour les élèves de quinze ans, contre 13 % dans l'ensemble de l'OCDE. Or le redoublement - c'est avéré - ne prévient pas l'échec scolaire ! À ce propos, monsieur le ministre, je note que les indicateurs concernant le redoublement tardent à se mettre en place : seul celui du second degré est renseigné dans l'annexe du projet de loi de finances pour 2007, alors que les indicateurs doivent porter à la fois sur le premier et le second degré pour l'enseignement public, mais aussi pour l'enseignement privé.

Réduire le taux de redoublement fait partie des quelques idées avancées dans les audits qui peuvent être intéressantes.

Il convient de regarder l'objectif que ces suggestions doivent servir, et la manière de les mettre en oeuvre. En effet, en dénaturant un certain nombre de propositions par des visées strictement comptables, en cherchant à imposer une évolution brutale du système, on prend le risque d'empêcher toute évolution d'un système éducatif qui a bien besoin de bouger. Or diminuer les moyens sans faire évoluer l'école dans ses pratiques et ses conceptions ne peut qu'aggraver ses difficultés.

L'avenir de l'école ne peut se régler par des audits financiers dont le but n'est que de maintenir le taux de scolarisation pour un moindre coût, en utilisant trois voies classiques. Tout d'abord, ils proposent d'augmenter la durée du travail des professeurs, par exemple en allongeant sans contrepartie l'année scolaire de deux semaines. Ensuite, ils préconisent de diminuer le salaire des enseignants, notamment en supprimant les décharges. Enfin, ils recommandent d'augmenter le volume d'« enseignés », en réduisant le nombre d'heures d'enseignement.

Qu'en est-il des facteurs relationnels, qui permettent de faire progresser les élèves, tels que la stabilité des équipes enseignantes, les efforts menés pour intégrer les parents à la vie de l'école, le développement de liens contractuels avec les élèves ? Il est vrai que ces stratégies n'ont aucune réalité comptable ou statistique !

L'efficacité de l'école - et non sa productivité, j'y insiste - doit s'apprécier aussi en termes de culture et d'épanouissement intellectuel. À l'école, on ne travaille pas des produits ; on éduque des futurs citoyens !

L'enseignement scolaire n'est pas seulement sommé d'entrer dans le moule du « budgétairement correct », les enseignants doivent maintenant se conformer au « pédagogiquement correct » !

La polémique absurde sur les méthodes de lecture, que vous avez lancée, monsieur le ministre, et ses conséquences - menaces d'enquête et de sanctions contre les enseignants ou de procédure disciplinaire contre un inspecteur - ont constitué une véritable attaque contre la liberté pédagogique des enseignants. Or celle-ci est pourtant au coeur de ce métier, car c'est elle qui permet d'adapter la pratique aux besoins des élèves. Une seule tête, une seule méthode : les enseignants et les mouvements pédagogiques ont été choqués par votre autoritarisme.

À cela s'est ajoutée la campagne de communication de l'association ultraconservatrice SOS Éducation, qui surfe sur la vague des « déclinistes ». Par des encarts publicitaires dans la presse, elle a appelé les parents à dénoncer les enseignants n'utilisant pas la méthode syllabique.

Il faut dire que, sur le terrain, les relations entre parents et enseignants se sont parfois tendues. Les enseignants sont soumis aux pressions de parents qui croient d'autant plus que l'instituteur de leur enfant utilise la méthode globale que vous avez laissé croire, monsieur le ministre, qu'une seule méthode était autorisée. Vous avez jeté le trouble chez les parents et participé à ébranler leur confiance dans l'école.

Parce que nous ne partageons ni votre vision comptable de l'enseignement scolaire ni votre manière très particulière de gérer la politique éducative, car aucune ne permet, pour une véritable égalité des chances, de « différencier sans exclure », selon le mot de Philippe Meirieu, nous voterons contre ce budget de l'enseignement scolaire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. André Ferrand.

M. André Ferrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est l'enseignement français à l'étranger que je souhaite évoquer ce soir. Il s'agit d'un sujet important sur lequel, monsieur le ministre, je tiens, encore, à renforcer votre intérêt.

En effet, même si la logique et les effets parfois trop simplificateurs de la LOLF semblent confier au seul ministère des affaires étrangères la responsabilité de cette dimension fondamentale de notre présence et de notre action extérieures, il n'en demeure pas moins - et il ne peut en être autrement - que votre ministère y joue un rôle essentiel, par la nature même du domaine.

De son engagement dépendent de nombreux progrès, qui, tous, en améliorant la qualité et l'importance de notre dispositif, contribueront à développer notre réseau d'écoles françaises, qui couvre le monde entier.

Je procéderai à quelques rappels.

Ce réseau, qui est le plus grand du monde, compte, pour l'année scolaire 2005-2006, 430 établissements - écoles, collèges, lycées - homologués par le ministère de l'éducation nationale et répartis dans 130 pays. Parmi eux, 252 dépendent de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE : seuls 74 sont gérées directement par cette instance, c'est-à-dire par l'État ; les 178 autres sont conventionnés, c'est-à-dire gérés par des associations de parents d'élèves de droit privé français ou étranger ayant passé un accord avec l'AEFE.

Ce réseau rassemble également 12 000 enseignants dans le seul réseau AEFE, dont environ 1 300 expatriés, 5 000 résidents et 5 400 recrutés locaux.

En outre, ce réseau propose un enseignement à 240 000 élèves, dont plus de 80 000 Français. Sur ce nombre, le réseau de l'AEFE scolarise 160 000 enfants, dont 56 % d'étrangers. Ainsi, 35 % des élèves sont scolarisés en Afrique, 27 % en Europe, 20 % en Asie et 19 % en Amérique.

Enfin, ce réseau présente également un taux de réussite au baccalauréat exceptionnel, soit presque 94 % !

Accomplissant d'abord sa mission de service public d'enseignement auprès de nos communautés, ce réseau sert notre économie, donc notre emploi, en accueillant les enfants de nos compatriotes expatriés. Il contribue aussi au rayonnement de notre culture, de notre langue, de nos valeurs. Il étend en outre notre influence en formant de jeunes étrangers, qui sont de plus en plus nombreux à nous rejoindre et qu'il nous faut nous efforcer d'accueillir ensuite dans nos universités et nos grandes écoles.

Conscient de l'importance de l'enjeu, votre ministère, après une période trop longue pendant laquelle, depuis la création de l'AEFE, il s'était éloigné du sujet, a commencé à revenir dans le jeu et à s'associer à l'action. Je lui en sais gré.

Monsieur le ministre, vous aviez vous-même donné l'exemple, à la rentrée 2005, en cosignant avec votre collègue ministre des affaires étrangères une lettre par laquelle vous confiiez au doyen de l'Inspection générale de l'éducation nationale, M. François Perret, la mission d'accélérer la mise en oeuvre des recommandations du rapport que j'avais remis à M. Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, sur sa demande.

Vous avez également récemment visité à Dubaï le nouveau lycée Georges-Pompidou, qui est devenu l'un des fleurons de notre réseau. En outre, nous espérons bien que, à l'occasion de la commémoration du Traité de l'Élysée, le 23 janvier prochain, vous vous rendrez à Düsseldorf. L'ensemble de la communauté scolaire ainsi que les entreprises françaises et allemandes veulent vous voir remercier le ministre-président de Rhénanie du Nord-Westphalie de son appui à l'importante opération d'extension et de modernisation de notre lycée, dont la capacité devrait ainsi être portée à environ 700 élèves.

Ainsi, aujourd'hui, le ministère de l'éducation nationale est normalement revenu dans l'action en faveur de l'enseignement français à l'étranger et a recommencé à y jouer le rôle qui lui revient.

M. André Ferrand. Heureusement, la page sur laquelle il était écrit, au moins en filigrane, que, puisque la tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger appartenait au seul ministère des affaires étrangères, il revenait à ses personnels de trouver eux-mêmes des solutions, sans s'attendre à une grande motivation de la part de leurs collègues de la rue de Grenelle, est largement tournée.

C'est ce pragmatisme citoyen qui, sous votre impulsion, a permis un certain nombre d'avancées concrètes telles que la mise en ligne des « dossiers bleus », qui facilite largement l'inscription dans l'enseignement supérieur en France des élèves issus de nos écoles à l'étranger, l'ouverture de plus en plus large de notre enseignement à la fois à la langue et à la culture du pays hôte et aux langues étrangères en général, principalement à l'anglais.

Je relèverai aussi l'accueil et l'accompagnement renforcés des élèves étrangers non originellement francophones qu'il est nécessaire d'aider pour qu'ils acquièrent rapidement l'essentiel de notre langue, ce qui leur permettra de suivre utilement les cours. Je noterai également les avancées sur les projets de baccalauréats binationaux, qui devraient permettre aux élèves issus de notre réseau d'accéder, selon leur choix, indifféremment à l'enseignement supérieur du pays hôte ou du nôtre.

Une autre avancée intéressante et potentiellement riche est l'affirmation nouvelle de l'éligibilité au bénéfice de la taxe d'apprentissage des établissements de l'étranger comportant des sections technologiques. L'un d'entre eux a déjà entrepris d'en profiter. Il faudra que nombre d'autres en fassent autant.

Je citerai, enfin, le détachement et la nomination de cinq inspecteurs d'académie-inspecteurs pédagogiques régionaux au service pédagogique de l'AEFE pour des missions non seulement d'inspection, mais aussi de pilotage de la didactique de leur discipline dans le contexte particulier des établissements de l'étranger.

Ainsi, monsieur le ministre, l'état d'esprit a changé. Il faut s'en féliciter. Un véritable esprit de partenariat se développe entre votre ministère et l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.

Il faut maintenant faire en sorte d'accélérer la vitesse du cercle vertueux. Permettez-moi d'énumérer un certain nombre de mesures allant dans ce sens.

Pour mieux donner corps à ce partenariat, il est prévu qu'un vice-président du conseil d'administration de l'AEFE, issu de l'éducation nationale, soit nommé aux côtés du président représentant, lui, le ministère des affaires étrangères. Il devra avoir naturellement pour vocation d'être l'interlocuteur privilégié dans votre ministère, la véritable interface, pour tout ce qui concerne l'enseignement français à l'étranger. Cette nomination devrait intervenir aussi vite que possible.

Par ailleurs, comme d'aucuns l'ont dit, l'initiative des baccalauréats binationaux est louable et doit être poursuivie. Mais il faut arrêter la floraison de dénominations qui troublent la visibilité et finissent par être préjudiciables à l'image de ce diplôme. Entre le baccalauréat tout cours, l'OIB, ou option internationale du baccalauréat, le baccalauréat européen, le baccalauréat franco-allemand, plus tard le bachibac espagnol, le matubac polonais ou autre esabac italien, sans parler d'un éventuel albac anglais, qui va s'y reconnaître face au grand concurrent qui gagne du terrain, y compris dans certaines de nos écoles, le baccalauréat international de Genève ?

Entendons-nous bien, je ne fais pas la promotion d'un diplôme étranger à notre système. Je dis seulement que, face à son succès, il nous faut continuer à travailler comme nous avons commencé à le faire, mais en nous attachant à trouver aux différentes déclinaisons bilatérales de notre baccalauréat une base de dénomination commune qui lui permette d'avoir un caractère universel et non pas extrêmement fragmentaire.

Dans un troisième point, monsieur le ministre, j'évoquerai plusieurs axes de progrès, qui ont tous en commun la caractéristique de devoir être très avantageusement mis en oeuvre par les académies françaises partenaires de nos établissements de l'étranger.

Exemples originaux de coopération décentralisée potentiellement très riches, ces actions de partenariat international gagnant-gagnant doivent être développées, et il faut encourager nos recteurs à en tirer la quintessence.

C'est ainsi que l'on privilégiera, en particulier, l'aide à l'orientation des élèves, qu'ils soient français ou non. De ce fait, les entités régionales disposeront d'une possibilité intéressante d'attirer les élèves étrangers issus de nos écoles dans leurs filières d'enseignement supérieur. La formation continue des enseignants et - pourquoi pas ?- l'optimisation de la gestion de leurs carrières par des échanges ou des affectations simples devront également être favorisées. L'expérimentation pédagogique devra enfin être privilégiée. Ne peut-on imaginer que nos établissements de l'étranger servent de laboratoires où seraient mises au point l'optimisation de la formation de l'honnête homme du XXIe siècle, la définition d'un nouveau socle de connaissances destiné aux citoyens français modernes, armés pour la mondialisation ?

À l'excellence, à la rigueur académique, à l'exigence de nos programmes, à la qualité de leur contenu et à la place qui y est faite à l'esprit critique, il suffirait d'ajouter ce que l'on trouve souvent autour de nous à l'étranger : un apprentissage pratique des langues, une plus grande ouverture sur l'environnement social, sur la réalité économique et le monde de l'entreprise, la découverte de l'échange oratoire, la pratique du débat et de la communication.

M. Pierre Laffitte. C'est vrai !

M. André Ferrand. Les succès ainsi obtenus à l'étranger pourraient ensuite utilement inspirer nos établissements en région.

Enfin, il est clair que, à l'exemple de l'expérience naguère pratiquée par la région Bretagne, les échanges de lycéens devraient être multipliés entre les établissements de nos régions et ceux de l'étranger.

Monsieur le ministre, notre enseignement à l'étranger représente une chance extraordinaire pour l'adaptation de notre pays à un environnement mondialisé. Il nous faut valoriser cet atout.

Mais, attention, si les chiffres de la dernière rentrée démontrent le succès croissant et l'attractivité de notre réseau et s'il faut espérer que les plans écoles, à moyen terme, dorénavant mis en place par établissement et par pays accélèrent encore ce développement, il est indispensable que l'État raffermisse son engagement.

Même si tous les acteurs, en particulier privés, doivent se sentir concernés, la responsabilité de l'État reste fondamentale et le ministre de l'éducation nationale, même si la LOLF ne lui en donne pas la responsabilité directe, doit savoir que la part des frais de scolarité à la charge de nos compatriotes atteint une limite devenant insupportable. C'est un message que devra porter le futur vice-président de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger issu du ministère. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte.

M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en contrepoint du brillant exposé de notre collègue André Ferrand, je voudrais parler, en cet instant, des sections internationales existant en France.

Dans le monde moderne, la compétition est partout, et surtout dans le domaine du savoir et de l'intelligence. Les organismes de recherche et d'enseignement prospectent et attirent les meilleurs scientifiques, professeurs, étudiants.

Après-demain, d'ailleurs, un éminent professeur vice-président du Massachusetts Institute of Technology, le MIT, va visiter les meilleurs pôles de compétences et de compétitivité français, de façon à offrir des postes et des bourses de master ou de PHT pour le MIT. Je m'en réjouis pour les candidats, mais j'espère que cette action n'engendrera pas une fuite de cerveaux, car tel est le problème.

Il faut que la France offre des zones attractives. Dieu merci, il en existe. J'en connais une particulièrement, Sophia Antipolis, mais l'on peut citer également Grenoble, Toulouse, etc. Mais ces zones ne sont attractives que si les spécialistes qui y travaillent peuvent y trouver un enseignement scolaire adapté pour leurs enfants.

Or, depuis cinquante ans, la France offre la vraie réponse, qui a fait ses preuves : la présence de sections internationales. Ces dernières accueillent en priorité les enfants des expatriés français. Elles leur proposent une alternative à ce que vient d'exposer notre collègue André Ferrand. C'est aussi une possibilité pour les spécialistes étrangers de se trouver chez eux et d'attirer les étrangers, contrairement au drain brain.

Pourtant, cette expérience de cinquante années est actuellement menacée.

Le dispositif des sections internationales, qui doit être préservé et simplifié, constitue une chance. De surcroît, il est économe pour le budget de l'État. Il est efficace pour l'enseignement des langues et l'apprentissage de la diversité des cultures. C'est un exemple réussi de coopération entre le public et le privé dans le domaine fondamental de l'ouverture d'esprit des enfants au monde contemporain, tel qu'il est. Les associations de parents d'élèves sont favorables à la poursuite de ce dispositif. Il faut donc tout faire pour maintenir et développer ces sections internationales.

Je voudrais maintenant dire quelques mots du rôle des directeurs de l'enseignement secondaire. L'évolution de l'éducation nationale est essentielle. Vous avez déjà beaucoup oeuvré en ce sens, monsieur le ministre, et vous poursuivez votre action, avec le soutien du Parlement. Mais sur le terrain, elle dépend surtout des responsables d'enseignement. Nos collègues présents au banc des commissions ont évoqué ce sujet.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Eh oui !

M. Pierre Laffitte. Sur le terrain, nous constatons que des suggestions d'ouverture vers l'extérieur ne reçoivent un accueil chaleureux et efficace que lorsque le proviseur ou le directeur d'établissement y souscrit et est lui-même ouvert. Dans ce cas de figure, on s'aperçoit que toute l'équipe pédagogique dont il a la responsabilité est soudée et crée un véritable état d'esprit.

Dans le temps, on parlait des hussards de la République. En reprenant cette comparaison un peu militaire, je dirai que les capitaines de hussards de la République - je parle des capitaines plutôt que des généraux parce que les capitaines sont plus proches de leur base, et établissent le contact - rendent possible l'ouverture d'un établissement sur le monde extérieur. À ce moment-là, tout est possible et l'éducation change de nature. Il faut absolument que nous le reconnaissions. Ces personnes sont souvent exemplaires, il faut les honorer, les récompenser à leur juste valeur.

Cela étant, monsieur le ministre, la majorité du groupe du RDSE approuvera votre budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'enseignement scolaire est bien plus qu'une question d'école qui concernerait uniquement les élèves et les enseignants ; c'est une question d'avenir, une question centrale. Les élèves sont les citoyens de demain, l'école est la France de demain. L'importance de l'enjeu mérite que l'on s'y consacre avec sérieux et exactitude.

Ce budget est le dernier de la législature. Il doit être l'occasion de faire le bilan de la politique menée depuis cinq ans. Les crédits pour 2007 de la mission « Enseignement scolaire » s'élèvent à 59,56 milliards d'euros et représentent 22 % du budget général de l'État, soit le plus gros poste de dépenses. Officiellement, les crédits sont en hausse de 1,3 % pour cette année, ce qui pourrait être une excellente nouvelle.

Mais, quand on y regarde de plus près, la réalité est moins brillante : le Gouvernement ne privilégie pas l'école, et la sacro-sainte égalité des chances recule. Le budget de l'enseignement scolaire devrait donner à l'école les moyens d'être un outil de promotion sociale, de formation citoyenne et humaniste, pour lui éviter d'être un lieu de confrontation sociale. Mais, monsieur le ministre, vous vous réfugiez derrière l'orthodoxie financière et le respect de l'équilibre des comptes pour réduire l'encadrement des élèves et mettre ainsi en danger leur avenir.

En quatre ans, 25 000 postes ont été supprimés. Cela correspond, selon vous, à la baisse démographique. Étudions de plus près la situation. Entre 2003 et 2007, le nombre des élèves du primaire a augmenté de 184 900 et, pour répondre à cette hausse, vous avez créé 4 100 postes, soit une création pour 45 élèves supplémentaires. Dans l'enseignement secondaire, vous vous apprêtez à supprimer 2 400 postes et vous en avez supprimé 20 593 entre 2003 et 2007, soit un poste pour 8 élèves en moins. Supprimer plus facilement que créer est une attitude fâcheuse. Mais Yannick Bodin l'a fait remarquer précédemment, et je n'insisterai donc pas sur ce point.

Quelles en sont les conséquences ?

Là encore, soyons précis : on constate une dégradation des conditions d'enseignement pour les élèves dont les classes sont surchargées et les options et filières supprimées. Les promesses de dédoublements de classes ou de généralisation des programmes personnalisés de réussite éducative n'ont pas été tenues. N'oublions pas, de plus, que 2 000 postes administratifs ont été supprimés depuis 2004 et que les TOS ont été transférés.

Cette vision purement comptable de votre budget nous déçoit.

Alors que la pause démographique aurait dû permettre de repenser les pratiques pédagogiques en abaissant le nombre d'élèves par classe, en particulier dans le domaine de l'éducation prioritaire, il n'en sera pas ainsi : ce n'était pas le l'objectif visé.

L'objectif prioritaire de l'école est l'égalité des chances. Nous venons de voir que votre « pointillisme budgétaire » nuit considérablement à cet objectif.

Cette rigueur mal venue concerne également des territoires comme la Nièvre. Je sais qu'il n'est pas convenable de parler des zones rurales, qui sont les véritables parents pauvres de la politique actuelle. Ce n'est qu'une raison de plus de nous y arrêter.

L'égalité des chances passe principalement par l'égalité entre les territoires. Or les zones rurales souffrent deux fois : elles souffrent de leur handicap géographique et économique, mais aussi de l'indifférence dont elles sont l'objet. Les lacunes flagrantes en matière d'éducation ne font qu'aggraver la situation.

Quant au développement rural, il semble que le temps de la politique d'aménagement du territoire élaborée et lancée par le pouvoir central ait vécu.

La décentralisation encourage à promouvoir le domaine local. Encore faudrait-il qu'une politique d'aménagement assure d'abord l'harmonie du territoire national et restaure sa cohésion, en veillant à réduire les inégalités régionales, à commencer par les projets éducatifs.

L'existence de l'école rurale ne se limite pas à un simple enjeu éducatif : face aux transformations démographiques et économiques qui affectent les campagnes, l'école rurale est également un enjeu d'aménagement du territoire, qui concerne aussi bien l'État que les collectivités locales.

Dans bien des cas, en particulier dans le premier degré, le réseau scolaire apparaît ainsi comme l'un des derniers maillons de proximité du service public. Les fermetures de classes ou, qui pis est, d'écoles sont toujours ressenties par les acteurs locaux comme un facteur de dévitalisation et de marginalisation, voire comme une forme de rejet de la République à l'égard de certains des siens, même si ces fermetures sont pédagogiquement justifiées.

L'appauvrissement de l'école, le recul de l'égalité des chances, c'est aussi le recul de l'égalité des destins : l'égalité des destins doit relever d'une vraie politique.

L'égalité des chances ne suffit pas. Elle ouvre une porte, mais n'accompagne pas totalement l'élève. Il faut l'accompagner, il faut qu'un enfant s'accomplisse, il faut développer l'éducation prioritaire et les ZEP, avec des pôles d'excellence, y compris en milieu rural, où l'on manque de tout et surtout des enseignements pédagogiques périscolaires éducatifs, sportifs, artistiques ou musicaux.

L'égalité réelle à l'école implique l'enseignement le plus large et un suivi de l'élève. C'est un chantier des plus difficiles, mais c'est un chantier nécessaire. Ce pourrait être une grande ambition nationale : apporter à tous un peu plus de considération, de chance et de dignité.

On ne peut accepter qu'il y ait tant de différence entre départements riches et départements pauvres, entre écoles riches et écoles pauvres. L'échelle de leur financement local s'échelonne de 1 à 16.

La réduction de la fracture territoriale au niveau de l'école doit être un objectif. Les dotations de l'État doivent être modulées par un effort sans précédent en faveur de la péréquation.

Le principe d'égalité, principe fondateur de la République, est aujourd'hui fort malmené. Les inégalités règnent depuis les écoles jusqu'aux entreprises : inégalités face au chômage, inégalités face à l'accès à la formation, aux soins, au logement, etc., mais aussi quant à l'accès aux connaissances dispensées par l'école.

La loi d'orientation de 1989 rappelle solennellement ce principe d'égalité et le garantit à chaque enfant : les zones d'habitat dispersé y sont même évoquées. Nous en sommes loin...

L'enseignement est-il partout ouvert à toutes les disciplines, même si, dans les zones rurales, il reste de qualité ?

Une nouvelle approche complémentaire, que permettrait l'intervention de l'État, me paraît indispensable pour les communes rurales, pour la diversification de l'enseignement de leurs écoles, pour leur équipement. Nous appelons de nos voeux une dotation d'égalité territoriale : la péréquation n'intervient dans les budgets qu'à hauteur de 6 %.

L'école, monsieur le ministre, est la clé de voûte de la citoyenneté. Elle a été le creuset de la réussite républicaine.

Elle vit cependant une transition difficile, qui impose une évolution dans la façon d'enseigner, dans le lien avec la société, qu'elle soit rurale, urbaine ou suburbaine. Le niveau scolaire moyen s'est certes élevé, mais l'élitisme républicain s'est enrayé.

L'ascenseur social que l'école favorisait s'est bloqué. Les élites se reproduisent entre elles. L'école devait promouvoir les plus modestes et les déshérités : elle accentue la discrimination. Cela devrait nous amener à revoir sa structure et sa construction pédagogique en y intégrant des enseignements nouveaux, mais aussi la citoyenneté et l'analyse des images trop vite et mal assimilées par les enfants.

Les zones rurales mériteraient un long débat en elles-mêmes. Il faut en effet insister sur un élément statistique tout à fait révélateur : près de la moitié des écoles publiques sont situées en zone rurale. Ces zones ne retiennent qu'assez peu l'attention de l'État, sans doute parce qu'elles n'accueillent que le quart des effectifs du premier degré.

De ce fait, logiquement, les établissements scolaires sont de taille modeste et entraînent corrélativement des coûts d'enseignement et des taux d'encadrement nettement plus élevés que la moyenne nationale.

Toutefois, ce que l'État considère comme un fardeau a des aspects positifs : les petites écoles sont reconnues comme lieux d'inventions pédagogiques, dans une dynamique de compensation de l'isolement ressenti par les maîtres.

Malheureusement, le niveau de l'enseignement pèche par son manque de diversité, ses locaux vétustes, ses structures, ses équipements disparates ou inexistants, par un manque de centres sportifs, de centres culturels, d'enseignement musical, d'enseignement du dessin, de la peinture, etc.

Nous pourrions longtemps discourir sur les difficultés que rencontre la ruralité et, sur ce point, les élus seraient intarissables. Je m'en tiendrai là.

Monsieur le ministre, ce budget de l'enseignement scolaire pour 2007 n'est pas à la hauteur des enjeux qui sont en cause, et je ne parle pas seulement des territoires ruraux.

Le service public de l'éducation nationale n'a cessé de reculer depuis cinq ans.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Depuis cinq ans ? Non : depuis cinquante ans !

M. René-Pierre Signé. L'ambition du Gouvernement n'est pas d'atteindre l'objectif essentiel, qui consiste à assurer l'égalité dans l'éducation scolaire et la promotion sociale. Minimaliste dans ses visées, ce budget n'a aucune chance d'apporter l'égalité à nos enfants. Comme l'ensemble du groupe socialiste, je ne le voterai donc pas. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.

M. Robert Laufoaulu. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, MM. les rapporteurs ont déjà excellemment dit tout ce qui devait l'être sur l'ensemble de la mission « Enseignement scolaire ». De plus, il est maintenant bien tard, et je pressens que chacun espère que mon intervention sera brève.

Je me contenterai donc d'évoquer quelques points matériels et pratiques, mais essentiels pour la réussite scolaire des jeunes de Wallis-et-Futuna. Il s'agit d'éléments qui concernent l'enseignement particulier à Wallis-et-Futuna.

Notre territoire est en effet soumis à un statut tout à fait particulier, qui résulte de la loi du 29 juillet 1961.

Aux termes de l'article 7 de cette loi, la République assure notamment l'enseignement et la charge des dépenses de fonctionnement et d'équipement des services afférents.

La décentralisation n'est pas encore arrivée à Wallis-et-Futuna.

Parallèlement, une convention entre l'État et la mission catholique délègue à cette dernière l'enseignement primaire, mais l'État garde la responsabilité du contrôle et du suivi pédagogiques ainsi que de la construction des bâtiments et des réparations importantes.

L'enseignement à Wallis-et-Futuna se trouve aujourd'hui dans une situation difficile. Pour ce qui concerne le primaire tout d'abord, une nouvelle convention entre l'État et la mission vient d'être signée il y a quelques semaines. Elle n'établit pas de changement immédiat au niveau du forfait. Toutefois, elle prévoit un réajustement de celui-ci.

Une mission menée par vos services, monsieur le ministre, devait évaluer les vrais besoins de l'enseignement primaire, en vue dudit réajustement de la dotation.

Or aucun rapport n'a été rendu public à la suite de cette mission, et nous sommes donc dans l'ignorance de ce que l'avenir nous réserve.

Peut-être pourrez-vous m'éclairer sur ce point, monsieur le ministre, car il est évident que les bases actuelles sont insuffisantes et que des insatisfactions demeurent, comme en témoigne le préavis de grève déposé par les enseignants.

La situation de notre enseignement secondaire n'est hélas guère plus reluisante. Dans le cadre de la convention de développement 2003-2007 entre l'État et le territoire, 400 000 euros ont été débloqués en urgence par votre prédécesseur, il y a deux ans, pour subvenir aux besoins matériels. M. Fillon avait annoncé dans cet hémicycle le financement de la première tranche de travaux du lycée de Wallis.

Cette somme n'a malheureusement été qu'un cache misère, pardonnez-moi l'expression, d'autant plus que les travaux ont été en partie mal exécutés. Les interventions de M. le député Victor Brial et, bien entendu, votre écoute attentive ont permis que d'importants travaux de réhabilitation soient entrepris cette année : nous vous en savons gré.

Par ailleurs, le projet de contrat de développement 2007-2011 prévoit une enveloppe de 5 millions d'euros sur cinq ans pour financer les grosses réparations des bâtiments, la mise aux normes d'hygiène et de sécurité, ainsi que l'acquisition de matériel pédagogique.

C'est moins que ce que nous avait octroyé le contrat de développement 2000-2004, soit plus de 44 millions de francs.

Je crains surtout que cette somme n'arrive de manière sporadique, irrégulière. Or il est urgent de pallier les carences, qui demeurent importantes malgré les travaux entamés cette année. Il conviendrait donc qu'une part importante de cette enveloppe nous parvienne rapidement, ne fût-ce que pour éviter un possible drame matériel.

Outre ces dépenses d'investissement, la question du budget de fonctionnement du lycée demeure : le dernier budget de l'établissement a en effet été élaboré dans des conditions difficiles, alors même que l'effectif des élèves augmentait. Il serait bon qu'à l'avenir nous puissions éviter d'acrobatiques contorsions budgétaires pour maintenir le fonctionnement convenable de ce lycée, dont la charge, je le rappelle, revient à l'État.

Je souhaiterais également insister, monsieur le ministre, sur la nécessité de doter le territoire d'un médecin scolaire, et j'espère vivement que vous pourrez donner une suite favorable à cette requête Pour près de 4 200 élèves du primaire et du secondaire, répartis sur les deux îles, cela ne semble pas une demande anormale.

Vos services ont toujours souhaité que nous ayons recours aux médecins de l'agence de santé, mais cela devient de plus en plus compliqué, car l'agence a déjà ses propres problèmes.

J'en viens maintenant aux sections d'enseignement dispensé à Wallis-et-Futuna. Celles-ci sont évidemment limitées en nombre et visent le plus possible à s'adapter aux besoins du territoire et aux aspirations des jeunes, notamment pour les sections technologiques et professionnelles.

La conséquence cruciale du faible nombre de filières d'enseignement, son pendant logique, est que nous sommes obligés d'envoyer de nombreux lycéens à l'extérieur du territoire pour poursuivre leur scolarité. Ils sont plus d'une centaine en métropole, et plus encore en Nouvelle Calédonie et en Polynésie française.

La convention de développement 2003-2007 avait prévu qu'une mission soit envoyée sur le territoire. Elle devait étudier l'organisation et les aspects administratifs de l'enseignement et examiner le cas des lycéens ne trouvant pas de filières de formation conformes à leur souhait au plan local. Elle devait en déterminer les conséquences en termes d'organisation et de coût financier, tout en identifiant des solutions.

Rien n'a été fait jusqu'à maintenant, monsieur le ministre, mais peut-être pourrez-vous me donner quelques assurances sur ces deux points de la convention.

Ce que nous espérons par-dessus tout, c'est que l'État apporte son aide aux étudiants et facilite l'accueil, le suivi et l'accompagnement de ces jeunes, obligés de s'exiler à 20 000 kilomètres de chez eux, qui subissent un choc culturel et des difficultés matérielles que chacun peut aisément imaginer.

Enfin, monsieur le ministre, même si cela ne fait pas tout à fait partie de la mission « Enseignement scolaire », je profite de votre présence pour rappeler, au nom de mes collègues parlementaires des collectivités du Pacifique, que nos étudiants ne bénéficient toujours pas en métropole du quatrième terme boursier versé par les CROUS aux autres étudiants d'outre-mer.

Cette discrimination est anormale, et j'espère vivement que vous pourrez donner une suite favorable à notre demande maintes fois réitérée auprès de vos services et restée jusqu'à ce jour lettre morte.

Je voterai bien entendu les crédits de la mission « Enseignement scolaire », avec l'espoir que les problèmes que je vous ai exposés trouveront des solutions. Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, des réponses que vous voudrez bien apporter aux préoccupations de Wallis-et-Futuna, ce « petit morceau de France » situé à l'autre bout du monde et handicapé par son isolement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.

M. René-Pierre Signé. C'est le bouquet final !

M. Bernard Piras. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis particulièrement heureux d'intervenir aujourd'hui sur l'enseignement agricole, étant moi-même issu de cette grande famille. Malheureusement, trop souvent et injustement méconnu, il ne bénéficie pas de la reconnaissance à laquelle il pourrait légitimement aspirer, eu égard à sa qualité et à sa place dans notre société, notamment dans les secteurs ruraux.

Cet enseignement présente de nombreuses particularités : une dimension réduite, puisqu'il ne représente que 2,15 % du budget de la mission « Enseignement scolaire » ; une pédagogie concrète ; l'ancrage territorial de ses établissements, qui sont très étroitement liés à l'économie et à la vie rurales ; un rattachement au ministère de l'agriculture. Ce sont autant de facteurs qui, s'ils peuvent sans doute expliquer le cloisonnement de l'enseignement agricole, permettent par ailleurs de mieux comprendre sa réussite.

La nouvelle architecture budgétaire réunit au sein d'une même mission l'enseignement agricole et l'enseignement relevant de l'éducation nationale. Si je reconnais que le rapprochement présente certains avantages, il appelle de notre part une grande vigilance, afin d'éviter que l'enseignement agricole, au vu de sa taille beaucoup moins importante, soit totalement « absorbé ». Il doit en effet pouvoir conserver sa spécificité, qui a largement contribué à son succès.

L'intitulé « Enseignement agricole » est d'ailleurs trompeur, car cet enseignement a su élargir ses compétences avec le temps, pour concerner désormais la ruralité dans son ensemble, ce qui s'est traduit par une augmentation importante des effectifs et des offres de formation.

La production, la transformation, l'aménagement et les services en milieu rural sont autant de secteurs professionnels en faveur desquels l'enseignement agricole intervient. En outre, il est en prise directe avec les questions sociétales émergentes, que ce soit l'alimentation et la santé, les énergies renouvelables, la préservation de l'environnement, les OGM, la sécurité sanitaire. Tout cela l'amènera inéluctablement à introduire ces nouveaux enjeux dans ses formations.

Ces faits, au demeurant incontestables, devraient nous inciter au plus grand optimisme pour l'avenir de l'enseignement agricole. Paradoxalement, la réalité est tout autre : un sentiment de profond malaise, pour ne pas dire de mal-être, est ressenti au sein de l'ensemble des établissements, répartis sur tout le territoire, notamment dans les zones de l'arrière-pays. J'ai rencontré plusieurs représentants des personnels : qu'ils émanent du public ou du privé, ils expriment chaque fois le même abattement et la même incompréhension devant la destruction, année après année, de ce si bel outil éducatif.

Si vous en doutiez, monsieur le ministre, je vous recommande la lecture de l'excellent rapport d'information de notre collègue Françoise Férat.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Bravo, madame Férat !

M. Bernard Piras. L'origine de ce malaise est double : d'une part, une diminution constante et drastique, depuis 2003, des moyens consacrés par l'État à l'enseignement agricole ; d'autre part, une absence de projet mobilisateur et fédérateur. Un de mes interlocuteurs m'a confié, d'ailleurs à juste titre : « Il est inexact de dire que les choix budgétaires ne reposent sur aucun projet ; celui-ci est simple : fermer des classes et refuser des élèves faute de places. »

De nombreuses statistiques en attestent, l'enseignement agricole est en pleine asphyxie financière. Sans vouloir vous abreuver de chiffres, je rappelle tout de même que, depuis 2003, près de 600 emplois ont été supprimés dans l'enseignement technique agricole public. Pour 2007, 56 emplois disparaissent, dont 48 dans l'enseignement public, 10 concernant des emplois d'enseignants. Pour mémoire, rappelons qu'en 2006 l'enseignement agricole public a perdu 181 emplois et a vu ses crédits de vacation amputés de 2,5 millions d'euros.

Monsieur le ministre, personne n'a à gagner à une opposition entre l'enseignement public et l'enseignement privé.

M. Gilles de Robien, ministre. C'est vrai !

M. Bernard Piras. L'enseignement agricole, dans son ensemble, est incontestablement mal traité.

D'une part, l'enseignement privé l'est à n'en pas douter : il attend toujours la publication d'un décret modifiant le décret n° 89-406 du 20 juin 1989, modifié, qui doit permettre, notamment, de poursuivre, voire d'amplifier, le reclassement de 2 200 agents de troisième catégorie.

D'autre part, l'enseignement agricole public l'est au moins tout autant.

Ainsi, la réduction des moyens qui lui sont consacrés a eu plusieurs conséquences : l'érosion constante de la part des effectifs scolarisés par les établissements publics, qui s'élève à présent à moins de 38 % ; la précarisation accrue des emplois ; la baisse régulière des crédits de formation continue des personnels ; le plafonnement du recrutement des élèves, au mépris de la mission d'insertion scolaire que la loi d'orientation agricole de 1999 lui avait confiée ; l'impossibilité de redoublement pour certains élèves de terminale ; le regroupement de classes de différents niveaux et de différentes filières ; l'impossibilité de pouvoir effectuer certains dédoublements réglementaires.

Mes chers collègues, je pourrais multiplier les illustrations de cette triste réalité, car la situation de l'enseignement agricole public est bien celle que je vous décris. Je vous invite vivement à vous rendre chacun dans un établissement de votre département afin de prendre conscience du désarroi qui y règne. D'ailleurs, monsieur le ministre, je ne doute pas que vous et votre collègue ministre de l'agriculture aurez à coeur d'aller « sonder les âmes » au sein des établissements de la Somme et de la Charente-Maritime !

Si mon propos vous semble quelque peu alarmiste, il est parfaitement justifié par la teneur de mes échanges avec les personnels des établissements drômois. Par exemple, la limitation des effectifs à 24 élèves par classe se traduit pour l'un par une diminution de 50 à 60 élèves sur 360 actuellement et, pour l'autre, par le non-accueil de 32 élèves pour un effectif actuel de 425 élèves.

Cette réduction a pour effet d'augmenter le coût de l'élève formé et d'induire des difficultés financières très importantes pour l'équilibre de fonctionnement des établissements concernés. De même, elle laisse en suspens de nombreuses questions : que deviennent ces élèves non accueillis par l'enseignement agricole public ? Quels choix laisse-t-on aux élèves et aux familles en termes d'orientation ? Doit-on accepter que celle-ci se fasse par défaut ?

Monsieur le ministre, nombreux sont ceux qui attendent avec impatience les réponses que vous pouvez apporter à ces légitimes interrogations.

J'illustrerai mon propos par un autre exemple : un des établissements que j'ai visités a vu sa dotation horaire globale diminuer de 3 240 heures entre la rentrée 2004 et celle de 2006, soit une baisse de 11,5 %, ce qui correspond à 5 équivalents temps plein. Sur le plan pédagogique, les effets néfastes sont nombreux : regroupements, suppressions d'heures et limitations en matière de recrutement.

L'enseignement agricole est contraint de « naviguer à vue ». Je dénonce cette logique, qui est le fruit d'une gestion purement comptable, car, c'est désormais criant, le Gouvernement laisse cet enseignement en quasi-déshérence. Une diminution de moyens serait compréhensible si elle était justifiée par la mise en oeuvre d'un projet, qu'il nous serait alors loisible d'approuver ou de critiquer. Mais peut-être projetez-vous, en définitive, d'encourager cette dégradation, qui aboutit à la fermeture des formations, sans aucune réaction du ministère concerné.

Six rapports consacrés à l'avenir de l'enseignement agricole ont été remis ou sont en cours de rédaction, la plupart à la demande du Gouvernement. L'ensemble de ces études, auxquelles peut être adjointe la concertation que le ministère de l'agriculture vient de lancer, pourraient être interprétées comme le signe d'un intérêt prononcé pour cet enseignement. Néanmoins, cette réflexion, à laquelle je ne peux que souscrire, arrive bien tard, à la fin d'une législature marquée avant tout par une réduction sans précédent des moyens.

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous justifier votre politique conduite en matière d'enseignement agricole, laquelle vise à ne porter une réflexion qu'après avoir « cassé » ce merveilleux outil éducatif, à l'identité et à la réussite indéniables ? La méthode suivie par ce gouvernement manque cruellement de logique. En 2002, vous avez pourtant hérité d'un enseignement agricole en plein essor. (M. le ministre s'exclame.) Plus de 500 postes ont été créés entre 2000 et 2002. De plus, le lancement du projet PROSPEA, projet pour le service public de l'enseignement agricole, a porté à l'époque une ambition de refondation s'appuyant sur la concertation et l'implication des différents acteurs. La politique que vous avez conduite depuis a tout remis en cause.

La semaine dernière, à l'occasion d'une question d'actualité adressée à M. le ministre de l'agriculture, mon collègue Charles Gautier a tenté de faire prendre conscience au Gouvernement de l'ampleur du malaise. Je dis bien « tenté », car la teneur de la réponse témoigne d'un « autisme » surprenant. L'alibi de l'héritage et le renvoi à des jours meilleurs sont vos seuls arguments. Avouez que cela est bien peu au regard de votre bilan !

Vous comprendrez donc, monsieur le ministre, que nous ne pouvons pas adopter le budget que vous nous présentez, lequel est porteur de l'aggravation d'une situation déjà explosive. À ce propos, je vous transmets, sur leur demande, une pétition des enseignants contenant 2 000 signatures. J'espère que vous en ferez bon usage ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget pour 2007 pour l'enseignement scolaire que j'ai l'honneur de vous présenter est d'abord la traduction d'une politique, d'une ambition pour l'école, en vue de la réussite des élèves.

À partir d'un état des lieux réalisé le plus objectivement possible, à partir de constats partagés et vérifiés, nous vous proposons tout à la fois de rénover et d'innover, pour offrir, tout de suite, le maximum de chances de réussite aux jeunes Français.

Mon ambition pour l'éducation nationale, c'est de trouver les moyens d'action les plus efficaces. Or il ne s'agit pas toujours de moyens budgétaires ou de postes supplémentaires.

M. René-Pierre Signé. Pas toujours, mais souvent !

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le sénateur, votre vision est terriblement réductrice ! (M. Serge Lagauche s'esclaffe.) Le temps passé à discuter de sous ou de postes budgétaires est certes utile, mais c'est autant de temps qui n'est pas consacré à la pédagogie, aux programmes, aux méthodes, à une bonne et saine répartition des moyens en fonction des besoins.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Gilles de Robien, ministre. Augmenter systématiquement les ressources et les effectifs n'est pas la bonne réponse, car c'est tomber dans la facilité et le clientélisme, par souci de complaisance pour certains. À mes yeux, c'est la réussite des élèves qui nous vaudra l'adhésion de la population.

En réalité, ce n'est pas parce que l'on dépense plus que les résultats des élèves sont meilleurs. Le coût annuel d'un lycéen a augmenté de 50 % en quinze ans. Or personne n'oserait affirmer dans cet hémicycle que les performances des élèves ont suivi la même tendance. Certaines enquêtes statistiques de l'OCDE nous le rappellent cruellement, hélas !

Par conséquent, mesdames, messieurs les sénateurs, il nous faut changer de langage et d'approche. Aujourd'hui, je souhaite vous délivrer avant tout un message de confiance : oui, nous sommes en train d'améliorer l'école, grâce à la volonté de la majorité et à l'engagement du Gouvernement ! Quel chemin parcouru en dix-huit mois, en cinq ans ! Les vingt-trois chantiers que je mets en oeuvre actuellement en sont le témoignage.

Ainsi, les savoirs fondamentaux ont été refondés dans le cadre de la loi Fillon. Il s'agit d'en revenir à cette notion élémentaire du socle commun de connaissances : dès le printemps prochain, les premiers programmes mis à jour seront publiés.

L'apprentissage de la lecture a fait l'objet de remarques ironiques. Mais nous avons su le rénover, et un récent rapport de l'inspection générale atteste sa mise en oeuvre effective.

L'enseignement de la grammaire retrouvera enfin prochainement un peu de cohérence et de simplicité, pour être mieux compris non seulement par les élèves mais aussi par les professeurs. Si, en plus, les parents adhèrent au projet, alors nous aurons franchi une étape décisive. Dans un avenir proche, c'est l'enseignement du calcul qui fera l'objet de toute mon attention.

En outre, la formation des maîtres est redéfinie sur des bases plus pratiques et répondra à la demande de nos concitoyens et des professionnels eux-mêmes. J'y reviendrai d'ailleurs dans un instant.

Mon ambition, c'est de proposer une éducation prioritaire, non pas réformée mais rénovée et recentrée, pour être désormais au service de ceux qui en ont le plus besoin.

Je pense en particulier aux 392 000 élèves des 249 réseaux « ambition réussite », au tutorat étudiant dont ils bénéficient, aux chefs d'entreprises qui se mobilisent pour eux. Le 13 décembre prochain, sur mon invitation, ces derniers viendront signer la Charte d'engagement des entreprises au service de l'égalité des chances.

Mon ambition, c'est aussi de promouvoir l'ouverture sociale de l'enseignement supérieur. À ma demande, 1 525 bacheliers ayant obtenu une mention très bien ou une mention bien ont été invités à se porter candidats pour la rentrée 2006 à l'entrée dans les classes préparatoires aux grandes écoles. Ils n'auraient pas eu accès à une telle filière si nous n'avions pas fait cette démarche. Nombre d'entre eux vivent dans des quartiers sensibles, dans des « ghettos, et n'auraient jamais imaginé pouvoir intégrer les classes préparatoires tout simplement parce qu'ils ne connaissaient pas ce dispositif ! Nous leur avons donc proposé de se rendre sur place, pour comprendre le fonctionnement de ce fantastique apprentissage et pour découvrir toute la panoplie des métiers possibles. Au total, 1 525 bacheliers ont répondu présents et se sont inscrits, alors qu'ils auraient pu mettre fin à leurs études avec une mention bien ou très bien ; quel gâchis !

Je tiens à mentionner aussi l'opération que je viens d'engager pour la rentrée prochaine : les parcours de réussite, qui établissent une coopération entre des lycées prestigieux et des lycées de banlieue.

Les lycéens de banlieue pourront accéder aux filières d'excellence de ces lycées prestigieux, filières de pointe que, souvent, ils ne connaissaient pas. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, ces mesures ont l'air de vous faire sourire.

M. Bernard Piras. Non, c'est bien !

M. Gilles de Robien, ministre. Si c'est bien, il faut le dire, non pas pour encourager le ministre, mais pour encourager ces jeunes, bien sûr.

M. Bernard Piras. Mais cela concerne peu d'élèves !

M. Gilles de Robien, ministre. Cela concerne déjà 1 525 élèves. Nous sommes bien au coeur de la mission de l'éducation nationale, d'une ambition qu'elle n'aurait jamais dû abandonner, ambition qu'elle fait de nouveau sienne aujourd'hui.

Je vous sais gré, monsieur Richert, d'avoir rappelé l'importance de la rénovation de la formation des maîtres. Je suis intimement persuadé qu'il s'agit du chantier le plus important que j'aurai eu l'honneur d'entamer et de voir aboutir.

Cette rénovation est l'expression d'une cohérence, celle qui la lie au socle commun des connaissances. En effet, un enseignant se doit de maîtriser les connaissances correspondant aux disciplines qu'il aura à enseigner. Cela suppose une formation disciplinaire et scientifique solide qu'il acquiert, pour l'essentiel, à l'université. Mais il doit aussi se familiariser progressivement avec la façon de transmettre ces connaissances aux élèves sur la base du socle commun de connaissances et des programmes d'enseignement.

Le cahier des charges de la formation des maîtres, que j'ai présenté hier, confirme trois grands principes.

Premièrement, la formation des enseignants est beaucoup plus concrète, pratique, ouverte au monde. Il s'agit également d'une formation en alternance, comprenant un stage en entreprise pour tous les futurs professeurs. Cette formation permet aussi d'apprendre à s'adapter à la diversité des élèves.

Deuxièmement, cette formation est plus continue. Elle commence avant le concours par des enseignements pré-professionnalisants et se poursuit par des périodes de stage pendant les deux années qui suivent l'année de formation.

Troisièmement, cette formation est dispensée par les universités et sera elle-même évaluée afin que soit vérifié le respect du cahier des charges national et garantie la qualité de la formation reçue.

Dès la rentrée 2007, les premiers instituts de formation des maîtres seront intégrés dans les universités.

Ce n'est évidemment qu'un des nombreux chantiers que j'ai ouverts au sein de l'éducation nationale. Je crois que les Français comprennent que celle-ci est en train de changer de visage, progressivement, sans grand plan quinquennal, sans grande loi supplémentaire, mais plus sûrement qu'elle ne l'a jamais fait ! Il a suffi pour cela d'appliquer les textes que la majorité a su voter au bon moment.

Les encouragements du Parlement et les efforts du Gouvernement portent leurs fruits ! Les Français, notamment les parents d'élèves, voient bien que l'éducation nationale bouge, qu'elle se modernise, qu'elle se fait plus efficace pour la réussite de tous les élèves.

Bien entendu, je n'ai pas la naïveté de croire qu'il suffit d'afficher de belles ambitions pour mobiliser cette immense structure qu'est l'éducation nationale.

Pour y parvenir, quatre conditions sont absolument nécessaires : cibler des objectifs précis, responsabiliser les acteurs en développant la culture de projet ; allouer les moyens en fonction des projets ; évaluer les résultats avec des indicateurs de performance précis.

Il s'agit en fait - et je sais, monsieur Longuet, combien vous êtes sensible à cette question - de passer d'une logique purement quantitative à une logique qualitative, qui définit des objectifs, cible des moyens, responsabilise les acteurs et évalue les performances. Tel est notre objectif commun.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cette logique qualitative est celle de la loi organique relative aux lois de finances, que j'ai voulu mettre au coeur du projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. Gilles de Robien, ministre. Toute l'éducation nationale se convertit progressivement à une culture de la performance et du projet : l'enseignement supérieur et la recherche, bien sûr, mais également l'enseignement scolaire.

Reprenons l'exemple des 249 réseaux « ambition réussite » : ils sont fondés sur un projet et un contrat d'objectifs, présentés sur l'initiative des établissements, qui responsabilisent les acteurs concernés et permettent de concentrer les moyens sur des objectifs précis.

L'utilisation ciblée des moyens, c'est aussi la logique qui préside aux programmes personnalisés de réussite éducative, les PPRE.

C'est encore l'allocation des moyens aux académies qui se fait désormais sur la base d'une contractualisation, adossée à des indicateurs de performance. La démarche - je dirais même la philosophie - de la contractualisation progresse. Et je remercie M. Philippe Richert d'en avoir souligné toute l'importance.

Je prendrai un exemple très concret, qui répondra aussi, je l'espère, aux interrogations de M. Gérard Longuet : le cas des décharges d'enseignement.

Dans le projet de budget, et suivant les recommandations d'un rapport de modernisation, nous prévoyons de supprimer 10 % de ces décharges, celles qui ne sont ni justifiées ni équitables. Nous sommes surtout en train de repenser complètement la gestion des heures de décharge, pour passer d'un modèle centralisé, directif, figé et sans souplesse, à une gestion dynamique, en phase avec l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances.

Dans le projet de décret que nous préparons, chaque académie disposera désormais d'une enveloppe budgétaire pour les décharges, que les recteurs auront la responsabilité de répartir. Ainsi, si un établissement propose un projet particulièrement innovant centré sur les technologies de l'information et de la communication, il sera justifié de lui accorder un certain nombre d'heures de décharge, pour permettre à un enseignant de s'investir dans ce projet. Et cette décharge ne sera maintenue que si le projet a fait la preuve de son efficacité au seul bénéfice des élèves.

Pour l'enseignement scolaire public du premier degré, tout d'abord, une hausse de 39 500 élèves supplémentaires, soit moins d'un élève par école, est attendue pour la rentrée 2007. Nous créons donc 500 postes de professeurs des écoles, ce qui nous permet de maintenir le taux d'encadrement sous le seuil de 19 élèves par professeur.

Dans l'enseignement scolaire public du second degré, une baisse d'au moins 30 000 élèves est attendue : c'est l'équivalent d'un établissement scolaire de 1 000 élèves par académie !

Comme je l'ai dit en commission, si nous cédions à la tentation de la calculette, madame David, nous supprimerions plus de 2 300 postes, sans d'ailleurs diminuer les taux d'encadrement.

Mme Annie David. Je n'ai pas cité de chiffres !

M. Gilles de Robien, ministre. Or nous supprimons seulement 2 000 postes, afin que les 300 postes restants puissent renforcer l'enseignement donné aux élèves les plus en difficulté.

Oui, nous donnons plus à ceux qui ont moins. Notre majorité sait le faire ! C'est cela aussi une vraie politique sociale éducative.

Mme Annie David. Nous ne sommes pas convaincus !

M. Gilles de Robien, ministre. Par exemple, grâce aux réseaux « ambition réussite », des jeunes bénéficient déjà quatre soirs par semaine, depuis le mois de septembre dernier, d'études accompagnées.

Je pense aussi aux PPRE, mis en place à la rentrée en sixième, qui pourront être étendus à un nombre plus important d'élèves, et notamment aux élèves de cinquième, à partir de la rentrée 2007.

En outre, des efforts de gestion vont permettre de mobiliser, selon deux axes, 2 780 équivalents temps plein.

Le premier axe concerne les surnombres. Dans les disciplines où des professeurs sont encore en sureffectif, environ 500 départs en retraite ne seront pas remplacés.

Quant aux décharges de service - c'est le deuxième axe - elles représentent l'équivalent de 23 000 emplois de professeurs qui ne sont pas devant les élèves.

À la suite des observations de la Cour des comptes et du Parlement, et à partir des conclusions de l'audit de modernisation, 10 % de ces décharges, ce qui représente 2 300 emplois, sont supprimées dans le budget 2007, sans incidence sur la qualité du service rendu.

Je rappelle à cette occasion que la situation des associations sportives scolaires, celle des professeurs d'éducation physique et sportive, ainsi que celle des professeurs de classes préparatoires et de sections de techniciens supérieurs, reste inchangée.

Ces suppressions d'emplois n'entraînent ni changement dans le taux d'encadrement des élèves ni réduction des horaires d'enseignement. Elles contribuent, en revanche, à une meilleure utilisation de la ressource enseignante. Ce sont des euros bien placés !

Cette mobilisation de la ressource humaine s'inscrit, là encore, dans le cadre de la politique d'égalité des chances.

En plus des moyens horaires déjà réservés au soutien, nous avons inscrit au budget les crédits permettant de recruter 1 000 nouveaux assistants pédagogiques, qui s'ajoutent aux quelque 5 000 déjà recrutés en 2006. Ils seront affectés en priorité aux établissements de l'éducation prioritaire.

Il faut aussi ajouter les 466 postes supplémentaires de professeurs créés, d'une part, pour la scolarisation des élèves handicapés dans les nouvelles unités pédagogiques d'intégration et, d'autre part, pour les dispositifs relais, qui prennent en charge les élèves les plus difficiles.

Cette même logique s'applique à l'enseignement privé sous contrat, dans le respect attentif du principe de parité : 100 contrats sont ainsi créés dans le premier degré, 400 contrats sont retirés dans le second degré, et 476 contrats supprimés au titre des décharges.

J'en viens à la question des moyens non enseignants, avant de répondre aux questions que vous m'avez posées, mesdames, messieurs les sénateurs.

Le rapport d'audit sur l'organisation des examens et des concours a montré que des mesures d'amélioration administrative pourraient dégager plus de 400 postes sur toute la France. Nous appliquerons ces mesures !

Par exemple, les sujets du brevet en 2007 seront élaborés non plus au niveau interacadémique, mais au plan national. De même, on dénombrait 20 000 sujets pour les certificats d'aptitude professionnelle, les CAP, et les brevets d'études professionnelles, les BEP. Nous nous organiserons différemment pour n'en fabriquer « que » 5 000.

Aucun poste administratif n'est supprimé dans les collèges et lycées, en dépit de la baisse des effectifs. Sur ce point, j'ai voulu donner une suite favorable aux demandes, qui m'apparaissent justifiées, des chefs d'établissement.

Il en va de même pour le nombre total des surveillants et assistants d'éducation, qui reste identique, malgré la baisse des effectifs d'élèves. Il s'agit de garantir la présence d'adultes dans les établissements scolaires et donc la sérénité des études, au moment où le Gouvernement se mobilise contre la violence en milieu scolaire.

Par ailleurs, j'ai voulu que l'Éducation nationale fasse un effort particulier pour la santé des élèves.

Le plan de recrutement des infirmières sera poursuivi. Il y aura donc, après la création de 300 nouveaux postes à la rentrée 2006, 300 nouveaux postes à la rentrée 2007. Nous y ajouterons, à la rentrée 2007, la création de 50 postes de médecins et d'assistantes sociales et de 10 postes supplémentaires, à la suite de l'adoption d'un amendement de l'Assemblée nationale.

Enfin, l'accueil des élèves handicapés sera amélioré : 2 800 contrats aidés destinés à l'accompagnement individuel d'élèves ont déjà été délégués, en plus des moyens existants, dès le mois d'octobre 2006 ; 500 auxiliaires de vie scolaire supplémentaires seront délégués aux académies dès le 1er janvier 2007, de façon à poursuivre la création des dispositifs d'accueil que sont les unités pédagogiques d'intégration.

Chacun peut constater ainsi que la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005, que notre majorité a proposée et votée de façon consensuelle, est très favorable à ces personnes et qu'elle est bien appliquée. Nous faisons plus et mieux, notamment pour la scolarisation des enfants handicapés.

Grâce à ce projet de budget pour 2007, nous pourrons construire une école plus responsable, où les moyens publics sont mieux utilisés, donc mieux maîtrisés, au profit des élèves ; une école plus performante, qui sait définir ses objectifs pédagogiques, élaborer un enseignement de qualité, s'adapter aux capacités de tous les élèves, pour les faire tous réussir ; enfin, une école plus juste, où l'égalité des chances se traduit dans les faits par l'aide aux élèves handicapés ou vivant en milieu défavorisé.

Je souhaite enfin que notre école soit plus pragmatique, c'est-à-dire plus ouverte au monde de l'entreprise et mieux connectée aux métiers.

Vous avez, madame David, évoqué l'enseignement professionnel. Il est vrai que nous avons fait des efforts pour promouvoir cet enseignement, notamment grâce à l'apprentissage junior.

Je n'ai pas l'intention de négliger la formation professionnelle sous statut scolaire, qui reste d'ailleurs largement majoritaire. Mais, comme l'a souligné un récent audit, notre offre de formation doit être revue, car elle est déficitaire dans certains secteurs et pléthorique dans d'autres. Nous sommes en train de réfléchir à des redéploiements en fonction des besoins de l'économie locale.

S'agissant de l'orientation, je souhaite vous rassurer, madame David. Pendant des années, on a bloqué les élèves dans les sections générales, pour des raisons purement idéologiques. Là encore, je revendique le pragmatisme : je n'ai pas l'intention de tomber dans le même travers, en les enfermant dans les voies professionnelles.

Je ne néglige aucune opportunité qu'il s'agit de saisir grâce à la complémentarité, et non la concurrence, entre l'enseignement dispensé par l'éducation nationale et l'enseignement technique. J'essaie aussi d'appliquer ce principe à l'enseignement agricole, domaine qui vous préoccupe particulièrement, madame Férat et monsieur Longuet.

Vous avez déploré, madame Férat, que, dans l'exécution du budget de 2006, une partie des crédits votés par le Parlement n'ait pas été laissée à la disposition de l'enseignement agricole. Il est vrai que le programme « Enseignement technique agricole » a été touché, en 2006, par une mesure de mise en réserve de 19 millions d'euros. Mon collègue Dominique Bussereau a pu obtenir un premier dégel de 10 millions d'euros. Très attentif à l'attachement des sénateurs au budget de l'enseignement technique agricole, le Gouvernement a décidé de procéder à une seconde phase de dégel d'un montant de 6 millions d'euros. Je crois donc avoir répondu à votre question, madame Férat.

Au total, 85 % des crédits mis en réserve sont restitués à ce programme. Seuls manqueront les crédits destinés, avec les crédits d'autres ministères mis à contribution, à financer le décret d'avance « influenza aviaire », compte tenu des difficultés apparues dans la filière avicole et de la solidarité nationale qu'il a fallu mobiliser.

Je répondrai maintenant à M. Mouly que je remercie sincèrement d'avoir évoqué nombre de sujets très importants et qui a commencé par saluer le bilan des réseaux « ambition réussite ».

Donner plus à ceux qui en ont le plus besoin, c'est cela l'égalité républicaine, et les PPRE ou les dispositifs relais apportent des réponses adaptées aux élèves en situation de fragilité par rapport à l'école.

En créant les réseaux « ambition réussite », j'ai voulu donner à l'éducation prioritaire une nouvelle impulsion, j'ai même dit parfois une dernière chance.

La dynamique d'origine est en passe d'être retrouvée, même s'il est sans doute trop tôt pour en faire une première évaluation. Celle-ci est confiée aux inspections générales qui assurent un suivi de la mise en place du réseau.

Je peux d'ores et déjà vous dire que ces collèges ont suscité un vif intérêt dans la société civile, ont attiré des partenariats d'excellence, une coopération avec la grande chancellerie de la Légion d'honneur, des partenaires culturels de première importance, un partenariat avec l'ordre des architectes, des grandes écoles ou des entreprises. Tous veulent aider les élèves et cela constitue un grand espoir pour notre démocratie.

Je veux évidemment maintenir cette dynamique et je réunirai prochainement les chefs d'établissements des réseaux « ambition réussite » pour établir un premier bilan et prévoir des mesures d'approfondissement.

Quant aux PPRE, ils répondent au même souci d'apporter une aide ciblée aux élèves qui en ont besoin. Nous n'avons pas assez de recul pour envisager des infléchissements, mais la parution prochaine de directives sur le volet éducatif des contrats urbains de cohésion sociale devrait permettre de parvenir à une meilleure complémentarité entre tous les dispositifs mis en place pour venir en aide aux élèves et à leurs familles.

Enfin, les dispositifs relais concernent des élèves particulièrement fragilisés, en rupture scolaire. Ils font leurs preuves et j'entends les conforter avec le souci de permettre aux élèves de pouvoir réintégrer le niveau scolaire où ils devraient être normalement scolarisés.

Pour ce qui est de la scolarisation des enfants handicapés, de la formation des auxiliaires de vie scolaire, les AVS, et des emplois de vie scolaire, les EVS, vous soulignez un point essentiel : il faut fidéliser et professionnaliser ces personnels qui accompagnent les élèves handicapés car ils font un travail tout à fait remarquable.

L'an dernier, 4 500 assistants d'éducation ont été formés. Cette année, une formation systématique de nouveaux EVS est organisée. Elle porte sur des modules de soixante heures réparties en séance de trois heures sur vingt semaines. Une convention entre le ministre de l'éducation nationale, le ministre délégué aux personnes handicapées et six associations a été élaborée pour mobiliser leur expertise dans la formation. Il est en effet indispensable de renforcer l'attractivité des emplois proposés par la construction de l'avenir professionnel de ces personnels contractuels maintenant formés et, en tout cas, extrêmement dévoués.

Nous ferons d'ailleurs des propositions au Premier ministre en ce sens pour l'accès à la fonction publique par concours interne, par la reconnaissance du savoir-faire professionnel, par la validation des acquis de l'expérience. Le rapport remis récemment par le député Guy Geoffroy ouvre de nouvelles pistes ; j'y travaille avec mon collègue Philippe Bas.

Madame David, vous avez dit que ce budget manquait d'ambition. C'est un peu blessant parce que c'est tout le contraire.

J'ai beaucoup insisté sur l'idée que ce budget avait un sens pour la politique éducative et je regrette de ne pas avoir été suffisamment explicite pour vous en avoir convaincue. Le sens de ce budget, c'est d'être au service d'une ambition.

À chacune de mes visites dans les établissements scolaires, en particulier ceux où se trouvent les élèves les moins favorisés, je constate combien le lien social a vocation à se rétablir dans nos écoles, notamment à travers les réseaux « ambition réussite ».

Je pense aussi à l'opération 100 000 pour 100 000. Des étudiants viennent dans les établissements scolaires, les collèges, les lycées, pour tendre la main à des plus jeunes en leur disant : « Je suis dans l'enseignement supérieur, viens voir une faculté, aie envie comme moi d'y aller, je vais te montrer le chemin ». C'est une démarche de générosité qui mérite beaucoup de respect que celle de ces étudiants, qui ne sont pas encore 100 000 d'ailleurs, ce nombre étant un objectif à atteindre !

Je suis également très sensible au fait que 1 500 jeunes - c'est un début - aient pu intégrer une classe préparatoire, car ces 1 500 jeunes seraient restés « encalminés » dans leur quartier. Cette mesure leur permet d'en sortir et d'accéder aux plus grandes classes préparatoires qui leur donneront accès peut-être aux plus grandes écoles. Jamais ils n'y auraient pensé sans cette main tendue.

Telle est notre ambition d'égalité des droits, des accès et des chances pour les jeunes en situation sociale en difficulté.

Vous m'avez interrogé, madame, sur la formation des EVS. Tous n'y ont pas eu accès, c'est vrai, mais tous pourront en bénéficier, il faut un peu de temps, je ne veux pas me précipiter, je souhaite inscrire mon action dans le temps. Il doit s'agir d'une formation de qualité et non d'une formation dispensée à la va-vite.

S'agissant des infirmières, 300 postes ont été créés en 2006, madame David, et pour les médecins scolaires, ce n'est pas dix mais cinquante plus dix, et plus vingt pour les personnels.

Lors de la première rencontre de l'éducation nationale pour la santé que j'ai organisée le 28 novembre dernier à la Sorbonne, j'ai constaté l'engagement des professionnels de santé au service des élèves et leur satisfaction des créations de postes que j'ai pu leur annoncer, aussi bien d'ailleurs pour la médecine scolaire que pour la médecine de prévention des personnels.

Enfin, je m'inscris en faux contre votre affirmation, madame David. La présence des adultes dans les établissements ne faiblit pas, bien au contraire. Nous avons créé 5 000 postes d'assistants pédagogiques en 2006 plus 1 000 en 2007. Savez-vous combien il y a d'EVS aujourd'hui ? Peut-être les sous-estimez-vous, il y en a 52 000, madame. Quand vous ferez le compte de tous ces emplois, vous ne pourrez plus affirmer qu'il y a moins d'adultes aujourd'hui dans les établissements : il y en a au contraire davantage

Mme Annie David. Et ceux que vous avez supprimés, monsieur le ministre ?

M. Gilles de Robien, ministre. Je réponds maintenant à M. Bodin, qui m'a interpellé, quelquefois sur un ton un peu ironique, sur la baisse démographique, la modernisation de la gestion, le recentrage des élèves qui en ont le plus besoin dans les réseaux « ambition réussite », les handicapés, la politique des langues ou les efforts à faire pour l'enseignement supérieur et la recherche.

Oui, monsieur le sénateur, ce budget commence à rétablir les priorités, et c'est dans l'enseignement supérieur que l'on a le plus besoin d'argent. Vous le savez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, puisque l'OCDE a clairement précisé que la France était le pays qui consacrait le plus de moyens à l'enseignement primaire et à l'enseignement secondaire et qui avait des résultats moyens. Or, pour l'enseignement supérieur, on manque d'argent ; c'est la raison pour laquelle nous opérons un rétablissement. Mais nous ne nous en cachons pas : il était nécessaire de rétablir des moyens en faveur de l'enseignement supérieur, et c'est bien ainsi.

S'agissant des directeurs d'école, monsieur Bodin, mes prédécesseurs ont mis dix ans pour généraliser une décharge d'un jour par semaine dans les écoles à cinq classes. Pour ma part, j'ai généralisé en une fois, à la rentrée 2006 - j'étais là depuis quelques mois -, cette même décharge pour les directeurs d'école à quatre classes. Cela a été vite fait bien fait et, en plus, ces directeurs peuvent disposer chacun, s'ils le souhaitent, d'un EVS.

On a dit qu'ils n'en voudraient pas, mais 28 000 directeurs d'école ont demandé un EVS. On ne peut donc pas prétendre que c'était une mauvaise mesure.

À propos de la note de vie scolaire, monsieur Bodin, il faut que vous changiez d'avis. Tout s'apprend, même de bien se comporter, de respecter un règlement intérieur, d'être ponctuel et assidu. Ce n'est pas inné. Il est donc normal d'évaluer le comportement des élèves et surtout d'en apprécier l'évolution. On ne demande pas à tous les élèves le même niveau le 1er septembre, mais on regarde les progrès qui sont faits par chacun et ce sont ces progrès qui seront évalués à la fin de chaque trimestre.

Ces mesures sont déjà en place, elles seront appliquées dans 99 % des cas ; nous pourrons les évaluer ensemble.

Si l'on veut lutter contre la violence, notamment la violence scolaire, si l'on veut inciter au respect, à la solidarité, à l'apprentissage des valeurs de la République, il faut passer par la valorisation de ces apprentissages, en donnant à ces jeunes des repères. La note de vie scolaire constitue l'un d'entre eux ; elle permet de savoir si le jeune est en progrès ou si au contraire il ne fait aucun effort de vie en société. Car l'élève d'aujourd'hui qui vit dans sa classe sera le citoyen de demain. Si à dix ans, douze ans ou quinze ans, il n'a pas de repères pour savoir s'il est sur la bonne voie, comment se conduira-t-il à dix-huit ans ?

Monsieur Nogrix, j'ai beaucoup apprécié votre intervention. Je constate avec intérêt que vous approuvez l'essentiel du budget de l'éducation nationale et de la politique éducative du Gouvernement.

Je reviendrai sur les crédits affectés à l'enseignement catholique lors de la discussion des amendements, lorsqu'il sera question de l'enseignement privé. J'insiste simplement sur le nécessaire respect du principe de parité. J'ai été très attentif au fait qu'il soit appliqué dans les deux sens, en plus et en moins. Par exemple, l'honneur de l'école dans ce pays, est de faire en sorte que les enfants handicapés soient scolarisés ; 166 postes sont créés dans l'enseignement public dans les unités pédagogiques d'intégration, les UPI, 34 le sont également dans les UPI de l'enseignement privé ; il n'aurait pu en être autrement.

Par ailleurs, j'ai parfaitement conscience du fait que l'évolution démographique dans l'enseignement privé n'est pas identique selon les académies. Le ministère de l'éducation nationale travaillera avec le secrétariat général de l'enseignement catholique pour répartir au mieux les réductions de moyens en fonction des besoins.

La parité n'est pas qu'un concept budgétaire. Elle exprime aussi la garantie de l'équité dans le respect des choix de chacun. C'est la traduction d'un accord qui a été exprimé, même s'il n'a pas été écrit. Si, un jour - je l'ai dit très clairement à l'Assemblée nationale - dans un consensus parfait, tout le monde est prêt à mettre sur la table les chiffres, les moyens, les postes mais aussi la demande des parents d'élèves pour voir si cette parité est bien respectée, je me plierai à l'exercice. Cela fait partie de l'exercice d'une liberté, d'un choix.

Monsieur Carle, je vous remercie d'avoir salué les 23 chantiers que j'ai ouverts.

J'ai reçu, le 29 novembre dernier, l'intersyndicale des organisations des personnels enseignants du second degré sur le projet de décret. Il s'agissait de faire un point d'étape après les audiences que j'ai accordées individuellement à chacune des fédérations représentatives au cours du mois de novembre. J'ai rappelé une nouvelle fois que le projet de décret modifiant le décret de mai 1950 - il s'agit tout de même d'un décret qui date de cinquante-six ans - vise à moderniser la définition du service des enseignants et à l'adapter aux réalités pédagogiques d'aujourd'hui.

J'ai pris soin de garantir que le principe des trois heures de formation, entraînement et animation sportifs dans le service des enseignants d'EPS était maintenu, je vous le confirme. Il est évident que cette garantie est conditionnée à l'exercice effectif de ces activités. Cette question fera de nouveau l'objet d'une explication le 11 décembre prochain devant le comité technique paritaire ministériel.

Quant aux bourses, monsieur le sénateur, j'y reviendrai lors de l'examen des amendements.

Monsieur Fortassin, « être compris par ceux à qui l'on s'adresse », la formule m'a beaucoup plu. Vous avez tout à fait raison, c'est ce que j'ai essayé de faire à travers les réformes de la lecture, de la grammaire et bientôt du calcul, car les enseignants ne comprenaient pas ce qu'on leur demandait d'enseigner et ils le disaient : « on ne comprend pas les textes ».

Le socle commun, c'est l'ensemble de connaissances que tout élève de la République doit avoir en sa possession à seize ans. Mais les professeurs des IUFM devront acquérir aussi ce socle commun de connaissances et de compétences. C'est une partie de l'objet de la réforme des IUFM.

S'agissant des ZEP, vous avez parlé des réseaux « ambition réussite » et vous avez dit que l'on y envoyait les enseignants récemment formés. Je vous assure que ce n'est plus le cas.

Il y a encore des jeunes enseignants qui y vont, mais nombre d'entre eux, à la sortie des IUFM, souhaitent aller dans les ZEP par vocation et par générosité. Ils ont 23 ans, 24 ans ou 25 ans et ils veulent commencer leur carrière dans une ZEP. Ils ne commencent pas par le plus facile, mais peut-être par le plus enthousiasmant.

Parallèlement, pour les collèges « ambition réussite », j'ai voulu qu'il y ait mille professeurs référents. On les avait d'abord appelés professeurs « expérimentés ». Mais ce n'était pas agréable pour les autres professeurs, parce que cela avait l'air de sous-entendre que, eux, n'étaient pas expérimentés. Mille professeurs référents ont donc été envoyés dans 249 collèges ; cela fait quand même quatre professeurs référents ayant déjà plusieurs années d'expérience par établissement.

Cette mesure favorisera l'élaboration des projets « ambition réussite » ; elle constitue une vraie relance de l'éducation prioritaire.

Vous avez parlé du socle, de la formation des maîtres, du principe de laïcité qui est inscrit dans le socle. Il le sera aussi dans le cahier des charges des IUFM.

Vous avez évoqué les chefs d'établissement. Nous sommes d'accord. Vous avez pu constater qu'à l'occasion de leur manifestation j'ai admis que leurs charges étaient lourdes ; mais l'État n'est pas seul à les accroître, les collectivités locales le font aussi. Une mise à plat de leurs charges et de leurs conditions de travail est nécessaire. Elle a déjà commencé au ministère et j'apporterai des réponses au terme des concertations qui, pour l'instant, se poursuivent dans un excellent état d'esprit.

Vous avez pu voir dans quel état d'esprit se trouvaient les manifestants. Leur message était le suivant : nous avons beaucoup de boulot, pensez à nous ; la négociation est engagée, poursuivons-la ! ».

Face à cette situation, j'ai pris des initiatives. J'ai ainsi fait réaliser et reproduire à 11 0000 exemplaires un DVD du film La Séparation, que j'ai fait distribuer dans tous les lycées et collèges. Je m'efforce, dans la mesure de mes moyens, d'aider ces personnels dans leur tâche importante et complexe, au centre des relations entre les enseignants, les parents d'élèves et l'administration.

Monsieur Lagauche, vous souhaitez que l'on fasse des efforts pour la scolarisation des enfants handicapés. Comme je vous comprends ! En 2006, 153 000 élèves handicapés sont scolarisés en milieu ordinaire. On compte 3 940 CLIS, les classes d'intégration scolaire, pour 40 000 élèves, et plus d'un millier d'unités pédagogiques d'intégration, les UPI, qui scolarisent près de 8 000 élèves en collèges et en lycées. Nous atteindrons 2 000 UPI d'ici à 2010, avec un rythme de 200 créations par an.

Le nombre d'assistants en vie scolaire passera de 6 425 en 2006 à 6 925 en 2007, et le potentiel d'accompagnement sera porté de 10 500 emplois en 2006, dont 9 000 pour l'accompagnement individuel, à plus de 11 000 personnes en 2007, dont plus de 9 500 pour l'accompagnement individuel.

Les crédits consacrés au matériel pédagogique adapté, qui atteignaient 23 millions d'euros en 2006, seront majorés de 14 millions d'euros en 2007, dont 2 millions d'euros grâce à un amendement. Nous sommes désormais dans une phase de renouvellement et non plus dans une période d'acquisition initiale.

Monsieur Lagauche, s'agissant de la liberté pédagogique, je ne peux pas accepter des formules qui, pour être raccourcies, en deviennent inexactes. Oui, la liberté pédagogique existe, mais il faut citer tout le texte : « La liberté pédagogique s'exerce dans le cadre des textes ministériels ». Nous sommes d'accord ?

M. Gilles de Robien, ministre. Si nous sommes d'accord, vous auriez dû donner lecture de toute la phrase.

M. Serge Lagauche. La pédagogie, ce n'est pas le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Non, mais le ministre définit les programmes,...

M. Serge Lagauche. Tout à fait !

M. Gilles de Robien, ministre.... et les enseignants sont chargés de les respecter. La liberté pédagogique s'exerce donc dans le cadre des textes ministériels. D'ailleurs, monsieur le sénateur, il suffit de dire la loi pour que nous soyons d'accord, puisque nous sommes tous les deux républicains.

M. Ferrand, vous connaissez mon attachement à l'enseignement français à l'étranger.

Sa mission est double : c'est une mission d'attractivité et de rayonnement de la France. Ce rayonnement est d'ailleurs tout à fait extraordinaire, comme j'ai pu le constater lors de mes visites d'établissements français à l'étranger. Tous sont d'une très grande qualité. Ils scolarisent à la fois les enfants de nos compatriotes expatriés mais aussi de nombreux enfants du pays d'accueil, enfants qui diffusent ensuite le rayonnement de la France.

Dans ce domaine, il y a une répartition des compétences, et c'est à mon collègue ministre des affaires étrangères que revient l'honneur d'exercer la tutelle du réseau éminent de l'enseignement français à l'étranger. Au demeurant, la coopération de mon ministère est importante. Je la renforcerai, car je crois à cette action. Je pense à cet égard aux baccalauréats binationaux et j'ai bien perçu votre désir de trouver une dénomination commune pour ces baccalauréats ?

Monsieur Laffitte, je partage votre enthousiasme pour les sections internationales. Elles sont en plein développement, ce dont je ne peux que me réjouir. Leur nombre a augmenté de 12 % ces deux dernières années. L'école internationale qui va être créée à l'occasion de la construction d'ITER s'ajoutera aux 71 établissements à sections internationales que compte déjà notre pays.

Comme vous l'avez indiqué à juste titre, les directeurs d'école et les chefs d'établissement doivent s'ouvrir au monde extérieur, notamment au monde économique et aux partenariats artistiques. Ils le font d'ailleurs de plus en plus.

Monsieur Signé, vous n'avez parlé que du quantitatif. Or, c'est la qualité et la performance de l'enseignement qui nous intéresse le plus. En tout cas, c'est ce qui me motive.

M. René-Pierre Signé. Mais j'ai parlé de la qualité !

M. Gilles de Robien, ministre. S'agissant de la quantité, permettez-moi de rappeler, une fois encore, que les taux d'encadrement sont confortés, le soutien aux élèves en difficulté est mieux organisé et que nous avons fait des efforts en ce qui concerne les PPRE, la scolarisation des enfants handicapés, l'ambition et la réussite à l'école. Les fondamentaux sont mieux définis, les programmes mieux adaptés, afin de permettre à chaque élève d'acquérir un socle de connaissances qui sera pour lui un gage de réussite, un gage d'élévation de son niveau de qualification.

M. René-Pierre Signé. Et les enseignements périscolaires ?

M. Gilles de Robien, ministre. Les enseignements périscolaires, dites-vous ? Eh bien, parlons du plan Borloo ! Grâce à la bonne coordination du plan Borloo de réussite éducative et de l'ensemble des dispositifs que j'ai mis en place, on peut dire que la France n'a jamais fait autant pour l'égalité des chances. Je suis persuadé que vous en avez parfaitement conscience.

Monsieur Laufoaulu, l'accueil des élèves dans les établissements de Wallis-et-Futuna me tient vraiment à coeur. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé d'investir 2,5 millions d'euros en 2006 dans des opérations de réhabilitation et de mise aux normes de sécurité.

S'agissant des moyens de fonctionnement des lycées, des collèges et des écoles, des études sont en cours. Je souhaite qu'elles aboutissent rapidement et j'en partagerai les conclusions avec vous.

En ce qui concerne la création d'un poste de médecin ou d'infirmier scolaire, je devrais être en mesure de vous répondre rapidement pour la rentrée de février 2007.

Enfin, sachez que le vice-rectorat assure désormais une préparation des jeunes de Wallis-et-Futuna à leur arrivée en métropole. Je souhaite que chacune des académies d'accueil suive particulièrement ces jeunes, qui pourront en outre bénéficier bientôt du quatrième terme des bourses de l'enseignement supérieur.

Par ailleurs, j'ai demandé une étude sur la création d'un poste supplémentaire de médecin scolaire ou d'infirmière affecté à la communauté de Wallis-et-Futuna pour la rentrée de février 2007.

Le service d'hygiène et de propreté dans les écoles relève de la responsabilité de la direction de l'enseignement catholique. Pour remplir sa mission, cette direction dispose d'un budget de fonctionnement que l'on appelle le forfait. Le vice-rectorat procède actuellement à une étude précise des besoins de la direction de l'enseignement catholique pour mener à bien sa mission. Une réévaluation du forfait permettrait d'améliorer la qualité de l'accueil dans les écoles sur le plan matériel comme sur le plan pédagogique.

Monsieur Piras, vous avez rappelé, à juste titre, les qualités de l'enseignement agricole. Je suis persuadé que tout le monde, dans cette enceinte, partage ce point de vue.

L'architecture de la mission « Enseignement scolaire » n'est pas contraire aux intérêts de l'enseignement agricole. Les difficultés budgétaires de 2006 ont pu être traitées en accord avec M. Bussereau. La diminution des moyens est proportionnelle à la baisse des effectifs. Il en est de l'enseignement agricole comme de l'enseignement scolaire et de l'éducation nationale dans son ensemble. Nous avons pris des initiatives en faveur d'une meilleure coordination de l'offre de formation agricole avec l'éducation nationale et d'une meilleure information. Un délégué interministériel à l'orientation, Pierre Lunel, aura pour tâche prioritaire de veiller à leur application. Je peux vous assurer de sa mobilisation à cet égard.

M. Bernard Piras. Je ne vous crois pas !

M. Gilles de Robien, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je me suis efforcé de répondre le mieux possible à beaucoup de vos questions, j'ai bien le sentiment que mes réponses ont été partielles, mais elles n'ont en aucun cas été partiales. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article additionnel après l'article 48 (début)

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des amendements portant sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Enseignement scolaire

59 842 555 157

59 534 982 204

Enseignement scolaire public du premier degré

16 129 660 228

16 129 660 228

dont titre 2

16 057 963 548

16 057 963 548

Enseignement scolaire public du second degré

27 882 822 331

27 882 822 331

dont titre 2

27 680 122 901

27 680 122 901

Vie de l'élève

5 332 127 089

5 332 127 089

dont titre 2

3 534 989 146

3 534 989 146

Enseignement privé du premier et du second degré

6 835 503 116

6 835 503 116

dont titre 2

6 105 536 940

6 105 536 940

Soutien de la politique de l'éducation nationale

2 079 553 215

2 077 480 262

dont titre 2

1 338 064 199

1 338 064 199

Enseignement technique agricole

1 582 889 178

1 277 389 178

dont titre 2

859 332 960

859 332 960

L'amendement n° II-171, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

Vie de l'élève

Dont Titre 2

541.119.445

541.119.445

541.119.445

541.119.445

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

12.360.644

11.852.522

12.360.644

11.852.522

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

TOTAL

553.480.089

553.480.089

SOLDE

- 553.480.089

- 553.480.089

La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Il s'agit d'un amendement de conséquence.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné cet amendement ; mais il relève d'un tel bon sens, compte tenu des ajustements d'effectifs de TOS, qu'il aurait obtenu l'adhésion de la commission si elle avait été consultée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-171.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-103 rectifié est présenté par MM. Seillier et Mouly, Mme B. Dupont, MM. Darniche, du Luart et Lardeux, Mme Hermange, M. Bailly, Mmes Rozier et Desmarescaux.

L'amendement n° II-117 rectifié bis est présenté par MM. Texier, Esneu, Martin, de Broissia et Trillard.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

Vie de l'élève

Dont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

TOTAL

15 000 000

15 000 000

15 000 000

15 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Georges Mouly, pour présenter l'amendement n° II - 103 rectifié.

M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, dans mon intervention, je vous ai interrogé sur la présence des enfants de deux ans dans le secteur préélémentaire. Je ne vous demande pas une réponse immédiate, mais je me permettrai de revenir sur ce sujet en une autre occasion.

Quant à l'amendement n°II - 103 rectifié, il vise à maintenir en l'état les effectifs de l'enseignement privé compte tenu de l'évolution du nombre d'élèves scolarisés qu'il connaît.

Les crédits du programme « Enseignement privé du premier et du second degré » sont établis en référence à ceux de l'enseignement public selon l'application d'une mesure non écrite : 20 % des efforts demandés à l'enseignement public pour la réduction des postes d'enseignement sont appliqués à l'enseignement privé sous contrat, cela sans qu'il soit tenu compte des réalités et résultats propres au secteur sous contrat.

En effet, l'enseignement privé sous contrat ne dispose que de 11,5 % des crédits pour 20 % des élèves scolarisés.

Par ailleurs, l'enseignement privé sous contrat ne dispose d'aucun poste équivalent temps plein sans classe ni activité pédagogique sur les 32 000 recensés par la Cour des comptes.

L'enseignement privé sous contrat, depuis quelques années, ne perd pas d'élèves et voit au contraire son effectif stabilisé ou en légère croissance alors même que le manque de moyens fait croître le nombre d'élèves refusés dans de nombreuses régions.

En outre, les taux d'encadrement pédagogique sont supérieurs à ceux de l'enseignement public dans le premier degré et au moins équivalent dans le second degré.

L'objet de cet amendement est donc de conserver les 300 postes équivalents temps plein devant élèves pour l'enseignement privé dont la suppression a été annoncée à la rentrée 2007.

En conséquence, le présent amendement vise à réduire de 15 millions d'euros les crédits de l'action 1 « Pilotage et mise en oeuvre des politiques éducatives et de recherche » du programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », et d'augmenter à due concurrence les crédits de l'action 3 « Enseignement au collège », pour 7,5 millions d'euros, et de l'action 4 « Enseignement général et technologique en lycée », pour 7,5 millions d'euros, du programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés ».

M. le président. La parole est à M. Yannick Texier, pour présenter l'amendement n° II - 117 rectifié bis.

M. Yannick Texier. Cet amendement, identique au précédent, vise à corriger la pratique qui fait évoluer de manière négative les effectifs enseignants de la même manière dans l'enseignement public et dans l'enseignement privé sous contrat dans une proportion de 20 %.

Cette pratique, irréaliste, ne tient en effet aucun compte des réalités et des résultats propres au secteur sous contrat. L'évolution démographique observée dans les collèges et les lycées publics n'est pas identique à celle de l'enseignement privé sous contrat, dans lequel les effectifs ne décroissent pas et où le taux d'encadrement des élèves doit être maintenu.

De plus, dans les faits, l'enseignement privé sous contrat ne dispose que de 11,5 % des crédits alors qu'il accueille 20 % des élèves scolarisés. Le coût moyen de l'élève dans l'enseignement privé sous contrat dans le secondaire est, pour l'État, inférieur à 30 % de celui de l'enseignement public. Seuls sont pris en compte les enseignants et non l'ensemble des personnels administratifs.

Il est donc nécessaire de conserver les 300 postes équivalents temps plein pour l'enseignement privé dont la suppression a été annoncée pour la rentrée 2007 et d'augmenter la dotation correspondante de 15 millions d'euros.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission n'a pas examiné ces deux amendements. Je comprends parfaitement l'intention de leurs auteurs, que j'ai d'ailleurs évoquée dans mon propos liminaire.

Il existe une rigidité de l'offre d'enseignement et une souplesse de la demande. C'est un principe républicain que nous acceptons et qui n'oppose d'ailleurs pas simplement l'enseignement privé à l'enseignement public. On retrouve cette opposition entre l'enseignement agricole et l'enseignement général, entre l'apprentissage et l'enseignement professionnel à temps plein. Il s'agit d'une question d'ordre général : comment faire pour que des moyens nécessairement limités puissent s'adapter à la demande variable des parents, dont le libre choix est reconnu par la Constitution, sans que les modalités d'application concrète de ce libre choix soient nécessairement mises en oeuvre.

À titre personnel, je considère qu'il est un peu prématuré de vouloir maintenant remédier à un problème d'une portée si générale. Je remercie les auteurs des amendements d'avoir soulevé cette question : aucune majorité, aucun gouvernement, aucun exécutif ne pourra y échapper dans les années qui viennent. Toutefois, je ne suis pas persuadé que le degré de maturité de ce dossier permette aujourd'hui de voter ces deux amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Comme M. le rapporteur spécial, je voudrais tenir un langage de vérité.

Quand on regarde les chiffres, on s'aperçoit, dans un premier temps, que 11,5 % des crédits des programmes de la mission « Enseignement scolaire » sont consacrés à l'enseignement privé, alors que les effectifs de celui-ci, premier et deuxième degrés confondus, représentaient, en 2005, 16,7 % des sommes attribuées à cette mission.

La comparaison de ces deux pourcentages mérite cependant une étude plus approfondie. En effet, ce pourcentage de 11,5 % ne reflète pas tout à fait la réalité des moyens que l'éducation nationale accorde à l'enseignement privé et à l'enseignement public.

Prenons quelques exemples, mesdames, messieurs les sénateurs. Tout d'abord, le programme « Soutien de la politique de l'éducation nationale » est commun à l'enseignement public et à l'enseignement privé. Tous les crédits ouverts au titre des examens et des concours du public comme du privé sont retracés dans ce programme. Une partie de ces sommes viennent donc s'ajouter aux crédits expressément attribués à l'enseignement privé.

De même, les personnels administratifs qui gèrent les moyens et les personnels de l'enseignement privé dans les services académiques relèvent du programme « Soutien de la politique de l'éducation nationale ». Il faudrait donc en tenir compte.

En outre, le taux des cotisations patronales au titre des retraites est largement supérieur pour les enseignants du public, puisqu'il atteint 51,05 %, alors qu'il n'atteint en moyenne que 26,4 % en moyenne dans le privé.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Pourquoi ?

M. Gilles de Robien, ministre. À l'heure qu'il est, je ne sais pas pourquoi ! Il ne s'agit peut-être pas des mêmes retraites ! En effet, l'État consacre beaucoup plus d'argent aux retraites des personnels de l'enseignement public. On peut se poser la question de la parité des retraites, mais ce n'est pas le sujet de notre discussion...

Il résulte de ces considérations un écart de six milliards d'euros, ce qui représente près de 10 % de ce budget, qui doit être pris en compte pour comparer la réalité des moyens d'enseignement consacrés au public et au privé.

Enfin, sans vouloir faire preuve d'un juridisme déplacé - nous nous efforçons d'avoir la vision la plus juste et la plus équitable possible -, je suis obligé de dire que la mesure proposée n'est pas conforme au principe de parité fixé par l'article L. 442-14 du code de l'éducation, qui, comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, a permis de dégager ce fameux principe d'équilibre entre le public et le privé.

L'enseignement privé a ainsi bénéficié, durant ces dix dernières années, d'une augmentation du nombre de ses professeurs correspondant à 2 297 emplois équivalents temps plein, alors que, pendant cette même période, le nombre des élèves a diminué de 35 000.

Ainsi, de nombreux chiffres qui semblent a priori contradictoires ou complémentaires doivent être examinés dans leur ensemble et dans le détail. Cela nécessitera du temps et de nombreuses études. Les débats devront évidemment se dérouler dans un climat serein - c'est d'ailleurs le cas ce soir ! - et, si possible, consensuel, de façon à ne pas rallumer quelque polémique que ce soit, alors que nous avons eu tant de difficultés, les uns et les autres, à apaiser la situation dans les années quatre-vingt.

Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement ne peut pas émettre un avis favorable sur les amendements identiques nos II-103 rectifié et II-117 rectifié bis.

M. le président. L'amendement n° II-103 rectifié est-il maintenu, monsieur Mouly ?

M. Georges Mouly. Étant donné la diversité de notre groupe politique, j'ai scrupule à le retirer, monsieur le président.

Mais, après avoir entendu M. le ministre évoquer le programme « Soutien de la politique de l'éducation nationale », les personnels administratifs, les cotisations patronales et l'article L. 442-14 du code de l'éducation, il semble que nous pourrions, pour le moins, surseoir à la décision.

Par conséquent, dans la mesure où il nous est proposé de reporter une telle décision en vue d'approfondir le débat, pour reprendre les propos de M. le rapporteur spécial, et afin d'engager un débat serein, je retire tout de même l'amendement. Au demeurant, nous saurons vous rappeler votre engagement, monsieur le ministre.

M. le président. L'amendement n° II-103 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-117 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Texier ?

M. Yannick Texier. Je retire également mon amendement, car j'ai presque entendu parler de guerre scolaire, et je ne voudrais pas la rallumer !

M. le président. L'amendement n° II-117 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre. Messieurs Mouly et Texier, je vous remercie d'avoir bien voulu retirer vos amendements.

Je vous confirme que les directions financières des services de mon ministère ont engagé le travail qui est destiné à mettre à plat tous les chiffres. Je vous propose donc, si vous le souhaitez, de mettre en place un groupe de travail informel, afin de suivre l'évolution de ces travaux.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-192 rectifié, présenté par MM. Carle, Émin, Humbert et Martin, Mmes Mélot et Papon, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

9 800 000

9 800 000

9 800 000

9 800 000

Vie de l'élève

Dont Titre 2

8 900 000

8 900 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

900 000

900 000

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

TOTAL

9 800 000

9 800 000

9 800 000

9 800 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. J'ai déjà eu l'occasion tout à l'heure d'évoquer l'objet de cet amendement, qui tend à revaloriser de façon très significative les bourses destinées aux collégiens.

Le premier taux des bourses du collège correspond à 60,30 euros par an, soit seulement 5 euros par mois, pour une famille avec deux enfants dont le revenu annuel est inférieur à 11 660 euros. Pour le troisième taux, les bourses sont de 25 euros par mois, ce qui est extrêmement faible, pour un plafond de ressources de 2 233 euros.

Ces bourses n'ont pas été revalorisées de façon significative depuis très longtemps. En effet, à la rentrée de 1998, la bourse était de 53,05 euros pour le premier taux. Trois ans plus tard, en 2001, c'est-à-dire sous un gouvernement de gauche, la revalorisation n'avait atteint que 1,4 euro.

Notre majorité a fait sensiblement plus, puisque, sur la même période, elle a revalorisé ces bourses de près de 5 euros.

Cet amendement vise donc à augmenter de façon importante ces plafonds. Je l'ai dit tout à l'heure, c'est une question de décence. Cet amendement vise à faire passer le premier taux de 60,30 euros à 100 euros, le deuxième de 193,38 euros à 230 euros et le troisième de 310,62 euros à 350 euros.

Cette revalorisation, je le répète, s'effectuerait sans augmentation budgétaire, mais par redéploiement.

Pour le premier taux, il s'agirait non seulement d'un redéploiement, mais aussi d'une diminution du même montant des dépenses du titre 2.

En ce qui concerne les deuxième et troisième taux, dont l'augmentation se chiffrerait à 4,9 millions d'euros pour le public et 400 000 euros pour le privé, nous proposons de redéployer les crédits des fonds sociaux, qui, chacun le sait, ne sont pas toujours utilisés et constituent très souvent les fonds de réserve d'un certain nombre d'établissements. Or, qu'il s'agisse des bourses ou des fonds sociaux, ces crédits sont destinés aux élèves en grande difficulté.

Tel est, monsieur le ministre, l'objet de cet amendement. Je suis tout à fait conscient des contraintes budgétaires qui sont les nôtres. Au demeurant, je le répète, aucune augmentation du budget n'est prévue puisqu'il s'agit simplement de redéployer des crédits.

M. le président. L'amendement n° II-169, présenté par M. Richert, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

Vie de l'élève

Dont Titre 2

3 600 000

3 600 000

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

400 000

400 000

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

TOTAL

4 000 000

4 000 000

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Philippe Richert, rapporteur pour avis.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Je reviens sur le sujet des bourses.

Les bourses de lycée ont été considérablement réévaluées par les bourses au mérite, dont chacun pense ce qu'il veut, mais, pour les bourses de collège, aucune remise à niveau n'a été réellement engagée.

Pourtant, nous savons bien que, dans les collèges, il existe de vrais besoins. Certaines familles rencontrent des difficultés pour faire déjeuner leur enfant à midi. Il y a de vrais problèmes sociaux.

Certes, les fonds sociaux qui permettent de répondre à ces situations existent. Notre vocation est d'inciter les parents et les enfants à venir systématiquement demander une aide. À partir d'un certain niveau de revenus - évidemment si ce niveau est vérifié -, on doit pouvoir systématiquement obtenir une bourse de façon quasiment automatique.

Je rappelle quelques chiffres. Pour une famille de deux enfants, un revenu mensuel de 970 euros, ce n'est pas grand-chose ! Or, pour un enfant au collège, la bourse est de 60,20 euros par an ! La mesure prévue constituerait en une réévaluation de 2 %, ce qui représente 1,20 euro par an ! Ce n'est pas décent !

L'an dernier, nous avions insisté sur ce point, et j'avais eu le sentiment que nous avions réussi à « emporter le morceau ». Je pensais que la traduction concrète d'une telle avancée figurerait dans le projet de budget, ce qui n'est pas tout à fait le cas.

En outre, comme l'a dit Jean-Claude Carle, il existe des réserves reportées au titre des fonds sociaux. Il n'est cependant pas possible dans un amendement de proposer un redéploiement des crédits des fonds sociaux. Il a donc fallu que nous trouvions d'autres moyens.

Nous avons tout simplement proposé de gager cet amendement par une diminution des actions du programme « Enseignement scolaire public du second degré », justifiée par un effort supplémentaire, équivalent à 96 ETP, au titre de la révision des décharges de service des enseignants.

Monsieur le ministre, nous proposons d'inscrire 4 millions d'euros au total en faveur de ces bourses de collège, qui seront réparties entre le privé et le public, ce qui permettra, pour un tiers d'année, d'accorder une augmentation de quinze euros par élève et par an. Les bourses d'un montant de 60 euros passeront ainsi à 75 euros, ce qui représente une augmentation de 25 %.

Sachant que, parallèlement, nous disposons de 30 millions de reports au niveau des fonds sociaux, cette mesure me semble acceptable. Il faut bien entendu l'inscrire dans une progression pluriannuelle permettant d'arriver assez rapidement à un montant de 100 euros, comme Jean-Claude Carle l'a proposé.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission n'a pas pu exprimer son avis sur les amendements nos II-192 rectifié et II-169.

À titre personnel, pour des raisons de modalité d'application, je préfère l'amendement de la commission des affaires culturelles. M. Richert sollicite un redéploiement à hauteur de 4 millions d'euros, ce qui représente un peu moins de la moitié de la proposition de notre collègue Jean-Claude Carle, laquelle est légitime et généreuse, mais mettrait certainement M. le ministre dans une situation difficile.

Je rappelle que les bourses appartiennent, certes, à la tradition républicaine, mais que l'aide à l'enfance et aux familles a heureusement pris d'autres formes : l'allocation de rentrée scolaire, qui représente, à elle seule, plus de 250 euros ; les allocations familiales, mais aussi les fonds sociaux. Il serait donc intéressant de globaliser la réflexion et de ne pas laisser croire que l'État se borne à accorder 60 euros par an à une famille particulièrement nécessiteuse. Ce serait travestir l'effort accompli par le contribuable au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Je préférerais, pour les bénéficiaires, retenir l'amendement défendu par M. Carle. Mais, au nom du réalisme et de la faisabilité, j'opte pour l'amendement de M. Richert.

Vos intentions sont tout à fait louables, monsieur Carle, mais le coût de la mesure que vous proposez représente tout de même l'équivalent de 670 postes de professeur. Vous proposez de réduire les moyens consacrés à l'enseignement des langues régionales. Il m'est vraiment difficile de vous suivre sur une telle proposition. En effet, nous devons respecter l'obligation prévue par l'article 20 de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, que vous connaissez bien. Les sommes en question sont tellement importantes que je souhaite que vous puissiez revoir votre position.

En revanche, monsieur Richert, nous ferons tous les efforts nécessaires pour trouver les 4 millions d'euros nécessaires pour revaloriser les bourses de collège.

Les fonds sociaux ont été fortement réduits, puisqu'ils ont été divisés par quatre en quatre ans. Il subsiste peut-être encore, ici ou là, des poches de fonds sociaux. En tout cas, les établissements ont fait un effort considérable.

Par conséquent, monsieur le président, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur l'amendement n° II-169.

M. le président. Monsieur Carle, l'amendement n° II-192 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Carle. J'ai bien entendu M. le rapporteur et M. le ministre. Je suis par ailleurs très conscient des contraintes budgétaires et de la liberté de manoeuvre relativement étroite qui est la vôtre, monsieur le ministre. Mais ces crédits sont destinés à des familles qui en ont réellement besoin pour l'éducation de leurs enfants.

Or l'éducation des enfants me semble aussi importante, si ce n'est plus, que les crédits affectés aux retraites jackpot - comme les qualifie le journal Le Monde -, attribuées à ceux qui souhaitent passer leur retraite dans les territoires d'outre-mer !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien ! Mais vous avez voté contre notre amendement !

M. Jean-Claude Carle. Je n'étais pas présent, monsieur Arthuis !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il fallait voter l'amendement de la commission des finances !

M. Jean-Claude Carle. Je suis prêt à rectifier mon vote si vous acceptez mon amendement !

Cela dit, j'accepte de me rallier à l'amendement de la commission des affaires culturelles et à retirer le mien si vous nous assurez, monsieur le ministre - mais je n'ai aucune raison de douter de vos intentions -, que vous publierez le décret fixant l'augmentation de quinze euros pour l'année 2007 et que vous inscrirez cette augmentation dans un plan pluriannuel, afin que nous atteignions cent euros au terme de deux exercices budgétaires.

Sous ces conditions, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° II-192 rectifié est retiré.

La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote sur l'amendement n° II-169.

M. Serge Lagauche. Abonder les crédits destinés aux bourses de collèges, c'est très généreux et extrêmement intéressant.

D'après M. Carle, nous n'avons pas fait grand-chose dans ce domaine lorsque nous étions au Gouvernement. Mais, en écoutant cette discussion et bien qu'il soit deux heures du matin, j'ai quand même le sentiment que vous n'avez pas fait grand-chose non plus ! Il est vrai que certaines raisons ont été avancées par le rapporteur de la commission des finances.

Parler des bourses de collèges n'est pas si simple ! Cela fait plaisir à M. Richert. Je ne dirai pas qu'il le fait parce que nous sommes dans une période un peu particulière (M. Philippe Richert proteste.)... Je ne me le permettrais pas, alors ne me poussez pas à le dire ! (Sourires.)

Au demeurant, il serait en effet utile d'approfondir avec l'éducation nationale la discussion de fond qui a été abordée par le rapporteur de la commission des finances : l'aide globale qui est apportée aux familles et qui influe donc sur la vie au quotidien doit-elle provenir de l'éducation nationale ou d'un autre budget ? Nous sommes, quant à nous, prêts à avoir une telle discussion et nous restons ouverts sur ce sujet.

Ce problème a été signalé au ministre en commission ; il l'est à nouveau ce soir ; il avait déjà été abordé l'année dernière. Pour vous faire plaisir, monsieur le rapporteur pour avis, le ministre va faire un geste. Vous ajoutez même une année supplémentaire, ce qui n'est pas très logique. Laissons donc faire le geste, qui est généreux et agréable pour vous. Mais nous ne participerons pas au vote, car c'est une affaire à régler entre vous !

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Il faut vraiment être prêt à dégainer plus vite que son ombre dans cette assemblée !

J'ai essayé de reprendre les amendements nos II-103 rectifié et II-117 rectifié bis, défendus par MM. Mouly et Texier, mais vous ne m'avez pas vu, monsieur le président. Je le regrette vraiment, car je m'aperçois qu'en argumentant comme l'a fait mon collègue Richert on parvient finalement à trouver un accord !

Je n'ai pas très bien compris pourquoi, après avoir défendu comme ils l'ont fait ces amendements identiques, mes collègues les ont retirés. Il est pourtant essentiel, tout le monde le reconnaît ici, de faire quelque chose pour les établissements privés par rapport aux établissements publics.

Le problème n'aurait pas été suffisamment étudié, nous dit-on, ou il ne l'aurait pas été à temps. Pourtant, depuis le temps qu'on en parle ! Jusqu'à quand va-t-on discuter de ce problème ? Avoir un geste pour les établissements privés qui s'engagent à accueillir les élèves ne serait pourtant que justice, tout le monde le reconnaît ! Leur accueil pédagogique est très suivi, les résultats qu'ils obtiennent sont exceptionnels, et on leur supprimerait des moyens sous prétexte que leur croissance ne correspond pas à celle des établissements publics !

Je suis d'autant plus désolé de ne pas avoir pu reprendre la disposition présentée par mes collègues que, si j'avais demandé 7,5 millions au lieu de 15 millions, j'aurais peut-être été suivi, puisque c'est la démarche que vient de faire notre collègue Richert par rapport à la demande de M. Carle !

Cela dit, je suis tout à fait prêt à voter l'amendement n° II-169, car les bourses sont véritablement le meilleur moyen pour permettre à certains élèves de pousser un petit peu loin leurs études et nous avons besoin de gens de plus en plus formés.

M. le président. Monsieur Nogrix, vous auriez dû vous manifester autrement que par un geste et dire à haute voix que vous souhaitiez reprendre l'amendement !

La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Nous nous heurtons là à un aspect pervers de la LOLF !

Même si l'on tient compte de l'effort fait pour la rentrée, il est vrai que le problème des bourses reste important, compte tenu de ce que cela représente mensuellement et surtout par rapport à l'époque où les bourses jouaient un rôle dans l'ascenseur social et, de façon plus globale, dans l'école elle-même.

Qu'un groupe de travail se mette en place, qu'on réfléchisse et que l'on travaille sur la question, c'est bien. Mais, auparavant, dans un débat budgétaire, nous avions la possibilité, pour prendre l'image de la voiture, de changer quatre enjoliveurs. Ce soir, même si l'on ajoute deux pare-chocs, on voit bien que les gages ne sont pas satisfaisants !

Je partage l'opinion de mon collègue Lagauche : nous ne pouvons pas participer à un vote à l'occasion duquel, chaque fois, on enlève quelque chose d'important : d'un côté, certaines langues vivantes, de l'autre, des choses essentielles, etc. Ce n'est pas la bonne solution, car, à ce petit jeu-là, sur quoi débouchera-t-on au gré des années ? Ce n'est pas très sain pour un débat budgétaire.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il faudrait donc dépenser plus ?

M. Ivan Renar. Éventuellement !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Comment financez-vous la mesure ?

M. Ivan Renar. C'est un choix qu'il faut faire avant dans l'ensemble des budgets du Gouvernement ! Il faut choisir l'éducation nationale plutôt qu'autre chose.

Mais c'est un autre débat que je suis prêt à ouvrir, monsieur le président de la commission des finances, de même que je suis prêt à modifier la Constitution pour passer à la VIe République... C'est un vaste débat !

En attendant, nous ne participerons au vote ni de cet amendement, s'il est maintenu, ni des amendements suivants.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, rapporteur pour avis.

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Monsieur le président, pardonnez-moi de reprendre la parole sur ce sujet à deux heures dix du matin. Mais je voudrais d'abord remercier le rapporteur de la commission des finances et le ministre pour leurs positions, un avis favorable pour l'un, un avis de sagesse pour l'autre, ce qui va, je l'espère, permettre l'adoption de cet amendement tout à l'heure.

Je remercie également Jean-Claude Carle de se rallier à l'amendement de la commission des affaires culturelles. Ce n'est pas une disposition de circonstance ; cela fait déjà plusieurs années que j'explique, au nom de cette commission, la nécessité de revaloriser les bourses. En effet, comme l'a dit Ivan Renar, c'est un moyen d'accompagner les familles modestes, de leur permettre, dans les moments difficiles, d'obtenir un soutien sans être obligées de le solliciter dans le bureau du proviseur ou du principal.

M. le ministre nous a indiqué en commission qu'il souhaitait mettre en place un groupe de travail pour réfléchir sur ce sujet et procéder à une mise à plat de l'ensemble des aides. Le rapporteur de la commission des finances l'a confirmé. C'est, je crois, une bonne chose.

Je voudrais également répondre à Ivan Renar sur les moyens que nous souhaitons utiliser pour ponctionner les crédits nécessaires à cette revalorisation. Je propose de « flécher » les décharges de service des enseignants, étant entendu que cet effort sera envisagé globalement et que, pour les postes d'enseignants, nous laissons bien sûr au ministère le soin d'arbitrer.

Regardons ce qui s'est passé en un an pour les postes en surnombre. Monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, alors que vous aviez demandé, et obtenu, une diminution sensible du budget consacré à ces postes, ces derniers, si je me souviens bien, n'ont été réduits que d'environ 400 ; il en reste encore 3 400.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On continue !

M. Philippe Richert, rapporteur pour avis. Pourquoi n'ont-ils pas diminué plus vite ? Tout d'abord, nous avons eu à subir le contrecoup de la loi Fillon. En effet, du fait de l'allongement de la durée de travail, moins d'enseignants sont partis à la retraite et il a donc fallu plus de temps pour diminuer les postes en surnombre. Comme l'a dit très justement le président de la commission - cela ne nous étonne pas -, il aurait fallu, parallèlement, diminuer d'autant les recrutements, ce qui n'a pas été fait !

C'est M. le ministre qui a ajusté les recrutements par rapport à l'application de la loi Fillon, et cela fait maintenant deux ans. C'est seulement dans l'année qui vient que nous aurons une diminution réelle du « stock » des personnels en surnombre. C'est précisément cet ajustement, sur quatre-vingts ou cent équivalents temps plein, qui devrait rendre la ponction possible, la fluctuation naturelle reprenant le dessus entre les recrutements faits et le flux normal des départs prévus avant la loi Fillon.

Nous ne prélevons nullement sur la pénurie pour abonder les crédits destinés aux bourses ; nous profitons seulement d'un ajustement qu'à mon avis nous constaterons naturellement d'ici à l'année prochaine.

M. Ivan Renar. Vous avez pourtant utilisé vous-même le terme de « ponction » !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-169.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-118 rectifié, présenté par MM. Texier, Esneu, Martin et Trillard, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

Vie de l'élève

Dont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

1 200 000

1 200 000

1 200 000

1 200 000

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

1 200 000

1 200 000

1 200 000

1 200 000

TOTAL

1 200 000

1 200 000

1 200 000

1 200 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Yannick Texier.

M. Yannick Texier. Dans le budget de 2006, 240 postes du plafond équivalents temps plein travaillé, ETPT, ont été transformés en heures supplémentaires années, HSA.

Il convient de rétablir 120 ETPT, afin de permettre une meilleure gestion au sein de l'enseignement privé agricole.

Ce changement n'affecte pas la réalité du nombre d'enseignants devant les élèves. Toutefois, les postes HSA ne figurent pas dans le plafond d'emplois. Il convient donc d'augmenter de 120 le plafond d'emplois en le passant de 18 047 à 18 167 ETPT.

Le coût de cette mesure est de 1,2 million d'euros, les postes HSA n'étant pas rémunérés en dehors des périodes scolaires.

Avec le présent amendement, nous proposons un abondement des crédits du titre II du programme 143 « Enseignement technique agricole », actions 1 et 2, d'un montant de 600 000 euros par action.

Nous proposons également d'économiser 1,2 million d'euros sur le titre II du programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », à l'action 7 « Établissements d'appui de la politique éducative ».

Je souhaite également attirer votre attention sur le décret d'application n° 89-409 de la loi « Censi » du 5 janvier 2005 bloqué à Bercy. Ce décret très attendu régit le statut des enseignants et concerne en particulier le reclassement de 2 500 enseignants du privé classés en catégorie 3.

Dominique Bussereau le ministre de l'agriculture, s'était du reste personnellement engagé sur ce reclassement. L'absence de ce décret pèsera lourdement sur la rentrée 2007 et causera un préjudice important aux enseignants maintenus en catégorie 3.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission ne s'est pas forgé une opinion très claire sur cet amendement. J'aurais tendance, assez spontanément, à considérer que la formule des HSA autorise une certaine flexibilité dans un domaine où elle est rare, puisque le budget de la mission « Enseignement scolaire » est constitué pour 95 % de salaires. C'est extrêmement rigide. Aussi, il me paraissait opportun de laisser un peu de liberté.

Ma science n'étant pas universelle, à cette heure de la nuit, je souhaiterais connaître l'avis de M. le ministre. (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. En 2006, par une mesure à la fois souple et astucieuse, nous avions transformé 240 équivalents temps plein en heures supplémentaires année. Vouloir créer des postes va à l'encontre de la politique du Gouvernement visant à la maîtrise des effectifs et à la limitation des recrutements. Ces deux orientations participent à l'effort national de réduction du déficit budgétaire, qui est en train de porter ses fruits. Je vous renvoie à l'appréciation qu'a portée la semaine dernière Bruxelles sur l'effort durable de la France en la matière, dont le déficit est passé sous la barre des 3 % du produit intérieur brut. Aussi, ce n'est pas le moment de consolider des postes. En outre, pourquoi donc revenir sur une mesure visant à plus de souplesse ?

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Nous partageons totalement le point de vue qu'a exprimé tout à l'heure Bernard Piras sur l'enseignement agricole public.

Compte tenu des propos qui ont été tenus aujourd'hui, nous regrettons que cet amendement ne vise que l'enseignement agricole privé. Nous aurions aimé que l'enseignement agricole public trouve ici des oreilles plus attentives. Je tenais à insister sur ce point n'ayant pas eu moi-même, au cours de mon intervention, le temps de défendre cet enseignement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-118 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-20, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré

Dont Titre 2

1.000.000

1.000.000

Vie de l'élève

Dont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont Titre 2

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Dont Titre 2

1.000.000

1.000.000

Enseignement technique agricole

Dont Titre 2

TOTAL

1.000.000

1.000.000

1.000.000

1.000.000

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, cet amendement a pour objet d'attirer votre attention sur la gestion du Centre national d'enseignement à distance, le CNED, à la suite d'un rapport de la Cour des comptes. Puisque nous n'avons pas la faculté de modifier la répartition des crédits à l'intérieur d'un programme, nous ne pouvons qu'appeler à une nécessaire remise en ordre du CNED.

Si votre réponse nous satisfait, nous pourrons retirer notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, le CNED est sur la bonne voie. Son directeur général a clarifié ses missions et adapté son organisation ainsi que sa politique tarifaire. Sa gestion est désormais saine. Il dispose maintenant d'une comptabilité analytique, dont la qualité vient d'être saluée par la Cour des comptes. Je puis vraiment vous assurer que le CNED est aujourd'hui en bonne santé et qu'il mérite d'être utilisé à pleine capacité. Nous le faisons d'ailleurs avec plaisir, notamment dans le cadre de l'organisation d'espaces numériques de travail.

Cela me ferait de la peine qu'on diminue les moyens de ce très bel outil, surtout à hauteur de 1 million d'euros.

M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-20 est-il maintenu ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Fort de ces arguments, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-20 est retiré.

Sur les crédits, j'ai été saisi d'une demande d'explication de vote par Mme Annie David.

Mme Annie David. Monsieur le ministre, vos arguments, malgré un exercice rhétorique réussi, ne m'ont pas convaincue et ne sont pas parvenus à masquer à mes yeux le manque d'ambition du budget affecté à la mission « Enseignement scolaire ».

Vous nous parlez chiffres, que ce soit en euros ou en personnes, mais je pourrais contester cette liste du premier au dernier indicateur. Je n'en ai pas le temps ni d'ailleurs l'envie. Un seul suffit à démontrer votre ambition : 1,3 % d'augmentation. Pour nous, cela ne répond en rien aux attentes fortes en matière de service public de l'éducation au service des élèves.

Mais cette politique voulue pour notre éducation nationale est des plus cohérentes avec la politique d'ensemble du Gouvernement. Vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, en vous y associant pleinement.

Aussi la question que nous pouvons légitimement nous poser est la suivante : quelle école voulez-vous pour quelle société ? De toute évidence, nous ne voulons pas la même !

Pour mon groupe, ce budget, voté en l'état, affaiblit dangereusement l'école et ne lui permettra pas de remplir ses missions, au détriment bien sûr de notre jeunesse. Pourtant, à maintes reprises, celle-ci a manifesté son ras-le-bol tant elle est dans une situation d'urgence sociale : difficulté d'orientation et de réussite scolaire, difficulté à trouver un emploi stable et rémunérateur, difficulté à trouver un logement, difficulté à se soigner.

Aujourd'hui, l'alternative qui s'offre à elle est la suivante : la dépendance ou la précarité.

Nos jeunes sont en attente, monsieur le ministre, et les baisses successives du budget anéantissent l'espoir pour nombre d'entre eux de « changer de vie ». Beaucoup ne croient plus en l'école.

Un exemple illustre ce phénomène : celui de l'orientation, souvent pointée du doigt par les jeunes car trop souvent subie.

Mais il ne s'agit pas ici de se tromper de cible car c'est bien le manque de conseillers d'orientation-psychologues, les COPsy, et de moyens matériels qui sont en cause dans le manque d'accompagnement les élèves dans la construction de leur projet personnel, scolaire et professionnel. Comme je l'ai souligné dans mon rapport sur l'enseignement professionnel, on compte 1 COPsy pour environ 1 400 élèves.

Pourtant, nul ne peut nier le rôle de ces personnels. Aussi, une reconnaissance de ce corps de métier, à travers la mise en oeuvre d'un plan pluriannuel de recrutement pour combler le déficit en personnel, et une clarification de leurs missions permettraient un meilleur suivi de l'élève, une meilleure collaboration avec les équipes éducatives et les parents. C'est ce que revendique l'ensemble des acteurs concernés, notamment l'association SOS Rentrée.

Il conviendrait également de réfléchir à la création d'un véritable service public de psychologie de l'éducation, de la formation et de l'orientation scolaire ayant compétence pour intervenir auprès des élèves de la maternelle à la fin de la scolarité obligatoire.

Malheureusement, les COPsy, tout comme les personnels de santé et les assistantes sociales ne sont pas les seuls à faire les frais de votre politique de restriction budgétaire. Il en va de même pour l'éducation populaire, dont personne n'a parlé ce soir bien que, cette année, ses moyens ne soient plus en forte diminution.

Pour autant, les baisses qu'ont subies cette année encore les budgets des associations d'éducation populaire, cumulées à celles des années précédentes, laissent présager un avenir incertain. C'est bien mal leur témoigner la reconnaissance de leur rôle de promotion, dans le temps scolaire et en dehors de celui-ci, du service public d'éducation, dont elles sont des partenaires incontournables et dont elles accompagnent bon nombre de dispositifs.

Les enseignants, dans cette logique de restriction, sont eux aussi « une main-d'oeuvre dispendieuse » dont il faut réduire le coût. La préparation d'un décret relatif aux missions et obligations du service enseignant nous le révèle avec force : d'un côté, vous nous présentez un budget prétendument ambitieux et, d'un autre côté, vous travaillez à la révision du statut des enseignants.

Ainsi, par la modification de différents décrets, vous voulez alourdir de manière importante leur charge de travail à travers de nombreuses dispositions tout aussi diverses que dangereuses, sans pour autant amorcer la moindre concertation avec le corps enseignant sur une définition que vous voulez plus fine du métier même d'enseignant.

Monsieur le ministre, l'école de l'égalité, de la justice et de la réussite scolaire pour tous nos jeunes, telle est véritablement notre ambition. Nous l'avons déclinée dans une proposition de loi que nous venons de déposer. Cette école passe aussi par l'amélioration des conditions de travail des personnels de l'éducation nationale.

Telle n'est pas l'ambition du budget que vous nous soumettez. Aussi nous ne le voterons pas.

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Enseignement scolaire », modifiés.

M. Serge Lagauche. Le groupe socialiste vote contre.

Mme Annie David. Le groupe CRC également.

(Ces crédits sont adoptés.)

Article 34 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Article additionnel après l'article 48 (interruption de la discussion)

Article additionnel après l'article 48

M. le président. J'appelle maintenant l'amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 48, rattaché pour son examen à la mission « Enseignement scolaire ».

L'amendement n° II-190 rectifié bis, présenté par MM. Laffitte, Legendre, Mouly, Ferrand, de Montesquiou et Gournac et Mme Garriaud - Maylam, est ainsi libellé :

I. - Après l'article 48, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 211-8 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les écoles maternelles ou élémentaires, les collèges et les lycées qui comportent une ou plusieurs sections internationales où sont dispensés des enseignements relevant des programmes scolaires suivis à l'étranger, les enseignants étrangers chargés d'assurer ces enseignements peuvent être mis à disposition par les pays étrangers concernés ou être recrutés et rémunérés par des associations agréées. Ils peuvent également être recrutés par l'État comme professeurs associés dans les conditions prévues à l'article L. 932-2 du code de l'éducation. Ces associations agréées sont autorisées à collecter auprès des familles des cotisations éventuellement obligatoires pour permettre leur fonctionnement dans la durée, et en particulier pour assurer la rémunération des enseignants étrangers de la partie étrangère du dispositif. »

II. - En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :

Enseignement scolaire

La parole est à M. Pierre Laffitte.

M. Pierre Laffitte. Cet amendement porte sur les sections internationales dont j'ai évoqué l'intérêt et le nécessaire développement lors de la discussion générale. Il vise à compléter un article du code de l'éducation pour préciser les modalités de recrutement et de rémunération des enseignants étrangers chargés d'assurer les cours relevant des cursus scolaires de leur pays d'origine.

Cette disposition est parfaitement cohérente avec la politique qui est menée à l'échelon national pour augmenter l'attractivité de la France grâce au développement de la recherche et de l'innovation. Depuis plus de cinquante ans, cette formule fonctionne pour le mieux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas eu l'occasion d'examiner cet amendement. Je ne pense pas trahir ce qu'aurait pu être sa décision en indiquant que cette disposition a le grand mérite de permettre aux sections internationales de bénéficier de professeurs dont la rémunération ne pèse pas sur le budget de l'État, puisqu'elle est prise en charge soit par des gouvernements étrangers, soit par des associations agréées.

Toutefois, j'ai le devoir d'attirer l'attention de la Haute Assemblée sur le fait qu'un recours contentieux pendant devant le Conseil d'État tend à annuler un décret de mise à disposition d'enseignants étrangers rémunérés par des gouvernements étrangers ou par des associations agréées. Cette mesure risque donc d'être contraire à la loi.

Quoi qu'il en soit, la commission des finances se réjouit de voir que des moyens sont apportés aux sections internationales et laisse à la Haute Assemblée le soin d'apprécier les autres conséquences de l'amendement.

M. Ivan Renar. Il faudrait déjà leur donner un visa !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gilles de Robien, ministre. Lorsque M. Laffitte affirme que, pour l'attractivité de la France, les sections internationales sont importantes, je ne peux que l'approuver totalement. Il existe à l'heure actuelle, dans vingt-six établissements publics et trois établissements privés, soixante et onze sections internationales où sont instruits, en dix langues étrangères, des élèves français et leurs camarades étrangers.

Au fond, ces sections souffrent aujourd'hui d'une crise de croissance ; ce n'est pas la peine de se cacher la vérité. Elles n'ont pas tellement besoin d'un coup de pouce ; ce qui leur manque, c'est une nouvelle architecture dans la durée.

Je suggère donc à M. Laffitte de retirer son amendement et à la Haute Assemblée de créer une mission d'information parlementaire sur le fonctionnement et les perspectives de développement des sections internationales. Cela pourrait éclairer utilement le Parlement et le Gouvernement, comme l'a fait M. Ferrand dans son excellent rapport. De mon côté, je vais saisir les inspections générales pour évaluer le dispositif actuel des sections internationales et étudier les évolutions possibles.

Tels sont les éléments que je peux vous apporter dès maintenant. Mais cette question ne peut pas être traitée rapidement. Les conséquences de l'amendement de M. Laffitte seraient disproportionnées par rapport à ses louables intentions.

M. le président. Monsieur Laffitte, l'amendement n° II-190 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Pierre Laffitte. Monsieur le ministre, je retire bien évidemment cet amendement, tout en précisant que votre proposition de réflexion supplémentaire me paraît importante pour trouver une solution à cette question.

M. le président. L'amendement n° II-190 rectifié bis est retiré.

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

La suite de la discussion du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.