Article 10
Les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement sont remplacés par onze alinéas ainsi rédigés :
« 1° D'établir, de mettre à jour tous les trois ans et de publier l'inventaire des matières et déchets radioactifs présents en France ;
« 2° De réaliser ou faire réaliser, conformément au plan national prévu à l'article L. 542-1-1, des recherches et études sur l'entreposage et le stockage en couche géologique profonde et d'assurer leur coordination ;
« 3° De contribuer, dans les conditions définies à l'avant- dernier alinéa du présent article, à l'évaluation des coûts afférents à la mise en oeuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue, selon leur nature ;
« 4° De prévoir, dans le respect des règles de sûreté nucléaire, les spécifications pour le stockage des déchets radioactifs et de donner aux autorités administratives compétentes un avis sur les spécifications pour le conditionnement des déchets ;
« 5° De concevoir, d'implanter, de réaliser et d'assurer la gestion de centres d'entreposage ou des centres de stockage de déchets radioactifs compte tenu des perspectives à long terme de production et de gestion de ces déchets ainsi que d'effectuer à ces fins toutes les études nécessaires ;
« 6° D'assurer la collecte, le transport et la prise en charge de déchets radioactifs sur demande et aux frais de leurs responsables ou sur réquisition publique lorsque les responsables de ces déchets sont défaillants ;
« 7° De mettre à la disposition du public des informations relatives à la gestion des déchets radioactifs et de participer à la diffusion de la culture scientifique et technologique dans ce domaine ;
« 8° De diffuser à l'étranger son savoir-faire.
« L'agence peut obtenir le remboursement des frais exposés pour la gestion des déchets radioactifs pris en charge sur réquisition publique des responsables de ces déchets qui viendraient à être identifiés ou qui reviendraient à meilleure fortune.
« L'agence propose au ministre chargé de l'énergie une évaluation des coûts afférents à la mise en oeuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue selon leur nature. Après avoir recueilli les observations des redevables des taxes additionnelles mentionnées au V de l'article 43 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) et l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, le ministre chargé de l'énergie fixe et rend publique l'évaluation de ces coûts.
« L'agence peut conduire, avec toute personne intéressée, des actions communes d'information du public et de diffusion de la culture scientifique et technologique. »
M. le président. L'amendement n° 72, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement par les mots :
, notamment ceux d'origine étrangère, listés par pays
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Cet amendement est limpide et ne devrait pas poser trop de difficultés.
Il s'agit de préciser qu'un soin particulier sera apporté au fait de lister au sein de l'inventaire des matières et déchets radioactifs présents en France les déchets d'origine étrangère en fonction de leur origine, afin d'assurer le respect des dispositions prises par ailleurs pour préparer le retour de ces déchets une fois les délais de traitement échus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement souligne tout l'intérêt qu'appelle le contrôle des flux de déchets radioactifs d'origine étrangère. Ces derniers bénéficieront d'ailleurs de l'encadrement désormais prévu par l'article L. 542-2-1 du code de l'environnement inséré par l'article 5 du projet de loi.
Pour les matières, c'est-à-dire les substances valorisables, l'origine étrangère n'est en revanche pas strictement identifiée dans les différentes étapes du cycle qu'elles vont subir en France.
Aussi, votre commission marque son accord de principe avec le présent amendement, mais estime que l'ajout d'une mention spécifique pour les substances d'origine étrangère ne peut valoir que pour les déchets et non pour les matières valorisables ; ces dernières seront traitées par l'inventaire national établi par l'ANDRA comme les matières d'origine française.
La commission propose donc de modifier l'amendement en remplaçant les mots : «, notamment ceux d'origine étrangère, listés par pays » par les mots : «, les déchets visés à l'article L. 542-2-1 étant listés par pays ».
Sous réserve de cette modification, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Madame Voynet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par la commission ?
Mme Dominique Voynet. J'accepte bien volontiers la modification proposée par la commission. M. le rapporteur est adroit : il a réussi à supprimer l'adverbe « notamment » qui aurait conduit M. Longuet à voter contre ! (Sourires.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 72 rectifié, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement par les mots :
, les déchets visés à l'article L. 542-2-1 étant listés par pays
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable.
Je souligne que c'est une science subtile, puisqu'il existe des substances, des matières et des déchets. Je suis donc favorable à l'inventaire des déchets par pays.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité des présents.
L'amendement n° 90, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter in fine le premier alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement par les mots :
ainsi que leur localisation sur le territoire national
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. La loi « Bataille » de 1991 obligeait l'ANDRA à répertorier non seulement les déchets radioactifs, mais aussi leur localisation en France ; ce n'est pas tout à fait la même chose.
Une telle précision nous paraît utile afin que l'inventaire actuellement élaboré par l'ANDRA puisse être poursuivi selon les principes prévus initialement par la loi « Bataille ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement est en effet utile en termes de transparence, qui est le but visé par l'inventaire national des déchets radioactifs et des matières valorisables.
La commission y est favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement. D'ailleurs, cela se fait déjà.
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement, remplacer les mots :
de centres d'entreposage ou des centres de stockage
par les mots :
des laboratoires souterrains de recherche, des centres de stockage en couches géologiques profondes, des nouveaux centres d'entreposage en surface ou en faible profondeur, des centres de stockage
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement vise en particulier à redéfinir et à compléter les missions dévolues à l'ANDRA.
On ne peut que se féliciter de certaines nouvelles missions désormais confiées à l'ANDRA, comme celles d'assurer la collecte, le transport et la prise en charge des déchets radioactifs, notamment - je suis navré pour M. Longuet ! - en cas de défaillance des responsables, sur réquisition publique, ou encore d'informer le public sur la gestion des déchets radioactifs et de diffuser la culture scientifique et technologique dans ce domaine.
Il n'en convient pas moins de réaffirmer clairement que seule l'ANDRA est chargée de la réalisation et de la gestion des laboratoires et des centres de stockage souterrains, mais aussi de tous les centres d'entreposage en surface ou en faible profondeur qui pourraient être créés après la promulgation de la présente loi. De telles fonctions ne peuvent être confiées qu'à un organisme public comme l'ANDRA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Les motivations des auteurs de cet amendement nous laissent perplexes. Elles sont assez difficiles à comprendre, même avec les explications qui ont été données. Pourquoi réserver à l'ANDRA l'exclusivité de la construction et de la gestion d'un ensemble d'installations parmi lesquelles figurent les centres d'entreposage en surface ? Pourquoi les lieux d'entreposage de La Hague, que nous connaissons tous, ne continueraient-ils pas à être gérés par AREVA ? C'est la même chose pour le CEA ou pour EDF.
N'ayant pas trouvé de réponse à ces questions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Je ne vois pas quels problèmes cet amendement résoudrait. Il n'y a aucune raison de retirer les entreposages existants à leurs gestionnaires.
J'émets donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le sixième alinéa (6°) du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement :
« 6° D'assurer la collecte, le transport et la prise en charge de déchets radioactifs et la remise en état de sites de pollution radioactive sur demande et aux frais de leurs responsables ou sur réquisition publique lorsque les responsables de ces déchets ou de ces sites sont défaillants ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement vise à ajouter aux missions de l'ANDRA la remise en état des sites de pollution radioactive.
Nous évoquions tout à l'heure le principe de responsabilité des producteurs et des détenteurs de déchets radioactifs, mais nous avons aussi à gérer les sites dits « orphelins » qui existent aujourd'hui, pour lesquels l'État, à travers l'ANDRA, doit intervenir. Cette mission est déjà assurée par l'ANDRA dans les faits et doit être maintenue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Je suis favorable à cet amendement.
Si vous l'adoptez, l'ANDRA aura une fonction comparable à celle de l'ADEME à l'égard des sites pollués orphelins non radioactifs.
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
le ministre chargé de l'énergie
rédiger comme suit la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer les 1° à 5° de l'article L. 542-12 du code de l'environnement :
arrête l'évaluation de ces coûts et la rend publique.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Il vous est proposé ici un amendement de précision.
C'est bien le ministre chargé de l'énergie qui donne son caractère officiel et définitif à l'évaluation des coûts des solutions de gestion à long terme des déchets de type C, c'est-à-dire des déchets à haute et moyenne activité à vie longue.
C'est un élément important, car c'est à partir de ce montant que les producteurs de déchets et l'ANDRA signeront des conventions permettant le transfert à l'agence des sommes provisionnées par les exploitants nucléaires pour la gestion de leurs déchets.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. J'émets un avis favorable, même si c'est une lourde responsabilité pour mes lointains successeurs. (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article additionnel après l'article 10
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mme Demontès et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé:
L'établissement public de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs est administré par un conseil d'administration, composé d'un tiers de représentants de l'État, d'un tiers de représentants des organismes et sociétés intéressés par l'action de l'établissement, et d'un tiers de personnalités qualifiées nommées sur proposition de l'Académie des Sciences.
Un membre du Sénat et un membre de l'Assemblée nationale nommés sur proposition de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, siègent également au conseil d'administration, mais ne peuvent exercer les fonctions de président ou de vice - président.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Il s'agit d'un amendement d'appel visant à modifier la composition du conseil d'administration de l'ANDRA.
Je tiens à rappeler que le rapport public particulier de la Cour des comptes relatif aux déchets radioactifs, publié en 2005, attirait l'attention sur les problèmes posés par l'actuelle composition du conseil d'administration de l'ANDRA.
Il soulignait, notamment, que sa composition témoignait d'un manque d'indépendance à l'égard des producteurs.
Il faisait remarquer que, dans la pratique, la composition prévue par le décret de 1992 conduisait à une large représentation des producteurs de déchets de la filière électronucléaire, qui sont aussi les clients de l'agence : CEA, COGEMA, EDF et Framatome-ANP.
Selon la Cour des comptes « cette représentation des producteurs joue un rôle positif de dialogue, mais devient contre-productive lorsque ceux-ci privilégient leur position de client par rapport à celle de membre du conseil d'administration. »
Celle-ci suggérait de modifier les modalités de la gouvernance en donnant à l'ANDRA une plus grande autonomie à l'égard des producteurs de déchets.
Par ailleurs, elle dénonçait la situation récurrente de vacance du pouvoir liée aux difficultés de nomination des membres du conseil d'administration.
Cet amendement tente de répondre à ces préoccupations.
Nous proposons donc de rééquilibrer la composition du conseil d'administration de l'ANDRA en rappelant que cette agence est un établissement public à vocation économique et scientifique. Il faut donc traduire cette caractéristique dans la composition de son conseil d'administration : un tiers de représentants de l'État, un tiers de clients et un tiers de scientifiques.
Enfin, il est proposé qu'un membre du Sénat et un membre de l'Assemblée nationale, nommés sur proposition de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, siègent également au conseil d'administration de l'ANDRA, leurs fonctions étant cependant incompatibles avec celles de président ou de vice-président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Mes chers collègues, nous avons tous pris la mauvaise habitude de prévoir dans la loi la création de nouveaux établissements publics qui relèvent pourtant du domaine réglementaire.
Il nous est même arrivé d'aller plus loin et de prévoir les modalités d'organisation interne de ces établissements publics, notamment leur composition.
C'est une tendance à laquelle il faut savoir résister, surtout lorsqu'il s'agit d'un établissement public qui existe depuis quinze ans et qui produit les résultats attendus par le législateur.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Cet amendement vise à réduire la représentation de l'État, à supprimer la représentation des délégués du personnel et à augmenter la représentation des clients. Je ne crois pourtant pas que telle soit votre volonté, monsieur Piras, car vous sembliez penser que la représentation des clients était trop forte.
J'émets donc un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Piras, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Piras. J'ai pris le soin d'indiquer qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Je n'ai pas de composition précise à vous proposer. J'aimerais simplement que l'on tienne compte des remarques formulées par la Cour des comptes.
La réponse de M. le rapporteur ne me convient pas du tout ; je ne la trouve pas positive. Celle du ministre me sied davantage, car elle a le mérite de poser le problème.
La réflexion doit se poursuivre, en commission mixte paritaire ou ailleurs, sur une composition qui permettrait de ne pas mélanger les rôles.
Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 91 rectifié est retiré.
Article 11
Après l'article L. 542-12 du code de l'environnement, il est inséré un article L. 542-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 542-12-1. - Il est institué, au sein de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, un fonds destiné au financement des recherches et études sur l'entreposage et le stockage en couche géologique profonde des déchets radioactifs. Les opérations de ce fonds font l'objet d'une comptabilisation distincte permettant d'individualiser les ressources et les emplois du fonds au sein du budget de l'agence. Le fonds a pour ressources le produit de la taxe dite de «recherche» additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base prévue au V de l'article 43 de la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999).
« L'agence dispose d'une subvention de l'État qui contribue au financement des missions d'intérêt général qui lui sont confiées en application des dispositions des 1° et 6° de l'article L. 542-12.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 92, présenté par MM. Piras, Raoul, Teston et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après l'article L. 542-3 du code de l'environnement, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Il est créé un établissement public industriel et commercial dénommé Fonds de gestion des déchets radioactifs.
« Ce fonds a pour objet le financement de la recherche, de la gestion industrielle des déchets radioactifs et des combustibles usés non retraités.
« Géré sous la responsabilité de l'État par la Caisse des dépôts et consignations, ce fonds externalisé dédié recueille les contributions des producteurs de déchets radioactifs.
« Le montant de la contribution annuelle versée à ce fonds par les producteurs de déchets radioactifs est fixé par décret de manière à garantir les différents financements.
« La contribution initiale versée par les producteurs de déchets à titre de fonds de roulement est égale à une fraction, fixée par décret, des provisions pour la gestion des déchets radioactifs, constituées par les producteurs.
« Les modalités du transfert progressif au fonds externalisé des actifs dédiés constitués par les producteurs de déchets radioactifs sont arrêtées par décret en Conseil d'État.
« Une partie des actifs transférés, peut être constituée de biens immobiliers ou d'installations industrielles, dont les producteurs de déchets conservent la disposition et la gestion.
« Le montant et la répartition des financements annuels accordés par le fonds sont arrêtés par un comité d'administration composé, d'une part, pour moitié au moins, de représentants de l'État, et, d'autre part, de représentants de producteurs de déchets et d'un député et d'un sénateur désignés par le Parlement sur proposition de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
« Le comité d'administration est assisté d'un comité scientifique dont les membres sont désignés par le Gouvernement sur proposition de l'Académie des sciences.
« Un décret en Conseil d'État précisera les modalités d'organisation et de fonctionnement du fonds externalisé dédié. »
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Cet amendement vise à créer un fonds externalisé dédié pour sécuriser le financement à long terme de la gestion des déchets radioactifs.
Si l'on veut que ce fonds externalisé dédié soit géré selon les règles les plus répandues, il convient de confier sa gestion à la Caisse des dépôts et consignations et la répartition du financement qu'il permettra à un conseil d'administration indépendant.
Les fonds recueillis représenteront, à terme, des sommes très importantes.
Le transfert des actifs, déjà constitués, par les producteurs de déchets pourra se faire progressivement et en fonction des besoins, de manière à préserver l'équilibre financier de l'entreprise.
La gestion scientifique et technique de ce fonds sera très importante, tant pour le choix des objectifs de recherche et leur programmation que pour la mise en oeuvre des installations industrielles : entreposage et stockage.
Le fonctionnement public du dispositif de financement et de mise en oeuvre de la filière des déchets nucléaires à haute activité est une garantie supplémentaire de transparence et de démocratie à laquelle l'opinion publique est particulièrement sensible.
La mise en place d'un tel dispositif visant à sécuriser les fonds dédiés nous paraît nécessaire.
Comment ne pas rappeler que la Cour de comptes a mis en évidence les limites du système actuel et les multiples zones d'ombre qui subsistent encore en raison, notamment, de l'évolution possible du capital des opérateurs ? Elle recommande, d'ailleurs, dans son dernier rapport de prendre des mesures pour sécuriser ces fonds dédiés.
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques recommandait également, dans son dernier rapport, l'adoption d'un dispositif semblable à celui qui est prévu par cet amendement.
Ce dispositif permet une meilleure transparence et un contrôle plus efficace des fonds dédiés qui, rappelons-le, sont constitués au final des contributions des consommateurs versées aux producteurs d'électricité.
M. le président. L'amendement n° 138 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-12-1 du code de l'environnement, avant les mots :
l'entreposage
insérer les mots :
le conditionnement,
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Cet amendement aurait pu trouver sa place à l'article 10. Nous proposons que l'ANDRA puisse être compétente non seulement pour l'entreposage et le stockage, mais également pour le conditionnement.
Le conditionnement est en effet une activité préalable à l'entreposage et au stockage. Il doit donc faire l'objet d'une réflexion, afin d'assurer une certaine compatibilité dans le circuit de circulation des déchets nucléaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. L'amendement n° 92 est le premier d'une série qui vise à constituer les fonds dédiés au démantèlement des installations, à la recherche et à la gestion des déchets et des combustibles usés sous la forme de fonds externalisés.
C'est une option intéressante et un sujet sur lequel il faut être pragmatique tant il existe des interrogations de part et d'autre de cet hémicycle. J'en veux pour preuve la grande ouverture avec laquelle nous avons débattu de ces sujets en commission.
C'est dans ce cadre que je voudrais expliquer aussi simplement que possible les raisons qui ont amené la commission, qui n'avait pas d'idée préconçue, à soutenir le système de fonds internes proposé par le projet de loi.
Cela vaut à la fois pour les fonds concernant la recherche, prévus à l'article 11, pour ceux qui sont destinés au financement des centres de stockage et d'entreposage, prévus à l'article 11 bis, et pour les fonds relatifs au démantèlement des installations et à la gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs, prévus à l'article 14.
Nous sommes partis d'un constat simple : personne ne sait exactement aujourd'hui quel sera le coût du démantèlement des centrales, celui de la construction, et encore moins celui de la gestion d'installations telles qu'un centre de stockage réversible.
Or il est bien clair que la logique de l'externalisation, si elle est mise en oeuvre de façon cohérente, conduit à transférer de l'exploitant vers des structures ad hoc à la fois le passif représenté par les déchets ou les charges de démantèlement et les actifs qui ont été constitués pour couvrir ces charges.
Cette solution serait envisageable - mon sentiment personnel est qu'elle le sera sans doute un jour - s'il était également possible de déterminer sans trop d'incertitude le montant du passif et de l'actif nécessaire.
Si tel n'est pas le cas - c'est la situation actuelle - les exploitants transféreront à la structure mise en place des actifs dont le montant pourra s'avérer très inférieur aux charges représentées. Il n'est pas du tout certain qu'après le paiement de cette soulte les exploitants, libérés de la charge, pourront être contraints par l'État à payer la différence. Déresponsabilisées de leur démantèlement et de la gestion de leurs déchets, les entreprises mèneront leur vie.
C'est la raison pour laquelle, dans l'attente d'une connaissance plus fine du coût du démantèlement ou de la gestion des déchets et des combustibles par les procédés annoncés pour les vingt prochaines années, il me semble plus raisonnable de laisser aux exploitants nucléaires la responsabilité à la fois des charges et des actifs qui leur sont dédiés.
Ce raisonnement nous a conduits à préférer aujourd'hui une gestion interne des fonds dont il est question. Bien évidemment, cette méthode n'est applicable que si les fonds en question sont complètement sécurisés et encadrés par des règles très strictes, dont le contrôle est assuré, avec des pouvoirs importants, par l'administration et par le Parlement.
De plus, il est nécessaire que soit mis en place un mécanisme d'évaluation permanente des charges financières à couvrir, faute de quoi le système de la gestion interne des fonds perdrait l'un de ses principaux avantages sur le système de la gestion externalisée.
Le projet de loi, en particulier tel qu'il ressort de l'Assemblée nationale - avec l'article 11 bis et le III bis de l'article 14 -, remplit aujourd'hui ces conditions qui rendent pour nous préférable la gestion interne des fonds dédiés à l'aval du cycle nucléaire.
Tels sont, mes chers collègues, les principes qui guident le choix de la commission et qui me conduisent à émettre un avis défavorable sur les amendements en faveur d'une externalisation des fonds.
Cette longue présentation vaudra également pour les amendements suivants.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 92.
Quant à l'amendement n° 138 rectifié, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. La démonstration de M. le rapporteur au sujet de l'amendement n° 92 m'a convaincu. Je n'en ai pas de meilleure à vous offrir !
Il s'agit d'un vrai problème et, dans chaque pays, des solutions originales ont été trouvées.
Hier, en répondant aux orateurs, j'ai indiqué qu'une raison technique de fond nous gênait beaucoup : les déchets resteraient de la responsabilité des opérateurs, même si la gestion du fonds était externalisée. Cette responsabilité induirait des provisions dans leurs comptes. Dès lors, on compliquerait le problème au lieu de le simplifier.
Les contraintes que nous avons mentionnées dans la loi s'agissant de la gestion de ces fonds, le cantonnement qui est prévu, suffisent à atteindre les objectifs visés.
Je suis donc défavorable à l'amendement n° 92.
En ce qui concerne l'amendement n° 138 rectifié, j'y suis également défavorable, non pas que j'estime qu'il ne faille pas oeuvrer sur le conditionnement, mais parce que cela va de soi. À l'instar des plans de circulation, ce travail est nécessaire et l'ANDRA doit l'intégrer dans ses études.
Le fait d'évoquer le conditionnement n'est pas un problème en soi. Mais si nous apportions cette précision, cela pourrait conduire à s'interroger plus tard sur l'absence d'autres thèmes de recherche dans le texte, comme la conception ou le plan de circulation.
En outre, la loi doit-elle détailler précisément tous les travaux de recherche que l'ANDRA doit mener ? Je ne le crois pas ! Il est évident que cette agence étudiera la question du conditionnement.
En conséquence, même si le Gouvernement est d'accord avec Gérard Longuet sur le fond, il lui demande de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur l'amendement n° 138 rectifié ?
M. Henri Revol, rapporteur. Lors de l'examen d'un précédent amendement, la commission avait déjà expliqué les raisons pour lesquelles elle n'était pas favorable au fait d'inscrire la mention « conditionnement » : la recherche n'est pas axée sur un seul domaine.
Après avoir entendu les explications du Gouvernement, la commission invite M. Longuet à retirer son amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Teston, l'amendement n° 92 est-il maintenu ?
M. Michel Teston. Je connaissais les arguments qui ont été avancés par la commission et par le Gouvernement, car ils avaient déjà été développés lors des réunions de la commission.
Il est vrai que le sujet est particulièrement délicat et qu'il est difficile de choisir la bonne solution. Néanmoins, plusieurs indicateurs incitent à opter pour le fonds externalisé dédié.
Tout d'abord, nombre de pays étrangers ont fait ce choix. Ensuite, les deux rapports que j'ai cités, tant lors de la discussion générale qu'en présentant l'amendement n° 92, retiennent cette formule ; je fais bien entendu référence au rapport de la Cour des comptes et à celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Je maintiens donc cet amendement.
M. le président. Monsieur Longuet, l'amendement n° 138 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Longuet. Monsieur le ministre, votre explication ne m'a pas totalement convaincu. Je préfère donc maintenir mon amendement.
Le conditionnement est en effet l'un des éléments qui permet d'assurer la fluidité des colis de déchets nucléaires entre l'entreposage et le stockage. Que se passerait-il si le conditionnement retenu pour l'entreposage n'était pas compatible avec le stockage ? C'est bien sûr inimaginable, mais qu'arriverait-il si le conditionnement prévu en commun pour l'entreposage, puis pour le stockage, ne permettait pas la réutilisation dans l'hypothèse où la première voie, celle de la séparation-transmutation, s'avérait pertinente ?
La référence au conditionnement montrerait que la circulation des colis de déchets radioactifs est possible et que celle-ci est gérée par l'ANDRA. L'agence aurait peut-être aussi la responsabilité des plans de circulation, même si cela n'est pas dit, mais elle aurait en tout cas celle du conditionnement.
Le sujet est important : il s'agit d'avoir la certitude que le conditionnement ne sera jamais un obstacle à la réversibilité.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Les remarques de M. Longuet sont parfaitement fondées. Cela étant, le 4° de l'article 10 dispose : « De prévoir, dans le respect des règles de sûreté nucléaire, les spécifications pour le stockage des déchets radioactifs et de donner aux autorités administratives compétentes un avis sur les spécifications pour le conditionnement des déchets ; ».
À l'évidence, l'ANDRA doit travailler sur ce sujet ; le CEA également. Cela figure déjà dans le texte !
M. le président. Monsieur Longuet, maintenez-vous toujours l'amendement n° 138 rectifié ?
M. Gérard Longuet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 138 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de programme, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs.