compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
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DÉPÔT D'UN RAPPORT du Gouvernement
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les orientations de la politique de l'immigration, conformément à l'article L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des lois.
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égalité des chances
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence (n°s 203, 210, 211, 212, 213, 214).
Rappels au règlement
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J'ai lu ce matin dans la presse que le Premier ministre avait dit que tout le temps nécessaire serait consacré aux débats sur le contrat première embauche au Sénat.
Compte tenu de cet engagement, je voudrais que M. le ministre nous dise si nous aurons la possibilité de donner notre avis sur les amendements que nous examinons ou si nous serons encore une fois empêchés de parler. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 49...
M. Guy Fischer. C'est le meilleur !
M. Jean-Pierre Godefroy. ... et il concerne l'organisation de nos travaux.
Nous avons un objectif commun, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs : que le Sénat débatte dans la sérénité de l'ensemble des 40 articles qui composent désormais le projet de loi pour l'égalité des chances.
Nous souhaitons avoir un débat qui n'a pas eu lieu à l'Assemblée nationale.
Or, quelle est la situation actuelle ?
Après trois jours de séance et près de trente heures de débats, seul l'article 1er a été adopté.
Sur les 86 amendements déposés sur l'article 3 bis, seuls 40 ont été présentés hier.
Nous ne comprenons toujours pas l'objectif de la réserve des votes sur les amendements de l'article 3 bis.
Cherchez-vous à gagner du temps ? Je crois que la démonstration a été faite hier qu'aucun gain n'est à attendre de ce côté.
Cherchez-vous à appliquer l'article 44, alinéa 3, de la Constitution et à recourir au vote bloqué au Sénat après le passage en force à l'Assemblée nationale avec l'article 49-3 ? C'est une question que nous posons inlassablement.
Nous voulons bien croire que ce n'est pas votre objectif, même si le doute est légitime.
Si l'organisation de nos débats reste celle que vous nous avez imposée hier, le Sénat va se transformer, le temps d'une séance, en Parlement européen. Nous aurons à l'issue de la présentation des amendements une série de 86 votes pour lesquels les sénateurs présents ne sauront pas à quels amendements précis ils se réfèrent.
C'est surréaliste et presque sans précédent.
Ce n'est pas, vous en conviendrez, favorable à la sérénité de nos débats.
Aussi, je vous fais solennellement une proposition : même si vous persistez dans la réserve des votes, les sénateurs du groupe socialiste présenteront un nombre limité d'explications de vote.
Ainsi, vous ne pourrez pas prendre prétexte d'une obstruction qui n'existe que dans vos discours pour mieux justifier l'usage cumulatif de toutes les procédures susceptibles d'accélérer les débats, procédures que je recense pour mémoire.
Premièrement, la demande de réserve jusqu'à la fin du titre 1er de tous les amendements tendant à insérer des articles additionnels avant ou après les articles 1er, 2, 3 et 3 bis, relatif au CPE.
Deuxièmement, la levée de la discussion commune conformément à l'article 49-2 du règlement du Sénat.
Troisièmement, la demande d'examen en priorité de certains amendements, afin de faire « tomber » les amendements contraires, en général ceux de l'opposition.
Quatrièmement, l'exception d'irrecevabilité prévue à l'article 44-2 du règlement du Sénat : la commission des affaires sociales a déposé une motion déclarant irrecevables 25 amendements à l'article 1er qui, selon elle, sont « dépourvus de tout lien avec l'objet du texte en discussion ».
Cinquièmement, la décision de la conférence des présidents, convoquée vendredi à quatorze heures trente, qui a ajouté aux jours prévus pour l'examen du projet de loi le mercredi 1er mars au matin ainsi que, éventuellement, le samedi 4 mars, le matin et le soir, et le dimanche 5 mars.
Sixièmement, l'invocation de l'article 40 de la Constitution : ont été déclarés irrecevables les amendements dont l'adoption « aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique ».
Septièmement, l'irrecevabilité de l'article 44-2 de la Constitution, qui a été invoquée à l'encontre des sous-amendements déposés par le groupe communiste.
Huitièmement, la clôture du débat : l'article 38-1 du règlement du Sénat dispose : « Lorsqu'au moins deux orateurs d'avis contraire sont intervenus dans la discussion générale, sur l'ensemble d'un article ou dans les explications de vote portant sur un amendement, un article ou l'ensemble du texte en discussion, le Président ou tout membre du Sénat peut proposer la clôture de cette discussion ».
Monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, soyez raisonnables et considérez que toutes ces mesures ne nous empêcheront pas de nous exprimer ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite faire une brève intervention sur les articles 51 à 62 du règlement.
Monsieur le président, je vous rappelle que le Conseil constitutionnel a très souvent insisté sur la nécessaire intelligibilité de la loi.
Or, nous nous sommes trouvés hier soir dans une extrême confusion sur la question essentielle de la motivation du licenciement, c'est-à-dire sur le fait de savoir si l'on peut licencier un jeune sans motivation.
Monsieur le ministre, dont nous connaissons les qualités et la force de conviction, nous a fait un discours sur la différence entre la motivation et la justification, qui était totalement incompréhensible. (Sourires)
Sur un sujet aussi grave, il n'est pas possible que l'on ne nous laisse pas expliquer notre vote, amendement après amendement.
C'est pourquoi il me semble très important de changer la procédure.
Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir accordé la parole.
M. le président. Ce n'était pas un rappel au règlement !
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 3 bis appelé en priorité, à l'amendement n° 655.
Par ailleurs, je vous rappelle que les votes ont été réservés jusqu'à la fin de cet article.
Article 3 bis (suite)
I. - Les employeurs qui entrent dans le champ du premier alinéa de l'article L. 131-2 du code du travail peuvent conclure, pour toute nouvelle embauche d'un jeune âgé de moins de vingt-six ans, un contrat de travail dénommé « contrat première embauche ».
L'effectif de l'entreprise doit être supérieur à vingt salariés dans les conditions définies par l'article L. 620-10 du même code.
Un tel contrat ne peut être conclu pour pourvoir les emplois mentionnés au 3° de l'article L. 122-1-1 du même code.
II. - Le contrat de travail défini au I est conclu sans détermination de durée. Il est établi par écrit.
Ce contrat est soumis aux dispositions du code du travail, à l'exception, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, de celles des articles L. 122-4 à L. 122-11, L. 122-13 à L. 122-14-14 et L. 321-1 à L. 321-17 du même code.
La durée des contrats de travail, précédemment conclus par le salarié avec l'entreprise ainsi que la durée des missions de travail temporaire effectuées par le salarié au sein de l'entreprise dans les deux années précédant la signature du contrat première embauche, de même que la durée des stages réalisés au sein de l'entreprise sont prises en compte dans le calcul de la période prévue à l'alinéa précédent.
Ce contrat peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, pendant les deux premières années courant à compter de la date de sa conclusion, dans les conditions suivantes :
1° La rupture est notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
2° Lorsque l'employeur est à l'initiative de la rupture et sauf faute grave ou force majeure, la présentation de la lettre recommandée fait courir, dès lors que le salarié est présent depuis au moins un mois dans l'entreprise, un préavis. La durée de celui-ci est fixée à deux semaines, dans le cas d'un contrat conclu depuis moins de six mois à la date de la présentation de la lettre recommandée, et à un mois dans le cas d'un contrat conclu depuis au moins six mois ;
3° Lorsqu'il est à l'initiative de la rupture, sauf faute grave, l'employeur verse au salarié, au plus tard à l'expiration du préavis, outre les sommes restant dues au titre des salaires et de l'indemnité de congés payés, une indemnité égale à 8 % du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion du contrat. Le régime fiscal et social de cette indemnité est celui applicable à l'indemnité mentionnée à l'article L. 122-9 du code du travail. À cette indemnité versée au salarié s'ajoute une contribution de l'employeur, égale à 2 % de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat. Cette contribution est recouvrée par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 351-21 du code du travail conformément aux dispositions des articles L. 351-6 et L. 351-6-1 du même code. Elle est destinée à financer les actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi en vue de son retour à l'emploi. Elle n'est pas considérée comme un élément de salaire au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.
Toute contestation portant sur la rupture se prescrit par douze mois à compter de l'envoi de la lettre recommandée prévue au 1°. Ce délai n'est opposable aux salariés que s'il en a été fait mention dans cette lettre.
Par exception aux dispositions du deuxième alinéa, les ruptures du contrat de travail envisagées à l'initiative de l'employeur sont prises en compte pour la mise en oeuvre des procédures d'information et de consultation régissant les procédures de licenciement économique collectif prévues au chapitre Ier du titre II du livre III du code du travail.
La rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif.
En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut être conclu de nouveau contrat première embauche entre le même employeur et le même salarié avant que ne soit écoulé un délai de trois mois à compter du jour de la rupture du précédent contrat.
Le salarié titulaire d'un contrat première embauche peut bénéficier du congé de formation dans les conditions fixées par les articles L. 931-13 à L. 931-20-1 du code du travail.
Le salarié titulaire d'un contrat première embauche peut bénéficier du droit individuel à la formation prévu à l'article L. 933-1 du code du travail pro rata temporis, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date d'effet du contrat. Le droit individuel à la formation est mis en oeuvre dans les conditions visées aux articles L. 933-2 à L. 933-6 du même code.
L'employeur est tenu d'informer le salarié, lors de la signature du contrat, des dispositifs interprofessionnels lui accordant une garantie et une caution de loyer pour la recherche éventuelle de son logement.
III. - Les travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi au sens de l'article L. 351-1 du code du travail, ayant été titulaires du contrat mentionné au I pendant une durée minimale de quatre mois d'activité ont droit, dès lors qu'ils ne justifient pas de références de travail suffisantes pour être indemnisés en application de l'article L. 351-3 du même code, à une allocation forfaitaire versée pendant deux mois.
Le montant de l'allocation forfaitaire ainsi que le délai après l'expiration duquel l'inscription comme demandeur d'emploi est réputée tardive pour l'ouverture du droit à l'allocation, les délais de demande et d'action en paiement, le délai au terme duquel le reliquat des droits antérieurement constitués ne peut plus être utilisé et le montant au-dessous duquel l'allocation indûment versée ne donne pas lieu à répétition sont ceux applicables au contrat nouvelles embauches.
Les dispositions de la section 4 du chapitre Ier du titre V du livre III du code du travail sont applicables à l'allocation forfaitaire.
Les dispositions de l'article L. 131-2, du 2° du I de l'article L. 242-13 et des articles L. 311-5 et L. 351-3 du code de la sécurité sociale ainsi que celles des articles 79 et 82 du code général des impôts sont applicables à l'allocation forfaitaire.
Cette allocation est à la charge du fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi.
L'État peut, par convention, confier aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail ou à tout organisme de droit privé la gestion de l'allocation forfaitaire.
Un accord conclu dans les conditions prévues à l'article L. 351-8 du code du travail définit les conditions et les modalités selon lesquelles les salariés embauchés sous le régime du contrat institué au I peuvent bénéficier de la convention de reclassement personnalisé prévue au I de l'article L. 321-4-2 du même code. À défaut d'accord ou d'agrément de cet accord, ces conditions et modalités sont fixées par décret en Conseil d'État.
IV. - Les conditions de mise en oeuvre du « contrat première embauche » et ses effets sur l'emploi feront l'objet, au plus tard au 31 décembre 2008, d'une évaluation par une commission associant les organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et interprofessionnel.
L'amendement n° 655, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après le cinquième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Lorsque l'employeur envisage la rupture d'un « contrat première embauche », il est tenu de respecter les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail ;
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Je tiens à dire que le Gouvernement n'a pas cru bon de répondre aux deux rappels au règlement qui viennent d'être faits. Ce n'est pas nouveau. Hier, déjà, le ministre n'a pas répondu à nos interpellations. Le Gouvernement n'a rien à dire. Les chiffres du chômage doivent le laisser sans voix.
Comme nous l'avons largement déploré, l'article 3 bis déroge d'une façon générale au droit du travail, qu'il s'agisse des règles applicables aux CDD, mais aussi et surtout aux CDI, principalement en ce qui concerne les conditions de leur rupture et les garanties attenantes pour le salarié.
De l'exception posée permettant ni plus ni moins à l'employeur de licencier à sa guise, sans avoir à donner les motifs de sa décision et sans respecter une procédure précise, il résulte notamment que l'employeur n'est plus tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable d'embauche, qu'il n'a plus à respecter les articles encadrant les licenciements économiques.
Après la systématisation du licenciement pour motif personnel par les employeurs pour contourner la législation sur les licenciements économiques leur imposant l'établissement d'un plan social, une obligation de reclassement, - 76 % des licenciements aujourd'hui ne relèvent pas de plan de sauvegarde de l'emploi - les présentes dispositions et la rupture idéologique qui les sous-tend préparent l'explosion des licenciements sans motif.
S'agissant des licenciements collectifs du CPE entrant pourtant dans le cadre des licenciements pour motif économique, la seule règle actuelle qui continuera à s'appliquer concerne la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel. On ne sait cependant pas comment cette obligation s'appliquera, car il sera impossible pour les élus du personnel de contester le bien-fondé de la décision prise dans la mesure où cette dernière n'a plus à être motivée.
Ce n'est peut-être qu'un détail pour vous, mes chers collègues, mais je souhaite que le Gouvernement puisse préciser cet aspect flou du texte.
L'amendement n° 655 vise, quant à lui, à réintroduire dans le texte l'application au CPE d'une démarche de reclassement.
Le troisième alinéa de l'article L. 321-1 du code du travail impose à la charge de l'employeur une obligation individuelle de reclassement des salariés. Il dispose que « le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé (...) ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ».
Même si, comme nous ne manquons pas de le regretter, cette obligation de reclassement ne contraint pas l'employeur à un résultat, même si le non-respect de cette obligation n'est pas sanctionné par la nullité de la procédure de licenciement, elle rappelle néanmoins ce dernier à sa responsabilité.
Même si, de plus, ladite obligation devait être renforcée afin de ne plus permettre des propositions de reclassement dans des emplois de catégorie inférieure, il nous semble toutefois que rien ne justifie qu'en raison de leur âge et du type d'emploi occupé, en l'occurrence un CPE, les jeunes salariés soient exclus du champ de cette obligation de reclassement.
L'objet de notre démarche est d'une part, d'éviter qu'une classe d'âge ne soit la perpétuelle variable d'ajustement des entreprises et que les parcours professionnels des jeunes concernés ne connaissent des ruptures et, d'autre part, de mettre l'employeur face à ses responsabilités en matière de formation, domaine qui le concerne, avant qu'il rencontre des difficultés économiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article L. 321-1 du code du travail prévoit, en son dernier alinéa, que le licenciement individuel pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement du salarié ne peut avoir lieu.
M. Guy Fischer. C'est du flan !
M. Alain Gournac, rapporteur. Mon cher collègue, cette précision est bien indiquée dans l'article précité, que j'ai relu.
M. Guy Fischer. Vous l'avez appris par coeur !
M. Alain Gournac, rapporteur. Le CPE vise à introduire plus de souplesse dans les modalités de rupture du contrat. Par conséquent, a priori, l'amendement n° 655 n'est pas compatible avec l'économie du dispositif.
M. Roland Muzeau. C'est sûr !
M. Alain Gournac, rapporteur. Il est cependant tout à fait clair que la question du reclassement devra être étudiée postérieurement à l'évaluation prévue avant la fin de l'année 2008 et en fonction de l'expérience retirée du fonctionnement du CPE.
M. Roland Muzeau. C'est maintenant qu'il faut le faire !
M. Alain Gournac, rapporteur. Mon cher collègue, je vous remercie, car il s'agit d'une proposition intéressante. Cependant, pour l'instant, la commission émet un avis défavorable.
M. Guy Fischer. Entre les discours et les actes...
Mme Hélène Luc. Nous ne pouvons pas discuter ! Vous nous en empêchez !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le sénateur, je veux revenir sur deux points. Je vous rappelle tout d'abord que les partenaires sociaux doivent mettre en place une convention de reclassement personnalisé, qui s'applique à la fois au contrat « nouvelles embauches » et au contrat première embauche.
Par ailleurs, la multiplication des voies procédurales assure-t-elle une garantie supplémentaire aux salariés ? Je n'en suis pas tout à fait certain. Naturellement, il existe des droits, un ordre public social. Les éléments procéduraux doivent être clairs. De ce fait, il est nécessaire de clarifier le « maquis additionnel » qui vise le code du travail et qui justifie une recodification à droit constant.
La réflexion qui devra être engagée devra concilier la souplesse du marché du travail et sa sécurisation.
Monsieur le sénateur, pour les deux raisons que je viens d'évoquer, le Gouvernement ne peut pas être favorable à l'amendement n° 655.
Mme Évelyne Didier. C'est dommage !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 161, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du sixième alinéa (2°) du II de cet article, supprimer les mots :
ou force majeure
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Je crois le moment venu de faire le point de la situation.
L'identité collective par le travail résulte, notamment, du développement de droits uniformément reconnus à tous les travailleurs. À partir du moment où le besoin de sécurité physique et économique des salariés s'est inscrit dans des droits, ceux-ci ont constitué l'un des objets principaux de l'activité des organisations représentatives, qui font respecter les droits existants ou cherchent à en conquérir de nouveaux.
De la reconnaissance de ces droits, de leur accumulation et de leur organisation en système a émergé le droit du travail, qui tient lieu à la fois de procès-verbal et de rempart des conquêtes d'une classe sociale déterminée, ce qui a conduit à y voir un « droit ouvrier », autant dire un « droit de classe ».
La combinaison de ces droits a donné le jour à la situation juridique du travailleur salarié, autrement dit à un système de règles s'appliquant de manière uniforme à tous les salariés, réduisant ainsi progressivement le contrat de travail à un acte, condition de l'application d'un statut commun à tous les travailleurs.
C'est le contrat de travail à temps plein et à durée indéterminée qui a joué ce rôle d'acte propre à donner aux travailleurs une véritable identité professionnelle. Tous ceux qui sont liés par un contrat de ce type se trouvent également unis entre eux par un sentiment d'appartenance à une même communauté professionnelle.
Le syndicalisme, la sécurité sociale, la mutualité ont été modelés sur leur situation juridique. Les ouvriers avaient un « état » au XIXe siècle et aujourd'hui ils sont intégrés dans un appareil de représentation et de protection de leurs intérêts.
La clé de voûte de la socialisation par le travail, c'est le contrat de travail à durée indéterminée. Il faut entendre par là que le travail ne suffit pas à assurer l'intégration sociale ; les exclus eux aussi travaillent et accomplissent même les tâches les plus dures et les plus rebutantes. Mais le travail n'est un instrument d'identification professionnelle, et donc d'intégration sociale, que dans la mesure où il s'inscrit dans une forme juridique stable, comme le statut du fonctionnaire ou le contrat à durée indéterminée du salarié. Les risques d'exclusion augmentent donc d'autant plus que l'on s'éloigne durablement de ce cadre de référence. S'en écarter provisoirement amène le salarié à relever d'un autre statut juridique, aujourd'hui bien assis, à savoir celui du chômeur temporaire, en transit entre deux emplois, et n'ayant droit qu'aux prestations de l'assurance souscrite à cet effet ou aux minima sociaux lorsque la situation se prolonge.
Avec ce projet de loi, nous sommes plus que jamais au coeur de la question. Au travers de la modification des règles juridiques relatives au contrat de travail, c'est cette identité collective que vous êtes en train de briser, mes chers collègues. Et nous avons la conviction qu'une partie d'entre vous le fait sciemment.
Certains mesurent parfaitement, avec le MEDEF, les enjeux du processus en cours. Il s'agit bien de détruire l'identité collective formée autour du travail, du statut salarial stable et des conquêtes sociales qui ont marqué son développement.
La compétitivité des entreprises, dans cette affaire-là, devient un alibi commode. En multipliant les formes juridiques sous lesquelles s'effectue le travail - CDD, intérim, contrats d'accès à l'emploi, contrats d'avenir, CPE, CNE, contrats de réinsertion-revenu minimum d'activité, les CIRMA, partage salarial, protection des services -, en précarisant toujours plus les travailleurs, en faisant toujours pression à la baisse sur les salaires, il ne s'agit pas seulement de favoriser systématiquement l'actionnaire au détriment du travailleur ; il s'agit aussi d'individualiser et d'isoler chaque travailleur et de détruire les bases du mouvement social. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'application du préavis me paraît peu compatible avec une situation de force majeure. Il est donc naturel de prévoir cette exception à la règle. La commission émet par conséquent un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame le sénateur, nous avons déjà évoqué hier la force majeure. À cette occasion, j'ai indiqué que, dans un certain nombre de cas, le CPE pouvait apporter des garanties supérieures à celles qui sont prévues dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
Je rappelle que la force majeure résulte d'un événement imprévisible, inévitable, insurmontable, créant une impossibilité absolue et durable d'exécuter le contrat de travail, sans que cette impossibilité puisse être imputée à l'employeur. Lorsqu'un cas de force majeure est reconnu, il emporte rupture immédiate du contrat de travail, sans que cette rupture puisse lui être attribuée.
L'employeur est donc dispensé de la procédure de licenciement et n'a pas à verser d'indemnités de préavis ou de licenciement. Il doit seulement acquitter au salarié l'indemnité de congés payés.
Or, dans le cadre du CNE, et demain du CPE, une indemnité de 8 % doit être obligatoirement versée. Les droits ouverts pour ces deux contrats - c'est la nouvelle procédure de sécurisation - sont supérieurs, en cas de force majeure, à ceux qui existent pour le contrat de travail à durée déterminé classique. C'est, me semble-t-il, un exemple de la construction d'un nouveau parcours de sécurisation. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Guy Fischer. Ce sera très peu utilisé ! Ce sera l'exception !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 162, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le sixième alinéa (2°) du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :
En cas de faute grave, l'employeur est tenu de respecter la procédure prévue à l'article L. 122-41 du code du travail.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement de précision tend, en cas de faute grave, à ce que l'employeur soit tenu de respecter la procédure prévue à l'article L. 122-41 du code du travail.
Monsieur le ministre, le projet de loi actuellement en discussion comporte une bizarrerie. Le licenciement peut être prononcé sans motif et sans que soit respectée une quelconque procédure. Laissons de côté la force majeure. En cas de faute grave, le licenciement devra bien être motivé puisque, si l'employeur n'invoque pas ladite faute vis-à-vis d'un salarié à l'encontre duquel il a quelques griefs, il devra respecter le préavis et assurer le paiement des indemnités de rupture. Il aura donc tout intérêt à invoquer la faute grave pour ne rien payer, comme de nombreux employeurs le font d'ores et déjà.
Pour invoquer la faute grave, surtout en prévision du recours qui ne manquera pas d'être intenté devant le conseil des prud'hommes, il faut bien qu'il définisse cette faute et qu'il l'indique évidemment par écrit.
C'est ce qui nous amène à demander, au moins dans ce cas de figure, l'application du code du travail. S'il y a faute grave présumée, l'employeur doit au moins être tenu de l'invoquer dans un délai raisonnable et non, par exemple, vingt et un mois après le début du contrat, soit avant la fin du CPE en l'occurrence.
Monsieur le ministre, une difficulté apparaît. Le code du travail indique notamment que la convocation à l'entretien préalable, en cas de procédure de licenciement, doit être envoyée au plus tard dans les deux mois à compter du jour de la connaissance des faits par l'employeur. Qu'en sera-t-il dans le cas du licenciement pour faute grave d'un salarié recruté par le biais d'un CPE ? Comment cela va-t-il s'articuler ?
Je veux maintenant évoquer un dernier point. Pour permettre à l'employeur d'être exonéré du respect du préavis et du paiement d'indemnités dans le cadre d'un licenciement pour faute grave, on arrive à ce paradoxe sidérant selon lequel le salarié sera le seul à « bénéficier », si je puis dire, d'un licenciement motivé.
Le salarié, dont on voudra simplement se débarrasser, bénéficiera glorieusement de quinze jours ou d'un mois de préavis et de son indemnité de 8 %, mais il n'aura pas le droit de savoir les raisons pour lesquelles il est licencié, sauf à contester son licenciement pour rupture abusive, la charge de la preuve pesant à ce moment-là sur lui.
Le salarié fautif aura déjà au moins de quoi contester son licenciement. Voilà qui démontre, si besoin en était, à quel point le dispositif que vous proposez est incohérent et source permanente de contentieux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, estimant qu'il est satisfait. Le code du travail, je le répète, est applicable au CPE, les cas de fautes graves et de fautes non graves étant prévus dans le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement est superfétatoire, comme le disait M. le rapporteur. Car, dans le projet de loi, n'est pas exclu le respect de la procédure disciplinaire en cas de rupture pour faute du salarié. Cela nous renvoie à l'article L. 122-41 du code du travail, comme dans le cas d'un contrat à durée indéterminée classique.
Voilà pourquoi le Gouvernement ne peut pas être favorable à cet amendement. Je rappelle que nous ne sommes pas dans une zone de non-droit social. Cela a été l'objet de nos échanges et de nos débats hier soir.
M. Alain Gournac, rapporteur. J'essaie de faire passer ce message !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 509, présenté par M. Vallet et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le sixième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... °L'accès au crédit est ouvert auprès des établissements bancaires aux salariés employés sous le régime d'un contrat de première embauche. Les banques ne peuvent invoquer ce régime pour refuser des éventuelles ouvertures de crédits.
La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. L'objet de cet amendement est d'éviter que les établissements bancaires ne puissent invoquer le contrat de première embauche pour refuser à un salarié l'accès au crédit. Les salariés en CPE doivent pouvoir bénéficier, à l'instar de n'importe quels salariés, d'ouverture de crédits pour l'achat de mobilier ou d'un véhicule, par exemple. C'est là un droit essentiel, qui apporte une protection élémentaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. La rédaction de cet amendement est excessivement impérative. Si elle l'estime utile, une banque refusera d'accorder un crédit en invoquant les motifs habituels, sans mentionner le CPE.
M. Roland Muzeau. C'est comme pour licencier les travailleurs !
M. Alain Gournac, rapporteur. Monsieur Muzeau, il n'existe pas un monde du CPE !
Peut-être M. le ministre pourrait-il nous rappeler à nouveau les initiatives prises par le Gouvernement afin de faciliter l'accès des titulaires de CPE au crédit bancaire ?
L'avis de la commission est défavorable.
M. Roland Muzeau. Les banquiers feront-ils comme les patrons ? Telle est la question !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappelle que le CPE est un CDI. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Raymonde Le Texier. Non !
M. Alain Gournac, rapporteur. Si !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En ce qui concerne le CNE, le Premier ministre a engagé, avec la fédération des banques françaises, l'Association française des établissements de crédit et les compagnies d'assurances, un dialogue qui s'est révélé fructueux.
L'engagement qui a été pris par ces organismes représentatifs est bien de considérer le contrat « nouvelles embauches » et le contrat première embauche comme n'étant pas des instruments de discrimination.
S'agissant de l'accès au logement, le projet de loi apporte un progrès par rapport à la situation de précarisation actuelle. En effet, la moitié des CDD, pour les moins de vingt-six ans, sont d'une durée allant de moins d'un mois à un mois, et n'ouvrent pas droit à l'obtention de crédits de la part des organismes financiers.
C'est là l'un des éléments que le Gouvernement a pris en compte lors de ses négociations avec les organismes représentatifs, notamment du secteur bancaire.
M. Alain Gournac, rapporteur. Très bien !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 163, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du septième alinéa (3°) du II de cet article, après les mots :
des salaires
insérer les mots :
au sens de l'article L. 140-2 du code du travail
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Par cet amendement, nous proposons de préciser que le montant des salaires restant dus en cas de licenciement s'entend au sens de l'article L. 140-2 du code du travail.
Outre le salaire de base, le salaire brut, doivent être mentionnés les compléments ou accessoires de salaire. Il peut s'agir d'un mois double, d'un treizième mois, d'une prime de fin d'année ou de primes liées à des spécificités ou à des usages professionnels. Certains de ces accessoires de salaire ont un caractère obligatoire parce qu'ils sont mentionnés dans les conventions collectives. D'autres sont à la discrétion de l'employeur.
Quelle sera la situation du salarié en CPE au regard de ces primes et accessoires ? La jurisprudence admet que le droit à gratification soit subordonné à la condition d'appartenance à l'entreprise au moment de sa distribution.
J'en veux pour preuve deux arrêts de la Cour de cassation : le premier, en assemblée plénière du 5 mars 1993, et, le second, du 28 mai 2003 de la chambre sociale, aux termes desquels même en l'absence d'une disposition expresse excluant du bénéfice de la gratification les salariés ayant quitté l'entreprise avant la date de son versement, le droit au paiement d'une gratification calculée au prorata du temps de présence ne peut résulter que d'une convention expresse ou d'un usage, dont il appartient au salarié d'apporter la preuve.
On voit bien ce qui peut en résulter en ce qui concerne les contrats précaires.
La question se pose aussi, d'ailleurs, pour les salariés en contrat « nouvelles embauches ». Lorsqu'un salarié a quitté une entreprise depuis plusieurs mois, qui va le rappeler pour lui dire qu'il a droit à la prime de bilan ?
Cependant, le fait que le CPE soit ouvert dans toutes les entreprises, et pas seulement dans celles de moins de vingt salariés, amène à se poser une autre question : quelle sera la situation du salarié, notamment de celui qui aura été licencié, par exemple, après vingt-trois mois, au regard de l'intéressement ou du compte de participation ?
Que prévoyez-vous exactement, monsieur le ministre, pour garantir le versement de toutes les primes et accessoires de salaire au salarié licencié sans motif ? Qu'en sera-t-il pour l'intéressement et la participation ?
S'il est réembauché après trois mois de délai de carence, comment cela fonctionnera-t-il ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Je vous ai écoutée avec beaucoup d'attention, ma chère collègue. Le texte étant déjà fort complexe, je ne souhaite pas l'alourdir. S'adressant le plus souvent à des jeunes, il doit être lisible ! La commission est défavorable à cet amendement. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Le texte est simplifié !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roland Muzeau. Est une arnaque !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... s'il est encadré par des règles de procédure notamment s'agissant de la rupture du contrat pendant les vingt-quatre premiers mois, qui peuvent être minorés des temps de formation en alternance, des contrats, des stages ou de l'intérim, ne conduit à ne toucher aucune virgule en ce qui concerne les autres conventions collectives.
Quant aux dispositions relatives à l'intéressement et à la participation, mais aussi au plan d'épargne entreprise,...
M. Jean-Luc Mélenchon. L'intéressement pour un salarié qui travaille quatre mois : vous plaisantez !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... elles s'appliquent bien entendu à ces salariés pendant cette période de consolidation sous réserve du délai de trois mois,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il va passer un mois dans une entreprise !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... qui est le délai normal pour participer à l'intéressement ou à la participation.
Aucun de ces droits n'est touché. Cela me semblait aller de soi, mais il s'est révélé important d'apporter cette précision, pour la clarté du débat.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pendant un mois, il sera intéressé !
M. le président. Le vote est réservé.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 164 est présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 668 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans la première phrase du septième alinéa (3°) du II de cet article, remplacer le pourcentage :
8 %
par le pourcentage :
15 %
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 164.
Mme Raymonde Le Texier. Par cet amendement, nous proposons de porter le montant de l'indemnité de précarité due au salarié en CPE de 8 % à 15 % du montant du salaire brut.
En quelque sorte, on peut dire que la précarité d'un jeune en CPE est bien plus grave encore que celle d'un salarié en CDD ou en intérim, puisqu'il peut être licencié à tout moment et sans motif, ce qui n'est pas le cas du salarié en CDD, qui ira jusqu'au terme de son contrat, sauf faute grave.
Le salarié vit dans une angoisse permanente. Il n'est jamais sûr d'être là encore le lendemain, le surlendemain et ainsi de suite !
Voilà ce que l'on propose à notre jeunesse. De cette angoisse quotidienne, il convient de tenir compte.
De plus, il faut rappeler que ce jeune ne pourra construire convenablement sa vie dans ces conditions.
Admettons, néanmoins, qu'il parvienne à obtenir d'une banque un crédit pour acheter une voiture d'occasion.
Les membres de l'Association française des banques ont, sur votre invitation et en tant que membres du MEDEF, indiqué que les salariés en CPE seront traités comme les salariés en CDI. C'est déjà, d'ailleurs, un aveu quant au fait que le CPE n'est pas un CDI. Passons !
Sur le fond, c'est prendre les jeunes pour des demeurés, ainsi que nous d'ailleurs, car les conditions de prêt sont toujours similaires : elles sont liées aux revenus, c'est-à-dire à leur montant et à leur durée prévisible, au patrimoine, à l'état de santé de l'emprunteur et, pour les jeunes, en particulier, souvent, à la caution éventuelle.
La vraie question que l'Association française des banques s'est bien gardée d'évoquer est celle de l'assurance chômage, qui est liée à l'emprunt.
S'il se trouve une banque qui prête à un jeune en situation de précarité totale, va-t-elle le faire sans assurance chômage ? Évidemment non. S'appuiera-t-elle sur la caution ? Oui, mais que se passera-t-il si l'emprunteur n'a pas la caution ou les garanties suffisantes, surtout à vingt-cinq ans ?
On peut dire que les conditions de prêt seront les mêmes pour un salarié en CPE ou en CNE que pour n'importe qui d'autre. En l'absence de garanties patrimoniales ou de caution solvable, il n'y aura pas d'emprunt possible. Petit handicap quand on démarre dans sa vie d'adulte !
Cependant, si l'on admet, comme je le disais au départ, que le jeune a fait un achat à crédit, au cas où il serait licencié du jour au lendemain, les mensualités vont continuer à courir. Il lui faudra donc payer, ce qui supposera le recours à la caution, la saisie de l'éventuel patrimoine, à moins que l'on n'opte pour la procédure de surendettement.
Je n'exagère même pas en disant cela, mais la vraie question est celle de la précarisation de la situation des jeunes, y compris de ceux qui peuvent accéder aujourd'hui à un CDI, et des difficultés économiques et sociétales que cela ne manquera pas de créer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 668.
Mme Évelyne Didier. Cet amendement est relatif à la prime de précarité à laquelle le salarié embauché a droit dans le cadre d'un contrat de première embauche et en cas de licenciement.
Le paragraphe II tend à préciser que cette prime relève du même régime que la prime de précarité due aux salariés embauchés en CDD à la fin de leur contrat.
En revanche, le montant n'est pas le même, puisque, dans la prime initiale due après CDD, le montant est fixé à 10 % du montant total de la rémunération brute du salarié, alors que ce montant n'équivaudra qu'à 8 % du même total pour les salariés embauchés en CPE.
Pourquoi un tel écart ? Il est tout de même incroyable que le CDD devienne maintenant l'un des contrats les plus intéressants en termes de garantie des droits.
Avec le CNE et, maintenant, le CPE, le Gouvernement a définitivement installé la précarité, en la généralisant à toutes les formes d'emplois. En disant qu'avec le CPE ou le CNE il s'agit de faire des contrats à durée indéterminée, vous essayez en fait d'imposer de nouvelles normes sociales et vous plongez le monde du travail dans la fragilité professionnelle, sociale et familiale.
Dans la mesure où le licenciement peut intervenir à n'importe quel moment, après un court préavis, pendant les deux premières années, il est normal que les difficultés matérielles et personnelles engendrées par cette rupture de contrat soient compensées. C'est pourquoi nous estimons que la prime de précarité doit être plus importante et nous proposons de fixer son taux à 15 %. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. David Assouline. C'est intéressant !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il faut penser aux travailleurs de temps à autre !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'indemnité de précarité due à l'issue d'un CDD est fixée à 10 % de la rémunération brute. L'employeur d'un salarié en CPE devra payer 8 % d'indemnités de rupture, auxquels s'ajouteront 2 % de contributions destinées à financer des actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi.
Le montant total de ces indemnités est ainsi le même dans les deux cas.
Mme Évelyne Didier. Cela ne va pas dans la même poche !
M. Alain Gournac, rapporteur. Il serait vraiment paradoxal de dissuader les employeurs de recourir au CDD plutôt qu'au CPE, en fixant une indemnité plus élevée pour la rupture de ce dernier contrat !
M. Roland Muzeau. Pourquoi ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Parce qu'il faut leur laisser le choix ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Marie-France Beaufils. C'est contradictoire !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ayez au moins un argumentaire qui tienne !
M. Alain Gournac, rapporteur. L'avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Un parallélisme a été établi par les auteurs de ces amendements entre le taux de 10 %, applicable en cas de rupture du CDD, et celui de 8 %, qui concerne le CPE.
Or, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler hier à propos d'un amendement du groupe CRC, il existe une différence entre les deux contrats : Le titulaire salarié d'un CDD paie des cotisations sociales et des impôts, alors que celui d'un CPE en sera totalement exonéré.
En outre, dans un certain nombre de branches ou d'entreprises, il existe un accord collectif prévoyant une indemnité de rupture de CDD de 6 %, et non de 10 %.
Enfin, l'Association française des sociétés financières a effectivement indiqué par écrit à l'ensemble de ses sections, le 22 novembre 2005, que le CNE et le CDI devaient être traités sur le même plan lors de l'examen des demandes de crédits.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cela n'engage à rien !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Parallèlement, nous constatons une augmentation de plus de 10 % des crédits distribués aux particuliers sur l'année 2005.
Par ailleurs, les assureurs, qui préparent actuellement un projet de convention permettant l'accès au logement et la mise en place d'une assurance logement dans le cadre du dispositif local LOCAPASS et de tous les dispositifs favorisant l'accompagnement social, nous ont dit, à la suite de leur audience, le 15 février dernier, par M. le Premier ministre que, dans l'attente de la signature de cette convention, la Fédération française des sociétés d'assurances avait demandé à ses adhérents de prendre en considération les demandes d'assurance de loyers impayés selon les modalités habituelles.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ils vont « prendre en considération » !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Il n'y a donc pas d'exclusion.
La convention qui est en cours de préparation sera prête en même temps que l'ensemble des décrets permettant de proposer le CPE aux jeunes de moins de vingt-six ans.
M. Roland Muzeau. Escroquerie !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 445, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
I. Dans la première phrase du septième alinéa du II de cet article, remplacer le pourcentage :
8 %
par le mot :
15 %
II. Après la même phrase, insérer une phrase ainsi rédigée :
Une convention ou un accord collectif de travail peut déterminer un taux plus élevé.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Alors que l'économie mondialisée occupe toutes les niches de non-droit social ou environnemental afin d'augmenter ses bénéfices, il existe tout de même des outils internationaux répondant à l'intérêt public et dont l'objectif est de faire rempart à des pratiques de prédation et d'exploitation des hommes, des femmes, voire des enfants dans les pays en voie de développement. C'est le cas, par exemple, de l'Organisation mondiale du travail, l'OIT. Nous allons bientôt devoir y recourir.
Le démantèlement à la française du code du travail conduit à la transgression des règles minimales de protection des travailleurs.
À la proposition des deux orateurs précédents, tendant à augmenter le taux des indemnités de rupture de 8 % à 15 %, j'ajoute une référence aux accords ou conventions collectives, car ceux qui prennent part à leur négociation sont plus expérimentés que les jeunes embauchés.
Je voudrais, au-delà de la condamnable précarisation induite par cet article du projet de loi, attirer votre attention sur le vécu d'instabilité auquel vous allez livrer les jeunes. Vous qui vantez les mérites de la croissance, vous n'êtes pas prêts de favoriser la consommation de ces nouveaux embauchés qui savent qu'ils pourront être licenciés brutalement, à n'importe quel moment.
Cet amendement vise au moins à ce que les indemnités de rupture de contrat ne soient pas en deçà de tout. En augmentant les indemnités de 8 % à 15 %, nous éviterons que les employeurs ne soient abusivement encouragés à user de pratiques peu responsables à l'égard de la société.
Prenons tous en compte ce qu'est le vécu réel : le loyer à payer, le préavis à déposer en cas de déménagement, les factures de gaz, d'électricité, les courses...
Quelle société préparez-vous ? Une société où les jeunes ne pourront plus construire leur autonomie ? Resteront-ils chez leurs parents, si ceux-ci peuvent les héberger, ou prendront-ils le risque de connaître l'expulsion et la spirale de l'exclusion ? Cette tiers-mondisation rampante, préfigurant une organisation sociale comparable à celle de nombre de grandes métropoles africaines, est lamentable. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Il n'est pas normal d'entendre de pareils arguments !
On ne peut pas comparer la situation d'un jeune qui reste sur le trottoir à celle d'un autre jeune, qui aura la chance, grâce au CPE, d'entrer dans l'entreprise et de montrer ses compétences.
M. Roland Muzeau. Il y a de quoi s'étrangler quand on entend cela !
M. Alain Gournac, rapporteur. Chacun est libre de choisir. Pour ma part, entre les deux solutions, je préfère que le jeune travaille ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Luc Mélenchon. L'esclavage, c'est bien aussi !
M. Alain Gournac, rapporteur. Il ne s'agit pas du tout d'esclavage !
M. le président. Monsieur Mélenchon, vous n'avez pas la parole !
M. Guy Fischer. C'est de la pure provocation !
M. Alain Gournac, rapporteur. Je réponds simplement à l'argumentation qui vient d'être présentée !
M. Guy Fischer. Elle est respectable !
M. Alain Gournac, rapporteur. Hier, vous disiez que je ne répondais pas assez !
Je suis persuadé que les propos que j'ai entendus seront pris en considération, mais je ne donnerai pas un avis favorable sur cet amendement, qui est similaire aux deux amendements précédents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Trouvez de bons arguments !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En cas de rupture d'un CDI au cours des deux premières années, le code du travail ne prévoit pas d'indemnités de rupture.
Dans le cas du CPE, il existe des indemnités croissantes dont le taux s'élève au minimum à 8 %. Nous proposons un taux plancher. Rien n'empêche les conventions collectives de prévoir plus.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Ou de prévoir moins !
M. Roland Muzeau. Et dans la métallurgie !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Dans la métallurgie, il existe un accord global, qui a d'ailleurs été signé par les partenaires sociaux depuis fort longtemps.
M. Roland Muzeau. Avec trois syndicats minoritaires !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Il ne s'agit donc pas d'une décision unilatérale.
L'avis est donc défavorable.
M. David Assouline. C'est Boulogne-Billancourt !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 669, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la troisième phrase du septième alinéa du II de cet article :
À cette indemnité versée au salarié s'ajoute une contribution de l'employeur variant en fonction de la date de la rupture du contrat : 8 % de la rémunération brute due au salarié depuis le début du contrat lorsque la rupture intervient dans les six premiers mois ; 6 % de six à douze mois ; 4 % de douze à dix-huit mois ; 2 % de dix-huit à vingt-quatre mois.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Nous vous faisons une proposition.
Nous voulons construire un projet, mais aussi défendre le salarié.
M. Jean-Claude Gaudin. En fusillant les patrons !
M. Guy Fischer. S'agissant de l'indemnité de rupture, nous proposons de mettre en place une contribution supplémentaire qui serait versée par l'employeur et varierait en fonction de la date de rupture du contrat.
M. Robert Bret. C'est important !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela vous aiderait à garder les jeunes dans l'emploi !
M. Guy Fischer. Cet amendement vise donc à moduler et à augmenter le montant de la contribution de l'employeur au moment de la rupture du contrat et au regard des grandes situations de précarité que ne manquera pas de créer ce nouveau contrat dit de première embauche.
M. David Assouline. Intéressant !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est le futur contrat unique !
M. Guy Fischer. Cet amendement complète le précédent, qui était relatif à la prime de précarité.
Nous avons rappelé en quoi la mise en place de ce contrat première embauche, qui s'inscrit dans la droite ligne du contrat nouvelle embauche, fait exploser les normes sociales en terme de précarité.
Depuis le développement d'un chômage de masse qui, d'ailleurs, est reparti à la hausse, contrairement à tout ce que l'on nous avait dit, ...
M. Robert Bret. Voilà qui explique la popularité du Premier ministre !
M. David Assouline. C'était tellement simple ! Le CNE n'a servi à rien !
M. Didier Boulaud. Il a fait « pschitt » ! Ci-gît le CNE !
M. Guy Fischer. ... on a vu s'opérer une distinction entre emplois stables et emplois précaires.
Mais, depuis l'arrivée de votre majorité au pouvoir, la dégradation des conditions d'emploi s'est généralisée : les emplois précaires, sous-qualifiés et mal rémunérés deviennent la norme.
Cette norme s'impose au détriment de l'emploi dit « typique » qui, à cause de cette majorité, va devenir de plus en plus rare.
Je rappelle que l'emploi typique, c'était l'emploi à temps complet, en contrat à durée indéterminée, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela n'existera plus !
M. Guy Fischer. ... qui offrait un niveau de revenu permettant une projection personnelle et familiale dans l'avenir, ainsi qu'un statut social et des droits, et dont nous avons bénéficié, ce qui nous a permis de prendre l'ascenseur social.
Et je suis persuadé qu'un certain nombre de mes collègues en ont également profité. Je ne parle pas de ceux qui sont bien nés.
M. David Assouline. C'est une formule !
M. Jean-Luc Mélenchon. Disons nés avec une cuillère d'argent dans la bouche !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. De vermeil !
M. Guy Fischer. Actuellement, 17 % de la population active dispose d'un emploi précaire, pourcentage auquel il faut ajouter les 5 % de la population active qui se trouve en situation de sous-emploi, c'est-à-dire les personnes qui travaillent à temps partiel alors qu'elles souhaiteraient travailler plus. Au total, un travailleur sur cinq est victime de conditions d'emploi dégradées.
Mais ces chiffres ne tiennent pas compte du fléau que constitue le CNE, et que va renforcer le CPE.
Nous risquons aussi de voir se généraliser la pauvreté parmi les travailleurs, phénomène qui a fait son apparition ces dernières années et qui touche actuellement 3 millions de personnes, les « travailleurs pauvres ».
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a jamais eu autant de personnes qui gagnent moins que le SMIC.
M. Guy Fischer. Vous avez probablement conscience de la dérive induite par ces nouveaux contrats, monsieur le ministre, puisque vous envisagez une contribution supplémentaire des entreprises à hauteur de 2 % de la rémunération brute du salarié, afin de financer des actions en faveur des salariés privés d'emploi.
Mais cette mesure n'est pas suffisamment « désincitative » pour les employeurs. Le montant de la contribution limitée à 2 % ne permettra pas de décourager l'entreprise de se séparer d'un salarié.
Par cet amendement, et c'est là toute son intelligence,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. En effet, c'est stupéfiant !
M. Guy Fischer. ... nous proposons que cette contribution soit modulable en fonction du moment où intervient le licenciement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela vous aidera à les garder dans l'emploi !
M. Guy Fischer. Plus celui-ci interviendrait rapidement, c'est-à-dire dans les tout premiers mois du CPE, plus le pourcentage de la compensation serait élevé.
Ce montant serait dégressif, dans la limite du taux de 2 % que vous préconisez, seulement si le salarié est licencié entre le 18ème et le 24ème mois.
Ces éléments de modulation pourraient avoir une véritable fonction de responsabilisation des entreprises, tout en offrant des moyens de financement non négligeables. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. J'ai bien évidemment écouté M. Fischer, qui a dit des choses intéressantes (Ah ! sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste), même si ces dernières ne portaient pas tout à fait sur le contrat proposé aujourd'hui.
Monsieur Fischer, rendre le CPE nettement plus coûteux pour l'employeur que le CDD est tout à fait incompatible avec l'intention de la commission de favoriser l'utilisation de cet outil de lutte contre la précarité. Si le CPE n'est pas incitatif, pourquoi les futurs employeurs s'en serviraient-ils ? La commission émet donc un avis défavorable, mais elle se souviendra de vos intéressantes propositions dans l'avenir.
M. Didier Boulaud. Des promesses ! On a vu avec Sarkozy et GDF ce que cela voulait dire !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappelle que le projet de loi prévoit que les employeurs qui viendraient à rompre un contrat première embauche verseront une contribution, égale à 2 % de la rémunération brute depuis le début du contrat, au régime d'assurance chômage pour financer des actions d'accompagnement renforcé en direction du salarié dont le contrat est rompu.
Au moment de la négociation sur le régime de l'assurance chômage, il y a eu un débat sur la contribution des employeurs, notamment pour financer des actions d'accompagnement et de formation en faveur des demandeurs d'emploi indemnisés, pour divers types de contrat. Nous devons d'ailleurs aussi prendre en compte la situation des demandeurs d'emploi non indemnisés : nous étudions actuellement des propositions que nous vous présenterons dans les semaines qui viennent. Cependant, s'agissant des divers types de contrat, je veux à cet instant du débat citer les chiffres qui ressortent d'une étude parue à la mi-2005, chiffres qui font apparaître que la situation évolue peu.
Ainsi, à la mi-2005, les contrats à durée déterminée représentaient 5,2 % de l'ensemble des contrats alors que la part des contrats à durée indéterminée était de 89,3 %, avec d'ailleurs une relative inégalité entre les hommes et les femmes puisque ces dernières se voient moins souvent proposer des contrats à durée indéterminée.
Les contrats d'apprentissage représentaient 1,1 % de l'ensemble des contrats. Ce pourcentage, on le sait, est en croissance, et les chiffres du mois de janvier, puisqu'ils ont été évoqués, confirment les bons résultats des contrats d'apprentissage et des contrats de professionnalisation.
Enfin, la part des contrats intérimaires était de 2,1 %, et celle des contrats aidés de 2,3 %.
Hors les CDI, il s'agit donc de contrats représentant un peu plus de 10,6 % de l'ensemble des contrats. Voilà la réalité telle qu'elle est, et je crois que la dernière négociation sur le régime d'assurance chômage, qui est en cours d'agrément, a permis un certain nombre d'avancées dans ce domaine.
Le Gouvernement ne peut donc pas être favorable à votre amendement, monsieur Fischer.
Il n'en reste pas moins que la convention de reclassement personnalisé est bien financée en partie par l'employeur tout en ne constituant pas une sanction à son encontre : c'est sa contribution au parcours d'accompagnement du salarié dont le contrat a été rompu.
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 165, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter l'avant-dernière phrase du septième alinéa (3°) du II de cet article par les mots :
et l'accès aux conventions de reclassement personnalisé prévues à l'article L. 321-4-2 du code du travail
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Cet amendement prévoit l'accès à la convention de reclassement personnalisé pour le jeune victime d'un licenciement économique.
Dans cette situation, je le rappelle, le salarié devient stagiaire de la formation professionnelle et doit alors pouvoir bénéficier d'actions d'orientation, d'actions de bilan de compétences, éventuellement d'actions de validation des acquis de l'expérience, ou VAE, et, bien évidemment, d'actions de formation, en particulier de formation qualifiante.
La convention de reclassement personnalisé est nettement plus précise que les actions d'accompagnement du salarié telles que vous les entendez et telles que vous les proposez dans le cadre de cet article concernant le contrat première embauche.
La convention de reclassement personnalisé permet au bénéficiaire de construire un parcours professionnel, un parcours de formation qui, de notre point de vue, lui permettra d'espérer davantage au moins un retour à l'emploi.
Dans ce cas, non seulement le jeune ne sera pas dans l'impossibilité de refuser n'importe quel emploi - j'insiste sur les mots : « n'importe quel » -, mais il aura en plus le statut de stagiaire, statut qui lui apportera une certaine sécurité et un complément de formation.
Nous proposons donc que l'accès des jeunes licenciés d'un contrat première embauche à une convention de reclassement personnalisé soit automatique, et cela dans tous les cas et quel que soit le déroulement des négociations internes dans l'entreprise avec les partenaires sociaux.
Accessoirement, je rappelle que, en cas de non-proposition au salarié, l'employeur se doit de verser aux ASSEDIC une contribution égale à deux mois du salaire brut du salarié licencié.
Vous ne cessez d'affirmer, monsieur le ministre, que le contrat première embauche est « l'outil miracle » pour faire baisser le chômage des jeunes. Au vu des chiffres du chômage de janvier, chiffres qui, à cause ou, peut-être, grâce au contrat nouvelles embauches, affichent une nouvelle augmentation, ce n'est pas gagné, et l'on peut craindre que vous n'ayez pas encore trouvé « l'outil miracle » !
Mais, pour le moins, vous devez permettre aux jeunes qui perdent leur emploi de bénéficier de tous les outils existants qui permettent de créer les conditions d'un possible retour à l'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Ma chère collègue, personne n'a parlé d'« outil miracle ». On l'a dit et répété, en commission comme dans cet hémicycle, le CPE est « un outil » que nous estimons intéressant, mais, de là à parler d' « outil miracle », il ne faut pas exagérer !
Par ailleurs, je suis un peu étonné de ce que j'entends, car, à longueur de temps, vous nous reprochez de ne pas accepter le dialogue social. Attendons donc, ma chère collègue, d'avoir l'avis des partenaires sociaux !
Mme Christiane Demontès. Précisément !
M. Alain Gournac, rapporteur. Si vous voulez le dialogue social, laissez tout de même aux partenaires sociaux la possibilité d'exprimer leurs souhaits : vous ne pouvez être à la fois d'un côté et de l'autre.
Le 3° du II de l'article 3 bis prévoit, à défaut du bénéfice des conventions de reclassement personnalisé, des « actions d'accompagnement renforcé du salarié par le service public de l'emploi en vue de son retour à l'emploi ». C'est nous qui avons un peu « poussé » le Gouvernement à accepter cette avancée, qui est donc due, mes chers collègues, au travail du Sénat !
M. Jean-Luc Mélenchon. Contre la cruauté gouvernementale ! (Sourires.)
Mme Christiane Demontès. Eh bien, allons jusqu'au bout ! Inscrivez-le dans la loi !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Il est important qu'il y ait un accord entre les partenaires sociaux sur la convention de reclassement personnalisé.
Le projet de loi renvoie donc à un accord entre les partenaires sociaux le soin de définir les conditions et les modalités selon lesquelles les salariés embauchés en contrat première embauche pourront bénéficier de la convention de reclassement personnalisé.
Je profite de cet instant pour rappeler qu'au moment de l'examen de la loi de programmation pour la cohésion sociale la convention de reclassement personnalisé n'avait pas suscité, sur les travées de gauche de cet hémicycle, un très grand enthousiasme. Or, aujourd'hui, l'ensemble des partenaires sociaux participent à la mise en oeuvre de ce dispositif et mettent en place, dans des territoires qui connaissent de plus grandes difficultés, des conventions de reclassement personnalisé « plus », d'ailleurs avec le soutien de régions et de départements. Je citerai l'exemple de Romans et du secteur de la chaussure, où il y a une convention de reclassement personnalisé « plus », ou celui de l'ouest de la France, où plusieurs conventions de reclassement vont être mises en oeuvre pour faire face, notamment, à l'évolution du secteur de l'électronique.
Il s'agit d'apporter des réponses à la fois en termes de réactivation des bassins, de contrats de site, et de revitalisation - en utilisant d'ailleurs un décret de l'été 2005 qui prévoit la participation des entreprises, et pas seulement des très grandes entreprises, au financement de la revitalisation des bassins d'emplois - et en termes d'accompagnement renforcé au travers d'une convention de reclassement personnalisé des demandeurs d'emplois.
Par ailleurs, sous l'impulsion du président de la commission des affaires sociales et de son rapporteur, nous avons entamé une réflexion qui va plus loin que celle que j'annonçais à l'Assemblée nationale sur l'accompagnement personnalisé dans l'emploi, en particulier celui des jeunes dont c'est parfois le premier contact avec l'entreprise et avec l'emploi.
J'évoquais hier l'importance des taux de rupture, notamment pour les jeunes sortis sans qualification du système scolaire. Je rappelle les chiffres : 150 000 sans diplôme, 60 000 sans qualification.
M. Guy Fischer. Les patrons n'en veulent pas !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous voyons bien que l'accompagnement des premiers mois est tout à fait essentiel pour la réussite de l'entrée dans l'emploi et pour éviter ces importants taux de rupture, imputables aussi bien aux entreprises qu'aux salariés.
C'est à cela que doit s'attacher le service public de l'emploi, et, si la commission et son président le souhaitent, je pourrai les informer de ce que sera cet accompagnement personnalisé dans l'emploi - et non pas vers l'emploi, accompagnement qui relève du dispositif CIVIS, le contrat d'insertion des jeunes dans la vie sociale - de ceux qui auront signé un contrat première embauche, accompagnement dont certains auront besoin.
C'est, me semble-t-il, un élément extrêmement important pour éviter d'additionner les contrats, comme on le voit actuellement avec les contrats en intérim et les CDD. Tel est le sens de la démarche du Gouvernement, qui entend bien faire du CPE un élément anti-précarité...
M. Jean-Luc Mélenchon. On rêve !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... s'inscrivant dans une entrée consolidée dans l'emploi, notamment pour la génération des jeunes âgés de seize à vingt-six ans. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 446, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après le septième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° L'employeur doit respecter l'article 122-14 du code du travail.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à obtenir les garanties écrites d'un entretien préalable avant licenciement.
Vous n'avez eu de cesse, au-delà des arguments - que nous n'admettons pas - en faveur du CPE, de dire, de façon assez lapidaire, « c'est toujours mieux que rien »...
Mme Marie-Christine Blandin. ...et de donner à entendre aux médias la situation des jeunes en déshérence face à la rareté de l'emploi : en déshérence, peut-être, en fragilité, sûrement, face au foisonnement de statuts nouveaux aux contours incertains !
C'est pourquoi il est nécessaire que la personne « remerciée » - triste vocable - puisse bénéficier d'un entretien et être épaulée par ceux qui sont plus documentés et mieux outillés qu'elle sur le sujet.
Qui plus est, vous éviterez ce faisant la sensation de vide qui est celle du non-dialogue. On parle peu du suicide des jeunes. C'est un fléau, et il ne faut quand même pas ajouter au mépris, car le fameux « c'est toujours mieux que rien » sans accompagnement de reconnaissance de la dignité de l'individu porte en lui-même le système bien connu des harceleurs ou même d'autres professions interdites : la caresse puis la gifle, l'espoir puis la déception, l'apprivoisement puis la blessure. C'est ainsi que l'on casse les gens, économiquement et psychologiquement.
Lorsque les prud'hommes ont été amenés à se prononcer la semaine dernière, à la suite de la rupture contestée d'un contrat nouvelles embauches, M. le ministre s'est félicité...
Mme Marie-Christine Blandin. ...de cette preuve, selon lui, que le CNE n'était pas en dehors du cadre juridique. Mais pour que cela ait un minimum de véracité, dans votre logique, encore faudrait-il que les salariés en CNE ou en CPE aient les moyens matériels d'exercer leur droit.
C'est le sens de cet amendement, qui est indispensable pour que la grande majorité des jeunes de moins de vingt-six ans, qui souvent connaissent mal le code du travail, puissent se défendre et être reconnus dans leur parole.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Depuis le début de nos débats, nous avons déjà eu l'occasion à plusieurs reprises d'expliquer que nous souhaitions dans cette affaire beaucoup de souplesse.
L'entretien préalable fait partie des dispositions explicitement écartées par l'article 3 bis afin de donner à l'exécution du CPE cette fameuse souplesse nécessaire à l'embauche de la jeunesse précarisée.
Mais, monsieur le ministre, si la souplesse, c'est bien, le renvoi expéditif, c'est moins bien. C'est pourquoi il est nécessaire, à mon avis, à défaut de l'inscrire dans la loi, de tout mettre en place pour qu'il y ait une explication à l'intérieur de l'entreprise. Si le licenciement intervient simplement en raison d'une absence de commandes ou de l'existence de quelques difficultés, il est facile de le dire.
Nous souhaitons qu'il y ait, avant l'évaluation, une conversation entre la personne qui va quitter l'entreprise et le patron ou le chef de service.
Mme Nicole Bricq et M. Bernard Frimat. Vous êtes donc favorable !
M. Alain Gournac, rapporteur. Voilà ce que nous voulions dire. Mais évidemment, puisque nous sommes d'accord avec l'organisation du CPE, la commission émet un avis défavorable. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai déjà eu l'occasion, lors de l'examen des amendements nos 667, 447, et répondant à Mme Gautier, d'expliciter à la fois la fonction de conseiller du salarié, laquelle peut être occupée par un salarié sous CPE, et l'assistance d'un salarié sous CPE par un conseiller, la procédure n'étant pas applicable pendant la période de consolidation.
Un débat sur la justification et la modification opposa jadis des théologiens. Je ne voudrais pas renvoyer à des manifestes célèbres, mais il faut comprendre que c'est là que se situe l'allégement procédural.
Dans aucun des cas, sachez-le, on ne doit oublier qu'un salarié, quel qu'il soit et quel que soit son contrat, peut s'adresser à la fois à l'inspection du travail, à une organisation syndicale de son choix et au conseil des prud'hommes, c'est-à-dire à la juridiction.
Je voudrais d'ailleurs rappeler que le Gouvernement entend renforcer les moyens de l'inspection du travail ; l'ordre public social, c'est en effet aussi des moyens donnés à cette dernière. Le Gouvernement présentera donc dans quelques jours un plan pluriannuel de renforcement des moyens de l'inspection, de la formation, de l'animation de l'inspection - le doublement du nombre de places au concours d'inspecteur et de contrôleur en 2006, et le maintien de ce rythme pour les années 2007, 2008 et 2009 -, ce qui nous permettra de rejoindre la moyenne européenne, notamment en termes d'effectifs de l'inspection.
Par ailleurs, je dois le dire, c'est aussi un moyen de répondre à l'information nécessaire pour le respect des relations du travail, qui doivent être équilibrées entre employeurs et salariés.
Ce renforcement de l'ordre public social contredit ceux qui pensent que la seule vocation du Gouvernement serait, comme je l'ai entendu, de détricoter en permanence le code du travail, ...
M. Guy Fischer. C'est sûr !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...comme si le code du travail était un tricot ! Nous avons besoin de voir dans le code du travail un outil pour les relations sociales équilibrées, et non une espèce d'empilement dans lequel plus personne ne se retrouve et à propos duquel seuls quelques exégètes donnent des interprétations souvent contradictoires avant que la chambre sociale de la Cour de cassation ne se prononce finalement après bien des années. Ce n'est pas notre vision des relations équilibrées du travail.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 656, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le septième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
La priorité de réembauchage prévue à l'article L. 321-14 du code du travail est applicable à la rupture du « contrat première embauche ».
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. En fait, monsieur le ministre, s'agissant de vos derniers propos, je peux indiquer à notre assemblée que votre feuille de route est contenue dans la revue du MEDEF ! (L'orateur brandit un exemplaire de cette revue. -Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
Et oui, mes chers collègues, je suis un lecteur attentif de cette revue (M. François Trucy rit), parce qu'elle annonce toujours vos propositions ultérieures avant même que vous ne les présentiez ! Donc, forcément, je me sers à la source ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Ce numéro de novembre 2005 est consacré au code du travail, avec pour sous-titre : Une réforme urgente. Vous venez de confirmer que vous étiez en plein dedans, ce que je savais d'ailleurs pertinemment !
Monsieur le président, j'essaie d'animer un peu les débats, faute d'avoir le droit de répondre au ministre !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous ne vous en privez pas !
M. Roland Muzeau. J'en viens à l'amendement n° 656.
Comme nous le voyons depuis le début de l'examen de l'article 3 bis, le contrat première embauche, c'est le retour au XIXème siècle pour une génération de jeunes envers lesquels les employeurs n'auront plus à justifier d'un motif réel et sérieux de licenciement.
Pour sortir du chômage et de la précarité, les jeunes de moins de vingt-six ans se verront offrir comme perspective une angoisse au quotidien durant les deux premières années d'exécution du contrat, si tant est que celui-ci dure si longtemps.
Par le droit, vous les précarisez et dessinez ainsi sans complexe les contours de la nouvelle condition salariale, celle qu'analyse justement M. Patrick Savidan : des salariés taillables et corvéables à merci que l'on peut jeter, reprendre au gré des besoins de l'entreprise. Ce n'est pas une caricature, c'est votre CPE !
En défendant notre précédent amendement, je faisais remarquer que l'article 3 bis avait aussi pour conséquence de priver les salariés en CPE licenciés collectivement pour motif économique des garanties de droit commun, dont l'obligation de reclassement, mais aussi de la priorité de réembauchage.
En effet, l'article L.321-14 du code du travail dispose ceci : « Le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat s'il manifeste le désir d'user de cette priorité. Dans ce cas, l'employeur l'informe de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. [...] »
Au passage, je vous signale que la jurisprudence considère qu'un poste tenu par des stagiaires est un poste disponible. Nous reviendrons donc sur cette question un peu plus tard.
Si l'employeur manque à ses obligations en ce domaine, il est passible d'une sanction financière.
Cette priorité de réembauchage doit être mentionnée dans la lettre de licenciement ou le document écrit adressé au salarié qui énonce le motif de licenciement, motif justement absent lors de la rupture du CPE, comme chacun s'en souvient.
Si, ainsi que vous le prétendez, le CPE est destiné à sécuriser les parcours professionnels, et donc de vie, des jeunes auxquels il s'adresse, il me semble pour le moins paradoxal de ne pas prévoir que les salariés dont le contrat est rompu bénéficient d'une priorité de réembauchage pendant un an dans l'entreprise.
Notre amendement remédie à cet oubli. Il est tout aussi paradoxal de ne pas avoir envisagé sérieusement la mise en place d'autres outils financés spécifiquement par l'employeur, comme un accompagnement personnalisé, visant eux aussi à permettre aux jeunes salariés de retrouver le plus rapidement possible un emploi.
En cas de rupture, le titulaire d'un CPE ne pourra pas prétendre de plein droit à l'indemnisation du chômage. Il entrera éventuellement dans le cadre des conventions de reclassement avec accompagnement personnalisé. Avec plus de chance, il se verra offrir un autre CPE.
M. Guy Fischer. Voilà ! Çà, c'est le MEDEF !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Je vais répondre à mon collègue. Mais peut-être le MEDEF a-t-il publié un numéro de sa revue depuis le mois novembre 2005 ? (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Je vous l'enverrai cet après-midi !
M. Alain Gournac, rapporteur. En effet, vous avez fait état d'un vieux numéro !
La priorité de réembauchage durant un délai d'un an en cas de licenciement pour motif économique vise surtout les salariés âgés, dont le réemploi est difficile.
Dans le cas du CPE, elle aurait une autre signification, qui ne serait pas bonne, s'agissant d'un jeune travailleur en recherche active d'un emploi.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai rappelé hier que la priorité de réembauchage vaut pour le licenciement économique, mais n'est pas techniquement possible pour le CPE.
Enfin, monsieur Muzeau, puisque vous trouvez dans la revue du MEDEF l'anticipation ou la vision de l'avenir, je peux vous renvoyer à d'autres lectures (Exclamations sur les travées de l'UMP), et notamment à une déclaration d'un précédent président du MEDEF - c'était l'époque, je le reconnais, où un baron présidait le MEDEF, ce qui agrémentait quelque peu les interpellations lors de nos séances - qui parlait, au sujet de la recodification à droit constant, de mon art de manier le plumeau. Alors, est-ce le plumeau, est-ce le balai ?
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 661, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le huitième alinéa du II de cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. C'est un nouvel amendement de repli que je vous présente, puisque nous ne connaissons toujours pas le sort qui sera réservé aux quatre amendements de suppression de cet article 3 bis, ajouté par le Gouvernement.
Le début du onzième alinéa du texte proposé pour l'article 3 bis est ainsi rédigé : « Toute contestation portant sur la rupture se prescrit par douze mois à compter de l'envoi de la lettre recommandée ».
À l'époque des discussions parlementaires sur le CNE, le rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Gournac, avait lui-même jugé « souhaitable que l'ordonnance encadre le recours au CNE », précisant même que « l'absence de motivation du licenciement est perçue par les syndicats auditionnés comme une régression difficilement acceptable. Il est vrai qu'elle ramène à une situation antérieure à 1973 et qu'elle confère à l'employeur un pouvoir discrétionnaire qui peut laisser craindre des abus. »
M. Alain Gournac, rapporteur. C'est vrai, je l'ai dit !
Mme Marie-France Beaufils. Bien sûr !
Effectivement, les abus sont bien à craindre. À peine quelques mois après la mise en place du contrat nouvelles embauches, le conseil des prud'hommes voit déjà se développer des plaintes pour abus de la part d'employeurs qui n'ont pas attendu longtemps pour profiter du droit qui leur a été offert de traiter leurs salariés comme une simple variable d'ajustement.
M. Jean-Luc Mélenchon. Exactement !
Mme Marie-France Beaufils. De toute façon, dans la mesure où, durant les deux premières années, le licenciement peut se faire sans obligation de motif, les salariés seront contraints d'avoir recours aux tribunaux pour faire valoir leurs droits à comprendre la justification de leur licenciement.
En fait, en analysant en détail votre texte, on s'aperçoit que ce qui va poser problème au salarié pour alimenter son recours, c'est non pas tant le fait que le licenciement peut intervenir sans motif que l'absence d'obligation pour l'entreprise de fournir ce dernier.
D'ailleurs Mme Parisot défend son CNE en considérant qu'il est respectueux du droit dans la mesure où le salarié peut saisir les tribunaux. Les accusations portées par les salariés à l'encontre d'employeurs qui auraient abusé de la situation n'ont pas fini d'augmenter puisque, pour connaître le motif de son licenciement, le salarié n'a d'autre recours que d'assigner son employeur en justice.
En tout état de cause, face à cette multiplication des recours engagés par les salariés, l'employeur ne pourra pas longtemps et indéfiniment se retrancher derrière la présomption de bonne foi ou l'absence de nécessité de motiver la rupture.
On peut légitimement croire que ce onzième alinéa, qui introduit un délai de prescription pour les recours devant les tribunaux, est bel et bien là pour éviter cette inflation des plaintes devant les prud'hommes.
Par cet alinéa, les auteurs de ce projet de loi ont probablement essayé de limiter le désaveu que risque de subir le CPE à l'épreuve de la réalité, comme cela commence à se vivre avec le CNE.
Au cours de nos précédentes interventions, nous avons rappelé que les dispositions relatives au CPE, en particulier les articles concernant les licenciements, étaient en contradiction avec les conventions internationales, ainsi qu'avec les textes européens.
Par cet alinéa, vous franchissez une étape supplémentaire dans la mise en cause du droit. C'est pourquoi il est souhaitable qu'a minima il ne soit pas introduit de délai de prescription pour un recours juridique dans la mesure où c'est le seul rempart qui restera aux salariés face à votre déferlante de précarité et de dérégulation.
D'ailleurs, si, comme vous nous le dites depuis hier, ce CPE a été créé pour déboucher sur un CDI, vous n'auriez aucun risque à approuver notre amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Ma chère collègue, je voudrais vous remercier d'avoir corroboré les propos que j'ai tenus et que je ne regrette en aucune manière, même s'il est vrai que notre approche est quelque peu différente.
Pour ce qui nous concerne, nous tenons, je le répète, à rendre le système beaucoup plus souple.
S'agissant du délai d'un an, il vise à ce que le CPE soit suffisamment attractif pour réussir.
En effet, ce que nous voulons, c'est que les jeunes puissent entrer dans le monde du travail grâce, notamment, à la mise en place de cet outil important.
Toujours à propos du délai de douze mois, il me semble que le jeune ne doit pas tomber dans une espèce de contestation permanente. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) Il dispose d'un an, s'il le veut, pour contester la décision prise à son encontre, et je suis absolument d'accord avec cette mesure. Cela étant dit, je considère qu'il doit par la suite envisager autre chose de façon positive, car il en va de l'emploi et de la vie elle-même.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame la sénatrice, en matière de prescription, les dispositions adoptées lors du vote de la loi de programmation pour la cohésion sociale ont fixé le délai de recours pour licenciement économique à une année.
Je voudrais rappeler que, en matière de droit social, il existe une quinzaine de délais différents de prescription, allant de deux mois à trente ans, cette dernière durée étant applicable, notamment, en cas de discrimination, ce qui, en matière de licenciement, est tout de même, reconnaissons-le, un peu long !
Ce délai est de cinq ans dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
Vous avez, par ailleurs, évoqué la situation d'autres pays européens. Or, dans le droit social comparé européen, cette situation est pour le moins contrastée s'agissant des licenciements économiques, la moyenne des délais se situant entre deux mois et un an.
Par conséquent, comme vous pouvez le voir, nous nous situons plutôt dans la moyenne de l'ensemble des pays de l'Union européenne.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut être favorable à cet amendement. En effet, le délai d'un an lui paraît apporter les garanties nécessaires, et ce d'autant plus que nous sommes dans une phase de consolidation qui s'étend au maximum sur vingt-quatre mois.
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 166, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du huitième alinéa du II de cet article, après les mots :
portant sur la rupture
insérer les mots :
en cas de non-respect des présentes dispositions ou de rupture abusive
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Il convient d'emblée de rappeler que le CPE, comme le CNE, fait l'objet d'une procédure « à la hussarde », que ce soit sous forme d'ordonnance ou d'amendement gouvernemental présenté au dernier moment.
Cette procédure permet d'éviter l'examen par le Conseil d'État et de ne pas tenir compte des engagements pris par le Gouvernement en matière du droit du travail, tant il est vrai que les dispositions proposées dans le domaine de l'emploi devaient, en principe, selon les termes de la loi Fillon, faire préalablement l'objet d'une consultation des partenaires sociaux.
Le CPE, comme le contrat nouvelles embauches, est techniquement un CDI, et, dès lors, soumis a priori à la législation applicable aux contrats de travail dans tous les domaines.
Or la question qui se pose aujourd'hui est de savoir quelle définition il convient de donner du CDI eu égard aux nombreuses autres catégories de contrats qui ont été créées depuis la montée du chômage de masse et l'invention du CDD, en 1982.
En effet, le CDI ne se différencie de cette multitude de contrats précaires que par ses conditions de rupture, notamment lorsque cette dernière est le fait de l'employeur : respect d'une procédure de licenciement - entretien préalable, lettre recommandée, délais, etc. - et obligation d'une cause réelle et sérieuse.
Depuis la loi du 13 juillet 1973, malgré certains aléas, ces conditions ont survécu.
Le droit du travail s'applique donc au CPE, sauf en ce qui concerne quelques articles du code du travail relatifs à la rupture du contrat, pendant une durée de deux ans. Ces articles concernent toutes les dispositions ayant trait à la rupture du contrat - articles L.122-4 à L. 122- 14- 14 -, à l'exception de l'article L. 122- 12 qui, lui, est relatif à la cessation de l'entreprise, devant donner lieu à préavis et à indemnité, et à la modification de la situation juridique de l'employeur - vente, fusion -, d'où la reprise des salariés par le nouvel employeur, avant un plan social.
Ne s'appliquent pas non plus au CPE, monsieur le ministre, les articles L. 321- 1 à L. 321- 17, relatifs au licenciement économique, ce qui implique que les jeunes en CPE ne seraient pas comptabilisés dans un plan social et ne bénéficieraient ni d'indemnités ni de procédures de reclassement, etc.
En revanche, les procédures d'information et de consultation prendront en compte les jeunes en CPE, ce qui, soit dit en passant, ne fait pas avancer le schmilblick, comme aurait dit Coluche ! Il conviendrait donc, monsieur le ministre, que vous nous apportiez des précisions sur tous ces points.
La période de deux ans n'est pas nommément inscrite dans le projet de loi. Elle a malencontreusement, dans un premier temps, été appelée « période d'essai » par M. le Premier ministre, puis « période de consolidation », selon la terminologie du MEDEF.
En réalité, cette période est juridiquement innommable - cela explique sans doute qu'elle ne soit pas nommée -, sauf à tomber sous le coup de l'article 4 de la convention 158 de l'OIT, repris dans l'article 24 de la Charte sociale européenne, approuvée par la loi du 10 mars 1999 et reconnue par ailleurs d'application directe par le Conseil d'État dans sa décision du 19 octobre 2005 : « Un salarié ne devra pas être licencié sans qu'il existe un motif valable de licenciement lié à l'aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l'entreprise ».
S'agissant du CNE, au sujet duquel il a été saisi, le Conseil d'État a considéré que le licenciement peut toujours être contesté devant un juge relativement au motif de l'abus de droit, la charge de la preuve incombant au salarié. L'on pourra alors savoir - mais un peu tard - s'il existe ou non un motif sérieux de licenciement, et ce n'est que s'il y a abus de droit que le salarié aura droit à réparation.
On peut imaginer que le Conseil d'État va juger de même pour le CPE. Mais on ne peut négliger le fait que l'article 7 de la même convention 158 impose l'existence d'une procédure contradictoire en cas de licenciement pour des motifs liés à la conduite ou au travail du salarié. Dès lors - je vous pose la question, monsieur le ministre -, la procédure judiciaire a posteriori peut-elle en tenir lieu ?
En ce qui concerne la période d'essai, la même convention 158 de l'OIT prévoit qu'un État peut exclure du champ de certaines dispositions de la convention « les travailleurs effectuant une période d'essai ou n'ayant pas l'ancienneté requise ». Le présent projet de loi pourrait donc a priori entrer dans ce champ, d'autant plus que le code du travail ne prévoit aucune durée précise pour les périodes d'essai.
La jurisprudence de la Cour de cassation a néanmoins fourni un certain nombre d'indications sur la durée raisonnable d'une période d'essai, en fonction des diverses professions dont elle a eu à connaître. Ainsi, sont considérées comme excessives une période d'essai de trois mois pour un coursier, une période de six mois pour un chargé de mission, une période d'un an pour un cadre.
Il serait intéressant, selon nous, de savoir comment la Cour de cassation qualifiera cette période de deux ans sans procédure ni motif de licenciement, donc hors du droit du travail, et si elle estime qu'une période d'essai peut, le cas échéant, durer deux ans.
Le fait que la période de deux ans ne soit pas définie par le Gouvernement comme une période d'essai est également important pour pouvoir imposer des contrats successifs.
En effet, si une période d'essai ne peut être renouvelée, en revanche, comme le prévoit expressément le projet de loi, un CPE peut succéder à un autre, pour un même salarié dans la même entreprise, moyennant un délai de carence de trois mois ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement est satisfait par le huitième alinéa du II de l'article 3 bis, qui couvre tous les cas de rupture du contrat.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme Nicole Bricq. C'est un peu court !
Mme Christiane Demontès. Ce n'est pas argumenté !
M. Guy Fischer. Vous restez égal à vous-même !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Godefroy, s'agissant de plusieurs points que vous avez évoqués et qui portaient, notamment, sur la période de consolidation, sur les différences entre celle-ci et la période d'essai ou sur l'application de la convention 158 de l'OIT, le Gouvernement a, me semble-t-il, déjà apporté un certain nombre de réponses.
Toutefois, je voudrais revenir sur un élément particulier. Vous m'avez demandé si les contrats première embauche seront pris en compte dans les effectifs pour la mise en oeuvre des différentes mesures d'information et de consultation relatives soit aux procédures collectives dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, soit à l'ensemble des procédures de licenciement économique.
Je puis à cet égard vous confirmer que les salariés sous contrat CPE seront bien pris en compte dans les effectifs dans le cadre des procédures que j'ai citées.
Par conséquent, je puis vous donner une réponse claire et précise sur ce point et répondre ainsi à une partie de vos interrogations et de vos inquiétudes.
Certes, je ne puis accepter un tel amendement, mais je tenais, malgré tout, à vous apporter cet éclairage.
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 168, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du huitième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :
douze mois
par les mots :
cinq ans
La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. Le projet de loi prévoit que le délai de prescription de l'action en contestation de rupture du contrat se fait par cinq ans, conformément aux dispositions votées lors de la discussion du projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.
À l'époque, nous avions voté contre cette disposition qui aboutit à réduire la possibilité pour le salarié de contester le licenciement dont il fait l'objet. Très souvent, en effet, un salarié licencié hésite à contester le motif de son licenciement ; il ne sait quelle attitude adopter ; il est en quelque sorte sous le choc, outre les problèmes matériels qu'il doit affronter dans l'urgence. Ce n'est qu'après un certain délai qu'il réagit, souvent après avoir été informé et conseillé par d'autres personnes, ou mis en rapport avec une organisation syndicale.
Cet état de fait, vous ne pouvez que l'avoir constaté, monsieur le ministre, et c'est sans doute pourquoi vous avez voulu raccourcir considérablement le délai de prescription.
Aujourd'hui, nous sommes a fortiori encore plus opposés à une telle disposition dans la mesure où le salarié, sans compter qu'il ne peut disposer que d'un délai réduit, ne peut au surplus se fonder que sur le non-respect des règles du projet de loi ou sur l'abus de droit, ce qui conduit à réduire de façon drastique les délais et les moyens.
Au demeurant, il n'est pas certain - et j'en reviens à l'incertitude juridique qui préside à ce texte - qu'une telle réduction des délais ne soit pas, en fin de compte, un élément de nature à inciter les salariés licenciés à multiplier, immédiatement après leur licenciement, les contestations devant les prud'hommes.
En effet, si le droit du travail n'offre plus aux salariés le respect de droits reconnus, si le salarié vit ce déséquilibre permanent et si, de surcroît, il n'est pas véritablement lié à l'entreprise, il jugera d'autant plus normal de contester systématiquement le licenciement.
Une nouvelle fois, le Gouvernement va beaucoup trop loin dans sa logique, ce qui aboutira immanquablement à la multiplication des conflits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)
Mme Nicole Bricq. Vous allez dans le mur !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. En cohérence avec les explications que j'ai apportées sur l'amendement n° 661, la commission ne peut qu'être défavorable à cet amendement. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame la sénatrice, en matière de délais, je pense avoir déjà répondu en évoquant la cohérence du texte avec la loi de programmation pour la cohésion sociale.
Quoi qu'il en soit, je tiens à préciser qu'il ne s'agit en aucune façon d'empêcher le salarié de contester le licenciement dont il est l'objet ; il dispose à cet effet d'un délai d'un an.
Cela étant dit, le délai de prescription n'est opposable au salarié que si l'employeur lui a indiqué ce délai par lettre recommandée avec accusé de réception, de telle sorte que le salarié soit effectivement informé. Par conséquent, si l'employeur ne se pliait pas à cette obligation, le délai prévu ne s'appliquerait pas.
Il existe donc bien une information du salarié, qui sait parfaitement qu'il a le droit, pendant un an, de contester la décision prise par son employeur à son encontre ; cela doit figurer expressément dans la lettre recommandée avec accusé de réception dont je viens de parler.
M. Jean-Claude Gaudin. Très bien !
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 167, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le huitième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout salarié sous contrat première embauche peut refuser d'effectuer des heures choisies au sens de l'article L. 212- 6- 1 du code du travail.
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Il n'est pas possible de prévoir que le refus d'effectuer des heures choisies ne constitue pas un motif légitime de licenciement, puisque le licenciement d'un jeune en CPE n'a pas à être motivé.
L'employeur peut donc invoquer n'importe quel motif, sans même l'exprimer clairement, pour justifier un licenciement. Il en résulte qu'une pression permanente s'exercera sur le salarié. Celui-ci sera non plus seulement réduit à l'obéissance, mais placé dans une situation de soumission, voire d'humiliation (Exclamations sur les travées de l'UMP), ...
M. Alain Gournac, rapporteur. Vous y allez fort !
Mme Christiane Demontès. ... sinon il recevra une lettre recommandée.
Si nous insistons sur cette notion d'heures choisies, c'est que, derrière ce nom sympathique, se cache du temps de travail accompli par le salarié au-delà des heures supplémentaires.
Officiellement, c'est le salarié qui demande à réaliser ces heures, qu'il effectue après avoir obtenu l'accord de son employeur. Toutefois, il s'agit bien sûr d'une fiction. En réalité, le salarié est invité à demander à son employeur l'autorisation d'effectuer ces heures. Rappelez-vous, mes chers collègues : lorsque ce dispositif des heures choisies a été mis en place, le Gouvernement invoquait le slogan : « travailler plus pour gagner plus ».
M. Henri de Raincourt. Bravo !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a jamais eu autant de smicards !
Mme Christiane Demontès. En réalité, comme nous l'avons dénoncé dès ce moment, ces dispositions ont abouti à une rédaction des articles L. 212-5 et L. 212-6-1 du code du travail qui autorise, par voie d'accord, les salariés à effectuer des heures supplémentaires et des heures choisies au-delà du contingent annuel, avec une majoration de salaire de 10 %.
Cette majoration peut de surcroît se voir remplacée par un repos compensateur. Un employeur est donc en droit d'exiger, de fait, des heures supplémentaires majorées à 10 %, voire simplement compensées !
Dès lors, nous nous posons une question simple : aux termes du projet de loi, un salarié en CPE ou en CNE pourra-t-il refuser de demander à son employeur d'effectuer des heures choisies ? Dans ce cas, ne risquera-t-il pas, plus qu'un autre encore, d'être licencié séance tenante ? Une pression constante s'exercera sur lui et l'empêchera d'exprimer un refus, a fortiori une revendication.
Par ailleurs, un salarié en CPE ou en CNE ne sera pas non plus en situation d'adhérer à un syndicat. Les pratiques de nombreux employeurs en la matière sont connues. Il leur sera d'autant plus facile de licencier un salarié qui prend contact avec un syndicat qu'il ne leur sera même plus nécessaire de motiver ce licenciement, à moins, bien entendu, qu'ils ne préfèrent imputer au salarié une faute grave, afin d'éviter en outre de payer l'indemnité de précarité et les salaires restant dus !
Le CPE, tout comme le CNE, est également une machine de guerre dirigée contre les droits des salariés et la présence des organisations syndicales représentatives dans les entreprises.
Monsieur le ministre, vous affirmez que vous entendez développer le dialogue social mais, dans le même temps, vous faites tout pour affaiblir la représentation des salariés qui en est le fondement. En fait, vous méprisez le dialogue social, comme le dialogue en général d'ailleurs. Vous l'avez prouvé - il faut tout de même le rappeler à ce stade du débat - en introduisant le CPE par voie d'amendement tendant à insérer un article additionnel dans le projet de loi, en utilisant la procédure d'urgence sans aucune concertation avec les partenaires sociaux et en mettant en oeuvre l'article 49-3 à l'Assemblée nationale.
Comment dans ces conditions les jeunes pourraient-ils vous faire confiance ? Le soir, en rentrant chez eux, au mieux sauront-ils combien d'heures ils doivent effectuer le lendemain, au pire ignoreront-ils même s'ils vont encore travailler ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Comme nos débats sont écoutés et lus en dehors de cette assemblée, j'indique, au passage, que l'article 49-3 de la Constitution a été mis en oeuvre seulement au lendemain du vote sur le CPE ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Claude Gaudin. Après quarante-trois heures de débat !
Mme Nicole Bricq. Cela ne justifie rien !
M. Alain Gournac, rapporteur. Le public croit en effet que l'article 49-3 a été utilisé avant que le CPE ne soit voté, alors qu'en réalité il ne l'a été qu'après !
J'ai lu avec beaucoup d'attention l'objet de cet amendement.
M. Robert Bret. Heureusement !
M. Alain Gournac, rapporteur. Vous avez évoqué « l'extrême précarité » que créerait le CPE. Mais l'extrême précarité - je le répéterai jusqu'au terme de cette discussion -, c'est ne pas pouvoir entrer dans l'entreprise, c'est ne pas trouver son premier emploi,...
Mme Hélène Luc. Et le travail, ce n'est pas ce que vous proposez !
M. Alain Gournac, rapporteur. ... c'est être jeune et s'entendre dire : « circulez, on n'a pas besoin de vous » ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Nous estimons que le CPE est le contraire de l'extrême précarité, contre laquelle il permet efficacement de lutter. Ainsi, rien ne justifie de limiter le champ d'application du CPE, comme le proposent les auteurs de cet amendement.
La commission émet un avis tout à fait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappellerai d'abord que l'adhésion à un syndicat est protégée par l'article L. 122-45 du code du travail, qui interdit toute discrimination pour un tel motif. (Mme Hélène Luc proteste.)
Madame Demontès, vous avez évoqué la procédure de la faute grave, qui - pardonnez-moi de vous le faire remarquer - nous fait sortir du champ du CPE et qui exige une motivation, aux termes de l'article L 122-41 du code du travail !
Au début de votre intervention, vous avez également évoqué les heures choisies. Je rappelle que celles-ci reposent sur le principe du volontariat : les salariés qui souhaitent effectuer des heures choisies le demandent, l'employeur approuve, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le gentil employeur ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ... et un accord collectif est nécessaire, qui suppose un débat et une négociation entre les partenaires sociaux.
Pour faire le point sur la mise en oeuvre des heures choisies, j'indique que, sur seize millions de salariés affiliés à l'UNEDIC, environ deux millions sont couverts par des accords collectifs négociés ou en cours d'extension.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 506, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le huitième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé:
La rupture du contrat donne droit pour le salarié à une validation des acquis de l'expérience, un bilan de compétence et un accompagnement spécifique par les services de l'Agence nationale pour l'emploi. Ces services font aussi au salarié des offres de formation complémentaire.
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. L'UDF n'est pas hostile par principe à la simplification et à la flexibilisation de notre droit du travail.
M. Guy Fischer. Cela ne m'étonne pas !
Mme Muguette Dini. Toutefois, tout assouplissement des conditions d'embauche et de licenciement doit automatiquement être accompagné de droits et de garanties supplémentaires pour le salarié.
Mme Nicole Bricq. Mais il n'y en a pas avec le CPE !
Mme Muguette Dini. Le CPE flexibilise à l'extrême le droit du travail, sans contrepartie substantielle en termes d'accompagnement et de formation pour les salariés dont le contrat serait rompu.
C'est pourquoi, avec cet amendement, nous souhaitons créer pour le salarié dont le CPE aurait été rompu un droit à la validation des acquis de l'expérience, ou VAE, et prévoir un bilan de compétences et un accompagnement spécifique par les services de l'Agence nationale pour l'emploi. Ces derniers devront également proposer aux salariés concernés une formation complémentaire adaptée.
C'est cela la « flexisécurité » danoise dont ce projet de loi prétend s'inspirer : de la flexibilité, mais aussi un accompagnement spécifique renforcé. (Applaudissements sur certaines travées de l'UC-UDF.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'article 3 bis institue un accompagnement renforcé du salarié licencié et donne donc très largement satisfaction à cet amendement. J'ai déjà eu l'occasion de le souligner tout à l'heure à propos d'un autre amendement.
Mme Hélène Luc. Les salariés doivent donc travailler à n'importe quel prix et n'importe quand, comme vous l'avez affirmé vous-même sur Public Sénat ? Ce n'est pas cela, le travail !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le CNE est un échec !
M. Alain Gournac, rapporteur. En ce qui concerne la validation des acquis de l'expérience gagnée lors d'un CPE, le cinquième alinéa de l'article L. 901-1 du code du travail ouvre ce droit à toute personne engagée dans la vie active, indépendamment de tout licenciement.
Mme Nicole Bricq. Vous ne répondez pas à la question !
M. Alain Gournac, rapporteur. Monsieur le ministre, les membres de la commission des affaires sociales du Sénat ont beaucoup travaillé sur cette question, qui est essentielle. Nous voudrions que s'accélère la validation des acquis de l'expérience, qui semble aujourd'hui un peu patiner.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame Dini, vous soulignez la nécessité d'un accompagnement personnalisé pour le salarié dont le contrat s'achève ou est rompu. J'ai évoqué tout à l'heure la convention de reclassement personnalisé. D'ores et déjà, le salarié sera reçu mensuellement par le service public de l'emploi dès le premier mois de chômage, et non plus à partir du quatrième mois.
Monsieur le rapporteur, pour répondre à la question posée par la commission quant à la validation des acquis de l'expérience et la formation, je dirai que notre objectif est de tripler en 2006 le nombre des VAE, qui passeraient donc de 15 000 à 45 000.
Un délégué interministériel à la VAE a été nommé, comme l'atteste le Journal officiel de la semaine dernière.
M. Jean-Louis Carrère. Ce n'est pas un CPE ? (Sourires.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Il s'agit du Délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle, le DGEFP. En effet, la VAE doit nécessairement comporter une dimension interministérielle, et le Gouvernement marque ainsi sa volonté forte d'encourager à la fois l'emploi et la formation professionnelle.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah ! s'il en a la volonté, c'est gagné ! (Sourires.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué. M. Jean Gaeremynck est le nouveau délégué interministériel à la VAE, et nous atteindrons notre objectif de triplement du nombre de VAE au cours de cette année.
Mme Nicole Bricq. Avec quels moyens ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Après avoir ainsi répondu à vos préoccupations, j'invite Mme Dini à retirer son amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'UDF n'a pas de chance avec ses amendements ! (Sourires.)
M. le président. Le vote est réservé.
L'amendement n° 169 rectifié, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mme Cerisier-ben Guiga, M. C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mme Tasca, M. Vidal et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le dixième alinéa du II de cet article par les mots :
et aux femmes en état de grossesse.
La parole est à Mme Jacqueline Alquier.
Mme Jacqueline Alquier. Il s'agit d'un amendement de précision. Le projet de loi prévoit que « la rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif ».
Nous savons déjà qu'il faudra un courage extrême à un salarié en CPE ou en CNE pour s'investir dans une mission syndicale ; mais, parmi les salariés qui bénéficient de protections particulières, le texte oublie les femmes en état de grossesse.
C'est d'autant plus regrettable que les femmes sont les premières victimes de la précarité, du temps partiel subi et surtout du temps fragmenté et des bas salaires. Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ce problème lorsque nous avons discuté ici, en deuxième lecture, au mois de janvier, du projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, qui porte bien mal son nom. De nouveau, les femmes risquent d'être les premières victimes du CPE et du CNE, comme elles le sont déjà des contrats précaires existants.
Nous avons déjà évoqué le fait que le CPE et le CNE sont des machines de guerre dirigées contre le CDD et l'intérim, puisqu'ils offrent aux employeurs peu scrupuleux le moyen de licencier à tout moment et sans motif. En l'espèce, ils aboutiront à aggraver encore la condition des femmes, notamment celles qui sont dépourvues de qualification.
Je rappelle au Sénat que le taux de chômage des femmes reste plus élevé que celui des hommes, que 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes et que les trois quarts des femmes concernées souhaitent travailler plus. Il s'agit donc d'un temps partiel subi, car les salaires dans les secteurs où les femmes sont majoritaires, comme la grande distribution ou le nettoyage, sont tellement dérisoires, surtout à temps partiel, que ces femmes ne peuvent décemment survivre.
Jusqu'à présent, les emplois de ce type, que nous avons d'ailleurs fréquemment dénoncés, étaient le plus souvent pourvus par des contrats à durée déterminée. Demain, ils le seront par des CPE ou des CNE, avec une rotation des personnes affectées aux mêmes postes, au mieux tous les vingt-trois mois.
Non seulement vous ne faites rien de sérieux pour améliorer la situation des femmes au travail, puisque votre texte relatif à l'égalité salariale n'est qu'un catalogue d'intentions dépourvu de toute sanction à l'égard des employeurs, mais vous prenez des dispositions de portée générale qui seront, elles, d'application immédiate et qui aggraveront prioritairement le sort des femmes !
De là notre question, monsieur le ministre : l'absence de mention de la protection spécifique dont bénéficient les femmes en état de grossesse est-elle véritablement un oubli ?
Nous souhaitons connaître les intentions du Gouvernement sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. L'article L.122-25-2 du code du travail est bien entendu applicable dans le cas du CPE, comme l'ensemble des dispositions de l'ordre public social.
Mieux, la loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, actuellement soumise au Conseil constitutionnel, intègre dans le champ des discriminations interdites de l'article L.122-45 du code de travail celles qui sont liées à la grossesse.
La même loi réaménage le régime de la charge de la preuve dans le cas de discriminations en raison de l'état de grossesse de la salariée en prévoyant qu'il incombe à la partie défenderesse - donc à l'employeur et non plus à la salariée - de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination.
Enfin, cette même loi mentionne la grossesse parmi les cas de discrimination identifiés à l'article 225-1 du code pénal, et l'article 225-2 du même code fixe les sanctions.
Toutes ces dispositions sont applicables au CPE. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. Roland Muzeau. Mais ce n'est pas précisé !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a pas de motif à donner !
M. Roland Muzeau. C'est vrai, ils n'auront aucun motif à fournir !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. C'est un sujet qui a été longuement débattu à l'Assemblée nationale, et le rapporteur de la commission des affaires sociales vous a tout dit.
M. Roland Muzeau. Il a été bref !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je rappellerai seulement les articles L. 122-25-2 et L. 122-27, relatifs aux protections nécessaires de la maternité.
Dans l'hypothèse d'une grossesse, les femmes embauchées dans le cadre d'un CPE seront donc protégées de la même manière que l'ensemble des femmes salariées.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Personne ne peut le croire, il n'y a pas de motif !
Mme Hélène Luc. C'est un sujet sur lequel nous voulions nous exprimer, mais nous n'avons pas pu le faire !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sur l'initiative conjointe de Catherine Vautrin et de moi-même, les partenaires sociaux ont été réunis sur le sujet du temps partiel subi.
En raison de l'évolution de leur situation matrimoniale, des femmes peuvent se retrouver seules avec des enfants à charge. Le temps partiel choisi devient alors parfois un temps partiel subi. Ce cas est fréquent, notamment dans deux domaines : les activités liées à l'entretien et au nettoyage, et celles qui sont liées à la grande distribution.
Nous avons obtenu que s'ouvrent des négociations sur ce sujet, particulièrement pour la grande distribution. Nous espérons qu'il en sera de même pour d'autres branches, afin que des pratiques différentes permettent de mieux répondre à la situation de ces femmes.
Mme Hélène Luc. Nous nous trouvons dans une situation incongrue : nous ne pouvons même pas nous exprimer ! C'est incroyable !
M. le président. Le vote est réservé.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 450 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 664 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter le dixième alinéa du II de cet article par les mots :
, ainsi qu'aux salariées enceintes
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour défendre l'amendement n° 450.
Mme Marie-Christine Blandin. Cinquante ans de planning familial et plus de cent ans de luttes sociales ont construit de justes droits pour les femmes, en particulier des droits relatifs à leur protection quand elles travaillent et lorsqu'elles sont enceintes.
Au moment de l'entrée dans la vie active, le salaire permet d'être autonome, le corps est au mieux de sa forme et l'âge est idéal pour une grossesse. Mais qu'adviendra-t-il des droits des femmes enceintes pour les nombreuses femmes qui seront employées après signature d'un contrat première embauche ?
L'employeur qui sera informé de la grossesse de l'une de ses employées, à la suite d'une indiscrétion ou parce qu'il aura vu s'arrondir la taille de celle-ci, envisagera la situation d'un mauvais oeil, considérant le congé de maternité comme une perturbation. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Didier Boulaud. Exactement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais oui ! Ça se passe comme cela dans la vraie vie !
Mme Marie-Christine Blandin. Avec le CPE, il aura toute latitude, sans motif ni entretien, de licencier la jeune femme.
M. Roland Muzeau. Parfaitement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Exactement !
Mme Marie-Christine Blandin. Par là même, ce sont toutes les protections de la femme enceinte au travail et ses droits à congé de maternité que vous remettez en cause. Cet effet collatéral est dommageable. Aussi l'objet de cet amendement est-il de garantir les droits de ces femmes.
Si j'en juge par vos avis, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, ce sera à l'employeur de démontrer qu'il n'y a eu aucune discrimination due à la grossesse. Fort bien ! Mais vos propos sont en contradiction avec ce projet de loi, qui confère à l'employeur le droit d'agir sans motif. En effet, pour démontrer qu'il n'y a pas eu discrimination, ce dernier se contentera de répondre que la grossesse n'est pas en cause. Il pourra le faire d'autant plus aisément qu'il ne sera pas obligé de donner les causes du licenciement.
Il est par conséquent absolument nécessaire d'inscrire dans le projet de loi les protections de la femme enceinte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 664.
M. Guy Fischer. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l'amendement n° 662.
M. le président. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 662, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, et ainsi libellé :
Compléter le dixième alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Durant un arrêt pour cause de maladie, le contrat de travail ne peut être rompu sans être motivé expressément.
La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre les amendements nos 664 et 662.
M. Guy Fischer. Ces deux amendements ont pour objet d'apporter les précisions nécessaires, comme l'a expliqué Mme Blandin, afin de limiter les effets néfastes du CPE en matière de licenciement.
Au-delà d'une segmentation du monde du travail et d'une mise en concurrence entre les salariés, le CPE, tout comme le CNE, constitue une attaque juridique sans précédent de notre code du travail.
Dans la mesure où, durant les deux premières années, l'employeur n'a pas besoin de fournir un motif de licenciement valable pour se « débarrasser » de son salarié, ce dernier devra systématiquement en référer aux tribunaux pour faire valoir ses droits.
Nul doute que les tribunaux sauront rétablir la conformité du contrat de travail avec les législations existantes. En particulier, l'obligation de l'employeur de justifier d'une raison « valable » de licenciement sera probablement rétablie, comme cela a été le cas dans l'affaire jugée par le conseil des prud'hommes de Longjumeau.
Le code du travail protège explicitement les licenciements en cas de maladie ou de grossesse. Les salariés embauchés en CPE demeurent couverts par ces dispositions, je vous l'accorde. Mais le problème est que, en cas de licenciement durant les deux premières années alors qu'ils sont malades, ou en état de grossesse pour les salariées, ils devront intenter une action devant les prud'hommes et faire la preuve que c'est ce motif implicite qui a conduit à leur licenciement.
Dans les faits, ils auront en effet été licenciés, alors qu'ils ne l'auraient pas été auparavant, l'employeur risquant d'être poursuivi. Vous m'accorderez qu'il s'agit d'une différence de taille !
C'est bien à cela que conduit le CPE : à un renversement de la preuve, puisque ce sera au salarié de prouver le motif pour lequel il a été licencié.
Avec ces deux amendements, nous souhaitons nous prémunir de tels abus de la part des employeurs en faisant figurer explicitement les cas dans lesquels le licenciement n'est pas permis.
Nous proposons par conséquent de préciser que « la rupture du contrat doit respecter les dispositions législatives et réglementaires qui assurent une protection particulière aux salariés titulaires d'un mandat syndical ou représentatif, ainsi qu'aux salariées enceintes ».
Par ailleurs, avec l'amendement n° 662, nous proposons de compléter ce même alinéa afin de préciser que, « durant un arrêt pour cause de maladie, le contrat de travail ne peut être rompu sans être motivé expressément ».
Faute de pouvoir rétablir pleinement les droits des travailleurs, que ce gouvernement s'acharne méticuleusement à mettre en pièces,...
M. Jean-Claude Gaudin. Oh là là !
M. Guy Fischer. ... cet amendement permettra au moins de protéger les salariés les plus fragiles, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas la garantie de conserver leurs droits, directement menacés.
M. le président. Monsieur Fischer, je me demande vraiment pourquoi vous avez souhaité défendre l'amendement n° 662 en même temps que les amendements identiques nos 450 et 664, et donc associer maladie et grossesse. À mes yeux, la grossesse n'est pas une maladie ! Mais je peux me tromper... (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
M. Alain Gournac, rapporteur. S'agissant des amendements identiques nos 450 et 664, je répéterai ce que j'ai dit tout à l'heure lors de l'examen de l'amendement n° 169 rectifié : si le licenciement d'une femme enceinte est lié à la grossesse, il est contraire à l'article L. 122-45 du code du travail, qui s'applique aussi au CPE.
Avec l'aménagement de la charge de la preuve, l'employeur devra, en cas de contentieux, non seulement expliquer sa décision, mais également la justifier.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques, bien que l'objet de l'amendement n° 664 soit plus clair.
Quant à l'amendement n° 662, il vise à créer une sorte de présomption de rupture abusive lorsque le licenciement intervient pendant un arrêt pour maladie. Le droit étant déjà assez compliqué comme cela, il est préférable de s'en tenir au droit actuellement applicable en la matière. Respectons ce qui existe déjà !
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Comme j'ai déjà longuement parlé de l'article L. 122-25 du code du travail relatif à l'état de grossesse, j'aborderai la question de la maladie.
Je le répète, l'article L. 122-45 du code du travail s'applique au contrat première embauche et permet aux salariés de présenter devant l'ensemble des tribunaux les éléments de fait qui laissent supposer que le licenciement repose sur la maladie. Il existe déjà une large jurisprudence en la matière, qui est d'ailleurs très clairement énoncée dans le code du travail.
Il appartiendra donc à l'employeur de démontrer que sa décision de licenciement repose sur des éléments objectifs autres que ceux qui sont expressément prévus par les articles L. 122-25 et L. 122-45 du code du travail. Ce dernier devra apporter la preuve du bien-fondé de sa décision.
En l'espèce, les droits des salariés sous CPE sont identiques à ceux des autres salariés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Non, parce qu'il n'y a pas de motif !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Leurs droits sont donc totalement respectés.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements identiques nos 450 et 664 ainsi que sur l'amendement n° 662.
M. le président. Le vote sur ces trois amendements est réservé.
L'amendement n° 663, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le dixième alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :
En cas de rupture du contrat, à l'initiative de l'employeur, au cours des deux premières années, il ne peut conclure un nouveau « contrat première embauche » pendant une durée d'un an après la rupture dudit contrat, pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement prévoit qu'un employeur qui déciderait de rompre un contrat première embauche ne peut en conclure un autre pendant une durée d'un an après la rupture dudit contrat pour faire occuper le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise. Ce faisant, nous voulons assurer une véritable protection aux salariés qui pourraient signer un CPE.
En effet, le CPE est un contrat tellement précaire qu'il nous semble nécessaire de l'assortir du plus grand nombre de garanties possible pour les salariés.
Nous proposons d'apporter des restrictions à la signature d'un nouveau CPE. Ainsi, nous pensons que le fait d'interdire la signature d'un nouveau CPE dans le délai d'un an après la rupture d'un premier, et ce pour occuper le même poste ou les mêmes fonctions, permettra de décourager l'employeur de rompre celui-ci. À nos yeux, c'est un moyen de sécuriser, pour autant que cela soit possible avec un tel contrat précaire, le parcours professionnel des jeunes de moins de vingt-six ans qui sont amenés à signer un contrat première embauche.
Par ailleurs, assortir le CPE de telles garanties permettra également d'éviter toutes les dérives et tous les excès possibles de la part d'un employeur qui, peu scrupuleux, voudrait disposer d'une main-d'oeuvre facilement renouvelable, en abusant de la période d'essai de deux ans applicable à un CPE.
Notre amendement de repli - vous aurez évidemment compris, mes chers collègues, que nous rejetons fermement le CPE - vise donc à offrir des garanties aux salariés qui signeraient un tel contrat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. -Mme Gisèle Printz applaudit également.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Je le répète, dans le cadre du CPE, le licenciement n'est rendu plus souple pendant la période de consolidation que pour inciter l'employeur à embaucher, même lorsque ses perspectives de développement ont encore une visibilité réduite. Interdire à un employeur de réembaucher sur un même poste, pendant un an, après un licenciement auquel il a été contraint pour cause de retournement des perspectives de marché serait contraire à notre objectif visant à offrir à ce dernier une nouvelle dynamique. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il faut lui laisser la possibilité de faire face à un nouveau développement.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le délai de carence de trois mois vise à prévenir tout phénomène d'intermittence. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
Mais tout montage juridique visant simplement à faire se succéder des CPE à la seule fin de contourner la réglementation serait, je le dis, constitutif d'un abus de droit.
M. Jean-Luc Mélenchon. Que ferez-vous alors ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. D'ailleurs, la décision de Longjumeau le prouve. Le conseil des prud'hommes a considéré constitutif d'un abus de droit le fait pour deux entreprises d'avoir successivement employé une personne d'abord en période d'essai sur un CDI, puis en CNE dans le même secteur d'activité, sur le même poste.
Voilà pourquoi Jean-Louis Borloo et moi-même avons dit, ...
M. Bernard Frimat. Il n'est pas là !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. .... que cette décision confirmait ce que nous n'avons cessé d'affirmer au cours du débat relatif au projet de loi visant à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance.
Vos craintes ne sont donc pas fondées, madame la sénatrice. Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jean-Luc Mélenchon. Mes chers collègues de la majorité, ces propos vous rassurent-ils ?
M. le président. Le vote est réservé.