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Nomination d'un membre d'un oRGANISME extraPARLEMENTAIRE
M. le président. Je rappelle que la commission des affaires culturelles a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Adrien Giraud membre du Conseil d'administration de la société Réseau France Outre-mer.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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COMMUNICATION relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
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DÉPÔT D'un RAPPORT Du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, ainsi que sur les orientations des finances sociales, en application de l'article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l'article L.O. 111-5-2 du code de la sécurité sociale.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des finances et à la commission des affaires sociales.
Il fera l'objet d'une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation, sur les finances publiques et les finances sociales lors de la séance du jeudi 29 juin.
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gestion de l'après-mines
Discussion d'une question orale avec débat
(Ordre du jour réservé)
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 8 de M. Philippe Leroy à M. le ministre délégué à l'industrie sur la gestion de l'après-mines.
Cette question est ainsi libellée :
M. Philippe Leroy demande à M. le ministre délégué à l'industrie quelles sont les dernières évolutions en matière de gestion de « l'après-mines ». Il souhaiterait, en particulier, obtenir des précisions quant au premier bilan qui peut être tiré, un peu moins d'un an après sa création effective, du fonctionnement de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, ainsi que des éventuelles difficultés qu'elle a pu rencontrer pour l'exercice de ses missions.
De même, il apprécierait de connaître l'état d'avancement des actions mises en oeuvre pour permettre la reconversion économique et sociale des bassins touchés par la cessation des activités minières, favoriser la réhabilitation des logements des mineurs et améliorer la conservation des archives minières.
Enfin, il s'interroge sur le nombre de dossiers d'indemnisation des victimes de sinistres miniers qui restent à traiter.
La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question.
M. Philippe Leroy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question, qui s'inscrit dans la continuité des travaux conduits par la commission des affaires économiques, a pour objet d'approfondir le débat que nous avons eu le 24 novembre 2004 sur l'avenir des régions françaises et de leurs habitants concernés par la fin des activités minières.
Il s'agit en effet d'un débat qui est plus que jamais d'actualité et qui, de mon point de vue, mérite un suivi attentif et régulier, non seulement bien évidemment de la part des élus locaux issus des territoires concernés, mais également de la part du Gouvernement et du Parlement. Ne nous y trompons pas, et j'en ai la conviction profonde, ce n'est pas la dernière fois que nous discuterons de ce sujet tant il est clair que l'après-mines constitue un dossier national que nous aurons à gérer encore très longtemps.
Mes chers collègues, lors de la dernière question orale que j'avais eu l'occasion de poser sur ce sujet voilà près de deux ans, nous avions, avec le Gouvernement, débattu d'un grand nombre de questions concrètes liées à l'après-mines, des questions fondamentales pour l'avenir de nos territoires et des citoyens qui y vivent. Des éléments de réponse précis avaient alors été apportés par Patrick Devedjian, qui s'exprimait au nom du Gouvernement en sa qualité de ministre de l'industrie. J'espère, monsieur le ministre, que vous serez tout à l'heure en mesure de rassurer les élus locaux de la Lorraine.
Plus d'un an et demi après ce débat, j'ai souhaité, avec le soutien du président de la commission des affaires économiques, M. Jean-Paul Emorine, que nous puissions, tous ensemble, tirer un premier bilan des échanges passés. Je tiens d'ailleurs à vous remercier, monsieur le ministre, de vous êtes rendu disponible pour le présent débat, dont nous nous étions entretenus à la fin de l'année dernière.
En novembre 2004, nous avions tout d'abord abordé l'avenir de l'entité chargée de la gestion technique des questions de l'après-mines - celle qui avait été prévue dans la proposition de loi dont j'avais été le rapporteur -, qu'il s'agisse de la surveillance des bassins miniers et de la remise en état des sites ou de l'entretien des installations de dégagement des gaz et des installations hydrauliques.
À la suite d'un rapport qui avait été remis dans le courant de l'année 2004 par le conseil général des mines et l'inspection générale des finances, le Gouvernement avait retenu l'option de transférer d'ici à 2005 les missions opérationnelles incombant à l'État en matière d'après-mines au Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM. Le ministre de l'industrie nous avait alors donné des garanties majeures sur deux points : en premier lieu, l'État assurerait les financements nécessaires à la réalisation de l'après-mines technique et, en second lieu, les missions opérationnelles de l'après-mines ne se limiteraient pas au seul charbon - c'est un point fondamental -, et concerneraient également le fer et la potasse.
Ma première question est simple, monsieur le ministre : qu'en est-il du passage de relais entre les anciens exploitants miniers, l'État et le BRGM ?
Un décret récent, en date du 4 mars 2006, a créé au sein du BRGM un département de prévention et de sécurité minière, et nous nous en félicitons. Toutefois, pouvez-vous nous en dire plus, monsieur le ministre, sur le calendrier relatif à l'installation de cette structure, sur les moyens dont celle-ci sera dotée et sur les conditions concrètes de son action, y compris sur le terrain ? Vous le savez, cher François Loos, les élus locaux, notamment les maires, sont attachés à la présence d'interlocuteurs locaux. Il s'agit là, bien évidemment, d'une question fondamentale pour nos territoires.
Si je me réfère à une région que je connais bien, la Lorraine, je puis vous dire que les collectivités territoriales sont également très inquiètes s'agissant des risques qu'entraîne la situation de l'après-mines. J'espère que les réponses que vous apporterez, monsieur le ministre, seront de nature à les rassurer.
Au-delà de cette question, pouvez-vous également nous éclairer, monsieur le ministre, sur l'après-Charbonnages de France ? Cet établissement disparaîtra sans doute, comme prévu, à la fin de l'année 2007. Cette question nous intéresse.
Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'une cellule partenariale - je suis prudent, je pèse mes mots, je ne parle pas d'une structure - devra, au moins provisoirement, prendre le relais, afin d'assurer le suivi de toutes les questions qui ne seront pas résolues ?
En effet, je ne pense pas que la situation sera complètement réglée à la fin de l'année 2007, et il nous faudra probablement trouver une formule souple, susceptible d'assurer un relais progressif pour régler les dernières questions en suspens, que je vous poserai d'ailleurs ultérieurement au cours de mon intervention.
Pourriez-vous, par la même occasion, monsieur le ministre, dresser un premier bilan du transfert aux collectivités territoriales des installations hydrauliques, qui regroupent les stations de pompage ou de relevage des eaux ? Il s'agit en effet d'un problème complexe. Je rappelle que le code minier autorise une telle procédure de transfert de ces installations, notamment aux communes. Il nous avait été indiqué que cette prise en charge serait accompagnée des financements adéquats et que, dans les cas où les communes refuseraient d'assumer cette charge, l'entité après-mines en conserverait la responsabilité. Il faut faire le point à cet égard.
En effet, la problématique hydraulique fait partie de nos premières préoccupations, celles qui concernent la population. Pour étayer cette affirmation, je tiens à rappeler les risques particuliers engendrés par l'arrêt des exhaures dans le bassin ferrifère ; c'est une question que nous ne connaissons désormais malheureusement que trop bien. Je souhaite me tromper mais, dans les années qui viennent, nous allons sans doute ouvrir le chapitre sur les conséquences de l'arrêt des exhaures dans le bassin houiller, arrêt que vous venez de prononcer, monsieur le ministre. Dans l'immédiat, pour ce qui concerne le bassin ferrifère, les risques encourus sont désormais bien repérés sur le terrain, mais de larges surfaces sont neutralisées au titre de l'urbanisation.
Les aspects techniques et opérationnels de l'après-mines m'amènent à évoquer deux questions particulières.
Premièrement, je pense aux conséquences et à la prévention des affaissements miniers. Ce sujet reste plus que jamais d'actualité dans le bassin ferrifère lorrain, qui est confronté, en de nombreux endroits, aux risques d'affaissement brutal ou progressif. Bien entendu, sur ce dossier, ma priorité reste la sécurité des personnes.
Toutefois, comme en 2004, je suis conduit à réinterroger le Gouvernement sur ce point. En effet, je souhaiterais obtenir des éléments d'information sur les activités de l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers, sur l'état de réalisation des cartes d'aléas miniers, sur le nombre de plans de prévention des risques miniers, les PPRM, qui ont été prescrits en France et sur les modalités de concertation locale en matière de réalisation de ces plans.
Les cinq PPRM du bassin ferrifère lorrain devaient être finalisés au plus tard à la fin de l'année 2005 et les cartes d'aléas devraient être établies pour l'ensemble des sites miniers du territoire métropolitain d'ici à la fin 2007. Qu'en est-il de ce calendrier ? Quelles conclusions les services de l'État en tirent-ils s'agissant de la constructibilité des sols ? Car telle est la grande question.
Ce sujet me conduit à vous interroger sur un autre dossier qui lui est intimement lié, à savoir l'indemnisation des victimes.
Certes, ce dossier délicat a énormément progressé depuis que le législateur s'en est emparé sur mon initiative, grâce à la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages. Le dispositif que nous avons voté a permis, en accord avec le Gouvernement, de régler un bon nombre de situations dramatiques, puisque nous avons confié au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la responsabilité d'indemniser les personnes ayant subi des dégâts concernant leur habitation principale. Une grande partie du problème a ainsi trouvé une solution.
Reste pendante la question de l'indemnisation des sinistres intervenus entre 1994 et 1998, pour lesquels rien n'avait été décidé. Il avait été évoqué une évaluation de leur nombre et de leur nature. À la fin de 2004, le Fonds a été saisi de cent quarante dossiers de sinistres survenus pendant cette période. Un bilan du dispositif devait être effectué afin de savoir s'il était possible de prendre en compte ces dossiers. Qu'en est-il ?
Nous souhaiterions, là encore, obtenir des éléments de réponse, nos concitoyens concernés étant attentifs à cet égard.
Deuxième question liée aux aspects techniques de l'après-mines : celle de l'urbanisme et du foncier dans les communes touchées par l'après-mines.
Cette thématique recouvre en réalité deux sujets différents.
D'une part, je souhaiterais obtenir des informations sur les actions de requalification urbaine que les communes veulent réaliser sur les territoires miniers. Bien souvent, nos collectivités territoriales doivent faire face à des besoins considérables en matière de rénovation des voiries et des réseaux, des logements et des cités minières. Or les actions de requalification des cités minières telles qu'elles ont été entreprises dans le cadre des contrats de plan successifs État-région ou dans le cadre du Groupe interministériel pour la restructuration des zones minières, le GIRZOM, sont loin d'être terminées, notamment en Lorraine.
Dans les bassins houillers, et parfois dans les bassins ferrifères, cette problématique rejoint celle du traitement des zones urbaines sensibles car, au fil du temps, les cités minières, pour certaines d'entre elles, sont devenues des quartiers sensibles. Or nous ne souhaitons pas que, progressivement, s'installe une confusion des unes avec les autres. Le montant estimé des travaux et des actions de requalification est considérable, monsieur le ministre, et nous ne voudrions pas banaliser le traitement des cités minières en faisant de celles-ci des quartiers ANRU. Nous souhaitons qu'elles continuent à bénéficier d'un soutien fort, tant auprès du Fonds européen de développement régional, le FEDER, qu'auprès de l'État et de ses établissements publics - au premier rang desquels l'Agence nationale pour la rénovation urbaine - dans le cadre des futurs contrats de projets.
Un autre problème, monsieur le ministre, est celui du foncier. Les communes concernées par les risques miniers ont besoin de procéder à des acquisitions foncières pour rénover leur urbanisme. Dans un contexte de renchérissement général des prix du foncier, comment peut-on aider ces communes à abaisser les charges qui en résultent notamment pour la construction de logements à destination de nos concitoyens les plus modestes ?
Cette question est d'autant plus cruciale que les collectivités territoriales, qui sont prêtes à mettre la main à la poche, sont aujourd'hui confrontées à la nécessité d'acquérir les terrains que cherchent actuellement à céder les anciens exploitants. En Lorraine, les surfaces disponibles se chiffrent en centaines d'hectares, qui sont la propriété de Charbonnages de France et d'Arcelor - même s'il est plus difficile d'imaginer un accord avec cette dernière entreprise.
Certes, des négociations sont en cours entre les exploitants et les collectivités, notamment sur le bassin houiller. Cependant, la valeur de ces quelques centaines d'hectares n'a pas encore été déterminée et Charbonnages de France n'a pas encore finalisé avec les communes le transfert des terrains.
Au-delà de la question du prix de vente subsiste une interrogation majeure : quel est le devenir de ces centaines d'hectares ? On n'en a jamais parlé. Quelle place peuvent-ils prendre dans l'aménagement du territoire ? Ne pourrait-on pas éventuellement les transférer à un établissement public - par exemple l'Établissement public foncier lorrain -, qui pourrait valoriser ces terrains, les aménager, les faire profiter de soutiens financiers à déterminer pour aboutir à des solutions urbanistiques satisfaisantes ?
Voilà un exemple de sujets qu'il nous faudrait rapidement discuter dans le cadre de l'après-mines Charbonnages de France. La question de l'après-mines ferrifère est différente, mais elle méritera également une réflexion.
Autre question importante : celle de l'emploi. Dans ces zones minières, nous avons perdu énormément d'emplois et nous n'avons pas encore reconstitué totalement le tissu industriel ou économique. Quels moyens seront mis en oeuvre pour faciliter la reconversion des zones frappées par l'arrêt des activités minières ? Il faut aller de l'avant et nous forger des outils de développement. Quels seront ces outils ? Nous souhaitons les voir intégrer dans le contrat de projet État-région de façon que nous puissions conduire une action dynamique. Quelles sont les perspectives pour les crédits européens attendus au titre du FEDER ? Nous souhaitons que, en la matière, l'orientation soit bien définie. Quelle évolution pour la SOFIREM, la Société financière pour favoriser l'industrialisation des régions minières ? Le Gouvernement nous avait indiqué qu'une réflexion avait été envisagée sur ce sujet. Qu'en est-il de la reprise de la FINORPA, la Financière du Nord et du Pas-de-Calais ? Par ailleurs, la survie des fonds d'industrialisation des bassins miniers, en particulier le FIBM, sera-t-elle au moins assurée pour la durée du prochain contrat de projet ?
Je pose ces questions dans la mesure où le soutien au développement économique nous sera nécessaire.
Autre point qui me tient particulièrement à coeur, celui des archives houillères. Elles sont encore actives, qu'il s'agisse des archives médicales ou des archives techniques. Les risques techniques vont encore sévir durant de longues années.
Un groupe de travail devait être constitué pour régler ce problème des archives, dans la mesure où les autorités locales ne peuvent seules en supporter le traitement. Nous souhaitons, avec l'État, avec les ministères de l'industrie et de la culture, trouver une formule qui nous permette de conserver au moins les archives techniques, notamment à Saint-Avold, au titre de la mémoire. Quelles précisions pouvez-vous nous donner sur ce dossier ? Comment seront gérées les archives encore utiles au BRGM, à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, l'ANGDM, et à la sécurité sociale ? Quelles solutions envisageons-nous pour ne pas laisser au seul département de la Moselle - permettez-moi d'être un peu inquiet - la charge du tri des archives que la loi nous ferait peut-être obligation d'accueillir, charge que nous ne pouvons supporter ?
Enfin, il n'est pas possible de débattre du dossier de l'après-mines sans évoquer la question de la sécurité sociale minière et la mise en place de l'ANGDM. Cette agence, créée en 2004, est opérationnelle depuis janvier 2005. Sa création répondait à la nécessité de garantir la pérennité des avantages sociaux des anciens mineurs. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous dresser un premier bilan de son action ou prendre des dispositions pour que nous soyons informés à cet égard.
Voilà les principales questions que je souhaitais poser. Elles sont nombreuses. C'est un sujet que vous connaissez bien, monsieur le ministre. Je vous remercie de nous avoir écoutés encore une fois. Il ne s'agit pas d'un acharnement de la part des élus locaux. Cette question d'actualité est cruciale, et nous attendons des réponses du Gouvernement. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez déjà beaucoup fait, mais nous espérons encore beaucoup. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 47 minutes ;
Groupe socialiste, 32 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite avant toute chose vous redire combien ce combat de l'après-mines - parce que c'est un véritable combat - est difficile, jalonné d'embûches et pourtant vital pour ces anciens mineurs qui ont marqué les différentes régions minières.
Je m'appuierai dans mon intervention sur l'exemple lorrain que je connais mieux. Pour autant, je n'oublie pas que la France compte de nombreuses régions minières concernées par toutes ces questions.
Je veux rendre hommage ici à ces générations d'hommes et de femmes qui ont fait la richesse de notre pays. Beaucoup y ont payé de leur vie dans des accidents qui ont marqué les mémoires ; d'autres sont décédés prématurément, victimes de la silicose ou encore de l'amiante. Tous ont participé dans des conditions difficiles à la construction de la France.
Ce combat ne cessera que lorsque les réparations auront été effectuées, lorsque leurs droits seront respectés et leur cadre de vie restructuré, lorsque les villes auront été réaménagées, bref, lorsqu'ils auront retrouvé leur dignité.
Aujourd'hui, notre collègue Philippe Leroy souhaite, monsieur le ministre, que vous fassiez le point sur la situation des ayants droit du régime minier et des bassins miniers ainsi que sur l'application de la loi qui a instauré l'ANGDM.
Pour ma part, j'évoquerai surtout le droit au logement - notamment de la mise en vente du parc immobilier d'Arcelor - et du problème de la constructibilité que rencontrent de nombreuses communes.
Tout d'abord, je tiens à rappeler les termes de la question écrite que j'ai déposée le 16 mars 2006. Je souhaitais obtenir de votre part, monsieur le ministre, de plus amples détails notamment sur les baux signés par l'ANGDM et Bail Industrie. En effet, il y est mentionné que le montant du loyer est adapté à l'indemnité chauffage-logement et à l'aide personnalisée au logement. Or cette mesure risque d'entraîner un nouveau statut encadré par le droit commun et de remettre en cause durablement la gratuité acquise, qui est un droit de fait. Aussi, j'avais souhaité avoir des précisions sur les accords passés entre l'ANGDM et Bail Industrie.
Par ailleurs, en cas de vente à des particuliers, le droit du mineur se trouve confronté au droit de la propriété dont bénéficieront les nouveaux acquéreurs. Dans quelle mesure les droits acquis du mineur pourront-ils alors être respectés ?
Si je m'interroge à ce sujet, c'est que, récemment, en Lorraine, un couple de retraités, dont le mari est un ancien travailleur des mines, logé depuis trente ans dans une maison ayant appartenu au parc Arcelor, a vu le nouveau propriétaire utiliser une partie du terrain dont il avait jusqu'alors la jouissance. Il s'agit bien évidemment de personnes âgées sans méfiance et sans défense. Vous imaginez leur émoi. Bien que locataires, ces retraités se sentaient chez eux dans cette maison puisqu'ils y ont passé toute leur vie. Aujourd'hui, le nouveau propriétaire s'y installe, coupe les arbres, démolit leur garage à caravane sans aucune concertation préalable.
Imaginons un instant que, sous couvert de rénovation et de travaux, le nouveau propriétaire décide de les reloger ailleurs. Quelles seront les limites du droit de la propriété dans une telle situation ?
De façon plus générale, la vente des différents lots a conduit à une multiplicité d'interlocuteurs et de cas, et donc à la multiplicité des risques encourus par ces familles de retraités. C'est tout le patrimoine immobilier qui a été bradé dans ces opérations.
En Moselle et en Meurthe-et-Moselle, la majeure partie des logements vendus par Bail Industrie sont devenus la propriété de la Deutsche Bank. Le reste a pu être acquis par les communes et par les organismes d'HLM, soit directement, soit par l'intermédiaire de l'Établissement public foncier de Lorraine.
Si nous ne pouvons mettre en doute la volonté des communes de maintenir le droit des mineurs, il va autrement pour la filiale allemande. De plus, en ce qui concerne les organismes d'HLM, les loyers qu'ils percevront ne seront pas suffisants pour leur permettre de financer la remise en état des habitations, comme les normes les y obligent. Monsieur le ministre, je vous demande donc de bien vouloir considérer ces difficultés à venir et de voir dans quelle mesure nous pourrions aider ces organismes à garantir dans les meilleures conditions la gratuité du logement pour les mineurs.
Par ailleurs, l'ANGDM, qui a pour mission de garantir, au nom de l'État, les droits sociaux des mineurs retraités, semble persister dans ses dysfonctionnements : baisse des prestations, remise en cause permanente des acquis comme la gratuité du logement, retards de paiement, traitement tardif des dossiers.
Les syndicats dénoncent, à juste titre, la situation de blocage à la tête de cet organisme. Tout est prétexte à limiter le versement des prestations aux familles. Est-ce de l'imprévision, de la mauvaise gestion ou plutôt des contraintes financières qui amènent la direction à laisser perdurer une situation défavorable aux ayants droit ? L'heure du bilan est venue avec, je l'espère, à l'issue de ce débat, la possibilité d'une clarification juridique permettant à l'Agence de mener à bien ses missions et de mieux garantir les droits des mineurs.
En outre, sans entrer vraiment dans le sujet, je ne peux pas ne pas évoquer ici, d'une part, le pouvoir d'achat anormalement bas des anciens mineurs par rapport à la moyenne nationale, et davantage encore de leurs veuves, qui sont souvent dans une situation des plus dramatiques, et, d'autre part, les réformes engagées en matière de sécurité sociale, qui menacent la qualité, la proximité et la gratuité des soins. C'est un problème de santé publique qui touche une population dont l'âge moyen se situe autour de soixante-dix ans - soixante-treize ans pour les retraités des mines de fer -, et les besoins sanitaires ne diminuent pas, bien au contraire.
J'en viens à la question de l'urbanisme dans ces bassins miniers touchés par les affaissements. Les élus et les populations ont accueilli la mise en place des plans de prévention des risques miniers, les PPRM, comme un espoir dans un pays frappé par un gel de la constructibilité depuis près de dix ans. La prescription et l'application de ces plans devaient permettre à nouveau de mener à bien des projets d'urbanisme et de redynamiser nos communes au niveau architectural, économique et social.
Or, malheureusement, la réalité est tout autre : considérant la directive territoriale d'aménagement, la DTA, de manière restrictive, les services de l'État indiquent que les constructions en zones contraintes seront des exceptions.
En effet, les PPRM font l'objet d'interprétations variables, remettant aujourd'hui en cause leur portée : beaucoup semblait possible ; maintenant, peu se trouve autorisé.
Pourtant, le secteur touché par les risques miniers n'a jamais connu une telle demande d'urbanisation. C'est une grande opportunité de développement pour la région Lorraine après la désindustrialisation que nous avons connue. C'est pourquoi cette constructibilité doit être défendue et les règles générales en la matière ne doivent pas être rigides.
Ainsi, concernant les matériaux de construction, des expériences intelligentes ont été tentées et mériteraient qu'on les prenne en compte. Malheureusement, l'étude réalisée par le Centre scientifique et technique du bâtiment, le CSTB, qui sert de base dans l'élaboration des PPRM, ne fournit aucune donnée pour des habitations qui comprennent des matériaux comme le métal ou le bois.
M. Gérard Longuet. Absolument !
Mme Évelyne Didier. Par conséquent, les projets utilisant de telles ossatures sont écartés. Les élus se battent aujourd'hui pour que le territoire obtienne, dans la pratique, le droit à l'expérimentation qui lui est reconnu dans la DTA des bassins ferrifères nord lorrains.
Je me permets ici de revenir sur le paradoxe que rencontrent malheureusement les communes sinistrées : d'un côté, une marge de manoeuvre restreinte quant à la constructibilité ; de l'autre, une obligation de répondre à un quota de 20 % de logements sociaux sous peine d'amende. Je ne m'étendrai pas plus sur le sujet puisque je l'ai abordé lors de l'examen du projet de loi portant engagement national pour le logement. J'espère seulement que les promesses faites alors seront tenues.
Les affaissements miniers ont ainsi provoqué bien des désastres, qui ne cessent de se rappeler à nous au fur et à mesure que nous avançons. En effet, malgré tout ce qui a été enduré, les acteurs de ce bassin minier ne se sont jamais laissés aller. Élus et population ont toujours uni leurs efforts pour lui redonner vie et prouver aux yeux de tous son potentiel et sa réelle attractivité. Mais pour venir à bout des conséquences de l'arrêt de l'exploitation minière, il reste encore beaucoup à faire. Je rappelle à mon tour qu'il existe des dossiers en souffrance pour les dégâts survenus entre 1997 et 1998, notamment dans le bassin de Piennes-Landres.
Les problèmes posés aux communes, en dehors de la constructibilité, sont ceux des voiries et des réseaux détériorés qu'il faut réhabiliter ; mais avec quel argent ? Certains syndicats des eaux gravement touchés sont obligés d'augmenter le prix de l'eau. Je pense notamment au SIAOA, en Meurthe-et-Moselle, toujours en attente d'aide. Le contrat de projet État-Région est prévu pour la fin de l'année et, avec lui, l'espoir d'un financement qui engagera l'État et les grandes collectivités. Il faut absolument que le contrat de projet intègre un volet après-mines comme c'était le cas dans le dernier contrat de plan. Cela permettrait notamment un renouveau économique dans ces bassins miniers.
Je voudrais, à titre d'exemple, vous parler de Moutiers, petite ville de Lorraine qui, depuis 1997, se bat pour reconstruire tout un quartier détruit : 200 bâtiments irréparables ont dû être démolis ; le préjudice est évalué à 22 millions de francs pour la commune, qui a engagé contre Lormines une procédure n'ayant pas encore abouti. Comme si un malheur n'arrivait jamais seul, en 2005, face à cette zone détruite, juste à côté, on a annoncé à quatre-vingt-cinq familles l'existence d'un risque d'effondrement brutal, et donc la nécessité de quitter leur maison.
Dans le premier cas, en 1997, l'indemnisation a été réalisée sur la base d'un protocole d'accord amiable en vertu duquel la valeur prise en compte était la valeur de reconstruction à neuf avec, pour principe de base, la notion d' « un bien de confort et de consistance équivalent ».
Dans le second cas, en 2005, c'est l'estimation des Domaines qui a fait référence : on a pris en compte la valeur vénale des biens, ce qui n'a pas permis aux familles de se reloger à l'identique. Je rappelle que le prix des terrains est en train de flamber.
Même si l'on ne peut pas dire que rien n'a été fait, Moutiers est l'exemple des communes sinistrées en attente d'une indemnisation équitable, non seulement pour ses habitants, mais aussi pour elle-même.
Permettez-moi de vous faire part également de l'inquiétude que connaissent les habitants des communes concernées par l'arrêt du pompage des eaux d'exhaure. Nous savons que cela fragilise un peu plus le sous-sol. Oui, monsieur le ministre, je regrette la décision que l'État a prise malgré les protestations émises contre l'ennoyage et les avertissements d'élus locaux, de syndicats et de l'ensemble de la population.
Je voudrais aussi, monsieur le ministre, rappeler les termes d'une question écrite de Mme Annie David, sénatrice de l'Isère, qui s'inquiétait du sort réservé aux employés des comités d'entreprise de Charbonnages de France, pour lesquels nous avions demandé, lors de l'examen du texte, qu'ils soient intégrés dans l'effectif des mineurs afin de pouvoir bénéficier, eux aussi, des garanties de la profession. Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce qui a été décidé à ce sujet ?
J'aborderai enfin le sujet des nouvelles concessions minières. Je m'interroge en effet sur leur statut. Pouvez-vous, monsieur le ministre, m'indiquer à ce propos s'il existe une liste exhaustive des concessions qui ont été faites et quels en sont les propriétaires ? Je souhaiterais avoir des précisions sur la façon dont elles pourront être attribuées et exploitées. Si j'ai bien compris les termes de la loi précédente, le code minier et le statut du mineur ne s'appliquent plus. Il serait important de savoir ce qu'il va advenir de ces concessions.
La flambée du prix des matières premières, la question de la politique énergétique, la raréfaction prévisible des combustibles fossiles peuvent rendre à nouveau attractifs les minerais contenus dans notre sous-sol. Qui exploitera alors et dans quelles conditions ? N'avons-nous pas, un peu inconsidérément, laissé disparaître les savoir-faire acquis par des générations de mineurs ?
Pour conclure, il est évident que la gestion de l'après-mines n'a pas été jusqu'à présent maîtrisée. Et nous n'en sommes qu'au début. Il s'agit d'une situation complexe qui nécessite réflexion, organisation et compétence. C'est pourquoi, outre l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, l'ANGDM, qui a sa fonction propre en intervenant sur la protection des droits des anciens mineurs, outre le Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM, dont les compétences sont unanimement reconnues, l'Agence de protection et de surveillance des risques miniers, l'APSRM, avait vu le jour par un décret de mars 2002, afin d'archiver et de mettre à disposition les documents relatifs à la vie des sites miniers, et, surtout, de participer à la préparation des mesures de prévention liées aux risques miniers.
Or, aujourd'hui, l'utilité de l'agence semble remise en cause. L'orientation stratégique de l'établissement reste floue. Avant de supprimer ou de remettre en cause un tel outil et sous réserve d'inventaire, il serait judicieux de voir dans quelle mesure on pourrait le rendre véritablement opérationnel. Nous avons réellement besoin d'un organisme qui puisse faire avancer la réflexion sur les bassins miniers en général, et l'après-mines en particulier. Je sais que l'Europe s'est déjà saisie de cette question.
Ainsi, monsieur le ministre, élus, populations et syndicats attendent de l'État des éclaircissements et des réponses. Ils attendent surtout l'expression de la solidarité nationale. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d'introduire mon propos en vous confiant la satisfaction qui est la mienne aujourd'hui de débattre à nouveau de « l'après-mines », même si nous sommes surtout en présence d'élus lorrains.
Cette appellation, quelque peu restrictive, ne saurait se limiter à la seule gestion de l'arrêt d'activités traditionnelles. Elle cache des problématiques territoriales, économiques et sociales plus larges et plus complexes que celles qu'impose une simple reconversion. Je pense à l'ennoyage, à la gestion de l'eau, aux affaissements miniers, à la requalification urbaine, à la gestion du foncier et à la disparition programmée de Charbonnages de France.
Autant de dossiers qui demeurent une priorité à la fois par l'ampleur des travaux restant à réaliser que par l'attente sociale qu'ils constituent. Autant de chantiers qui recommandent un engagement fort de l'État au titre de la solidarité nationale. Celui-ci ne peut la refuser aux régions, aux hommes et aux femmes qui, pendant deux cents ans, firent les beaux jours de notre pays.
Ma satisfaction sera, je l'espère, encore plus grande, car ce débat, initié par notre collègue Philippe Leroy, soutien de la majorité gouvernementale, nous permettra sans doute d'obtenir des réponses peut-être plus claires et plus pertinentes que celles que le Gouvernement, depuis octobre 2004, m'adresse ou donne à mes collègues meurthe-et-mosellans ou mosellans, à savoir Daniel Reiner, Gisèle Printz et Jean-Pierre Masseret.
Peut-être, monsieur le ministre, aurai-je aujourd'hui une bonne nouvelle, ou simplement une information supplémentaire, à la suite de ma question orale du 31 mai relative au contrat de projet État-région Lorraine et à la possibilité d'y inscrire un volet après-mines avec, bien entendu, un chiffrage attendu de l'effort financier que le Gouvernement entend faire vers ce secteur ? Nous verrons bien.
Mais là n'est pas l'essentiel de mon propos. Je développerai quatre points faisant l'objet de plusieurs questions : la requalification urbaine du bassin houiller, les difficultés liées aux plans de prévention des risques miniers et les aides aux communes, l'indemnisation des sinistrés du bassin ferrifère lorrain et l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs.
J'évoquerai d'abord la requalification urbaine du bassin houiller de Lorraine, quitte à me répéter, puisque j'avais déjà évoqué ce sujet ici même le 31 mai dernier. Les communes de ce secteur devant achever la réhabilitation de leurs cités minières devront faire face à un éventuel transfert des actifs immobiliers qui sont encore la propriété de Charbonnages de France.
Selon un premier recensement des besoins exprimés à la fin de l'année 2005, seront encore nécessaires : 70 millions à 100 millions d'euros pour les travaux de voirie et d'assainissement, 20 millions d'euros pour les travaux d'alimentation en eau potable, et 30 millions à 40 millions d'euros pour faire face aux transferts des actifs immobiliers de Charbonnages de France.
Jusqu'à présent, le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, prenait en charge les travaux de voirie et d'assainissement des communes minières. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous confirmer ces chiffres et nous assurer que le FNADT sera abondé de façon suffisante pour faire face à cette réalité ?
J'examinerai ensuite les difficultés liées aux plans de prévention des risques miniers, les fameux PPRM, et les aides aux communes.
La loi du 30 mars 1999 a créé les plans de prévention des risques miniers. Ceux-ci imposent des servitudes d'urbanisme qui limitent l'urbanisation des secteurs touchés, mais ces contraintes ne donnent lieu à aucune indemnisation et ne permettent pas à ces communes de se développer. Or ces servitudes ont des incidences fiscales pour les communes concernées. Elles réduisent les bases de la taxe d'habitation, des taxes foncières, et parfois même de la taxe professionnelle.
C'est le cas, par exemple, d'Ottange, en Moselle, où 22 % du territoire se situe en zone d'effondrement ou de fontis. Si les moyens mis en oeuvre à Fontoy peuvent constituer un exemple de la manière dont tous les acteurs, y compris l'État, peuvent se mobiliser pour maintenir l'équilibre financier d'une commune, trop nombreuses sont ou seront les communes qui connaîtront ces problèmes pour intervenir de façon ponctuelle. Aussi le Gouvernement est-il favorable à l'instauration d'une compensation pour ces collectivités.
Par ailleurs, les PPRM devaient permettre de lever, dans certains cas, le gel des permis de construire et le blocage de la révision des plans d'urbanisme dans le secteur ennoyé du bassin sidérurgique centre lorrain. Ce n'est malheureusement pas le cas dans la mesure où peu de communes ont reçu à ce jour les cartes d'aléas miniers.
Face à l'impossibilité de disposer, sur les bassins sud et centre, des études d'investigations nécessaires pour élaborer ces cartes d'aléas, l'État a confié à GEODERIS ce travail d'analyse du risque qui devrait s'achever au mieux dans trois ans.
En attendant, il ne faudrait pas que le principe de précaution, auquel on doit naturellement souscrire, conduise la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, la DRIRE, à adopter une posture systématiquement restrictive. Dans certains cas limites, il peut arriver que l'administration refuse la construction d'un abri de jardin ou d'un velux.
M. Gérard Longuet. Exact !
M. Jean-Marc Todeschini. Il ne faudrait pas non plus que ce principe, important, conduise automatiquement à classer une zone non étudiée en zone rouge.
Il serait grand temps, sous peine de mettre en péril le développement des collectivités concernées, d'établir avec précision les zones à risques, la nature des aménagements autorisés et de libérer les autres.
Le troisième point que j'aborderai est celui des indemnisations des sinistrés.
Je n'évoquerai pas le nombre de dossiers déposés, je le connais puisque vous avez bien voulu me le communiquer, le 15 juin dernier, en réponse à ma question écrite du 21 octobre 2004. Je me pencherai sur ceux qui n'ont pas été étudiés et sur ceux qui ont été rejetés.
Sur 287 dossiers déposés depuis 2004, 87 - peut-être un peu plus maintenant - ont été étudiés, 30 ont été rejetés, car la majorité des dégâts sont antérieurs au 1er septembre 1998, date retenue par la loi du 30 juillet 2003 et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, le FGAOD.
À l'époque, nous avions proposé que soit traitée la totalité des sinistres, identifiés comme tels depuis 1994. Cela avait été refusé. Le 24 novembre 2004, au cours d'un débat identique à celui d'aujourd'hui, votre prédécesseur avait précisé que cette question devrait être examinée une fois établie l'évaluation du coût correspondant aux dommages. Où en est-on aujourd'hui, monsieur le ministre ? Le Gouvernement entend-il revenir à cette date de 1994 ?
Chacun connaît l'interminable feuilleton des indemnisations : après moult expertises, contre-expertises, lourdeurs et lenteurs des procédures, les sinistrés parviennent à se faire indemniser, mais à une hauteur insuffisante quand on connaît la valeur actuelle d'une maison sur le marché immobilier dans notre région, proche du Luxembourg et de la Sarre.
Dans le cadre du débat sur la proposition de loi de 2004 portant création de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et diverses dispositions relatives aux mines, les membres du groupe socialiste avaient présenté un amendement ayant pour objet de faire clairement préciser la notion de réparation intégrale des dommages et de supprimer le principe du plafond.
Cet amendement, qui prévoyait une réparation intégrale des dommages visés au I de l'article L. 421-17 du code des assurances, avait été rejeté par le rapporteur, M. Philippe Leroy, et par le Gouvernement.
Néanmoins, l'État entend-t-il tenir compte de l'intention du législateur qui, voilà quelques années, a clairement indiqué que les sinistrés ne devaient subir aucune perte de valeur sur leurs biens ? Compte-t-il étendre la réparation des dégâts à l'ensemble de la propriété, à savoir aux dépendances, au garage et au terrain ?
À ce stade de mon propos, permettez-moi d'aborder également les difficultés rencontrées par les familles propriétaires concernées par un risque d'effondrement minier, en prenant l'exemple de la commune de Moutiers.
Le 8 mars 2005, l'État annonçait à 87 familles du secteur de Moutiers Haut qu'un risque d'effondrement minier brutal affectait le quartier, plaçant celles-ci sous le coup d'une mesure d'expropriation, comme le rappelait Mme Evelyne Didier.
À compter de février 2006, ces familles propriétaires de leurs logements devaient avoir le statut de locataires à titre gracieux de l'État. Elles ont donc déposé une demande d'exonération de leur taxe foncière, à partir de janvier 2006, qui leur a été refusée. Elles se sont retrouvées paradoxalement expropriées, locataires et redevables de la taxe foncière et de la taxe d'habitation.
Je n'ignore pas que des possibilités de minorer la taxe foncière et la taxe d'habitation existent, et cela me paraît même une bonne chose. Toutefois, déjà fragilisées par le drame des affaissements miniers, ces familles sont pénalisées et leurs difficultés ne se règlent pas.
Dans ces conditions, le Gouvernement envisage-t-il pour les familles concernées aujourd'hui, comme pour celles qui subiront dans l'avenir les mêmes désagréments, de les exonérer de la taxe foncière et de la taxe d'habitation ?
En outre, l'État aura-t-il les ressources nécessaires pour assurer l'indemnisation des sinistrés ? Les 500 000 euros de crédits de paiement affectés à l'indemnisation dans le programme 174 de la loi de finances pour 2006 au titre des « passifs financiers miniers » seront-ils suffisants ?
Le programme 174 consent un effort, certes, puisqu'il est en augmentation de 2,7 %, mais sur les 672 millions d'euros affectés, 86 % sont consacrés aux prestations sociales des anciens mineurs et à certains retraités des industries gazières et électriques d'Afrique du Nord.
Cela me permet de faire la transition avec le dernier point que j'évoquerai, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs.
Cette agence, on le sait, a connu un certain nombre de dysfonctionnements qui remettaient en cause les acquis des mineurs, des anciens mineurs et de leurs ayants droit, en liaison aux retards de paiement des prestations.
Je peux comprendre que le statut juridique d'établissement public administratif, EPA, ait nécessité, depuis janvier 2005, une adaptation des procédures internes de travail et de contrôle, qui s'est opérée progressivement et a allongé les précédents délais d'instruction et de traitement des demandes.
Je peux comprendre également que ces règles et ce contrôle traduisent l'obligation pour tout EPA d'apporter aux citoyens la garantie que les fonds publics qui lui sont confiés sont utilisés à bon escient et dans des conditions d'une régularité incontestable.
Mais cela ne justifie pas tout : les problèmes existent, ne serait-ce que ceux qui sont liés aux « us et coutumes » dont l'inventaire a été dressé en 2001 et annexé au décret du 23 décembre 2004. Ce recensement fut incomplet, et vous l'avez reconnu, tant et si bien que les comités locaux devront le compléter par un deuxième inventaire, qui sera ensuite validé par le conseil d'administration de l'agence. Ces droits, qui devront a priori être attestés au moins par des preuves financières, seront maintenus, mais non étendus.
Dès lors, comment entendez-vous faire, monsieur le ministre, pour préserver un traitement égalitaire, équitable ? Les ayants droit auront-ils le bénéficie de ces us et coutumes ?
Par ailleurs, les agents des mines ou leurs ayants droits sont traditionnellement logés dans un parc immobilier issu des anciens exploitants. Ce patrimoine est en cours de restructuration.
Le Gouvernement prévoit-il la signature de conventions entre l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et les bailleurs sociaux, afin de répondre aux attentes des agents logés et aux besoins d'adaptation de l'ancien patrimoine, et ce sans remettre en cause le droit au logement gratuit ?
Quant à la gratuité des soins pour les mineurs et leurs ayants droits, chacun sait que la disparition de la sécurité sociale minière a été programmée. Cette dernière, riche en équipements médicaux, assure jusqu'à présent l'intégralité des soins pour les ayants droit. La carte Vitale, dont ils bénéficient désormais, devrait leur donner le statut de malade pris en charge à 100 % par la sécurité sociale. Est-ce le cas ? À défaut, il s'agirait d'un recul sur le plan des avantages acquis par la corporation minière.
Enfin, le décret du 3 mai 2002 a permis de corriger partiellement l'écart entre les retraites minières et celle du régime général. En effet, les mesures de revalorisation de ce décret ne concernent que les mineurs ayant liquidé leurs retraites après 1987. Il pénalise les mineurs des anciens bassins. Le Gouvernement envisage-t-il de remédier à cette inégalité en attribuant des trimestres supplémentaires aux mineurs ayant liquidé leur retraite avant 1987 ?
Telles sont les questions qu'il me semblait important de soulever à nouveau aujourd'hui.
Je vous remercie des réponses que vous pourrez y apporter, monsieur le ministre. Elles sont très attendues par les communes, les populations et les mineurs, qui comptent sur la solidarité nationale. Une solidarité qui devra encore s'exercer pendant des décennies, car nous ne sommes malheureusement qu'au début des difficultés, non seulement dans le bassin sidérurgique, mais aussi, et surtout, dans le bassin houiller lorrain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier Philippe Leroy et le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Émorine, d'avoir pris l'initiative de demander l'inscription à l'ordre du jour du Sénat de cette question orale avec débat, tant il est vrai que le suivi de l'ensemble des actions en faveur des secteurs touchés par l'après-mines est indispensable
Monsieur le ministre, vous avez pris la succession de Patrick Devedjian sur ce dossier et nous avons des échanges continus sur ce sujet. Derrière votre silhouette, se profile d'ailleurs celle de l'ingénieur des mines (M. le ministre délégué sourit), qui manifestera sans aucun doute une compétence et une attention toute particulières dans ce domaine !
J'attire votre attention sur le climat consensuel dans lequel sont intervenus les orateurs précédents : Philippe Leroy en particulier pour l'après-mines charbon dans l'Est mosellan, Évelyne Didier avec des accents de vérité et d'authenticité sur les secteurs du bâtiment, de l'urbanisme des communes du bassin ferrifère et, à l'instant, Jean-Marc Todeschini notamment sur le problème social et la mise en place effective de la garantie des droits mineurs, au-delà de l'agence, dans la réalité quotidienne.
En effet, nous suivons avec une attention toute particulière la situation des anciens salariés des communes dont l'activité a été pendant des décennies un facteur de richesses pour l'économie lorraine, mais, d'une façon générale, pour l'État et, accessoirement, avant les nationalisations, pour les entreprises privées qui ont su s'y constituer des patrimoines.
Je m'exprime, à cet instant, non pas au titre de mes responsabilités anciennes qui m'ont amené à m'intéresser à ce sujet comme président de région ou comme ministre de l'industrie, mais tout simplement en tant que sénateur de la Meuse, même si, sur les trois départements lorrains concernés par l'action après-mines, le mien est sans doute celui qui l'est le plus modestement.
Le département de la Meuse partage avec le Pays Haut, la Meurthe-et-Moselle et le bassin de Landres-Bouligny les difficultés qui sont spécifiques au secteur de l'après-mines ferrifère. Il le fait de façon modeste en apparence seulement, car, en réalité, mon département a très longtemps servi de réservoir de main-d'oeuvre pour les activités sidérurgiques et ferrifères à la réussite desquelles il y a donc contribué. Ainsi, les cars de ramassage de la mine ou de la sidérurgie, qu'elles soient de Longwy, de la Fensch ou de l'Orne, allaient chercher dans les bourgs ruraux de la Meuse la main-d'oeuvre nécessaire à la réussite de ces activités. À cet instant, nous ne pouvons pas l'oublier.
Naturellement, nous sommes solidaires des propos qui ont été tenus en ce qui concerne les droits sociaux, même si les effectifs sont moins nombreux à être touchés.
Je souhaite revenir sur la nécessité, évoquée par Évelyne Didier, comme par Philippe Leroy, de prolonger l'action menée dans le cadre du volet « après-mines ».
Le contrat de plan, négocié avec l'État en 2000, était modeste, voire médiocre, au regard du contrat de plan précédent et n'a été satisfaisant pour la Lorraine qu'en raison de l'apport constitué par le volet après-mines. L'engagement du gouvernement de l'époque, M. Lionel Jospin était alors Premier ministre et M. Christian Pierret, ministre délégué à l'industrie, a pu jouer un rôle en faveur de l'après-mines, a permis d'obtenir des crédits substantiels, qui ont ramené l'action de l'État à un niveau comparable à celui qui avait été obtenu dans le contrat précédent.
Ainsi, dans le département de la Meuse, c'est bien le volet après-mines qui a permis de financer la déviation de la RN 18 à Étain, apportant la sécurité aux habitants de cette commune et, surtout, favorisant un désengagement du Pays Haut et du pôle d'activité de Longwy et de Mont-Saint-Martin.
Ce volet après-mines reste indispensable. Alors que vous préparez les contrats de projets qui vont associer l'État avec les régions, les départements, les communes - dans une complication que j'ai d'ailleurs parfois du mal à maîtriser -, je souhaite que les actions spécifiques de l'après-mines soient retenues.
Je pense, en particulier, au bassin ferrifère du Pays Haut meurthe-et-mosellan et de la Meuse, parce que nous avons une opportunité qu'il nous faut saisir, monsieur le ministre, et tel est le sens de mon intervention.
Je ne nie aucune des contestations exprimées par mes prédécesseurs à cette tribune et j'y ajouterai une interrogation spécifique quant au rôle que vous entendez confier à l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers, dont la mise en oeuvre semble plus difficile que prévu.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur le fait que ce volet après-mines n'est pas uniquement défensif et ne vise pas simplement à donner aux collectivités locales les moyens de reconstituer leur patrimoine de réseaux, comme l'a dit Philippe Leroy à juste titre. Il s'agit également de saisir l'opportunité considérable que constitue, pour ce bassin ferrifère, le développement du Luxembourg en général et, plus particulièrement, de la zone d'activité luxembourgeoise de Esch-Belval.
Près de 20 000 emplois de services sont prévus, et de fortes raisons incitent à penser que l'optimisme luxembourgeois n'est pas sans fondement.
Les Luxembourgeois ont fait le choix d'une localisation sur d'anciennes friches industrielles situées à la frontière de la France et du Luxembourg non pas tant pour nous faire plaisir, mais pour se simplifier la vie, c'est-à-dire pour bénéficier d'une main-d'oeuvre qualifiée, compétente, formée, abritée, distraite, assurée en services de santé par la vie collective française. Cette main-d'oeuvre n'encombrera pas inutilement les réseaux d'infrastructures de transports luxembourgeois, puisque la zone de Belval est exactement à la frontière.
Encore faut-il que les communes minières du bassin ferrifère puissent accompagner la demande de logements qui se manifeste aujourd'hui. Par exemple, en Meuse, dans la commune de Bouligny, qui m'est familière, j'ai pu constater, pour avoir fait le tour des quatre cités minières, que si les rénovations sont en cours, elles restent à poursuivre, et que les ventes immobilières ont quasiment cessé, toutes les maisons ayant été vendues, à la suite d'un mouvement de migration de toute une population qui se déplace vers le nord lorrain pour bénéficier de l'opportunité qui s'offre à elle.
Nous devons aider ces communes en réalisant très rapidement les cartes d'aléas miniers, afin de leur permettre de réaliser des projets. Aujourd'hui, elles sont totalement paralysées.
La commune de Dommary-Baroncourt, qui dispose d'une zone d'activité considérable de soixante hectares, se voit notifier l'impossibilité d'utiliser plus d'un tiers de cette superficie parce que le PPRM et l'absence de carte précise d'aléas miniers aboutissent à empêcher toute action, à titre de précaution.
De la même façon, des maisons qui devraient être rénovées ne peuvent l'être, quand bien même les financements privés nécessaires existent, du fait d'une interprétation, certes compréhensible mais parfois excessive, du principe de précaution qui conduit à bloquer la délivrance des permis de construire.
Surtout, il faut reprendre le volet « infrastructures » de l'après-mines. Or, monsieur le ministre, en tant que président de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, je suis bien placé pour dire que nous craignons que l'État ne soit pas, ou n'ait pas les moyens d'être, le partenaire des collectivités locales, départementales principalement, dans la construction d'un réseau conforme à cet objectif simple : rendre accessible cette zone d'activité.
Il s'agit donc, pour employer un terme savant, d'élargir les courbes isochrones de temps d'accès à la zone d'Esch-Belval afin que les communes de l'ensemble du bassin ferrifère qui, depuis les débuts de l'exploitation de la minette lorraine, ont apporté par le passé leurs capacités de main-d'oeuvre à cette zone d'activité traditionnelle retrouvent la même fonction en accueillant des actifs - non plus, certes, de l'industrie mais du secteur tertiaire - qui feront le choix d'y habiter dès lors, d'une part, que le risque minier aura été dissipé ou, plus exactement, que la réalité du risque minier aura été clarifiée et, d'autre part, que sera assuré le soutien de l'État aux collectivités locales, départementales et intercommunales, pour mettre en oeuvre une politique d'infrastructures de transport rendant accessible la zone d'activité de l'ouest Lorrain qui irrigue le Pays Haut.
Si nous parvenons à un tel résultat, monsieur le ministre, nous aurons fait pour l'après-mines un effort de reconstitution et de protection qui constituerait non seulement un hommage, rendu par la collectivité nationale, au travail des communes et pays miniers, mais aussi et surtout une promesse d'avenir pour des territoires qui ont désormais la ferme intention d'aller au-delà du souvenir pour épouser à travers cette modernité transfrontalière des promesses de réussite. (Applaudissements.)
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en introduction, je tiens à dire à Philippe Leroy que sa question au Gouvernement était tout à fait opportune. Venant après la discussion, en 2004, de sa précédente question sur l'après-mines, elle nous permet en effet de parler à nouveau ou, devrais-je dire, de continuer à parler de la gestion de ce dossier et, avec l'espoir de les résoudre un à un, des nombreux problèmes qui demeurent en suspens, problèmes qui parfois sont douloureux pour les populations des bassins miniers, qui en tout cas les préoccupent et préoccupent les élus.
Tous, nous avons présent à l'esprit que ces régions, qui ont joué un rôle essentiel dans le développement de la France pendant un siècle et demi et qui souffrent depuis quelques années, méritent une attention particulière, et chacun aura relevé la cohérence de la Lorraine sur ce sujet, dont je regrette d'ailleurs à mon tour qu'il ne semble toucher que notre région, alors qu'il y a 300 bassins miniers en France.
Je voudrais éviter les redondances avec les interventions précédentes, mais, inévitablement - la répétition n'est-elle pas cependant l'art de la pédagogie ? -, mon propos portera sur un certain nombre de points déjà évoqués : l'indemnisation des sinistrés, l'élaboration des PPRM, le devenir de l'agence de prévention et de surveillance des risques miniers et les futurs contrats de projets État-région.
L'indemnisation des sinistrés est le premier point que je traite parce qu'elle s'adresse aux populations les plus touchées dans ce qui leur est cher.
Après l'intervention des sociétés minières elles-mêmes ou de leurs assureurs et le règlement de la délicate question des clauses restrictives dans les contrats de vente aux particuliers, qui n'a pas été évoquée aujourd'hui mais qui a fait couler beaucoup d'encre par le passé, puisque certains particuliers s'étaient, sans le savoir, engagés à ne jamais se retourner contre les sociétés minières, l'État s'est substitué aux sociétés minières défaillantes et la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a mis en place - comme le rappelait Philippe Leroy, le consensus était général - un nouveau dispositif d'indemnisation par le biais du fonds de garantie des dommages immobiliers d'origine minière, et c'était en effet une excellente chose.
Mais nous répétons, et nous répéterons encore, que cette loi n'intervient que pour les dégâts survenus à compter du 1er septembre 1998, alors même que les premiers effondrements ont été constatés dès 1994.
Les chiffres que je vais citer recoupent ceux qui ont été précédemment avancés.
Selon les services de la préfecture de la région Lorraine, à la fin de 2005, 287 demandes d'indemnisation ont été enregistrées par le fonds de garantie. La majorité de ces dossiers porte sur la commune de Roncourt, qui avait été particulièrement touchée, et sur le fameux secteur du bassin de Landres-Piennes.
À ma connaissance, sur ces 287 dossiers, 115 ont été traités - dont 85 dossiers indemnisés et 30 demandes rejetées - et six sont en cours d'instruction.
Quant aux 166 autres dossiers, ils sont encore en instance, la plupart d'entre eux - Philippe Leroy a cité le nombre de 140 - étant antérieurs au 1er°septembre 1998. L'évaluation annoncée par M. Devedjian, alors ministre délégué à l'industrie, voilà un an et demi, n'a pas été publiée, mais, sur le terrain, nous savons qu'il s'agit de sinistres de faible ampleur dont l'indemnisation s'élèverait en moyenne à 2 000, 3 000 ou 4 000 euros au plus.
Dans ces conditions, il semble à tous que l'État s'honorerait s'il prenait en charge l'ensemble de ces dossiers antérieurs à 1998 pour régler cette question lancinante. Certes, il paraît qu'il y a des règles et qu'il pourrait y avoir une jurisprudence, mais, le délai, qui, en la circonstance, est de dix ans, nous ramène à 1996 et il n'y a plus grand risque que cette jurisprudence trouve encore à s'appliquer. À l'évidence, une telle mesure contribuerait à renforcer la notion d'égalité d'indemnisation de toutes les victimes de dégâts miniers.
L'élaboration des plans de prévention des risques miniers constituera, je l'ai dit, le deuxième point de mon intervention.
Lors du débat sur l'après-mines d'octobre 2004, le ministre en charge de ce dossier avait dit qu'il attachait une grande importance au déploiement rapide des PPRM et il avait même assuré que le bassin ferrifère lorrain serait traité en priorité.
Je veux témoigner ici de l'effort qui a été accompli : les acteurs impliqués, GEODERIS, les DRIRE, les DDE, ont fait, compte tenu des moyens dont ils disposaient, aussi vite que possible. À ce jour, pratiquement tous les PPRM sont prescrits - en Meurthe-et-Moselle, ils le sont tous.
Dans un premier temps, à la demande des préfets, la quasi-totalité des PPRM ont été appliqués par anticipation, avec l'inconvénient que les zones d'aléas n'avaient pas toutes étaient fixées.
Nous avons alors constaté de la part des services instructeurs des permis de construire, des interprétations diverses selon les départements, en particulier sur les zones à affaissements résiduels, c'est-à-dire les zones à aléas beaucoup plus faibles Ainsi, on a pu voir, sur un même bassin minier s'étalant sur deux départements limitrophes, la Moselle et la Meurthe-et-Moselle, des décisions divergentes, acceptation dans un cas, refus dans l'autre, alors que les circonstances étaient identiques.
Ce n'est évidemment pas très convenable et cela prouve qu'il serait bon qu'une attitude cohérente soit définie assez « haut » pour que les règles soient appliquées de la même manière dans tous les départements.
Plus grave, ces dysfonctionnements ayant été constatés, une décision de caractère administratif est « tombée » - je suppose qu'elle émanait de la préfecture de la région -, imposant par précaution une application très stricte des PPRM en cours d'élaboration.
Ainsi, là où on avait été d'abord plus « large » et où des fondations avaient, après approbation de bureaux d'études, été acceptées, il a fallu revenir en arrière. Les maires qui avaient conseillé les pétitionnaires sur la base des premières instructions se sont vus, dans une certaine mesure, désavoués et ils ont aujourd'hui le sentiment que l'on est revenu en arrière.
En conséquence, après un progrès, l'application mal coordonnée des règles a finalement rendu plus complexe l'examen des permis de construire, ce qui a eu pour effet de multiplier le nombre des refus.
Peut-être, monsieur le ministre, avez-vous, conjointement avec votre collègue chargé du logement, un rôle à jouer à ce stade, car il conviendrait de mettre les différentes administrations d'accord entre elles afin d'assurer un traitement égal sur l'ensemble du territoire.
Le troisième point de mon intervention portera sur l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers.
Cette agence a été évoquée par Philippe Leroy et par Gérard Longuet. Elle est d'ailleurs évoquée un peu partout, mais il semble que cela n'aille pas plus loin... Membre de son conseil d'administration, je la pratique depuis sa mise en place et je reprends une comparaison que j'ai déjà faite : on a le sentiment que chacun est un peu honteux qu'après un accouchement difficile on ait donné naissance à un enfant malformé.
Je voudrais que l'on parle sereinement de l'APSRM.
Le législateur en 1999, sur le fondement du rapport du député de Meurthe-et-Moselle Jean-Yves Le Déaut, avait décidé la création de cette agence pour assurer une véritable mémoire de l'après-mines dans un lieu de partage des connaissances d'où celles-ci pourraient être transmises de manière simple et rapide.
Défini dans la loi puis précisé par un décret qui, il faut bien le dire, avait tardé puisqu'il avait fallu attendre trois ans sa publication, ce qui prouve qu'il y avait des réticences, au plus haut niveau de l'État ou dans certains ministères, quant à la mise en place de cette agence, le rôle de celle-ci devait être le suivant : recueillir les pièces essentielles du dossier d'arrêt d'exploitation minière ; conserver dans ses locaux et sous sa responsabilité ces documents ; les mettre à la disposition des personnes et collectivités qui en auraient l'usage.
Elle devait par ailleurs être associée par le préfet à toutes les étapes de l'élaboration des plans de prévention des risques miniers établis en application de l'article 94 du code minier, « son avis [étant] réputé favorable s'il n'est pas exprimé dans le délai d'un mois à compter de chacune de ses saisines », phrase qui a elle seule fait apparaître qu'il s'agit d'un avis purement formel.
L'agence devait en outre pouvoir être consultée, ce qu'elle n'a jamais été, sur les projets de textes réglementaires portant sur la prévention des risques miniers.
Après une difficile mise en place et une difficile montée en puissance, l'agence a dû faire face à une autre difficulté : son budget a sans cesse été revu à la baisse.
Tout cela fait planer, on le sent bien, un doute réel sur son existence future.
Je voudrais faire un petit historique de cette agence depuis sa création en 2002 et rappeler au Sénat, qui a désigné parmi ses membres deux administrateurs, lesquels ont donc à rendre compte de ce qui s'y passe, qu'au fond elle a toujours été dans une situation extrêmement délicate, et c'est un euphémisme.
En 2003, année de son démarrage, il a été procédé à la nomination du président et du directeur. Mais l'exécution du budget n'a pu être conforme aux prévisions puisque le directeur a démissionné en novembre de la même année - je ne cherche pas à savoir pourquoi, mais il a démissionné.
En 2004, alors même que le directeur n'a toujours pas été remplacé, c'est le président qui, cette fois, démissionne après quelques mois d'activité. Donc, l'exécution budgétaire n'a été que partielle, extrêmement faible.
En 2005, si un nouveau président est nommé en janvier, le directeur n'est nommé qu'en mai. Le fonctionnement réel ne peut se faire qu'à partir de cette date, c'est-à-dire pendant l'été 2005. Puis, à partir de la mi-septembre, ordre est venu d'en haut de mettre un terme à un fonctionnement raisonnable. En effet, sur la subvention initiale, qui avait été fixée à 550 000 euros pour cette année, on a versé 36 000 euros seulement, invoquant des réserves de l'année précédente. À l'évidence, on ne pouvait pas continuer à travailler ainsi. En tant qu'administrateur, j'ai même reçu, à un moment donné, des appels téléphoniques de la part de personnels de l'agence, pas payés depuis quatre mois, ce qui est quand même étrange pour un établissement public d'État !
Évidemment, en 2006, l'engagement financier est totalement insuffisant. En effet, le budget de cette année s'élève à 212 000 euros. Je rappelle que pour 2004, année a priori de plein fonctionnement, c'était 850 000 euros. C'est clair : si on lui donne 212 000 euros, c'est qu'on la condamne à l'inertie !
La tâche de cette agence est plus que difficile : elle est impossible. Au regard des missions qui lui sont fixées par la loi, elle n'a pas les moyens de fonctionner et elle n'a pas le potentiel d'intervention suffisant.
Au regard de son statut, on est un peu dans le ridicule. Il est évident qu'un établissement public qui emploie deux ou trois personnes, franchement, ce n'est pas adapté, ce n'est pas proportionné.
Au regard des besoins de gestion de l'après-mines, on peut s'interroger. Ce sont les textes réglementaires qui le disent. Actuellement, le décret ne lui donne l'accès qu'à 10 % des dossiers d'arrêt définitif d'exploitation minière : elle ne verra pas 90 % des textes compte tenu de la date retenue de 2001. Pour ne citer qu'un exemple, s'agissant du bassin ferrifère lorrain dont l'arrêt définitif a eu lieu avant 2001, elle ne disposera jamais des documents de fermeture de ces concessions. C'est tout de même assez surprenant ! Nous, Lorrains, qui sommes ici, il faut que nous le sachions, au moment où nous parlons de cette agence.
Insuffisamment dotée pour assurer ses strictes missions, son fonctionnement n'est évidemment pas satisfaisant, et cela renforce l'idée d'une agence peu présente, voire inutile. Vous l'avez bien compris, si je dis tout cela, c'est pour montrer qu'on ne peut évaluer l'action de cette agence au vu de ses réalisations : elle n'a jamais pu maîtriser convenablement son développement.
Il est assez tentant, à ce stade, de dire qu'au fond sa suppression n'aurait pas de conséquences. Le BRGM, par exemple, serait tout à fait adapté pour traiter des questions dont elle est chargée. Les archives départementales, entre autres structures, pourraient aussi traiter de ces questions, encore que M. Philippe Leroy nous ait mis en garde contre le risque de trop surcharger les archives départementales.
Honnêtement, je trouve le raisonnement un peu court. Il faut revenir à l'esprit : l'agence devait représenter un espace d'échange où pourraient s'exprimer sans contrainte élus et services de l'État, en particulier sur le sujet épineux des plans de prévention des risques miniers et, plus largement, sur toutes les questions d'aménagement et d'urbanisme en domaine minier, par nature contraint.
L'agence possède en elle cette légitimité intéressante, car elle est l'un des seuls intervenants à pouvoir introduire dans la médiation des arguments techniques autres que ceux qui sont avancés par les services de l'État chargés de l'instruction.
Pour le moment, le statut de l'agence est original. Les tâches centralisées au niveau du ministère qui seront menées ne sont pas actuellement envisageables par les entités après-mines ni par les archives territoriales.
La seule question qui se pose à nous est une question de fond : y a-t-il encore intérêt à disposer au sein du dispositif national d'un lieu de concertation et de coordination - la question des PPRM est un bon exemple - qui a valeur de référent, de centre de ressources et d'appui à la gestion de l'après-mines ?
Ayant été l'un des rares à participer à la gestion de cette agence - un second sénateur avait été désigné mais n'ayant pu occuper la fonction de président qu'il briguait, il a démissionné immédiatement et critique depuis systématiquement cette agence à l'administration de laquelle il ne participe pas -, je réponds oui, sans hésitation. En effet, je ne veux pas laisser les collectivités locales seules face à la technique et à l'administration. Déjà dans une situation difficile, elles ont besoin, à l'évidence, d'une médiation originale, et c'était le cas. De ce point de vue, rien n'interdit de penser qu'elle pourrait être plus présente au moins dans sa déclinaison au niveau régional.
Rien ne l'interdit après tout. Certes, je sais que l'on fait souvent la comparaison avec les plans de prévention des risques naturels, lesquels sont élaborés sans qu'il y ait une agence nationale des risques naturels. J'en conviens, mais l'activité minière se rapproche plus, en termes de risques, des risques technologiques. Or pour ce qui est de ces derniers, on a mis en place, que je sache, des comités locaux d'information qui réunissent élus et population. Ils prouvent que, sur ces questions, une concertation à la base est nécessaire.
Réfléchissons-y à deux fois avant de s'engager dans la suppression de cette agence au prétexte qu'elle n'aurait pas suffisamment travaillé. Elle n'en a jamais eu les moyens. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain !
M. Gérard Longuet. Avec les eaux d'exhaure, plus exactement...
M. Daniel Reiner. Pour parler de l'avenir, je voudrais dire quelques mots, et vous sentez que la cohérence est très forte sur toutes les travées, concernant le rôle de l'État dans les futurs contrats de projets entre les collectivités territoriales et l'État. Naturellement, nous nous interrogeons sur la volonté du Gouvernement d'assumer encore son rôle s'agissant de la solidarité nationale. En effet, si on peut se féliciter de la manière dont les contrats de plan État-région 2000-2006 intégraient cette question, il est légitime de se poser la question pour les futurs contrats de projets.
Je pense bien sûr à la région Lorraine qui, compte tenu de son histoire minière, a longuement contribué au dynamisme économique de la France et dont les habitants entendent bien pouvoir compter sur la solidarité nationale.
Sans revenir sur l'application des PPRM, qui limitent l'urbanisme, on assiste aujourd'hui, en Lorraine, à une flambée des prix du foncier, liée à la proximité du Luxembourg, de la Belgique et de l'Allemagne, flambée qui ne permet plus aux habitants de la région d'accéder à la propriété ni aux élus locaux de réaliser des logements sociaux. C'est une question à laquelle il faudra répondre.
Dans le passé, on a assisté à une très forte hémorragie démographique évidemment liée à l'arrêt de l'activité minière ou sidérurgique. Elle a fait perdre entre 25 % et 30 % de la population de cette région, certaines communes ayant même perdu plus de 30 % de leur population. Paradoxalement, on assiste aujourd'hui à une pression extrêmement forte sur ces mêmes zones pour y faire revenir des habitants, comme le rappelait M. Longuet. Il faut donner les moyens d'accueillir ces nouvelles populations dans de bonnes conditions.
Il faut bien sûr poursuivre les efforts en matière de requalification urbaine et de réhabilitation des logements. De l'argent est nécessaire. Nous attendons de l'État qu'il continue à jouer son rôle moteur.
Reste aussi le problème de la sécurisation de l'approvisionnement en eau pour quelques syndicats locaux. Là encore, ce sont des sommes très importantes qui sont nécessaires.
Bien entendu, la région Lorraine entend continuer à assumer l'ensemble de ses responsabilités sur ces questions, comme elle l'a toujours fait. Elle a inscrit l'après-mines en bonne place dans le contrat de projet qu'elle entend discuter prochainement avec l'État. Je rappelle que le dernier contrat de plan comprenait, pour le volet « après-mines », 833 millions de francs, soit 120 millions à 130 millions d'euros attribués par l'État.
Monsieur le ministre, nous attendons de vous des réponses à la hauteur des enjeux. Les Lorrains sont prêts à agir eux-mêmes. C'est leur caractère et leur tradition. Vous l'avez vu aujourd'hui encore dans cet hémicycle. S'il fut un temps où la Lorraine a été annexée, j'ai l'impression qu'aujourd'hui ce sont les Lorrains qui ont annexé l'hémicycle du Sénat, tout au moins la tribune ! (Sourires.)
La reconversion est en marche. Elle n'est pas achevée. Nous attendons de ce nouveau contrat de sept ans que l'État accompagne comme d'habitude la Lorraine dans son effort. (Applaudissements.)
(M. Guy Fischer remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.)