Article 1er
I. - Après l'article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé :
« Art. 10-1. - I. - A. - Préalablement à la conclusion de la vente, dans sa totalité et en une seule fois, d'un immeuble à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel de plus de dix logements au profit d'un acquéreur ne s'engageant pas à proroger les contrats de bail à usage d'habitation en cours à la date de la conclusion de la vente afin de permettre à chaque locataire ou occupant de bonne foi de disposer du logement qu'il occupe pour une durée de six ans à compter de la signature de l'acte authentique de vente qui contiendra la liste des locataires concernés par un engagement de prorogation de bail, le bailleur doit faire connaître par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à chacun des locataires ou occupants de bonne foi l'indication du prix et des conditions de la vente, dans sa totalité et en une seule fois, de l'immeuble ainsi que l'indication du prix et des conditions de la vente pour le local qu'il occupe.
« Cette notification doit intervenir à peine de nullité de la vente, dans sa totalité et en une seule fois, de l'immeuble. Elle s'accompagne d'un projet de règlement de copropriété qui réglera les rapports entre les copropriétaires si l'un au moins des locataires ou occupants de bonne foi réalise un acte de vente, ainsi que des résultats d'un diagnostic technique, portant constat de l'état apparent de la solidité du clos et du couvert et de celui de l'état des conduites et canalisations collectives ainsi que des équipements communs et de sécurité. Ce diagnostic est établi par un contrôleur technique au sens de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation ou par un architecte au sens de l'article 2 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, qui ne doit avoir avec le propriétaire de l'immeuble ou son mandataire aucun lien de nature à porter atteinte à son impartialité ou à son indépendance. Les dépenses afférentes à ce diagnostic sont à la charge du bailleur.
« Nonobstant les dispositions de l'article 1751 du code civil, cette notification est de plein droit opposable au conjoint du locataire ou occupant de bonne foi si son existence n'a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur. Elle vaut offre de vente au profit du locataire ou occupant de bonne foi.
« L'offre est valable pendant une durée de quatre mois à compter de sa réception. Le locataire ou occupant de bonne foi qui accepte l'offre ainsi notifiée dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de l'acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie au bailleur son intention de recourir à un prêt, son acceptation de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et, en ce cas, le délai de réalisation est porté à quatre mois. Passé le délai de réalisation de l'acte de vente, l'acceptation de l'offre de vente est nulle de plein droit.
« Lorsque, en raison de la vente d'au moins un logement à un locataire ou un occupant de bonne foi, l'immeuble fait l'objet d'une mise en copropriété et que le bailleur décide de vendre les lots occupés à des conditions ou à un prix plus avantageux à un tiers, le notaire doit, lorsque le propriétaire n'y a pas préalablement procédé, notifier au locataire ou occupant de bonne foi ces conditions et prix à peine de nullité de la vente. Cette notification vaut offre de vente à leur profit. Elle est valable pendant une durée d'un mois à compter de sa réception. L'offre qui n'a pas été acceptée dans le délai d'un mois est caduque.
« Le locataire ou occupant de bonne foi qui accepte l'offre ainsi notifiée dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au propriétaire ou au notaire, d'un délai de deux mois pour la réalisation de l'acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire ou occupant de bonne foi de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, la vente n'a pas été réalisée, l'acceptation de l'offre de vente est nulle de plein droit.
« Les dispositions du présent A doivent être reproduites, à peine de nullité, dans chaque notification.
« B. - Préalablement à la conclusion de la vente mentionnée au premier alinéa du A, le bailleur communique au maire de la commune sur le territoire de laquelle est situé l'immeuble le prix et les conditions de la vente de l'immeuble dans sa totalité et en une seule fois. Lorsque l'immeuble est soumis à l'un des droits de préemption institués par les chapitres Ier et II du titre Ier du livre II du code de l'urbanisme, la déclaration préalable faite au titre de l'article L. 213-2 du même code vaut communication au sens du présent article.
« II. - Les dispositions du I ne sont pas applicables en cas d'exercice de l'un des droits de préemption institués par le titre Ier du livre II du même code ou lorsque la vente intervient entre parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus.
« Elles sont applicables aux cessions de la totalité des parts ou actions de sociétés lorsque ces parts ou actions portent attribution en propriété ou en jouissance à temps complet de chacun des logements d'un immeuble de plus de dix logements.
« Elles ne sont pas applicables aux cessions de parts ou actions susvisées lorsque ces cessions interviennent entre parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus. »
II. -- Après l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 210-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 210-2. - En cas de vente d'un immeuble à usage d'habitation, la commune peut faire usage de son droit de préemption pour assurer le maintien dans les lieux des locataires. »
Article 1er bis
I. - Après l'article 1584 du code général des impôts, il est inséré un article 1584 bis ainsi rédigé :
« Art. 1584 bis. - Le conseil municipal peut, sur délibération, réduire le taux de la taxe additionnelle aux droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière jusqu'à 0,5 % pour les mutations visées au 1° du 1 de l'article 1584, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
« 1° La mutation s'inscrit dans le cadre d'une opération consistant :
« a) Soit en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l'article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation ou le droit de préemption prévu à l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ;
« b) Soit en la vente d'un ou plusieurs lots, consécutive à la mise en copropriété d'un immeuble en raison de l'exercice, par l'un des locataires ou occupants de bonne foi, du droit de préemption prévu à l'article 10-1 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 précitée ;
« 2° La mutation porte sur un logement occupé ;
« 3° L'acquéreur s'engage dans l'acte d'acquisition à affecter le logement à la location pendant une période minimale de six ans à compter de la date d'acquisition.
« Les dispositions de l'article 1594 E sont applicables. »
II. - Après l'article 1594 F quinquies du même code, il est inséré un article 1594 F sexies ainsi rédigé :
« Art. 1594 F sexies. - Le conseil général peut, sur délibération, réduire le taux de la taxe de publicité foncière ou des droits d'enregistrement jusqu'à 0,5 %, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
« 1° La mutation s'inscrit dans le cadre d'une opération consistant :
« a) Soit en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l'article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation ou le droit de préemption prévu à l'article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ;
« b) Soit en la vente d'un ou plusieurs lots, consécutive à la mise en copropriété d'un immeuble en raison de l'exercice, par l'un des locataires ou occupants de bonne foi, du droit de préemption prévu à l'article 10-1 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 précitée ;
« 2° La vente porte sur un logement occupé ;
« 3° L'acquéreur s'engage dans l'acte d'acquisition à affecter le logement à la location pendant une période minimale de six ans à compter de la date d'acquisition.
« Les dispositions de l'article 1594 E sont applicables. »
III. - Dans la première phrase du I de l'article 1840 G ter du même code, les mots : « ou de taxe de publicité foncière » sont remplacés par les mots : «, de taxe de publicité foncière ou de taxe additionnelle aux droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière ».
Mme la présidente. Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Adeline Gousseau, pour explication de vote.
Mme Adeline Gousseau. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, la France connaît une grave crise du logement. Le cas de l'Île-de-France est assez symptomatique de ce contexte. En effet, cette région doit surmonter deux principales difficultés : d'une part, des prix de l'immobilier atteignant un niveau excessivement élevé et, d'autre part, une spéculation croissante sur la vente à la découpe d'immeubles.
Aucune région n'est à l'abri de ces dangers. Nous sommes tous confrontés à ces questions. Tous, nous tentons de trouver les réponses efficaces pour lutter contre ce phénomène.
Nous voici au terme de la navette parlementaire. À cette occasion, je tiens à féliciter notre rapporteur, Laurent Béteille, de son excellent travail. Je me réjouis, d'une part, que le Sénat ait utilement participé à ce débat en enrichissant nettement la proposition de loi initiale et, d'autre part, que le texte que nous nous apprêtons à adopter aujourd'hui émane, pour l'essentiel, des travaux de notre Haute Assemblée.
Au cours de nos discussions, nous nous sommes attachés à trouver une solution juste et équilibrée entre les projets - qu'il ne faut pas entraver - de nombreux Français d'accéder à la propriété et la protection des droits de ceux qui ne peuvent pas devenir propriétaires.
Parmi les mesures phares adoptées, le Sénat a ainsi renforcé le droit de préemption du locataire lors d'une vente à la découpe, créé des instruments d'incitation fiscale pour que les communes et les départements encouragent les personnes acquéreurs d'un logement occupé à y maintenir leur locataire pendant au moins six mois, et augmenté de cinq à dix logements le seuil au-delà duquel le dispositif de préemption s'appliquera.
Ce seuil apparaît plus cohérent avec, d'une part, le dispositif des accords du 9 juin 1998 et du 6 mars 2005 applicables aux ventes d'immeubles comprenant plus de dix logements et, d'autre part, le dispositif en vigueur de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1975.
Ce relèvement de seuil devrait, de facto, exclure la quasi-totalité des bailleurs personnes physiques du dispositif, dans la mesure où une infime minorité d'entre eux est propriétaire d'immeubles de dix logements et plus.
Malgré les mesures indispensables et attendues qui ont été prises, il faut avoir conscience que tous les problèmes qui affectent le logement dans les villes de France n'ont pas été résolus.
Ce texte constitue néanmoins une étape essentielle dans la lutte contre les spéculations immobilières qui peuvent exclure de l'accession à un logement trop de nos concitoyens.
Nous avons la responsabilité politique de mettre un terme à cette menace et de protéger nos concitoyens les plus fragiles et les plus exposés aux caprices du marché immobilier.
C'est la voie dans laquelle s'est engagé le Gouvernement, soutenu par sa majorité, depuis 2002. Une politique efficace en matière de logement ne peut être appréhendée que dans sa globalité. Tel est le sens de notre politique, suivie d'actions puisque, dans les faits, la construction de logements sociaux demeure sans précédent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je tiens à faire quelques observations, car il est des contrevérités que je ne saurais laisser passer. (M. David Assouline proteste.)
Vous êtes de toute façon coutumier du fait, monsieur Assouline !
Vous avez parlé des personnes les plus fragiles. Je vous rappelle qu'elles sont protégées par l'accord du 9 juin 1998 - ce qu'il ne faut pas oublier de dire - et qu'elles l'auraient été mieux encore par celui de juin 2005 s'il ne s'était pas trouvé quelques associations de locataires pour refuser de le signer, ce qui, en fin de compte, a empêché de protéger les plus fragiles et nous a obligés à légiférer. Sans ces associations, tout était résolu ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat fait un signe de protestation.)
Nous avons dû légiférer, mais il est bon de dire que d'autres moyens contractuels et conventionnels s'offraient à nous, qui étaient bien meilleurs.
Monsieur Assouline, dans l'accord de 1998, comme dans celui de 2005 et comme dans la proposition de loi socialiste figurait le seuil de dix logements, parce que telle est la règle traditionnelle dans les accords collectifs, règle que nous n'avions pas de raison de changer puisque nous n'avions noté aucun problème particulier à Paris ou en Île-de-France pour les immeubles de moins de dix logements. Prétendre le contraire relève du pur fantasme !
Je tenais à apporter ces précisions pour bien montrer que, lorsque certains nous reprochent de ne pas protéger les personnes les plus fragiles,...
M. David Assouline. C'est vrai !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non, c'est faux, monsieur Assouline !
Quelques personnes ont mené toute une campagne alors qu'elles ont bénéficié de rentes de situation pendant de très nombreuses années et qu'elles auraient pu depuis longtemps acheter leur logement. Ce ne sont tout de même pas ces personnes-là que nous devons protéger en premier ! Voilà la cause de toutes les difficultés qui sont survenues. Le vote de cette proposition de loi est devenu indispensable à partir du moment où l'accord de 2005 n'a pas été étendu. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
6
Dépôt d'une proposition de loi organique
Mme la présidente. J'ai reçu de M. Gaston Flosse une proposition de loi organique portant modification de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
La proposition de loi organique sera imprimée sous le n° 373, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
7
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
Mme la présidente. J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi tendant à instaurer une obligation de parité pour l'élection des vice-présidents de conseils régionaux, à assurer la représentation des listes minoritaires dès le premier tour des élections régionales et à clarifier les choix au second tour.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 374, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
8
ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 6 juin 2006 :
À dix heures :
1. Dix-huit questions orales.
(Le texte des questions figure en annexe.)
À seize heures et le soir :
2. Discussion du projet de loi (n° 362, 2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'immigration et à l'intégration ;
Rapport (n° 371, 2005-2006) de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 5 juin 2006, avant dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 5 juin 2006, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à quinze heures trente-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD