Mme la présidente. L'amendement n° 18, présenté par Mmes Demessine et Didier, MM. Billout, Coquelle, Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 822-1 et L. 822-2 du code de l'éducation sont ainsi rédigés :
« Art. L. 822-1. - Le centre national des oeuvres universitaires et scolaires est un établissement public, doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière. Il est placé sous la tutelle du ministre chargé de l'enseignement supérieur qui approuve son budget.
« Art. L. 822-2. - Le conseil d'administration du centre national des oeuvres universitaires et scolaires est chargé de définir la politique générale du centre national des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires.
« Il est également chargé :
« 1° D'assurer la répartition des crédits budgétaires ordinaires et extraordinaires affectés aux centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires ;
« 2° De recueillir et de répartir tous dons, legs, subventions et aides diverses susceptibles de favoriser l'établissement, le fonctionnement ou le développement de ces oeuvres. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement concerne la question très sensible du logement étudiant, telle qu'elle a été envisagée à travers la loi de décentralisation. En effet, le caractère national de la politique des oeuvres universitaires, et notamment du logement étudiant, a été dissous dans le cadre plus incertain des politiques urbaines déterminées au niveau départemental et intercommunal.
Lors de la discussion de la loi de décentralisation, nous avions pointé cette question essentielle. Permettez-moi de citer les propos que nous avions alors tenus : « Si ce projet de loi prévoit la signature d'une convention entre le CROUS et la collectivité locale pour la gestion des attributions, il ne prévoit aucun cadrage de cette convention. Certaines municipalités pourraient ainsi supporter le remboursement des emprunts contractés pour la construction des bâtiments au CROUS, ce qui mettrait en danger son équilibre financier, qui est déjà bien précaire. La décentralisation du financement de la construction des logements étudiants ne prévoit aucun système de péréquation financière. Elle conduira forcément à une augmentation importante des inégalités géographiques. »
Les observations que nous formulions à l'époque ont-elles perdu de leur pertinence ? La construction de logements étudiants a-t-elle connu, depuis l'adoption de la loi de décentralisation, une relance importante ?
Les étudiants cessent-ils d'être confrontés au problème du logement, notamment à Paris, où le parc de chambres universitaires disponibles n'équivaut même pas au nombre des étudiants théoriquement prioritaires dans l'attribution d'un logement, c'est-à-dire les étudiants boursiers ?
La situation est telle que le Gouvernement s'est senti obligé d'ajouter une niche fiscale en permettant la déductibilité sous forme de crédit d'impôt des emprunts étudiants, mode de financement utilisé, hélas ! par un nombre croissant d'entre eux, faute d'une aide sociale adaptée et compte tenu, justement, de l'explosion des loyers, qui frappe au premier chef les jeunes.
C'est bien parce que ces questions ne peuvent être résolues uniquement par des réponses au niveau local mais doivent nécessairement, selon nous, relever de la solidarité nationale, que nous proposons l'insertion de cet article additionnel dans le projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je suis très circonspect, car l'objet de cet amendement n'a aucun rapport avec le texte même de ce dernier, qui ne concerne en aucun cas le logement étudiant mais vise la réforme du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires. Il faut rester un peu sérieux, madame Demessine !
Mme Michelle Demessine. C'est vous qui n'êtes pas sérieux !
M. Dominique Braye, rapporteur. Que vient faire une telle proposition en plein milieu des dispositions consacrées à l'urbanisme ? Cet amendement n'est même pas un cavalier ! La commission ne peut donc émettre qu'un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3 bis
Mme la présidente. L'article 3 bis a été supprimé par l'Assemblée nationale ; mais je suis saisie de deux amendements identiques tendant à le rétablir.
L'amendement n° 58 est présenté par M. Braye, au nom de la commission.
L'amendement n° 351 est présenté par M. Jarlier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 111-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-12. Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme.
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables :
« a) Lorsque la construction est de nature, par sa situation, à exposer ses usagers ou des tiers à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
« b) Lorsque la construction a fait l'objet d'une décision devenue définitive d'un tribunal de l'ordre judiciaire ordonnant sa démolition ;
« c) Lorsque la construction est située dans un site classé en application des articles L. 341-2 et suivants du code de l'environnement ou un parc naturel créé en application des articles L. 331-1 et suivants du code de l'environnement. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 58.
M. Dominique Braye, rapporteur. Cet amendement tend à rétablir un article additionnel, introduit au Sénat sur l'initiative de la commission des affaires économiques et de la commission des lois, et supprimé en première lecture par l'Assemblée nationale. L'article 3 bis reprenait une proposition contenue dans le rapport établi par le groupe de travail sur la sécurisation des autorisations d'urbanisme, présidé par M. Pelletier, proposition qui tendait à instituer un délai de prescription de dix ans en matière administrative pour les règles d'urbanisme.
La commission souhaite rétablir cette disposition, qui a fait l'objet d'une concertation approfondie et d'un accord entre tous les acteurs concernés au sein du groupe précité, y compris les associations de défense de l'environnement.
Alors qu'il existe une prescription pénale de trois ans et une prescription civile de dix ans, il n'existe pas de prescription administrative, ce qui nous paraît totalement anormal.
Ainsi, même après l'extinction des actions pénales et civiles, la construction ne cesse pas pour autant d'être irrégulière sur le plan administratif, ce qui a pour conséquence une grande insécurité juridique pesant sur les mutations et l'impossibilité, dans certains cas, de réaliser les travaux de rénovation sur les constructions, de nombreuses années après l'achèvement des travaux.
J'ajoute que cet amendement n'affecte en aucun cas le droit de recours, qui reste inchangé, dans les délais de l'action civile et de l'action pénale.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 227 rectifié, présenté par MM. Repentin, Raoul, Caffet et Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau et Dussaut, Mmes Herviaux, Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Lejeune, Pastor, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Saunier, Teston, Trémel, Lise, Vézinhet, Picheral et Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade, Gillot, Miquel, Guérini, Lagauche, Sueur, Collombat et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 58 pour l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme par un alinéa ainsi rédigé :
« ... ) Lorsque la construction est sur le domaine public ;
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Nous partageons l'esprit de l'amendement présenté par M. le rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques, puisque nous avions voté cette disposition en première lecture.
Nous souhaitons cependant, par ce sous-amendement, préciser les conditions d'application du délai de prescription du permis de construire en matière administrative, et seulement dans ce cas - la situation reste en effet inchangée en matière pénale -, afin de pouvoir faire référence aux constructions édifiées sur le domaine public. Il nous semble en effet dommageable que des contrevenants indélicats, ayant installé par exemple une paillote sur une plage, puissent considérer, alors que le littoral fait partie du domaine public maritime, qu'ils sont dans leur droit et donc intouchables d'un point de vue administratif, dès lors que le délai fatidique des dix années serait dépassé.
La loi littoral, comme la loi montagne d'ailleurs, doit être pleinement respectée et les sites naturels doivent être libérés de toutes les emprises, de quelque nature qu'elles soient.
Les différents gouvernements se sont attachés à faire démolir un certain nombre de constructions illicites. Il ne faudrait donc pas donner le sentiment que nous renonçons à ce travail de salubrité publique engagé par l'État.
Nous avions également élargi, au travers de l'amendement n° 227 initial, l'impossibilité de régularisation administrative, même au bout de dix ans, à tous les permis obtenus par fraude, situations qui existent quelquefois, notamment en matière de trafic d'influence. Nous avons ensuite retiré cet alinéa, car il nous a été dit, lors de l'examen du texte en commission, que la disposition ne s'appliquerait pas dans ces cas.
Il est important d'adopter l'amendement n° 58, modifié si possible par ce sous-amendement. En effet, les personnes qui ont réalisé des constructions dans des bâtiments dont le permis a été cassé rencontrent de nombreuses difficultés, dès lors qu'elles veulent se séparer de ces appartements à l'occasion de mutations professionnelles, car elles ne peuvent pas obtenir le permis de construire ou le certificat de conformité, souvent nécessaires lors de la transaction des biens. Elles sont donc pénalisées par l'absence d'une telle disposition dans le code.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 355 rectifié, présenté par M. Cornu, est ainsi libellé :
Compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 58 pour insérer un article L. 111-12 dans le code de l'urbanisme par un alinéa ainsi rédigé :
« d) Dans les zones visées au 1° du II de l'article L.562-1 du code de l'environnement. ».
La parole est à M. Gérard Cornu.
M. Gérard Cornu. Le sous-amendement n° 355 rectifié vise à ajouter à l'amendement n° 58, que je soutiens, une quatrième exception à celles qui sont prévues dans l'amendement n° 58 : les zones exposées au risque, dites « zones de danger ». Il faut en effet absolument exempter les constructions illégales dans les plans de prévention des risques naturels prévisibles, tels que les inondations. Il serait en effet paradoxal, faute d'avoir prévu de telles exceptions, d'encourager la réalisation sur des sites dangereux de constructions irrégulières, qui seraient régularisées au terme d'un délai de dix ans.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour présenter l'amendement n° 351.
M. Pierre Jarlier. Cet amendement, identique à l'amendement n° 58, déposé par la commission des affaires économiques, a pour objet de rétablir une disposition introduite par le Sénat en première lecture, sur proposition conjointe de la commission des lois et de la commission des affaires économiques. Cette mesure tend à améliorer la sécurité juridique des constructions existantes, en admettant le principe selon lequel, à l'issue d'un délai de dix ans à compter de l'achèvement d'une construction, la méconnaissance des règles d'urbanisme ou des règles applicables aux autorisations d'urbanisme ne peut plus être opposée.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 227 rectifié, ainsi qu'au sous-amendement n° 355 rectifié, qui tend à prévoir une restriction justifiée s'appliquant aux secteurs où les constructions peuvent être problématiques, comme les zones inondables.
Quant à l'amendement n° 351, il est satisfait par l'amendement n° 58 de la commission.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Azouz Begag, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 58 et 351, ainsi qu'au sous-amendement n° 227 rectifié.
Il partage par ailleurs le souci de M. Cornu d'éviter la régularisation administrative des constructions irrégulières situées dans les zones de danger des plans de prévision des risques visées au code de l'environnement. Il est donc également favorable au sous-amendement n° 355 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 227 rectifié.
M. Yves Fréville. Le sous-amendement n° 227 rectifié est absolument indispensable. Le domaine public est effet inaliénable, imprescriptible et incessible, et cela depuis belle lurette ! (Sourires.)
Je tenais simplement à dire que ce sous-amendement ne visait pas seulement les cas de constructions sur le littoral, par exemple, signalés par M. Repentin.
M. Thierry Repentin. J'ai cité les cas les plus connus !
M. Yves Fréville. Il ne faudrait en effet pas que le compte rendu de nos débats puisse laisser penser que nous restreignons ce grand principe du droit aux exemples donnés pour illustrer cet excellent sous-amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 227 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 355 rectifié.
M. Serge Lagauche. Sous-amendement tout aussi excellent que le précédent !
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 58, modifié.
M. Alain Vasselle. Je vais voter l'amendement n° 58, modifié, mais je voudrais auparavant attirer l'attention du Gouvernement sur l'inertie dont font souvent preuve tant les tribunaux que l'administration quant à la mise en oeuvre des décisions de justice ou des décisions administratives à l'encontre des constructions réalisées à l'insu du maire dans le domaine privé.
J'ai été sensibilisé à ces situations par plusieurs maires de mon département confrontés à l'impossibilité d'obtenir des particuliers la démolition des constructions illicites, éventuellement inachevées quand les travaux ont pu être stoppés, constructions qui restent en l'état pendant des années sans que ne se passe quoi que ce soit.
Ces situations récurrentes et qui perdurent, en particulier dans certaines régions de notre pays, soulèvent de multiples problèmes. Par exemple, il faut saisir une entreprise pour démolir la construction ; mais qui supporte la dépense lorsque l'on a affaire à des particuliers insolvables ?
Pour que les textes que nous votons ne soient pas décrédibilisés, le minimum serait qu'une circulaire ministérielle soit adressée au garde des sceaux et aux préfets afin que la justice et l'administration fassent en sorte qu'une suite effective soit donnée dans de brefs délais aux décisions prises sur le plan tant judiciaire qu'administratif.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je voterai moi aussi l'amendement, tout en étant animé par les mêmes préoccupations que M. Vasselle.
Je demande à mon tour au Gouvernement de rappeler au corps préfectoral qu'une décision de démolition d'une construction illicite prise au plus haut niveau juridictionnel doit être effectivement appliquée. Or, ce n'est pas toujours le cas, et plusieurs exemples le démontrent dans le département dont je suis sénateur.
Les conséquences sont évidemment gravement dommageables tant au regard du respect des lois que pour les communes concernées, mais elles vont bien au-delà puisque l'exemple ainsi donné encourage toutes les infractions aux règlements d'urbanisme. Finalement, c'est celui qui respecte la loi qui se sent victime, alors que celui qui l'enfreint se considère comme « légitimé » !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 58 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 3 bis est rétabli dans cette rédaction et l'amendement n° 351 n'a plus d'objet.
Article 3 quinquies
Après l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 600-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 600-6. - Lorsque la juridiction administrative, saisie d'un déféré préfectoral, a annulé par une décision devenue définitive un permis de construire pour un motif non susceptible de régularisation, le représentant de l'État dans le département peut engager une action civile en vue de la démolition de la construction dans les conditions et délais définis par le deuxième alinéa de l'article L. 480-13. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 3 quinquies
Mme la présidente. L'amendement n° 364 rectifié, présenté par MM. Revet, Bailly et J. Boyer, Mme Gousseau, M. Grillot, Mme Rozier et M. Seillier, est ainsi libellé :
Après l'article 3 quinquies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les communes ne disposant pas de plan d'occupation des sols et où s'applique le règlement national d'urbanisme, le permis de construire est de droit accordé à la personne qui en fait la demande dès lors que celle-ci a fait l'objet d'un avis favorable du conseil municipal et que dans les deux mois suivant la notification et durant lesquels celle-ci aura été affichée en mairie, aucun recours dûment motivé n'aura été déposé. Les règles applicables en matière de délai de réponse sont celles en vigueur en matière de gestion des permis de construire.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article additionnel après l'article 3 sexies
Mme la présidente. L'amendement n° 186 rectifié bis, présenté par MM. Hérisson, Jarlier, Béteille, Girod et Détraigne, est ainsi libellé :
Après l'article 3 sexies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. »
La parole est à M. Pierre Jarlier.
M. Pierre Jarlier. Cet amendement d'appel, suggéré par l'association des maires de France, a pour objet d'interpeller le Gouvernement sur le problème des recours abusifs engagés par certaines associations dans le but de se donner les moyens de négocier les prix de terrains où des projets doivent être réalisés.
Il s'agit, bien sûr, non pas de priver les associations de leur droit légitime de recourir contre un projet qu'elles contestent, mais d'éviter les recours des associations de pure circonstance qui se créent au moment où une opération se monte pour défendre non une cause d'intérêt général mais un intérêt particulier, en vue de pouvoir négocier ensuite le prix des terrains.
Nous souhaiterions que le Gouvernement engage une réflexion sur ces recours abusifs qui entraînent en fait une surenchère sur le prix des terrains.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Les acteurs que nous avons auditionnés, dans le cadre du groupe de travail que présidait M. Philippe Pelletier et auquel participait notre collègue Pierre Jarlier, partagent largement le sentiment que le phénomène des recours abusifs est, hélas ! une réalité et que ces recours sont fréquents.
Le rapport, intitulé Propositions pour une meilleure sécurité juridique des autorisations d'urbanisme, montre en outre que le délai moyen de jugement est de quinze à seize mois devant les tribunaux administratifs, délai qui passe de deux à trois ans devant les cours administratives d'appel.
De surcroît, par rapport aux autres contentieux, celui de l'urbanisme donne lieu à un nombre significatif de désistements. De 15 % à 20 % des affaires se concluent ainsi par un désistement, ce qui peut démontrer l'existence, dont aucun de nous ne doute, de nombreux recours abusifs dont l'abandon est ensuite monnayé auprès des promoteurs - ils préfèrent payer, car la durée excessive des délais de jugement leur fait perdre de l'argent - par des gens qui ont presque fait profession de ce type de pratique.
Le rapport constate également que le contentieux concerne une faible proportion des autorisations - environ 1 % -, mais qu'il porte de plus en plus sur les opérations importantes avec des conséquences économiques très lourdes, d'où le comportement de certains « professionnels du recours ».
La commission constate que le présent amendement ne remet nullement en question le droit d'agir des riverains non plus que celui des associations existantes.
Pour toutes ces raisons, et conformément à la jurisprudence relative aux deuxièmes lectures, elle émet un avis de sagesse.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Azouz Begag, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui limiterait à l'excès le droit de recours contre les décisions d'urbanisme en ne permettant pas aux citoyens confrontés, sur le plan local, à une décision qui lèse leur intérêt et qui leur paraît illégale de se regrouper pour faire valoir leurs droits devant les tribunaux.
Le Gouvernement souhaite vivement améliorer la sécurité juridique des opérations d'urbanisme et des permis de construire. Il avait demandé à Philippe Pelletier de lui proposer des mesures appropriées.
Beaucoup des mesures proposées sont en train de devenir effectives, en particulier dans le cadre de ce projet de loi.
Il avait été clairement précisé, alors, que le Gouvernement était très attaché au respect du droit fondamental pour les citoyens et les associations concernées de contester devant un juge les décisions qu'ils estiment illégales.
Pour aller plus loin, le Gouvernement réfléchit au problème de ces recours au chantage.
Dans cet esprit, il souhaite le retrait de l'amendement.
Mme la présidente. Monsieur Jarlier, l'amendement n° 186 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Pierre Jarlier. D'une part, j'avais annoncé dès le début de mon propos qu'il s'agissait d'un amendement d'appel portant sur les abus imputables à ces associations de circonstance - les associations légitimes, je le répète, ne sont pas en cause - qui se constituent dans le seul but de monnayer les prix des terrains. Cette pratique est dommageable pour les promoteurs mais aussi pour les collectivités,...
M. Gérard Delfau. Bien sûr !
M. Pierre Jarlier. ... qui peuvent être concernées par les projets.
D'autre part, j'ai bien entendu les arguments de M. le ministre.
Je vais bien évidemment retirer cet amendement, car j'ai conscience que, dans sa rédaction actuelle, il ne répond pas à la question posée ; mais je souhaite qu'une réflexion s'engage pour que ces abus inacceptables soient évités.
Mme la présidente. L'amendement n° 186 rectifié bis est retiré.
M. Alain Vasselle. Je le reprends !
Mme la présidente. Il s'agit donc de l'amendement n° 186 rectifié ter.
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Il est inacceptable que l'on tolère qu'un pétitionnaire puisse s'appuyer sur l'existence d'une association dont les statuts n'ont pas été déposés en préfecture, et qui n'a donc pas encore un caractère public, pour engager une procédure à son bénéfice.
Je considère que c'est contraire à notre droit et à notre pratique. Je ne comprends donc pas l'argumentation qui a conduit le Gouvernement à demander le retrait de cet amendement.
M. le rapporteur est d'ailleurs bien conscient de la réalité du problème puisque la commission a donné un avis de sagesse, à défaut d'oser émettre un avis favorable.
Pour ma part, je souhaite que le Sénat se prononce sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Le débat doit rester serein, car nous devons éviter tout risque de dérapage.
Nous sommes nombreux à être des élus locaux et donc à avoir été confrontés, à un moment ou à un autre, à un recours de cette nature, pouvant être qualifié d'« abusif » puisque nous savions que celui - ou ceux, s'il s'agissait d'une démarche collective - qui l'avait engagé recherchait un intérêt non pas général, mais particulier.
Le hasard des programmations télévisées a voulu qu'un reportage sur ce sujet soit diffusé hier soir : le maire d'une commune de la région parisienne - Limeil-Brévannes - a cité le cas d'un promoteur immobilier ayant accepté de payer une somme de 15 000 euros à un pétitionnaire...
Ces pratiques sont en effet inacceptables, mais, monsieur le ministre, puisque vous avez annoncé que vous étudiez le problème, permettez-moi de dire qu'elles le sont encore plus quand elles interviennent dans des circonstances dont j'ai eu moi-même à connaître en tant qu'adjoint chargé de l'urbanisme.
En l'occurrence, et c'est pourquoi cet exemple est très significatif, la demande de permis de construire avait été déposée par un OPAC. Après un premier recours, une autre demande avait été déposée, mais, au second recours, l'OPAC avait « capitulé » et renoncé à son opération. Quelques mois après, un promoteur immobilier dépose un permis de construire et mène, lui, son opération à terme !
C'était assez surprenant, car un nouveau recours avait été engagé par les mêmes requérants. Connaissant particulièrement bien le promoteur immobilier, je lui ai demandé comment les choses s'étaient déroulées. Eh bien, en contrepartie d'un désistement devant notaire, le pétitionnaire avait obtenu un dédommagement pour la construction qui allait s'édifier.
Ces pratiques créent donc de surcroît une distorsion entre le monde du logement social et celui des promoteurs immobiliers, car provisionner pour charges ce type de recours, comme le font aujourd'hui les promoteurs immobiliers, est impossible pour les constructeurs de logements sociaux.
De telles pratiques fragilisent donc ces derniers par rapport aux terrains libres.
Monsieur le ministre, votre réponse nous pose vraiment un cas de conscience.
Elle me rappelle la sécurité routière, domaine dans lequel, pour quelques criminels de la route, on impose à tout le monde des mesures draconiennes faute de disposer de mesures individuelles.
Cela étant, monsieur le ministre, je ne souhaite pas non plus que soit complètement bridée dans notre pays la faculté de discuter de la pertinence d'un certain nombre de permis de construire. Il faut bien le reconnaître, il y a en France des sites qui doivent leur préservation à des associations. Paradoxalement - en tout cas, c'est ainsi que cela va apparaître -, je ferais plutôt confiance au Gouvernement s'il s'engageait à présenter, dans les mois qui viennent, des propositions pour répondre à ce type de difficultés.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Azouz Begag, ministre délégué. Je comprends totalement vos préoccupations. Toutefois, s'agissant du difficile équilibre entre le droit de recours et le droit du porteur de projet, je voudrais que se poursuive la réflexion du Gouvernement, à laquelle je souhaite vous associer. Je demande donc le retrait de l'amendement n° 186 rectifié ter.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. C'est vrai que nous sommes partagés entre, d'un côté, le droit d'association, issu de la loi de 1901 - c'est l'un des piliers de la République, et il ne faut pas y toucher - et, de l'autre côté, des manoeuvres spéculatives, même si, on le dit dans cette enceinte en choisissant les mots, la réalité est de très loin en rupture avec l'objet qui a présidé au vote de la loi de 1901.
Je serai tenté de voter cet amendement. En effet, si le Gouvernement nous assure de ses bonnes intentions, il ne nous donne cependant rien de concret pour l'instant.
J'y ajouterai un autre élément que j'avais évoqué au cours de la discussion générale et à propos duquel je n'ai pas eu le moindre début de réponse ni même de prise en considération de la part du Gouvernement depuis que s'est engagé ce débat : c'est la surenchère qui est la pratique courante d'une partie, sans doute minoritaire mais très active, de la profession de promoteur immobilier privé. J'y vois l'une des bases de la spéculation foncière et l'une des raisons de la mise en difficulté des élus désireux de mener des politiques courageuses en matière d'urbanisme et d'aménagement, notamment - mais pas seulement - de ceux qui veulent construire suffisamment de logements sociaux locatifs.
Ce que je dis là - et ce n'est pas un procès d'intention - rejoint le propos du président du syndicat national des promoteurs immobiliers, qui, à l'ouverture d'un salon récent, regrettait que la correction nécessaire ne règne pas toujours au sein de sa profession.
Il y a donc pour partie une crise de cette profession. Et l'intérêt général et les élus locaux, comme les citoyens, en sont les victimes. Je le dis en distinguant bien la profession tout entière de cette fraction. Mais je le dis à partir d'exemples concrets, précis, concordants sur mon département. Et je suis prêt, si vous mettez en place des auditions, à venir donner des cas précis que j'ai collectés en tant que maire et en tant que parlementaire.
Je souhaiterais donc que l'on organise le droit d'association, tout en le préservant, d'où mon hésitation à voter cet amendement.
En revanche, certaines pratiques d'une partie de la profession de promoteur immobilier privé relèvent de l'action de la puissance publique. Il y a un organisme qui doit éviter ces dérives, et, s'il n'y parvient pas, il appartient alors au Gouvernement de prendre l'initiative nécessaire, à la limite d'étudier la situation et de proposer des solutions, à moins évidemment que l'on ne veuille encourager de telles pratiques !
Cet amendement heureux déposé initialement par notre collègue Pierre Jarlier a le mérite de soulever un problème délicat, je le sais. Mais si les parlementaires que nous sommes ne posent pas les vraies questions, alors, nous ne sommes pas dignes du mandat qui nous a été confié !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Caffet. Adjoint à l'urbanisme d'une grande ville, je suis confronté, comme beaucoup d'élus locaux, à ce qu'il faut bien appeler une sorte de marché parallèle du recours, suscité soit par des intérêts particuliers totalement égoïstes, soit, parfois, par la recherche d'intérêts pécuniaires : il est en effet établi qu'il est des recours dont les auteurs cherchent à monnayer le retrait contre monnaie sonnante et trébuchante. Des actions judiciaires en cours en témoignent d'ailleurs. Nous sommes tous confrontés à ce problème.
L'amendement n° 186 rectifié ter présente l'intérêt fondamental de dire clairement qu'il faut aujourd'hui faire quelque chose, et sans doute légiférer sur cette question pour pouvoir régler au mieux le problème, sinon de manière définitive, au moins en fixant un certain nombre de principes.
Sur le problème de principe, je suis, comme beaucoup d'entre vous, mes chers collègues, assez partagé.
Je comprends le principe selon lequel il faut faire la différence entre des intérêts égoïstes, étroitement particuliers et parfois pécuniaires, et des recours provenant d'associations, même constituées tardivement.
Je comprends qu'une association se constitue, même tardivement, devant un projet d'ampleur dès lors que ce dernier n'a pas fait l'objet d'une concertation suffisante, de discussions avec la population locale et de publicité.
Ce qui est difficile, c'est la confusion entre ce qui peut être parfaitement légitime, à savoir la création d'associations en réponse au mutisme d'autorités locales qui ne pratiquent pas la concertation sur un projet important, et les intérêts particuliers, complètement égoïstes de gens constitués en associations pour préserver leur propre bien-être ou moyenner espèces sonnantes et trébuchantes
Il est vrai que, de ce point de vue, il y a association et association. Aujourd'hui, il est extraordinairement difficile de distinguer entre elles.
Même si j'étais spontanément, je le dis clairement, enclin à voter l'amendement n° 186 rectifié ter, je pense que ce débat nous éclaire. Très franchement, le Gouvernement serait bien inspiré de proposer, d'ici à la deuxième lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, un certain nombre de solutions, dont quelques-unes figurent, me dit-on, dans le rapport Pelletier.
Mais cette question est loin d'être épuisée, et il va falloir trouver des solutions pour parvenir à faire, autant que possible, la différence entre les deux types d'associations. En conséquence de quoi, je comprends parfaitement la problématique posée à l'origine par M. Jarlier, et je la partage même.
Toutefois, tel qu'il est libellé, l'amendement n° 186 rectifié ter risque d'être perçu comme liberticide. C'est cela son problème. Et c'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas le voter tel quel. J'invite donc le Gouvernement à avancer un certain nombre de solutions.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Je tiens à remercier notre collègue Pierre Jarlier d'avoir soulevé cette question. Nous avons tous, les uns et les autres, des exemples frappants de cette utilisation abusive des recours que leurs auteurs tentent d'échanger contre de l'argent ou contre des services. Je connais ainsi le cas d'une récente opération au cours de laquelle la négociation avec le maire a porté sur la passation d'un autre accord. Comme l'a dit M. Repentin, ce problème touche aussi les opérations sociales, même si une concertation a été menée, et ce alors que l'on veut mettre en place une politique de diversité et de mixité dans les quartiers. Les choses sont d'ailleurs telles que l'on en arrive à redouter de pratiquer une concertation, car cela revient à donner des informations sur les opérations que l'on va bâtir. Il y a donc un réel problème à cet égard.
On sait aussi que, bien qu'autorisées par le droit, très peu nombreuses sont les actions en indemnités et en dommages et intérêts, alors même qu'il est reconnu que l'association en cause ne s'était constituée que pour ralentir les choses ou en tirer profit. C'est dire que l'engagement est plus fort pour bâtir que pour aller en justice.
Monsieur le ministre, je souhaite que la commission qui doit étudier le sujet soit constituée rapidement, qu'elle s'engage à travailler, donne une date à laquelle elle rendra ses conclusions, afin qu'ensemble nous trouvions des solutions équilibrées. Il s'agit de permettre aux associations de bonne foi d'agir, et à celles qui sont de mauvaise foi de ne pas poursuivre leur action qui ralentit les opérations de construction aussi bien privées que sociales, aussi bien de services et de prestations de services - tout à l'heure, l'exemple que j'ai pris concernait un cabinet médical.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. J'étais effectivement partagé, soucieux de préserver la liberté des associations sans encourager les manoeuvres spéculatives. Mais, à la lumière de cette discussion, je crois que nous devons envoyer un signal fort. On ne peut pas accepter que se créent des associations de défense d'intérêts privés, surtout s'il s'agit de se faire de l'argent sur le dos de ceux qui veulent avancer.
Il est important que le Sénat adresse ce signal fort à destination de ceux qui veulent créer des associations pour s'enrichir, et donc qu'il vote cet amendement. À l'issue de l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, la commission mixte paritaire se réunira, et il reviendra alors à cette dernière de trouver un consensus.
Certes, on pourrait hésiter en considérant que, dans certains dossiers, les gens n'auront peut-être pas les moyens de se défendre. Mais nombre d'associations, notamment dans le domaine de l'environnement, sont déjà créées et reconnues. Le risque que les gens ne puissent pas se défendre est donc finalement très faible. Par conséquent, il faut absolument, à mon sens, condamner des associations qui se créeraient pour des raisons diverses et variées, notamment pécuniaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Comme M. Repentin, j'ai vu le reportage diffusé hier soir à la télévision. Pour ma part, j'ai été impressionné par l'air satisfait qu'affichait le président de cette association, qui venait indubitablement de rançonner - le terme n'est pas trop fort - un promoteur. Pour autant, ce dernier n'est pas passible de poursuites, puisqu'il a agi dans le cadre d'une association. Son action n'a donc eu aucune conséquence, sauf celle de permettre à son association d'engranger un bon pécule.
Tout le monde le sait ici, je représente les Français de l'étranger. J'ai donc l'occasion de voyager plus de quatre mois de l'année à travers le monde entier. C'est pourquoi je me demande - et je pèse mes mots - si nous ne nous regardons pas trop souvent le nombril. Je ne sais pas s'il existe un autre pays où l'on est aussi attentif aux recours d'associations, souvent douteuses (Exclamations sur les travées du groupe CRC),...
Mme Michelle Demessine. Arrêtez l'escalade !
M. Jean-Pierre Cantegrit. ...qui ont pour conséquence de bloquer des chantiers. Or qui paie lorsque ce blocage concerne des chantiers publics ? C'est le contribuable ! Le retard provoqué coûte donc de l'argent à tout le monde.
Il n'est pas dans mon intention de retirer aux associations de bonne foi, à celles dont l'existence est reconnue, le droit de former des recours quand ceux-ci sont justifiés. Mais, il faut le savoir, à partir du moment où les recours sont engagés, les tribunaux bloquent longtemps les dossiers. Je demande donc au Sénat de bien réfléchir à la situation et de voir si l'activité économique de notre pays n'est pas, dans certains cas, retardée, et ce à un moment où nous devrions plutôt nous consacrer au combat que nous avons à mener dans le monde.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Azouz Begag, ministre délégué. Je le répète, le Gouvernement est parfaitement conscient du problème. Il s'engage donc à réunir très rapidement - d'ici au 1er juin, c'est-à-dire avant que l'Assemblée nationale n'examine ce texte en deuxième lecture - un groupe de travail composé de parlementaires afin que des solutions équilibrées soient proposées.
Le Gouvernement insiste fortement sur le fait que l'amendement ne doit pas être voté dans sa rédaction actuelle, car cela porterait une grave atteinte au droit de recours.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Madec, pour explication de vote.
M. Roger Madec. Je voudrais répondre à l'un de nos collègues : les associations nationales ou régionales ne peuvent pas former de recours contre un dossier ponctuel. Elles sont en effet systématiquement déboutées, car le tribunal administratif estime qu'elles n'ont pas d'intérêt à agir. On ne peut donc pas laisser dire qu'il y a suffisamment d'associations pour intervenir contre un permis de construire.
Cela étant, nous prenons acte de l'engagement du Gouvernement et nous souhaitons que les élus de tous les bords politiques soient associés à cette démarche.
M. Gérard Delfau. Tout à fait ! Sur tous les bancs !
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. On ne peut pas empêcher une association d'intenter un recours. Il faut donc chercher une autre voie. Je suis d'ailleurs heureux d'avoir entendu M. le ministre dire qu'il fallait trouver des solutions. Pour ma part, je suggère deux pistes.
La première serait de dire que les transactions financières entre une association et un promoteur sont nulles d'ordre public. Le droit de transiger existe, mais lorsque l'une des parties est une association, la transaction devrait être nulle d'ordre public, ce qui impliquerait des conséquences financières pour les deux parties contractantes.
Cela signifie que le promoteur ne pourrait pas sortir d'argent de sa comptabilité. Et s'il était prouvé que l'association a reçu de l'argent, elle serait alors responsable et devrait rendre gorge.
La seconde piste serait que les tribunaux appliquent la théorie de l'abus de droit. Si une association intentait un recours manifestement dépourvu de fondement, l'abus de droit pourrait être invoqué et entraînerait le versement de dommages et intérêts.
La solution est donc à mon avis à rechercher plus dans le domaine financier que dans le domaine du droit de recours.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Braye, rapporteur. Comme l'a dit M. Cornu, il faut lancer un signe fort.
Je ne doute pas de la bonne foi du Gouvernement, puisqu'il a proposé la création d'un groupe de travail, qui devrait se réunir avant que le texte ne soit examiné en commission mixte paritaire. Cela étant, afin de prouver son engagement, je propose que nous mettions à profit la navette et que nous adoptions cet amendement.
Mme Michelle Demessine. Oh non !
M. Dominique Braye, rapporteur. La disposition adoptée pourra ensuite être supprimée si le groupe de travail trouve des solutions adéquates pour mettre fin à un problème que tout le monde considère comme scandaleux...
M. Gérard Cornu. Très bien !
M. Dominique Braye, rapporteur. ... et que nous n'avons manifestement pas encore assez pris en compte. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour explication de vote.
Mme Michelle Demessine. Le débat est intéressant et très éclairant. Je suis donc surprise par l'intervention de M. le rapporteur, qui nous ramène à la case départ.
Il peut effectivement exister des problèmes ici ou là, mais il ne faut en aucun cas porter atteinte au droit de recours, qui est un droit démocratique et qui doit pouvoir être utilisé à toute occasion et non de manière sélective.
Il est vrai que certains recours retardent les projets, voire les font « capoter ». Il faut donc rechercher des solutions, mais il y a d'autres voies que celle qui est proposée par cet amendement.
D'ailleurs, fait-on oui ou non confiance à la justice ? Après tout, c'est elle qui rend une décision sur ces recours. D'ailleurs, j'ai bien entendu ce qu'a dit M. Fréville.
M. Dominique Braye, rapporteur. Vous n'avez pas compris : ces recours sont retirés avant jugement !
Mme Michelle Demessine. Pas dans tous les cas, ne généralisez pas !
Quant au groupe de travail, il devrait plutôt se pencher sur les procédures de concertation. Nous sommes à un moment de notre démocratie où les gens veulent davantage participer aux décisions.
M. Gérard Delfau. C'est l'inverse ! Plus on fait de la concertation, plus on donne d'arguments !
Mme Michelle Demessine. Il ne faut pas avoir peur de la concertation.
M. Gérard Delfau. On n'en a pas peur !
Mme Michelle Demessine. Si l'on en a peur, c'est parce que l'on n'est pas sûr du bien-fondé de son projet.
Quoi qu'il en soit, le groupe CRC ne votera pas cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié ter.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3 sexies.
CHAPITRE IV
Améliorer les outils d'acquisition foncière