Mme Christiane Demontes. Même si l'on veut bien admettre la bonne foi de certains membres de la majorité, elle ne résiste pas devant une telle déclaration. C'est pour ce type d'employeurs que le CPE constitue un formidable cadeau. Pour eux, le CPE est non pas un « débloqueur » d'emplois, mais un « débloqueur » de licenciements.
Je vous rappelle qu'en droit commun le salarié licencié sait ce que l'employeur lui reproche. Il peut donc, en connaissance de cause, décider de saisir le juge, ce qui se fait d'ailleurs assez rarement, contrairement à une idée largement répandue chez les employeurs.
Devant le juge, la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Avec le CPE, la lettre de licenciement sera non motivée. La charge de la preuve incombera donc au salarié, qui devra démontrer que son licenciement n'est fondé ni sur l'insuffisance professionnelle ni sur un motif économique. Perversion du système, l'ignorance du motif du licenciement va contraindre le salarié, pour connaître ce motif, à assigner presque systématiquement en justice son employeur. Osera-t-il le faire ?
D'une manière plus générale, la nouvelle réglementation va contraindre les salariés et, à leur suite, les juridictions du travail à revenir à une jurisprudence de 1872, maintenue en vigueur jusqu'à la loi du 13 juillet 1973, selon laquelle le salarié licencié n'a pas droit à réparation, même lorsque la rupture du contrat a lieu sans juste motif, mais peut y prétendre si l'employeur commet une faute, un abus dans l'exercice de son droit de résiliation unilatéral.
Alors, effectivement, le CPE, présenté aux employeurs comme une invitation à embaucher, dans la mesure où il est surtout une facilité à licencier, recèle en réalité - et j'ai essayé de le démontrer - de lourdes incertitudes juridiques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. J'espère que la bonne foi règne sur toutes les travées, et non pas d'un seul côté de cette assemblée, car ce serait grave pour la démocratie.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il vaut mieux entendre cela que d'être sourd !
M. Alain Gournac, rapporteur. Oui et j'y insiste : il ne faut jamais s'approprier ce genre de mérite...
Cet amendement tend à revenir sur l'un des éléments de souplesse indispensables au bon fonctionnement du CPE. La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame Demontes, je voudrais faire état d'un extrait d'une analyse juridique parue dans la presse économique, concernant les employeurs ; c'est en effet cet aspect de la question que vous avez plus particulièrement développé dans votre intervention : « la réforme n'autorise pas les licenciements discrétionnaires, ni ne constitue une voie ouverte au contournement du droit du travail. Des montages divers de renouvellement des contrats aux seules fins d'échapper aux exigences du code du travail seront sanctionnés au titre de l'abus de droit [...]. De même les dispositions dérogeant à l'exigence de motivation du licenciement et d'une cause réelle et sérieuse ne sont pas une invitation à l'arbitraire, puisque les garanties essentielles de notre ordre public social s'imposent et feront l'objet d'une vigilance particulière de la part des pouvoirs publics » - et je peux vous garantir que cela se vérifiera !
« Il appartiendra enfin au juge d'élaborer un contrôle distinct de celui qu'il exerce dans le cadre de l'application de la cause réelle et sérieuse, le Conseil d'État ayant confirmé à propos de l'ordonnance sur le CNE sa conformité aux engagements internationaux de la France. Dans un État de droit, on ne peut d'un même mouvement contester l'absence de sécurité juridique et dénier toute portée à un arrêt rendu par la plus haute juridiction administrative [...]. »
Tel est le point que je souhaitais faire sur cette analyse juridique.
Mme la présidente. Le vote est réservé.
L'amendement n° 503, présenté par M. Biwer et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa (1°) du II de cet article, après le mot:
notifiée
insérer les mots :
et justifiée
La parole est à Mme Gisèle Gautier.
Mme Gisèle Gautier. Il s'agit d'un amendement majeur pour le groupe UC-UDF.
Il pose, en effet, le principe en vertu duquel toute rupture d'un CPE pendant la période de consolidation devra non seulement être « notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception », mais aussi justifiée.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
Mme Gisèle Gautier. La rédaction actuelle du dispositif du CPE n'est pas admissible en l'état. Nous ne pouvons accepter que, pendant deux ans à compter de la signature du contrat, le jeune puisse être renvoyé sans savoir pourquoi.
Mme Christiane Demontes. Très bien !
Mme Gisèle Gautier. L'absence de justification de la rupture est choquante à trois titres, comme je l'avais déjà dénoncé dans le cadre de la discussion générale.
Premièrement, elle est contraire aux principes fondamentaux sur lesquels repose notre modèle démocratique et social, et elle est illégale. Le droit de pouvoir se défendre est un principe constitutionnel que l'on dénie aux signataires du CPE.
Je ne serais d'ailleurs pas étonnée que ce point fasse l'objet d'une censure du Conseil constitutionnel.
Mme Hélène Luc. Il devrait !
M. Jean-Pierre Sueur. Ce serait justifié !
Mme Gisèle Gautier. Ensuite, la possibilité de rompre le CPE sans justifier la rupture est contraire aux engagements internationaux de la France, en particulier à la convention 158 de l'OIT que vous avez très partiellement évoquée, monsieur le ministre, que nous avons ratifiée et qui oblige à établir les motifs d'un licenciement.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
Mme Gisèle Gautier. D'ailleurs, soyons-en convaincus, même si le Conseil constitutionnel n'intervenait pas, cette disposition de la loi ne résisterait pas à l'épreuve de la jurisprudence judiciaire.
Deuxièmement, et c'est essentiel, nous ne voyons pas quels enseignements pourront tirer les jeunes dont le contrat est rompu si aucune justification ne leur est donnée. Leurs questions légitimes - ai-je mal agi, puis-je m'améliorer ? - demeureront sans réponse. Cela me paraît inconcevable.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
Mme Gisèle Gautier. Troisièmement, le fait de renvoyer quelqu'un sans qu'il sache pourquoi ne correspond pas à l'idée que nous nous faisons de la justice sociale.
Pour ces trois raisons fondamentales, nous estimons que toute rupture d'un CPE doit être justifiée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Ma chère collègue, je vous ai écoutée avec beaucoup d'attention,...
M. David Assouline. Nous, nous n'y avons pas droit ! (Sourires.)
M. Alain Gournac, rapporteur. ...et je comprends que l'on puisse avoir un avis différent de celui que nous défendons quant à la souplesse de cette proposition visant à donner plus de chances aux jeunes d'accéder à un premier emploi, de connaître l'entreprise.
Si la lettre recommandée avec accusé de réception comportait une justification, cette justification écrite de la rupture ne serait rien d'autre qu'une motivation.
Nous voulons donner les meilleures chances à ce contrat première embauche, et c'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Jean-Pierre Sueur. En quoi le fait d'indiquer la cause du licenciement porte-t-il préjudice ? Vous ne répondez pas !
Un sénateur du groupe CRC. Pour que les entreprises soient libres de faire ce qu'elles veulent !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame le sénateur, nous abordons l'un des sujets faisant le plus débat. Nous sommes en effet entre l'aspect motivation, au sens juridique, avec la crainte d'une judiciarisation excessive...
Mme Christiane Demontès. Eh voilà !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...des rapports de travail dans notre pays, et la justification - ou en tout cas l'explication - à laquelle vous prêtez une vertu pédagogique.
M. André Lejeune. Et les 15,7 milliards d'euros qu'Arcelor distribuera à ses actionnaires, qu'en dites-vous ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je comprends votre position, madame le sénateur, mais l'équilibre entre la démarche de la motivation, de la justification, l'aspect judiciaire l'emportant, et celle de la souplesse, avec la dimension de la sécurisation, nous conduit à émettre un avis défavorable sur votre amendement.
M. Jean-Pierre Sueur. C'est très beau, mais on ne comprend rien !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Si l'employeur a toujours la latitude d'expliquer, il n'a pas l'obligation de motiver.
L'accompagnement personnalisé mis en place par le service public de l'emploi...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas sérieux !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...tend précisément à éviter les ruptures ou, en cas de cessation du contrat, à comprendre pourquoi, dans le rapport entre le salarié et l'entreprise, on en est arrivé là.
M. Guy Fischer. C'est Manpower !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. S'agissant de la censure du Conseil constitutionnel, madame le sénateur, j'ai déjà évoqué à deux reprises l'analyse qu'il avait faite, après le Conseil d'État, de la période de qualification. Quant à la jurisprudence, nous verrons comment elle se construira.
M. André Lejeune. Lisez Le Monde !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. En termes de justice sociale, la pire des injustices, c'est qu'autant de jeunes, en particulier issus des quartiers en difficulté et de certains secteurs ruraux, soient au chômage. Le taux de chômage des jeunes de moins de vingt-six ans, je le rappelle, y est de plus de 36 % pour les hommes et de 41 % pour les femmes. Voilà la pire des injustices sociales, voilà la vraie précarité !
M. Roland Muzeau. Larmes de crocodile !
Un sénateur du groupe socialiste. Cela ne va pas s'améliorer !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Telles sont les raisons pour lesquelles je ne peux pas donner un avis favorable à l'amendement n° 503. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Le vote est réservé.
L'amendement n° 654, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Le cinquième alinéa du II de cet article est complété par les mots :
l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs de la rupture du contrat ;
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. En droit commun du travail, « l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs de licenciement dans la lettre de licenciement mentionnée à l'article L. 122-14-1 ». Tels sont les termes du code du travail.
Mais l'article 3 bis du projet de loi dont nous débattons exclut cette obligation pendant les deux premières années à compter de la conclusion d'un CPE. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour comprendre que le contrat à durée indéterminée ne sera pratiquement jamais au rendez-vous, au bout des deux ans.
Lot de consolation, le jeune salarié concerné pourra s'inscrire au chômage puisqu'il faut avoir cotisé 180 jours aux ASSEDIC pour y prétendre. Et, bien sûr, comme il n'est pas question de laisser le chômeur « profiter du système », il sera soumis aux contrôles et aux sanctions, qui sont de plus en plus nombreux, s'il n'a pas le « bonheur », ou le « courage », de retrouver assez vite un nouveau CPE, un CNE ou n'importe quel autre emploi précaire.
Je n'ose même plus dire « un emploi intérimaire » puisque, avec le CNE, les emplois en intérim sont actuellement en forte diminution. Mais on sait que les vases communicants existent toujours quand la précarité est à l'ordre du jour...
Le responsable d'une organisation de jeunesse disait, voilà quelques jours : « un jeune précaire est un jeune qui ne peut pas protester. Si la jeunesse se mobilise aujourd'hui, ce n'est pas pour défendre ses propres conditions d'existence, c'est aussi parce qu'elle refuse la société qu'on veut lui imposer. » Car, ce que demandent les jeunes, c'est une véritable formation, un emploi stable, la possibilité de se projeter dans l'avenir. Une analyse réalisée sous l'égide de la Jeunesse ouvrière chrétienne vient d'ailleurs de rappeler ces éléments. Or le CPE fait obstacle à toutes ces conditions. Les jeunes refusent de devenir des salariés jetables, au gré du bon vouloir des employeurs. Car pourquoi ces derniers se priveraient-ils de mettre en pratique des droits qu'ils demandent depuis longtemps ?
Mais les jeunes ne se trompent pas sur vos objectifs. Ils sont de plus en plus nombreux à prendre conscience non seulement du caractère nocif du CPE, mais aussi du fait que ce dernier n'est pas une fatalité, qu'il participe du choix d'une société dont ils ne veulent pas. L'absence de motif du licenciement rendra aussi plus difficile le fondement des recours devant les tribunaux,...
M. Jean-Pierre Sueur. Évidemment !
Mme Marie-France Beaufils. ...d'autant plus que vous avez réduit ce recours à un an.
J'ai entendu un jeune dire : « un employeur pourra licencier du jour au lendemain, et c'est encore le jeune qui devra se justifier ». Il devra se justifier devant les ASSEDIC et devant les tribunaux, au cas où il déciderait de combattre la décision de son employeur.
Le conseil des prud'hommes de Longjumeau vient de condamner deux entreprises pour « usage et rupture abusive d'un CNE ». On ne peut que s'en féliciter. Cette décision n'est certainement que la première d'une série qui s'annonce longue et qui s'allongera encore si le CPE est adopté. C'est pourquoi nous souhaitons que l'obligation d'une véritable motivation du licenciement soit réintroduite.
Enfin, permettez-moi d'ajouter que, dans la mesure où trois amendements portant sur le même contenu avaient été déposés, une discussion commune aurait été profondément justifiée...
M. Claude Domeizel. Eh oui !
Mme Marie-France Beaufils. ...et plus conforme à la conception que nous avons des débats dans cette assemblée.
Monsieur le ministre, vous aviez plus le sens du débat lorsque vous étiez président de la commission des affaires économique du Sénat qu'aujourd'hui, et je le regrette ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Le jugement de Longjumeau a été maintes fois mentionné. Mais nous nous félicitons de la décision prise par le tribunal ! Si les choses ne se sont pas passées de façon correcte, elles doivent être condamnées.
Sur le fond, cet amendement se fixe les mêmes objectifs que ceux qui ont été défendus précédemment ; la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame le sénateur, je suis sensible au fait que vous ayez gardé un excellent souvenir de moi ; mais nous sommes dans les réalités, et pas dans la nostalgie. Nous devons aborder un véritable sujet, celui du chômage des jeunes et de leur parcours vers l'emploi.
C'est le sens de notre démarche. Je respecte les approches différentes, parce que c'est ainsi que je conçois les rapports humains ; il n'en demeure pas moins que votre proposition va exactement à l'inverse de l'équilibre que nous souhaitons entre souplesse et sécurisation. Je ne peux donc y être que défavorable, dans la droite ligne des débats que nous avons eus jusqu'à présent.
Mme la présidente. Le vote est réservé.
L'amendement n° 160, présenté par Mme Le Texier, M. Godefroy, Mmes Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Lagauche, Mélenchon, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le cinquième alinéa (1°) du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° À réception de la lettre recommandée, le salarié peut solliciter un entretien préalable au licenciement que l'employeur est tenu de lui accorder. Lors de cet entretien l'employeur est tenu d'indiquer les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. Celui-ci peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister par un conseiller de son choix, inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département après consultation des organisations représentatives visées à l'article L. 136-1 du code du travail dans des conditions fixées par décret. Mention doit être faite dans la lettre recommandée de cette faculté, ainsi que de l'adresse des services où le salarié put se procurer la liste des conseillers.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le ministre, je souhaite vous faire une remarque avant d'aborder concrètement l'objet de l'amendement n° 160.
Je vous écoute depuis tout à l'heure nous offrir parfois des garanties pour rassurer nos préventions, que vous trouvez quelque peu paranoïaques, sur les effets du CPE. Je rappellerai certains de vos propos, afin que chacun puisse mesurer ce que valent vos engagements !
Vous aviez avec M. Borloo, dans l'exposé des motifs de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, déclaré que ce texte était « l'occasion tout à la fois d'affirmer et de montrer l'application concrète du principe, déjà institué au sein de l'Union européenne, selon lequel toute réforme substantielle modifiant l'équilibre des relations sociales doit être précédée d'une concertation effective avec les partenaires sociaux et, le cas échéant, d'une négociation entre ceux-ci ».
Au cas où nous aurions mal compris, vous ajoutiez que le Gouvernement prenait l'engagement « de renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle toute réforme de nature législative relative au droit du travail ».
Or nous sommes dans le cadre d'une réforme législative en matière de droit du travail, et aucune concertation avec les partenaires sociaux n'a eu lieu. Vous n'avez donc pas respecté cet engagement !
J'en viens à l'amendement n° 160 : il vise à rétablir une procédure de licenciement pour le salarié employé en CPE, dans la perspective, bien entendu, où les amendements de suppression de l'article seraient rejetés.
Je mets particulièrement l'accent, monsieur le ministre, sur l'importance de l'intervention du conseiller du salarié.
Comme vous le savez, la fonction de conseiller du salarié est issue d'une proposition de loi qu'avaient fait voter les socialistes en vue de pallier l'isolement du salarié licencié dans une entreprise dépourvue de représentants du personnel.
Cette situation est en effet la plus fréquente, y compris dans les entreprises de plus de cinquante salariés qui devraient pourtant avoir un comité d'entreprise.
Dans le cas présent, nous n'avons sans doute pas à craindre que les jeunes ne soient pas inclus dans les seuils d'effectifs puisque le Conseil d'État, saisi sur l'une de vos ordonnances de l'été dernier, vous a refusé de pratiquer cette discrimination à l'encontre de la jeunesse.
Néanmoins, les difficultés de la représentation des salariés n'étant plus à démontrer, il faut prévoir que le salarié licencié d'un jour à l'autre ne soit pas laissé seul avec son préavis de quinze jours, si son contrat a moins de six mois, ce qui sera fréquent dans le cas de substitution d'un CPE à un CDD.
Comment, en effet, retrouver un emploi en quinze jours ? Nous aurions dû, si M. le rapporteur nous en avait laissé le temps, auditionner des agents de l'ANPE sur ce point. Nous aurions sûrement beaucoup appris.
Le risque que chacun peut mesurer est que cette nouvelle précarité ne vienne gonfler le nombre d'inscrits à l'ANPE et le déficit des ASSEDIC.
Je rappellerai, en effet, ce que chacun sait désormais : la première cause de déficit des ASSEDIC, c'est non pas - comme jadis M. Seillière avait tenté de le faire croire faussement - les intermittents du spectacle, jetés en pâture à l'opinion, mais la précarité !
Annoncer que l'on va réduire le déficit de l'UNEDIC en contrôlant et en sanctionnant les chômeurs, en les obligeant à accepter n'importe quel emploi précaire dans n'importe quelles conditions et, par ailleurs, augmenter, généraliser la précarité, ce n'est plus seulement conduire une politique de gribouille. C'est beaucoup plus grave, monsieur le ministre, et l'on peut se demander quelles en seront les conséquences politiques pour les jeunes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Il s'agit toujours de priver le CPE d'un élément important de son régime spécifique.
Nous savons que ce régime est spécifique, car cela a été dit depuis le début, dans toutes les déclarations ! La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous avons déjà longuement répondu à ces questions. Je reprendrai donc simplement les derniers propos de M. Assouline.
Réellement, si l'accompagnement mensuel du demandeur d'emploi, si le fait de lui proposer une formation et une validation des acquis de l'expérience, si le fait de chercher à mettre en place - et nous sommes en passe d'y parvenir de manière très concrète - un dossier unique du demandeur d'emploi et un guichet unique constituent une manière de « fliquer » les demandeurs d'emploi, je n'y comprends plus rien !
Pardonnez-moi de vous le dire, la réalité, c'est que les demandeurs d'emploi n'étaient vus, au mieux, que tous les six mois !
M. Alain Gournac, rapporteur. Pas toujours !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La plupart du temps, ils n'étaient vus qu'une fois par an, pour ne pas dire tous les dix-huit mois, notamment par l'UNEDIC ! Nous voulons rompre avec cette réalité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Accompagner le demandeur d'emploi chaque mois, lui proposer une formation et un accompagnement, ce n'est pas exercer un « flicage », comme vous le dites, des demandeurs d'emploi ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. David Assouline. Je n'ai pas employé ce terme !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ce que nous proposons repose sans doute sur une philosophie différente, car nous ne voulons pas d'une société où l'on reste exclu longtemps, d'une société qui protège simplement un certain nombre d'emplois, et non pas les hommes et les femmes.
Notre démarche s'adresse aux hommes et aux femmes les plus exclus, les plus éloignés de l'emploi. C'est notre différence ! Telle est notre priorité, car la précarité, c'est de laisser ces personnes de côté.
Nous voulons, pour eux, un vrai retour vers l'emploi. C'est le sens de la loi de programmation pour la cohésion sociale et c'est le sens de l'ensemble de ce projet de loi pour l'égalité des chances. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
Mme la présidente. J'ai reçu de MM. Ivan Renar, Jacques Valade, David Assouline, Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Yannick Bodin, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Alain Dufaut, Ambroise Dupont, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Alain Journet, Pierre Laffitte, Serge Lagauche, Jacques Legendre, Mme Lucienne Malovry, M. Pierre Martin, Mmes Colette Melot, Catherine Morin-Desailly, MM. Bernard Murat, Philippe Nachbar, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Philippe Richert, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, André Vallet et Jean-François Voguet une proposition de loi modifiant le code général des collectivités territoriales et la loi n° 2002-6 du 4 janvier 2002 relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 224, distribuée et renvoyée à la commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de Mme Annie David, MM. Ivan Renar, Jack Ralite, Jean François Voguet, Mmes Eliane Assassi, Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Robert Bret, Yves Coquelle, Mmes Michelle Demessine, Evelyne Didier, MM. Guy Fischer, Thierry Foucaud, Mme Gélita Hoarau, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mmes Hélène Luc, Josiane Mathon Poinat, MM. Roland Muzeau, Bernard Vera, François Autain et Pierre Biarnès une proposition de loi tendant à la création d'un statut professionnel des psychologues scolaires.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 225, distribuée et renvoyée à la commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. André Lardeux, Alain Vasselle, Mme Isabelle Debré, MM. Louis de Broissia et Charles Revet une proposition de loi renforçant l'encadrement des contrats de crédit afin de prévenir le surendettement.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 226, distribuée et renvoyée à la commission des affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
6
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'accords sous forme d'échange de lettres, d'une part entre la Communauté européenne et la République populaire de Chine, et d'autre part entre la Communauté européenne et les États-Unis d'Amérique ; Proposition de règlement du Conseil concernant la mise en oeuvre de l'accord conclu par la CE à l'issue des négociations menées dans le cadre du paragraphe 6 de l'article XXIV du GATT de 1994, modifiant et complétant l'annexe I du règlement (CEE) n° 2658/87 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3090 et distribué.
7
ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mardi 28 février 2006, à dix heures, à seize heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 203, 2005 2006) pour l'égalité des chances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale aux termes de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après déclaration d'urgence ;
Rapport (n° 210, 2005-2006) présenté par M. Alain Gournac, au nom de la commission des affaires sociales ;
Avis (n° 211, 2005-2006) présenté par M. Philippe Richert, au nom de la commission des affaires culturelles ;
Avis (n° 212, 2005-2006) présenté par M. Pierre André, au nom de la commission des affaires économiques ;
Avis (n° 213, 2005-2006) présenté par M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation ;
Avis (n° 214, 2005-2006) présenté par M. Jean-René Lecerf, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi modifié par une lettre rectificative relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (n° 326 rectifié, 2001-2002) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 6 mars 2006, à onze heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 6 mars 2006, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 28 février 2006, à une heure cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD